M. André Gattolin. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, il y a un an, presque jour pour jour, nous étions dans cet hémicycle pour débattre d’un possible engagement de nos armées à la suite de la terrible tournure prise par la guerre en Syrie.
Aujourd'hui, nous nous retrouvons pour évoquer un sujet presque similaire et concernant la même région. Toutefois, en l’espace de douze mois, la situation sur place a pris une dimension qui ajoute encore une horreur extrême à ce qui paraissait déjà à l’époque le pire de l’horreur.
Hier, en effet, l’usage d’armes chimiques contre des populations civiles en Syrie représentait le plus haut degré de violence jamais atteint dans ce conflit.
Depuis lors, la guerre dans la région a franchi un seuil de barbarie presque impensable : nouveaux déplacements de population, exécutions sommaires, massacres de civils, actes de tortures et viols massifs... C’est une terreur sans limites qui, bien au-delà de la Syrie, s’étend désormais à l’Irak voisin. Devant cette tragédie, la communauté internationale se trouve, de fait, acculée. Nous n’avons d’autre choix que d’intervenir pour tenter de venir en aide à des populations prises au piège et pour enrayer la progression d’une entreprise terroriste d’une ampleur jamais connue auparavant.
De ce point de vue, soyons clairs, le groupe écologiste du Sénat ne peut que soutenir la décision du Gouvernement de participer à la coalition internationale qui se met en place depuis plusieurs jours.
Cette participation de la France, certes toujours risquée, comme toute participation à un conflit, a d’emblée été voulue comme très limitée par le Président de la République.
D’une part, nos moyens dans la région demeurent modestes, l’essentiel de nos capacités d’intervention extérieure étant déjà mobilisé sur d’autres théâtres d’opérations, notamment en Afrique subsaharienne.
D’autre part, notre action s’inscrit dans un cadre de stricte légalité internationale : nous répondons à une demande pressante d’assistance de l’État irakien. Nul besoin donc, dans ce cas précis, d’une résolution de l’ONU.
Pour autant, nous savons tous que nous ne sommes pas ici dans la meilleure des configurations pour mettre fin, exclusivement à coups de frappes aériennes, à un conflit horriblement complexe et sanglant. Nous pouvons certes contribuer à contenir la progression des djihadistes du soi-disant État islamique en Irak et au Levant dans le nord de l’Irak, pour peu que les Peshmergas kurdes n’enregistrent pas au sol de nouvelles défaites et que l’armée régulière irakienne – en cours de reconstruction – voie ses forces, notamment aériennes, devenir très rapidement opérationnelles.
Nous le voyons bien, ces derniers jours, le cœur du conflit s’est largement déplacé vers la Syrie, ainsi qu’aux frontières de la Turquie et du Liban. C’est la raison pour laquelle les États-Unis et cinq pays arabes ont choisi depuis lundi de procéder aussi à des frappes aériennes dans certaines zones de la Syrie.
Cette intervention en Syrie visant à contenir ou à déstructurer militairement les troupes de Daech, elle a une logique peu discutable, même si elle sort du strict droit international. On peut au passage s’interroger sur l’existence aujourd’hui d’un État syrien reconnu, légal et cohérent.
Nous sommes même légitimement en droit de nous poser la question suivante : jusqu’où la volonté affichée par les États-Unis de ne pas engager de troupes au sol lui permettra-t-elle de tenir ses objectifs politiques et militaires ?
Dans l’hypothèse d’un engagement au sol, le conflit entrerait alors dans une autre dimension, avec son cortège de risques et de conséquences contradictoires à court comme à moyen terme.
Disons-le clairement, une telle hypothèse ne concerne pas directement la France : d’une part, comme nous l’avons souligné précédemment, nous n’en avons pas les moyens militaires ; d’autre part, la sagesse passée de notre diplomatie, qui nous a tenus à l’écart d’une telle participation durant la guerre menée en Irak en 2003, nous protège, selon moi, d’une escalade dans notre engagement.
Toutefois, il faut bien garder en tête que des frappes aériennes ou, plus largement, une opération militaire ne suffira pas à instaurer la paix dans cette région. La réponse à ce conflit sera nécessairement une réponse politique et diplomatique et non pas seulement une réponse d’urgence, à la fois humanitaire et sécuritaire.
C’est vrai dans la plupart des cas, mais ça l’est tout particulièrement ici : chaque fois qu’une intervention extérieure a été déclenchée dans la région, elle s’est malheureusement traduite, in fine, par l’apparition de nouveaux groupes armés, de nouvelles factions aux objectifs plus radicaux. Il est donc impératif de tirer les enseignements des échecs passés si nous voulons enfin pouvoir mettre en place les conditions d’une sortie par le haut après cette succession de conflits.
