Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 95.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 bis, modifié.

(L'article 10 bis est adopté.)

Article 10 bis (début)
Dossier législatif : projet de loi pénitentiaire
Discussion générale

11

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire luxembourgeoise

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons l’honneur d’accueillir ce soir une délégation de la commission des finances du parlement luxembourgeois, conduite par son président, M. Laurent Mosar. (Mme la garde des sceaux, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)

C’est toujours un plaisir pour nous de recevoir nos collègues des parlements européens.

Nos collègues luxembourgeois auront, demain matin, une séance de travail conjointe avec les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat. Je ne doute pas que ce séminaire de réflexion permettra de progresser sur les nombreux sujets d’intérêt commun qui touchent nos deux économies.

Une telle initiative doit être saluée en ces temps de crise, où la coordination des politiques menées par nos pays s’impose, plus encore qu’à l’accoutumée, comme une ardente nécessité.

Je me réjouis donc de votre venue à Paris, et je vous souhaite, chers collègues, au nom du Sénat tout entier, un utile et agréable séjour à Paris. (Applaudissements.)

12

Article 10 bis (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi pénitentiaire
Article additionnel avant l'article 11

Loi pénitentiaire

Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d’urgence (Texte de la commission)

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi pénitentiaire.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi pénitentiaire
Article 11

Article additionnel avant l'article 11

Mme la présidente. L'amendement n° 97, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Tout détenu a le droit de solliciter des conseils juridiques et les autorités pénitentiaires doivent raisonnablement l'aider à avoir accès à de tels conseils.

Les consultations et autres communications – y compris la correspondance -– sur des points de droit entre un détenu et son avocat doivent être confidentielles.

La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Cet amendement, qui rejoint les préoccupations exprimées voilà quelques instants, vise à permettre aux détenus d’accéder à des conseils juridiques de toute nature.

En effet, le détenu est bien souvent une personne « paumée » – le terme me paraît approprié –, se trouvant dans une situation de misère, y compris parfois intellectuelle, mais surtout d’exclusion telle qu’elle ne peut guère avoir accès aux informations susceptibles de lui être utiles. Or les multiples difficultés que chacun d’entre nous peut rencontrer dans la vie quotidienne sont aggravées par la détention, qu’il s’agisse de la gestion de problèmes familiaux, de la nécessité de rédiger un testament ou de faire un acte de droit civil. Tout cela suppose des conseils, a fortiori quand on est dans la situation que je viens de décrire.

Nous proposons donc que tout détenu ait le droit de solliciter des conseils juridiques et que l’administration pénitentiaire lui facilite l’accès à ce droit.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable, et ce pour deux raisons.

D’une part, ces dispositions ne relèvent en aucune manière du domaine de la loi.

D’autre part, le développement des points d’accès au droit dans les prisons et la présence des délégués du Médiateur de la République ont très largement répondu à votre préoccupation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. L’article 10 du projet de loi « garantit à tout détenu le respect de ses droits ».

Par ailleurs, la confidentialité des communications entre un détenu et son avocat figure parmi les droits de la défense. C’est un droit élémentaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout à fait !

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. La confidentialité est, pour toute personne, un droit fondamental, à caractère constitutionnel, dont la réaffirmation par une norme législative se révèle inutile.

En conséquence, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Même si la précision concernant la confidentialité nous paraît inutile dans la mesure où celle-ci va de soi, nous soutenons cet amendement, car le texte présente une insuffisance – je l’ai déjà indiqué à M. le rapporteur – en ce qui concerne l’appui juridique dont doit pouvoir bénéficier le condamné.

Le plus souvent, le condamné n’a plus de contact avec le conseil qui l’a défendu puisque, très logiquement, la mission du conseil s’arrête après la condamnation définitive. Certes, l’avocat a le droit de conserver des liens avec le condamné, mais, dans la pratique, je me suis, pour ma part, souvent fait le reproche d’avoir, par la force des choses et eu égard à diverses difficultés, laissé un détenu seul après sa condamnation.

J’ajoute que la plupart des condamnés bénéficient de l’aide juridictionnelle ; leur avocat est donc souvent commis d’office et ne peut ensuite rester en contact direct avec le condamné, d’autant que celui-ci est le plus souvent transféré, parfois très loin.

