M. le président. L'amendement n° A-10 rectifié est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2, tableau
Rédiger ainsi ce tableau :
II. – État A
1° Ligne 1760
Remplacer le montant :
3 918 000
par le montant :
4 018 000
2° Ligne 3120
Remplacer le montant :
31 698 000
par le montant :
31 798 000
La parole est à M. le ministre, pour présenter ces différents amendements.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, s’agissant des modifications relatives à l’article 2 tel que celui-ci résulte de l’amendement n°I-1 de votre commission des finances, le Gouvernement vous demande d’abord de revenir au taux de 3 % initialement prévu pour le plafonnement de la cotisation en fonction de la valeur ajoutée, au lieu du taux de 3,5 % que vous avez adopté en première délibération.
Il s’agit là d’un élément essentiel de la réforme de l’imposition locale des entreprises, l’abaissement du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée étant indispensable pour alléger la charge pesant sur les entreprises actuellement plafonnées, qui sont les plus lourdement imposées. À défaut, certaines entreprises, pourtant exposées à la concurrence internationale, ne sortiraient pas gagnantes de la réforme, à rebours des objectifs visés par le Gouvernement. II s’agit donc d’une mesure qui concernera au premier chef l’industrie et qui est essentielle à la poursuite de l’objectif économique de la réforme.
Le Gouvernement vous demande ensuite de préciser les modalités de fixation du taux de cotisation foncière des entreprises au titre de l’année 2010, c'est-à-dire le « taux relais ».
Le texte adopté par l’Assemblé nationale supprimait, dès 2010, l’ensemble des dérogations aux règles de liens entre les taux. Le texte que vous avez adopté revient sur ce principe et ne fait que réduire marginalement la portée du principal dispositif de déliaison, celui qui permet d’augmenter le taux de l’impôt des entreprises 1,5 fois plus que les taux des impôts ménages, en ramenant cette proportion à 1,25 fois.
Le Gouvernement ne peut accepter ce retour en arrière. Pour que l’objectif de réduction des charges des entreprises fixé dans le cadre de la réforme soit atteint, il est primordial que le taux de la cotisation foncière des entreprises ne progresse pas plus vite que les taux des impôts ménages.
Le Gouvernement vous propose donc de ne maintenir que les dérogations justifiées par le caractère atypique de certaines situations : dispositifs de rattrapage des taux moyens nationaux, déliaison à la baisse et système dit « de capitalisation » pour les établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, les EPCI à TPU.
En contrepartie, et afin de vous prouver une fois de plus que cette réforme ne doit pas porter atteinte aux finances des collectivités locales, le Gouvernement vous propose de rehausser le montant de la compensation relais qui sera versée aux collectivités en 2010 pour compenser les pertes de taxe professionnelle.
Le texte que vous avez adopté prévoit que cette compensation sera égale, pour chaque collectivité, au plus élevé des deux montants suivants : le produit de la taxe professionnelle pour 2009 ou le produit des bases de la taxe professionnelle pour 2010 par les taux de 2009, dans la limite des taux de 2008 majorés de 0,6 %. Le Gouvernement vous propose de retenir les taux de 2009, dans la limite des taux de 2008 majorés de 1%, et non de 0,6 %.
S’agissant toujours de l’article 2, le Gouvernement vous demande de bien vouloir préciser les modalités d’imposition de deux des composantes de l’IFER, la première relative à la RATP, la seconde aux répartiteurs principaux.
Pour ce qui est de la RATP, nous vous demandons de compléter l’initiative de l’Assemblée nationale, qui consiste à soumettre à l’IFER le matériel utilisé par la RATP. Il s’agit de préciser les caractéristiques de la composante correspondante de l’IFER, dont le produit serait affecté à l’établissement public du Grand Paris, prochainement créé.
Par ailleurs, le Gouvernement vous demande de bien vouloir supprimer la réduction du montant de l’IFER due par les entreprises propriétaires de répartiteurs principaux, égale à 50 % du montant des investissements effectués pour l’amélioration des accès à internet.