Très clairement, ces conditions supposent d’engager très vite un règlement politique et diplomatique, qui pourrait prendre le relai de l’actuelle réponse militaire. En la matière, j’y reviendrai plus tard, la France et l’Union européenne ont un rôle d’initiative majeur à jouer.
Néanmoins, pour bien comprendre l’enjeu auquel nous sommes confrontés, il est nécessaire de revenir rapidement sur les raisons de l’émergence de ce prétendu État islamique en Irak et au Levant et sur l’origine des moyens humains, logistiques et financiers importants dont il dispose aujourd’hui. Celui-ci s’est constitué en agrégeant des groupes parfois très divers, ayant souvent bénéficié de l’appui de pays de la région, qui voulaient ainsi intervenir dans la guerre en Syrie. Ces groupes ont ensuite rompu avec leurs anciens « sponsors » en se radicalisant.
Au stade actuel, cette organisation profite évidemment des prises de guerre et des détournements de matériels opérés en Irak et surtout en Syrie, à l’occasion des combats et du ralliement des groupes que j’évoquais à l’instant.
Toutefois, il est manifeste qu’elle s’appuie aussi sur divers trafics, notamment celui du pétrole provenant des champs pétroliers des zones du nord de l’Irak passées sous son contrôle. Il serait donc intéressant d’identifier les intermédiaires et les clients de ces trafics et de restreindre, si possible, cette manne bien trop commode. Là encore, cette démarche requiert une coopération internationale aussi prononcée que possible.
Nous le savons, les responsabilités dans cette tragique évolution sont des plus partagées et, dans le même temps, nous ne pouvons en aucun cas nous contenter d’établir ces responsabilités pour dire avec lesquels de ces acteurs nous voulons, ou non, travailler aujourd’hui. En effet, cela peut être difficile à admettre, mais, si nous faisions cela, si nous choisissions nos interlocuteurs pour une paix future, il y aurait très peu de monde autour de la table des négociations au moment où la diplomatie devra succéder à l’action militaire.
Disons-le tout net : seule une grande conférence internationale mobilisant l’ensemble des puissances et des acteurs concernés permettra peut-être de sortir la région de cette spirale infernale. Et dans cette perspective, nous ne devrons avoir aucune espèce de tabou, aucune réticence, quand bien même cela ne dédouanera personne de ses responsabilités passées ni ne permettra d’oublier les terribles drames qui ont secoué ces pays.
Cela veut dire que les acteurs syriens dans leur ensemble – régime de Bachar Al-Assad et opposants à ce régime compris – devront être associés à ces discussions.
Que l’Iran – seul pays à même, aujourd’hui, de parler avec la plupart des parties à ce conflit – ne pourra être laissé à l’écart.
Que la Turquie, dont le rôle est, hélas, souvent ambigu, devra clarifier sa position ; elle a peut-être commencé à le faire, en accueillant depuis peu sur son territoire des dizaines de milliers de réfugiés kurdes, les principales victimes de la situation actuelle.
La question du Kurdistan et de son autonomie devra bien sûr, elle aussi, être posée, et cela, là encore, sans tabou.
La politique du gouvernement irakien devra aussi évoluer – avec le changement de Premier ministre, un début d’évolution est perceptible – pour apaiser les tensions passées avec ses populations sunnites.
Enfin, il ne faut pas oublier bien sûr la Russie, très constante et très présente dans la région via son appui au régime syrien...
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, apporter une réponse durable à la situation à laquelle fait face la communauté internationale ne sera pas aisé, mais il me paraît important de rassurer nos concitoyens sur un certain nombre de points.
Oui, cette organisation terroriste peut être militairement réduite, et peut-être même vaincue : quoique fortement équipée et manifestement déterminée, elle ne semble pas être en mesure de tenir durablement des territoires aussi vastes que ceux sur lesquels elle prétend aujourd’hui exercer sa domination.
La mobilisation des opinions publiques dans de nombreux pays musulmans pour dénoncer les exactions de ce prétendu État djihadiste, ainsi que la participation directe d’États de la région aux opérations visant à la réduire témoignent assez de ce qu’il ne s’agit en rien d’un choc entre civilisations et que l’on a plutôt affaire à une lutte entre les civilisations et ceux qui veulent leur porter atteinte.
Nous devons bien prendre garde, en France, dans un contexte sociétal et politique tendu, à ne pas céder aux facilités de l’amalgame ni à la panique. Nous devons faire preuve de prudence sur notre territoire, en luttant évidemment contre les possibles actes terroristes, mais aussi contre les effets délétères de ces drames sur nos propres consciences.
Sans minimiser l’impact possible de la situation en Syrie et en Irak au sein de notre société, rappelons tout de même que le conflit israélo-palestinien tel qu’il se développe, notamment depuis trois ans, est de loin celui qui suscite le plus de passions dans notre opinion, et qu’instinctivement beaucoup y voient la source de bien d’autres conflits, y compris celui dont nous parlons aujourd'hui.
