sommaire
présidence de Mme Michèle André
2. Modification de l'ordre du jour
3. Egalité salariale entre les femmes et les hommes. - Discussion d'un projet de loi
Discussion générale : Mmes Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité ; Esther Sittler, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Gisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes ; M. Bernard Seillier, Mmes Gisèle Printz, Janine Rozier, Catherine Morin-Desailly, MM. Roland Muzeau, Claude Domeizel, Jean-Guy Branger, Mme Patricia Schillinger.
Mme la ministre déléguée.
Clôture de la discussion générale.
Article additionnel avant l'article 1er
Amendement no 56 de Mme Annie David. - Mmes Annie David, le rapporteur, Mme la ministre déléguée. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Mme Annie David.
Amendements nos 57, 58 de M. Roland Muzeau, 22 de Mme Gisèle Printz et 1 de la commission. - M. Roland Muzeau, Mmes Gisèle Printz, le rapporteur.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
4. Communication relative à une commission mixte paritaire
MM. Roland Muzeau, le président.
6. Egalité salariale entre les femmes et les hommes. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
Mme Esther Sittler, rapporteur de la commission des affaires sociales ; MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - Rejet des amendements nos 57, 1 et 58 ; adoption de l'amendement no 22.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 88 rectifié ter de M. Jacques Legendre. - Mmes Janine Rozier, le rapporteur. - Retrait.
Amendement no 2 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 2
Amendement no 23 de Mme Gisèle Printz. - Mmes Patricia Schillinger, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 60 de M. Roland Muzeau. - Mmes Annie David, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 3 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 50 de Mme Catherine Procaccia. - Mmes Catherine Procaccia, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait.
Amendement no 61 de Mme Annie David. - Mmes Annie David, le rapporteur, M. le ministre. - Rejet.
Amendement no 4 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 5 de la commission. - M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 6 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 51 de Mme Catherine Procaccia. - Mme Catherine Procaccia. - Retrait.
Amendement no 7 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 3
Amendement no 8 de la commission. - Mme le rapporteur, MM. le ministre délégué, le président de la commission. - Retrait.
Amendement no 9 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 52 de Mme Catherine Procaccia. - Mmes Catherine Procaccia, le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 62 de M. Roland Muzeau. - M. Roland Muzeau, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendements identiques nos 24 de Mme Gisèle Printz et 63 de M. Roland Muzeau. - Mmes Gisèle Printz, Hélène Luc, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 11 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendement no 86 rectifié bis de M. Jacques Legendre. - Mmes Janine Rozier, le rapporteur, MM. le ministre délégué, le président de la commission. - Adoption.
Amendement no 10 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Amendements nos 12 de la commission, 90 du Gouvernement, 41 de Mme Christiane Demontes et 65 de Mme Annie David. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué, Mmes Christiane Demontes, Annie David. - Retrait de l'amendement no 65 ; adoption de l'amendement no 12, les amendements nos 90 et 41 devenant sans objet.
Amendements nos 25 de Mme Gisèle Printz, 45 rectifié de Mme Catherine Morin-Desailly, 64 de Mme Annie David, 39, 40 de Mme Christiane Demontes et 91 rectifié du Gouvernement. - Mmes Gisèle Printz, Catherine Morin-Desailly, Annie David, Christiane Demontes, M. le ministre délégué, Mme le rapporteur, M. Jean-Pierre Godefroy. - Retrait de l'amendement no 91 rectifié ; rejet des amendements nos 25, 45 rectifié, 64, 39 et 40.
Amendement no 66 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 59 rectifié de M. Roland Muzeau. - M. Roland Muzeau, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 4
Amendement no 26 de Mme Gisèle Printz. - Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 42 de Mme Christiane Demontes. - Mmes Christiane Demontes, le rapporteur. - Rejet.
M. le président.
Amendement no 89 de Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, le rapporteur, MM. le ministre délégué, Roland Muzeau, Robert Del Picchia, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Adoption.
Amendement no 13 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 14 de la commission. - Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Article additionnel avant l'article 5 ou après l'article 6
Amendements nos 46 rectifié de M. Michel Mercier, 68 de M. Roland Muzeau et 32 de Mme Gisèle Printz. - Mme Catherine Morin-Desailly, M. Roland Muzeau, Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, MM. le ministre délégué, Jean-Pierre Godefroy, Roland Muzeau. - Rejet des trois amendements.
MM. Jean-Pierre Godefroy, le président.
Amendement no 92 du Gouvernement. - Mmes Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité ; le rapporteur, Catherine Procaccia. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 5
Amendements nos 85 rectifié et 87 rectifié bis de M. Jacques Legendre. - Mmes Françoise Henneron, le rapporteur, la ministre déléguée. - Retrait des deux amendements.
Amendement no 15 de la commission. - Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 6
Amendement no 71 de M. Roland Muzeau. - M. Roland Muzeau, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 27 de Mme Gisèle Printz. - Mmes Patricia Schillinger, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendements nos 28 et 29 de Mme Gisèle Printz. - Mmes Patricia Schillinger, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet des deux amendements.
Demande de réserve des amendements nos 44 et 98. - M. Alain Gournac, vice-président de la commission des affaires sociales ; Mme la ministre déléguée. - La priorité est ordonnée.
Articles additionnels après l'article 6 (suite)
Amendements nos 16 de la commission et 31 de Mme Gisèle Printz. - Mmes le rapporteur, Gisèle Printz, la ministre déléguée. - Retrait de l'amendement no 16 ; rejet de l'amendement no 31.
Amendements nos 30 de Mme Gisèle Printz et 70 M. Roland Muzeau. - Mme Gisèle Printz, M. Guy Fischer, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet des deux amendements.
Amendements identiques nos 33 de Mme Gisèle Printz et 69 de M. Roland Muzeau. - Mmes Gisèle Printz, Annie David, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 72 de M. Roland Muzeau. - Mmes Eliane Assassi, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendements identiques nos 34 de Mme Gisèle Printz et 73 de M. Roland Muzeau ; amendement no 35 Mme Gisèle Printz. - Mmes Patricia Schillinger, Hélène Luc, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet des trois amendements.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 7
Amendements nos 36 Mme Gisèle Printz et 74 M. Roland Muzeau. - Mme Gisèle Printz, M. Guy Fischer, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet des deux amendements.
Amendements identiques nos 37 de Mme Gisèle Printz et 75 de M. Roland Muzeau. - Mmes Gisèle Printz, Annie David, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendement no 17 de la commission. - Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 18 de la commission. - Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 12
Amendement no 47 de Mme Catherine Morin-Desailly. - Mmes Catherine Morin-Desailly, le rapporteur, la ministre déléguée, Annie David. - Rejet.
Article additionnel après l'article 12 bis
Amendement no 49 rectifié de Mme Catherine Procaccia. - Mmes Catherine Procaccia, le rapporteur, la ministre déléguée. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article additionnel avant l'article 12 ter
Amendement no 97 de Mme Annie David. - Mmes Annie David, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 19 de la commission et sous-amendement no 93 du Gouvernement ; amendement no 76 de Mme Annie David. - Mmes le rapporteur, la ministre déléguée, Annie David. - Retrait du sous-amendement no 93 ; adoption de l'amendement no 19 rédigeant l'article, l'amendement no 76 devenant sans objet.
Article additionnel après l'article 13
Amendement no 77 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 20 de la commission. - Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 99 rectifié du Gouvernement et 78 de M. Roland Muzeau. - Mme la ministre déléguée, M. Roland Muzeau, Mme le rapporteur. - Adoption de l'amendement no 99 rectifié rédigeant l'article, l'amendement no 78 devenant sans objet.
Amendements nos 100 rectifié du Gouvernement et 79 de M. Roland Muzeau. - Mmes la ministre déléguée, le rapporteur, M. Roland Muzeau. - Adoption de l'amendement no 100 rectifié rédigeant l'article, l'amendement no 79 devenant sans objet.
Amendement no 43 de Mme Christiane Demontes. - Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 38 de Mme Gisèle Printz. - Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, la ministre déléguée, M. Jean-Pierre Godefroy. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels avant l'article 15
Amendement no 80 de Mme Annie David. - Mmes Annie David, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 82 de Mme Annie David. - Mmes Annie David, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 81 de Mme Annie David. - Mmes Annie David, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 21 de la commission et sous-amendements nos 94 à 96 du Gouvernement. - Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Adoption des trois sous-amendements et de l'amendement modifié.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 15
Amendement no 84 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 48 de Mme Catherine Morin-Desailly. - Mmes Catherine Morin-Desailly, le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
Amendement no 83 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet.
présidence de M. Philippe Richert
Amendements identiques nos 53 de M. Serge Lagauche et 54 de M. Jack Ralite ; amendement no 55 de M. Jack Ralite. - Mme Gisèle Printz, M. Robert Bret, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée. - Rejet des trois amendements.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 10
Amendements (précédemment réservé) nos 44 de M. Jean-Pierre Godefroy et 98 du Gouvernement. - MM. Jean-Pierre Godefroy, le ministre délégué, Mme le rapporteur. - Retrait de l'amendement no 44 ; adoption de l'amendement no 98 insérant un article additionnel.
MM. Bernard Seillier, Roland Muzeau, Mmes Catherine Morin-Desailly, Christiane Demontes, M. Alain Gournac, Mmes le rapporteur, la ministre déléguée.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
M. le président.
7. Mesures d'urgence pour l'emploi. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire
Discussion générale : MM. Alain Gournac, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes ; Guy Fischer, Jean-Pierre Godefroy.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
MM. André Lardeux, Michel Mercier.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
M. le rapporteur.
9. Dépôt d'un rapport d'information
10. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André
vice-présidente
1
PROCÈS-VERBAL
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
modification de l'ordre du jour
Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement, la lettre suivante :
« Monsieur le président,
« En application de l'article 48 de la Constitution et de l'article 29 du règlement du Sénat, le Gouvernement modifie comme suit l'ordre du jour de la séance du mercredi 13 juillet :
« Mercredi 13 juillet, le matin, l'après-midi et, éventuellement, le soir :
« - Lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises ;
« - Troisième lecture du projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale ;
« - Lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de sauvegarde des entreprises ;
« - Lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif au développement des services à la personne ;
« - Lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie, sous réserve de leur dépôt.
« Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'expression de mes sentiments les meilleurs.
« Signé : HENRI CUQ »
Acte est donné de cette communication.
3
égalité salariale entre les femmes et les hommes
Discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes (nos 343, 435).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame le rapporteur, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les femmes et les hommes, mesdames, messieurs les sénateurs, toute vraie politique s'inscrit dans un projet qui lui donne sens et justifie les réformes qu'elle conduit.
Il en va ainsi de ce projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes que j'ai l'honneur de vous présenter et pour lequel je tiens à rendre hommage à Nicole Ameline.
Ce texte a un objectif ambitieux et les mesures qu'il vous propose d'adopter répondent à un enjeu qui va bien au-delà de leur contenu.
Notre objectif est de contribuer à l'émergence d'un nouveau modèle social qui n'est autre que l'approfondissement de notre modèle républicain.
Ce modèle, c'est celui d'une société qui garantit à toutes et à tous l'égalité des chances et une pleine égalité de traitement.
Ce modèle, c'est celui d'une société où le mérite seul compte et où il n'est entravé ni par des discriminations injustifiées ni par des préjugés dépassés.
Ce modèle, c'est celui d'une cohésion sociale renforcée autour des valeurs phares de notre idéal républicain.
Le texte proposé poursuit en cela le projet des fondateurs de notre République, projet dont chacun s'accorde à reconnaître qu'il doit être rénové, mais tout en visant les objectifs qui l'ont toujours animé.
Ce projet de loi est donc un projet de justice : il n'est plus tolérable que des discriminations en termes de rémunérations subsistent entre les hommes et les femmes occupant les mêmes fonctions ; de même, il n'est plus tolérable que les femmes n'accèdent pas autant qu'elles le pourraient aux filières d'emploi les plus porteuses d'avenir ou aux postes de responsabilité.
Non seulement ces discriminations sont injustes, mais surtout elles nuisent au dynamisme de notre économie. En luttant contre elles, le texte proposé est incontestablement au service de l'efficacité économique et sociale de notre pays.
L'égalité, et non l'égalitarisme, est une condition de notre compétitivité. Grâce à elle, tous les talents trouvent à s'exprimer, et la diversité qu'elle favorise est source d'enrichissement, mais aussi, à n'en point douter, de complémentarité.
En renforçant l'accès des femmes aux postes de responsabilité et à la formation, en les aidant à articuler vie professionnelle, vie personnelle et vie familiale, ce projet de loi va accroître leur présence à tous les niveaux de l'activité économique, mais aussi dans des secteurs où elles sont aujourd'hui peu représentées. L'économie va ainsi bénéficier d'un potentiel féminin encore sous-employé.
Cette égalité est également facteur d'efficacité au moment où la France, comme de nombreux pays européens, connaît un revirement démographique marqué.
Face à la diminution prévisible de la main-d'oeuvre, valoriser la performance des femmes est un enjeu crucial de productivité pour les entreprises et de compétitivité pour notre économie.
De même, pour faire face au vieillissement démographique, une natalité plus dynamique suppose que la maternité et ses suites ne soient pas une source d'inégalité dans l'emploi comme dans la formation.
C'est pourquoi ce texte a vocation à neutraliser l'impact de la maternité sur l'évolution salariale, à améliorer la prise en compte de la parentalité et à favoriser la conciliation entre vie professionnelle et vie privée.
Enfin, faire justice aux femmes et contribuer à leur meilleure insertion professionnelle est aussi un enjeu de cohésion sociale, car une société unie est, par définition, une société qui traite chacun sur un pied d'égalité.
C'est donc au titre de ma double compétence, cohésion sociale et parité, que j'ai l'honneur de porter ce texte devant vous.
Ce projet de loi n'est pas le premier à s'intéresser au sujet qui nous préoccupe, celui des femmes.
Le principe d'égalité salariale figure déjà dans le traité de Rome de 1957 et dans notre code du travail depuis 1972.
Plusieurs lois, dont celles de 1983 et de 2001, sont intervenues depuis lors pour tenter de concrétiser le principe fixé par le préambule de notre Constitution, que je ne résiste pas à vous rappeler : « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme ».
L'impact de ces lois n'a pas été négligeable puisque l'écart salarial s'est réduit de moitié depuis les années soixante.
Pour autant, nous ne pouvons pas considérer cela comme suffisant. Nous avons tous fait le constat que ces lois successives n'ont pas pleinement atteint leur objectif.
Par exemple, en 2004, trois ans après l'adoption de la loi Génisson, 72 % des entreprises n'avaient encore jamais organisé les négociations spécifiques, que réclamait cette loi, sur le thème de l'égalité professionnelle.
Le texte que nous vous présentons était donc nécessaire pour concrétiser le projet que je viens d'évoquer.
L'INSEE confirme, avec tous les observatoires qui ont étudié la question, que l'écart des salaires entre les femmes et les hommes reste significatif : la masse salariale représentée par les femmes est inférieure de plus de 20 % à celle des hommes.
Cet écart, s'il se réduit, ne diminue pas fondamentalement. On constate que le rattrapage s'est même interrompu de façon significative depuis les années quatre-vingt-dix.
La discrimination pure et simple reste de l'ordre de 5 % à 10 %, selon les secteurs professionnels.
M. Roland Muzeau. Oh, c'est bien plus que cela !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le reste de l'écart, en moyenne de quinze points, s'explique par des raisons structurelles liées aux filières d'emploi occupées par les femmes. Les emplois féminins sont concentrés dans les dix familles professionnelles où les salaires proposés sont les plus faibles. Je pense notamment aux secteurs du textile, de l'hôtellerie restauration, des services à la personne, de la propreté et de la grande distribution.
Sur les 8,4 millions d'actifs qui perçoivent un salaire inférieur au SMIC, 80 % sont des femmes, et cette proportion est supérieure d'environ dix points au niveau constaté au début des années quatre-vingt-dix.
Il y a donc là, clairement, un recul et une nécessité d'action.
Ces secteurs sont, en outre, les moins porteurs d'emploi, ce qui explique la persistance d'un « sur-chômage » féminin qui n'a pas faibli depuis trente ans et qui a même, sur certains secteurs de notre territoire, tendance à s'aggraver.
Quelle que soit leur catégorie sociale ou leur classe d'âge, les femmes sont plus souvent, et surtout plus longtemps, au chômage que les hommes. Le taux de chômage féminin s'élevait à près de 11 % à la fin de l'année 2004, contre 9 % chez les hommes.
Enfin, ces secteurs professionnels sont aussi ceux qui concentrent la plus grande proportion de travail intérimaire, de contrats à durée déterminée et à temps partiel.
En 2003, sur quatre millions de travailleurs à temps partiel, 82 % sont des femmes et, dans la majorité des cas, il s'agit de temps partiel subi. Une femme sur trois travaille à temps partiel contre un homme sur vingt seulement !
Le cumul emploi à temps partiel et emploi peu rémunéré est particulièrement désastreux pour l'égalité salariale.
Il n'est plus tolérable que des femmes, souvent en situation de monoparentalité, aient à subir des horaires éclatés tout au long de la journée, d'où des amplitudes horaires très importantes, sur un lieu de travail souvent extrêmement éloigné de leur domicile, ce qui les oblige à s'absenter de chez elles du matin au soir, avec toutes les conséquences que cela entraîne, notamment pour leurs enfants.
C'est pourquoi la question du temps partiel est au coeur des préoccupations du Gouvernement et constitue l'un des sujets prioritaires sur lesquels je travaille.
C'est dans cet esprit que j'ai commencé à rencontrer l'ensemble des partenaires sociaux.
La régulation des conditions du travail à temps partiel n'est pas l'objet de ce projet de loi, mais je compte engager aux côtés de Jean-Louis Borloo et Gérard Larcher une consultation approfondie avec les partenaires sociaux sur ce thème.
Je vais également confier au Conseil économique et social une mission d'expertise sur ce sujet tant le phénomène est aujourd'hui prégnant et tant il appelle des réponses concrètes.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est certain !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. L'inégalité dans l'emploi liée à la concentration des femmes dans certaines filières professionnelles se double d'une inégalité dans l'accès aux responsabilités, inégalité qui touche, elle, tous les secteurs professionnels.
Le nombre de femmes cadres a augmenté depuis les années quatre-vingt, mais leur part dépasse à peine un tiers.
Moins de 10 % des dirigeants d'entreprises et moins de 5 % des membres de conseil d'administration sont des femmes.
C'est ce diagnostic global qui nous a amenés à réagir et, pour tenir compte des efforts passés et des raisons de leur échec, nous avons décidé de changer de méthode.
Nous posons clairement, et pour la première fois, un objectif de résultat : mettre fin une fois pour toutes à la discrimination salariale entre les femmes et les hommes dans notre pays, dans un délai que nous fixons à cinq ans.
Le contexte actuel est particulièrement favorable à la réalisation de cet objectif ambitieux parce que la volonté de réussir est générale, comme l'a montré la signature unanime, le 1er mars 2004, de l'accord national interprofessionnel relatif à la mixité et à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.
Cet accord a jeté les bases indispensables à la réussite de cet objectif. Pour la première fois en effet, les éléments structurels de la discrimination salariale ont été pris en considération. Ainsi, le lien entre l'exercice de la parentalité et les conditions de travail a été reconnu, et les partenaires sociaux s'accordent sur le fait qu'il convient de mieux orienter l'appareil de formation professionnelle pour permettre aux demandeuses d'emploi comme aux salariées d'accéder à des filières différentes, qualifiantes et, surtout, porteuses d'emplois pour demain.
Le calendrier que nous avons adopté répond à la méthode que nous avons choisie : faire confiance au dialogue social et laisser aux acteurs sociaux la responsabilité et le temps d'agir.
Nous invitons solennellement ces derniers à relancer la négociation collective dès les prochains mois, au niveau des branches professionnelles comme à celui de chaque entreprise.
Cette invitation s'accompagne de trois dispositifs fortement incitatifs pour tenir compte des résultats de la loi Génisson, qui, malheureusement, sont restés insuffisants.
Tout d'abord, en cas d'échec ou d'absence de négociation de branche, le ministre chargé du travail pourra réunir une commission mixte paritaire afin que s'engage ou que se poursuive la négociation.
Ensuite, une convention de branche ne comportant pas de disposition relative à la suppression des écarts de salaires ne pourra pas être étendue.
Enfin, les accords salariaux des entreprises ne seront enregistrés, donc validés et opposables aux tiers, que s'ils sont accompagnés d'un procès-verbal d'engagement des négociations.
Voilà qui permettra d'avancer résolument vers notre objectif !
A mi-parcours, nous réunirons une conférence nationale sur l'égalité salariale. Si les résultats constatés ne sont pas satisfaisants, le Gouvernement soumettra ceux qui ne se seront pas engagés dans la démarche à une contribution financière assise sur la masse salariale.
M. Roland Muzeau. Ce sera trop tard !
Mme Annie David. Il faut le faire tout de suite !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Voilà pour le dispositif d'égalité salariale. Suffit-il pour concrétiser le projet que j'ai évoqué au début de mon intervention ? Assurément non.
Nous ne pouvons nous contenter d'un objectif quantitatif, car les motifs des discriminations qui susbistent sont d'ordre structurel.
Nous avons donc décidé d'agir vigoureusement sur les trois principaux facteurs de discrimination : la parentalité, la formation, les pesanteurs et les habitudes s'agissant de l'accession aux postes de responsabilité.
Pour mieux concilier l'emploi et la parentalité, nous souhaitons que la progression du salaire de la personne en congé maternité ne se limite plus aux seules augmentations collectives pour inclure également l'augmentation moyenne résultant des augmentations individuelles intervenues dans l'entreprise.
C'est la norme qui a été retenue par les entreprises, qui prévoient déjà la compensation de l'effet négatif de la maternité sur l'augmentation du salaire. D'autres systèmes de référence étaient, bien sûr, envisageables.
Aucun système n'est parfait. Celui que nous avons retenu nous paraît cependant préférable, et nous y reviendrons dans le débat, à celui qui consisterait à faire bénéficier les salariées de retour de congé d'une augmentation individuelle calculée sur la base de celles qu'elles avaient elles-mêmes perçues dans les trois années précédentes. Il nous semble, d'une part, que ce dispositif pénaliserait les nouveaux embauchés et, d'autre part, qu'il ne tient absolument pas compte des aléas de conjoncture que subit l'entreprise pendant le congé. En outre, il nous faut veiller ensemble à ne pas introduire de freins à la rémunération des jeunes femmes. Or, l'employeur pourrait être incité à ne pas les augmenter dans la crainte d'avoir à payer une prime trop élevée à leur retour de congé de maternité.
Toujours dans l'optique d'améliorer l'employabilité des femmes, ce qui est l'objet de notre mobilisation, le texte vise à faciliter pour les PME les modalités de remplacement des salariées parties en congé de maternité.
Concernant l'accès des femmes aux postes de responsabilité, nous adoptons une démarche plus volontariste pour augmenter leur participation aux instances délibératives et juridictionnelles.
Lors du débat à l'Assemblée nationale, les modalités de mise en oeuvre de la parité au sein des instances délibératives ont été renforcées, et cela tant pour les conseils d'administration des entreprises publiques, qui doivent incontestablement aller plus loin et donner l'exemple, que pour ceux des sociétés anonymes.
Là encore, nous consolidons la place des femmes au sein des conseils de prud'hommes en renouvelant, pour les élections de 2008, le processus de féminisation mis en place en 2002.
Notre dernier levier d'action vise à généraliser l'accès des femmes à l'ensemble des outils de la formation professionnelle et à l'apprentissage.
Les discriminations constatées résultent en grande partie, en effet, de la persistance chez les femmes de cursus de formation orientés depuis l'école vers les secteurs où les emplois sont plus précaires et moins rémunérateurs. Là encore, les constats sont affligeants : aujourd'hui, on compte à peine 25 % de femmes dans les filières scientifiques.
Nous vous proposons plusieurs mesures pour essayer d'aller plus loin.
D'abord, les partenaires sociaux pourront majorer l'allocation de formation d'au moins 10 % pour le salarié qui engage des frais supplémentaires de garde d'enfant afin de suivre une formation en dehors de son temps de travail.
Ensuite, le projet de loi facilite l'accès à la formation des femmes revenant de congé parental lorsqu'elles sont amenées à changer d'emploi.
Je rappelle également que le ministère de l'éducation nationale s'est engagé, dans le cadre de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, à augmenter de 20 % la place des filles dans les filières scientifiques de l'enseignement général et technologique d'ici à 2010.
Enfin, je souhaite que les régions, compétentes en matière d'apprentissage et de formation professionnelle, favorisent le plus possible la présence de jeunes filles et de femmes, en facilitant leur accueil dans leurs structures et en les invitant à rejoindre des formations qualifiantes leur ouvrant la porte vers des métiers d'avenir et, évidemment, plus rémunérateurs.
Le projet de loi prévoit à cet effet que le plan régional de développement des formations professionnelles devra assurer une présence équilibrée des femmes et des hommes dans chacune des filières de formation.
M. Nicolas About, président de la commission. Très bien !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Voilà, dans ses grandes lignes, la volonté qui m'anime. L'égalité salariale est un enjeu trop important pour que l'ensemble des forces productives de la nation ne se mettent pas en mouvement pour que la France de demain, la France qui gagne, assure une place équitable à 52 % de sa population, soit plus de la moitié, dans tous les secteurs de la vie publique, sociale et professionnelle.
