Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-38 et I-375.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° I-39, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Après les mots :
du traité
insérer les mots :
ainsi qu’aux entreprises de taille intermédiaire dont le chiffre d’affaires est inférieur à 250 millions d’euros
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État de l’extension du bénéfice du suramortissement accéléré des robots industriels aux entreprises de taille intermédiaire est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit non plus de la prolongation du dispositif, mais de son extension aux ETI.
Nous venons d’évoquer l’efficacité de ce dispositif de soutien à l’investissement dans les robots pour les PME, mais le problème se pose également pour les ETI.
On souligne très souvent la différence de niveau d’équipement robotique entre les entreprises industrielles françaises et allemandes. Les statistiques sur la présence de robots dans les entreprises allemandes sont tout à fait impressionnantes : celles-ci disposeraient de plus de 167 000 robots. Or nous savons bien que les entreprises industrielles sont souvent des ETI : il serait indiqué de leur accorder le bénéfice de ce dispositif de soutien, pour un coût très limité.
Un amendement similaire avait déjà été présenté par notre collègue François Marc, lorsqu’il était rapporteur général de la commission des finances, et notre assemblée l’avait adopté lors de l’examen de la loi de finances pour 2014. Aussi, je ne doute pas que cet amendement recueillera un large soutien.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il me semble que le ciblage de cet avantage sur les seules PME est pertinent au regard du faible taux de robotisation de ces entreprises. Par ailleurs, l’extension de ce dispositif aux ETI présenterait un effet d’aubaine pour celles d’entre elles qui disposent de ressources financières convenables. Enfin, cette extension nécessiterait une notification aux instances communautaires au titre des aides d’État qui risquerait de fragiliser notre position.
De surcroît, l’adoption de cet amendement aboutirait à augmenter mécaniquement le coût de ce dispositif, monsieur le rapporteur général, et à alourdir la facture. Or les réductions de recettes que le Sénat a votées depuis le début de cette discussion s’élèvent déjà à 1,6 milliard d’euros…
M. Richard Yung. J’en étais déjà à 2 milliards !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6, modifié.
(L’article 6 est adopté.)
Article additionnel après l’article 6
Mme la présidente. L’amendement n° I-71 rectifié, présenté par MM. Savary, G. Bailly, Bouchet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Carle, Chasseing, Commeinhes et de Raincourt, Mme Deroche, M. Gilles, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet, Grosdidier, Huré, Husson, Joyandet et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mme Micouleau et MM. Morisset, Pellevat, Pierre et Pointereau, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 72 B du code général des impôts, il est inséré un article 72 ... ainsi rédigé :
« Art. 72 .... – Les exploitants agricoles soumis à un régime réel d’imposition ont la possibilité de faire varier le montant total des dotations aux amortissements fiscalement déductibles par rapport au montant constaté en comptabilité au titre d’un exercice, dans la limite de plus ou moins 50 % de ce montant.
« Cette possibilité est exclusive de l’option pour l’amortissement dégressif prévu aux articles 39 A à 39 AB et de l’option pour l’amortissement exceptionnel prévu aux articles 39 AC à 39 AK.
« Cette variation n’a pas pour effet de modifier la durée d’amortissement adoptée en comptabilité. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Le présent amendement, proposé par notre collègue René-Paul Savary, vise à mettre en place un mécanisme simple d’utilisation et pérenne qui permet de tenir compte de la variabilité des résultats des exploitations.
Cette faculté serait exclusivement fiscale, mais n’aurait pas d’incidence sur la comptabilité de l’entreprise.
Mme Nathalie Goulet. Ça sent le champagne ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’ai déjà indiqué qu’une proposition de loi en faveur de la compétitivité de l’agriculture et de la filière agroalimentaire, cosignée par de nombreux membres de la majorité sénatoriale, avait été déposée. Elle comprend un certain nombre de dispositions fiscales, dont certaines sont reprises dans le présent projet de loi de finances.
M. Didier Guillaume. Et elle coûte très cher !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous aurons donc l’occasion de revenir sur de nombreux sujets agricoles lors de nos débats.
Dans le cas présent, le dispositif proposé est relativement complexe : il modifie le calcul des déductions au titre des dotations aux amortissements, afin de permettre aux exploitants soumis à un régime réel d’imposition de faire varier ce montant par rapport au montant constaté en comptabilité, dans une fourchette de plus ou moins 50 %. Concrètement, il s’agit d’un régime dérogatoire aux principes de la comptabilité des entreprises.