N’oublions pas non plus cette autre bombe à retardement qu’est la Libye, dont la mise à feu semble déjà bien enclenchée et dont les retombées pourraient être considérables.
Nous nous devons d’avoir toutes ces questions en tête en même temps que nous réfléchissons et agissons sur ce qui se passe en Irak et en Syrie.
Tous ces conflits sont certes différents, mais ils n’en restent pas moins liés à bien des égards, notamment dans les représentations collectives ; vouloir mettre fin à l’un d’entre eux, c’est vouloir mettre fin à tous les autres.
Mes chers collègues, j’en arrive à ma conclusion et au rôle que l’Union européenne, au-delà de notre seul pays, pourrait et devrait jouer dans les mois et les années à venir.
C’est peu de dire que l’Europe est absente aujourd’hui de ce débat. Elle l’est, tout d’abord, en raison du caractère embryonnaire des politiques extérieure et de sécurité européennes et de l’inexistence d’une véritable défense européenne, ensuite, en raison des divisions qui peuvent encore la parcourir sur certains aspects, et, enfin – de manière plus conjoncturelle –, en raison du renouvellement en cours des instances dirigeantes de l’Union.
Ce dernier point en dit long sur le chemin qu’il nous reste à parcourir pour rendre l’Europe plus efficace et opérationnelle. En outre, le Royaume-Uni reste totalement à l’écart de ce conflit, sans doute parce que David Cameron se souvient encore un peu trop de l’échec qu’il a essuyé l’an passé, au sujet de la Syrie, vis-à-vis de sa propre majorité et devant le parlement britannique.
Pourtant, l’Union européenne a une carte importante à jouer ; plusieurs de ses États sont des acteurs engagés sur la scène internationale ; je pense à la Pologne, à la République tchèque, aux Pays-Bas, au Danemark. À ce propos, je voudrais saluer l’action du ministre de la défense et de son homologue danois, qui, en juin dernier, ont élaboré une stratégie de coopération entre la France et le Danemark. Celle-ci nous permet de sortir de l’espèce de volonté jamais aboutie de travail concerté avec les Britanniques. Il est vrai que nous avons peut-être, à travers l’action des pays que je viens de citer, l’embryon d’une défense européenne.
L’Europe a su faire la démonstration de son utilité dans les discussions avec l’Iran et elle entretient une relation de longue date, quoique particulièrement tumultueuse, avec la région. Son engagement dans ces dossiers constituera sans doute le premier test grandeur nature pour ses dirigeants, une fois que la nouvelle Commission sera en fonction.
L’intervention est aujourd’hui inévitable pour répondre à la crise humanitaire et redonner de l’espace et du temps à nos alliés locaux dans ce conflit.
Sachons utiliser au mieux ce nouveau délai pour préparer une sortie de crise qui soit enfin durable et permette d’associer au mieux l’ensemble des peuples concernés. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC.)
M. Jean-Vincent Placé. Très bien !
M. le président. La parole est à M. André Trillard, pour le groupe UMP.
M. André Trillard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à quelques jours du renouvellement du Sénat, nous nous retrouvons pourtant cet après-midi, parce qu’il y a urgence.
Urgence face à l’inimaginable, urgence face à la barbarie. Devant l’inhumanité des événements qui se déroulent en Irak depuis le mois de juin, la France ne peut rester immobile, alors que des centaines de personnes sont exécutées en raison de leur appartenance religieuse ou raciale.
Le massacre des chrétiens d’Orient et d’autres communautés par des extrémistes nous rappelle que, au XXIe siècle, nous n’en avons pas tout à fait terminé avec la folie génocidaire des hommes.
Face à cette tragédie, la France, de par les valeurs de liberté et de respect des droits humains qu’elle a toujours défendues, la France, dont la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen a inspiré la Déclaration universelle des Nations unies, la France, membre du Conseil de sécurité des Nations unies, ne peut rester inactive.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. Philippe Marini. Absolument !
M. André Trillard. Face à une telle cruauté, il ne peut y avoir de polémiques, il ne peut y avoir de divisions.
À ce stade, qu’il me soit permis de remercier les responsables des communautés religieuses en France, qui ont fermement condamné la violence de ces fous d’un Dieu qui leur tient lieu d’alibi et pour lesquels la radicalité d’une religion n’est qu’un prétexte.
Je veux particulièrement saluer les démarches de soutien des responsables français de la communauté musulmane, qui s’est engagée auprès de l’Association des chrétiens d’Orient en danger.
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. André Trillard. Je veux les saluer également pour leur langage de vérité et de paix. Ils ont su rappeler que le meurtre, la sauvagerie, le sectarisme ne sont pas des valeurs de l’islam.