Si le Gouvernement partage l’objectif d’amélioration des débits offerts aux usagers en termes d’accès à internet, il y a toutefois lieu de supprimer cette réduction non plafonnée du montant de l’IFER, dans la mesure où elle aurait pour effet de réduire considérablement le produit de ce prélèvement, et donc le revenu correspondant pour les collectivités territoriales.
J’en viens aux modifications relatives à l’article 5, qui instaure la contribution carbone
Le Gouvernement a pris la décision de mettre en place cette contribution carbone afin de donner un prix aux émissions de CO2 et d’encourager les comportements de sobres à cet égard.
Pour être pleinement efficace, cette contribution carbone doit être universelle. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement vous propose de supprimer deux dispositifs d’exonération que vous avez adoptés. D’une part, l’exonération des consommations de charbon des ménages est contraire à l’objectif d’universalité de cette contribution. D’autre part, nous vous demandons de revenir sur le moratoire d’un an de contribution carbone accordé aux réseaux de chaleur, qui entre en contradiction tant avec le principe d’égalité devant l’impôt qu’avec les dispositions de la directive 2003/96/CE restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité.
Ces deux exonérations iraient clairement à l’encontre des objectifs de la contribution carbone, alors que les émissions du secteur résidentiel constituent un enjeu très important pour le respect de nos engagements internationaux. Elles contreviendraient à l’équité fiscale et rompraient le nécessaire équilibre entre le produit de la contribution et le coût du crédit d’impôt.
Le Gouvernement vous demande par ailleurs la suppression de l’article 8 bis B. Issu de l’amendement n° I-443, cet article prévoit l’application du taux réduit de TVA aux opérations d’achat d’aéronefs à propulsion électrique. Une telle mesure est contraire au droit communautaire puisque ces équipements ne figurent pas sur la liste des biens et services éligibles au taux réduit de TVA.
Je vous demande ensuite, mesdames, messieurs les sénateurs, de bien vouloir tirer les conséquences des amendements précédemment adoptés par votre assemblée sur l’article 20, qui récapitule les prélèvements opérés sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales. L’amendement n° A-9 est donc un simple amendement de coordination.
Enfin, je vous demande de traduire dans l’article d’équilibre et dans l’état A annexé l’incidence des modifications intervenues au cours de la seconde délibération.
L’ensemble des amendements qui viennent d’être présentés représentent un coût net de 20 millions d’euros. Cette somme résulte notamment des éléments suivants : le retour à un plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée à 3 % a un coût de 20 millions d’euros en 2010 ; l’augmentation de la compensation aux collectivités territoriales a un coût de 100 millions d’euros ; la suppression de certaines exonérations de contribution carbone se traduit par une majoration des recettes de 100 millions d’euros.
Au total, la seconde délibération conduit à dégrader le solde de 20 millions d’euros. Le déficit de l’État s’établirait ainsi à 117,6 milliards d’euros.
En application de l’article 44 de la Constitution, le Gouvernement souhaite que le Sénat se prononce par un seul vote sur l’ensemble de ces amendements et sur la première partie du projet de loi de finances pour 2010.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Dans la mesure où M. le ministre a fait une présentation globale des amendements du Gouvernement, si vous le voulez bien, monsieur le président, mes chers collègues, je procéderai selon la même méthode pour vous faire part de l’avis de la commission.
M. le président. Je pense que nul n’y verra un inconvénient, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Merci, monsieur le président.
Nous voici donc dans l’exercice usuel de la seconde délibération. Il arrive effectivement que, dans le cours de l’examen complexe d’une première partie de loi de finances, des conjonctions momentanées aboutissent à des votes qu’il est ensuite nécessaire de coordonner entre eux. C’est ce à quoi nous invite maintenant le Gouvernement.
En réalité, seuls deux éléments importants me paraissent mériter un réexamen : d’abord, la déliaison des taux des impôts locaux, et nous avions bien perçu, au cours du débat avec Mme la ministre de l’économie, qu’il s’agissait d’une question très sensible ; ensuite, le niveau de départ de la compensation relais, dont les élus locaux sont également très soucieux.
