Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Comme dans le débat que nous avons eu avec Daniel Dubois, se pose la question de la gouvernance de ces organismes.
Faisons confiance aux élus ! Si la « supra-communalité » ou la « supra-intercommunalité » a pour conséquence d’imposer aux maires des petits villages ce qu’ils doivent faire, il n’y aura plus de maire dans ces communes.
Rappelez-vous l’excellent travail réalisé par le Sénat sur le PLUI. Si nous avions laissé faire l’Assemblée nationale, le plan local d’urbanisme intercommunal serait obligatoire et les petites communes n’auraient plus qu’à suivre. Il faut en effet tenir compte de la réalité de chaque commune. Le compromis trouvé par le Sénat, qui consistait à affirmer la nécessité de mettre en place des PLUI sans empêcher les communes de donner leur avis, est tout à son honneur. Le dispositif a d’ailleurs été accepté par le Gouvernement et adopté en commission mixte paritaire.
Le problème des PAEN est identique : faisons-nous confiance ! Lors de l’examen de l’amendement n° 26 rectifié, le Sénat a considéré que l’échelon pertinent était l’EPCI. Or les EPCI sont déjà grands aujourd’hui, madame Primas. Depuis la loi Sarkozy-Fillon, il n’existe plus d’EPCI de moins de 5 000 habitants, sauf en zone géographique spéciale, comme en zone de montagne. Dans nos territoires ruraux, un EPCI de plus de 5 000 habitants regroupe quarante à soixante communes. Voilà la réalité !
Comme le PLUI, comme le SCOT, le PAEN ne peut pas être imposé par l’exécutif de l’EPCI à toutes les communes, monsieur Labbé. Il faut bien que le maire ait son mot à dire. C'est pourquoi il faut une gouvernance partagée.
Moi, je ne pars pas du principe que les élus s'affrontent forcément sur ces sujets. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à votre amendement. Je souhaite que les communes puissent continuer à donner leur avis. Si on le fait de façon intelligente, dans le cadre d’une gouvernance partagée, on trouvera un compromis.
Pour conclure – je vous prie de m'excuser d’avoir été un peu long –, je dirai qu’il faut faire attention, car la situation territoriale actuelle est en pleine mouvance. Le Premier ministre a en effet annoncé il y a quelques jours un certain nombre de mesures. Veillons à ne pas mettre les élus et les maires dans un corner, en considérant qu’ils n’ont plus voix au chapitre. Ma vision des affaires communales et intercommunales implique que le maire ait encore son mot à dire. Le maire ne sert pas qu’à boucher les trous dans une commune : il a la main sur le PLU, sur la carte communale, sur l’urbanisme !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. L’intercommunalité, ce sont des maires et des élus locaux qui travaillent ensemble. Les PAEN sont des outils mis à leur disposition ; ils ne sont pas obligatoires.
Pour créer un PAEN, il faut que les élus s’assoient autour d’une table et se mettent d’accord. Or il serait dommage qu’une seule commune puisse mettre son veto. Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, rapporteur.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Vous estimez, mon cher collègue, qu’il serait dommage qu’une seule commune puisse mettre son veto à la mise en place d’un PAEN, mais il serait très dommageable qu’une majorité impose à une petite commune ses desiderata. Votre raisonnement peut donc être inversé. Trouvons plutôt un équilibre !
Même si votre amendement part d’un bon sentiment, l’adopter reviendrait à dire aux maires qu’ils n’ont plus de pouvoir dans leur commune. On arrivera peut-être demain à des intercommunalités intégrées, mais, pour ma part, je ne suis pas favorable à une élection au suffrage universel direct des délégués intercommunautaires. Peut-être ce mode de scrutin s'imposera-t-il à Paris, à Lyon, à Marseille ou dans d’autres métropoles, mais si, dans nos territoires, on élit au suffrage universel direct les élus dans les intercommunalités, c'en est fini ! On se trouvera dans une situation de dédoublement des compétences et on ne saura plus qui du maire ou d’un autre élu exerce le pouvoir.