En dépit des dispositions rappelées par M. le rapporteur et Mme le garde des sceaux et de la présence de délégués du Médiateur de la République, il subsiste un vide en la matière.

Il serait particulièrement utile que les barreaux puissent organiser des permanences auprès des maisons d’arrêt et des maisons centrales, car l’absence des avocats pose un réel problème.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 97.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 11
Dossier législatif : projet de loi pénitentiaire
Article 11 bis

Article 11

Les condamnés communiquent librement avec leurs avocats dans les mêmes conditions que les prévenus pour l'exercice de leur défense.

Mme la présidente. La parole est à M. Louis Mermaz, sur l'article.

M. Louis Mermaz. Il est prévu, à l’article 11, que les condamnés peuvent communiquer librement avec leurs avocats dans les mêmes conditions que les prévenus pour l’exercice de leur défense.

Je ne me lasserai jamais de le répéter – tous les enseignants savent que la répétition a des vertus pédagogiques –, force est de se demander comment cela se passera avec un étranger qui ne pratique pas le français !

Le dernier alinéa de l’article 716 du code de procédure pénale dispose bien que « toutes communications et toutes facilités compatibles avec les exigences de la discipline et de la sécurité de la prison sont accordées aux personnes mises en examen, prévenus et accusés pour l’exercice de leur défense ».

La liberté de communication avec l’avocat pour l’exercice de la seule défense constituerait une régression puisqu’elle limiterait ce droit au seul exercice d’une action en justice.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !

M. Louis Mermaz. Puisqu’on explique depuis le début de ce débat qu’un détenu demeure un homme, un citoyen – quand il est français – qui dispose de ses droits, hormis bien sûr le fait d’être retenu, nous vous demanderons, avec un amendement que soutiendra notre collègue Alain Anziani, de supprimer, à la fin de cet article, les mots « pour l’exercice de leur défense », qui sont limitatifs.

Le conseil d’un avocat doit pouvoir être fourni au détenu pour toute autre affaire le concernant : une instance de divorce, un problème de caractère civil, etc. L’amendement qui vous sera présenté visera donc à permettre aux détenus de retrouver, comme le veut la loi, la totalité de leurs droits, afin de pouvoir ester en justice chaque fois que cela sera nécessaire.

Tout détenu a le droit, pensons-nous, de solliciter des conseils juridiques, et les autorités pénitentiaires doivent raisonnablement l’aider à avoir accès à de tels conseils, et cela, évidemment, dans une langue qu’il comprend !

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 15 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Les personnes détenues communiquent librement avec leurs avocats.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de simplifier la rédaction de l’article 11, qui est relatif au droit du détenu de communiquer librement avec son avocat.

Je ne comprends pas pourquoi la rédaction de cet article est si biscornue. Pourquoi faire référence aux condamnés et aux prévenus pour dire qu’ils bénéficient des mêmes droits ? Autant dire directement que les détenus, sans faire de distinction entre prévenus et condamnés, bénéficient du droit de communiquer librement avec leurs avocats ; ce serait plus simple !

Quant à la mention de l’exercice de leur défense, il me semble qu’elle est également superflue. Pour quelle raison un détenu communiquerait-il avec son avocat si ce n’est pour l’exercice de sa défense ? Il convient donc de supprimer cette référence qui me semble restrictive.

Je propose donc de prévoir simplement que les détenus communiquent librement avec leurs avocats.

Mme la présidente. Les amendements nos 13 et 98 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 13 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.

L'amendement n° 98 rectifié est présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

À la fin de cet article, supprimer les mots :

pour l'exercice de leur défense

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 13.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a été partiellement défendu, mais je souhaite tout de même préciser les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de la référence à l’exercice de la défense du détenu.

Il nous semble que cette précision est non seulement inutile, mais également dangereuse. Malgré les garanties qui ont été apportées par le rapporteur, je reste convaincue que cette restriction du champ de communication du détenu avec son avocat n’est pas justifiée et qu’elle masque quelque chose.

Soit l’on considère que toute communication du détenu avec son avocat a un rapport avec l’exercice de la défense et, dans ce cas, l’avocat n’interviendra que lorsqu’une procédure contentieuse est engagée. Soit l’on considère que le principe de libre communication du détenu avec l’avocat est pleinement respecté et, dans ce cas, la mention « pour l’exercice de leur défense » est de trop.