Le Gouvernement nous conseille vivement, dirai-je, de corréler ces deux aspects, d’un côté, en revenant partiellement sur notre vote concernant les dispositifs de déliaison des taux, et, de l’autre, en prenant pour base à la compensation relais l’assiette de 2010, multipliée par les taux de 2009, dans la limite du taux de 2008 majoré de 1 %. Cela représente un coût pour l’État de 240 millions d’euros et, corrélativement, une recette de 240 millions d’euros pour les collectivités territoriales. Mais tout cela fera ensuite l’objet des réexamens auxquels nous nous livrerons lors de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances, et du résultat desquels nous ne pouvons pas préjuger.
Ces 240 millions d’euros pour l’ensemble des collectivités territoriales représentent une amélioration des bases qui, comme on le sait, va produire durablement ses effets.
Tel est l’équilibre qui résulte du dialogue qui s’est noué avec le Gouvernement.
Je n’ai qu’un regret : il concerne les réseaux de chauffage urbain. Mais je comprends l’argument européen et l’argument juridique.
Pour tout le reste, cette seconde délibération reste dans des limites tout à fait acceptables (M. le président de la commission des finances acquiesce.) et me conduit à émettre, au nom de la commission des finances, un avis globalement favorable.
Demande de vote unique sur la seconde délibération et l’ensemble de la première partie.
M. le président. En application de l’article 44, dernier alinéa, de la Constitution et de l’article 42, alinéa 7, du règlement, le Gouvernement demande au Sénat de se prononcer par un seul vote sur les articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2010 soumis à seconde délibération dans la rédaction issue des amendements qu’il a déposés et sur la première partie du projet de loi de finances pour 2010.
En conséquence, le vote sur l’ensemble des amendements et des articles faisant l’objet de la seconde délibération est réservé.
Vote sur l’ensemble de la première partie
M. le président. J’indique au Sénat que, compte tenu de l’organisation du débat, décidée par la conférence des présidents, chacun des groupes dispose de cinq minutes pour les explications de vote sur l’ensemble de la première partie, la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2010, je tiens naturellement à remercier la présidence ainsi que l’ensemble des fonctionnaires du service de la séance et des services des comptes rendus.
Je veux également saluer le rapporteur général, Philippe Marini, pour son talent, sa méthode toute cartésienne et son sens pédagogique. Il a su animer nos débats dans des conditions qui étaient souvent difficiles, les éclairer, exprimer avec objectivité les avis de la commission des finances et, lorsque sa conviction personnelle restait quelque peu en deçà de son propos, puiser dans la raison et le sens de la solidarité les arguments permettant de faire aboutir le débat.
Madame la ministre, monsieur le ministre, soyez remerciés pour votre disponibilité, pour la qualité de votre écoute au cours de ces débats qui auront été, cette année, exceptionnellement longs puisque nous siégeons depuis vendredi après-midi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Nous étions là dès jeudi !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il est vrai que la discussion générale a débuté le jeudi 19 novembre. Quoi qu'il en soit, après avoir abordé les articles de la première partie le vendredi après-midi, nous avons siégé le vendredi soir et le samedi toute la journée, ce qui était une première. Nous avons même failli travailler le dimanche !
Depuis lundi, vous avez été constamment présents, et je veux associer à ces remerciements l’ensemble de vos collaborateurs, aussi bien les membres de vos cabinets que les services de Bercy. C’est peu dire que, dans cette réforme portant suppression de la taxe professionnelle et institution d’une contribution économique territoriale, nous avons senti tout le poids et toute l’expertise de Bercy. (Sourires.)
J’adresse également mes remerciements à M. Hervé Novelli, qui est venu tout exprès lundi soir vous appuyer lorsque nous avons examiné les amendements de notre collègue Jean-Jacques Jégou qui tendaient à revenir sur l’application du taux réduit de TVA à la restauration. Ce grand moment de débat nous a donné l’occasion d’adresser un coup de semonce à une profession qui est désormais consciente de la précarité de nos finances publiques. Il semble que cela ait provoqué quelques perturbations lors du congrès de la profession hôtelière, qui se tenait le lendemain.