Par conséquent, n’allons pas trop vite. Faisons évoluer notre paysage dans le sens de la modernité, mais préservons notre histoire. Or la base de notre histoire française, c'est la commune !
Mme Sophie Primas. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Je partage entièrement ce qui vient d’être dit. Je voudrais donner un exemple très concret pour répondre à notre collègue Labbé.
Je préside un parc naturel régional qui comprend quarante-cinq communes sur les quarante-neuf initialement définies dans le périmètre de ce parc, qui se situe au nord-ouest des Alpes-Maritimes. Quatre communes n’ont ainsi pas souhaité adhérer au projet. Comme vous le voyez, mon cher collègue, c’est d’une autre ampleur que le sujet dont nous débattons et, derrière, c’est une question de philosophie.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 204 rectifié, présenté par M. Savary, Mmes Boog et Bruguière, MM. Cambon, Cardoux, Cointat et Doligé, Mme Férat, MM. Houel, Huré, Laménie, Lefèvre et Longuet et Mme Masson-Maret, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 36
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- à la première phrase, les mots : « après avis de » sont remplacés par les mots : « en concertation avec » ;
La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. L’extension aux intercommunalités de la faculté d’élaborer des périmètres de protection des espaces agricoles et naturels périurbains, ou PAEN, soulève de fortes réticences de la part des acteurs agricoles, dans la mesure où les EPCI seraient, à l’avenir, dotés de nouvelles prérogatives, notamment d’un droit de préemption et d’expropriation.
Au travers de cet amendement, il s’agit donc de rassurer ces acteurs en leur garantissant une implication des chambres d’agriculture par une véritable concertation, mentionnée expressément dans ce dispositif qui, en l’état actuel, ne prévoit qu’une simple consultation des chambres d’agriculture sur le périmètre envisagé.
Mme la présidente. L'amendement n° 299, présenté par M. César, Mme Lamure, MM. Pointereau, Sido, Hérisson et Houel, Mme Masson-Maret, MM. Billard, Hyest, Couderc et Milon, Mme Mélot et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 36
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- À la première phrase, après le mot : « après », sont insérés les mots : « concertation et » ;
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Certains défendent parfois les chambres, et parfois non… C’est ainsi !
Pour ma part, je crois vraiment que remplacer l’avis des chambres par une concertation, c’est amoindrir leur force. Je défendrai donc l’avis des chambres d’agriculture dans les PAEN.
Dans les PAEN, il n'y a pas d’opposition entre la droite et la gauche, ou entre les écologistes et les autres. Il y a une opposition entre des terres agricoles et des terres qui ont une autre vocation. Au moment où l’on parle beaucoup de déprise agricole, il faut que les chambres d’agriculture puissent donner leur avis, y compris dans les PAEN. Cela permettra des ajustements et des rééquilibrages au cas par cas, par exemple en préservant des terrains pour des jeunes qui s’installent. Conservons donc l’avis des chambres, plutôt que de prévoir une simple concertation.
Si ces deux amendements ne sont pas retirés, j’émettrai donc des avis défavorables.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote.
Mme Françoise Férat. Dans cet hémicycle, on prône le « travailler ensemble ». Or la concertation est bien meilleure pour y parvenir. En l’occurrence, elle permettrait de confronter les avis de chacun pour dégager l’avis de la chambre. Il me semble plus intéressant de mettre ainsi tout le monde autour de la table.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, rapporteur.
M. Didier Guillaume, rapporteur. L’un va avec l’autre ! La concertation aura lieu avant. En effet, si la chambre d’agriculture doit donner un avis, elle sera associée en amont à la concertation. Toutefois, cette dernière ne suffit pas. Lorsque la concertation a eu lieu et que le PAEN se met en place, il est normal que la chambre d’agriculture donne son avis sur l’utilisation des terres agricoles. C’est son rôle.
Je le répète, il est préférable de maintenir la concertation et l’avis, plutôt que de ne conserver que la concertation.
Mme la présidente. Madame Férat, l'amendement n° 204 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Férat. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 204 rectifié est retiré.