En effet, en dehors de tout contentieux, qu’il soit disciplinaire ou même pénal, l’avocat peut apporter au détenu des conseils juridiques sur sa situation carcérale, mais aussi, comme l’a dit notre collègue Louis Mermaz, sur ses biens, sur sa famille ou toute autre question relevant de la gestion de ses droits personnels ou patrimoniaux. II n’y a pas, à proprement parler, de « défense » sur ces questions. Cela signifie-t-il que le détenu ne pourra pas communiquer avec son avocat à leur sujet ?

Cet article est flou et ne garantit pas la libre communication du détenu avec son avocat puisqu’il induit une restriction qui n’est pas justifiée au regard du droit européen. En effet, selon la Cour européenne des droits de l’homme, « il y va clairement de l’intérêt public qu’une personne désireuse de consulter un homme de loi puisse le faire dans les conditions propices à une pleine et libre discussion ».

L’article 11 qui nous est proposé ne permettant pas une telle discussion, nous vous proposons de supprimer la référence à l’exercice de la défense.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 98 rectifié.

M. Alain Anziani. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

La formulation simple, qui se comprend facilement et qui ne donne pas lieu à interprétation, est la suivante : les condamnés communiquent librement avec leurs avocats dans les mêmes conditions que les prévenus.

Pourquoi ajouter « pour l’exercice de leur défense » ? Ces mots sont forcément destinés à modifier la première partie de la phrase.

Je ne suspecte pas les auteurs du texte de mauvaise intention, mais mieux vaut être clair. Cet ajout étant inutile, autant supprimer ces mots pour permettre au détenu de communiquer avec son avocat sur tout type de questions.

Mme la présidente. L'amendement n° 12 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Lorsqu'ils ne bénéficient pas d'un avocat attitré, les détenus bénéficient de l'aide à l'accès au droit prévu par les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet d’inscrire dans la loi pénitentiaire la possibilité pour le détenu de bénéficier de l’aide à l’accès au droit prévue par la loi du 10 juillet 1991. Vous me répondrez que cela existe déjà pour les détenus. Mais nous ne perdrons rien à le prévoir de manière expresse dans la loi pénitentiaire.

Cela permettra d’ailleurs de nous conformer à la règle pénitentiaire européenne 23.3, selon laquelle, « lorsque la législation prévoit un système d’aide judiciaire gratuite, cette possibilité doit être portée à l’attention de tous les détenus par les autorités pénitentiaires ». C’est la raison pour laquelle je vous propose, avec cet amendement, de faire figurer cette possibilité dans la loi pénitentiaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission souhaite le retrait des amendements nos 15 rectifié, 13 et 98 rectifié ; à défaut, elle émettra avis défavorable.

En effet, le problème ici évoqué est essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, théorique. Les auteurs de ces amendements invoquent le fait que la liberté de communication avec l’avocat ne concerne pas seulement l’exercice de la défense.

En premier lieu, il faut remarquer que les échanges avec l’avocat sont toujours couverts par le secret et que nul ne peut en contrôler le contenu. Il est donc parfaitement possible que le détenu communique avec son avocat sur un problème de divorce, de pacs, de bien lui appartenant, ou que sais-je encore ! Cette communication sera de toute façon totalement confidentielle.

En second lieu, sur le plan des principes, il faut bien se remémorer que les garanties apportées par la loi à la liberté d’échange entre les personnes détenues et leurs avocats dérogent aux règles qui s’appliquent habituellement en milieu carcéral. Mais ces garanties ont leur première justification dans les exigences de la défense de la personne condamnée. Il me paraît donc naturel que cette précision demeure dans la loi, même si cela ne change strictement rien par rapport aux préoccupations qui ont été exprimées.

Quant à l’amendement n° 12 rectifié, nous pensons qu’il est satisfait puisque l’aide juridictionnelle est déjà prévue dans notre droit. C’est un droit ! Par conséquent, il ne nous paraît pas utile de le préciser à nouveau. C’est pourquoi la commission demande également le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 15 rectifié. L’article 11 reprend, pour les condamnés, le principe de libre communication avec leurs avocats prévu, pour les prévenus, par l’article 716 du code de procédure pénale. Il est donc inutile de viser ici les personnes détenues de manière à inclure les prévenus.

Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 13 et 98 rectifié. Certes, on pourrait penser que les mots « pour l’exercice de leur défense » sont limitatifs, mais l’exercice de la défense recouvre également l’assistance et le conseil.

Enfin, il est défavorable à l’amendement n° 12 rectifié, qui est inutile, car l’accès au droit est déjà prévu par la loi de 1991.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’explication de Mme la garde des sceaux me gêne.

Madame la ministre, ne nous dites pas que l’exercice de la défense englobe également le conseil en matière de divorce, de pension alimentaire, etc. Ce n’est pas possible !

Autant faire simple, comme l’a dit notre collègue Alain Anziani, et dire seulement que les condamnés communiquent librement avec leurs avocats. Cela permet d’englober tous les aspects de l’échange entre le condamné et son avocat.

Mme la présidente. La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote.

M. Louis Mermaz. À moins de supposer que tout directeur d’établissement public est au moins agrégé de droit, mais s’ils ont indiscutablement tous de bonnes connaissances juridiques, le fait de préciser que l’avocat est là pour l’exercice de la défense des personnes détenues entretient une confusion.

En effet, les condamnés et ceux qui sont en détention provisoire – n’oublions pas l’importance de ces détenus ! – peuvent parfaitement prendre l’initiative d’une action en justice. À ce moment-là, leurs avocats ne sont pas défendeurs, puisque ce sont eux, au contraire, qui introduisent l’action.

Par conséquent, la rédaction est ambiguë. Ce n’est plus du droit, c’est du Molière !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 15 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3 et 98 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11, modifié.

(L'article 11 est adopté.)

Article 11
Dossier législatif : projet de loi pénitentiaire
Article additionnel après l'article 11 bis

Article 11 bis

Les personnes détenues ont droit à la liberté de conscience et peuvent exercer leur culte, selon les conditions adaptées à l'organisation des lieux, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l'établissement.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 14 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Le droit à la liberté de conscience et de culte des détenus doit être respecté.

Chaque détenu peut accomplir au sein de l'établissement pénitentiaire les actes propres à son culte dans des conditions conformes aux exigences de la sécurité et du bon ordre de l'établissement.

L'administration pénitentiaire agrée le personnel d'aumônerie pour assurer des services ou des activités cultuelles.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à réécrire l’article 11 bis afin d’y ajouter quelques éléments.

La conformité des conditions d’exercice du culte avec les exigences de sécurité et de bon ordre de l’établissement est maintenue. En revanche, l’amendement fait référence à l’agrément du personnel d’aumônerie.

Les règles de l’assistance spirituelle apportée aux détenus sont prévues dans les articles D. 432 à D. 439 du code de procédure pénale. L’article D. 433 dispose que le service religieux est assuré, pour les différents cultes, par des aumôniers désignés par le ministre de la justice, sur proposition du directeur régional, qui consulte à cet effet l’autorité religieuse compétente, et après avis du préfet.

Il existe donc un cadre précis qui permet aux aumôniers des différents cultes d’accomplir leur ministère en prison.

Cependant, il convient de préciser que la procédure d’agrément est fondamentale : elle permet à l’autorité compétente de s’assurer de la représentativité d’un culte, voire du caractère cultuel de certains courants de pensée.

Ainsi, la possibilité accordée aux Témoins de Jéhovah d’entrer dans les prisons a donné lieu à une jurisprudence très importante du Conseil d’État, dans la perspective d’une ouverture du champ des cultes au-delà des grandes religions.

En raison de ces spécificités, il semble nécessaire de préciser que le service du culte s’exerce sous le contrôle de l’administration pénitentiaire, par le biais d’une procédure d’agrément, reprise dans le cadre des décrets d’application.

Mme la présidente. L'amendement n° 99, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Les personnes détenues ont droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ils peuvent exercer leur culte selon les conditions adaptées à l'organisation des lieux.

La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Cet amendement, qui vise à réécrire l’article 11 bis, présente deux différences avec le texte de la commission.

La première, fondamentale, vise à réparer ce qui est, selon moi, un oubli des auteurs de l’article 11 bis. Il s’agit de reconnaître la liberté d’opinion. On voit mal pour quelles raisons ce texte priverait le détenu de la liberté d’opinion. Qu’on affirme la liberté de conscience et de religion du détenu, c’est bien. Mais pourquoi ne pas mentionner aussi la liberté d’opinion ? Je rappelle que celle-ci est inscrite dans le préambule de la Constitution de 1946 et qu’elle fait partie des principes fondamentaux reconnus, notamment, par le Conseil constitutionnel en 1977.