Parmi les dispositions que nous avons examinées, deux mesures nous ont particulièrement mobilisés : la suppression de la taxe professionnelle et son remplacement par la contribution économique territoriale, d’une part, l’institution de la taxe carbone, que nous avons transformée en contribution carbone, d’autre part.
Ces deux exercices s’annonçaient particulièrement délicats.
Le premier a été accompli grâce aux efforts de chacun pour commencer de faire refluer le poids des impôts sur la production, qui encourage les délocalisations d’activités et d’emplois. Chacun a reconnu la nécessité d’alléger le poids de ces impôts sur la production, dont fait partie la taxe professionnelle.
Cette réforme est un premier pas dans la bonne direction, mais, à titre personnel, je reste convaincu que nous aurons à nous prononcer de nouveau sur les cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises, car elles restent une scorie qui peut être analysée comme un facteur de délocalisation éventuelle.
Dans le cadre de cette réforme, nous avons fait la moitié du chemin, car nous avons voté les dispositions qui s’appliqueront au 1er janvier prochain, reportant dans les articles non rattachés de la seconde partie l’ensemble des dispositions qui s’appliqueront en 2011.
Pour que le débat sur les ressources des collectivités territoriales soit aussi riche et serein que possible, j’ai demandé à la conférence des présidents qui s’est tenue ce soir que le Sénat puisse se réunir dès le samedi 5 décembre, l’après-midi et le soir, et éventuellement le dimanche, car la commission des finances vous proposera une réécriture destinée à pallier les lacunes du texte tel qu’il est actuellement rédigé. Nous aurons en effet besoin de temps pour que le débat réponde aux attentes de chacun d’entre nous ? Nous devrons nous donner collectivement rendez-vous dans le courant de l’année 2010 et, à l’occasion de cette clause de revoyure, il nous faudra disposer des simulations, des évaluations nous permettant de stabiliser le dispositif et d’assumer la plénitude de nos prérogatives.
L’examen des articles de la première partie est un exercice toujours passionnant et stimulant. On revoit chaque année l’ajustement de la fiscalité sur les déchets et la taxe générale sur les activités polluantes. C’est aussi un rendez-vous traditionnel sur la fiscalité de la publicité à la télévision. Sont également récurrentes les interventions qui visent à remettre en cause certaines dispositions de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat. Chaque année, nous revenons notamment sur le dispositif de l’ISF ou sur le bouclier fiscal.
À cet égard, nous aurons l’occasion de nous prononcer sur la trilogie qui nous tient à cœur lors de l’examen des articles non rattachés de la seconde partie.
Le débat sur l’impact des normes a également constitué un grand moment. Peut-être les présidents de groupe prendront-ils ensemble l’initiative de demander qu’un débat spécifique ait lieu au Sénat sur ce sujet, pour qu’on cesse enfin de mettre en accusation les collectivités territoriales lorsque l’explosion de certaines de leurs dépenses n’est que la conséquence des normes auxquelles elles doivent se plier.
La seconde délibération est un exercice rituel, le rapporteur général l’a rappelé. C’est en quelque sorte le coup de Kärcher donné par le Gouvernement sur les débats de la première partie. (Sourires.)
Le déficit prévisionnel qui va résulter de l’article d’équilibre progresse de 1,5 milliard d’euros, mais, pour l’essentiel, il s’agit de dépenses qui profiteront aux collectivités territoriales, tout spécialement aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale.
Mes chers collègues, dans quelques heures, après un bref repos, nous allons entamer l’examen des missions. Je ne doute pas qu’une fois encore le Sénat contribuera à renforcer l’efficacité des dépenses publiques.
Je remercie tous les collègues – ils ont été nombreux – qui ont participé aux débats sur les articles de cette première partie. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais à mon tour remercier l’ensemble des participants à cette discussion sur la première partie du projet de loi de finances.