C'est autant une question de justice que de dynamisme économique et de cohésion sociale. C'est donc un très beau projet pour notre République. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, pourquoi un nouveau texte sur la parité professionnelle ? C'est la question que l'on pouvait se poser lors de l'annonce de ce projet de loi. Pourtant, contrairement à ce que l'on pense, le Parlement n'a adopté que deux lois en plus de vingt ans en ce domaine : la loi Roudy de 1983 et la loi Génisson de 2001. Mais, je ne sais pourquoi, lorsqu'il s'agit de parité, certains trouvent parfois qu'on en fait un peu trop !
Le texte que j'ai l'honneur de rapporter au nom de la commission des affaires sociales n'est pourtant pas une loi de plus, une loi de trop. Il ne se contente pas de formuler une déclaration de principe. Aujourd'hui, l'exigence de parité n'est plus seulement une question démocratique ou sociale : elle est devenue un enjeu économique, ce qui explique que le Président de la République en ait fait une priorité au début de cette année.
M. Guy Fischer. On n'y croit plus !
Mme Esther Sittler, rapporteur. D'abord, comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, le marché du travail commence à connaître des tensions démographiques fortes : à partir de 2006, ce seront 100 000 actifs qui se retireront chaque année du marché du travail. Il faut donc mobiliser, dès maintenant, des ressources supplémentaires en main-d'oeuvre.
Ensuite, il nous faut admettre une réalité qu'aucun texte n'a fait disparaître : en France, l'écart salarial entre les hommes et les femmes est encore de près de 25 %.
M. Roland Muzeau. Eh oui !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Pourquoi ? Parce que, pour la première fois depuis les années quatre-vingt-dix, on observe un ralentissement du rythme de rattrapage salarial. Or, les éléments objectifs qui pouvaient jusqu'à présent « justifier » ces inégalités ont disparu, puisque, globalement, les femmes sont désormais plus diplômées que les hommes. De fait, une fois neutralisés les effets d'âge, de formation, de métier et d'évolution de carrière, il reste une différence de 15 % qu'on ne peut expliquer.
Les discriminations y sont-elles pour quelque chose ? Il est indéniable que les femmes ont payé cher la crise de l'emploi. Je pense, par exemple, à la persistance d'un surchômage féminin ou du travail à temps partiel, qui est assuré à 82 % par des femmes, et cela souvent malgré elles. Or, madame la ministre, il ne nous a pas paru tout à fait normal qu'un texte traitant de la parité n'aborde pas le thème du travail à temps partiel subi des femmes, mais vous venez de nous assurer que c'était l'une de vos préoccupations principales. Vous vous êtes engagée à travailler sur cette question et j'espère que les partenaires sociaux sauront trouver des solutions à ces situations difficiles, qu'on observe notamment dans le secteur des services à la personne et dans la grande distribution.
Plus largement, j'ajouterai que 78 % des emplois non qualifiés sont occupés par des femmes et, en général, sans réel espoir de progression pour elles. Cette précarité a des conséquences lourdes sur leur niveau de vie, en particulier lorsqu'elles sont isolées et ont des enfants à charge.
Sur les 8,4 millions d'actifs qui perçoivent un salaire inférieur au SMIC, 80 % sont des femmes. Comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, cette proportion est supérieure d'environ dix points au niveau constaté au début des années quatre-vingt-dix.
Enfin, on commence à mesurer les effets pervers d'une politique familiale à deux vitesses qui, en émancipant les femmes en mesure de faire garder leurs enfants grâce à des revenus suffisants, en a maintenu d'autres, moins qualifiées, dans un système d'assistanat dont elles peinent à s'extraire. Un rapport révèle même qu'en ouvrant l'allocation parentale d'éducation aux mères de deux enfants, la loi a créé une nouvelle « trappe à inactivité ». Comme si, entre travailler et élever ses enfants, il fallait encore choisir !
Mme Eliane Assassi. Il faut encore choisir !
M. Roland Muzeau. C'est bien là le scandale !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Mes chers collègues, la longue marche vers l'égalité n'est donc pas arrivée à son terme, et c'est à pas comptés qu'elle avance. Pour autant, nous devons prendre garde à ne pas rallumer une guerre des sexes. Celle-ci est bien derrière nous.
Nous devons également éviter de « victimiser » les femmes, notamment les plus diplômées ou les plus jeunes. Ce qu'elles attendent n'est certainement pas que les entreprises les embauchent parce qu'elles y sont obligées,...
Mme Annie David. Alors elles n'embaucheront pas !
Mme Esther Sittler, rapporteur. ...mais qu'on leur donne les moyens de concilier leur vie professionnelle et leur vie personnelle et familiale, et d'assurer leur émancipation économique, sans renoncement personnel.
Seule cette démarche de construction démontrera que la femme active est source de plus-value pour l'entreprise, et non pas une contrainte.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Comment gérer cette nouvelle exigence ? On peut certes faire confiance aux femmes et en leur capacité à se défendre seules, surtout pour les salariées appartenant aux catégories professionnelles supérieures, mais qu'en est-il des autres ?
D'autres voies ont été explorées.
Premièrement, la voie de la lutte contre les discriminations. Or, malgré quelques imperfections, tout un arsenal législatif permet déjà aux femmes de se défendre.
Deuxièmement, la voie de l'amélioration de la formation initiale et professionnelle. Contrairement aux idées reçues, les femmes sont, je l'ai dit, plus diplômées que les hommes. Elles ont également accès à la formation professionnelle dans des proportions plus élevées qu'on ne le pense.
Troisièmement, la voie de la lutte contre les idées reçues. Je crains, hélas ! que cela ne dépende pas du législateur.
Quatrièmement, la voie de la sanction des entreprises. Je ne suis pas sûre que ce soit une vraie solution : la loi Génisson a montré les limites de l'exercice puisque 72 % des entreprises n'ont pas signé les accords d'égalité prévus par cette loi.
M. Roland Muzeau. Eh oui !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Quel est donc l'apport du texte ?
D'abord, tirant les leçons des échecs antérieurs, le Gouvernement a compris qu'une sanction immédiate peut créer plus de problèmes qu'elle n'en règle.
Ensuite, il ne propose pas de s'en tenir aux déclarations d'intention, ce qui lui aurait fait perdre toute crédibilité aux yeux des femmes qui attendent toujours beaucoup des initiatives prises en matière de parité. Entre convaincre et contraindre, le Gouvernement a privilégié la voie de la conviction, la sanction n'étant qu'un ultime recours. Il évite ainsi le double écueil qui consisterait, d'une part, à penser que l'égalité se décrète, alors qu'elle s'organise, d'autre part, à encourager la guerre des sexes, alors que l'égalité professionnelle suppose, aujourd'hui, un partenariat intelligent entre les hommes et les femmes, au sein de l'entreprise.
Outre la mise en place du label « égalité », symbole de « l'exemplarité gagnante » des entreprises, il a incité les partenaires sociaux à négocier sur le sujet. Mais, comme souvent lorsqu'il s'agit de parité, les partenaires sociaux, y compris les syndicats de salariés, n'ont pas véritablement su dépasser le stade de l'incantation. Le Gouvernement a donc dû aller un peu plus loin.
Déjà la loi de cohésion sociale contenait des propositions remarquables en la matière, comme la professionnalisation des femmes peu qualifiées de retour d'un congé de maternité ; le projet de loi en faveur des PME prévoit aussi de donner aux conjoints d'entrepreneurs un statut juridique créateur de réels droits sociaux ; la loi d'orientation sur l'école a mis l'accent sur la nécessité d'orienter les filles vers d'autres filières que les filières traditionnellement féminines.
Le présent texte apparaît, par conséquent, comme l'aboutissement d'une démarche volontariste engagée depuis deux ans. Il vise quatre objectifs, ainsi que l'a indiqué Mme la ministre.
Il tend, d'abord, à supprimer les écarts de rémunération en cinq ans.
Il vise, pour améliorer la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, à neutraliser les effets de l'absence pour cause de maternité : d'une part, la salariée bénéficiera des augmentations de salaires versées pendant sa période d'absence ; d'autre part, une aide financière est prévue pour les petites entreprises qui souhaitent embaucher du personnel en remplacement d'un salarié en congé de maternité ou d'adoption.
Il a pour objet de renforcer l'arsenal législatif relatif à la lutte contre les discriminations au travail s'agissant des mesures visant l'intéressement et la distribution d'actions, ainsi que l'état de grossesse.
Il vise, enfin, à améliorer la représentation des femmes dans le monde du travail, notamment dans les conseils d'administration des entreprises publiques et les conseils des prud'hommes.
Comme on le constate, madame la ministre, l'originalité de votre projet de loi - auquel j'associe Mme Ameline en lui rendant hommage - réside dans le dispositif d'incitation des entreprises soumises, non plus à une obligation de moyens, mais à une obligation de résultat.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Les dispositions proposées sont dictées par le bon sens pratique et la recherche d'une efficacité immédiate : si les entreprises veulent profiter de compétences nouvelles, elles devront nécessairement défendre une autre idée du management.
L'Assemblée nationale a largement enrichi ce texte et nous sommes favorables à une grande partie de ses apports. Pour notre part, nous avons été animés par le souci de trouver un équilibre entre droits des femmes et contraintes imposées aux entreprises.
M. Roland Muzeau. On ne fait pas cela pour les hommes ! (Sourires.)
Mme Esther Sittler, rapporteur. Les amendements que je présenterai ont notamment pour objet de ne pas imposer aux entreprises qui embauchent, des règles et des charges susceptibles de limiter leur développement, - surtout lorsque, comme maintenant, l'économie ne se porte pas très bien - et donc d'aboutir à l'effet inverse de celui qui est recherché.
Mme Eliane Assassi. Il ne faut pas ennuyer les patrons !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Je pense ici à l'échec de la contribution « Delalande ». Nous en reparlerons au sujet des augmentations salariales à accorder aux femmes revenant d'un congé de maternité ou d'adoption.
Dans le même souci, j'évoquerai aussi l'instauration de quotas de femmes dans les conseils d'administration des sociétés privées ou l'obligation de nouvelle négociation aux branches et aux entreprises qui ont déjà récemment conclu des accords sur le thème de l'égalité salariale.
Notre second souci a été de ne pas accroître le risque de contentieux et nous vous proposerons, par divers amendements, des dispositifs mieux définis.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission est convaincue de l'utilité du projet de loi que nous allons examiner. Beaucoup de femmes l'attendent et croient aux mesures proposées.
M. Roland Muzeau. Elles n'attendent que cela !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Au-delà, c'est l'équilibre démographique et économique de notre marché du travail qui est en jeu. Elle vous propose donc d'adopter ce texte et les amendements qu'elle vous présentera. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. Je vous remercie, madame le rapporteur, et salue votre première intervention à la tribune. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'était remarquable !
Mme la présidente. La parole est à Mme Gisèle Gautier.
Mme Gisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la raison fondamentale de notre débat d'aujourd'hui, qui intéresse pas moins de 12 millions de femmes en activité dans notre pays, peut se résumer à quelques chiffres.
En 1952, l'écart des salaires entre femmes et hommes était de 54 %. En 1995, soit quarante-trois ans plus tard, il avait diminué pour approcher 26 %; depuis lors, nous constatons que l'évolution s'est pratiquement arrêtée puisque le chiffre stagne et n'est malheureusement jamais descendu en dessous de 24 %.
Aussi, dès l'annonce de ce projet de loi, des interrogations se sont fait jour et la question s'est posée de savoir s'il était nécessaire d'élaborer un nouveau texte de loi sur le sujet. On a fait remarquer que le législateur était déjà intervenu à plusieurs reprises. Notre délégation était bien placée pour le confirmer puisqu'elle a été la première à effectuer, en 2002, un recensement exhaustif des normes relatives à l'égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes.
Ces normes sont nombreuses : elles figurent dans le préambule de la Constitution, dans plusieurs conventions internationales, aux différents « étages » du droit européen, ainsi que dans notre code du travail.
Le cadre juridique français est donc très étoffé et conforme aux engagements internationaux et européens de la France. Pour autant, il n'est pas appliqué convenablement.
La délégation a ainsi mis en évidence que 72 % des entreprises interrogées n'ont jamais organisé la négociation spécifique et obligatoire prévue par le code du travail sur les objectifs en matière d'égalité professionnelle. Pire, il a été démontré que nombre d'entre elles méconnaissaient la loi de 2001 !
Il va de soi que les grandes entreprises employant plus de 1 000 salariés, dans la mesure où elles sont dotées de structures, de directeurs des ressources humaines, de représentants syndicaux, ont une approche différente du sujet par rapport aux petites et moyennes entreprises.
Les chiffres que je viens de citer résultent d'un sondage, commandé par notre délégation, en 2004, à un institut dont nous remercions la présidente d'être venue en personne commenter les résultats lors d'une de nos réunions. Il se trouve que cette femme chef d'entreprise a été tout récemment élue à la présidence du Medef, ce qui est un événement marquant. J'espère qu'elle pourra, à ce titre, - et je me ferai fort de le lui rappeler _ contribuer à résoudre un problème que le sondage avait parfaitement mis en lumière.
J'ajoute que, fondamentalement, c'est la culture d'entreprise qui reste perfectible et, à ce titre, je suis convaincue que notre économie a tout à gagner d'une progression des femmes dans les instances dirigeantes des entreprises publiques et privées. A cet égard, le texte adopté par l'Assemblée nationale a, comme l'a souligné précédemment Mme le rapporteur, perfectionné le dispositif initial consacré à la féminisation de la représentation des salariés et des conseils d'administration : notre délégation en approuve pleinement le principe.
Par ailleurs, nos collègues députés ont même adopté un seuil minimum de féminisation de 20 % des conseils d'administration : si certains jugent l'avancée un peu audacieuse du point de vue juridique, d'autres, au contraire, l'approuvent. Très concrètement, la délégation constate que la féminisation des exécutifs est bien souvent un gage d'amélioration de l'efficacité et de l'équité dans l'entreprise.
En examinant les faits, on constate que les écarts de rémunération ont cessé de se réduire depuis 1995 et que les négociations obligatoires sur ce thème sont très peu dynamiques. Dans ces conditions, fallait-il continuer à déplorer le phénomène, baisser les bras et constater simplement cette carence ? Non, car j'estime, résumant en cela le sentiment de la délégation, que la persévérance, la pugnacité et la volonté de remettre l'ouvrage sur le métier sont un facteur essentiel de succès, en particulier pour transformer les mentalités et certains préjugés qui évoluent malheureusement moins vite que la législation.
Ce texte, en fixant un objectif clair et un délai, tient compte du processus de labellisation et de négociation déjà engagé, comme vient de le rappeler Mme la ministre.
La méthode prônée par certains juristes consiste à multiplier les nouvelles normes, les procédures et les sanctions. Or, nous constatons toutes et tous que cette façon de procéder rencontre des limites au moment où, par exemple, notre code du travail comporte déjà plus de 3000 articles d'une terrible complexité. Quoique favorable, par principe, à la sanction de l'inobservation des règles, la délégation estime que, comme dans d'autres domaines de la parité, on peut s'interroger sur l'efficacité des pénalités financières immédiates et leur effet restreint sur les comportements. Bien évidemment, je fais ici allusion aux pénalités financières en matière de parité dans la vie politique,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
Mme Gisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes... mais je n'insisterai pas, car tel n'est pas l'objet de mon intervention.
Plus grave encore, cette méthode pourrait produire des effets pervers, comme Mme Sittler l'a parfaitement exprimé. Soyons réalistes et efforçons-nous de concevoir des cadres juridiques compatibles avec la création d'emplois - objectif qui nous tient aujourd'hui à coeur et qui est prioritaire - et plus encore avec leur maintien sur le territoire.
Vous me permettrez d'intégrer dans le raisonnement un fait sociologique. Les femmes, dans leur grande majorité, s'autolimitent en matière de carrière et de revendications salariales ; elles ne savent pas et n'osent pas demander. Si le législateur doit soutenir leurs droits, il est en même temps assez naturel que nos travaux reflètent aussi leur attente qui n'est souvent rien d'autre que le respect de l'équité.
S'agissant des entreprises, j'ai pu constater, au cours des différentes auditions auxquelles a procédé la délégation, à quel point, pour certaines d'entre elles, la fixation d'objectifs chiffrés est un élément primordial des stratégies de réduction des disparités.
Je vous en livre un exemple frappant et réel : certains grands groupes, hélas peu nombreux ! ont pris à ce point conscience de la nécessité de développer la mixité professionnelle qu'ils se sont fixé des objectifs en matière de recrutement de femmes, et que c'est le bonus de leurs dirigeants qui est « pénalisé » lorsque le but n'est pas atteint.
Il faut reconnaître, soyons réalistes, que les entreprises les plus efficaces en matière d'égalité professionnelle ne sont pas toujours celles qui connaissent le mieux le détail de la réglementation. Quoi qu'il en soit, leur réussite tient à la mobilisation autour d'un objectif et on ne peut que regretter, encore une fois, qu'elles ne soient pas assez nombreuses aujourd'hui.
De ce point de vue, le texte que nous examinons a le mérite de délivrer un message particulièrement clair. De plus, la délégation a constaté que le projet de loi s'appuie sur le droit existant en insistant sur son application effective. Il n'ajoute donc pas de réelles complications dans le code du travail et il respecte l'exigence de stabilité des normes et des objectifs.
En ce qui concerne sa force contraignante, d'éventuelles pénalités calculées sur la masse salariale pourront être mises en place à titre dissuasif après le bilan qui sera effectué d'ici à deux ans, voire trois ans.
Mais la délégation a observé que, si les pénalités sont différées, le texte comporte néanmoins des dispositifs fortement et immédiatement contraignants, comme le refus d'extension des accords de branche, au cas où l'égalité des rémunérations n'aurait pas fait l'objet de discussions et de résultats satisfaisants. Ce sont là des mesures qui devraient se révéler efficaces.
Je souhaite maintenant vous présenter les recommandations de la délégation, en vous montrant qu'elles sont essentiellement animées d'un souci du concret.
La première série de recommandations vise à favoriser la diffusion des « bonnes pratiques » en matière d'égalité salariale.
A l'évidence, et en pratique, l'une des meilleures façons d'appliquer la loi est de s'inspirer des accords existants. Le prolongement direct du projet de loi est donc, comme le souligne la délégation, de faciliter la diffusion des expériences réussies, en s'efforçant tout particulièrement de lever les obstacles juridiques à la mise en ligne sur Internet des accords d'égalité professionnelle. Un amendement a été déposé en ce sens, auquel je souscris totalement en espérant qu'il sera adopté. L'objectif, c'est qu'en « cliquant » la bonne rubrique d'un site adéquat, un entrepreneur ou un directeur des ressources humaines puissent trouver immédiatement des exemples d'accords déjà conclus. C'est un affichage lisible par tous et surtout incitatif à l'égard des autres entreprises.
Il faut aussi tendre à généraliser au sein de l'entreprise la présence d'une interlocutrice à l'écoute des salariées pour améliorer les possibilités de médiation et de dialogue.
Il est vrai que les femmes n'ont pas de référente dans les petites et moyennes entreprises et qu'en l'absence de représentants syndicaux elles n'osent pas toujours se confier à un homme, et ce encore moins si c'est un supérieur hiérarchique, voire le chef de l'entreprise. Certes, une mesure législative générale et contraignante en la matière est inimaginable pour l'instant, j'en ai tout à fait conscience. Pourtant, la conviction de la délégation est que, partout où cela est possible, il faudrait aménager, pour les salariées, une possibilité de dialogue et de rencontre.
Par ailleurs, la délégation recommande de veiller, dans la gestion des ressources humaines des entreprises et des collectivités publiques, à mieux articuler la mobilité professionnelle avec le souci de rapprochement des conjoints.
Depuis la loi Roustan du 30 décembre 1921 - elle est si ancienne que l'on ne s'en souvient plus ! - le statut de la fonction publique comporte un dispositif juridique assez précis dans ce domaine. Cependant, comme les débats au sein de notre délégation l'ont souligné, ce dispositif ne résout pas tous les cas concrets et il faut veiller à en perfectionner l'application.
Pour les salariés, aucune disposition du code du travail n'évoque directement le souci de rapprocher les conjoints, à deux exceptions près : la synchronisation des congés annuels et la possibilité de démissionner pour suivre son conjoint, sans perdre ses droits à l'assurance chômage. C'est là un problème humain essentiel que nous avons eu l'occasion d'évoquer lors de nos entretiens avec vous, madame la ministre. Sa solution ne peut pas faire l'objet d'une formule juridique simple. Je souligne, au nom de la délégation, que les entreprises, et au moins celles d'une certaine taille, doivent se soucier du couple autant que faire se peut dans les décisions de mobilité professionnelle.
J'ajoute que, dans les cas, les plus nombreux, où elles suivent leur conjoint, en France ou à l'étranger, les femmes connaissent une période de recherche d'emploi. Se trouvant au chômage, elles sont une nouvelle fois pénalisées. Cela n'est pas acceptable, notamment dans le secteur public. Nous avons eu de multiples témoignages à cet égard.
M. Philippe Nogrix. C'est un point essentiel !
Mme Gisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Dans sa deuxième série de recommandations, la délégation a estimé qu'il serait hautement instructif de mesurer les effets directs et induits du rééquilibrage des rémunérations.
Tout d'abord, même si la tâche ne paraît pas facile, il conviendrait de chiffrer l'effort financier consenti par les entreprises pour combler les écarts de rémunérations entre les genres. Un tel chiffrage aurait le mérite de donner des indications claires sur le rééquilibrage. Il permettrait, en effet, de mesurer si la véritable discrimination salariale estimée par l'INSEE à 5 % - c'est ce que l'on appelle la part résiduelle - est en voie d'extinction et d'évaluer le chemin qui reste à parcourir en matière de réduction des écarts de rémunérations.
Eradiquer la discrimination est, on le sait, une obligation indiscutable, selon le principe souvent cité : « à travail égal, salaire égal ». Réduire les différences de salaires suppose de franchir une étape en favorisant l'égalité des chances dans l'accès aux emplois les mieux rémunérés et dans les déroulements de carrière. De ce point de vue, il faudrait sans doute étudier de façon approfondie la corrélation entre le rééquilibrage des rémunérations et le rééquilibrage dans l'accomplissement des tâches domestiques entre les femmes et les hommes.
La délégation insiste, en particulier, pour que soient recensés les résultats concrets du réexamen des grilles de qualification pour garantir, à compétences équivalentes, une rémunération égale. La raison de cette recommandation est simple. En effet, les qualités que réclament certains emplois majoritairement occupés par des femmes sont assez mal valorisées par des grilles de salaires parfois si anciennes qu'elles sont devenues obsolètes, n'ayant plus rien à voir avec la réalité actuelle.
A l'étranger, on mesure également les retombées positives, pour les entreprises, en termes de résultats, des bonnes pratiques en matière d'égalité professionnelle. La délégation propose de faire de même en France, premier pays à avoir mis place un dispositif de « labellisation » pour l'égalité salariale. A cet égard, permettez-moi, madame la ministre, de rendre hommage à votre prédécesseur, Mme Ameline, qui a accompli un travail remarquable au sein de son ministère pendant plusieurs années. Je tiens à l'en féliciter et à lui exprimer mes remerciements.
Au total, nous souhaitons bénéficier d'un bilan sérieux et précis établissant le rapport entre le coût et les avantages résultant de l'application du présent projet de loi.
Enfin, troisième série de recommandations, nous souhaitons impliquer les pouvoirs publics dans le processus.
Eveiller les consciences, c'est impliquer non seulement les partenaires sociaux, mais également les déléguées régionales aux droits des femmes dans le processus de discussion et sensibiliser les inspecteurs du travail au thème de l'égalité salariale.
Nous préconisons également de faire de la fonction publique et du secteur public un « laboratoire », qui ait valeur d'exemple, de l'égalité salariale et de la représentation des femmes dans les équipes de direction.
Enfin, je souligne que la délégation a regretté que les questions de précarité et de travail à temps partiel ne soient pas prises en compte par le présent texte. Elle a fortement insisté, à l'unanimité de ses membres, pour que ces sujets fassent l'objet très prochainement d'un projet de loi complémentaire.
Madame la ministre, vous nous avez clairement annoncé, confirmant les propos que vous avez tenus devant l'Assemblée nationale, ainsi que lors de la réunion que vous avez bien voulu tenir dans votre ministère, votre volonté de trouver une solution à ce problème, très important pour les femmes, de la précarité et du travail à temps partiel.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, notre pays a besoin de justice sociale, mais aussi d'efficacité. Pour combattre nos déséquilibres économiques et sociaux, le travail des femmes est un facteur essentiel pour l'avenir.
Nous devons nous projeter en avant, car tout est lié. Je mentionnerai le déséquilibre démographique, qui se profile avec le papy boom, la nécessité, pour les régimes de retraite, d'augmenter le nombre de cotisants. Cela va de pair avec la réduction de l'écart des montants de pensions perçues par les hommes et les femmes, qui est, je le rappelle, de l'ordre de 42 %.
M. Guy Fischer. Et la réforme des retraites a aggravé l'écart !
M. Roland Muzeau. C'est le silence sur ce point !
Mme Gisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Nous devons définitivement stopper le gâchis humain et financier qui consisterait à dissuader les femmes de valoriser sur le marché du travail leur réussite scolaire et universitaire. Elles font aujourd'hui des études plus longues et obtiennent souvent des résultats plus brillants que leurs homologues masculins. Donnons-leur le sentiment d'être reconnues et rémunérées sans discrimination.
