M. le président. Je vais vous donner lecture des conclusions de la conférence des présidents, qui s’est réunie aujourd’hui, mercredi 21 juin 2016 :
Je vais maintenant consulter le Sénat sur les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui résultant des inscriptions prioritaires du Gouvernement.
Y a-t-il des observations ?…
Ces propositions sont adoptées.
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Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons l’examen du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 26.
Articles additionnels après l’article 26 (suite)
M. le président. L'amendement n° 377 rectifié, présenté par Mmes Jouanno et Morin-Desailly, M. Capo-Canellas, Mme Gatel et M. Cigolotti, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La région, après avis de la Conférence territoriale de l’action publique et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, peut recevoir pour une durée d’expérimentation de trois ans à compter du 1er juillet 2016, la partie des données mentionnées à l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale concernant le besoin de déplacements domicile-travail des salariés et assimilés qui habitent ou travaillent sur le territoire régional, selon des modalités définies par décret.
Dans le cadre de la mise en œuvre de programmes d’information mentionnés à l’article L. 221-7 du code de l’énergie dans sa version issue de l’article 30 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte et sous réserve d’autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, ces données peuvent être traitées pour élaborer et déployer des campagnes ciblées d’information du public sur les solutions les plus économiques pour se rendre au travail, notamment les services de transport public ou le covoiturage réguliers.
Les critères d’évaluation de l’expérimentation seront définis par décret.
La parole est à Mme Françoise Gatel.
Mme Françoise Gatel. Dans le respect des libertés individuelles et de la vie privée, cet amendement vise à permettre aux collectivités territoriales de relier les bassins de vie et les bassins d’emploi plus économiquement et, surtout, plus écologiquement que par l’usage individuel de la voiture.
Par la délivrance ciblée d’une information anonymisée, l’amendement tend à augmenter la liberté, pour les actifs, de choisir de nouvelles façons de se rendre au travail, pour diminuer, notamment dans les milieux ruraux, l’utilisation de la voiture en solo.
En stimulant le développement du covoiturage domicile-travail, l’amendement a également pour objet de créer des conditions propices à l’émergence de nouvelles formes de télétravail.
Enfin, en articulation avec les dispositions de la loi Macron sur l’ouverture des données des services de mobilité, l’adoption de cet amendement facilitera ultérieurement l’accès des chômeurs, mais aussi des jeunes à l’emploi et à l’apprentissage en entreprise, en présentant des solutions de transport étoffées et économiquement abordables pour se rendre au travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement, qui concerne plus spécifiquement l’organisation des transports à l’échelle régionale, n’a peut-être pas véritablement sa place dans une loi sur le droit du travail.
En plus, je ne suis pas totalement convaincu que son dispositif constitue une bonne approche pour une étude opérationnelle sur les transports au niveau des bassins de vie.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Je souscris à l’objectif de cet amendement, qui est de faire en sorte que les pouvoirs publics accompagnent les entreprises pour trouver des solutions à la fois plus économiques pour les salariés et, bien sûr, plus écologiques.
Pour autant, je suis en désaccord avec son dispositif, parce que l’expérimentation que proposent ses auteurs s’appuie sur l’accès des régions aux données personnelles figurant sur le bulletin de paie des salariés. Cela va beaucoup trop loin !
Des entreprises ont pris des initiatives. Je pense notamment à ce qu’ont fait certaines entreprises de la Seine-Saint-Denis, dont certains salariés étaient en horaires décalés, sur la base d’enquêtes ciblées.
À cet égard, je pense que l’appui des régions pourrait consister à mettre en place des enquêtes ciblées avec de grandes entreprises, mais aussi avec des sous-traitants pour essayer d’élaborer ce type de processus.
La méthode retenue par les auteurs de cet amendement n’est, à mes yeux, pas satisfaisante. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel.
Mme Françoise Gatel. Il convient effectivement de considérer cet amendement comme un amendement d’appel très appuyé pour faciliter l’accès à l’emploi, notamment dans des régions périurbaines ou rurales où le transport collectif n’existe pas. Toutefois, compte tenu de l’avis de M. le rapporteur et de Mme la ministre, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 377 rectifié est retiré.
Article 27
I. – L’article L. 2142-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 2142-6. – Un accord d’entreprise peut définir les conditions et les modalités de diffusion des informations syndicales au moyen des outils numériques disponibles dans l’entreprise.
« À défaut d’accord, les organisations syndicales présentes dans l’entreprise et satisfaisant aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans peuvent mettre à disposition des publications et tracts sur un site syndical accessible à partir de l’intranet de l’entreprise, lorsqu’il existe.