Néanmoins, la commission souhaiterait prendre connaissance de l’avis du Gouvernement, dès lors que ce dispositif est très technique. À voir M. le secrétaire d’État hocher la tête, je me doute de l’avis qu’il va exprimer !
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. En ce qui me concerne, j’ai l’habitude d’être franc ! Je vous entends tout le temps dire que vous souhaiteriez connaître l’avis du Gouvernement, monsieur le rapporteur général. Faites-vous donc votre propre opinion ! Votre commission est souveraine, elle dispose d’équipes pour travailler et mes services répondent aux questions que vous leur posez.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Oui, mais nous ne disposons pas des chiffrages !
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cela dit, le Gouvernement à un point de vue, je vous prie de le croire !
Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le sénateur, le dispositif prévu dans votre amendement n’est pas simple ; au contraire, il est complexe – M. le rapporteur général l’a d’ailleurs discrètement laissé entendre ! En outre, l’évolution du coût d’une telle mesure dans le temps est très difficile à suivre.
Par ailleurs, M. le rapporteur général vous a vanté les mérites d’une proposition de loi défendue par la majorité sénatoriale, mais le Gouvernement présentera, quant à lui, un certain nombre de mesures fiscales en faveur de l’agriculture dans le cadre du projet de loi de finances rectificative.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Laménie, l’amendement n° I-71 rectifié est-il maintenu ?
M. Marc Laménie. Compte tenu de l’avis exprimé par M. le secrétaire d’État, qui a souligné la complexité du dispositif de déduction des amortissements qui est proposé, et dans l’attente du prochain projet de loi de finances rectificative, je vais modestement retirer cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° I-71 rectifié est retiré.
Article 6 bis (nouveau)
I. – Au 5 bis de l’article 39 du code général des impôts, le mot : « six » est remplacé par le mot : « trois ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er novembre 2015.
Mme la présidente. L’amendement n° I-161, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 5 bis de l’article 39 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 5 bis. Les rémunérations différées visées aux articles L. 225-42-1 et L. 225-90-1 du code de commerce sont admises en déduction du bénéfice net dans la limite d’une fois le plafond annuel de la sécurité sociale par bénéficiaire. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Les mesures que l’on peut adopter dans le cadre d’une loi de finances ont un caractère parfois assez symbolique, mais il est des symboles qui parlent, notamment aux citoyens et à l’opinion publique.
Le présent amendement relève de ce type de mesures. Il tend à ramener la déductibilité des abondements des entreprises aux dispositifs de retraite complémentaire de leurs anciens cadres dirigeants à l’équivalent du plafond annuel de la sécurité sociale.
Devons-nous, en effet, au nom de je ne sais quel mercato des dirigeants d’entreprise – qui n’existe pas vraiment –, laisser perdurer, l’âge de la retraite atteint, les inégalités de ressources et de revenus subies et constatées durant la vie professionnelle ? Telle est la question.
Cette situation est singulièrement présente dans le cas des « retraites chapeau », avec des niveaux de financement par l’entreprise de dispositifs très largement dérogatoires au droit commun, conduisant à des niveaux de prestations servies particulièrement élevés.
Le droit fiscal de notre pays comporte un certain nombre de dispositions qui tendent à favoriser le développement des systèmes de retraite supplémentaire. Ainsi, en l’état actuel des textes, une entreprise peut verser 228 240 euros par an au titre du financement d’une rente viagère, reversée ensuite en « retraite chapeau » sous forme de charge déductible du revenu fiscal de la société. Ce qui doit donner quelque chose comme 200 SMIC par an !
Un tel dispositif porte atteinte à l’égalité de traitement entre salariés et représente une charge indue pour les comptes publics, eu égard au très faible nombre de bénéficiaires.
L’adoption de cet amendement permettrait de rendre tout son sens à la participation solidaire de chacun au financement de prestations d’assurance vieillesse collectives de qualité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous avons déjà évoqué le sujet des « parachutes dorés » et des « retraites chapeau » samedi dernier, lorsque nous avons débattu de l’impôt sur le revenu.
Je vous avais alors parlé des « parachutes argentés »… Or ce que vise cet amendement, ce sont plutôt les « parachutes en bronze », puisque le montant évoqué est seulement d’une fois le plafond annuel de la sécurité sociale, le PASS. Cette proposition toucherait donc uniquement les dirigeants de PME, voire d’ETI. On est là très loin des abus cités lors de la séance de samedi…
La commission émet donc un avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Alors que l’article 6 bis durcit d’ores et déjà la législation, vous proposez, monsieur Foucaud, d’aller encore plus loin.