Madame la ministre, par ce projet de loi, vous avez mobilisé tous les acteurs concernés par les inégalités salariales qui perdurent. Vous avez pris des mesures qui s'imposent pour améliorer, voire amplifier les textes existants par la voie de la négociation ou par des dispositions plus contraignantes.
Si ce projet de loi est adopté, les femmes seront au rendez-vous de l'économie moderne et de la justice sociale. C'est en tout cas ce que nous souhaitons très vivement, toutes et tous
Je ne veux pas achever mon propos sans vous remercier, messieurs, de votre présence à ce débat sur la parité qui nous apporte pour l'avenir une lueur d'espoir. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 47 minutes ;
Groupe socialiste, 32 minutes ;
Groupe Union centriste-UDF, 14 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 9 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Bernard Seillier.
M. Bernard Seillier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il n'y aura pas de politique de cohésion sociale digne de ce nom dans notre pays tant qu'une véritable égalité salariale entre les hommes et les femmes n'aura pas été établie.
Voilà près de trois décennies que ce sujet est abordé par nos assemblées et, malgré quelques avancées, les chiffres restent confondants. En effet, l'écart salarial moyen entre les hommes et les femmes est de près de 25 %. S'ajoute à cela l'absence de qualification, 78 % des emplois non qualifiés étant occupés par des femmes qui n'ont aucune perspective d'évolution de carrière.
Il ne faut pas hésiter à parler de précarité dans ce cas, puisque, en matière de revenus, les 8,4 millions d'actifs qui perçoivent un salaire inférieur au SMIC, sont à une majorité écrasante des femmes - 80 %, avez-vous dit, madame la ministre. Ces mêmes femmes perçoivent une retraite mensuelle moyenne deux fois inférieure à celle des hommes.
Le recours au travail à temps partiel est fréquemment invoqué comme justificatif de certaines inégalités. L'argument ne pourrait être pris en compte qu'à la condition que le temps partiel soit librement choisi. Or tel n'est pas le cas aujourd'hui pour nombre de femmes. Sur quatre millions de travailleurs à temps partiel, on compte une immense majorité de femmes. Trop souvent, le travail à temps partiel lorsqu'il existe correspond à des horaires non maîtrisés, menace alors la stabilité de la vie familiale et se traduit fréquemment par des salaires insuffisants.
De surcroît, ces femmes sont en outre les premières victimes du chômage et des délocalisations. Cette situation a créé de nouvelles inégalités. Alors qu'elles représentent 45,9 % de la population active, le taux de chômage féminin s'élevait à 10,9 %, contre 9 % chez les hommes, à la fin de l'année 2004.
Les secteurs où les femmes sont surreprésentées sont aussi ceux où les salaires proposés sont les plus faibles. Vous les avez cités, madame la ministre, il s'agit notamment du commerce de détail, des industries du textile, de la chaussure.
Les femmes sont les premières victimes d'une mondialisation non régulée et d'une Europe peu combative pour défendre ses salariés au regard du reste du monde.
C'est d'abord les femmes qui sont visées lorsqu'il s'agit de baisser les salaires pour faire face à une concurrence internationale. Ce sont souvent elles les premières licenciées. C'est à elles que certains dirigeants d'entreprises ont proposé de partir à Madagascar ou en Roumanie pour des salaires inférieurs à un euro de l'heure !
Mme Eliane Assassi. Tout à fait !
M. Bernard Seillier. Il existe évidemment des exceptions - elles ont été citées. C'est ainsi que certaines femmes occupent des fonctions d'encadrement ; une femme, et je m'en réjouis, vient de prendre la tête du MEDEF. Mais les chiffres demeurent explicites. En effet, moins de 10 % des dirigeants d'entreprise et moins de 5 % des membres des conseils d'administration sont des femmes. Force est de constater que les lois relatives à l'égalité professionnelle ne sont pas réellement mises en oeuvre.
M. Roland Muzeau. Eh non !
M. Bernard Seillier. J'en viens à un aspect capital, celui de l'articulation entre vie familiale et vie professionnelle. Il est à la source de bien des quiproquos.
Le taux d'activité salariée des mères s'élève à 80 % lorsqu'elles ont un enfant de moins de trois ans, mais il chute à 58 % lorsqu'elles ont deux enfants, dont un ayant moins de trois ans.
Le rapport Milewski fait éclater la réalité du quiproquo en soulignant que l'allocation parentale d'éducation, l'APE, n'a pas contribué à faciliter l'emploi des femmes. En effet, selon ce rapport, en ouvrant l'accès de l'APE aux femmes de deux enfants, la réforme de 1994 a entraîné une baisse sensible du taux d'activité des mères dont l'un des deux enfants a moins de trois ans, créant une « trappe à inactivité ».
N'est-ce pas plutôt de l'ouverture d'un sas de liberté et de décompression qu'il conviendrait de parler ?
L'allocation parentale d'éducation a favorisé l'exercice du libre arbitrage, que personne ne peut critiquer, à moins d'être doublement injuste : injuste à l'égard du choix des femmes, qui leur appartient sans que l'on soit autorisé à porter un jugement péjoratif sur leur préférence et leur arbitrage ; injuste à l'égard de la hiérarchie des valeurs sociales, car parler d'inactivité à propos de la maternité et de l'éducation des enfants n'est possible que par défaut de nos comptabilités publiques, qui ne donnent une valeur à l'être humain qu'à travers le versement des capitaux décès.
Il est bien connu que la comptabilité nationale enregistre une croissance du produit national quand une assurance-vie est liquidée à la mort de son souscripteur. Rien de tel n'est pris en compte à la naissance d'un enfant, hormis le montant éventuel des allocations familiales. Encore ne faut-il pas oublier le fait que la naissance d'un enfant fait diminuer le produit national brut par habitant, contrairement à celle d'un animal de boucherie, qui le fait croître, puisque, dans le premier cas, le dénominateur de la fraction augmente alors que, dans le second, l'animal fait progresser le numérateur.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Quelle démonstration !
M. Bernard Seillier. Je doute que les mères de famille qui s'occupent de leurs enfants à plein temps en favorisant leur éveil et leur épanouissement apprécient les termes de « trappe à inactivité ». Il s'agit, pour les mères qui le souhaitent, de pouvoir arbitrer entre leurs activités, et ce n'est pas là tomber dans je ne sais quelle trappe, car elles jouent en réalité un rôle fondamental dans notre société, rôle dont nous ne tenons pas compte puisque le travail accompli n'est ni rémunéré ni pris en compte économiquement à sa valeur sociale réelle.
Aussi, je regrette vraiment que le rapport n'ait pas soulevé cette question essentielle, alors même que la part des allocations familiales dans les revenus des ménages n'a cessé de diminuer depuis le début des années cinquante par rapport à celle des salaires.
Lorsque les femmes souhaitent exercer une activité salariée, il faut qu'elles disposent, à travail égal, d'un salaire égal à celui des hommes, mais il faut aussi favoriser leur liberté d'organisation, en permettant à celles qui veulent bien mettre au monde et élever des enfants, qui sont certes les leurs, mais aussi en quelque sorte les nôtres, de le faire.
Je vous recommande à ce propos, mes chers collègues, la lecture de l'article de Michel Godet intitulé La famille, une affaire publique, paru dans la dernière revue Futuribles. Quelques vérités élémentaires y sont opportunément rappelées.
N'oublions pas, en effet, que l'avenir des retraites par répartition dépend directement de la famille. Nous profitons du fait que le travail maternel n'est pas rémunéré par la société au niveau du profit réel que celle-ci en tire. Favorisons la liberté des femmes dont nous sommes tous bénéficiaires et gardons-nous de paraître accuser celles-ci d'être inactives lorsqu'elles choisissent, momentanément ou plus durablement, le travail maternel et non pas le travail salarié.
L'inégalité la plus grande est celle qui oblige certaines femmes à renoncer au travail maternel faute de ressources suffisantes. Ne serait-ce pas pour masquer cette plus scandaleuse inégalité que certains s'efforcent de culpabiliser et de pénaliser le travail maternel ? C'est en tout cas un très mauvais calcul, de tout point de vue.
Sur le plan social, il n'y a d'humanité, de fraternité et de société durable que s'il y a des familles avec des enfants. Et, sur le plan de la justice, faire de la maternité et du travail familial qui l'accompagne soit un luxe réservé aux classes aisées, soit la richesse secrète, mais coûteuse, des prolétaires, conduit à une impasse.
C'est pourquoi cette question restera encore longtemps pendante dans nos sociétés, obnubilées par des comptabilités restreintes et restrictives, qui mesurent de manière partielle et partiale les inégalités.
Cette situation rend d'autant plus urgente la nécessité de remédier, si possible, aux inégalités salariales et de faciliter l'articulation entre vie professionnelle et vie familiale, faute de pouvoir assurer d'emblée une égalité totale entre les femmes pour arbitrer entre le travail professionnel et le travail familial.
Cela dit, ce projet de loi prévoit des mesures intéressantes visant à faciliter la vie des femmes et le fonctionnement des entreprises, afin de concilier vie familiale et vie professionnelle.
Je citerai, notamment, l'aide financière forfaitaire accordée aux petites entreprises de moins de cinquante salariés qui souhaitent procéder au remplacement d'un salarié en congé de maternité ou d'adoption, la possibilité pour les partenaires sociaux de la branche concernée de prévoir une majoration de l'allocation de formation de 10 % au moins pour le salarié qui engage des frais supplémentaires de garde d'enfant pour suivre une formation en dehors de son temps de travail, enfin l'extension du crédit d'impôt famille en faveur des entreprises qui engagent des dépenses pour assurer la formation de salariés qui ont été recrutés à la suite d'une démission pendant un congé parental d'éducation.
Vous privilégiez, à juste titre, madame la ministre, les négociations par branche ou par entreprise en ce qui concerne l'évolution des salaires des femmes. En cas d'échec de ces négociations, le Gouvernement propose de mettre en place un dispositif plus contraignant : après avoir procédé à un diagnostic, obliger les branches professionnelles et les entreprises à programmer des mesures visant à supprimer les écarts salariaux.
Il est prévu d'imposer aux entreprises qui n'auraient pas ouvert de négociations salariales une contribution sur la masse salariale. Je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous donniez quelques précisions quant à la mise en oeuvre concrète de ce dispositif contraignant.
Le projet de loi prévoit également que les régions organisent des actions destinées à répondre aux besoins d'apprentissage et de formation, en favorisant un accès plus équilibré entre les femmes et les hommes.
La formation doit jouer un rôle majeur dans l'objectif d'égalité salariale, même si la progression du nombre de jeunes filles diplômées est spectaculaire depuis vingt ans. Le plan régional de développement des formations professionnelles devra ainsi assurer une présence équilibrée des femmes et des hommes dans chacune des filières de formation.
De plus, les contrats d'objectifs devront permettre une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les métiers préparés par les différentes voies de formation initiale et continue. Il est essentiel que les conseillers d'orientation dans les collèges et les lycées fassent connaître les filières où les offres d'emplois sont loin d'être satisfaites - ce qu'ils ne font pas toujours - et insistent sur le fait que certaines professions qui manquent de bras sont aujourd'hui ouvertes aux femmes.
Le projet de loi vise enfin à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les conseils d'administration des entreprises publiques. Il prévoit de supprimer en cinq ans l'écart de représentation entre les sexes, s'agissant de la nomination des personnalités qualifiées proposées par les ministères de tutelle. Je souhaite, naturellement, que nous évitions les quotas ; ceux-ci doivent à chaque fois être envisagés comme un dernier recours.
Par conséquent, tant pour les mesures favorables à l'adéquation entre la vie familiale et la vie professionnelle que pour le volontarisme fort dont il fait preuve dans le domaine de l'égalité salariale entre hommes et femmes, ce texte constitue une avancée sociale incontestable et mérite d'être largement soutenu.
Je souhaite enfin profiter de cette occasion pour adresser mes compliments tant à Mme Esther Sittler, pour son rapport, qu'à Mme Gisèle Gautier, pour son rapport d'information sur le sujet qui nous occupe. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.- M. Charles Gautier applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, Michel de Montaigne disait : « Les femmes ont raison de se rebeller contre les lois parce que nous les avons faites sans elles. »
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est plus le cas ! (Sourires.)
Mme Gisèle Printz. C'est dans cette optique que j'interviens dans la discussion générale sur un sujet qui me tient beaucoup à coeur : l'égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Je commencerai par un constat que tout le monde connaît, mais qu'il est toujours utile de rappeler : les femmes représentent plus de 50 % de la population française et contribuent par leur travail à la richesse de notre pays.
Malheureusement, elles ne sont pas traitées sur un pied d'égalité avec les hommes. La situation des femmes sur le marché du travail est même très préoccupante. On y observe des inégalités persistantes, qui commencent très tôt, dès la fin de la scolarité.
En effet, bien que les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons et qu'elles soient majoritaires au sein de la population étudiante, elles sont moins nombreuses dans les filières prestigieuses comme les classes préparatoires ou les écoles d'ingénieur. De plus, le diplôme obtenu par une femme est moins valorisé que celui d'un homme. Ainsi, un homme de quarante ans, bachelier, a 13 % de chances d'être cadre, contre 6 % pour une femme qui se trouve dans la même situation.
L'accès à la formation professionnelle continue fait partie de ces discriminations anormales dont les femmes sont victimes. En effet, les statistiques font ressortir qu'une femme âgée de trente-cinq ans a deux fois moins de chances qu'un homme du même âge d'y accéder du fait de son statut précaire.
Comme les femmes occupent largement des emplois à faibles qualifications, où des formations sont rarement proposées, elles ne peuvent avoir de plan de carrière.
Par ailleurs, le taux de chômage des femmes reste plus élevé que celui des hommes et, si la féminisation s'est accrue dans des professions où les femmes étaient peu présentes, elle a davantage augmenté dans les professions souvent dévalorisées, où les femmes étaient déjà surreprésentées.
Le fait de parler d'emploi féminin et d'emploi masculin ne contribue-t-il pas à renforcer cette discrimination ? Le seul critère de choix doit dépendre de la capacité physique ou intellectuelle de la personne, fût-il un homme où une femme.
La structure de l'emploi des femmes est aussi un élément clé de la discrimination. En effet, le rapport de l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'OFCE, de mars 2005 relatif aux facteurs de précarité montre que 82 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes. Il s'agit très majoritairement de temps partiels subis. Une enquête réalisée en 2004 par l'INSEE montre d'ailleurs que les trois quarts des femmes travaillant à temps partiel souhaiteraient travailler plus. Car elles sont souvent chef de famille et élèvent seules leurs enfants.
S'agissant de l'articulation des temps de vie, je note par ailleurs que les schémas traditionnels évoluent peu. Les femmes consacrent toujours deux fois plus de temps que les hommes aux tâches domestiques et les hommes trois fois moins de temps que les femmes aux enfants. L'incidence sur la carrière professionnelle s'en ressent.
Enfin - et c'est l'aboutissement logique de ces situations qui perdurent -, les femmes gagnent en moyenne 27 % de moins que les hommes. Depuis une vingtaine d'années, cet écart ne se réduit plus. On observe même que, à catégorie professionnelle équivalente, l'écart demeure de 10 % à 15 %, ce que rien ne peut justifier. Les femmes sont donc victimes d'une discrimination directe en matière de salaire.
Madame la ministre, vous proposez d'adopter un nouveau projet de loi, dont le principal objectif est la suppression des écarts de rémunération entre les hommes et les femmes. Cet objectif est certes louable, mais il soulève tout de même une interrogation majeure : fallait-il un nouveau texte ?
Rappelons que le principe « à travail égal, salaire égal » est inscrit dans le code du travail depuis 1972,...
Mme Gisèle Printz. ... et que le principe de l'égalité des droits entre les hommes et les femmes est reconnu dans le préambule de la Constitution de 1946. La loi Roudy relative à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes date de 1983, et la loi Génisson de 2001 l'a complétée en imposant, notamment, une obligation de négocier sur l'égalité salariale dans les entreprises et les branches professionnelles.
Je souhaite aussi rappeler l'accord national interprofessionnel du 1er mars 2004 relatif à la mixité et à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.
N'oublions pas non plus la législation communautaire : l'article 119 du traité de Rome concerne le principe de l'égalité de rémunération ; la directive du 23 septembre 2002 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, est souvent plus performante que notre droit interne.
De plus, le Conseil européen a adopté, en juillet 2003, un texte traitant des inégalités entre hommes et femmes en matière de rémunérations.
En réalité, les textes existent ; ce qui manque, c'est une volonté forte de les faire appliquer.
A ce sujet, l'excellent rapport d'information réalisé par la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes démontre que 70 % des entreprises n'ont pas entamé de négociation dans le cadre de la loi Génisson relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Plus grave encore, beaucoup de femmes avouent ne pas être au courant de cette loi. La bonne volonté ne suffit donc pas ; il faut des contraintes. Le Gouvernement doit faire preuve de plus de fermeté pour faire appliquer ces lois ; il sait très bien le faire en d'autres occasions.
Mais comme un nouveau texte nous est aujourd'hui soumis, nous allons essayer d'en apprécier la pertinence.
On peut regretter, tout d'abord, que ce projet de loi traite de l'inégalité salariale de façon aussi réductrice. En effet, celle-ci se réduit aux seules conséquences dues à la maternité ; mais ce n'est pas la seule cause. Ma collègue Patricia Schillinger reviendra plus précisément sur le thème de la maternité tout à l'heure.
Les écarts de salaires entre les femmes et les hommes sont la résultante de plusieurs facteurs, notamment des difficultés d'embauche et d'accès à la formation. Si le congé de maternité influe sur la carrière des femmes, ce sont bien davantage les responsabilités familiales ultérieures, le travail domestique non partagé et l'absence de structures d'accueil pour les enfants non scolarisés qui handicapent les femmes.
Une grave lacune du projet de loi concerne le temps partiel subi. Rien n'est proposé pour y remédier, alors qu'il concerne 3,25 millions de femmes actives sur 11 millions.
Mme Annie David. Eh oui !
Mme Gisèle Printz. Seule la loi sur les 35 heures a pu freiner ce phénomène. Comme je l'ai déjà souligné, 75 % des femmes qui le subissent sont avant tout des chefs de famille monoparentale, pour qui temps partiel équivaut à pauvreté.
Rappelons que le temps partiel est surtout un moyen détourné pour le Gouvernement de faire baisser les statistiques du chômage. Et comme les femmes qui travaillent à temps partiel ne sont pas considérées comme des chômeuses, elles ne sont pas prioritaires dans les politiques de l'emploi.
Je me permets d'insister sur le caractère particulièrement négatif du temps partiel subi, dont les conséquences fâcheuses sur les femmes se manifestent non seulement durant leur carrière professionnelle, mais aussi au moment de la retraite. En effet, souvent, le temps partiel ne suffit pas à valider des trimestres. Et comme les retraites découlent directement des salaires perçus au cours de la carrière professionnelle, les disparités perdurent lors de la retraite. Ainsi les femmes restent-elles confinées dans une précarité encore plus grande.
On peut regretter, ensuite, que ce projet de loi ne s'adresse qu'au secteur privé et ne concerne pas la fonction publique où, en dépit d'une égalité salariale, une inégalité de rémunération demeure en raison des primes et du fameux « plafond de verre ». Il serait souhaitable que l'Etat employeur donne le bon exemple.
L'article 4 met en place des dispositifs pour faire respecter l'application de ce texte, mais ceux-ci restent insuffisants. Nous ne pouvons d'ailleurs que déplorer le caractère non persuasif de ce texte et l'absence délibérée de sanctions, par exemple dans le cas où les négociations de branche ou d'entreprise n'aboutiraient pas à la réduction des écarts de rémunération.
Pour contrôler l'application de la loi, il aurait au moins fallu demander aux entreprises un rapport annuel sur leur politique salariale. Que le Gouvernement présente un rapport d'évaluation au Parlement six ans après la promulgation de la loi me parait un peu tardif. Que fera-t-on si ce rapport est négatif ? Une nouvelle loi sera-t-elle élaborée ? On tourne en rond !
De plus, il aurait fallu associer à cette loi une embauche significative d'inspecteurs du travail, pour se donner les moyens d'un contrôle plus efficace.
Concernant les conseils des prud'hommes, la loi prévoit une « représentation équilibrée », ce qui veut dire tout et rien à la fois. Pourquoi ne pas proposer des listes paritaires pour que les femmes y soient mieux représentées ? Nous avons bien su le faire pour les élections municipales, régionales et sénatoriales. C'est une question de volonté !
M. Claude Domeizel. Eh oui !
Mme Gisèle Printz. Dans le même ordre d'idées, l'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements visant à une meilleure représentativité des femmes dans les conseils d'administration ou les conseils de surveillance des établissements industriels et commerciaux, dans les conseils d'administration des sociétés anonymes et dans les fonctions de délégués du personnel. Il s'agit d'une très bonne initiative.
Légiférer sur l'égalité salariale constitue un temps fort de la vie politique d'un pays. Pour autant, de nombreuses questions restent en suspens.
J'ai mentionné tout à l'heure le temps partiel subi, mais il ne faut pas oublier la formation professionnelle,...
Mme Annie David. Effectivement !
Mme Gisèle Printz. ...qui devrait être permise durant le temps de travail lorsqu'un problème de garde d'enfant se présente, ou encore l'aménagement du temps de travail des femmes, qui devrait tenir compte des aléas de la vie parentale.
En outre, la discrimination dont sont victimes les femmes d'origine étrangère n'est même pas évoquée dans le projet de loi.
Mme Annie David. Exactement !
Mme Gisèle Printz. Il faudra pourtant répondre un jour à ces questions de société !
Mme Annie David. Plus de lacunes que d'avancées !
Mme Gisèle Printz. Enfin, il aurait été opportun d'associer plus étroitement les déléguées régionales aux droits des femmes et à l'égalité dans le processus de négociation salariale.
Pour conclure, on peut regretter que ce projet de loi, qui part certainement d'une bonne intention, reste très insuffisant pour garantir l'égalité salariale. Des préjugés tenaces font obstacle à l'égalité entre les hommes et les femmes. Il faut que les mentalités évoluent. Ainsi, le salaire des femmes ne doit plus être considéré comme un salaire d'appoint.
J'encourage les femmes à être plus revendicatives pour affirmer leurs capacités et faire valoir leurs droits.
Par ailleurs, on peut s'interroger sur l'avenir de ce texte dans la nébuleuse des nouvelles mesures prises par le Gouvernement en matière d'emploi et de droit du travail. Celles-ci ne favoriseront pas les conditions d'emploi des femmes, ni celles des hommes, d'ailleurs !
Mme Annie David. C'est sûr !
Mme Gisèle Printz. On se dirige vers un démantèlement du code du travail dont les femmes risquent d'être les premières victimes.
Malgré le peu d'enthousiasme que nous inspire ce texte, nous proposerons plusieurs amendements visant à en améliorer le contenu. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Janine Rozier.
Mme Janine Rozier. Madame la présidente, madame le ministre, madame le rapporteur, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, mes chers collègues, le présent projet de loi marque une étape importante sur la voie de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, puisque la féminisation de la population active a beaucoup progressé en quelques décennies.
Plusieurs chiffres ont été avancés et les orateurs qui m'ont précédé à cette tribune ont procédé à de nombreux rappels. Mais sans doute est-il utile de dire et redire les mêmes choses pour qu'elles avancent ! D'ailleurs, devant la persistance des inégalités, le Gouvernement a, depuis trois ans, engagé une nouvelle dynamique, dont nous souhaitons ardemment la réussite.
Ainsi, l'accord national interprofessionnel du 1er mars 2004 relatif à la mixité et à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes a défini des objectifs, tout en privilégiant le dialogue social au sein de l'entreprise.
Je tiens également à souligner l'importance du label « égalité », créé par Mme le ministre Nicole Ameline en juin 2004, qui distingue les entreprises ayant mis en place des mesures concrètes pour promouvoir l'égalité professionnelle. Depuis, ces labels se sont multipliés, car les dirigeants ont bien conscience que l'égalité professionnelle donne de leur entreprise une image de modernité. Cette piste est très intéressante puisqu'elle encourage une démarche volontaire.
En janvier dernier, le Président de la République a fixé un objectif de suppression de l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes d'ici à cinq ans.
Le présent projet de loi apporte une réponse à cette exigence en traitant, dans son titre Ier, des inégalités salariales. L'écart moyen de rémunération en France entre les femmes et les hommes est d'environ 25 %. Cette différence s'explique principalement par la présence des femmes dans des emplois ou des secteurs moins qualifiés.
Nombre d'entreprises estiment ne pas discriminer les femmes, tout simplement parce que ces dernières n'occupent pas les mêmes postes que les hommes. Néanmoins, lorsqu'on effectue des comparaisons à conditions d'emploi identiques, l'écart de salaire « inexpliqué », c'est-à-dire lié à la discrimination, demeure autour de 15 %. Ce chiffre est évidemment très décevant.