D’abord, je veux dire au président Jean Arthuis tout le plaisir que j’ai pris à continuer de travailler avec lui et à retrouver chaque année l’ambiance et les conditions si particulières de la discussion budgétaire, qui donne une impression de jouvence perpétuelle ! (Sourires.) Car, contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’examen du budget d’une année n’est jamais semblable à celui des années précédentes.
Cette fois-ci, nous avons adopté une méthode nouvelle, qui fait appel au talent et à la participation de chacun. Elle permet de tirer le meilleur parti des compétences et de l’expertise aussi bien du Parlement que de l’exécutif.
Je remercie à nouveau le président Arthuis pour l’aide qu’il n’a cessé de m’apporter et pour la manière dont il a animé nos débats en commission. Dès demain matin, nous poursuivrons sur la voie de l’innovation en organisant un débat d’orientation sur les finances locales. Le sujet est tellement sensible, comporte tant de contradictions internes que nous allons nous efforcer, en commission, d’analyser à fond les choix envisageables, de nous assurer du bien-fondé de nos positions, avant de venir les soutenir ici, en séance publique.
Bien que les sujets traités soient quelquefois ardus, je voudrais souligner tout le plaisir que j’ai eu à travailler avec le « couple de Bercy ». (Sourires.) Les ministres des recettes et des dépenses sont solidaires et complémentaires, tous deux ministres de l’équilibre.
Madame la ministre, monsieur le ministre, vous avez toujours respecté l’expression des parlementaires, sans pour autant vous départir jamais de la pointe d’humour indispensable pour conserver une certaine distance par rapport à l’instant immédiatement présent et créer un climat propice à l’avancement d’une discussion aussi difficile que la nôtre.
Naturellement, rien n’aurait été possible sans nos collaborateurs respectifs, à qui nous demandons beaucoup. La discussion budgétaire nous donne l’occasion d’apprendre à nous connaître, même si les échanges sont parfois tendus. Je souligne, à ce titre, la qualité remarquable des équipes de Bercy, qui font partie des meilleures administrations de notre pays. L’intelligence dont elles font preuve s’oppose parfois au bon sens de terrain que nous nous efforçons d’exprimer…
Je remercie enfin la présidence et l’ensemble des personnels de la séance.
Je voudrais maintenant récapituler brièvement les mesures que nous avons adoptées.
En ce qui concerne la réforme de la fiscalité locale, nous sommes au milieu du gué : nous sommes heureux d’avoir franchi les fondrières qui pouvaient nous sembler menaçantes, mais d’autres sont encore devant nous.
M. François Marc. Là, ce sont les grandes eaux !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous nous attacherons à exercer, là encore, un pilotage aussi précis que possible.
Le Sénat a précisé les modalités de « territorialisation » de la valeur ajoutée des entreprises disposant de plusieurs établissements. Il a donné un sens au barème de la cotisation sur la valeur ajoutée – c’est là un sujet à propos duquel je ne partage pas complètement la vision du président Arthuis, mais nos désaccords nous rendent aussi complémentaires ! – en prévoyant que toutes les entreprises réalisant plus de 500 000 euros de chiffre d’affaires en seraient redevables, avec une cotisation minimale de 250 euros.
Nous avons confirmé le principe du maintien du droit existant en matière d’exonérations, notamment en rétablissant le droit actuel applicable aux distributeurs de fils ou aux artisans et en maintenant les dispositifs qui concernent l’aménagement du territoire.
Le Sénat a resserré le dispositif « anti-abus ». Nous avons réduit la perte de compétitivité des entreprises titulaires de bénéfices non commerciaux employant moins de cinq salariés, en faisant passer de 6 % à 5,5 % la fraction des recettes qui sert de base à la cotisation foncière des entreprises.
Nous avons préservé l’assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties en concentrant sur la cotisation foncière des entreprises l’abattement sur les bases du foncier industriel.
