Article 21
I. - Après l'article L. 21 A du livre des procédures fiscales, il est inséré un article L. 21 B ainsi rédigé :
« Art. L. 21 B. - I. - L'un des signataires de la déclaration prévue à l'article 800 du code général des impôts ou l'un des donataires mentionnés dans un acte de mutation à titre gratuit entre vifs peut demander à l'administration de contrôler la déclaration dont il est signataire ou l'acte auquel il est partie.
« La demande de contrôle doit être :
« 1° Relative à une déclaration ou un acte enregistrés avant la réception d'un avis de mise en recouvrement ou de la mise en demeure mentionnée à l'article L. 67 ;
« 2° Et présentée au plus tard dans le délai de trois mois suivant l'enregistrement de la déclaration ou de l'acte sans pouvoir être antérieure à la date de cet enregistrement.
« II. - Lorsque les conditions mentionnées au I sont satisfaites, aucun rehaussement d'imposition ne peut être proposé postérieurement au délai d'un an suivant la date de réception de la demande de contrôle. Cette période d'un an est prorogée, le cas échéant, du délai de réponse du contribuable aux demandes de renseignements, justifications ou éclaircissements de l'administration, pour la partie excédant le délai prévu à l'article L. 11, ainsi que du délai nécessaire à l'administration pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères lorsque des biens situés à l'étranger figurent sur la déclaration ou l'acte mentionné au I du présent article.
« III. La garantie mentionnée au II ne s'applique pas aux rehaussements d'imposition :
« 1° Découlant de l'omission, dans l'acte ou la déclaration, de la mention de biens, droits, valeurs ou donations antérieures qui auraient dû y figurer ;
« 2° Ou procédant de la remise en cause d'une exonération ou d'un régime de taxation favorable en raison du non-respect d'un engagement ou d'une condition prévus pour en bénéficier ;
« 3° Ou proposés dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 64.
« IV. - Les I, II et III s'appliquent aux demandes de contrôle afférentes à des successions ouvertes ou à des donations consenties entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2011. »
II. - Le Gouvernement présentera au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2011, un rapport sur l'application des dispositions figurant au I.
M. le président. L'amendement n° 71, présenté par M. Jégou et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 21 B du livre des procédures fiscales :
« Les signataires de la déclaration prévue à l'article 800 du code général des impôts ou les donataires mentionnés dans un acte de mutation à titre gratuit entre vifs peuvent, ensemble, demander à l'administration de contrôler la déclaration dont ils sont signataires ou l'acte auquel ils sont parties. »
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. L'article 21 vise à introduire à titre expérimental un contrôle fiscal sur demande du contribuable en matière de donation et de succession.
Cet article permet ainsi aux bénéficiaires d'une transmission à titre gratuit – donataires parties à un acte de donation entre vifs ou signataires de la déclaration visée à l'article 800 du code général des impôts – de demander à l'administration fiscale d'effectuer le contrôle de l'acte de donation ou de la déclaration de succession en cause dans les douze mois qui suivent cette demande. Or, dès lors que, en matière de droits d'enregistrement, une solidarité de paiement des droits s'applique, la décision de faire appel au contrôle sur demande ne peut être prise que par l'ensemble des bénéficiaires des mutations à titre gratuit et non par un seul d'entre eux.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 196, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 71, après les mots :
acte de mutation à titre gratuit entre vifs
insérer les mots :
qui représentent au moins le tiers de l'actif transmis
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Le dispositif proposé par M. Jégou rendrait l’application de l’article 21 plus pratique et éviterait qu’un héritier minoritaire ne puisse bloquer une succession pour telle ou telle raison – il peut en exister tant dans certaines familles ! – en imposant un contrôle de l’administration fiscale que les autres héritiers ne désireraient pas.
L’objectif du Gouvernement est de sécuriser la succession. Dès lors, pour éviter que l’accord de tous les héritiers ne soit requis et que l’on ne se retrouve dans une sorte de copropriété ingérable, je présente un sous-amendement visant à ce qu’un tiers des héritiers puisse demander un contrôle.
M. Michel Charasse. C’est raisonnable !
M. Éric Woerth, ministre. Comme je l’ai déjà dit, cette mesure éviterait à un héritier minoritaire de créer un blocage.
M. Michel Charasse. Absolument !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s’agit d’un sujet délicat, qui peut être tout à fait redoutable : en abordant les questions d’intérêt au moment de l’ouverture d’une succession, nous touchons là au cœur de la paix des familles.
M. Michel Charasse. C’est un thème balzacien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il existe une grande rémanence dans notre société, mon cher collègue. (Sourires.)
Dire, comme le fait Jean-Jacques Jégou, que la décision de faire appel au contrôle sur demande ne peut être prise que par l’ensemble des bénéficiaires des mutations à titre gratuit et non par un seul d’entre eux, c’est prendre le risque d’un blocage si un arrière-neveu ou un quelconque ayant droit très minoritaire a une position dissidente.
Dire, comme le fait M. le ministre, qu’un tiers de l’actif de la succession suffirait à imposer le contrôle aux deux autres tiers me conduit à me demander si le balancier ne repartirait pas un peu trop dans l’autre sens.
Ce n’est qu’une intuition, mais je suggère que le sous-amendement du Gouvernement prenne en compte les héritiers représentant au moins les deux tiers de l’actif transmis. Je me sentirai ainsi plus à l’aise. Cependant, il y a ici des spécialistes du droit successoral plus éminents que moi et, surtout, connaissant les situations concrètes, ce qui n’est pas mon cas.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je ne suis pas non plus un spécialiste du droit successoral. Je pense simplement que prévoir une proportion des deux tiers reviendrait à prendre presque tout le monde en compte, ce qui deviendrait compliqué. À mon sens, comme pour une entreprise, la proportion d’un tiers me semble significative.
Les héritiers souhaitent que la succession soit sécurisée et qu’il n’y ait pas de problèmes avec l’administration fiscale. L’amendement de M. Jégou permet précisément d’éviter qu’un héritier représentant une faible part ne puisse à lui seul déclencher la procédure, laquelle, en fait, a été mise en place pour protéger les héritiers.
Le Gouvernement veut, lui aussi, éviter les abus de procédure. La proportion d’un tiers de l’actif transmis me semble donc être suffisante. Cela étant, je ne détiens pas la vérité.
M. le président. Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 21
M. le président. L'amendement n° 40 rectifié, présenté par M. Lambert, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 13 du code général des impôts, il est inséré un article 13 A ainsi rédigé :
« Art. 13 A. - Un contribuable peut déduire de ses revenus imposables les frais, droits et intérêts d'emprunt versés pour acquérir des parts ou des actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale dans laquelle il exerce son activité professionnelle dès lors que ces dépenses sont utiles à l'acquisition ou à la conservation de ses revenus, quel que soit son statut juridique au sein de la société et quel que soit le régime fiscal de celle-ci. Le montant des intérêts déductibles sont proportionnels à la rémunération perçue ou escomptée par le contribuable. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Lambert.
M. Alain Lambert. Mes chers collègues, je ne présente que des amendements dont je suis à peu près sûr qu’ils sont juridiquement valides et conformes aux pratiques des familles …
La série d’amendements que je vous propose ici vise à faciliter la transmission des entreprises. La démographie dont nous parlions tout à l’heure montre en effet que de nombreux chefs d’entreprise vont bientôt partir à la retraite.
Les dispositifs fiscaux favorables qui sont en vigueur en matière de transmission de l’outil industriel fonctionnent bien pour les sociétés soumises à l’impôt sur le revenu, mais pas pour les sociétés anonymes soumises à l’impôt sur les sociétés.
Monsieur le ministre, vous avez plusieurs fois accepté de remettre cet ouvrage sur le métier. De longues rencontres avec vos services m’ont ainsi permis de comprendre les raisons – justifiées – de leur inquiétude. Ils veulent en effet éviter que les redevables ne puissent déduire les intérêts versés non pour acquérir une entreprise mais pour se constituer un portefeuille de titres.
Or tel n’est absolument pas l’objectif visé par mon amendement n° 40 rectifié. Je propose seulement d’harmoniser la fiscalité concernant la transmission des entreprises soumises à l’impôt sur le revenu et des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette question a déjà été évoquée lors de la discussion des articles de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009 non rattachés à l’examen des crédits.
À cette occasion, M. Lambert avait déposé un amendement qui avait ensuite été retiré à la demande du Gouvernement, lequel arguait du fait que ce dispositif était en grande partie satisfait par le droit existant. N’en étant pas persuadé, notre collègue réitère aujourd’hui son initiative. Tout bien considéré, la commission estime que celle-ci doit aboutir. C’est pourquoi elle a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Après des discussions fructueuses avec mes services, M. Lambert a accepté de rectifier son amendement. Le Gouvernement y est donc favorable.
Cela étant, afin d’éviter toute ambiguïté, je voudrais apporter quelques précisions, avec lesquelles vous serez sans doute d’accord, monsieur le sénateur.
Tout d’abord, il n’est pas question de permettre le cumul de cet avantage avec la déduction d’impôt de 10 % au titre des frais professionnels.
Ensuite, les rémunérations prises en compte pour apprécier la proportionnalité que vous avez réintroduite entre les intérêts d’emprunt et la rémunération perçue sont les rémunérations versées par la société et n’incluent pas les revenus directement tirés des titres tels que les dividendes ou les plus-values.
Sous réserve de ces précisions que vous faites également vôtres, me semble-t-il, le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je ne conteste pas l’intérêt de cet amendement. J’aimerais simplement que son auteur nous explicite la dernière phrase proposée pour l’article 13 du code général des impôts.
Indépendamment du fait qu’elle comporte une faute d’accord, j’aimerais comprendre ce qu’elle signifie. Que va-t-on déduire ?
M. le président. La parole est à M. Alain Lambert, pour explication de vote.
M. Alain Lambert. Cette rédaction est précisément le fruit des discussions que j’ai eues avec les services de Bercy, lesquels souhaitent éviter que les déductions ne puissent favoriser des opérations destinées à se constituer des portefeuilles d’actions. Tel n’est en effet pas mon objectif.
Nous sommes là dans le cadre d’une transmission d’entreprise ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.
Monsieur le président de la commission, je sais que vous connaissez mieux que personne le cas des sociétés libérales. Vous savez qu’elles sont de plus en plus nombreuses à adopter le statut de société anonyme et donc à être soumises à l’impôt sur les sociétés.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Quelquefois même dans des PEA, ce qui serait à revoir !
M. Alain Lambert. Dans ce cas, elles ne peuvent pas déduire les intérêts d’emprunt, ce que vous savez aussi.
Afin de nous conformer à la jurisprudence du Conseil d’État, qui est assez précise pour les autres catégories de sociétés, nous avons retenu le principe que « le montant des intérêts déductibles est proportionnel à la rémunération perçue ou escomptée par le contribuable » – mon amendement comportait une faute d’accord qu’il convient de corriger – dans la société dans laquelle il aura acquis ses actions.
De cette façon, le contribuable ne pourra pas optimiser sa déduction, par exemple pour des actifs de la société qui ne seraient pas utiles à l’entreprise elle-même.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est très bien !
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 40 rectifié bis, la dernière phrase du texte proposé pour l’article 13 A du code général des impôts étant ainsi rédigée : « Le montant des intérêts déductibles est proportionnel à la rémunération perçue ou escomptée par le contribuable. »
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Le président de la commission des finances a raison : la compréhension de la rédaction proposée n’est pas immédiate…
La doctrine administrative de même que la jurisprudence du Conseil d’État établissent – et nous pourrions procéder de la même manière dans l’instruction fiscale en question – la limite au triple. Autrement dit : vous avez tiré trois fois plus de revenus de votre rémunération en tant que salarié de l’entreprise que des dividendes des participations que vous détenez.
Cela signifie simplement que votre activité est bien d’être salarié dans l’entreprise et que vous ne réalisez pas dans celle-ci un placement patrimonial. C’est d’ailleurs pour cette raison que les intérêts sont déductibles.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je pense qu’il faudrait que, d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, nous trouvions une rédaction plus satisfaisante, c'est-à-dire plus claire.
Alain Lambert évoquait à l’instant la nature des sociétés en question. Je me demande, monsieur le ministre, s’il n’y a pas quelquefois des actions de cette nature qui finissent dans des PEA, et ce dans des conditions qui sont à la limite de ce que prévoit l’article 20. Peut-être pourrez-vous nous éclairer ultérieurement sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. J’avoue n’avoir pas immédiatement réponse à votre question, monsieur le président de la commission des finances.
En revanche, dans le cas des sociétés d’exercice libéral, on voit bien qu’il existe parfois des rémunérations en dividendes qui sont plus importantes que les rémunérations versées à titre de salaire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui, et qui finissent en PEA !
M. Éric Woerth, ministre. Pour cette situation, nous avons fixé, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale si mes souvenirs sont exacts, un principe de proportionnalité.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mais il est infime !
M. Éric Woerth, ministre. Dans un certain nombre de cas, en effet, on peut très facilement établir que la participation a pour but évident d’éviter les cotisations sociales, …
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Et l’impôt sur le revenu !
M. Éric Woerth, ministre. … qui ne portent pas sur les dividendes. Voilà pourquoi nous avons réintégré ces cotisations, dans un certain nombre de cas, en requalifiant les faits.
Toutefois, dans le cas présent, je pense que l’on pourrait préciser cela dans l’instruction fiscale, ou quand vous le jugerez opportun.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Sur cet amendement, l’intention du législateur me paraît désormais évidente : les frais sont proportionnels au total des rémunérations dans la limite du tiers. La formulation est quant à elle perfectible, mais nous la clarifierons comme il convient d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire.
Dans ces conditions, nous pouvons donc voter l’amendement en l’état, sous réserve d’une rédaction affinée qui interviendra en commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 40 rectifié ter.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative pour 2008, après l'article 21.
L'amendement n° 35, présenté par M. Lambert, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le I bis de l'article 151 septies A du code général des impôts, il est inséré un I ter ainsi rédigé :
« I ter. - 1° L'exonération prévue au I s'applique, à l'exception du 2° et du 3°, dans les mêmes conditions, aux cessions échelonnées des droits ou parts détenus par un contribuable qui exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société ou d'un groupement dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu et qui sont considérés comme des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession au sens du I de l'article 151 nonies.
« 2° Ne sont prises en compte que les cessions intervenues, dans le délai de cinq ans précédant le premier des deux événements que constituent la cessation de ses fonctions dans l'entreprise par le cédant et son départ à la retraite. »
II. - Après le I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. - 1° L'exonération prévue au I s'applique dans les mêmes conditions, à l'exception de celles visées au c) du 2°, aux cessions échelonnées des parts ou droits visés éligibles au présent dispositif.
« 2° Ne sont prises en compte que les cessions intervenues, dans le délai de cinq ans précédant le premier des deux évènements que constituent la cessation de ses fonctions dans l'entreprise par le cédant et son départ à la retraite. »
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Lambert.
M. Alain Lambert. Il s’agit ici des cessions échelonnées. Cette méthode est utilisée pour la transmission d’une entreprise, tout en permettant à son propriétaire d’encourager le repreneur en le faisant venir dans l’entreprise et en le formant. Celui-ci trouve ainsi l’occasion de se confronter au nouveau métier qu’il aura à exercer, et surtout d’assurer la viabilité de l’entreprise.
On consacre beaucoup d’argent, dans notre pays, à la création d’entreprise. Je crois que nous pourrions très sagement en consacrer un peu, par les aménagements fiscaux que je propose, à la transmission. En effet, les entreprises ont souvent un fond de clientèle, mais aussi un savoir-faire et des ressources humaines de qualité, qu’il faut absolument préserver et transmettre.
Or, cela ne se fait généralement pas en totalité, compte tenu du financement à trouver ; on procède par transmissions progressives, ce qui ne va pas sans entraîner des difficultés.
Au cours des années précédentes, nous avons souvent légiféré sur cette question, mais pour faire bénéficier des avantages fiscaux les seules transmissions s’opérant dans un délai de douze mois, alors même – et ceux qui ont fait l’expérience de reprendre une entreprise le savent – qu’il faut largement un tel délai pour monter un projet de reprise, en obtenir le financement et les garanties !
C’est pourquoi, monsieur le ministre, on s’est aperçu – et je pense que tous ceux qui se sont consacrés à la question ont dû vous faire remonter cette information – que le délai n’est pas suffisant.
Le présent amendement vise donc à porter le délai à cinq ans. Lors de la discussion du projet de loi de finances initiale, votre collègue Christine Lagarde avait émis un avis plutôt positif, tout en remarquant qu’un délai de cinq ans lui paraissait trop long.
Pour ma part, je suis seulement à la recherche de la meilleure solution. L’idée est de faciliter des transmissions réussies, et non de faire de l’optimisation fiscale. Or, après avoir mûrement réfléchi à la question, le délai de cinq ans m’a en effet paru trop long. Je pense donc que le bon délai serait trois ans. Cela présenterait de plus un immense avantage : nous pourrions ainsi rejoindre la période d’exonération prévue à l’horizon 2012. Il s’agirait par conséquent d’une solution de sagesse qui me permettrait de plus, si cela convient toutefois au Gouvernement et à la commission des finances, de rectifier immédiatement mon amendement en conséquence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission partage les préoccupations de notre collègue Alain Lambert, mais souhaiterait un délai plus bref, pour éviter notamment un effet de précédent par rapport à d’autres dispositifs ou régimes existants.
Sous réserve d’une détermination adéquate du délai, la commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement constate d’abord que M. Alain Lambert a de la suite dans les idées, puisque ce sujet a été abordé à plusieurs reprises, notamment lors de l’examen du projet de loi de finances initiale. Le délai avait alors été considéré comme étant trop long, ainsi que vous l’avez vous-même rappelé, monsieur le sénateur.
Le Gouvernement serait prêt à accepter un amendement fixant le délai à deux ans, voire à trois ans si vous l’estimiez nécessaire. En tout cas, il faut que le lien entre la cession et la retraite soit clair. C’est cela qui compte.
M. Alain Lambert. Tout à fait !
M. Éric Woerth, ministre. Par conséquent, monsieur Lambert, si le délai était raccourci, le Gouvernement lèverait le gage.
M. le président. La parole est à M. Alain Lambert.
M. Alain Lambert. Je rectifie donc mon amendement pour ramener le délai à trois ans.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Deux ans !
M. Alain Lambert. Je ne voudrais pas me trouver en désaccord avec la commission. Néanmoins, je fais le pari suivant : si vous fixez aujourd’hui le délai à deux ans, vous accorderez une année supplémentaire l’an prochain !
J’ajoute que cela fait trois fois que nous revenons sur cette question. Il est temps de nous arrêter !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est donc entendu pour trois ans !
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 35 rectifié, présenté par M. Alain Lambert, et ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le I bis de l'article 151 septies A du code général des impôts, il est inséré un I ter ainsi rédigé :
« I ter. - 1° L'exonération prévue au I s'applique, à l'exception du 2° et du 3°, dans les mêmes conditions, aux cessions échelonnées des droits ou parts détenus par un contribuable qui exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société ou d'un groupement dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu et qui sont considérés comme des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession au sens du I de l'article 151 nonies.
« 2° Ne sont prises en compte que les cessions intervenues, dans le délai de trois ans précédant le premier des deux événements que constituent la cessation de ses fonctions dans l'entreprise par le cédant et son départ à la retraite. »
II. - Après le I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. - 1° L'exonération prévue au I s'applique dans les mêmes conditions, à l'exception de celles visées au c) du 2°, aux cessions échelonnées des parts ou droits visés éligibles au présent dispositif.
« 2° Ne sont prises en compte que les cessions intervenues, dans le délai de trois ans précédant le premier des deux évènements que constituent la cessation de ses fonctions dans l'entreprise par le cédant et son départ à la retraite. »
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative pour 2008, après l'article 21.
L'amendement n° 36 rectifié, présenté par M. Lambert, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 814 B du code général des impôts, il est inséré un article 814 C ainsi rédigé :
« Art 814 C. - Sous réserve des dispositions du septième alinéa du III de l'article 810, sont enregistrés au droit fixe de 375 € porté à 500 € pour les sociétés ayant un capital d'au moins 225 000 € :
« 1° les réductions de capital de sociétés contre annulation ou réduction du nominal ou du nombre de titres ;
« 2° les réductions de capital consécutives au rachat par les sociétés de leurs propres titres, avec attribution de biens sociaux aux associés, y compris du numéraire, lorsqu'un seul acte est établi pour constater les deux opérations ;
« 3° les actes de réductions de capital consécutives au rachat par les sociétés de leurs propres titres lorsque deux actes distincts sont dressés pour constater les deux opérations. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État de l'application d'un droit fixe pour les actes de réduction de capital est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Lambert.