Quant à nous, responsables politiques français, européens, ainsi que tous nos homologues à travers le monde, nous nous devons d’ouvrir lucidement les yeux sur la réalité de cette menace qui pèse sur nos peuples.
Pour sa part, attaché à l’unité nationale, c’est en toute responsabilité que le groupe UMP soutiendra le Gouvernement dans sa lutte contre le terrorisme en France, en Irak et dans le monde.
Au nom de notre groupe, je me dois de rappeler ici que la France et les Français ont déjà connu les menaces et subi le terrorisme.
Sur le sol national comme à l’étranger, les Français ont été les victimes de mouvements fanatiques, détournant et instrumentalisant la religion musulmane pour le compte de leur propre folie. Il en est de même pour nos alliés belges, espagnols et britanniques, pour ne citer qu’eux.
Il est donc grand temps de prendre la vraie mesure des nouvelles réalités du terrorisme global.
Il est temps d’adopter une grille de lecture cohérente des attentats de ces dernières années, qui dépassent très largement la Méditerranée : Paris en 1995, Madrid en 2004, Londres en 2005, Marrakech en 2011, les assassinats perpétrés par Mohamed Merah en 2012, la prise d’otages à In Amenas en Algérie en janvier dernier, la tuerie de Bruxelles, il y a quatre mois, sans oublier les soldats algériens tués en Kabylie au mois de juin dernier.
La litanie de ces macabres événements démontre que nous avons franchi un cap. L’Europe comme territoire est tout entière concernée. Chaque ressortissant européen à l’étranger est devenu une cible potentielle. L’enlèvement de notre compatriote, auquel nous pensons tous aujourd’hui, en est, hélas, l’illustration la plus récente...
L’augmentation du nombre d’enlèvements est proportionnelle à la cruauté de ceux qui disent agir au nom du djihad. Il n’y a pas de mots assez durs pour qualifier la terrible mise en scène des décapitations de journalistes, d’humanitaires, de civils.
Aujourd’hui, les responsables politiques doivent faire face à une double menace : la surenchère de mouvances terroristes plurielles ; l’embrigadement via internet d’individus rêvant de « faire leurs classes », si je puis utiliser cette expression, dans des camps d’entraînement au Pakistan, au Yémen ou en Syrie.
Les cartes ont changé. Il ne s’agit plus seulement de nébuleuses clairement identifiables telles Al-Qaïda ou AQMI au Sahel. Il y a désormais l’émergence de sectes comme Boko Haram en Afrique de l’Ouest. Et aujourd’hui, nous sommes face à Daech, dont les ramifications se situent en Syrie – j’y reviendrai.
Plus grave, ces organisations sectaires se voient talonnées par d’autres réseaux, tout aussi criminels et organisés. Ces derniers trouvent des soutiens opportunistes, au sein de telle ou telle tribu ou de telle ou telle communauté.
Depuis la mort de Ben Laden, ces groupuscules sont en rivalité permanente. Ils sont en quête de reconnaissance sur la scène internationale. Tous considèrent que leur barbarie est un gage de leur crédibilité politique et tous jouent de leur médiatisation.
Toutefois, je veux rappeler ici que le fléau du terrorisme, quelle que soit l’appartenance de ses acteurs, trouve ses origines d’abord dans la déliquescence des structures étatiques. Si ces factions contrôlent des régions entières du monde, c’est parce que des États se sont effondrés. Nous l’avons vu au Mali. Ces structures sont à la tête de trafics de drogues, d’armes et d’êtres humains qui ne connaissent pas de frontières.
Pour l’Irak, il faut comprendre et se souvenir que les Irakiens n’ont jamais cessé, depuis dix ans, de vivre sous la terreur. Combien d’attentats, combien de morts à Bagdad depuis 2003 ? Le retrait des troupes américaines n’a strictement rien changé.
Il faut le dire clairement : l’État islamique d’Irak et du Levant est né des cendres de la deuxième guerre d’Irak – la communauté internationale s’est détournée de ce pays – tout comme les membres de Daech sont légitimés par les trois années de guerre en Syrie, où Bachar Al-Assad continue de sacrifier la population, alors même que, il y a quelques années, lui-même n’avait pas combattu ces terroristes avec autant d’énergie....
Il y a un an, dans ce même hémicycle, il était question d’intervenir en Syrie contre un dictateur usant d’armes chimiques contre son peuple. Aujourd’hui, force est de constater que la France doit combattre le même ennemi que Bachar Al-Assad...
Dans cette redistribution géopolitique totale au Moyen-Orient, ni les interventions de la France ni celles des États-Unis ou des Britanniques n’aboutiront sans une clarification des positions des puissances régionales.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. C’est vrai !