Le Gouvernement souhaite procéder par étapes, et en rester pour le moment à celle qui est prévue dans l’article : un montant limité à trois fois le PASS, et pas seulement à une fois.
L’avis est donc défavorable.
Par ailleurs, je lisais, ce matin, que le Conseil constitutionnel a annulé très récemment une disposition concernant les « retraites chapeau » ou les « parachutes dorés », non pas pour des raisons de fond ou parce que ces dispositifs seraient confiscatoires, mais au motif que la taxe de 45 % prévue créerait des effets de seuil trop importants. Il conviendra donc de corriger cela durant la navette parlementaire, si c’est encore possible.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. M. le secrétaire d’État nous dit que cet article est une étape. On peut donc considérer que c’est une bonne chose. Mais j’ai surtout retenu que, pour le rapporteur général, une « retraite chapeau » d’un montant équivalent à 200 SMIC, cela n’a rien de choquant…
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient, pour explication de vote.
M. Georges Patient. Même si nous reconnaissons le bien-fondé de l’objectif recherché au travers de l’amendement de M. Foucaud, notre groupe votera contre : une telle mesure aurait pour effet, comme l’a dit le rapporteur général, de faire entrer dans le champ de la mesure des PME et des PMI, ce qui n’est pas l’objectif initial de ce dispositif relatif aux « parachutes dorés ».
Mme la présidente. L’amendement n° I-423, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – Le I s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er novembre 2015.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Cet amendement a pour objet de préciser la date d’entrée en vigueur des dispositions prévues à l’article 6 bis, qui est par trop imprécis à cet égard. Faut-il retenir la date de la décision d’attribution de la rémunération, celle de la clôture de l’exercice, ou celle de son ouverture ?
Le Gouvernement propose que la mesure s’applique « aux exercices ouverts à compter du 1er novembre 2015 ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’a pas pu examiner cet amendement, qui vient d’être déposé.
On peut comprendre l’intention du Gouvernement, qui souhaite préciser la date d’application de l’article. Or nous sommes déjà le 23 novembre. Par respect pour le Sénat, nous aurions préféré que l’on prévoie la date du 1er décembre. À défaut, cela reviendrait à considérer que le Parlement ne compte qu’une seule chambre, l’Assemblée nationale.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Nous retenons généralement la date de l’annonce de la mesure, c’est-à-dire celle du moment où elle a été rendue publique, afin d’éviter des effets d’optimisation.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6 bis, modifié.
(L'article 6 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 6 bis
Mme la présidente. L'amendement n° I-169, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 39 terdecies du code général des impôts est abrogé.
II. – Le I est applicable aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Le présent amendement vise à supprimer la taxation à taux réduit des plus-values à long terme provenant des produits de cessions et de concessions de brevets. Ce dispositif fiscal dérogatoire prévoit une taxation au taux de 15 % – au lieu du taux normal de 33, ⅓ % – des plus-values provenant des produits de cessions et de concessions de brevets réalisées par des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés.
Plusieurs travaux et rapports récents ont mis en lumière l’urgente nécessité de revoir le niveau de taxation actuellement fixé.
Dans le cadre du rapport du Comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, ce dispositif s’était vu attribuer le score de 1, soit la deuxième note la moins élevée.
Plusieurs éléments de ce rapport interrogent, en effet, sur la pertinence du dispositif. Permettez-moi de les citer.
« L’avantage fiscal est d’autant plus grand, à rendement social donné, que l’entreprise peut facilement s’approprier les gains liés à l’invention en la cédant ou la concédant et donc que l’externalité est faible. » Ainsi, plus l’entreprise est en mesure de valoriser le fruit de ses recherches, et donc d’en tirer profit, plus l’avantage fiscal est important.
« Le taux réduit en vigueur en France ne devrait avoir un impact sur la localisation de la R et D que très limité dans la mesure où son application est indépendante du lieu d’exécution de la R et D. » En effet, « un inconvénient du dispositif en termes d’attractivité est que le produit des brevets peut découler de travaux de recherche exécutés à l’étranger. » D’ailleurs, 58 % de l’avantage fiscal soutiendrait des activités de recherche menées à l’étranger.
Voilà pourquoi nous demandons l’abrogation de l’article 39 terdecies du code général des impôts. Cela permettrait de rendre disponibles près de 400 millions d’euros.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous disions à l’instant que le CIR était un élément favorisant la compétitivité des entreprises françaises ; c’est également le cas de ce dispositif.
M. Foucaud a cité une étude ; j’en invoquerai une autre, qui dit exactement le contraire : l’étude comparative sur la fiscalité des brevets en Europe, réalisée par la Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services, la DGCIS.