Nous avons modifié et réorganisé l’IFER, notamment en relevant de 2,2 euros à 8 euros par kilowatt de puissance installée le tarif applicable aux éoliennes terrestres. Il reste à parfaire, en trouvant, si j’ose dire, la bonne rotation, le mécanisme d’affectation du produit de cette taxe.
M. Albéric de Montgolfier. Le sens du vent !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Voilà !
La compensation relais des EPCI à fiscalité propre, dont le périmètre serait modifié en 2010, a été l’un des points soumis à la seconde délibération : nous en avons modifié le mode de calcul, ce qui est de nature à satisfaire notre excellent collègue Denis Badré.
Le Sénat est finalement parvenu à conserver la transposition à la cotisation foncière des entreprises des dispositifs de déliaison applicables à la taxe professionnelle ; au moins le principe a été réaffirmé.
Il a maintenu, pour l’année 2010 uniquement, le mode actuel de fonctionnement des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle.
Il a également adopté de nouvelles règles pour le calcul des taxes spéciales d’équipement.
Le Sénat a veillé à préserver raisonnablement les ressources des chambres de commerce et d’industrie grâce à l’adoption d’un amendement de notre collègue Eric Doligé, qui a introduit un système intelligent de modulation. Il a coordonné le droit applicable en Alsace et Moselle pour le financement des chambres de métiers et d’artisanat.
S’agissant de la taxe carbone, notre premier travail a consisté à la rebaptiser « contribution carbone ». Le transport maritime national en est exonéré et le taux applicable au transport fluvial de marchandises est réduit de 35%.
Dans le domaine des biocarburants, les apports du Sénat ont été significatifs. Un article du code des douanes dispose désormais explicitement que seule l’incorporation d’éthanol non dénaturé est prise en compte pour l’atteinte des objectifs d’incorporation de biocarburants. Quant aux biocarburants de deuxième génération, ils feront l’objet d’une double comptabilisation, c'est-à-dire d’une multiplication par deux de leur proportion, pour atteindre les objectifs nationaux d’incorporation.
Avec votre assentiment, madame la ministre, le Sénat a lancé une réflexion sur l’instauration d’une prime d’assurance systémique pour le secteur financier.
Bien entendu, nous n’avons pu échapper à l’incontournable débat sur l’ISF, qui reprendra, comme le président Arthuis l’a indiqué, en seconde partie. Nous avons maintenu nos positions sur les holdings ISF et veillé à ce qu’elles ne s’étendent pas trop. Mais nous avons surtout adopté la disposition, issue d’une proposition de Jean Arthuis, relative à l’accélération des investissements des fonds, en réduisant le délai d’investissement des fonds à un an pour permettre à leurs souscripteurs de bénéficier d’avantages fiscaux.
Je cite pour mémoire la diminution du droit de timbre pour la délivrance d’un passeport en cas de fourniture de la photographie, conformément au souhait de Mme André.
Mme Nicole Bricq. Mais au prix de quel marchandage !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’opération la plus significative sur le plan financier a consisté à définir les conditions de la prolongation du plan de relance pour les investissements des collectivités territoriales. Le coût de cette mesure, qui est de 1 milliard d’euros, pèse sur le solde budgétaire de la première partie.
M. François Marc. C’est un cadeau !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Marc, vous savez bien que de nombreuses collectivités ont des projets d’investissements en attente. Il s’agit non pas d’un cadeau, mais d’un contrat. Puisque ce dispositif a été appliqué dans de bonnes conditions en 2009, il n’y a pas de raison de ne pas le reconduire en 2010 pour ceux qui n’en ont pas encore bénéficié.
Mes chers collègues, la première étape du budget est franchie. Nous pouvons être satisfaits du résultat auquel nous sommes parvenus. Je vous donne rendez-vous dès demain pour la seconde partie de ce projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de l’examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2010, le Sénat a validé deux orientations fiscales majeures.
La première est la suppression de la taxe professionnelle sur les investissements productifs pour restaurer la compétitivité de nos entreprises. Elle sera remplacée par un impôt plus moderne et plus conforme aux réalités économiques d’aujourd’hui.