« L’utilisation par les organisations syndicales des outils numériques mis à leur disposition doit satisfaire l’ensemble des conditions suivantes :
« 1° Être compatible avec les exigences de bon fonctionnement et de sécurité du réseau informatique de l’entreprise ;
« 2° Ne pas avoir des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise ;
« 3° Préserver la liberté de choix des salariés d’accepter ou de refuser un message. »
II. – Le livre III de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :
1° L’article L. 2314-21 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « enveloppe », la fin du premier alinéa est supprimée ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Elle peut également avoir lieu par vote électronique, selon les modalités fixées par un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, si un accord d’entreprise ou, à défaut, l’employeur le décide. » ;
2° L’article L. 2324-19 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « enveloppe », la fin du premier alinéa est supprimée ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Elle peut également avoir lieu par vote électronique, selon les modalités fixées par un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, si un accord d’entreprise ou, à défaut, l’employeur le décide. »
III. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2017.
M. le président. L'amendement n° 711, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
Un accord d’entreprise peut définir
par les mots :
Une négociation doit être engagée sur simple demande d'une organisation syndicale, en vue de conclure un accord d’entreprise définissant
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. La question de la diffusion des informations syndicales par voie électronique est primordiale.
À l’heure où les horaires sont éclatés, de même que les lieux de production, le traditionnel tractage à l’entrée de l’entreprise, aux heures de prises de poste et de sortie, semble moins pertinent.
Surtout, le numérique s’est imposé comme un moyen privilégié de communication et d’information. Il est donc primordial qu’il soit accessible aux organisations syndicales dans la poursuite de leur mission d’intérêt général.
Les organisations syndicales doivent donc se voir offrir des facilités en ce sens, à leur demande. C’est pourquoi nous proposons qu’elles puissent être à l’initiative de la négociation engagée à ce sujet.
Cela serait bénéfique pour l’entreprise. En effet, dans les entreprises qui ont restreint le droit à l’information syndicale via les réseaux intranet ou les courriels internes, les informations ont pu être déposées sur les réseaux sociaux des organisations syndicales ou sur leur site web, ce qui est loin de plaire aux employeurs.
Il est donc dans l’intérêt de tous les acteurs de l’entreprise de parvenir à un accord sur ce sujet et tous doivent pouvoir être à l’initiative de cette négociation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. Cet amendement tend à créer une contrainte supplémentaire pour les entreprises. Le dispositif prévu va suffisamment loin.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je partage la préoccupation des auteurs de l’amendement. D'ailleurs, le texte du Gouvernement prévoyait d’améliorer les droits numériques des syndicats.
Je pense en effet qu’il faut tenir compte des évolutions du monde du travail et de la place qu’occupe désormais le numérique.
M. Roland Courteau. Eh oui !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Il faut que nous puissions avoir accès à ces espaces.
Je considère que la négociation doit s’emparer de ce sujet. Toutefois, poser l’obligation, pour l’employeur, d’ouvrir une négociation chaque fois qu’un syndicat – un seul – le demande ne me paraît tout simplement pas praticable. Ce serait une source de blocage, puisque cette règle n’existe pour aucune négociation, même pour les salaires.
Pour lancer une négociation, il faut qu’il y ait une appétence, une envie d’échanger, d’avancer.
L’avis du Gouvernement est par conséquent défavorable.
M. le président. L'amendement n° 354, présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet, M. Roux et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment l’intranet et la messagerie électronique de l’entreprise.
La parole est à Mme Stéphanie Riocreux.
Mme Stéphanie Riocreux. Cet amendement de précision vise à mentionner, de manière non exhaustive puisque l’adverbe « notamment » est employé, les outils numériques disponibles pouvant être utilisés pour la diffusion d’informations syndicales.
Il s'agit d’un rétablissement, à droit constant, de l’article L. 2142–6 du code du travail, puisque cet article mentionne actuellement ces deux outils.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. Cette précision ne me paraît pas utile, puisque l’article cite déjà les outils numériques disponibles dans l’entreprise. La redite n’est pas indispensable.
L’avis de la commission est donc défavorable. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Les syndicats doivent profiter davantage des outils numériques disponibles dans les entreprises, pourvu que ce soit dans des conditions qui assurent le bon fonctionnement du travail.
Aussi, le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 712 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 3
1° Supprimer les mots :
depuis au moins deux ans
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La page d’accueil de l’intranet et son arborescence font clairement apparaître le lien vers les sites des organisations syndicales.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Notre amendement vise à améliorer la visibilité des organisations syndicales et des informations qu’elles communiquent.
Dans le nouvel article L. 2142–6, qui réécrit grandement le droit existant pour l’adapter aux réalités, les syndicats pourront, même à défaut d’accord, demander un espace sur le site interne de l’entreprise, si celui-ci existe. C’est une avancée, mais nous pensons qu’il est possible de l’améliorer encore.