Selon cette étude, « la loi fiscale française applicable aux brevets semble être un élément, avec d’autres, pris en compte de manière positive dans les prises de décision des directions générales des groupes. Elle est perçue comme un facteur incitant ou justifiant la localisation en France de centres de recherche et développement. »
Ce dispositif participe donc, avec le CIR, à la localisation de la recherche en France. C’est important, dans la mesure où notre pays ne dépose malheureusement pas assez de brevets.
En outre, le coût du dispositif ne connaît pas une évolution très dynamique : il est passé de 850 millions d’euros en 2011 à 250 millions d’euros en 2015.
Supprimer la taxation à taux réduit des plus-values à long terme provenant des produits de cessions et de concessions de brevets serait un très mauvais signal adressé à nos entreprises. Pour les soutenir, il nous faut au contraire aller dans le sens de la compétitivité et de la stabilité fiscale.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement est opposé à cet amendement pour deux raisons au moins.
Premièrement, le taux de 15 % pratiqué en France est déjà relativement élevé par rapport à la concurrence européenne. C’est une raison qui compte quand il est très facile de délocaliser.
Deuxièmement, et c’est encore plus important, nous menons actuellement de grands travaux avec l’OCDE et la Commission européenne sur le régime d’imposition des produits de l’exploitation des brevets en fonction du lieu de production, mais aussi du lieu d’exploitation, des brevets. Il s’agit de questions très délicates, sur lesquelles les discussions avancent bien. D’après les derniers échanges que j’ai eus avec Michel Sapin sur le sujet, il y a des progrès en la matière, même si un ou deux pays, que je ne citerai pas, sont encore opposés à ce que nous aboutissions à une harmonisation du traitement des brevets au sein de l’Union européenne, voire au niveau mondial.
Il ne serait donc pas opportun de toucher à ce taux qui, encore une fois, n’est pas très favorable à nos entreprises.
Le Gouvernement émet un avis est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. L’activité de cession de brevets est relativement modeste en France, et même trop modeste, car nous ne sommes pas assez actifs en ce domaine.
Je pourrai comprendre qu’un tel amendement soit déposé pour ce qui concerne les redevances sur brevets, car il s’agit d’un moyen d’évasion fiscale : les brevets sont logés dans une société mère localisée aux Pays-Bas, aux États-Unis ou aux Bahamas ; les revenus de la filiale sont « pompés » au travers de redevances souvent excessives portant sur des marques, et surtout sur des brevets, puis dirigés vers la société mère.
Pour la cession de brevets, en revanche, le problème est différent. Il est important que les entreprises puissent faire tourner leur portefeuille de brevets. Cela fait partie de leur stratégie : elles quittent un secteur pour aller vers un autre. Toutes les grandes entreprises, et même les moyennes, font de l’achat et de la vente de brevets.
En outre, comme l’a dit M. le secrétaire d’État, le taux de 15 % est tout à fait moyen. Il y a une certaine concurrence fiscale en la matière en Europe et dans le monde. Je ne pense donc pas que la mesure proposée soit opportune.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-169.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 6 ter (nouveau)
Après l’article 39 decies du code général des impôts, il est inséré un article 39 decies A ainsi rédigé :
« Art. 39 decies A. – Les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu selon un régime réel d’imposition peuvent déduire de leur résultat imposable une somme égale à 40 % de la valeur d’origine des biens, hors frais financiers, affectés à leur activité et qu’elles acquièrent entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2017, lorsqu’ils relèvent de la catégorie des véhicules de plus de 3,5 tonnes qui fonctionnent exclusivement au moyen de l’énergie gaz naturel et biométhane carburant.
« La déduction est répartie linéairement sur la durée normale d’utilisation des biens. En cas de cession du bien avant le terme de cette période, elle n’est acquise à l’entreprise qu’à hauteur des montants déjà déduits du résultat à la date de la cession, qui sont calculés prorata temporis.
« L’entreprise qui prend en location un bien neuf mentionné au premier alinéa du présent article dans les conditions prévues au 1 de l’article L. 313-7 du code monétaire et financier en application d’un contrat de crédit-bail ou dans le cadre d’un contrat de location avec option d’achat, conclu entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2017, peut déduire une somme égale à 40 % de la valeur d’origine du bien, hors frais financiers, au moment de la signature du contrat. Cette déduction est répartie sur douze mois à compter de la mise en service du bien. Si l’entreprise crédit-preneuse ou locataire acquiert le bien, elle peut continuer à appliquer la déduction. La déduction cesse à compter de la cession ou de la cessation par celle-ci du contrat de crédit-bail ou de location avec option d’achat ou du bien et ne peut pas s’appliquer au nouvel exploitant.