Comment accepter à notre époque que, à travail égal, le salaire ne soit pas égal ? Pourquoi rémunére-t-on davantage un homme, alors qu'il ne travaille ni plus, ni mieux ? (Sourires.) Ce dernier reste d'un passé peu flatteur de dominance masculine ne devrait plus perdurer, d'autant qu'il est démontré qu'au cours d'un cursus scolaire semblable les filles sont plus consciencieuses et plus motivées, et réussissent mieux que les garçons.
M. Paul Blanc. Ça, c'est vrai !
Mme Janine Rozier. L'inégalité n'est pas seulement salariale, elle est aussi professionnelle.
Les sociologues notent que l'écart se creuse entre les femmes diplômées et cadres, qui s'en sortent de mieux en mieux et voient leur pouvoir d'achat progresser, et les femmes moins qualifiées, qui restent cantonnées dans le temps partiel et les « petits boulots ». Les femmes sont bien plus nombreuses que les hommes à occuper des emplois temporaires, tels que les contrats à durée déterminée, les emplois aidés, les stages, etc. Tout le monde a dénoncé cet état de fait.
Selon l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'OFCE, aujourd'hui, près de 80 % des salariés à bas salaires, c'est-à-dire dont le montant est inférieur au SMIC, sont des femmes. Et cette proportion est d'environ 10 points supérieure à celle qui avait été atteinte au début des années quatre-vingt-dix.
Même si les femmes diplômées accèdent de plus en plus à des postes à responsabilités, elles se cognent encore au « plafond de verre », selon une expression consacrée. Elles ne sont que 7 % parmi les cadres dirigeants, alors qu'elles constituent près du tiers des cadres administratifs et commerciaux. Celles qui obtiennent des postes à responsabilités ont souvent dû, consciemment ou inconsciemment, faire le sacrifice de leur vie de femme ou de mère.
Il est nécessaire d'agir, pour des raisons évidentes de justice, mais également pour l'économie de notre pays. Les économistes prévoient une baisse de la population active, en raison des départs à la retraite. Pour compenser cette baisse, la solution consisterait à augmenter la population des femmes sur le marché du travail. Sans même parler de cette échéance, on voit bien que le développement de l'activité féminine est étroitement lié au développement de l'emploi global : c'est dans les pays où le taux d'activité féminine est le plus élevé que le taux de chômage est le plus bas.
Pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, madame la ministre, je me réjouis que le Gouvernement agisse. Pour certains, bien sûr, il suffirait de laisser patiemment le temps faire son oeuvre. Mais l'histoire des avancées qui ont jalonné l'ascension de la femme dans la société montre bien que légiférer est utile et qu'il nous faut périodiquement faire un rappel à l'ordre.
Compte tenu de la lenteur des progrès réalisés, de l'insuffisante application de la loi du 9 mai 2001, nous n'avons d'autre choix que de mettre en place une certaine contrainte. C'est en cela que le texte que nous étudions aujourd'hui est original : il laisse place à la fois à la confiance accordée aux partenaires sociaux et à l'intervention nécessaire de l'Etat.
Le projet de loi s'inscrit dans la continuité de ce qui a déjà été entrepris. Mais, à la différence des textes précédents, il prévoit un cadrage dans le temps et incite les entreprises à une logique de résultat.
Ce texte prend en compte le travail de la femme dans son ensemble.
D'abord, s'agissant des salaires, les entreprises et les branches professionnelles devront négocier la suppression des écarts de rémunération selon des modalités et un calendrier précis. Des sanctions financières à mi-parcours sont prévues s'il s'avère que la loi n'est pas respectée. Le champ des discriminations interdites est étendu et les moyens de défense des femmes sont renforcés.
Ensuite, pour ce qui est des difficultés que la femme rencontre en tant que parent, des mesures sont proposées pour garantir son droit aux augmentations individuelles, pour aider les entreprises à embaucher pendant son absence, pour encourager la formation de la femme qui a repris son travail, toutes mesures qui peuvent aider les femmes à concilier vie familiale et carrière.
Enfin, en ce qui concerne la représentation des femmes au sein d'instances telles que les conseils de prud'hommes ou les conseils d'administration d'entreprises publiques, la notion de seuil permettra d'éviter les trop nombreuses nominations de femmes « alibi » et isolées.
Je n'entrerai pas davantage dans le détail des mesures que les orateurs précédents ont très bien décrites. Il me semble que ces dispositions, par les progrès très concrets qu'elles vont générer, devraient être unanimement approuvées par notre assemblée.
Toutefois, je souhaite attirer votre attention, madame la ministre, sur d'autres questions qui me semblent importantes et qui faciliteraient la vie des femmes voulant, ou devant, exercer une profession.
Je pense notamment à l'école, où les inégalités se préparent, où tout se joue déjà. Il faut agir en amont pour améliorer l'orientation des filles, élargir le choix des filières. Avec la loi d'orientation pour l'avenir de l'école adoptée en avril dernier, le Gouvernement a déclaré mener un combat pour l'égalité à l'école.
Toute une éducation reste à faire pour briser les schémas traditionnels et aider les filles à faire preuve d'audace. Elles n'osent pas s'orienter dans des secteurs où elles rencontreront la concurrence de leurs collègues masculins, craignant de ne pas être choisies ou d'être mal considérées. Plus tard, sur le marché du travail, elles n'osent pas briguer certains postes, toujours pour les mêmes raisons.
Ces blocages sont levés trop lentement. Un effort pourrait donc être accompli au travers de réunions d'information présentant des métiers dits « masculins », ainsi que des témoignages de femmes qui s'épanouissent dans des filières ou des postes où il n'allait pas de soi, a priori, de voir une femme.
Je note de façon positive le développement croissant des carrefours ou forums des métiers destinés à informer les jeunes. Mais je regrette, notamment en cette période d'« après-examen », où les jeunes, garçons et filles, doivent choisir leur orientation, le manque de clarté des filières proposées, ainsi que le manque de coordination entre les filières ouvertes et les besoins des entreprises.
Encore trop de voies sans issue, pénalisantes pour tous, déconcertent et démobilisent. Notre économie en pâtit.
Il faut aider les femmes à oser. Les jeunes femmes souffrent d'un handicap sur le marché du travail à cause de leur trop grande discrétion et d'une réticence à faire preuve d'ambition. Quand elles font acte de candidature, souvent, elles n'osent pas imposer un salaire de départ suffisant.
La famille, les professeurs, bref, l'ensemble de la société et notre histoire sont à l'origine d'une certaine autolimitation des femmes. Il faudrait former les femmes à la négociation salariale. Nombreuses sont celles qui prennent du retard en termes de salaire par rapport à leurs collègues masculins, parce qu'elles n'osent pas demander une augmentation.
D'autres sujets restent à traiter et je pense, bien sûr, aux modes de garde des enfants. En effet, comme vous l'avez souligné, madame la ministre, et je m'en réjouis, il n'est pas possible de parler du travail des femmes sans évoquer la maternité. Si vous le permettez, je ferai également allusion à la famille.
Les études montrent que l'insertion des femmes dans le monde du travail, à tous les stades de la carrière, est en partie fonction de l'organisation sociale de prise en charge de la petite enfance et de l'organisation scolaire. Améliorer l'accès des femmes à l'emploi suppose une amélioration du service public de l'enfance. Certes, nos voisins nous envient nos crèches et nos écoles maternelles, mais toutes les femmes qui ont dû rechercher une solution de garde savent que nous sommes encore loin du compte.
Nous assistons pourtant aujourd'hui à un phénomène spontané de prise en compte du problème par des entreprises, avec la création de crèches internes. Seules quelques grandes entreprises et quelques communes d'avant-garde ont enclenché ce mouvement. Il serait souhaitable que d'autres les imitent et que le Gouvernement joue un rôle incitatif.
Je voudrais également attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'encourager une plus grande flexibilité des modes de travail. Des horaires plus appropriés, le télétravail, pourraient permettre aux femmes de concilier plus sereinement leur vie familiale et leur vie professionnelle. Cette réflexion est également valable lorsqu'on souhaite que des jeunes femmes, mères de famille, participent à la vie associative et aux conseils municipaux.
Lorsque j'étais maire de ma commune, je regroupais dans la même soirée deux ou trois réunions de commission à la suite afin que les conseillères n'aient à s'absenter de leur foyer qu'une seule soirée dans la semaine. Ce système ne devait pas être si mauvais puisque mon successeur l'a conservé.
J'évoquerai maintenant un autre point : le travail à temps partiel. Selon l'INSEE, les femmes sont cinq fois plus nombreuses que les hommes à travailler à temps partiel. Dans ce monde nouveau, peuplé de tant de familles monoparentales, comment élever des enfants avec le salaire d'un travail à temps partiel ? Pourtant, la part du travail à temps partiel « contraint » est évaluée à 44 % !
Bien évidemment, la perte financière se répercute plus tard sur les retraites. Un amendement proposé par notre rapporteur permettrait d'améliorer la situation des femmes travaillant à temps partiel en leur donnant un accès prioritaire aux heures supplémentaires. J'espère qu'il fera l'unanimité.
Je voudrais ajouter un mot sur le congé parental. Si des mesures existent pour aider les femmes dans l'étape essentielle de leur vie qu'est la maternité, il reste encore beaucoup à faire. Lorsque les femmes décident d'avoir des enfants, elles sont conscientes de mettre en jeu leur carrière. Pour vivre la période de la petite enfance de façon sereine, nombreuses sont celles qui souhaiteraient arrêter de travailler. Certes, le congé parental est un premier pas. Mais il faudra un jour aller plus loin, afin que les femmes reçoivent une indemnité plus élevée, qui leur permette réellement de s'arrêter pendant une période indéterminée.
Notre politique familiale doit prendre en considération le déchirement des femmes qui reprennent le travail alors que leur bébé n'a que quelques semaines. Nous savons tous les bienfaits de la présence maternelle dans la toute petite enfance !
M. Philippe Nogrix. Elle est indispensable !
Mme Janine Rozier Notre pays est en retard dans sa façon d'aborder la maternité. L'allaitement, dont les vertus sont unanimement reconnues, est encouragé tant que la mère est en congé de maternité. Mais les femmes sont contraintes de l'arrêter à la reprise du travail. Le congé, trop court, ne le prend pas en compte, alors que l'OMS recommande au minimum six mois d'allaitement de l'enfant. Toutes les études concordent sur les bienfaits de l'apport de lait maternel dans la durée.
En réponse à la prise de conscience des femmes, aujourd'hui mieux informées, le code du travail prévoit maintenant que, pendant une année, les mères allaitant leurs enfants disposent à cet effet d'une heure par jour durant les heures de travail. Même si ce n'est pas la panacée, cette solution, méconnue ou volontairement ignorée, est loin d'être entrée dans les moeurs. On imagine les difficultés d'une mère qui voudrait la faire appliquer et on imagine également la gêne causée dans l'entreprise.
Le problème a donc été pris en considération, mais les bonnes réponses n'ont pas encore été trouvées. Un congé prolongé et soutenu financièrement devrait être étudié. Ce serait un pas de plus vers la modernité et une façon de re-considérer la famille. (M. Philippe Nogrix applaudit.)
Résoudre le problème de l'égalité professionnelle est complexe tant il existe d'aspects à prendre en considération. Le projet de loi va dans le bon sens et, bien évidemment, notre groupe le votera. Je souhaiterais néanmoins que mes suggestions soient entendues, car, je le redis avec force, la famille est le creuset de notre société.
On a tort de dire, couramment, qu'une femme qui reste à son foyer pour élever ses enfants ne travaille pas. (Marques d'approbation sur les travées de l'UC-UDF.) A ce titre, elle ne bénéficiera d'aucune retraite. Pourtant, elle fabrique du bonheur, et l'argent ne saurait compenser cela. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, après Michel de Montaigne, on peut citer un autre écrivain tout aussi célèbre, en tout cas l'un des sénateurs les plus connus, Victor Hugo : « Une moitié de l'espèce humaine est hors de l'égalité, il faut l'y faire rentrer : donner pour contrepoids au droit de l'homme le droit de la femme. ».
Un siècle plus tard et soixante ans après l'institution du suffrage féminin, la France est toujours caractérisée par une participation des femmes à la vie politique plus faible que celle que l'on rencontre dans les autres pays européens, même si, bien sûr, les lois relatives à la parité ont déjà fait beaucoup.
Des progrès sont donc encore nécessaires pour atteindre le seuil de 30 % considéré par l'Union européenne comme la condition minimale pour que les femmes exercent une influence réelle sur les politiques publiques.
A l'instar de l'égalité politique, l'égalité professionnelle n'est pas pleinement acquise. Symptôme révélateur de ces inégalités persistantes : les rémunérations.
Depuis quelques années, les femmes sont entrées massivement dans le monde du travail. En quarante ans, le nombre d'hommes sur le marché du travail a augmenté d'un peu plus de 1 million alors que celui des femmes a progressé de 5,5 millions. On compte aujourd'hui 12 millions de femmes actives pour 14 millions d'hommes. Pour autant, la diminution des écarts de salaires entre les deux sexes stagne. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : à travail égal et à qualification égale, une femme ne perçoit aujourd'hui en moyenne que 80 % de ce que toucherait un homme.
Il existe une autre source d'inégalité : les écarts moyens de rémunération ; ils sont très variables d'une catégorie socioprofessionnelle à l'autre. Tandis que, chez les employés, les femmes gagnent presque autant que les hommes, chez les cadres, elles ne gagnent que 77 % du salaire de leurs homologues masculins. Ces écarts de salaires sont d'autant moins acceptables que l'on ne peut reprocher aux femmes d'être moins diplômées que les hommes, au contraire !
Il faut tenir compte, en outre, de l'impact sous-estimé de ces salaires sur les retraites des femmes, qui seront diminuées d'autant. Enfin, notons que les femmes ont toujours un accès difficile aux postes stratégiques, que ce soit dans le secteur privé ou public.
Cette situation est non seulement contraire au principe constitutionnel d'égalité, mais également préjudiciable à l'économie française. Comme l'a souligné notre collègue Mme Sittler, dans la perspective du choc démographique que connaîtra le marché du travail lors du départ à la retraite de la génération du baby-boom, le travail des femmes sera un vecteur de croissance.
En conséquence, aucune raison économique ne justifie ces discriminations. La productivité des femmes est la même que celles des hommes et la mixité apparaît même comme un facteur de performance dans les entreprises. C'est donc bien dans les mentalités que reste ancrée cette inégalité : l'inéquité salariale est le fruit d'obstacles plus culturels qu'économiques.
Certes, la loi seule ne suffira pas à changer les mentalités ou à lever les préjugés culturels. Toutefois, elle peut y contribuer dès lors qu'elle enrichit et renforce les mesures précédentes.
En matière d'égalité salariale, nous devons beaucoup à la législation européenne, particulièrement développée depuis les années soixante-dix. Différentes dispositions des traités successifs, mises en oeuvre par l'adoption de directives, témoignent de la forte préoccupation de l'Union européenne en matière d'égalité salariale, celle-ci étant devenue un axe majeur de l'acquis communautaire. La jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes contribue aussi largement à l'avancée du droit de l'égalité.
Le législateur français, pleinement conscient de la nécessité à la fois sociale et économique de parvenir à une égalité de rémunération, a également contribué à la formation d'un droit de l'égalité salariale. Trois lois ont ainsi précédé le texte que nous examinons aujourd'hui.
Au regard de l'accumulation des textes, on est en droit de s'interroger sur l'efficacité et l'effectivité de la norme de droit dans la mesure où les lois se suivent sans rien changer, ou pas suffisamment. L'inflation législative aurait-elle pour objet de masquer une impuissance législative, comme le relevait déjà le juriste Georges Ripert en 1949 ? Comment éviter, madame la ministre, que votre loi ne reste lettre morte ? Assurément par une approche novatrice, non seulement globale, mais aussi coercitive.
Pour juger de l'approche globale, on ne peut s'arrêter à l'intitulé de votre texte, car celui-ci est inadéquat : le projet de loi ne porte pas uniquement sur l'égalité de rémunération, même si celle-ci en constitue le coeur ; il traite aussi d'aspects fondamentaux de la parité professionnelle, tels l'accès à la formation, à l'apprentissage ou à certaines instances délibératives et juridictionnelles comme les conseils d'administration ou de surveillance des entreprises publiques, ou les conseils des prud'hommes.
Volontaire et audacieuse, l'Assemblée nationale est allée plus loin en prévoyant, d'une part, des quotas et, d'autre part, une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration des sociétés anonymes. Si, juridiquement, cette mesure prête à discussion, il demeure vrai, comme l'a très justement rappelé Gisèle Gautier, que la mixité au sein des instances exécutives est un facteur de dynamisme et un modèle pour l'entreprise.
Madame la ministre, nous souscrivons aussi pleinement à l'objectif de conciliation entre parentalité et vie professionnelle qui sous-tend votre texte. A cet égard, nous proposerons un amendement visant à ce que les salariés puissent utiliser le congé parental d'éducation, d'une durée maximale de trois ans, jusqu'aux seize ans de l'enfant. Période souvent délicate, l'adolescence est en effet un moment où la présence des parents est fortement ressentie.
S'agissant de l'aspect coercitif, nous estimons que votre texte ne va pas assez loin. Il s'agit pour nous d'un point très important. Des mécanismes très incitatifs sont créés pour favoriser l'émergence de l'égalité salariale. Seront-ils suffisants ? Sans sanctions comparables, par exemple, à celles qui s'appliquent aux entreprises ne respectant pas leur obligation d'emploi de personnes handicapées, le présent projet de loi risque d'être aussi peu appliqué que les précédents.
Aussi, nous défendrons un amendement, à nos yeux essentiel, tendant à ce que la contribution assise sur les salaires, dont seront redevables les entreprises qui n'auront pas respecté leur obligation légale d'organiser des négociations relatives à l'égalité entre les femmes et les hommes, soit non pas renvoyée à une future loi, mais inscrite dès à présent dans celle-ci.
Vous souhaitez privilégier la concertation. On ne peut que vous en féliciter ; nous y sommes tous pleinement favorables. Mais inscrire d'ores et déjà dans la loi qu'en cas d'échec le Gouvernement mettra en place une sanction pécuniaire c'est préjuger de l'inefficacité de celle-ci.
Pourquoi ne pas prévoir dès maintenant qu'une contribution financière sera demandée aux entreprises qui manqueront à leur obligation de négociation ? Ce n'est pas adopter un dispositif plus coercitif de prime abord, c'est seulement faire preuve de loyauté à l'égard des entreprises et les encourager à la responsabilisation. C'est aussi reconnaître que, faute de contraintes, les lois précédentes n'ont pas été appliquées. Inscrire dans cette loi la taxe sur la masse salariale évitera en outre de contribuer à l'inflation législative que dénonçait le président du Conseil constitutionnel, Pierre Mazeaud, en début d'année.
En tout cas, le groupe de l'Union centriste-UDF sera très attentif à la manière dont cette loi sera appliquée. Il lui semble en particulier indispensable que le pouvoir réglementaire établisse très vite des indicateurs sérieux et solides, ainsi que des objectifs chiffrés précis à atteindre, sur la base desquels pourront s'engager les négociations collectives. Nous aimerions avoir un engagement du Gouvernement sur ce point.
Pour finir, j'aimerais vous faire part de notre déception de ne pas voir inscrites dans le projet de loi des mesures visant à lutter contre le temps partiel subi. (Mme Annie David fait un signe d'approbation.) Grand oublié de ce texte, il touche pourtant majoritairement les femmes. Faut-il rappeler qu'en 2003 82 % des 4 millions de travailleurs à temps partiel que compte notre pays étaient des femmes ?
Le temps partiel est souvent imposé aux femmes pour des emplois peu qualifiés ; il est facteur de précarité et, bien sûr, il contribue à renforcer l'écart de salaires de base constaté entre hommes et femmes.
Pour ces raisons, le groupe de l'UC-UDF défendra deux amendements, l'un visant à éviter que le statut de salarié à temps partiel ne donne lieu à des emplois du temps attentatoires à la vie privée et familiale imposés par l'employeur, l'autre tendant à ce que les salariés à temps partiel bénéficient en priorité d'un droit d'affectation aux emplois à temps complet de l'entreprise.
Nous attendons maintenant que le Gouvernement tienne l'engagement pris devant l'Assemblée nationale de réunir les partenaires sociaux sur ce thème.
Mme Catherine Morin-Desailly. L'ère du fatalisme est révolue. C'est en combattant les inégalités sur tous les fronts que nous parviendrons à faire avancer l'égalité professionnelle : parce que cette dernière, qui ne doit pas se limiter à l'égalité salariale, participe au progrès social, nous devons tous y être attentifs. Je souhaite que ce texte soit, pour nous, une aide.
J'ose espérer qu'à la faveur, pour la première fois de son histoire, de l'élection d'une femme à la présidence du MEDEF, P-DG de l'institut auquel la délégation aux droits des femmes a commandé, en 2004, un sondage très révélateur, les entreprises bougeront. Il me semble que, demain, elles n'auront pas d'autre choix. Nombre d'entre elles auront pris la mesure de la nécessité de travailler leur image. Ne rien faire serait courir le risque de se faire accuser de ringardise. Au contraire, apparaître comme une entreprise égalitaire, progressiste et innovante leur permettra d'influer sur leur capacité de recrutement et sur leur clientèle potentielle.
Il me reste à remercier Gisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, de l'excellence de son travail, et Esther Sittler de la qualité de son rapport.
Le groupe UC-UDF, attentif au sort qui sera réservé à ses amendements, soutiendra ce texte, qui reste volontairement consensuel. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Madame la ministre, avant d'exprimer l'opinion du groupe communiste républicain et citoyen sur le texte qui nous est soumis, je tiens à protester très énergiquement contre l'absence de M. Larcher. En effet, non seulement le texte dont nous discutons aujourd'hui méritait sa présence à vos côtés, mais, de plus, M. le ministre avait pris l'engagement de recevoir une délégation des travailleurs de l'entreprise Nestlé de Marseille, victimes, comme vous le savez, de la fermeture de cette dernière. Ils sont ici, et il leur est répondu que M. Larcher ne peut pas être là.
Ce genre de comportement est préoccupant compte tenu des difficultés immenses auxquelles se heurtent des centaines de familles et de salariés face à un groupe qui, je le rappelle, enregistre des milliards d'euros de profits.
Bien évidemment, la lutte continue chez Nestlé, et le Gouvernement en entendra encore parler.
La justice a, une première fois, condamné l'attitude de ce groupe, et je trouve que c'est bien mérité.
J'en viens au projet de loi qui nous est aujourd'hui soumis.
Ce texte est-il dicté par un souci de justice ? Nous aurions souhaité qu'il en fût ainsi, mais la première des motivations exprimées dans le rapport est plus cynique, puisqu'il est indiqué que « la baisse prévisible de 100 000 nouveaux actifs par an implique de rechercher des ressources de main-d'oeuvre que les femmes sont en plus grand nombre pour fournir. »
De la loi du 13 juillet 1983, dite « loi Roudy », à la loi du 9 mai 2001, dite « loi Génisson », voilà donc presque vingt ans que le législateur a, par de nombreuses dispositions, pour prétention de supprimer les inégalités professionnelles entre les femmes et les hommes, ce sans véritables résultats.
C'est devenu un véritable leitmotiv que de dire que ces lois ne sont pas appliquées, que les dispositifs mis en place sont insuffisants et pas assez contraignants.
Pourtant, le débat a été relancé grâce à l'adoption, en mars 2004, d'un accord interprofessionnel pour lutter contre les inégalités entre les hommes et les femmes, puis par le projet de loi que nous examinons aujourd'hui. Malheureusement, force est de constater que ce dernier est, lui aussi, plus que décevant.
Deux raisons majeures expliquent cela. Ce texte vise à lutter contre les inégalités de salaires entre les hommes et les femmes, qui, si elles ont légèrement baissé au cours des vingt dernières années, sont encore démesurées, puisque, en 2002, l'écart moyen était d'environ 19 %, pour monter jusqu'à 23 % chez les cadres. Mais, comme tout ce qui s'est fait depuis vingt ans sur ces questions, les articles de ce projet de loi ne comportent que des mesures purement incitatives et absolument pas coercitives.
C'est même un choix revendiqué par le Gouvernement : vous indiquez, en effet, madame la ministre déléguée, qu'entre convaincre et contraindre vous avez choisi de convaincre. Vous ajoutez également que l'égalité ne se décrète pas. Malheureusement, vingt ans d'échec apportent la démonstration concrète que, sans loi coercitive, il n'y a pas d'avancée réelle. J'en veux pour preuve la loi sur la parité aux élections. Où en serions-nous aujourd'hui sans elle ? Poser la question, c'est y répondre.
En ayant pour objet de supprimer les écarts de rémunération dans les cinq prochaines années, c'est-à-dire d'ici à 2010, par l'intermédiaire de négociations de branches, les mesures prévues dans le présent projet de loi reposent uniquement sur le « bon vouloir » des entrepreneurs au lieu de les contraindre à considérer également leurs salariés, qu'ils soient hommes ou femmes.
D'ores et déjà, avant même qu'il soit adopté, nous savons donc que ce texte sera inefficace et qu'il ne résoudra rien au fond. Il n'est, en réalité, qu'un ensemble de mesures d'affichage social, sans contestation sur le fond d'une immense injuste pour les femmes.
Par ailleurs - et c'est peut-être le plus important - le débat sur les inégalités professionnelles n'y est envisagé que sous l'angle des inégalités de rémunération.