En rendant obligatoire la création de liens hypertextes vers les sites des organisations syndicales sur les réseaux informatiques internes des entreprises, cet amendement vise à élargir l’effet d’une disposition favorable à la visibilité des syndicats.
Le texte initial peut ainsi être utilement complété par l’obligation d’établir un lien permettant au salarié de consulter la documentation syndicale présente sur les sites internet des organisations.
L’adoption de cet amendement permettrait d’élargir la diffusion des informations syndicales en totale cohérence avec le droit existant. Son dispositif ne requiert que de très légères modifications techniques et s’intègre tout à fait dans les modalités d’exercice de l’information syndicale.
L’article 27 vise en effet à intégrer pleinement l’utilisation des nouvelles technologies pour faciliter les diffusions internes à l’entreprise. Mais, de notre point de vue, l’établissement de liens hypertextes vers les sites internet nationaux des syndicats entre également tout à fait dans cette logique, en facilitant, comme nous l’avons dit, la consultation de documents syndicaux, d’analyses, de conseils et en permettant la prise de contact, par les salariés, avec leur syndicat.
Vous l’avez compris, mes chers collègues, le sens de notre amendement est d’élargir l’information syndicale, conformément à l’esprit du texte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. La loi n’a pas à régir le contenu de l’intranet des entreprises.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Avis défavorable également, parce que la mise en page de l’intranet de l’entreprise ne relève pas du domaine de la loi.
M. le président. L'amendement n° 713, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque organisation syndicale est autorisée à alerter les salariés de ses nouvelles communications mises en ligne par mail adressant un lien ou par tout autre moyen similaire.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Par cet amendement, nous souhaitons garantir la publicité de la mise en ligne de nouvelles publications et communications des différentes organisations syndicales sur un site accessible à partir de l’intranet.
Il s'agit d’autoriser un syndicat à alerter, par un mail contenant un lien ou par tout autre moyen similaire, les salariés de l’entreprise de sa récente communication.
Nous pensons que cette mesure pourrait notamment être utile pour les employés qui, ne travaillant pas sur l’outil informatique, consultent moins l’intranet que les travailleurs utilisant l’ordinateur et ont donc moins de chances d’être informés de la communication syndicale.
Les précisions que cet amendement vise à apporter ont vocation à améliorer et à conforter la diffusion des informations syndicales auprès de tous les salariés, condition indispensable, selon nous, au bon déploiement du dialogue social.
N’oublions pas qu’il s’agit bien ici de définir les conditions et modalités de diffusion des informations syndicales au moyen des outils numériques disponibles dans l’entreprise où il n’y a pas d’accord.
Afin d’apporter les meilleures conditions de l’exercice syndical et de ne pas favoriser le flou juridique qui subsiste aujourd’hui dans ce domaine, les précisions que nous proposons, à travers cet amendement et les suivants, nous paraissent indispensables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. Pour les mêmes raisons que celles qui ont été invoquées pour l’amendement précédent, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, même s’il me semble que nous souscrivons tous à l’objectif de l’amélioration des droits numériques des syndicats de l’entreprise. C’est d'ailleurs pourquoi nous avons souhaité que l’article 27 consacre le droit de diffuser de l’information sur les sites intranet.
Cependant, l’usage des messageries, qui, nous le savons, peuvent être intrusives, doit relever d’un accord et d’un échange. En effet, un équilibre doit être maintenu avec le fonctionnement normal du travail.
Il est important que cette pratique soit régulée et le soit par le dialogue. C’est ce que nous proposons.
M. le président. L'amendement n° 714, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« À défaut d’intranet mis en place par l’entreprise, chaque organisation syndicale peut adresser aux salariés sur leur messagerie professionnelle un tract sous la forme d’un courriel à raison d’au minimum douze envois autorisés par an.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Comme le précédent, cet amendement tend à préciser les modalités de communication dans les entreprises où il n’y a pas d’accord à ce sujet.
Il vise à assurer la diffusion des informations syndicales en l’absence d’intranet.
Ainsi, nous proposons que chaque organisation syndicale puisse adresser sa communication aux salariés sur leur messagerie professionnelle, avec un minimum de douze envois autorisés par an.
Encore une fois, nous voulons encadrer les pratiques afin d’éviter le flou juridique.
Le 25 janvier 2005, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que « la diffusion de tracts et de publications syndicaux sur la messagerie électronique que l’entreprise met à la disposition des salariés n’est possible qu’à la condition, soit d’être autorisée par l’employeur, soit d’être organisée par voie d’accord d’entreprise. » Mais cela a été remis en cause par un arrêt rendu le 11 juillet 2013 par la chambre sociale, qui a alors estimé que le fait de subordonner l’utilisation d’un moyen de communication actuel et usuel à un accord de l’employeur pouvait affecter l’efficacité de l’action syndicale dans l’entreprise et la défense des intérêts des travailleurs.