« L’entreprise qui donne le bien en crédit-bail ou en location avec option d’achat ne peut pas pratiquer la déduction mentionnée au premier alinéa du présent article. »
Mme la présidente. L’amendement n° I-40, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances avait proposé, il y a un an, un dispositif d’amortissement accéléré qui avait été approuvé sur toutes les travées, ou à peu près.
On nous avait expliqué, à l’époque, qu’un tel dispositif était trop coûteux. Puis la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron », a instauré un dispositif de suramortissement centré sur l’investissement productif.
Au travers de l’article 6 ter, l’Assemblée nationale a introduit une extension, un dispositif de suramortissement temporaire, sur le modèle de celui qui est prévu dans la loi Macron, au profit des véhicules de plus de 3,5 tonnes fonctionnant exclusivement au gaz naturel pour véhicules, le GNV, et au biométhane carburant, le bioGNV.
On peut s’interroger sur la cohérence de ce dispositif de suramortissement temporaire avec l’objectif de soutien de l’investissement productif industriel. Pourquoi l’étendre à tel véhicule, et pas à d’autres ?
Cette disposition ne va pas dans le sens d’une égalité de traitement entre les différents véhicules. Il faut d’ailleurs préciser que ceux qui fonctionnent au gaz naturel bénéficient déjà d’un taux de taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques, la TICPE, bien inférieur à celui qui est applicable aux véhicules qui roulent à l’essence ou au gazole.
La commission, en proposant la suppression de cet article, souhaite donc limiter le dispositif de suramortissement à l’investissement productif.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement, qui n’avait pas été favorable, à l’Assemblée nationale, à l’insertion de cet article, s’en remet, par cohérence, à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Claireaux, pour explication de vote.
Mme Karine Claireaux. Cet amendement vise à supprimer l’article 6 ter, qui étend l’amortissement fiscal supplémentaire exceptionnel sur certains achats d’équipements industriels annoncé en avril 2015 par le Premier ministre dans le cadre du plan de soutien à l’investissement industriel aux poids lourds fonctionnant au gaz naturel et au biométhane carburant, et ce pour une durée de deux ans.
Cette mesure entre ainsi dans le cadre d’un plan de soutien à l’investissement industriel pour un secteur en difficulté et pour un coût budgétaire relativement faible puisqu’il est de 5 millions d'euros. Il ne paraît donc pas souhaitable de supprimer cet article 6 ter.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. J’anticipe, car je crains que l’adoption de l’amendement de M. le rapporteur général ne fasse tomber le mien, qui devait être examiné dans la foulée.
Je veux d’abord rappeler le contexte. Lorsque nous avions voté, dans le cadre de la loi Macron, ce suramortissement fiscal, nous l’avions fait pour favoriser l’investissement productif. Et il se trouve qu’un certain nombre d’entreprises, notamment les entreprises de transport, font valoir que chez elles, l’investissement productif concerne le matériel roulant. Si une entreprise de transport n’investit pas dans le matériel roulant, cela signifie qu’elle n’investit pas dans la production.
Je tire, quant à moi, une conclusion « orthogonale », comme dirait M. le secrétaire d'État, du dispositif de l’Assemblée nationale, dont M. le rapporteur général préconise la suppression. Je considère que le problème est plus général, car il s’agit non de favoriser uniquement le biogaz, par exemple, ou ses filières environnementales de transport, mais d’étendre la mesure.
Je rappelle que le Sénat a voté ce dispositif en première lecture et que si nous ne l’avions pas fait, il aurait été censuré par le Conseil constitutionnel. À l’époque, lorsque nous avions discuté de cette mesure avec le ministre de l’économie, il avait été dit que l’amortissement fiscal supplémentaire concernait tout l’investissement productif. Il avait même été dit que seul l’immobilier était exclu. Aujourd'hui, les entreprises de transport nous font très légitimement observer que pour elles, l’investissement productif concerne le matériel roulant.
Je propose, de manière très « orthogonale », avec la commission d’étendre au matériel roulant le bénéfice du suramortissement Macron. Cela me semble répondre à une logique, qui est évidemment non pas une logique budgétaire – ce que M. le secrétaire d'État ne manquera pas de nous dire ! –, mais une logique de relance et d’emploi visant à favoriser la production, conformément à l’objectif initial.
Tel était l’objet de l’amendement n° I-153, qui ne pourra être discuté que si celui de la commission n’est pas adopté.