Dès lors, c’est bien la moindre des choses que d’ajouter ici la mention de la liberté d’opinion.

Par ailleurs, cet amendement vise à supprimer la référence aux limites imposées par la sécurité et le bon ordre de l’établissement, qui n’apporte pas grand-chose et risque au contraire de restreindre la liberté de religion des détenus.

Je précise, madame la présidente, que je rectifie cet amendement en remplaçant les mots « de pensée » par les mots « d’opinion » et en corrigeant l’erreur grammaticale qui consistait, au début de la deuxième phrase à employer le pronom « Ils » au lieu de « Elles ».

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 99 rectifié, présenté par M. Anziani et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Les personnes détenues ont droit à la liberté d'opinion, de conscience et de religion. Elles peuvent exercer leur culte selon les conditions adaptées à l'organisation des lieux.

L'amendement n° 227, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

À la fin de cet article, supprimer les mots :

, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l'établissement

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. L’article 11 bis reconnaît aux détenus le droit à la liberté de conscience et à l’exercice de leur culte, ce qui constitue, c’est vrai, une avancée. Celle-ci est cependant immédiatement suivie d’une restriction liée à la sécurité et au bon ordre de l’établissement.

Cet article est donc caractéristique d’une méthode : d’un côté, l’affirmation d’une liberté ; de l’autre, le rappel des impératifs de sécurité, qui en atténue bien évidemment la portée.

Telle est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer les restrictions prévues par les derniers mots de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. C’est la commission qui a décidé d’intégrer dans le projet de loi cet article consacrant les libertés de conscience et de culte.

La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 14 rectifié dans la mesure où celui-ci supprime la mention, qui nous paraît utile, des contraintes liées à l’organisation des lieux. En effet, dans la plupart des établissements pénitentiaires, un même lieu est utilisé pour toutes les religions. Cela m’apparaît d’ailleurs comme une illustration – voire un exemple à suivre – de l’esprit de compréhension et de tolérance qui doit selon moi régner entre les différentes religions. Tout se passe très bien, et les aumôniers, qu’ils soient catholiques, protestants, musulmans ou juifs, s’entendent parfaitement.

La commission est également défavorable à l’amendement n° 99 rectifié en ce qu’il vise notamment à supprimer la référence aux notions de sécurité et de bon ordre de l’établissement. Or, ne nous le cachons pas, il s’agit ici d’un domaine, celui de la religion, où des actions de prosélytisme radical peuvent être menées et doivent légitimement être combattues. Il nous semble donc que la référence à la sécurité et au bon ordre est tout à fait indispensable.

Pour cette même raison, la commission a également émis un avis défavorable sur l’amendement n° 227.

Cela étant, l’amendement n° 99 rectifié tend également à faire mention, dans l’article 11 bis, de la liberté d’opinion, et je dois dire que, personnellement, je n’y suis pas hostile, même si, concrètement, cela ne change pas grand-chose à la vie des établissements.

C’est pourquoi je propose de sous-amender l’amendement n° 99 rectifié bis – pardonnez-moi, madame la présidente, cet exercice d’« artisanat législatif » ! (Sourires.)  – de manière à y réintroduire les limites prévues initialement par la commission concernant la sécurité et le bon ordre des établissements.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un sous-amendement n° 300, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :

Compléter la seconde phrase du second alinéa de l'amendement n° 99 rectifié par les mots :

, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l'établissement

Quel est l’avis du Gouvernement sur les trois amendements et le sous-amendement en discussion ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. En vérité, monsieur le rapporteur, le Gouvernement était défavorable à l’amendement n° 99 rectifié. Évidemment, le dépôt de votre sous-amendement est susceptible de faire évoluer notre position.

Je demande une courte suspension de séance pour me permettre de faire le point, madame la présidente.

Mme la présidente. Nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à Mme le garde des sceaux.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 99 rectifié, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 300. Bien entendu, il est, par conséquent, défavorable aux deux autres amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 300.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 99 rectifié, modifié.

(L'amendement est adopté.)