Cette vision réductrice des problèmes sociaux ne peut que nous faire penser au proverbe chinois : quand le sage montre la lune, l'idiot regarde le doigt. En effet, la réalité sociale des discriminations sexuelles est beaucoup plus complexe et grave que ce que vous avez l'air de penser.
Madame la ministre dois-je vous rappeler que l'égalité salariale ne sera possible que lorsque toutes les discriminations professionnelles auront disparu et que l'on traitera de manière globale l'organisation du travail des salariés, en tenant compte de leur vie personnelle et familiale ?
Or les millions de femmes qui sont entrées dans la vie active au cours des quarante dernières années sont toujours confinées dans quelques secteurs d'activité, essentiellement le tertiaire et les services, où elles sont d'ailleurs plus vulnérables et victimes de ségrégations professionnelles, parce qu'elles occupent des postes peu qualifiés, peu valorisés, et se voient imposer un temps partiel, qui plus est peu compatible avec la vie familiale ou personnelle.
Le fond du problème, c'est que les inégalités majeures entre les hommes et les femmes résident dans le fait que ce sont les femmes qui sont le plus victimes de la précarité, car cantonnées à des emplois mal payés et instables. Victimes de discriminations, leurs chances de progression dans leur emploi sont beaucoup plus faibles. Ainsi, 63 % des contrats « aidés » concernent les femmes. Ce sont elles qui sont le plus touchées par le chômage : plus de 10 % des femmes actives sont au chômage et de plus en plus d'entre elles sont au chômage non indemnisé. En fin de carrière, elles sont souvent sans emploi ou en invalidité.
A cela, il faut ajouter que la vision sexiste du travail qui vise à prêter aux femmes des « caractéristiques » spécifiques - docilité, finesse, capacité d'effectuer des « petits travaux », notamment - est encore la culture dominante qui règne au sein du patronat français.
Bref, considérées comme une « variable d'ajustement », une « main-d'oeuvre mobilisable », ce sont toujours les femmes qui sont les plus contraintes à accepter des contrats à temps partiel : 82,1 % des temps partiels sont occupés par des femmes.
Or, un temps partiel, c'est un salaire partiel, éventuellement une indemnisation de chômage partielle, puis une retraite partielle. Près de 3,5 millions de femmes sont confrontées à cette réalité, qu'elles n'ont pas choisie et qui fait d'elles des salariées pauvres.
Depuis vingt ans, en effet, le travail à temps partiel a explosé dans certains secteurs - le commerce, l'hôtellerie, la restauration, les services aux particuliers et aux entreprises - et chez une catégorie professionnelle particulière : plus de la moitié des femmes concernées sont des employées. Qu'elles soient caissières, vendeuses ou femmes de ménage, la plupart n'ont pas choisi d'occuper un poste à temps partiel. Elles ont préféré avoir un emploi de quelques heures plutôt que d'être au chômage. Beaucoup d'entre elles travaillent pour un salaire bien inférieur au SMIC et avec des horaires extrêmement éclatés.
Sur les 8,5 millions d'actifs qui perçoivent un salaire inférieur au SMIC, 80 %sont des femmes. Ce chiffre représente une aggravation de 10 % en dix ans.
Il est donc grand temps de « tordre le cou » à l'idée de « choix ». Temps choisi, temps subi : en dépit des apparences, la question n'est pas pertinente. Que signifie « choisir » quand les pressions sont tellement fortes qu'il n'y a pas d'autres solutions, quand les emplois proposés ne sont jamais à temps plein, quand les contraintes de la vie familiale deviennent trop complexes ? Les pressions ne sont pas uniquement d'ordre économique ou domestique ; elles sont également, et fortement, idéologiques : le travail à temps partiel a été construit de toutes pièces comme étant la forme d'emploi idéale pour les femmes.
La question est donc non pas tant de savoir si le travail à temps partiel a été choisi un peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout, mais d'en mesurer les conséquences. Au fil des ans, il est devenu la figure emblématique de la division sexuelle du marché du travail. Il est, dans le même mouvement, devenu le moteur de la pauvreté laborieuse. Le sujet est pourtant longtemps resté tabou en France, comme si les working poors étaient une exclusivité américaine.
Or le sous-emploi échappe très largement à votre analyse des inégalités professionnelles, parce qu'il se confond, pour partie, avec le travail à temps partiel, que les stéréotypes culturels qualifient systématiquement de « bon pour les femmes ».
Il est tout à fait frappant, en effet, de voir comment le travail à temps partiel demeure exclu de votre réflexion sur l'emploi et le chômage. Le sujet est relégué au chapitre de la diversification du travail ou, plus désolant encore, à la rubrique relative à la « conciliation de l'emploi et de la vie familiale », mais il est rarement abordé sous l'angle de la pénurie d'emploi.
Il n'y a donc, dans votre projet de loi, rien sur tout cela, rien sur le temps partiel imposé aux femmes. Vous ne faites qu'en appeler à la bonne volonté des employeurs, sans les contraindre à en faire preuve, sans même les y inciter.
Si la bonne volonté suffisait, l'inégalité serait aujourd'hui en voie d'extinction, puisque, dans la loi « Roudy » du 13 juillet 1983, dont c'est l'anniversaire demain, était abordée la question des écarts de rémunérations entre les hommes et les femmes - or, près d'un quart de siècle après, ceux-ci n'ont presque pas changé ! - et que cela fait presque cinquante ans que, dans l'article 51 du traité de Rome, ces questions-là étaient traitées.
Il faut donc que les sanctions soient exemplaires et, surtout, appliquées, et que des obligations soient mises en oeuvre, donnant ainsi de la vraie visibilité à cette urgence sociale.
Enfin, il ne faut pas perdre de vue que si les problèmes d'inégalité professionnelle entre hommes et femmes sont le résultat d'une conception machiste de l'ordre social, elles sont aussi confortées par votre politique libérale, qui charrie chaque jour encore plus de précarité dans l'emploi et qui touche en premier lieu les femmes.
Les secteurs professionnels de l'éducation, du social, ou encore de la santé, sont des secteurs hautement féminisés qui subissent des assauts constants. Ce sont donc les femmes qui sont les premières touchées par la régression sociale. Ainsi, les réformes sur la retraite, avec le passage des dix meilleures années à vingt-cinq années, sont une véritable catastrophe : parmi les retraités pauvres, à savoir ceux qui perçoivent moins que le minimum vieillesse, huit sur dix sont des femmes.
En réalité, ce texte a pour objet non pas de satisfaire les besoins des femmes, mais de répondre aux exigences et aux besoins de l'économie française.
Mme Annie David. Exactement !
M. Roland Muzeau. Il s'agit non pas de faire respecter l'égalité des droits, de réduire les discriminations, de lutter contre la précarisation des femmes ou de remédier à leur paupérisation lorsqu'elles partent à la retraite, mais bien de discuter des besoins des entreprises en matière d'emploi et des opportunités à saisir en la matière.
Mme Annie David. Très bien !
M. Roland Muzeau. Au fil du temps, des avancées ont été obtenues sous l'impulsion des femmes, des mouvements féministes et des syndicats, dans la marche vers l'égalité professionnelle avec les hommes.
C'est dans cet esprit que nous avons déposé, voilà plusieurs mois, une proposition de loi : il s'agissait de lutter contre les inégalités professionnelles liées au genre en s'attaquant à la précarisation de l'emploi, qui, en premier lieu, touche les femmes.
Ainsi, dans un premier temps, cette proposition de loi visait à améliorer les dispositifs de négociations de l'égalité entre hommes et femmes au sein de l'entreprise en y intégrant la question des salaires et de la reconnaissance des qualifications, en augmentant le nombre d'indicateurs d'évaluation de l'égalité entre hommes et femmes et en permettant une plus grande représentation des salariées, notamment au sein des petites et moyennes entreprises.
Puis, dans un second temps, ce texte prévoyait la mise en place de mesures concrètes de lutte contre les inégalités, telles que l'instauration de dispositifs visant à limiter l'usage du temps partiel imposé, la suppression de l'exonération de charges sociales liées à la création de contrats à temps partiel, la protection contre le licenciement des salariés qui ne voudraient pas se voir imposer ce type de contrat, ou encore la possibilité, pour les représentants du personnel, de refuser un contrat à temps partiel qu'on voudrait leur imposer.
Enfin, ce texte visait à mettre en place des dispositifs coercitifs destinés à assurer l'égalité salariale et à rendre les négociations obligatoires. Or, malheureusement, à l'heure actuelle, ce texte n'a pas encore été examiné en séance publique. Nous avons déposé une trentaine d'amendements reprenant, entre autres, les mesures contenues dans cette proposition de loi.
Nous espérons, madame la ministre, que vous saurez écouter nos arguments au cours de ce débat et que, contrairement à ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale, vous ne refuserez pas en bloc d'intégrer ces dispositions tendant à contraindre les entreprises à assurer l'égalité professionnelle et à mieux encadrer le recours au temps partiel dans ce projet de loi.
Si tel n'était pas le cas, madame la ministre, nous serions obligés de voter contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici devant un projet de loi dont les objectifs affichés ne peuvent laisser indifférent et auxquels tout parlementaire ne peut qu'adhérer : supprimer les écarts de rémunération, concilier l'emploi et la parentalité, promouvoir l'accès des femmes à des instances délibératives et juridictionnelles, améliorer l'accès des jeunes filles et des femmes à l'apprentissage ou à la formation professionnelle.
Comment pourrions-nous exprimer notre désaccord ? Qui contesterait la situation que connaissent actuellement les femmes, elles qui sont arrivées massivement sur le marché du travail depuis quelques dizaines d'années ? L'égalité n'a en effet que faiblement progressé. Le taux d'activité des femmes est de 63,4 %, contre 74,6 % pour les hommes. Mais quel traitement leur est réservé dans le monde du travail et dans la société !
Si les filles obtiennent de meilleurs résultats scolaires que les garçons, elles sont moins nombreuses dans les filières prestigieuses, scientifiques et techniques. A elles, principalement, les emplois de service, les emplois non qualifiés et surtout le temps partiel non choisi ! En effet, 82 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes ; 32 % des femmes qui travaillent sont à temps partiel. Elles percevront donc une retraite partielle, mais j'y reviendrai.
Cette situation aboutit logiquement à une discrimination salariale. Même à catégorie professionnelle équivalente, l'écart entre les salaires des hommes et ceux des femmes demeure de l'ordre de 10 % à 15 %. Or rien ne peut le justifier ! Voilà encore une forme d'injustice dont les femmes sont victimes.
Que nous propose-t-on aujourd'hui ? Pour remédier à cet état de fait, le projet de loi contient quinze articles, qui sont loin d'être convaincants. En effet, madame la ministre, vous ne modifiez en rien la législation relative au temps partiel. Pis, de nouvelles exonérations de cotisations seraient actuellement à l'étude afin de faciliter le développement du travail à temps partiel.
Par ailleurs, aux termes de la loi Fillon du 4 mai 2004, l'encadrement de l'organisation du travail à temps partiel relèverait de simples accords d'entreprises, et non d'accords de branches.
L'organisation de la vie et du temps personnel d'une femme n'est pas encore prise en compte, comme en a d'ailleurs témoigné la réforme des retraites, dont les femmes sont les grandes perdantes. (Murmures d'approbation sur les travées du groupe CRC.)
Madame la ministre, comment voulez-vous que l'on accorde du crédit à vos déclarations de bonnes intentions ? (Mme la ministre déléguée s'exclame.)
Permettez-moi de vous rappeler qu'en moyenne les retraites des femmes sont inférieures de moitié à celles des hommes.
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Claude Domeizel. Loin de réduire les inégalités qui existent dans ce domaine, la réforme Fillon contribue à accentuer nombre d'entre elles.
M. Guy Fischer. Il faut le dire !
M. Claude Domeizel. Faut-il rappeler que la réforme de 1993 de M. Balladur avait déjà entraîné une baisse de 13 % des pensions de retraite des femmes ?
M. Guy Fischer. Et voilà !
M. Roland Muzeau. Loi scélérate !
M. Claude Domeizel. Mais revenons-en à la loi Fillon d'août 2003. L'une des conséquences de cette loi est que 60 % des femmes des générations nées entre 1954 et 1974 vont voir le montant de leur pension baisser, contre 40 % des hommes. Les causes, nous les connaissons tous : aux mesures générales de diminution des retraites s'ajoutent les conséquences du temps partiel et des périodes d'interruption liées à la maternité et à l'éducation des enfants.
Je le répète : un tiers de femmes travaillent à temps partiel et elles représentent 86 % des personnes touchant le SMIC.
Et ce n'est pas tout, madame la ministre ! Avec le jeu conjugué de la décote et de la remise en cause des avantages conjugaux et familiaux, de nombreuses femmes n'y trouveront pas leur compte.
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Guy Fischer. C'est une remise en cause des avantages !
M. Claude Domeizel. Les conséquences seront lourdes, voire très lourdes, madame la ministre ! Certes, sous la pression, votre gouvernement est revenu sur les pensions de réversion, mais il a supprimé la bonification d'un an par enfant pour les femmes fonctionnaires qui avaient choisi de constituer une famille avant d'exercer une profession soit pour des raisons personnelles, soit du fait de leurs études.
M. Guy Fischer. Et après, on parle de politique familiale !
M. Claude Domeizel. Non, madame la ministre, nous ne pouvons vous croire ! Voilà deux ans, déjà pendant une session extraordinaire, votre gouvernement a pris des mesures qui ont creusé l'écart entre les femmes et les hommes. Et, aujourd'hui, vous avez l'audace, madame la ministre (Mme la ministre déléguée s'exclame.), de nous présenter un projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, alors que vous avez agi dans le sens contraire en 2003 !
La retraite, qui est un salaire différé, doit aussi être égalitaire. Et ce n'est pas cette loi qui changera les choses dans ce domaine.
Le seul moyen de corriger les inégalités dues à la maternité en matière de retraite est de réviser la loi Fillon. Mais cela nécessite une remise à plat de l'ensemble des avantages familiaux et conjugaux, comme l'avait suggéré le Conseil d'orientation des retraites, le COR.
Alors, mes chers collègues, quelle doit être notre attitude face à ce double langage ? Ce projet de loi n'est-il pas qu'un acte de foi ? Comment vous croire, madame la ministre, quand, parallèlement à ce projet de loi, déclaration de bonnes intentions, vous ne faites rien contre le travail à temps partiel,...
M. Guy Fischer. Il ne faut pas voter un tel projet de loi !
M. Claude Domeizel. ...laissant les femmes se heurter à la politique globale de l'emploi que vous avez mise en place ces trois dernières années ?
Nous sommes désolés, madame la ministre, mais ce n'est pas ainsi que nous concevons une politique de valorisation du travail de la femme !
Nous sommes pour l'égalité salariale entre les femmes et les hommes. Malheureusement, votre projet de loi ne contient, selon nous, aucune idée nouvelle.
M. Roland Muzeau. Rien du tout !
M. Claude Domeizel. Ce texte n'est qu'une rationalisation de dispositions existantes ; il n'est que belles paroles. Dans les faits, les mesures que vous avez instaurées depuis trois ans, loin d'épargner les femmes, les pénalisent un peu plus.
M. Roland Muzeau. Absolument !
M. Guy Fischer. Et de manière non négligeable !
M. Claude Domeizel. Nous ne pouvons cautionner cela, et les Françaises nous comprendront.
Le contenu de ce projet de loi, sous un intitulé séduisant, est en fait très light. (Sourires.)
Telles sont les réflexions que suscite ce texte, que nous tenterons d'améliorer par amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Guy Branger.
M. Jean-Guy Branger. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le 4 janvier 2005, Jacques Chirac, Président de la République (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.), a exprimé le souhait que le Gouvernement présente un projet de loi visant à parvenir à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes dans l'entreprise d'ici à cinq ans.
M. Claude Domeizel. On n'y est pas encore !
M. Jean-Guy Branger. Plusieurs textes existent déjà,...
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Jean-Guy Branger. ... telles la loi Roudy, votée en 1983, et la loi Génisson, qui date de 2001, mais force est de constater qu'ils ne sont pas suffisamment respectés.
Mme Gisèle Printz. Pas du tout, même !
M. Jean-Guy Branger. La loi Roudy réaffirmait déjà l'égalité professionnelle dans le droit français et obligeait les entreprises à publier chaque année un rapport comparant les situations des femmes et des hommes et à proposer des plans dits d'« égalité »...,
M. Guy Fischer. Ça, c'est bien !
M. Jean-Guy Branger. ...mais le non-respect de cette obligation n'était assorti d'aucune sanction.
M. Roland Muzeau. Et voilà !
M. Guy Fischer. Nous sommes d'accord !
M. Jean-Guy Branger. Même si ce texte ne vous paraît pas parfait, vous pourriez peut-être admettre la réalité, mes chers collègues : nous avions déjà réfléchi à la question,...
M. Roland Muzeau. Bien sûr !
M. Jean-Guy Branger. ... mais les mesures qui ont été prises n'ont pas eu les effets escomptés, loin s'en faut !
La loi Génisson actualisa la loi Roudy en prévoyant des sanctions pénales et en imposant, notamment, l'obligation pour les entreprises de négocier sur les objectifs en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Mme Gisèle Printz. Elles ne l'ont pas fait !
M. Jean-Guy Branger. Le bilan de ces deux lois est loin d'être convaincant,...
M. Roland Muzeau. Justement !
M. Jean-Guy Branger. ... et leur application mitigée démontre bien les limites de la contrainte législative : la majorité des entreprises n'ont jamais organisé de négociations spécifiques sur le thème de l'égalité professionnelle.
M. Roland Muzeau. C'est une honte !
M. Jean-Guy Branger. Mais il faut bien comprendre que, derrière l'inégalité salariale, se pose le problème de la place de la femme au sein des entreprises.
En effet, comment, aujourd'hui, une maternité peut-elle encore constituer un préjudice pour une femme qui souhaite faire carrière ? Pourquoi si peu de femmes siègent-elles au sein des conseils d'administration ? Et je ne parle pas des postes à responsabilités !
Je fais partie de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. A ce titre, je suis tout particulièrement sensible aux problèmes de violences contre les femmes. Mais n'est-ce pas une forme de violence, et sournoise, que l'on commet encore ?
La conscience de l'inégalité, qui ne coûte pas cher, a progressé plus vite que la résolution du problème. Je vous remercie, madame la ministre, de nous soumettre aujourd'hui un texte complet.
Parmi les droits sociaux garantis aux femmes, c'est le droit au travail qui occupe la première place. Il suffit de jeter un oeil sur le passé pour constater combien le travail rémunéré des femmes a contribué à leur garantir le droit à la dignité et à l'autonomie, comme à assurer le bien-être financier de leur famille.
Aujourd'hui, il faut aller plus loin, car le travail n'est plus seulement un moyen d'assurer la subsistance individuelle ou familiale. Il est devenu, en plus, un facteur de réalisation personnelle et d'intégration sociale : de nos jours, la majorité des femmes souhaitent et réclament un épanouissement, dans leur vie tant professionnelle que familiale. Elles se veulent, elles se sentent les partenaires des hommes, leurs égales, et elles ont raison !
Mais si les femmes ont gagné en droits et en indépendance, il faut bien reconnaître qu'il reste un domaine où les inégalités persistent : le monde du travail.
Bien que la discrimination envers les femmes concerne tous les aspects de la relation de travail, qu'il s'agisse du recrutement, des conditions de travail ou du licenciement, c'est en matière de rémunération qu'elle est la plus évidente, la plus visible. Il existe en effet des chiffres avérés, qui ne peuvent être mis en doute.
Ainsi, alors que les femmes représentent 46 % de la population active, elles étaient, voilà encore peu de temps, payées en moyenne 25 % de moins que les hommes ; ce chiffre était de 21 % chez les cadres.
En effet, si l'écart de rémunération moyenne entre les femmes et les hommes se révèle plus faible dans le secteur public - le salaire moyen des femmes y était, en 2002, inférieur de 14 % à celui des hommes, alors que, dans les secteurs privé et semi-public, il était inférieur en moyenne de 19,5 % -, il reste que, quel que soit le secteur, c'est parmi les cadres que cet écart est le plus important.
Je souhaite rappeler ce qu'est l'égalité salariale : une femme et un homme accomplissant un travail de valeur égale gagnent un salaire égal. Exprimé ainsi, il paraît aberrant d'être obligé, aujourd'hui, en 2005, de légiférer sur ce sujet !
Un fait serait de nature à nous rassurer : nous ne sommes pas les seuls à connaître une telle situation. En 2002, dix-huit pays européens ont fait l'objet d'une analyse. On a ainsi comparé les salaires moyens de femmes travaillant à plein temps avec ceux d'hommes travaillant dans les mêmes conditions : la différence moyenne s'est établie à environ 20 %, au préjudice des femmes !
Je fais aussi partie de la commission sur l'égalité des chances pour les femmes et les hommes au sein de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, dans le cadre de laquelle j'ai pu participer à certains travaux concernant le sujet plus large des discriminations pratiquées à l'encontre des femmes sur le lieu de travail ; j'ai alors pu constater que les discriminations sont monnaie courante dans l'ensemble des pays européens.
Malgré les indéniables efforts mis en oeuvre, malgré l'augmentation des niveaux d'études et de qualification des femmes, aucun pays n'est parvenu à l'égalité dans ce domaine. Et même, certains pays parmi les plus avancés en matière de lutte en faveur de l'égalité des rémunérations entre femmes et hommes, qui ont obtenu des résultats rapides, ont constaté qu'à partir du moment où un certain palier de correction des inégalités avait été atteint cette correction ne se poursuivait alors que beaucoup plus lentement.
Je prendrai l'exemple de la France : l'écart moyen des rémunérations s'est effectivement stabilisé si l'on considère qu'en 1998 les salaires moyens des femmes travaillant à temps plein ou à temps partiel étaient d'un quart inférieurs à ceux de leurs confrères masculins. En 2002, cette différence atteignait 21 %, tout en prenant en compte le temps partiel. Si l'on ne s'intéresse qu'aux salariés travaillant à temps complet, l'écart de rémunération tombe à 12 %. Je reviendrai dans un instant sur cette question du travail à temps partiel.
Enfin, la crise économique a tendance à aggraver cette situation puisque la nécessité ou la volonté de rester dans le monde du travail conduit les femmes à accepter des rémunérations qui ne respectent pas les principes de l'égalité, ou encore à ne pas dénoncer les discriminations dont elles sont victimes par crainte de perdre leur emploi.
Dans les branches professionnelles et dans les entreprises, la négociation collective est bien sûr l'une des voies sur lesquelles il faut insister, puisqu'elle est l'instrument par excellence de la détermination des salaires. Mais pour que des stéréotypes concernant la valeur du travail des femmes ne se répètent pas, il faut que les femmes elles-mêmes participent plus activement aux organisations syndicales - en l'occurrence, la nomination à la tête du MEDEF d'une femme, Florence Parisot, est un exemple fort et prometteur -, et qu'elles prennent part aux négociations collectives afin de défendre au mieux leurs propres intérêts. C'est le sens dans lequel vous avez voulu aller, madame le ministre, et je ne peux que vous en féliciter.
Un autre point me semble très positif : dans le projet de loi que nous examinons, les entreprises sont soumises non plus à une obligation de moyens, puisqu'on a pu clairement établir que ce système ne fonctionnait pas, mais à une obligation de résultat, avec la mise en place d'une taxe sur la masse salariale pour les entreprises qui se montreraient récalcitrantes. Ces points positifs, dont je n'ai pas entendu parler jusqu'à présent, me semblent essentiels.
En contrepartie, des aides seront apportées aux entreprises, qui permettront ainsi indirectement aux femmes de concilier vie professionnelle et vie familiale : aide financière pour les petites entreprises, afin qu'elles puissent procéder au remplacement d'une salariée en congé de maternité, et extension du crédit d'impôt famille pour les entreprises qui doivent engager des dépenses de formation à la suite de la démission d'un salarié au cours d'un congé parental d'éducation.
Si nous voulons que l'égalité professionnelle soit rapidement effective, il ne faut pas que les entreprises subissent des charges qui seraient de nature à freiner le processus.
M. Roland Muzeau. Les bonnes intentions sont finies !
M. Jean-Guy Branger. Nous irions à l'encontre de l'objectif recherché, et vous le savez parfaitement, mes chers collègues ! Mais encore faut-il le reconnaître, ce qui est beaucoup plus difficile ! Je sais d'où proviennent les protestations, et j'ai pu apprécier, durant bientôt trente ans, combien elles avaient été efficaces !
J'en viens au travail à temps partiel.
Mme le ministre a déjà promis de réunir les partenaires sociaux afin de débattre plus profondément du problème du travail à temps partiel subi, et cela me semble être une bonne chose : cette forme de travail représente effectivement l'une des principales causes de la précarité que subissent les femmes.
M. Claude Domeizel. Ce ne sont que des promesses !
M. Jean-Guy Branger. Tous secteurs confondus, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à occuper des emplois temporaires, prenant la forme, par exemple, de contrats à durée déterminée, et ce sont les premières à être concernées par le travail à temps partiel.
Ainsi, en 2003 presque 30 % des femmes actives occupaient un emploi à temps partiel, contre 5,4 % des hommes, et les femmes représentaient près de 82 % des travailleurs à temps partiel.