Monsieur Pointereau, l'amendement n° 299 est-il maintenu ?
M. Rémy Pointereau. Oui, je le maintiens.
Mme la présidente. L'amendement n° 427 rectifié ter, présenté par MM. Labazée, Daudigny, Mazuir, Lozach, Boutant, Rome, J. Gillot, Krattinger et Miquel, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 432 rectifié ter, présenté par MM. Labazée, Daudigny, Mazuir, Lozach, Boutant, Rome, J. Gillot, Krattinger et Miquel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 40
Insérer sept alinéas ainsi rédigés :
…° Les cinq premiers alinéas de l’article L. 143-3 sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« À l’intérieur du périmètre délimité en application de l’article L. 143-1, les terrains peuvent être acquis en vue de la protection et de la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, dans les conditions suivantes :
« 1º À l'amiable ou par expropriation par le département ou, avec l'accord de celui-ci, par l’État, par une autre collectivité territoriale, un établissement public de coopération intercommunale, un établissement public foncier, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural, ou par le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, l'Agence des espaces verts de la région d'Île-de-France, un parc national ou un parc naturel régional, lorsque ceux-ci sont territorialement compétents ;
« 2° L’adoption du périmètre susvisé confère au département un droit de préemption Espaces agricoles et naturels périurbains dont il est le titulaire.
« Dans le cas où le périmètre délimité en application de l’article L. 143-1 est couvert en tout ou en partie par une zone de préemption au titre des espaces naturels sensibles, la renonciation à préemption du titulaire du droit de préemption s’entendra pour les deux droits.
« En cas d’exercice du droit de préemption, le titulaire du droit de préemption devra préciser la ou les parcelles qu’il acquière au titre des espaces agricoles et naturels périurbains et celles qu’il acquière au titre des espaces naturels sensibles.
« Ce droit peut être délégué, par le département, à l’État, à une autre collectivité territoriale, à un établissement public de coopération intercommunale, à un établissement public foncier, à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural ou au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, à l'Agence des espaces verts de la région d'Ile-de-France, un parc national ou un parc naturel régional, lorsque ceux-ci sont territorialement compétents. Cette délégation peut porter sur une ou plusieurs parties du périmètre d’intervention ou être accordée à l'occasion de l'aliénation d'un bien. » ;
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 268, présenté par M. Patriat, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 40
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° A la première phrase du 1° de l’article L. 143-3, les mots : « , à l’amiable ou par expropriation » sont supprimés ;
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 433 rectifié ter, présenté par MM. Labazée, Daudigny, Mazuir, Boutant, Lozach, Rome, J. Gillot, Krattinger et Miquel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 40
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la première phrase du sixième alinéa de l’article L. 143-3, les mots : « de la collectivité territoriale ou de l’établissement public qui les a acquis » sont remplacés par les mots : « de la personne morale, qui les acquit, à l’exception du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres qui conformément à ces statuts propres les intègre dans son domaine public » ;
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 434 rectifié ter, présenté par MM. Labazée, Daudigny, Mazuir, Boutant, Lozach, Rome, J. Gillot, Krattinger et Miquel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 40
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au dernier alinéa de l’article L. 143-3, les mots : « prévu par le 9° de l’article L. 143-2 du code rural et de la pêche maritime » sont remplacés par les mots : « en application du présent chapitre » ;
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons bien travaillé, puisque nous avons examiné 210 amendements au cours de la journée.
Il en reste 466 à examiner sur ce texte.
7
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, samedi 12 avril 2014, à neuf heures trente-cinq et à quatorze heures trente :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (n° 279, 2013-2014) ;
Rapport de MM. Didier Guillaume et Philippe Leroy, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 386, tomes I et II, 2013-2014) ;
Texte de la commission (n° 387 rectifié, 2013-2014) ;
Avis de Mme Brigitte Gonthier-Maurin, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 344, 2013-2014) ;
Avis de M. Pierre Camani, fait au nom de la commission du développement durable (n° 373, 2013-2014).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 12 avril 2014, à zéro heure trente-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART