Mme la présidente. L'amendement n° 56, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail est ainsi rédigé :
« Si un état pathologique attesté par un certificat médical comme résultant de la grossesse ou des couches le rend nécessaire, la période de suspension du contrat prévue aux alinéas précédent est augmentée de la durée de cet état pathologique ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Dans le rapport de M. Hubert Brin, président de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, remis à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, du 15 avril 2005, intitulé Enjeux démographiques et accompagnement du désir d'enfant des familles, il est précisé que près de 60 % des congés de maternité sont prolongés par des congés pathologiques.
Par ailleurs, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM, indique que 67 % des femmes ont eu au moins un arrêt maladie après la fin du troisième mois de grossesse.
Ces chiffres révèlent bien l'importance du recours au congé pathologique, souvent indispensable. Plus encore, certaines femmes sont obligées de rester alitées dès les premiers mois de grossesse, d'autres sont victimes de malaises, de maux divers, donc contraintes à s'arrêter de travailler. Elles sont alors en congé de maladie puisqu'elles s'arrêtent de travailler en dehors de la période dite de congé pathologique. En effet, les femmes ne peuvent bénéficier du congé de maternité, assimilé à une période de travail effectif, que dans la limite de deux semaines avant la date présumée de l'accouchement et de quatre semaines après la date de celui-ci.
Si la salariée a le droit de suspendre le contrat de travail pendant cette période pour la détermination de ses droits à l'ancienneté, au-delà, l'arrêt de travail, même lié à l'état de grossesse, est considéré comme un arrêt au titre de la maladie, avec, notamment, des indemnités journalières moins élevées. Ainsi, juridiquement, un tel arrêt de travail n'est pas assimilé à une période de travail effectif.
Cette disposition, qui limite le congé pathologique, est ressentie, à juste titre, comme une injustice par les femmes qui ont recours à cet arrêt.
L'objet de cet amendement est donc de prendre pleinement en considération les difficultés pathologiques liées à l'état de grossesse ou de couches que rencontrent de nombreuses femmes en supprimant, dans l'article L. 122-26 du code du travail, les « seuils temporels qui limitent le congé pathologique ». Il vise notamment à améliorer la protection des femmes enceintes, afin que tout arrêt de maladie lié à l'état de grossesse soit assimilé à une période de travail effectif.
Cela permettra à toute femme d'être reconnue dans son état de grossesse dès les premières semaines et jusqu'à son complet rétablissement après l'accouchement. C'est une mesure nécessaire dans une société qui dit reconnaître l'égalité des sexes, donc le droit des femmes à avoir un emploi. En effet, cette disposition aura des implications non seulement en matière de retraite, du fait de l'augmentation du nombre de trimestres requis pour bénéficier d'une retraite à taux plein, mais aussi s'agissant du droit individuel à la formation, le DIF, que j'évoquerai dans un instant.
Comme vous l'avez indiqué vous-même, madame la ministre, la maternité et ses suites doivent être reconnues. Aussi est-ce dans un souci de justice sociale, de solidarité et d'équité que je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de bon sens, sur lequel la commission a émis un avis favorable.
Une disposition du code du travail sous-tendue par un objectif identique est rédigée dans les mêmes termes que cet amendement. La seule différence c'est que la période de suspension est plafonnée à deux semaines avant l'accouchement et à quatre semaines après.
Cet amendement tend à lever les plafonds de la durée de suspension du contrat de travail. Il s'inspire du principe qu'avait adopté la commission au sujet de l'amendement sur le prolongement de la durée du congé parental lorsque l'enfant est prématuré.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. En application de l'alinéa 3 de l'article L. 122-26 du code du travail, il paraît difficile de modifier la durée du congé pathologique, d'une durée de deux semaines avant et de quatre semaines après l'accouchement. Cela risquerait en effet d'entraîner une inégalité au regard de l'appréciation de l'état pathologique d'une femme enceinte ou accouchée. Il y a donc là un risque de contentieux.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
Article 1er
L'article L. 122-26 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En l'absence d'accord collectif de branche ou d'entreprise déterminant des garanties d'évolution de la rémunération des salariés pendant les congés prévus au présent article et à leur issue, cette rémunération est majorée, à l'issue de ces congés, des augmentations générales ainsi que de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant la durée de ces congés par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l'entreprise. »
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Mon propos concernera l'ensemble du titre Ier, qui concerne la suppression des écarts de rémunération.
Après la loi Roudy et la loi Génisson, dont chacun s'accorde à reconnaître le bien-fondé - mais tous les moyens n'ont pas été mis en oeuvre pour atteindre l'objectif fixé - on pouvait espérer enfin un texte contraignant en faveur de l'égalité salariale et professionnelle, accompagnant de manière forte ces législations en vigueur !
En effet, aujourd'hui, selon le principe de base énoncé à l'article L. 140-2 du code du travail, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes s'impose pour « un même travail », mais aussi « pour un travail de valeur égale », notion définie au regard « d'un ensemble comparable de connaissances professionnelles, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ».
Quelle déception, donc, à la lecture de ce texte, qui ne verra comme avancées que la reconnaissance de l'état de grossesse - grâce à l'amendement que le Sénat vient d'adopter, les arrêts de maladie liés à cet état seront pris en compte - la place des femmes dans les instances représentatives, ou encore la mise en place d'aléatoires articulations entre l'activité professionnelle et l'exercice de la responsabilité familiale, comme si la responsabilité familiale n'incombait qu'aux femmes ! C'est un peu ce que j'ai eu l'impression d'entendre dans nombre d'interventions au cours de la discussion générale.
En fait d'avancées, ce n'est que la reconnaissance de droits jusqu'alors bafoués ! Quand allons-nous aborder les réelles difficultés des salariées : les bas salaires, le temps partiel imposé, l'aggravation de la paupérisation, la précarité grandissante, accentuée par les deniers textes sur l'emploi, la dévalorisation de la retraite, qui a déjà été largement dénoncée ? Et je n'évoquerai pas le harcèlement, qu'il soit sexuel ou non. Vous avez indiqué que ces questions seraient abordées à la rentrée, madame la ministre. J'en prends acte ; je serai là pour vous écouter.
Quand allons-nous également dénoncer la misogynie de certains de nos concitoyens, qui considèrent encore le salaire des femmes comme un salaire d'appoint - ce qui vaut bien souvent à celles-ci d'être les premières licenciées en cas de plan de suppression d'emplois - ou qui ne reconnaissent pas leur qualification professionnelle ? A travail égal, salaire égal, bien sûr, mais aussi qualification égale. Vous n'abordez pas ce point dans le texte que vous nous soumettez, madame la ministre.
Pour autant, je partage avec vous cette évidence, énoncée lors du débat à l'assemblée nationale : « L'égalité n'est pas seulement une exigence sociale, économique et démocratique. Elle est aussi une urgence pour des milliers de femmes qui veulent légitimement être reconnues pour ce qu'elles font et pour ce qu'elles sont » !
Pourtant, dans la première partie du projet de loi, il n'est question que de la suppression des écarts de rémunération, alors qu'il ne devrait plus y en avoir, au vu des législations en vigueur. Mais, aujourd'hui encore, certaines entreprises ne savent même pas qu'il existe des textes en ce sens, en tout cas elles font comme s'ils n'existaient pas !
Comme l'ont rappelé Mme Gautier et Mme Printz, le sondage réalisé à la demande de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes indique que 72 % des entreprises interrogées n'ont jamais organisé la négociation spécifique et obligatoire prévue par le code du travail et que, dans 60 % d'entre elles, le rapport de situation comparée n'a jamais été établi depuis 2002.
Par ailleurs, les négociations spécifiques sur l'égalité professionnelle ont davantage lieu au niveau de la branche, plus favorable à l'exercice de la négociation collective, qu'au niveau de l'entreprise. Interrogées sur l'intégration du thème de l'égalité professionnelle dans les négociations obligatoires déjà existantes, environ la moitié des entreprises ont répondu qu'elles l'ont inclus, manifestant ainsi leur réticence à la négociation spécifique, plus lourde à conduire.
C'est la raison pour laquelle un bilan rapide est nécessaire.
Je terminerai sur deux points qui ne me semblent pas davantage aller dans le sens d'une avancée des droits des salariées ?
Tout d'abord, fixer un objectif à cinq ans, c'est finalement accepter qu'il faille un quart de siècle pour donner aux femmes leur dû, puisque la loi Roudy remonte à 1983. Et je ne parle pas du préambule de la Constitution de 1946, auquel vous vous êtes référé, madame la ministre, qui prévoit déjà ceci : « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme. » !
Ensuite, comme le précise Mme Gautier dans son rapport pour la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, la fixation d'objectifs chiffrés est un élément primordial des stratégies de réduction des disparités. Or on s'aperçoit que, dans ce texte, rien n'est chiffré. Mme Sittler a même manifesté le souhait, au cours d'une réunion de la délégation, de fixer un objectif de rééquilibrage, par exemple pour l'article 13 bis nouveau, en évitant d'introduire un indicateur chiffré !
Pour ma part, j'aurais préféré des objectifs chiffrés véritablement ambitieux et contraignants pour les entreprises.
Après ces premières précisions, je veux indiquer ici que je ne partage pas l'avis rendu au nom de la délégation. Si, au cours de la réunion de cette dernière, ma collègue et amie Hélène Luc et moi-même avons donné acte à la présidente de son rapport, nous n'avons pas approuvé ce texte, sur lequel je suis très réservée, parce que je connais particulièrement la situation des femmes dans les entreprises pour avoir travaillé au sein de l'une d'entre elles pendant vingt ans et pour avoir défendu plus d'une salariée, toujours dans des situations difficiles.
Mon vote dépendra du sort réservé aux amendements déposés par mon groupe. Pour l'heure, j'oscille entre l'abstention ou le vote contre, car ce texte comporte à mes yeux plus de lacunes que d'avancées.
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 57, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 122-26 du code du travail :
« A l'issue des congés prévus au présent article, la rémunération des salariés est majorée des augmentations générales ainsi que de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant la durée de ces congés par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l'entreprise. Un accord collectif de branche ou d'entreprise détermine les conditions de mise en oeuvre des garanties d'évolution de la rémunération et d'évolution professionnelle des salariés concernés. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Plusieurs raisons expliquent qu'aujourd'hui les femmes pointent davantage au chômage que les hommes, qu'elles y restent plus longtemps, qu'elles soient majoritaires dans certains secteurs d'activité à bas salaires, les services notamment, qu'elles soient moins nombreuses en haut de l'échelle sociale et, surtout, qu'elles soient toutes moins bien rémunérées que les hommes.
Les mentalités doivent certes évoluer, mais cela ne saurait suffire : « il faudrait aller au-delà, des mesures coercitives sont indispensables », comme l'a souligné Mme Gaétane Hazeran s'exprimant en tant que chef d'entreprise devant la commission des affaires sociales.
Or il n'y a rien de contraignant dans ce projet de loi, qui s'appuie essentiellement sur un « système de confiance » et qui renvoie à la négociation d'entreprise le soin de « tordre le cou » aux inégalités entre les hommes et les femmes au travail. C'est le point noir de cet énième texte, de l'efficacité duquel beaucoup doutent. Et pour cause !
En dépit de la règle : « à travail égal, salaire égal », connue de tous, et d'un cadre juridique important, le rééquilibrage attendu des salaires n'est toujours pas acquis. Dans certains cas, même, l'écart s'est creusé, comme le note dans son rapport Françoise Milewski, économiste à l'OFCE : « La part des femmes dans les salaires les plus élevés tend à augmenter lentement, mais celle des femmes dans les bas salaires ne baisse pas. Aujourd'hui, près de 80 % des salariés à bas salaires sont des femmes. [...] Cette proportion est d'environ 10 points supérieure à son niveau des années quatre-vingt-dix. »
Le projet de loi ne prévoit rien de volontariste pour résorber d'ici à cinq ans ces inégalités salariales, inégalités que la politique de l'emploi du Gouvernement s'entête par ailleurs à enraciner en développant et en subventionnant l'emploi à temps partiel.
Il ne contient rien de très novateur, exception faite des dispositions de l'article 1er visant à neutraliser les périodes de maternité en termes de rémunération et de carrière, comme je l'ai souligné devant la commission des affaires sociales.
Nous approuvons évidemment le principe d'une actualisation de la rémunération du salarié de retour de congé maternité ou d'adoption. Encore faut-il s'entendre sur le terme « rémunération » et le retenir dans un sens large, donc y intégrer les primes et les dispositifs d'intéressement ; nous reviendrons sur ce point. Encore faut-il également ne pas laisser la possibilité aux entreprises de déroger à ce droit aux augmentations collectives et individuelles.
Or, tel qu'il est rédigé, l'article 1er dispose que c'est en l'absence d'accord collectif de branche ou d'entreprise que les garanties en matière de rémunération susvisées trouveront à s'appliquer.
A contrario, cela signifie que, par accord collectif, d'autres mesures peuvent être décidées et qu'elles primeront sur le minimum légal, y compris lorsqu'elles seront moins disantes.
Nous voulons éviter cette situation, rendue possible par l'évolution négative des règles applicables à la négociation collective initiée par M. Fillon, qui, je vous le rappelle, a cassé la hiérarchie des normes et a remis en cause le principe de faveur.
Par notre amendement, donc, d'une part, nous proposons de poser au bénéfice de tous les salariés la règle minimale d'évolution de la rémunération durant le congé maternité et, d'autre part, nous prévoyons que cette règle puisse être adaptée par la négociation collective dans un sens plus favorable aux salariés.
Cette solution laisse toute sa place à la généralisation de certains accords actuellement en vigueur, mais qui sont loin d'être majoritaires, tel celui de BNP-Paribas, aux termes duquel le congé de maternité est considéré comme du temps de travail effectif.
Un amendement similaire a pourtant été rejeté par les députés et le Gouvernement, qui ont estimé, à tort, qu'il n'était pas compatible avec la liberté qu'il convient de laisser aux employeurs. Il faut bien évidemment, et malheureusement, comprendre : la liberté pour ces derniers de continuer leurs pratiques discriminantes en concluant des accords dérogatoires à la loi.
Pour parvenir à résorber les écarts de salaires, c'est de règles claires et de garanties supplémentaires que nous avons besoin, et non de pétitions de principe sans valeur obligatoire.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter notre amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 22, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 122-26 du code du travail, après les mots :
cette rémunération
insérer les mots :
au sens de l'article L. 140-2,
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement a pour objet d'ajouter une précision à l'article 1er.
L'article L. 140-2 du code du travail indique en effet, dans son deuxième alinéa, que, « par rémunération [...], il faut entendre le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier ».
Afin d'éviter toute contestation ou toute tentative éventuelle de contourner la loi, nous proposons que cette précision soit apportée par la mention de l'article L. 140-2. En effet, depuis un certain nombre d'années, outre les exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires et sur de nombreux dispositifs aidés, on voit se multiplier les modes de rémunération hors salaire de base.
L'exemple le plus emblématique en est sans doute l'intéressement, mais les avantages en nature sont également de plus en plus répandus : il peut s'agir de bons d'achat, de voitures de fonction pour les cadres, ou encore de primes calculées au prorata du temps de présence, ce qui peut poser problème, particulièrement dans le cas qui nous occupe.
Ces modes de rémunération présentent pour les salariés de multiples inconvénients : ils sont aléatoires, car ils sont soumis aux résultats connus de l'entreprise ; ils sont aussi à la discrétion de l'employeur, puisqu'ils échappent aux grilles et classifications inscrites dans les conventions collectives.
Tout cela ne contribue pas à favoriser le dialogue social dans l'entreprise et conduit, à l'inverse, à créer un climat de rivalité entre salariés.
Pour les femmes absentes de l'entreprise pendant plusieurs mois, le risque existe qu'un certain nombre de ces avantages soient au passage « oubliés », en quelque sorte, lorsqu'il s'agira de calculer leur augmentation.
Afin d'éviter que les femmes ne soient pénalisées une fois de plus, nous proposons donc d'inscrire dans la loi cette précision relative à la nature des rémunérations dont il s'agit.
Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-26 du code du travail, remplacer les mots :
pendant la durée de ces congés par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l'entreprise
par les mots :
par le salarié au cours des trois années précédant lesdits congés
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'article 1er a pour objet d'accorder au salarié de retour de congé de maternité ou d'adoption le bénéfice à la fois des augmentations générales et de la moyenne des augmentations individuelles reçues par les collègues.
La seconde partie de cette disposition soulève de nombreuses difficultés.
La première difficulté concerne le respect de la confidentialité des rémunérations individuelles accordées aux salariés, surtout dans les petites entreprises.
La deuxième difficulté porte sur l'impossibilité, réelle pour les petites et moyennes entreprises, d'établir une moyenne significative lorsque la catégorie concernée est très limitée.
En outre, étant fondé sur les augmentations individuelles de la catégorie professionnelle concernée, ce dispositif risque de provoquer l'incompréhension ou un sentiment d'injustice de la part des autres salariés de la même catégorie, qui ne comprendraient pas que leur présence dans l'entreprise ne soit pas plus valorisée.
Par ailleurs, le caractère contre-productif de cette mesure a été relevé par de nombreuses entreprises, qui soulignent déjà qu'elle ne les incitera pas à accorder d'augmentations salariales individuelles dès lors que les salariés qui n'ont pas travaillé dans l'entreprise en bénéficieront aussi.
Enfin, le dispositif semble peu équitable, puisque les salariés qui bénéficient habituellement des plus fortes augmentations salariales pour leurs performances et qui reviennent de leur congé risquent d'être pénalisés par l'application de la moyenne des augmentations individuelles, donc par un nivellement par le bas.
L'amendement que je propose vise donc à reprendre le principe des augmentations générales. Toutefois, en ce qui concerne la moyenne des augmentations individuelles, je pense qu'il vaut mieux s'en tenir aux augmentations reçues les trois années précédentes par le salarié lui-même.
Mme la présidente. L'amendement n° 58, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 122-26 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :
Ces augmentations doivent tenir compte du salaire de base, des primes, des avantages en nature et de la distribution d'actions.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. L'article 1er concerne la suppression de l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes.
Selon les différentes études, le salaire net moyen des femmes est inférieur de 25 % à celui des hommes, toutes catégories confondues. Cet écart est plus important encore chez les cadres. Pourtant, voilà maintenant plus de trente ans, depuis 1972 pour être exact, que le principe : « à travail égal, salaire égal » est inscrit dans le code du travail. Malgré tout, à compétence, formation, âge et ancienneté équivalents, l'écart continue de se situer entre 5 et à 7 %, si l'on en croit la plupart des évaluations.
Cet écart est encore plus creusé par les discriminations dans la poursuite des carrières, l'accès au travail, la qualité des emplois proposés et le temps partiel imposé, essentiellement féminin, question que l'on élude sans cesse mais sur laquelle - n'ayez crainte ! - nous reviendrons plus tard.
Force est donc de constater l'ancrage puissant dans les mentalités des inégalités et des discriminations dont les femmes sont encore aujourd'hui victimes. Que ce soit la loi Roudy de 1983, qui a obligé les entreprises de plus de cinquante salariés à publier chaque année une comparaison entre la situation salariale des femmes et celle des hommes, ou la loi Génisson de 2001, qui a rendu obligatoires les négociations annuelles dans l'entreprise sur l'égalité professionnelle, ou encore la directive européenne du 23 septembre 2002, qui pose le principe de l'égalité de traitement, aucun des différents dispositifs législatifs n'a su répondre au problème des inégalités de salaire.
L'idée que le salaire des femmes n'est qu'un salaire d'appoint a donc malheureusement de beaux jours devant elle. Malgré les efforts du législateur, les conceptions rétrogrades du rôle de la femme dans la société font encore office de loi chez de trop nombreux employeurs. Il serait donc temps de remettre en question les différents textes qui visent à lutter contre ce fléau et d'adopter de nouveaux dispositifs plus contraignants, plus efficaces.
Malheureusement, comme nous le soulignions tout à l'heure, madame la ministre, le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui ne va pas jusque-là. En effet, globalement, il ne fait que reprendre les textes antérieurs et ne permet aucune avancée supplémentaire.
On note toutefois un progrès sur la question des congés de maternité : l'article 1er, qui impose de remettre à niveau les rémunérations des femmes après un congé de maternité, est une bonne chose, à condition évidemment que le mot « rémunération » soit pris au sens large.
La maternité ne saurait être un « handicap ». Nous proposons donc, par l'amendement n° 58, que soient incluses toutes les dimensions de la rémunération à prendre en compte pour calculer l'avancement après un congé de maternité, à savoir non seulement le salaire de base, mais également toute prime qui aurait pu être versée par l'entreprise dans l'intervalle, ainsi que les éventuels dispositifs d'intéressement tels que les avantages en nature ou les distributions d'actions.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
COMMUNICATION relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
5
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour un rappel au règlement.
M. Roland Muzeau. Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l'article 36 de notre règlement.
Nous venons d'apprendre, par une déclaration du président du groupe UMP de l'Assemblée nationale, M. Bernard Accoyer, que, une nouvelle fois, le Premier ministre donnait satisfaction à l'aile la plus libérale de sa majorité en annonçant une réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF, d'ici à la fin de l'année. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Laurent Béteille. Enfin !
M. Alain Gournac. Bravo !
M. Guy Fischer. C'est scandaleux !
M. Roland Muzeau. Je ne nourrissais aucun doute sur la nature de vos réactions, chers collègues de la majorité !
Hier encore, Dominique de Villepin refusait d'envisager toute modification de cet impôt dans le prochain projet de loi de finances.
Décidément, il ne se passe pas un jour sans que la droite annonce un coup de force contre la justice sociale !
M. Laurent Béteille. Ce n'est pas vrai !
M. Roland Muzeau. Que ceux qui paient l'ISF lèvent la main !
M. Alain Gournac. C'est le président qui dirige les débats !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Muzeau.
M. Roland Muzeau. On n'arrête pas de m'interrompre !
Après les assauts contre le droit du travail à l'occasion du plan de déstructuration sociale de M. Borloo, après les privations réalisées, GDF, ou annoncées, EDF et les autoroutes, le gouvernement de MM. de Villepin, Sarkozy et Breton vole au secours des plus fortunés.
Alors que les salaires sont au plus bas, que les allocations chômage sont bloquées, que l'écart entre les riches et les pauvres ne cesse d'augmenter, le Premier ministre, emboîtant le pas à son fortuné ministre de l'économie, annonce une réduction de la portée de l'ISF.
Cette nouvelle annonce conservatrice survient après une campagne bien orchestrée tentant, à partir d'un ou deux exemples totalement atypiques, de faire passer les plus riches - moins de 300 000 personnes - pour des persécutés.
Nous protestons devant ce nouveau coup bas contre le peuple, qui tient de la provocation ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)