On peut immédiatement penser que cette situation concerne des femmes qui ont décidé, par choix ou par nécessité, de conserver un travail, mais de réduire le temps qu'elles souhaitent ou peuvent y consacrer, mais on aurait tort ! Car les femmes travaillant à temps partiel sont quatre fois plus nombreuses que les hommes à déclarer rechercher un travail à temps complet ou, au moins, à souhaiter travailler davantage.
M. Roland Muzeau. Et voilà !
M. Claude Domeizel. Ce n'est pas une loi qui règlera le problème !
M. Jean-Guy Branger. En effet, à l'époque où le temps de travail est limité à 35 heures, en ces temps où le maître mot est « loisirs », il ne faudrait pas oublier que des personnes, des femmes en l'occurrence, veulent ou doivent travailler. Il en existe encore beaucoup !
Je félicite donc la commission des affaires sociales et son rapporteur, Mme Sittler, d'avoir voulu répondre à ces femmes et d'avoir proposé un amendement visant à favoriser l'exercice d'un travail à temps complet pour les salariés travaillant à temps partiel.
Je conclurai en rappelant que les discriminations, même en matière de rémunération, sont une violation flagrante du droit à l'égalité, qui est un droit fondamental.
Madame la ministre, je suis convaincu que le projet de loi que vous nous présentez est un bon texte, qu'il va générer des progrès dans le domaine de l'égalité salariale et mettre en évidence toutes les inégalités qui existent entre les femmes et les hommes. Il a le mérite d'être !
Notre rôle est de vous aider et de rechercher avec vous les moyens de l'améliorer.
Pour ma part, je veux que vous sachiez à quel point je l'apprécie, car tout ce qui est fait pour lutter contre les inégalités existantes représente un bienfait pour la société. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, madame la ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, de toutes les inégalités de développement, l'inégalité entre les hommes et les femmes est l'une des plus spécifiques, et elle affecte tous les pays, même les plus avancés.
Contrairement à un certain nombre d'idées reçues, les progrès en matière d'égalité entre les sexes ne dépendent pas toujours de la richesse d'un pays. C'est d'abord une affaire de volonté politique, d'évolution culturelle et d'engagement de la société tout entière.
La démocratie est une valeur fondamentale pour notre pays et pour être effective, elle requiert une participation et une représentation égales des citoyens des deux sexes dans l'économie, la prise de décisions, dans la vie aussi bien sociale, culturelle que civile.
Certes, des progrès majeurs ont été enregistrés au cours des dernières décennies. Cependant, le constat est peu réjouissant : les femmes ont moins de chance d'être embauchées que les hommes. Elles gagnent 25 % de moins que leurs collègues masculins ; leur progression de carrière est plus lente, et ce, malgré un arsenal législatif fort.
Ainsi, les femmes et les hommes ne jouissent pas des mêmes droits dans la pratique. Ces écarts sont inacceptables : trop de femmes sont en situation de précarité pendant leur activité, puis au moment de leur retraite. Ils sont inexplicables au moment où les femmes ont les mêmes diplômes ou compétences que les hommes.
Le problème est en outre aggravé par la ségrégation professionnelle, c'est-à-dire par le fait que les femmes sont essentiellement employées dans des secteurs où le travail est traditionnellement considéré comme moins valorisant.
M. Claude Domeizel. Eh oui !
Mme Patricia Schillinger. En d'autres termes, la vaste majorité des femmes reste cantonnée dans ce que certains économistes appellent le « ghetto rose » : personnel de service, emplois de bureau mal rémunérés, précarité résultant de contrats à durée déterminée, intérim, temps partiel, tous types de contrats qui contribuent au creusement de l'écart salarial et qui, de surcroît, pèsent sur le montant des pensions de retraite.
L'enjeu de l'égalité entre les hommes et les femmes ne se résume pas à la seule question du montant des salaires. Derrière ce thème se profile toute la problématique de la place effective des femmes au sein des entreprises. Comment lutter contre les maternités pénalisantes pour l'avancement d'une carrière ? Comment favoriser l'accession aux formations et aux postes à responsabilités ? Comment concilier responsabilités familiales et obligations professionnelles ?
Ne disposant que de quelques minutes et de nombreux points ayant été abordés, je me contenterai d'évoquer essentiellement le problème de la maternité. Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui apporte quelques avancées dans ce domaine, mais il reste encore très insuffisant. La prise de conscience est peut-être réelle, mais beaucoup reste à faire.
La maternité ne doit pas être un handicap et ne doit plus être un frein qui pénalise les femmes dans leur parcours professionnel. Dans ce texte, pour réconcilier l'emploi et la parentalité, vous proposez d'octroyer aux patrons des PME de moins de cinquante salariés une aide de 400 euros pour faire face au remplacement d'une salariée en congé de maternité. Ainsi, l'employeur ne subit aucun manque à gagner et cette indemnité compensatrice, prise en charge par la protection sociale, sous-entend qu'employer une femme constitue une charge supplémentaire. On propose donc des incitations financières pour pallier le recrutement des femmes. Ne s'agit-il pas d'une « discrimination positive » ?
Nicole Ameline a déclaré que les entreprises doivent comprendre qu'avoir des enfants ne doit pas être considéré comme un handicap. Mais cette mesure montre justement à l'employeur que la maternité est un handicap. Cette prime octroyée à l'employeur tend à accréditer l'idée que l'embauche de femmes constitue une source de problèmes pour l'entreprise.
Je ne suis pas certaine qu'en offrant aux patrons des PME des aides financières, on facilitera l'embauche des femmes. L'embauche d'une femme ne doit pas devenir un emploi aidé.
Après avoir prôné pendant de nombreuses années le retour au foyer des mères de famille, permettant ainsi d'alléger les statistiques du chômage et les finances de l'UNEDIC, la droite préconise aujourd'hui de « remettre les femmes au travail » pour faire face à la pénurie de main-d'oeuvre qui se profile avec le départ en retraite de la génération du baby-boom. Mais dans quelles conditions ? La nécessité de trouver rapidement de la main-d'oeuvre explique notamment la volonté de faire peser sur les femmes des contraintes en vue de les obliger à accepter n'importe quel emploi.
Par ailleurs, selon une étude de l'Organisation de coopération et de développement économiques, la participation des femmes au marché du travail dépend directement de leurs responsabilités familiales. Dans les pays où l'Etat investit peu dans l'accueil des jeunes enfants, la maternité reste un obstacle à l'entrée ou au maintien dans le marché du travail pour les femmes âgées de vingt-quatre à quarante-neuf ans.
En France, on note une insuffisance des crédits consacrés aux crèches, à la scolarisation des enfants de deux ans. Ainsi, 250 000 places sont disponibles pour 2,4 millions d'enfants. La pénurie de crèches atteint un tel niveau que les groupes privés commencent à flairer la bonne affaire, alors que l'on sait que, le plus souvent, ce sont les femmes qui, face aux problèmes de la garde des enfants, sont contraintes d'abandonner leur travail, au moins partiellement.
En outre, si la présence d'un seul enfant de moins de trois ans dans le ménage a peu d'effet sur l'activité des femmes, en revanche, il n'en est pas de même pour les mères de deux ou trois enfants. En 2003, le taux d'activité des mères en couple s'élevait à 80 % avec un enfant de moins de trois ans, mais à 58 % avec deux enfants, dont un de moins de trois ans. Ce projet de loi n'apporte aucune réponse à ce sujet.
Alors que l'on sait aujourd'hui que les politiques de soutien aux mères salariées, notamment la politique d'accueil de la petite enfance, jouent un rôle décisif dans les processus d'insertion ou de maintien des femmes sur le marché de l'emploi, il serait plus judicieux que l'Etat développe l'accueil de la petite enfance, aide les parents à y accéder, car le développement des modes d'accueil collectifs pour les enfants est une réponse à une meilleure articulation entre vie familiale et professionnelle pour tous.
Ainsi, les femmes pourront suivre plus librement une formation, car les écarts salariaux sont la résultante non seulement de la difficulté d'embauche, mais aussi de l'accès à la formation et des conditions de l'organisation du travail. Je ne vois dans ce texte aucune réponse à ce problème.
De plus, le recours aux aides fiscales plutôt qu'à l'expansion des modes de garde collectifs favorise les familles aisées.
En effet, la garde à domicile coûte cher, en moyenne 1 050,68 euros par mois pour un enfant d'un an. Et plus les revenus sont élevés, plus les réductions d'impôts sont importantes. Enfin, vous ne tenez pas compte de la rigidité des horaires des crèches publiques, alors que les emplois aux horaires atypiques se développent de plus en plus et que le temps de transport travail-domicile s'allonge dans les villes.
Certaines dispositions du texte soulèvent beaucoup d'interrogations quant à leur application.
L'article 1er impose la remise à niveau des rémunérations des femmes après un congé de maternité. C'est une bonne chose, à condition, bien sûr, de prendre en compte non seulement le salaire de base, mais également toute prime qui aurait pu être versée par l'entreprise dans l'intervalle, ainsi que les éventuels dispositifs d'intéressement. Les femmes en congé de maternité ont d'ores et déjà la garantie de retour à l'emploi. Mais, si elles bénéficient des augmentations générales accordées par l'entreprise, il n'en va pas de même des augmentations individuelles.
De plus, les conditions de mise en oeuvre des garanties plus larges d'évolution de la rémunération et d'évolution professionnelle des salariés ayant bénéficié d'un congé de maternité ou d'adoption doivent être fixées par un accord collectif de branche ou d'entreprise, afin de compenser les effets de la maternité ou de l'adoption sur la rémunération et les trajectoires professionnelles des salariés concernés.
Les conditions d'application de cette mesure laissent pour le moins perplexe. En effet, l'article 1er ne constitue en réalité qu'une mise en conformité avec une directive européenne et une application de l'accord de 2004. Le Gouvernement s'en remet d'ailleurs aux partenaires sociaux pour l'application de cet article, sans prévoir aucune sanction en cas de carence.
Le rapporteur à l'Assemblée nationale a même déclaré que l'essentiel était de lancer le mouvement, tout en préservant la liberté des employeurs de mettre en oeuvre, le cas échéant, ces garanties par la même négociation collective.
Le rapporteur lui-même le reconnaît : l'article 1er pourrait n'être appliqué que de façon virtuelle. Que se passerait-t-il en cas d'absence d'un accord collectif ? L'évolution des rémunérations pour les femmes revenant d'un congé de maternité ou d'adoption porterait donc sur l'augmentation minimale, calculée sur la base de la moyenne des augmentations.
Autre interrogation que soulève ce texte : s'agissant des pratiques de discrimination à l'embauche, que proposez-vous pour les femmes les plus jeunes dans la perspective d'un congé de maternité à venir ?
Pour finir, je souhaite aborder un problème qui me touche tout particulièrement et que j'ai déjà exposé et défendu à plusieurs reprises, celui du congé de maternité des femmes qui ont accouché prématurément.
Aujourd'hui, quelle que soit la date de l'accouchement, les mères assurées sociales bénéficient de seize semaines de congé indemnisé. Au-delà de ce délai, elles ne sont plus rémunérées.
L'article 10 de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui complète l'article L. 122-26 du code du travail, prévoit une nouvelle disposition permettant de prolonger le congé de maternité des salariées dans le cas où l'accouchement intervient plus de six semaines avant la date prévue et exige l'hospitalisation de l'enfant. Ce droit est applicable depuis la publication de la loi. Malheureusement, la loi ne contient aucune mesure relative à l'indemnité.
En fait, l'adoption de cette disposition a eu lieu après plusieurs modifications intervenues au cours de l'examen du projet de loi relatif aux personnes handicapées, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 puis à nouveau du projet de loi relatif aux personnes handicapées. Pour tous les parlementaires qui ont défendu cette mesure, il était évident que ce droit à un congé supplémentaire devait s'accompagner d'une indemnisation. Mais faute d'être mentionnée dans le texte ou de ne pas être placée dans le bon code, la prise en charge financière n'est pas prévue. Or ce droit nouveau n'a aucun sens s'il n'est pas accompagné d'une indemnité.
Le 28 juin dernier, j'ai posé une question orale au ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. La réponse qui m'a été donnée précise qu'il est nécessaire d'engager dès à présent une réflexion approfondie sur cette mesure, mais nous avons déjà perdu trop de temps ; il faut agir !
Je rappelle que l'allongement de la durée du congé de maternité est essentiel, car il permet à la mère et à son enfant de tisser les liens mis à mal par une hospitalisation. De plus, il est adapté aux situations de détresse dans lesquelles se trouvent des familles confrontées à la grande prématurité d'un enfant, qui peut rester hospitalisé plusieurs mois après sa naissance.
Si ce congé est sans solde, ces femmes devront reprendre leur travail, alors que leur enfant, encore en couveuse, devrait bénéficier de la présence maximale de leur mère. Il est inconcevable que ce droit soit un congé sans solde ; il doit s'accompagner d'une prise en charge financière. C'est la raison pour laquelle nous proposerons tout à l'heure un amendement permettant une telle prise en charge.
Pour conclure, je dirai que ce texte ne permet pas de répondre à tous les problèmes. Par ailleurs, toutes les solutions n'y sont pas envisagées. Je prends acte d'un manque de volonté politique. Comme je le mentionnais auparavant, la prise de conscience est là, mais il reste encore beaucoup à faire en matière d'égalité salariale !
Je terminerai par une citation : « on peut juger du degré de civilisation d'un peuple à la situation sociale de la femme ». Il faut donc agir ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Madame la présidente, madame le rapporteur, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier l'ensemble des orateurs. Ils ont permis, ce matin, que se tienne un débat extrêmement riche et ont donné, au fil de leurs interventions, une vision des moyens possibles pour remédier aux inégalités actuelles et juger de l'impact des mesures que nous vous proposons de prendre dans ce texte
Je commencerai par dire à Mme le rapporteur tout le plaisir que j'ai eu à échanger avec elle et combien j'ai apprécié notre dialogue franc et constructif.
Je remercie également Jean-Guy Branger de son vibrant plaidoyer. Monsieur le sénateur, vous avez raison de dire que les femmes ont gagné en droit et en indépendance, mais que des retards subsistent et que la société ne s'est pas mise au diapason des femmes. Le texte que nous vous proposons a précisément pour objet de tenter de mettre un peu plus la société au diapason des femmes.
Vous avez insisté, les uns et les autres, sur les différentes dispositions qu'il fallait adopter pour aller encore plus loin et avoir une démarche équilibrée. Entre la confiance excessive et la contrainte abusive, je suis convaincue qu'il existe une voie : celle que j'essaie de trouver avec vous. Pour être efficace, une condition est nécessaire : s'inscrire dans une stratégie globale d'amélioration de l'égalité des chances.
Vous avez tous fait un constat : l'égalité ne se décrète pas, elle s'organise. Mme Sittler, en particulier, l'a dit fort justement et concrètement. Oui, nous devons agir ensemble contre les discriminations. Le choix de ce texte, c'est d'abord celui de la discussion, donc de la conviction. C'est aussi, mais après seulement, celui de la contrainte. Voilà pourquoi ce texte comporte deux étapes.
Mme Sittler a fort bien dit qu'il fallait une obligation de résultat et pas seulement une obligation de moyens. En parallèle, évitons d'augmenter les formalités pour les entreprises et les risques de contentieux. Prenons garde également à l'effet boomerang : à vouloir trop bien faire, nous risquerions de voir les entreprises embaucher encore moins de femmes qu'elles ne le font aujourd'hui.
Mme Gautier a bien évidemment mis en avant l'excellent travail de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. La féminisation des instances de direction est clairement un gage de production et d'efficacité. Je partage tout à fait, madame la présidente, les constats que vous avez mis en avant, y compris celui qui porte sur le bonus des dirigeants des très grandes entreprises nationales. C'est une démarche tout à fait importante.
Je partage également votre interrogation sur l'efficacité des pénalités financières. Nous sommes effectivement nombreux ici à savoir combien, en politique, le système des pénalités s'est révélé d'une redoutable inefficacité.
Si la publicité ne pose pas de problème pour les accords de branche, c'est plus compliqué pour les accords d'entreprises en raison de la confidentialité. C'est la raison pour laquelle, à partir du 1er janvier 2006, la diffusion de ces accords sur le site Internet du ministère se fera sans aucune mention susceptible d'identifier quelque cas particulier que ce soit.
S'agissant du référent « égalité », je comprends, chère présidente, que vous soyez si attachée à cette notion. Elle ne relève pas forcément du domaine législatif, mais réfléchissons - pourquoi pas ? - au domaine réglementaire sur le sujet.
Vous avez raison de dire que travailler à la mobilité des conjoints est incontestablement aujourd'hui l'apanage de très grands groupes, quelquefois de la fonction publique. Je propose d'aller plus loin sur la diffusion des bonnes pratiques pour progresser à cet égard.
S'agissant de la formation des inspecteurs du travail, je tiens à vous dire que, dans le cadre de la réforme en cours, Gérard Larcher travaille sur cette question.
M. Seillier parle d'or quand il insiste sur l'articulation de la vie familiale et de la vie professionnelle : c'est le problème central du débat qui est le nôtre ! Toutes les études démontrent en effet la corrélation entre le taux de natalité et le taux d'activité. Les deux ne sont en aucune façon antinomiques ou antagonistes. Il suffit - ce n'est d'ailleurs pas si simple ! - de les organiser. Je suis convaincue que notre mission est de permettre aux femmes de vivre non seulement leur vie de femme et de mère, mais également une vie professionnelle. A ce sujet, je voudrais dire à Mme Rozier que je suis également totalement convaincue du nécessaire équilibre entre la vie familiale et la vie professionnelle.
Vous m'avez bien évidemment interrogé, monsieur Seillier, sur les dispositions contraignantes. Le 7 septembre - ce n'est pas dans six mois ! - je réunirai le Conseil supérieur. Nous parlerons alors du temps partiel subi - nous y viendrons nécessairement ! - et d'indicateurs pour ce texte. L'idée est d'avoir, à la fin de 2007, un rapport établi à partir des indicateurs que nous aurons déterminés. Si, au vu de ce rapport, il s'avère nécessaire de légiférer, nous le ferons, mais de façon simple : un ou deux articles suffiront pour déterminer les contraintes.
Madame Printz, vous m'avez interrogé sur les raisons qui sont à l'origine de cette loi : c'est la volonté d'aller plus loin dans l'application des lois de 1983 et de 2001, car nous avons unanimement constaté qu'elles n'étaient pas suffisamment appliquées. C'est la raison pour laquelle le projet de loi comporte deux étapes.
Ce texte constitue une avancée pour les prud'hommes, puisque nous reprenons l'objectif de réduction d'un tiers des écarts.
Quant aux déléguées régionales des droits des femmes, elles ont clairement toute leur place dans l'accompagnement du service public de l'emploi ; j'y reviendrai d'ailleurs dans la discussion des amendements.
Je souhaite également remercier Mme Rozier d'avoir mis en avant la méthode retenue par le texte : l'échéancier, la logique de résultat, les deux étapes. Les suggestions sur l'information sont tout à fait importantes et, à ce titre, je voudrais souligner la remarquable initiative de l'Union des industries et métiers de la métallurgie, l'UIMM, à savoir la grande manifestation du mois de mai dernier qui avait pour objet de sensibiliser les jeunes filles aux activités de la métallurgie.
J'ajoute que, pour sensibiliser, dès leur formation initiale, les enseignants sur la nécessité de l'égalité, il est prévu d'intégrer un module sur l'égalité dans les instituts universitaires de formation des maîtres.
Enfin, je suis convaincue que l'articulation du mode de garde des enfants et de la vie professionnelle est l'un des éléments vitaux pour développer le service aux familles. Je voudrais, à ce sujet, insister sur le travail qu'avait accompli Christian Jacob, lorsqu'il était ministre délégué à la famille. Ce travail sera bien évidemment repris par Philippe Bas.
Je souhaite revenir sur l'intervention de Mme Morin-Desailly et sur les sanctions immédiates. Pourquoi avons-nous prévu un délai de deux ans et demi ? Parce qu'à partir de moment où nous avons des indicateurs, des outils et une évaluation, il s'agit, en quelque sorte, du dernier avertissement avant la sanction. C'est un moyen très clair d'aller plus loin en ce qui concerne l'engagement de l'ensemble des partenaires sur le sujet.
S'agissant du temps partiel subi, que vous avez évoqué, les uns et les autres, il ne s'agit pas simplement de déclarations d'intention. Gérard Larcher a commencé son tour d'horizon. J'ai moi-même rencontré les partenaires sociaux à l'occasion de réunions bilatérales. J'ai saisi le Conseil économique et social. Ce sera l'un des sujets de la rentrée. Vous jugerez aux actes. En tout cas, les actions ont déjà commencé !
Nous sommes tous d'accord : c'est vraiment l'un des éléments clefs pour changer la condition de nos concitoyennes aujourd'hui dans notre pays. Nous savons tous que le temps partiel subi fonctionne comme une véritable trappe à pauvreté pour des gens qui travaillent. C'est donc une vraie difficulté.
M. Roland Muzeau. Il faut faire quelque chose !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Voilà seulement cinq semaines que le Gouvernement a été nommé ! Laissez-nous le temps de travailler, monsieur Muzeau !
M. Alain Gournac, vice-président de la commission des affaires sociales. Qu'ont-ils fait lorsqu'ils étaient au pouvoir ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Permettez-moi d'évoquer un autre élément important qui montre que l'on peut agir concrètement.
Lors de mon audition devant la commission des affaires sociales, Mme Schillinger a abordé la question, qui lui tient à coeur, du congé de maternité des femmes qui ont accouché prématurément. Sachez que Philippe Bas défendra lui-même, cet après-midi, un amendement du Gouvernement sur ce point. Cela prouve que nous savons nous mobiliser sur les vrais sujets et qu'ensemble nous pouvons les faire évoluer.
Madame Schillinger, je suis heureuse que vous reconnaissiez dans ce texte « une prise de conscience de la maternité ». Les 400 euros dont pourront bénéficier les petites entreprises constituent en effet une incitation à l'embauche des femmes.
S'agissant de la garde des enfants, un plan « crèche » a été proposé lors de la Conférence de la famille et le Premier ministre a annoncé la création de 15 000 places de crèche sur les années 2005 et 2006. C'est en effet, aujourd'hui encore, un élément indispensable.
Mais il ne faut pas nous concentrer uniquement sur les crèches. Un enfant n'est pas élevé à trois ans, nous le savons toutes, nous qui articulons tous les jours vie professionnelle et vie privée. Il faut apporter d'autres réponses ; je pense notamment aux absences dues aux enfants malades. L'un des deux parents, le plus souvent la femme, doit rester à la maison lorsqu'un enfant ne peut pas aller à la crèche ou à l'école. Ces absences ont des répercussions importantes sur les carrières des femmes.
De nombreux points importants ont été soulevés au cours de la discussion. Il faut insister sur l'articulation de la vie de femme, de la vie de mère et de la vie professionnelle.
Avec le présent projet de loi, le Gouvernement s'attaque à plusieurs de ces points : il améliore cette articulation ; il encourage l'accès des femmes à la formation, à l'apprentissage ; il neutralise les effets de la maternité sur l'évolution de la rémunération ; il augmente la représentation des femmes dans les instances délibératives des entreprises. Sur toutes ces questions, il existe des marges de progrès importantes.
En matière d'égalité professionnelle, le Gouvernement va plus loin. La diversification des choix professionnels des jeunes filles a été abordée dans le texte sur l'avenir de l'école. Il est également animé de la volonté d'avancer en matière de temps partiel subi.
La discussion du présent projet de loi va nous permettre, concrètement, de mesurer comment nous pouvons, ensemble, aller vers plus d'égalité, plus d'équilibre, donc plus de cohésion.
Avant de conclure, permettez-moi de répondre à l'interpellation de M. Roland Muzeau relative à la délégation de Nestlé : sur l'initiative de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président du Sénat, et de M. Roland Blum, député des Bouches-du-Rhône, M. Gérard Larcher recevra une délégation de Nestlé. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
TITRE IER
SUPPRESSION DES ÉCARTS DE RÉMUNÉRATION
Article additionnel avant l'article 1er
Mme la présidente. L'amendement n° 56, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail est ainsi rédigé :
« Si un état pathologique attesté par un certificat médical comme résultant de la grossesse ou des couches le rend nécessaire, la période de suspension du contrat prévue aux alinéas précédent est augmentée de la durée de cet état pathologique ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Dans le rapport de M. Hubert Brin, président de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, remis à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, du 15 avril 2005, intitulé Enjeux démographiques et accompagnement du désir d'enfant des familles, il est précisé que près de 60 % des congés de maternité sont prolongés par des congés pathologiques.
Par ailleurs, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM, indique que 67 % des femmes ont eu au moins un arrêt maladie après la fin du troisième mois de grossesse.
Ces chiffres révèlent bien l'importance du recours au congé pathologique, souvent indispensable. Plus encore, certaines femmes sont obligées de rester alitées dès les premiers mois de grossesse, d'autres sont victimes de malaises, de maux divers, donc contraintes à s'arrêter de travailler. Elles sont alors en congé de maladie puisqu'elles s'arrêtent de travailler en dehors de la période dite de congé pathologique. En effet, les femmes ne peuvent bénéficier du congé de maternité, assimilé à une période de travail effectif, que dans la limite de deux semaines avant la date présumée de l'accouchement et de quatre semaines après la date de celui-ci.