M. André Trillard. De la même façon, il importe de comprendre que les luttes entre les différentes obédiences religieuses au sein du monde musulman sont plus que déterminantes.
Partant de là, monsieur le ministre, plusieurs questions essentielles se posent.
Que pouvez-vous nous dire de l’implication de la Jordanie, de l’Arabie saoudite, du Qatar, du Bahreïn, à l’heure où les États-Unis ont mené une offensive en Syrie ?
Lors de votre audition conjointe par les commissions concernées de nos deux assemblées, la semaine dernière, vous avez déclaré que la France resterait libre de ses décisions stratégiques. Qu’en est-il en cet instant ? Qu’en est-il de la livraison d’armes aux rebelles syriens d’hier, potentiels ennemis d’aujourd’hui ?
Est-il besoin, en effet, de souligner que nous devons rester très vigilants quant aux futurs équilibres dans la région ? Rappelons que nous livrons des armes également aux Kurdes. Nous savons bien que, à terme l’unité de l’Irak pourra être menacée.
Rappelons que, lors de la deuxième guerre d’Irak, le président Chirac avait marqué sa différence avec la politique de l’administration Bush,…
M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. Mais pas Sarkozy !
M. André Trillard. … qui souhaitait une nouvelle carte géopolitique de la région. Il s’était opposé à cette guerre et avait refusé d’y entraîner la France. C’est tout à la fois inspirée de ce message d’indépendance de l’époque et animée de cette volonté de paix à long terme pour la région que la France doit agir aujourd’hui.
Dans ce contexte, il importe que notre pays engage un dialogue sincère et exhaustif avec la Turquie, très sensible à la question du Kurdistan. Ce pays connaît, lui aussi, les affres du terrorisme. Par ailleurs, il doit gérer l’afflux de milliers de réfugiés syriens qui fuient le régime de Bachar Al-Assad, mais parmi lesquels peuvent se cacher des membres de groupuscules terroristes.
L’Europe doit aussi se préoccuper des problèmes des réfugiés en Turquie. Nous l’avons vu hier soir avec cette grave affaire des djihadistes français qui transitent aussi par la Turquie. Nous aurons l’occasion de réinterroger le Gouvernement à ce sujet.
À la lumière de ces nouveaux transits, qui mêlent réfugiés entrants et djihadistes en partance, l’Union européenne doit rapidement reconsidérer sa politique des frontières. L’espace Schengen a été créé en temps de paix. La guerre contre le terrorisme est une bataille de longue haleine. Il faut que les Européens s’adaptent à cette nouvelle situation. Les pays européens doivent, ensemble, réexaminer la pertinence des accords de Schengen dans cette situation de terrorisme dirigée contre la communauté européenne, notamment à l’encontre de ceux qui participent à la lutte contre l’Europe.
Si nous soutenons le Gouvernement sur le principe d’intervention de nos forces aériennes en Irak, je voudrais rappeler qu’aucune politique de défense ne pourra se substituer à la mise en place d’une diplomatie globale au Moyen-Orient, que ce soit dans la résolution des conflits entre la Palestine et en Israël – ce conflit dure depuis l’année de ma naissance –, ou en Syrie, en Libye et en Irak.
Par ailleurs, plus que jamais, la France a besoin d’être rassemblée et unie dans cette épreuve. Notre première réponse aux menaces est l’unité nationale. Aussi, ne comptez pas sur nous pour attiser les polémiques : la France n’en souffre que déjà trop.
M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. Très bien !
M. André Trillard. Toutefois, monsieur le ministre, il ne s’agit pas de donner un blanc-seing. C’est animés de ce même esprit de responsabilité que nous vous invitons vivement à reconsidérer de toute urgence les crédits consacrés à nos armées, en particulier ceux qui sont dédiés aux OPEX, les opérations extérieures.
Certes, il y a les financements interministériels. Toutefois, nul n’est dupe : ceux-ci ne suffiront pas, d’autant plus qu’ils ont déjà partiellement servi à financer d’autres OPEX. Nous nous étions exprimés sur ce point lors de l’examen de la loi de la programmation militaire, la LPM.
M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. Et nous continuerons !
M. André Trillard. Nous vous avions alors tous alertés sur la sous-budgétisation des OPEX. C’est d’autant plus vrai que les recettes exceptionnelles ne sont pas toutes au rendez-vous…
Cet après-midi, nous l’avons dit, s’il s’agit pour la représentation nationale de faire preuve de responsabilité, il s’agit aussi de témoigner notre respect à l’endroit de nos soldats. Leur professionnalisme, leur dévouement et leur endurance sont l’honneur de la France et de nos forces armées. Or nous savons bien qu’ils ne bénéficient pas toujours des meilleures conditions pour leur sécurité et que leur moral est quelque peu atteint.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées avait abordé ce sujet notamment au moment du retour de nos collègues de République centrafricaine. Christian Cambon vous avait également interrogé sur ce point, monsieur le ministre, lors d’une séance de questions d’actualité au Gouvernement.