La seconde est le « verdissement » de notre fiscalité pour orienter la consommation des entreprises et des ménages vers les énergies plus propres. C’est l’objet de ce que nous avons rebaptisé la « contribution carbone ».
Ces orientations majeures entraînent un rééquilibrage et des transferts de charge fiscale entre les contribuables concernés, qu’il s’agisse d’entreprises ou de particuliers, selon leur secteur d’activité ou même leur mode de vie.
En ce qui concerne la contribution carbone, notre Haute Assemblée s’est efforcée de mieux prendre en compte certaines situations spécifiques.
De même, s’agissant de la suppression de la taxe professionnelle, nous avons veillé au respect du principe d’équité, le plus souvent sur l’initiative de notre rapporteur général, Philippe Marini. Nous tenons à saluer l’analyse pertinente qu’il a faite de cette réforme, dont il faut reconnaître le caractère particulièrement complexe.
Nous avons, par exemple, préservé le barème de la nouvelle « cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises » que devront acquitter les entreprises réalisant plus de 500 000 euros de chiffre d’affaires, tout en instituant une cotisation minimale de 250 euros.
En outre, nous avons rétabli, pour l’ensemble des entreprises, le plafonnement de la valeur ajoutée taxable à 80 % du chiffre d’affaires, de façon à réduire le nombre d’entreprises perdantes ou l’ampleur de leurs pertes.
Le groupe UMP a permis d’amorcer un processus de rapprochement des régimes fiscaux des BNC et des BIC en obtenant une réduction de 6 % à 5,5 % de la part des recettes taxable dans le régime des BNC, dont relèvent de très nombreux professionnels libéraux.
Plus important encore, nous avons amélioré la compensation relais qui sera versée en 2010 aux collectivités territoriales. Le compromis auquel nous sommes parvenus sur la prise en compte du produit des bases de taxe professionnelle 2010 par les taux 2009, dans la limite du taux voté pour les impositions au titre de l’année 2008 majoré de 1 %, constitue une avancée déterminante à cet égard.
De même, nous avons amélioré le rendement de la nouvelle imposition forfaitaire sur les éoliennes terrestres, en faisant participer de manière plus significative les exploitants de ces équipements au financement des collectivités publiques qui les accueillent sur leur territoire.
Bien entendu, il ne s’agit que d’une première étape. Il nous reste à préciser la répartition des recettes des collectivités territoriales pour 2011 et les années suivantes. Dans ce cadre, le groupe UMP veillera au respect d’un juste équilibre entre échelons de collectivités, entre territorialisation et mutualisation et, plus largement, entre territoires.
De plus, le groupe UMP redéposera en seconde partie l’amendement qu’il a présenté dès la première partie afin de marquer sa volonté d’instaurer deux rendez-vous législatifs en 2010 – et au-delà – pour tenir compte des simulations et de la future répartition des compétences. C’est un message de confiance et de responsabilité que nous souhaitons ainsi adresser aux élus locaux. Nous reparlerons de cela dans le cadre des articles non rattachés.
Pour ce qui concerne cette première partie, je souhaite conclure mon propos en évoquant deux amendements très attendus par les collectivités locales que le groupe UMP a présentés et fait adopter.
Le premier permettra aux collectivités territoriales de continuer à bénéficier du dispositif de remboursement anticipé du FCTVA pour les dépenses pour lesquelles elles se sont engagées en 2009, mais qu’elles n’ont pu réaliser ou mandater avant le 31 décembre de cette année, compte tenu des délais de certaines procédures de commande publique.
Le second concrétise la décision annoncée par le Premier ministre, lors du congrès des maires de France, de reconduire en 2010 ce dispositif de remboursement anticipé pour les collectivités locales qui n’auraient pas pu s’engager en 2009.
Ces deux amendements complètent les dispositions de ce projet de budget destinées à soutenir l’investissement, qui constitue pour nous une priorité pour relancer la croissance et construire l’avenir.
C’est dans cet esprit que le groupe de l’UMP votera cette première partie du projet de loi de finances pour 2010, telle qu’elle résulte des travaux de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)