Si la salariée a le droit de suspendre le contrat de travail pendant cette période pour la détermination de ses droits à l'ancienneté, au-delà, l'arrêt de travail, même lié à l'état de grossesse, est considéré comme un arrêt au titre de la maladie, avec, notamment, des indemnités journalières moins élevées. Ainsi, juridiquement, un tel arrêt de travail n'est pas assimilé à une période de travail effectif.
Cette disposition, qui limite le congé pathologique, est ressentie, à juste titre, comme une injustice par les femmes qui ont recours à cet arrêt.
L'objet de cet amendement est donc de prendre pleinement en considération les difficultés pathologiques liées à l'état de grossesse ou de couches que rencontrent de nombreuses femmes en supprimant, dans l'article L. 122-26 du code du travail, les « seuils temporels qui limitent le congé pathologique ». Il vise notamment à améliorer la protection des femmes enceintes, afin que tout arrêt de maladie lié à l'état de grossesse soit assimilé à une période de travail effectif.
Cela permettra à toute femme d'être reconnue dans son état de grossesse dès les premières semaines et jusqu'à son complet rétablissement après l'accouchement. C'est une mesure nécessaire dans une société qui dit reconnaître l'égalité des sexes, donc le droit des femmes à avoir un emploi. En effet, cette disposition aura des implications non seulement en matière de retraite, du fait de l'augmentation du nombre de trimestres requis pour bénéficier d'une retraite à taux plein, mais aussi s'agissant du droit individuel à la formation, le DIF, que j'évoquerai dans un instant.
Comme vous l'avez indiqué vous-même, madame la ministre, la maternité et ses suites doivent être reconnues. Aussi est-ce dans un souci de justice sociale, de solidarité et d'équité que je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de bon sens, sur lequel la commission a émis un avis favorable.
Une disposition du code du travail sous-tendue par un objectif identique est rédigée dans les mêmes termes que cet amendement. La seule différence c'est que la période de suspension est plafonnée à deux semaines avant l'accouchement et à quatre semaines après.
Cet amendement tend à lever les plafonds de la durée de suspension du contrat de travail. Il s'inspire du principe qu'avait adopté la commission au sujet de l'amendement sur le prolongement de la durée du congé parental lorsque l'enfant est prématuré.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. En application de l'alinéa 3 de l'article L. 122-26 du code du travail, il paraît difficile de modifier la durée du congé pathologique, d'une durée de deux semaines avant et de quatre semaines après l'accouchement. Cela risquerait en effet d'entraîner une inégalité au regard de l'appréciation de l'état pathologique d'une femme enceinte ou accouchée. Il y a donc là un risque de contentieux.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
Article 1er
L'article L. 122-26 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En l'absence d'accord collectif de branche ou d'entreprise déterminant des garanties d'évolution de la rémunération des salariés pendant les congés prévus au présent article et à leur issue, cette rémunération est majorée, à l'issue de ces congés, des augmentations générales ainsi que de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant la durée de ces congés par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l'entreprise. »
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Mon propos concernera l'ensemble du titre Ier, qui concerne la suppression des écarts de rémunération.
Après la loi Roudy et la loi Génisson, dont chacun s'accorde à reconnaître le bien-fondé - mais tous les moyens n'ont pas été mis en oeuvre pour atteindre l'objectif fixé - on pouvait espérer enfin un texte contraignant en faveur de l'égalité salariale et professionnelle, accompagnant de manière forte ces législations en vigueur !
En effet, aujourd'hui, selon le principe de base énoncé à l'article L. 140-2 du code du travail, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes s'impose pour « un même travail », mais aussi « pour un travail de valeur égale », notion définie au regard « d'un ensemble comparable de connaissances professionnelles, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ».
Quelle déception, donc, à la lecture de ce texte, qui ne verra comme avancées que la reconnaissance de l'état de grossesse - grâce à l'amendement que le Sénat vient d'adopter, les arrêts de maladie liés à cet état seront pris en compte - la place des femmes dans les instances représentatives, ou encore la mise en place d'aléatoires articulations entre l'activité professionnelle et l'exercice de la responsabilité familiale, comme si la responsabilité familiale n'incombait qu'aux femmes ! C'est un peu ce que j'ai eu l'impression d'entendre dans nombre d'interventions au cours de la discussion générale.
En fait d'avancées, ce n'est que la reconnaissance de droits jusqu'alors bafoués ! Quand allons-nous aborder les réelles difficultés des salariées : les bas salaires, le temps partiel imposé, l'aggravation de la paupérisation, la précarité grandissante, accentuée par les deniers textes sur l'emploi, la dévalorisation de la retraite, qui a déjà été largement dénoncée ? Et je n'évoquerai pas le harcèlement, qu'il soit sexuel ou non. Vous avez indiqué que ces questions seraient abordées à la rentrée, madame la ministre. J'en prends acte ; je serai là pour vous écouter.
Quand allons-nous également dénoncer la misogynie de certains de nos concitoyens, qui considèrent encore le salaire des femmes comme un salaire d'appoint - ce qui vaut bien souvent à celles-ci d'être les premières licenciées en cas de plan de suppression d'emplois - ou qui ne reconnaissent pas leur qualification professionnelle ? A travail égal, salaire égal, bien sûr, mais aussi qualification égale. Vous n'abordez pas ce point dans le texte que vous nous soumettez, madame la ministre.
Pour autant, je partage avec vous cette évidence, énoncée lors du débat à l'assemblée nationale : « L'égalité n'est pas seulement une exigence sociale, économique et démocratique. Elle est aussi une urgence pour des milliers de femmes qui veulent légitimement être reconnues pour ce qu'elles font et pour ce qu'elles sont » !
Pourtant, dans la première partie du projet de loi, il n'est question que de la suppression des écarts de rémunération, alors qu'il ne devrait plus y en avoir, au vu des législations en vigueur. Mais, aujourd'hui encore, certaines entreprises ne savent même pas qu'il existe des textes en ce sens, en tout cas elles font comme s'ils n'existaient pas !
Comme l'ont rappelé Mme Gautier et Mme Printz, le sondage réalisé à la demande de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes indique que 72 % des entreprises interrogées n'ont jamais organisé la négociation spécifique et obligatoire prévue par le code du travail et que, dans 60 % d'entre elles, le rapport de situation comparée n'a jamais été établi depuis 2002.
Par ailleurs, les négociations spécifiques sur l'égalité professionnelle ont davantage lieu au niveau de la branche, plus favorable à l'exercice de la négociation collective, qu'au niveau de l'entreprise. Interrogées sur l'intégration du thème de l'égalité professionnelle dans les négociations obligatoires déjà existantes, environ la moitié des entreprises ont répondu qu'elles l'ont inclus, manifestant ainsi leur réticence à la négociation spécifique, plus lourde à conduire.
C'est la raison pour laquelle un bilan rapide est nécessaire.
Je terminerai sur deux points qui ne me semblent pas davantage aller dans le sens d'une avancée des droits des salariées ?
Tout d'abord, fixer un objectif à cinq ans, c'est finalement accepter qu'il faille un quart de siècle pour donner aux femmes leur dû, puisque la loi Roudy remonte à 1983. Et je ne parle pas du préambule de la Constitution de 1946, auquel vous vous êtes référé, madame la ministre, qui prévoit déjà ceci : « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme. » !
Ensuite, comme le précise Mme Gautier dans son rapport pour la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, la fixation d'objectifs chiffrés est un élément primordial des stratégies de réduction des disparités. Or on s'aperçoit que, dans ce texte, rien n'est chiffré. Mme Sittler a même manifesté le souhait, au cours d'une réunion de la délégation, de fixer un objectif de rééquilibrage, par exemple pour l'article 13 bis nouveau, en évitant d'introduire un indicateur chiffré !
Pour ma part, j'aurais préféré des objectifs chiffrés véritablement ambitieux et contraignants pour les entreprises.
Après ces premières précisions, je veux indiquer ici que je ne partage pas l'avis rendu au nom de la délégation. Si, au cours de la réunion de cette dernière, ma collègue et amie Hélène Luc et moi-même avons donné acte à la présidente de son rapport, nous n'avons pas approuvé ce texte, sur lequel je suis très réservée, parce que je connais particulièrement la situation des femmes dans les entreprises pour avoir travaillé au sein de l'une d'entre elles pendant vingt ans et pour avoir défendu plus d'une salariée, toujours dans des situations difficiles.
Mon vote dépendra du sort réservé aux amendements déposés par mon groupe. Pour l'heure, j'oscille entre l'abstention ou le vote contre, car ce texte comporte à mes yeux plus de lacunes que d'avancées.
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 57, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 122-26 du code du travail :
« A l'issue des congés prévus au présent article, la rémunération des salariés est majorée des augmentations générales ainsi que de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant la durée de ces congés par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l'entreprise. Un accord collectif de branche ou d'entreprise détermine les conditions de mise en oeuvre des garanties d'évolution de la rémunération et d'évolution professionnelle des salariés concernés. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Plusieurs raisons expliquent qu'aujourd'hui les femmes pointent davantage au chômage que les hommes, qu'elles y restent plus longtemps, qu'elles soient majoritaires dans certains secteurs d'activité à bas salaires, les services notamment, qu'elles soient moins nombreuses en haut de l'échelle sociale et, surtout, qu'elles soient toutes moins bien rémunérées que les hommes.
Les mentalités doivent certes évoluer, mais cela ne saurait suffire : « il faudrait aller au-delà, des mesures coercitives sont indispensables », comme l'a souligné Mme Gaétane Hazeran s'exprimant en tant que chef d'entreprise devant la commission des affaires sociales.
Or il n'y a rien de contraignant dans ce projet de loi, qui s'appuie essentiellement sur un « système de confiance » et qui renvoie à la négociation d'entreprise le soin de « tordre le cou » aux inégalités entre les hommes et les femmes au travail. C'est le point noir de cet énième texte, de l'efficacité duquel beaucoup doutent. Et pour cause !
En dépit de la règle : « à travail égal, salaire égal », connue de tous, et d'un cadre juridique important, le rééquilibrage attendu des salaires n'est toujours pas acquis. Dans certains cas, même, l'écart s'est creusé, comme le note dans son rapport Françoise Milewski, économiste à l'OFCE : « La part des femmes dans les salaires les plus élevés tend à augmenter lentement, mais celle des femmes dans les bas salaires ne baisse pas. Aujourd'hui, près de 80 % des salariés à bas salaires sont des femmes. [...] Cette proportion est d'environ 10 points supérieure à son niveau des années quatre-vingt-dix. »
Le projet de loi ne prévoit rien de volontariste pour résorber d'ici à cinq ans ces inégalités salariales, inégalités que la politique de l'emploi du Gouvernement s'entête par ailleurs à enraciner en développant et en subventionnant l'emploi à temps partiel.
Il ne contient rien de très novateur, exception faite des dispositions de l'article 1er visant à neutraliser les périodes de maternité en termes de rémunération et de carrière, comme je l'ai souligné devant la commission des affaires sociales.
Nous approuvons évidemment le principe d'une actualisation de la rémunération du salarié de retour de congé maternité ou d'adoption. Encore faut-il s'entendre sur le terme « rémunération » et le retenir dans un sens large, donc y intégrer les primes et les dispositifs d'intéressement ; nous reviendrons sur ce point. Encore faut-il également ne pas laisser la possibilité aux entreprises de déroger à ce droit aux augmentations collectives et individuelles.
Or, tel qu'il est rédigé, l'article 1er dispose que c'est en l'absence d'accord collectif de branche ou d'entreprise que les garanties en matière de rémunération susvisées trouveront à s'appliquer.
A contrario, cela signifie que, par accord collectif, d'autres mesures peuvent être décidées et qu'elles primeront sur le minimum légal, y compris lorsqu'elles seront moins disantes.
Nous voulons éviter cette situation, rendue possible par l'évolution négative des règles applicables à la négociation collective initiée par M. Fillon, qui, je vous le rappelle, a cassé la hiérarchie des normes et a remis en cause le principe de faveur.
Par notre amendement, donc, d'une part, nous proposons de poser au bénéfice de tous les salariés la règle minimale d'évolution de la rémunération durant le congé maternité et, d'autre part, nous prévoyons que cette règle puisse être adaptée par la négociation collective dans un sens plus favorable aux salariés.
Cette solution laisse toute sa place à la généralisation de certains accords actuellement en vigueur, mais qui sont loin d'être majoritaires, tel celui de BNP-Paribas, aux termes duquel le congé de maternité est considéré comme du temps de travail effectif.
Un amendement similaire a pourtant été rejeté par les députés et le Gouvernement, qui ont estimé, à tort, qu'il n'était pas compatible avec la liberté qu'il convient de laisser aux employeurs. Il faut bien évidemment, et malheureusement, comprendre : la liberté pour ces derniers de continuer leurs pratiques discriminantes en concluant des accords dérogatoires à la loi.
Pour parvenir à résorber les écarts de salaires, c'est de règles claires et de garanties supplémentaires que nous avons besoin, et non de pétitions de principe sans valeur obligatoire.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter notre amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 22, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 122-26 du code du travail, après les mots :
cette rémunération
insérer les mots :
au sens de l'article L. 140-2,
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement a pour objet d'ajouter une précision à l'article 1er.
L'article L. 140-2 du code du travail indique en effet, dans son deuxième alinéa, que, « par rémunération [...], il faut entendre le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier ».
Afin d'éviter toute contestation ou toute tentative éventuelle de contourner la loi, nous proposons que cette précision soit apportée par la mention de l'article L. 140-2. En effet, depuis un certain nombre d'années, outre les exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires et sur de nombreux dispositifs aidés, on voit se multiplier les modes de rémunération hors salaire de base.
L'exemple le plus emblématique en est sans doute l'intéressement, mais les avantages en nature sont également de plus en plus répandus : il peut s'agir de bons d'achat, de voitures de fonction pour les cadres, ou encore de primes calculées au prorata du temps de présence, ce qui peut poser problème, particulièrement dans le cas qui nous occupe.
Ces modes de rémunération présentent pour les salariés de multiples inconvénients : ils sont aléatoires, car ils sont soumis aux résultats connus de l'entreprise ; ils sont aussi à la discrétion de l'employeur, puisqu'ils échappent aux grilles et classifications inscrites dans les conventions collectives.
Tout cela ne contribue pas à favoriser le dialogue social dans l'entreprise et conduit, à l'inverse, à créer un climat de rivalité entre salariés.
Pour les femmes absentes de l'entreprise pendant plusieurs mois, le risque existe qu'un certain nombre de ces avantages soient au passage « oubliés », en quelque sorte, lorsqu'il s'agira de calculer leur augmentation.
Afin d'éviter que les femmes ne soient pénalisées une fois de plus, nous proposons donc d'inscrire dans la loi cette précision relative à la nature des rémunérations dont il s'agit.
Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-26 du code du travail, remplacer les mots :
pendant la durée de ces congés par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle ou, à défaut, de la moyenne des augmentations individuelles dans l'entreprise
par les mots :
par le salarié au cours des trois années précédant lesdits congés
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'article 1er a pour objet d'accorder au salarié de retour de congé de maternité ou d'adoption le bénéfice à la fois des augmentations générales et de la moyenne des augmentations individuelles reçues par les collègues.
La seconde partie de cette disposition soulève de nombreuses difficultés.
La première difficulté concerne le respect de la confidentialité des rémunérations individuelles accordées aux salariés, surtout dans les petites entreprises.
La deuxième difficulté porte sur l'impossibilité, réelle pour les petites et moyennes entreprises, d'établir une moyenne significative lorsque la catégorie concernée est très limitée.
En outre, étant fondé sur les augmentations individuelles de la catégorie professionnelle concernée, ce dispositif risque de provoquer l'incompréhension ou un sentiment d'injustice de la part des autres salariés de la même catégorie, qui ne comprendraient pas que leur présence dans l'entreprise ne soit pas plus valorisée.
Par ailleurs, le caractère contre-productif de cette mesure a été relevé par de nombreuses entreprises, qui soulignent déjà qu'elle ne les incitera pas à accorder d'augmentations salariales individuelles dès lors que les salariés qui n'ont pas travaillé dans l'entreprise en bénéficieront aussi.
Enfin, le dispositif semble peu équitable, puisque les salariés qui bénéficient habituellement des plus fortes augmentations salariales pour leurs performances et qui reviennent de leur congé risquent d'être pénalisés par l'application de la moyenne des augmentations individuelles, donc par un nivellement par le bas.
L'amendement que je propose vise donc à reprendre le principe des augmentations générales. Toutefois, en ce qui concerne la moyenne des augmentations individuelles, je pense qu'il vaut mieux s'en tenir aux augmentations reçues les trois années précédentes par le salarié lui-même.
Mme la présidente. L'amendement n° 58, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 122-26 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :
Ces augmentations doivent tenir compte du salaire de base, des primes, des avantages en nature et de la distribution d'actions.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. L'article 1er concerne la suppression de l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes.
Selon les différentes études, le salaire net moyen des femmes est inférieur de 25 % à celui des hommes, toutes catégories confondues. Cet écart est plus important encore chez les cadres. Pourtant, voilà maintenant plus de trente ans, depuis 1972 pour être exact, que le principe : « à travail égal, salaire égal » est inscrit dans le code du travail. Malgré tout, à compétence, formation, âge et ancienneté équivalents, l'écart continue de se situer entre 5 et à 7 %, si l'on en croit la plupart des évaluations.
Cet écart est encore plus creusé par les discriminations dans la poursuite des carrières, l'accès au travail, la qualité des emplois proposés et le temps partiel imposé, essentiellement féminin, question que l'on élude sans cesse mais sur laquelle - n'ayez crainte ! - nous reviendrons plus tard.
Force est donc de constater l'ancrage puissant dans les mentalités des inégalités et des discriminations dont les femmes sont encore aujourd'hui victimes. Que ce soit la loi Roudy de 1983, qui a obligé les entreprises de plus de cinquante salariés à publier chaque année une comparaison entre la situation salariale des femmes et celle des hommes, ou la loi Génisson de 2001, qui a rendu obligatoires les négociations annuelles dans l'entreprise sur l'égalité professionnelle, ou encore la directive européenne du 23 septembre 2002, qui pose le principe de l'égalité de traitement, aucun des différents dispositifs législatifs n'a su répondre au problème des inégalités de salaire.
L'idée que le salaire des femmes n'est qu'un salaire d'appoint a donc malheureusement de beaux jours devant elle. Malgré les efforts du législateur, les conceptions rétrogrades du rôle de la femme dans la société font encore office de loi chez de trop nombreux employeurs. Il serait donc temps de remettre en question les différents textes qui visent à lutter contre ce fléau et d'adopter de nouveaux dispositifs plus contraignants, plus efficaces.
Malheureusement, comme nous le soulignions tout à l'heure, madame la ministre, le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui ne va pas jusque-là. En effet, globalement, il ne fait que reprendre les textes antérieurs et ne permet aucune avancée supplémentaire.
On note toutefois un progrès sur la question des congés de maternité : l'article 1er, qui impose de remettre à niveau les rémunérations des femmes après un congé de maternité, est une bonne chose, à condition évidemment que le mot « rémunération » soit pris au sens large.
La maternité ne saurait être un « handicap ». Nous proposons donc, par l'amendement n° 58, que soient incluses toutes les dimensions de la rémunération à prendre en compte pour calculer l'avancement après un congé de maternité, à savoir non seulement le salaire de base, mais également toute prime qui aurait pu être versée par l'entreprise dans l'intervalle, ainsi que les éventuels dispositifs d'intéressement tels que les avantages en nature ou les distributions d'actions.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
COMMUNICATION relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
5
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour un rappel au règlement.
M. Roland Muzeau. Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l'article 36 de notre règlement.
Nous venons d'apprendre, par une déclaration du président du groupe UMP de l'Assemblée nationale, M. Bernard Accoyer, que, une nouvelle fois, le Premier ministre donnait satisfaction à l'aile la plus libérale de sa majorité en annonçant une réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF, d'ici à la fin de l'année. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Laurent Béteille. Enfin !
M. Alain Gournac. Bravo !
M. Guy Fischer. C'est scandaleux !
M. Roland Muzeau. Je ne nourrissais aucun doute sur la nature de vos réactions, chers collègues de la majorité !
Hier encore, Dominique de Villepin refusait d'envisager toute modification de cet impôt dans le prochain projet de loi de finances.
Décidément, il ne se passe pas un jour sans que la droite annonce un coup de force contre la justice sociale !
M. Laurent Béteille. Ce n'est pas vrai !
M. Roland Muzeau. Que ceux qui paient l'ISF lèvent la main !
M. Alain Gournac. C'est le président qui dirige les débats !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Muzeau.
M. Roland Muzeau. On n'arrête pas de m'interrompre !
Après les assauts contre le droit du travail à l'occasion du plan de déstructuration sociale de M. Borloo, après les privations réalisées, GDF, ou annoncées, EDF et les autoroutes, le gouvernement de MM. de Villepin, Sarkozy et Breton vole au secours des plus fortunés.
Alors que les salaires sont au plus bas, que les allocations chômage sont bloquées, que l'écart entre les riches et les pauvres ne cesse d'augmenter, le Premier ministre, emboîtant le pas à son fortuné ministre de l'économie, annonce une réduction de la portée de l'ISF.
Cette nouvelle annonce conservatrice survient après une campagne bien orchestrée tentant, à partir d'un ou deux exemples totalement atypiques, de faire passer les plus riches - moins de 300 000 personnes - pour des persécutés.
Nous protestons devant ce nouveau coup bas contre le peuple, qui tient de la provocation ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
6
égalité salariale entre les femmes et les hommes
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Article 1er (suite)
M. le président. Nous poursuivons la discussion de l'article 1er. Je vous rappelle que tous les amendements déposés sur cet article, à savoir les amendements nos 57,22 ,1 et 58, ont été présentés.
Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur de la commission des affaires sociales. L'amendement n° 57 semble contrarier notre volonté de prendre en compte la négociation collective chaque fois que c'est possible plutôt que d'agir autoritairement par la loi sans tenir compte des spécificités des branches professionnelles.
De plus, certaines entreprises ont déjà signé des accords spécifiques. Dans ces conditions, pourquoi supplanter les accords ainsi conclus par la loi ?
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 57.
L'amendement n° 22 vise à préciser la rémunération qui fait l'objet d'une augmentation salariale, prise au sens de l'article L. 140-2 du code du travail.
Cet article définit la rémunération comme le salaire, mais également comme tous les autres avantages et accessoires qui peuvent, je le rappelle, être en espèces ou en nature.
Comment accorder des augmentations sur la base d'accessoires du salaire qui sont en nature ? Nous souhaiterions connaître l'avis du Gouvernement sur ce point.
L'amendement n° 58, comme l'amendement n°22, vise à tenir compte, pour les augmentations salariales, des accessoires du salaire, y compris des avantages en nature, mais la rédaction proposée ici nous paraît plus complexe. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En ce qui concerne l'amendement n° 57, le Gouvernement souhaite donner d'abord sa chance au dialogue social avant de prendre des mesures unilatérales qui s'imposeraient à l'entreprise. Il émet donc un avis défavorable.
En revanche, sur l'amendement n° 22, de précision et de cohérence, le Gouvernement émet un avis favorable.
Le Gouvernement demande à la commission de retirer son amendement n° 1. En effet, la mesure proposée serait en réalité défavorable - bien que ce ne soit certainement pas l'intention- aux nouveaux embauchés.
Quant à l'amendement n° 58, il n'aurait plus de sens si l'amendement n° 22 était adopté. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le ministre, il nous a semblé intéressant de prévoir une base plus favorable pour la majoration prévue.
La proposition de Mme Sittler ayant reçu un avis favorable de la commission, nous ne sommes pas habilités à retirer l'amendement en séance. De surcroît, nous souhaitons que, par le jeu de la navette parlementaire, le Parlement puisse aller dans le sens que nous souhaitons, en offrant une plus grande garantie pour les femmes, tout en levant la crainte que vous venez de formuler.
Je demande donc à mes collègues d'adopter cet amendement n° 1, en attendant qu'une solution qui donne à tous satisfaction soit trouvée au cours de la navette.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Je comprends bien la préoccupation de M. le président de la commission des affaires sociales. Le Gouvernement s'engage bien sûr à réexaminer ce point, mais, dans l'immédiat, compte tenu des explications que je viens de donner, il ne souhaite pas l'adoption de l'amendement n° 1.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
Au premier alinéa de l'article L. 122-45 du même code, après les mots : « notamment en matière de rémunération, », sont insérés les mots : « au sens de l'article L. 140-2, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions », et après les mots : « de sa situation de famille », sont insérés les mots : « ou de son état de grossesse ».
M. le président. L'amendement n° 88 rectifié ter, présenté par M. Legendre, Mme Rozier, M. Gournac et Mme Henneron, est ainsi libellé :
Dans cet article, après les mots :
mesures d'intéressement
insérer les mots :
, de participation, de plan d'épargne salariale
La parole est à Mme Janine Rozier.
Mme Janine Rozier. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission demande à Mme Rozier de bien vouloir retirer cet amendement.
En effet, la notion de participation, au sens large, inclut les mesures en matière d'intéressement et de participation des salariés aux résultats de l'entreprise, ainsi que les plans d'épargne.
Outre le fait que l'amendement est redondant, l'intéressement étant déjà cité dans l'article 2, la participation elle-même n'est pas une notion juridique reconnue par le code du travail. Celui-ci ne fait référence, en effet, qu'au concept, étroit, de participation des salariés aux résultats de l'entreprise. Cette notion étant fondée sur l'ancienneté dans l'entreprise, il serait difficile d'envisager une possibilité de discrimination fondée sur le sexe.