Au nom de la France, le Président de la République a répondu à l’appel à l’aide du gouvernement irakien. À ce stade, monsieur le ministre, vous nous l’avez confirmé la semaine dernière, il ne serait question que d’opérations aériennes.
Quoi qu’il en soit, dans cette guerre, il nous faut des alliés impliqués. À cet égard, nous ne pouvons que nous réjouir de la réaction et de l’implication de l’Algérie, qui lutte avec ses alliés fermement contre les djihadistes. Néanmoins, et je ne suis pas le seul à le dire, le Président de la République doit aussi, de toute urgence, réussir à mobiliser nos partenaires européens et les exhorter à voir la réalité du monde.
Être européen, ce n’est pas seulement répondre à des critères d’endettement. (M. Christian Cointat s’esclaffe.) Certes, ce point est primordial, mais, quand il y va de la sécurité de l’Europe et du monde, l’agenda européen ne peut se cantonner à des questions de déficits ou de croissance. La France est consciente qu’elle doit respecter ses engagements économiques, mais il faut que nos autres partenaires respectent aussi les leurs en matière de sécurité et de défense.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. André Trillard. Avec les seuls Britanniques, notre pays ne peut assurer la défense des vingt-huit États membres de l’Union européenne !
M. Christian Cointat. Absolument !
M. André Trillard. Monsieur le ministre, ainsi que je l’ai dit précédemment, le soutien de tous nos concitoyens à l’engagement dont notre pays a fait le choix est essentiel, et la première des réponses aux menaces que nous devons éradiquer est l’unité nationale.
Ce soutien et cette unité, il vous appartient de les obtenir : ils dépendront de la clarté des réponses que vous apporterez aux questions que les Français se posent légitimement et que la représentation nationale relaie dans cette enceinte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour le groupe UDI-UC.
M. Philippe Marini. Bravo !
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après la Libye, le Mali et la Centrafrique, la France est une nouvelle fois appelée à assumer ses responsabilités sur la scène militaire internationale.
Je tiens à le dire d’entrée de jeu, monsieur le ministre, l’ensemble des membres du groupe UDI-UC soutient cette intervention française en Irak, et nos premières pensées vont à nos soldats et nos pilotes, qui sont d’ores et déjà engagés dans l’espace aérien irakien, ainsi qu’à leurs familles. Je dirai que nous sommes au garde-à-vous pour soutenir nos armées, quand elles sont en mission extérieure !
M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. Très bien !
M. Yves Pozzo di Borgo. Toutefois, nous ne pouvons pas nous en tenir là. Le pathos de la guerre nous fait trop souvent perdre de vue les motifs et les objectifs de celle-ci.
Ce nouveau conflit doit être lu, tout d’abord, au travers du prisme plus large de la prolifération d’une nouvelle génération de terroristes dans l’ensemble de l’aire arabo-musulmane et musulmane, avant de pouvoir mesurer les implications opérationnelles concrètes de notre intervention en Irak.
L’État islamique est un cancer géopolitique né de l’échec de l’intervention américaine en Irak, ainsi que de l’incapacité du président Bachar Al-Assad de permettre une vie démocratique dans son pays et de l’impuissance de la scène internationale à résoudre la guerre civile syrienne qui s’est ensuivie et qui sévit depuis 2011.
L’État islamique, à cheval sur les confins de la Syrie et de l’Irak, constitue une menace sérieuse pour la sécurité et la paix internationale. Ce « califat » autoproclamé a des ambitions territoriales larges, des ressources importantes, un armement solide et de nombreux soutiens parmi les tribus sunnites et les anciens officiers de Saddam Hussein.
Lors de la séance des questions d’actualité du 19 juin dernier, j’avais déjà alerté le Gouvernement sur la gravité de cette situation : je m’étais alors ému du sort réservé aux chrétiens d’Orient. Les yazidis, notamment, ont été victimes de terribles exactions à mesure qu’avançaient les troupes de l’État islamique. L’opinion publique n’était pas sensibilisée à cette question. Depuis lors, elle en a pris conscience.
À cet égard, je me félicite de l’action du Gouvernement, de celle du maire de Sarcelles qui a reçu l’archevêque de Kirkouk dimanche dernier ou de celle de la mairie du VIIe arrondissement de Paris, qui consacre la journée d’aujourd’hui aux chrétiens d’Orient.