En dernier lieu, c’est le Conseil constitutionnel qui a tranché, en précisant « qu’en l’absence d’accord d’entreprise relatif à l’utilisation de l’intranet ou de la messagerie électronique de l’entreprise, les syndicats peuvent, outre l’application des dispositions du premier alinéa de l’article L. 2142–3 du code du travail et de son article L. 2142–4, librement diffuser des publications et tracts sur les réseaux de communication au public en ligne ; que les salariés peuvent également librement y accéder sur ces réseaux ; qu’ils peuvent s’inscrire sur des listes de diffusion afin de recevoir par voie électronique les publications et tracts syndicaux. »
Comme vous pouvez le constater, mes chers collègues, ces questions sont loin d’être anecdotiques et aisées. Nous vous proposons d’inscrire précisément les conditions d’adresse sur les messageries professionnelles dans le code du travail, afin d’assurer à tous, employeurs ou salariés, une lecture claire en la matière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. L’article 27 prévoit une négociation sur les modalités de communication syndicale dans l’entreprise. N’anticipons pas sur cette négociation en rigidifiant le système !
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour la raison que j’ai évoquée : il convient de privilégier l’accord d’entreprise.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Il semble que la commission ait été très bienveillante à notre égard, puisque, si ces amendements ne sont pas du domaine de la loi, ils auraient dû être déclarés irrecevables au titre de l’article 41 de la Constitution.
Cela dit, je m’interroge sur les arguments de notre rapporteur, qui ont été très lapidaires.
L’article 27 a trait aux négociations internes de l’entreprise concernant la diffusion de l’information syndicale auprès des salariés.
Les amendements que nous avons déposés à cet article étaient donc tout à fait bien placés et justifiés, puisque, pour permettre que les négociations aient lieu et explorent tous les champs possibles en matière de diffusion de l’information syndicale, il faut, nous semble-t-il, que, dans les objectifs de cette négociation, les choses soient clairement définies, qu’il s’agisse de la messagerie ou de l’intranet.
Tel était précisément le sens de nos différents amendements.
Je regrette donc que les arguments qui leur sont opposés nous soient présentés de manière aussi succincte.
M. le président. L'amendement n° 715, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les délégués syndicaux, représentants syndicaux, et représentants de section syndicale sont autorisés à communiquer avec les salariés via la messagerie professionnelle dans le cadre de leurs mandats. Une adresse spécifique est mise à leur disposition à cet effet, permettant d’identifier leur mandat et leur organisation syndicale. Tout élément envoyé ou réceptionné par cette adresse est garanti par la plus stricte confidentialité. Des dispositions similaires sont assurées pour les comités d’entreprise, les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, ainsi que les délégués du personnel. L’entreprise s’assure que tout salarié dispose d’une messagerie électronique et d’un accès à l’intranet de l’entreprise, s’il en existe un. »
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Dans la continuité de ceux que nous venons d’examiner, cet amendement vise à conforter la diffusion des informations syndicales auprès des salariés et à garantir la confidentialité des échanges électroniques entre les organisations syndicales, les représentants des personnels élus et les salariés.
Nous touchons là à des sujets particulièrement importants et sensibles.
D’abord, nous souhaitons que le code du travail affirme l’autorisation, pour les délégués et représentants syndicaux, de communiquer avec les salariés via la messagerie professionnelle.
Aussi, une adresse électronique spécifique relative à leur mandat syndical pourrait être mise à leur disposition. Cela permettrait d’identifier ces acteurs syndicaux dans les entreprises.
Par ailleurs, nous demandons la plus stricte garantie de la confidentialité des échanges réalisés à partir de cette boîte mail. En effet, nous sommes particulièrement attachés à ce que le secret de la communication entre salariés, syndicats et représentants des personnels élus soit assuré. Nous pensons notamment à certaines situations où cette confidentialité s’impose plus particulièrement – dans les affaires de harcèlement sexuel ou moral, en cas de pressions subies ou tout simplement lorsqu’un salarié se renseigne sur les modalités selon lesquelles il peut quitter son emploi.
Juridiquement, notre amendement est fondé sur un arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 19 juin 2013.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. Je le répète, ne rigidifions pas le cadre des négociations sur les modalités de communication syndicale au sein de l’entreprise.
Si l’on vous suivait, chers collègues du groupe CRC, il n’y aurait plus rien à négocier, puisque tout aurait déjà été prévu.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Comme je l’ai dit, je tiens véritablement à la condition d’un accord pour utiliser les messageries : un équilibre doit être trouvé avec le fonctionnement normal du travail.
Il me semble important que cette pratique soit régulée par le dialogue.
L’avis est donc est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 27.
(L'article 27 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 27