La prise de Mossoul par les djihadistes le 9 juin dernier a montré que la démocratie irakienne demeure trop faible pour contenir le péril intégriste. C’est à l’heure actuelle le problème endémique du monde arabo-musulman : les dictatures sont remises en cause ou ont été fragilisées par les printemps arabes, mais la démocratie demeure trop faible pour s’imposer avec vigueur. Le djihadisme s’immisce dans cette faille, en véhiculant un imaginaire héroïque de reconstitution de l’oumma la plus large qui soit.
Dès lors, nous ne pouvons pas considérer l’actuelle intervention irakienne comme un cas isolé. Le problème réel est beaucoup plus large. Le djihadisme est une menace globale, et l’État islamique n’en est que l’un des avatars.
Ce cancer géopolitique empoisonne une situation internationale déjà particulièrement tendue avec la guerre civile syrienne et les tensions endémiques du Liban, tout en menaçant la Palestine, la Jordanie, mais aussi la Turquie.
Ce califat terroriste, qui est au califat historique ce que la caricature est à son modèle, n’est pas un cas isolé. Boko Haram, dans le nord du Nigéria, s’est également érigé comme tel. L’Afrique est donc également touchée, tout comme l’Algérie. La spécificité du péril que nous fait courir Daech tient à la fois à sa proximité géographique, dans l’immédiat voisinage de l’Europe, et à ses activistes.
Une nouvelle génération de djihadistes émerge. Vous avez cité des chiffres, monsieur le ministre : près d’un millier de nos concitoyens seraient sur place. Certains spécialistes parlent du double, voire du triple. Ils sont partout. Au Kazakhstan, dont le peuple est composé de musulmans modérés, ils sont trois cents.
Nous ne pouvons donc tolérer qu’un sanctuaire djihadiste se constitue à quelques heures d’avion de l’Europe. Notre continent est bien trop vulnérable. Aucun État européen n’a de solution définitive pour contrer la folie meurtrière de djihadistes isolés. Nos propres concitoyens à l’étranger sont désormais menacés.
Depuis 1991 et l’opération « Tempête du désert », presque toutes les grandes opérations extérieures internationales ont eu lieu dans des pays arabes riches en pétrole. Le raccourci est simpliste. Il n’échappe pas nécessairement à une analyse historique détaillée, mais c’est ainsi que l’Histoire récente est lue par les grands pays musulmans du monde.
Or le problème n’est ni strictement occidental ni strictement oriental. En effet, le terrorisme islamiste a été traité pendant longtemps comme un strict problème sécuritaire. C’était le cas pour les Américains avant l’attentat du 11 septembre 2001 contre les tours du World Trade Center. Cet attentat a montré aux Américains et au monde que c’était non pas un problème terroriste, mais un problème politique mondial.
Il semble d’ailleurs, au regard des documents découverts en mai 2011 dans la cache de Ben Laden, que celui-ci concevait le djihadisme comme un projet politique global. Quand nous lisons ces documents, on se demande si Ben Laden n’était pas à la fois Marx et Lénine, un penseur et un organisateur ! Il semblerait que, malgré l’affaiblissement d’Al-Qaïda, remplacé par les islamistes de Daech, la diffusion de son idéologie guerrière bouscule le monde arabe, mais aussi le monde musulman dans son ensemble.
Le cancer djihadiste s’étend partout et frappe tout le monde. L’interventionnisme occidental suscite ainsi des réactions épidermiques sur l’ensemble du continent eurasiatique. Gardons-nous de jouer une fois de plus la mélodie du fardeau de l’homme blanc : la question djihadiste n’est pas un problème seulement occidental ; elle est devenue un phénomène global, dont les répercussions sont mondiales.
Nous balayons une zone grise et une autre apparaît immédiatement après. Nous sommes intervenus en Afghanistan pour couper les racines d’Al-Qaïda et du régime taliban qui la soutenait. Nous sommes intervenus en Libye et nous avons déstabilisé la région. Nous sommes intervenus au Mali pour les mêmes raisons, et voilà qu’un nouveau sanctuaire terroriste émerge à la frontière de la Syrie et de l’Irak.
À force d’éparpiller les djihadistes, nous prenons le risque qu’ils se regroupent à l’avenir dans d’autres pays de l’aire arabo-musulmane ou musulmane, ou même de l’Asie, notamment centrale, où se trouveraient déjà plusieurs centaines de djihadistes, mais aussi des talibans. L’Asie centrale, où j’étais récemment avec notre collègue André Dulait, craint vraiment le départ des alliés de l’Afghanistan, car elle redoute que l’ensemble de cette région ne soit déstabilisé par les talibans.
La déstabilisation de ces États serait un véritable drame. Toutefois, quelles solutions politiques pouvons-nous apporter ? Le président du Tadjikistan, en septembre dernier, devant André Dulait, Michel Boutant et moi-même, s’était ému de constater que l’essentiel des interventions extérieures de l’ONU avait pour théâtre d’opérations des pays musulmans. Là encore, prenons garde de ne pas jouer l’Occident contre l’Orient. Des solutions politiques au défi idéologique posé par le djihadisme doivent être formulées par les pays musulmans eux-mêmes. Ainsi le Kazakhstan, où se trouvent – je le rappelle – plus de 300 djihadistes, accueillera, en 2015, un grand congrès religieux de l’ensemble du monde musulman modéré, du Maroc à l’Indonésie.
Tous les pays musulmans se regroupent et réfléchissent aux solutions structurelles à apporter au développement du califat. Voilà une solution à l’équation fondamentale qui nous est posée : quelles institutions peuvent parvenir à endiguer la prolifération du djihadisme et comment la démocratie peut-elle s’imposer dans l’aire arabo-musulmane comme un modèle alternatif à la dictature ou au terrorisme ?
D’importantes questions se posent du point de vue de la légalité internationale.
L’appel lancé par le gouvernement irakien nous autorise, dans le cadre défini par l’article 51 de la Charte des Nations unies, à employer la force contre l’État islamique, mais dans les seules limites des frontières irakiennes. Cette limite a été rappelée de nombreuses fois tant par le Président de la République, avec raison, que par le ministre des affaires étrangères et du développement international et par vous-même, monsieur le ministre.
Toutefois, la situation est différente du côté américain. Barack Obama n’a jamais caché son intention de mener des frappes sur le sol syrien. La loi américaine – supérieure à la loi internationale… – autorise l’emploi de la force contre toute forme de terrorisme islamiste. Or, pour certains, en l’absence de demande expresse du gouvernement de Bachar Al-Assad, une telle intervention n’est légale que si elle est justifiée par la légitime défense.
Des frappes américaines, Bachar Al-Assad a déclaré avoir été mis au courant par les autorités américaines, lesquelles prétendent que l’information a circulé entre ambassadeurs de l’ONU. Monsieur le ministre, j’espère que vous nous éclairerez sur ce point. En effet, si ce que l’on peut lire dans les dépêches est vrai, le régime de Bachar Al-Assad bénéficierait d’une reconnaissance de fait !
Les Russes crient au non-respect du droit international – ils en sont spécialistes… –, tout comme l’Iran. Le risque d’escalade est-il bien exclu ? Les périmètres de notre intervention ne seront-ils pas remis en question par ces frappes américaines en Syrie ? Notre intervention pose donc inévitablement la question de notre position sur le dossier syrien. Selon des spécialistes, l’armée syrienne serait la seule en capacité d’agir au sol contre les troupes de l’État islamique.
Monsieur le ministre, devrons-nous, malgré nos déclarations péremptoires, nous résigner à réintégrer progressivement l’actuel gouvernement syrien dans le règlement de la crise provoquée par Daech, même sans évolutions de la transition politique en Syrie, évolutions que nous soutenons, avec raison ? Les discours doivent parfois céder devant les réalités. Je vous remercie de me répondre sur ce point.
Ma deuxième question porte sur la forme de la coalition : comment se fait-il qu’une crise avec une telle empreinte régionale et des répercussions potentiellement aussi larges ne permette pas un regroupement des puissances les plus directement menacées par la prolifération d’un sanctuaire terroriste transfrontalier ? Je regrette ainsi l’absence au sein de cette coalition de deux puissances régionales majeures : la Russie et l’Iran.
La Russie dispose d’une expertise en matière de lutte contre le djihadisme. De plus, elle connaît très bien l’aire géographique concernée, du fait de ses relations anciennes avec la Syrie et l’Iran. Je pense qu’elle nous aurait été d’un grand secours dans la lutte contre l’État islamique, mais l’impasse dans laquelle elle s’est enfermée sur le dossier ukrainien l’isole. Pour preuve, je vous rappelle que l’affaire ukrainienne nous a conduits à suspendre le programme SCANDEX - détection de terrorisme dans la foule – de coopération dans la lutte contre le terrorisme entre la France et la Russie, décision forte s’il en est ! À cet égard, j’espère qu’un règlement rapide de la situation ukrainienne nous permettra de revoir le rôle de la Russie dans la coalition contre Daech.
Ne faut-il pas aussi regretter l’absence de l’Iran dans cette coalition ? Selon ma collègue Nathalie Goulet, qui a attiré mon attention sur ce point, ce pays aurait un rôle incontestable à jouer dans l’équilibre de cette région. L’État islamique représente, en effet, une menace pour l’arc chiite, pour le Hezbollah au Liban et pour l’armée irakienne, essentiellement chiite. La coalition doit, même sur un plan symbolique, marquer l’opposition de l’ensemble du monde musulman au cancer djihadiste. Elle devrait réunir sunnites et chiites au sein d’un projet commun.
M. Christian Cointat. Tout à fait !