Mme Janine Rozier. Je retire l'amendement, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° 88 rectifié ter est retiré.
L'amendement n° 2, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A la fin de cet article, remplacer les mots :
son état de grossesse
par les mots :
sa grossesse justifiée par un certificat médical
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à éviter à l'employeur des poursuites pour discrimination en raison de l'état de grossesse, s'il ignorait l'état de la salariée lorsqu'il a pris une décision relative à sa carrière.
L'adoption de cet amendement n'enlèvera rien à l'interdiction de discriminer une salariée enceinte, à partir du moment où l'employeur connaît la situation de cette salariée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Madame le rapporteur, je suis au regret de devoir émettre un avis défavorable sur cet amendement, et ce pour une raison très simple.
En effet, l'article 2 impose déjà à la salariée de justifier de son état de grossesse. Exiger en outre la présentation d'un certificat médical nous paraît excessif, dans la mesure où la salariée peut informer son employeur de son état de grossesse par tout moyen. Il faut, à notre sens, laisser un peu de souplesse au dispositif.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article additionnel après l'article 2
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du paragraphe II de l'article L. 135-7 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La notice d'information contient également des éléments d'information sur les dispositifs juridiques contre les discriminations en milieu professionnel énoncés à l'article L. 122-45 et contre le harcèlement énoncé à l'article L. 122-46, sur le principe de l'égalité de traitement et sur l'existence de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Nous proposons de rendre l'article L. 135-7 du code du travail plus opératoire. « Nul n'est censé ignorer la loi », mais il arrive malheureusement trop souvent que les employeurs eux-mêmes l'ignorent ou l'oublient, et que les salariés ne soient pas informés des dispositifs protecteurs qu'elle a prévus.
L'article L. 135-7 du code du travail prévoit qu'une notice d'information doit être fournie aux salariés lors de leur embauche. Il n'en est malheureusement rien dans nombre de petites entreprises, où les salariés ne savent pas de quelle convention collective ils relèvent, et où l'adresse de l'inspection du travail n'est même pas connue.
Nous proposons donc d'introduire dans le projet de loi un amendement sur le contenu de la notice d'information. Celle-ci devrait comporter des éléments sur les discriminations en milieu professionnel et sur le harcèlement, ainsi que sur la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.
Le fait est avéré, les femmes sont davantage victimes de comportements discriminatoires et de faits de harcèlement que les hommes.
La discrimination à l'encontre des femmes est un phénomène courant.
Qu'il s'agisse, entre autres, de salaire, d'accès à la formation ou de promotion, la discrimination est à la source des inégalités. Pour que la loi s'applique, il faut que l'existence de ses dispositions soit connue et que son contenu soit accessible à tous. Si telle était la réalité, depuis que nous avons commencé à légiférer sur le harcèlement et la discrimination, le nombre de cas relevés aurait considérablement diminué.
Il n'en est malheureusement rien. Il nous faut donc améliorer la publicité que nous donnons aux dispositions que nous votons. C'est donc dans un but pédagogique que nous proposons d'inscrire dans la loi une telle amélioration de l'information des salariés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme Annie David. C'est dommage !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Elle estime en effet qu'il n'est pas opportun de surcharger le contenu de la notice d'information. En outre, l'information est doublement assurée, par affichage et dans le rapport de situation comparée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3
I. - Après l'article L. 132-12-1 du même code, il est inséré un article L. 132-12-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-12-2. - La négociation prévue au premier alinéa de l'article L. 132-12 vise également à définir et à programmer les mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes avant le 31 décembre 2010. A cette fin, un diagnostic des écarts éventuels de rémunération entre les femmes et les hommes est établi sur la base du rapport prévu au sixième alinéa de l'article L. 132-12.
« A défaut d'initiative de la partie patronale dans l'année suivant la promulgation de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, la négociation s'engage dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation représentative au sens de l'article L. 132-2.
« L'accord fait l'objet d'un dépôt auprès de l'autorité administrative compétente, selon les dispositions de l'article L. 132-10. En l'absence de dépôt d'un accord ou de transmission d'un procès-verbal de désaccord auprès de cette autorité, contenant les propositions des parties en leur dernier état, une commission mixte est réunie à l'initiative du ministre chargé du travail, en application du deuxième alinéa de l'article L. 133-1, afin que s'engage ou se poursuive la négociation prévue au premier alinéa du présent article.
« Une commission mixte est réunie dans les mêmes conditions si la négociation n'a pas été engagée sérieusement et loyalement. L'engagement sérieux et loyal des négociations implique notamment que la partie patronale ait communiqué aux organisations syndicales les informations nécessaires pour leur permettre de négocier en toute connaissance de cause et ait répondu de manière motivée aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
« Lors de l'examen annuel prévu au 8° de l'article L. 136-2, la commission nationale de la négociation collective établit le bilan de l'application de ces mesures. »
II. - Après le 9° de l'article L. 133-5 du même code, il est inséré un 9° bis ainsi rédigé :
« 9° bis La suppression des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes prévue à l'article L. 132-12-2 ; ».
III. - Les dispositions du 9° bis de l'article L. 133-5 du même code entreront en vigueur à compter d'un an après la promulgation de la présente loi.
M. le président. L'amendement n° 60, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 132-12 du code du travail sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les organisations visées au premier alinéa se réunissent pour négocier tous les deux ans sur les mesures tendant à assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et sur les mesures de rattrapage tendant à remédier aux inégalités constatées. La négociation porte notamment sur les points suivants :
« - les conditions d'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelle ;
« - les conditions de travail et d'emploi ;
« - Les salaires conformément à l'article L. 140-2 ;
« - la reconnaissance des qualifications professionnelles. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Rien de plus normal que de s'insurger contre l'injustice des écarts de salaires entre les hommes et les femmes. Cependant, se contenter de s'insurger contre ces écarts, c'est faire une grave erreur. Les inégalités salariales ne sont en effet qu'une des manifestations des inégalités professionnelles. Il faudrait donc s'attaquer aux inégalités liées au sexe dans leur ensemble, ce que le Gouvernement omet de faire dans ce projet de loi.
De plus, il est nécessaire d'accroître la force de la loi, par la menace de véritables sanctions en cas de non-respect de ses dispositions. Nous avons été nombreux à le dénoncer ce matin lors de la discussion générale, les lois déjà existantes ne sont pas appliquées, y compris, donc, la loi de 2001, qui prévoit pourtant des sanctions.
Signe de l'insuffisante application de ces lois, 72 % des entreprises n'ont encore jamais organisé de négociations spécifiques sur le thème de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. En 2004, les négociations spécifiques prévues par la loi ont eu lieu dans 19 % des entreprises. Aucune progression n'est constatée puisque ce taux est le même qu'en 2002. Il est en outre légèrement inférieur au taux de 23 % constaté en 2003. Pour les entreprises de plus de mille salariés, la proportion monte à 32 %.
Cependant, pour contrôler la bonne tenue des négociations, il faudrait, du même coup, poser la question des effectifs de l'inspection du travail et celle des orientations précises à donner aux inspecteurs en matière de discrimination.
Malheureusement, le texte prévoit déjà qu'il ne sera pas appliqué : il faudra recommencer à légiférer dans trois ans !
S'il n'y a pas de volonté politique pour faire appliquer la loi, notamment en donnant à l'inspection du travail les moyens nécessaires, les écarts de salaires constatés entre les femmes et les hommes subsisteront.
Toutefois, au-delà même des moyens à mettre en oeuvre pour assurer le bon déroulement des négociations sur l'égalité professionnelle et leur respect, il faut aussi revenir sur le contenu de ces négociations, souvent trop léger.
Tel est l'objectif de notre amendement, qui vise à améliorer les dispositifs de négociation sur l'égalité entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise, en y intégrant toutes les dimensions constitutives de l'égalité professionnelle, et non pas seulement l'égalité salariale. Ainsi, parmi les points sur lesquels portent ces négociations, nous proposons d'ajouter les questions des salaires et de la reconnaissance des qualifications professionnelles.
Je le disais ce matin : à travail égal, qualification égale, et, à qualification égale, salaire égal !
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement. Ses auteurs font comme si aucune négociation sur l'égalité professionnelle n'était prévue. Or c'est précisément l'objet de l'article du code du travail qui est complété par l'article 3 du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Dans le premier alinéa du I de cet article, remplacer respectivement les références :
L. 132-12-1 et L. 132-12-2
par les références :
L. 132-12-2 et L. 132-12-3
II. - En conséquence, au début du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-12-2 du code du travail, remplacer la référence :
L. 132-12-2
par la référence :
L. 132-12-3
III. - En conséquence, dans le texte proposé par le II de cet article pour le 9° bis de l'article L. 133-5 du code du travail, remplacer la référence :
L. 132-12-2
par la référence :
L. 132-12-3
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à corriger une erreur de référence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 50, présenté par Mme Procaccia et M. Cambon, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-12-2 du code du travail, après les mots :
écarts de rémunération
insérer les mots :
non justifiés
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement vise à éviter les risques de contentieux induits par l'individualisation des salaires, elle-même fondée sur la performance au travail du salarié.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement. Il s'agit d'éviter que l'employeur ne fasse l'objet de contentieux de la part d'une salariée qui, à l'appui de son recours en justice, arguerait d'une discrimination sexuelle pour expliquer un écart de salaires, alors que la décision de l'employeur aurait été fondée, non pas sur le sexe, mais sur la seule performance de la salariée.
Naturellement, s'il y a contestation, il reviendra à l'employeur de prouver, en apportant tous les éléments nécessaires, qu'il n'a pas souhaité discriminer une salariée pour des raisons liées au sexe.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Madame Procaccia, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
En effet, à cet article, on vise non pas la négociation d'entreprise, là où les cas concrets se présentent, mais la négociation au niveau des branches professionnelles. Or, à un tel niveau, seuls les minima salariaux sont fixés. Les niveaux de salaires dans les classifications n'étant pas individualisés, ces minima sont applicables à tous les salariés d'un même niveau de classification.
Par conséquent, à ce stade, il n'est pas possible de faire de distinctions pour savoir si un écart serait justifié ou non. Par hypothèse, tous les écarts sont injustifiés, s'agissant d'un même métier, qu'il soit accompli par un homme ou par une femme.
En revanche, madame Procaccia, si vous avez pris soin de déposer un amendement de même nature portant cette fois sur la négociation au niveau de l'entreprise elle-même, l'avis du Gouvernement sera différent : il serait tout à fait envisageable de viser une situation concrète de travail et de s'interroger pour savoir si un écart de rémunération est justifié ou non par la différence des tâches qui sont respectivement confiées au salarié et à la salariée.
M. le président. L'amendement n° 50 est-il maintenu, madame Procaccia ?
Mme Catherine Procaccia. Dans notre esprit, monsieur le ministre, notre proposition concernait bien les entreprises et non pas les branches. Compte tenu de l'avis parfaitement motivé que vous venez de formuler, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 50 est retiré.
L'amendement n° 61, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-12-2 du code du travail, remplacer les mots :
avant le 31 décembre 2010
par les mots :
avant le 31 décembre 2008
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Malgré quelques très timides avancées concernant les droits des femmes en congé maternité, le texte qui nous est soumis manque singulièrement d'ambition.
Comme je l'ai souligné précédemment, avec mon ami Roland Muzeau et d'autres de mes collègues siégeant sur différentes travées de cet hémicycle, il existe déjà dans notre pays tout un arsenal juridique destiné à proscrire les inégalités salariales entre les femmes et les hommes. Mais force est de constater que les choses avancent très lentement dans ce domaine, de même que dans celui des inégalités professionnelles et, plus généralement, des inégalités des conditions de travail, qui ne seront pas, je le regrette, abordées au cours de l'examen de ce projet de loi.
C'est donc la volonté politique qui fait défaut, car, à un moment donné, il faut agir et se donner des impératifs et des objectifs ambitieux !
Or le présent texte fixe à 2010 la date butoir pour clore les négociations dans les entreprises et le Gouvernement envisage d'emblée l'échec de cette démarche, en annonçant qu'au-delà il « pourra présenter un projet de loi instituant des sanctions financières ».
Aussi, l'objet de cet amendement est de ramener le délai pour supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes à trois ans, au lieu de cinq ans, pour qu'enfin l'égalité salariale ne soit plus une simple déclaration d'intention mais bien une ferme volonté d'aboutir ! Je vous rappelle simplement que la loi Roudy remonte à 1983. Par conséquent, même avec ce délai raccourci, il aura fallu vingt-cinq ans pour faire respecter les droits des femmes au travail.
Compte tenu de la législation existante, il est possible d'aller plus vite. C'est en tout cas ce que je souhaite, comme de nombreuses femmes victimes de ces inégalités. Je vous demande donc, chers collègues, de faire preuve d'audace et d'ambition en votant cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La date de 2010 n'a pas été choisie par hasard. Proposée par le Président de la République, elle a été inspirée par la stratégie européenne pour l'emploi, qui préconise la réduction des écarts de salaires entre les femmes et les hommes d'ici à cinq ans, c'est-à-dire d'ici à 2010.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 61.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement, qui espère que les négociations auront lieu le plus vite possible, souhaite également que le législateur laisse au dialogue social le temps nécessaire pour réussir.
J'observe que l'opposition actuelle était moins pressée en 1983, quand elle a fait adopter la loi Roudy, et en 2001, quand elle a fait adopter la loi Génisson. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.- Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Annie David. Il fallait faire des propositions, à ce moment-là !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Bien sûr, je souhaite vivement qu'il nous faille moins de cinq ans pour atteindre cet objectif.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Monsieur le ministre, nous avons attendu un quart de siècle, pour finir par constater ensemble, et de manière unanime, que les choses n'ont pas avancé. C'est au moins un point sur lequel nous pouvons tomber d'accord ! Nous n'allons donc pas attendre de nouveau un quart de siècle que votre ministère fasse évoluer la situation !
Vous nous proposez d'attendre encore cinq ans, avec la perspective d'un nouveau projet de loi qui viendrait, enfin, imposer de vrais changements.
Non ! Au bout d'un quart de siècle, on cesse de rédiger des rapports, et on impose des règles pour que les choses bougent enfin vraiment.
Mme Hélène Luc. D'autant que, dans cinq ans, ce gouvernement ne sera plus là !
M. Roland Muzeau. Cent jours !
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-12-2 du code du travail, remplacer les mots :
, selon les dispositions de
par les mots :
dans les conditions définies à
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-12-2 du code du travail, remplacer les mots :
une commission mixte est réunie à l'initiative du ministre chargé du travail, en application du deuxième alinéa de l'article L. 133-1
par les mots :
la commission mixte mentionnée à l'article L. 133-1 est réunie à l'initiative du ministre chargé du travail
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-12-2 du code du travail :
« La commission mixte est réunie dans les mêmes conditions si la partie patronale n'a pas communiqué aux organisations syndicales les informations nécessaires pour leur permettre de négocier en toute connaissance de cause et n'a pas répondu de manière motivée aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la mention relative à l' « engagement sérieux et loyal » exigé de l'employeur qui négocie un accord d'égalité salariale. En effet, une telle mention étant susceptible d'interprétations différentes, elle peut être source de contentieux et risque, par conséquent, de retarder la négociation.
L'amendement proposé maintient la nécessité pour l'employeur de communiquer aux syndicats les documents utiles à la négociation. Par cet acte, l'engagement sera nécessairement sérieux et loyal.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Toute négociation prévue par le code du travail doit être loyale et sérieuse. Il n'est donc pas nécessaire de faire figurer cette précision dans ce projet de loi.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 6.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par Mme Procaccia et M. Cambon, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le II de cet article pour insérer un alinéa après le 9° de l'article L. 133-5 du code du travail, après les mots :
écarts de rémunération
insérer les mots :
non justifiés
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement vise également les écarts de rémunération non justifiés. Toutefois, étant donné que nous sommes toujours dans le cadre d'un accord de branche et non pas d'entreprise, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 51 est retiré.
L'amendement n° 7, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
IV - Les dispositions du présent article ne s'appliqueront aux branches qui ont déjà conclu un accord relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes dans les trois années précédant la promulgation de la présente loi qu'à l'expiration dudit accord.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à libérer de l'obligation de conclure un nouvel accord les branches qui ont déjà signé un accord sur l'égalité salariale au cours des trois dernières années.
En effet, il n'est pas utile de leur imposer une négociation supplémentaire, notamment dans les branches où les entreprises ont négocié, après plusieurs années de discussion, un accord exemplaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement, qui remercie la commission de cet amendement, y est bien entendu favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 132-10 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces derniers sont rendus publics par tout moyen de communication, directement ou par le biais de conventions passées avec des organismes privés. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux entreprises qui souhaitent s'engager dans une démarche d'égalité professionnelle de prendre connaissance des pratiques déjà existantes en la matière et qui sont consignées dans des accords collectifs d'entreprise.
Ainsi, aux Etats-Unis, l'équivalent de l'inspection du travail publie les informations en sa possession, ce qui permet à tous de prendre connaissance du nom des entreprises dans lesquelles les conditions de travail sont réputées dangereuses.
Ne pourrait-on pas faire la même chose en France en matière de bonnes pratiques au regard de l'égalité professionnelle ? C'est d'ailleurs l'une des recommandations du rapport d'information de la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes présenté par Mme Gautier ce matin.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement comprend l'intention qui justifie le dépôt de cet amendement. Cependant, il doit également prendre en compte le fait que les accords collectifs du travail dans les entreprises sont aujourd'hui soumis, dans la majorité des cas, à une règle de confidentialité qui tient au souci non seulement des entreprises, mais aussi, souvent, des cosignataires représentants les salariés, de ne pas divulguer les termes d'un accord.
En revanche, il paraît tout à fait utile de relever l'exemplarité d'un certain nombre d'accords. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le ministère du travail s'engage à mettre en oeuvre, sur un site internet, une mesure d'information et de communication qui permettra au négociateur d'entreprise de s'inspirer des meilleurs accords en matière d'égalité salariale.
Par conséquent, le Gouvernement souhaite maintenir la règle de confidentialité, en permettant la divulgation des meilleurs accords, tout en les rendant anonymes.
Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement. A défaut, il émettrait un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Considérant que, sur le fond, l'amendement n° 8 de la commission est satisfait, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 8 est retiré.
Article 3 bis
L'article L. 132-27 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les entreprises de moins de vingt salariés, l'employeur est tenu de prendre en compte les objectifs en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l'entreprise et les mesures permettant de les atteindre. »
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 132-27 du code du travail, remplacer les mots :
vingt salariés
par les mots :
onze salariés non couverts par une convention ou un accord de branche étendu relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'article 3 bis impose aux entreprises de moins de vingt salariés une obligation de prise en compte des objectifs d'égalité salariale.
Or cette catégorie d'entreprises ne répond pas à une classification juridique reconnue. Il me semble préférable de la remplacer par la catégorie des entreprises de dix salariés au plus.
Toutefois, comme ces entreprises peuvent être assujetties à une obligation d'égalité salariale par le biais d'un accord de branche étendu, l'article 3 bis ne devrait viser, me semble-t-il, que celles qui ne sont pas couvertes par un tel accord.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 3 bis, modifié.
(L'article 3 bis est adopté.)
Article 4
I. - Après l'article L. 132-27-1 du même code, il est inséré un article L. 132-27-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-27-2. - Les négociations sur les salaires effectifs prévues au premier alinéa de l'article L. 132-27 visent également à définir et à programmer les mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes avant le 31 décembre 2010. A cette fin, un diagnostic des écarts éventuels de rémunération entre les femmes et les hommes est établi sur la base des éléments figurant dans le rapport prévu au premier alinéa de l'article L. 432-3-1.
« A défaut d'initiative de la partie patronale dans l'année suivant la promulgation de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, les négociations s'engagent dans les quinze jours suivant la demande d'une des organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise au sens des articles L. 132-2 et L. 132-19.
« Les accords collectifs d'entreprise sur les salaires effectifs ne peuvent être déposés auprès de l'autorité administrative compétente, dans les conditions prévues à l'article L. 132-10, qu'accompagnés d'un procès-verbal d'ouverture des négociations portant sur les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, consignant les propositions respectives des parties. Le procès-verbal atteste que l'employeur a engagé sérieusement et loyalement les négociations. L'engagement sérieux et loyal des négociations implique notamment que l'employeur ait convoqué à la négociation les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise et fixé le lieu et le calendrier des réunions. Il doit également leur avoir communiqué les informations nécessaires pour leur permettre de négocier en toute connaissance de cause et avoir répondu aux éventuelles propositions des organisations syndicales. »
II. - Une conférence nationale sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes établira, sur la base d'un rapport élaboré par le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, un bilan à mi-parcours de l'application des articles L. 132-12-2 et L. 132-27-2 du code du travail.
A cet effet, le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes procède à l'élaboration d'outils méthodologiques permettant de mesurer les écarts de rémunération et de les recenser, en tenant compte des différents parcours professionnels et secteurs d'activité. Un décret, pris après avis du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, fixe la liste de ces outils au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi.
Au vu du bilan effectué à cette occasion, le Gouvernement pourra présenter au Parlement, si nécessaire, un projet de loi instituant une contribution assise sur les salaires, et applicable aux entreprises ne satisfaisant pas à l'obligation d'engagement des négociations prévues à l'article L. 132-27-2 du code du travail.
Le Gouvernement présentera, six ans après la promulgation de la présente loi, un rapport d'évaluation au Parlement, après consultation du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
M. le président. L'amendement n° 52, présenté par Mme Procaccia et M. Cambon, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-27-2 du code du travail, après les mots :
écarts de rémunération
insérer les mots :
non justifiés
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Dans la même logique que précédemment - les écarts de rémunération peuvent être justifiés, quel que soit le sexe -, cet amendement a pour objet d'éviter des contentieux, dans le cadre, cette fois-ci, de l'entreprise. A ce titre, j'espère que cet amendement recevra un avis favorable de la part du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Favorable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 62, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
A la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 137-27-2 du code du travail, remplacer les mots :
avant le 31 décembre 2010
par les mots :
avant le 31 décembre 2008
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Il s'agit d'un amendement de cohérence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Par cohérence également, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 24 est présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 63 est présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-27-2 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise peuvent faire appel à un expert. La mission de l'expert consiste notamment à établir précisément la situation en matière d'écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et à en identifier les causes. Les frais d'expertise sont à la charge de l'employeur. Si l'employeur entend contester le coût ou le délai de l'expertise, cette contestation est portée devant le président du tribunal de grande instance qui statue en urgence. A l'issue de sa mission, l'expert présente ses conclusions aux organisations syndicales représentatives de l'entreprise et à l'employeur. Les négociations commencent à l'initiative de l'employeur dans le mois qui suit cette réunion.
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour défendre l'amendement n° 24.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement procède du même esprit que le précédent, puisqu'il vise en fait à améliorer l'information des organisations syndicales et de l'employeur.
Il ne suffit pas de constater, dans une entreprise, les écarts de salaire entre les femmes et les hommes. A cet égard, le rapport de situation comparée, avec ses indicateurs précis, tel qu'il a été mis en oeuvre aux termes des lois Roudy et Génisson, est précieux, mais demeure insuffisant.
Il importe d'identifier les causes de ces écarts, ce qui permettra de mettre le doigt sur ceux qui ne sont pas justifiés. Par exemple, pourquoi, dans un service donné, les femmes n'ont-elles pas accès à la formation autant que les hommes ? Pourquoi, sachant qu'elles ont des responsabilités familiales importantes, surtout si elles sont mères célibataires, prévoit-on systématiquement des horaires de formation hors du temps scolaire ? Et c'est à partir de telles discriminations, larvées, parfois même involontaires, que l'on peut affirmer ensuite que les femmes ne s'inscrivent pas en formation !
On pourra ensuite, avec bonne conscience, développer le discours selon lequel les femmes préfèrent se consacrer à leur vie familiale et se contentent d'un salaire d'appoint avec un travail à temps partiel.
Or ce discours est en contradiction flagrante avec le souhait de la plupart des femmes employées à temps partiel d'avoir un travail à temps complet et, surtout, le salaire correspondant.
On pourrait même imaginer que certaines souhaitent accéder à un autre poste que celui qu'elles occupent et à un travail plus intéressant.
Pour ne plus se dissimuler ces réalités et, parfois aussi, pour ne plus se mentir, il faut donc analyser les causes des inégalités non seulement en termes de salaires, mais aussi, en amont, en termes de formation professionnelle ou d'avancement au choix, notamment.
C'est pourquoi nous proposons que les organisations syndicales aient la faculté, et non l'obligation, je le précise, de faire appel à un expert pour réaliser cette analyse des causes, des inégalités persistantes dans l'entreprise. Ce rapport constituerait une base de négociation fiable, pour l'employeur de bonne volonté comme pour les salariés.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour présenter l'amendement n° 63.
Mme Hélène Luc. Cet amendement vise à enrichir la négociation et à permettre aux partenaires sociaux de fixer des objectifs en matière d'égalité professionnelle.
L'employeur doit analyser la situation des hommes et des femmes au sein de son entreprise et définir les actions à mener pour supprimer les inégalités.
Tel est l'objet du rapport annuel de situation comparée des conditions générales d'emploi et de formation des femmes et des hommes, obligatoire dans les entreprises de plus de cinquante salariés. Le contenu de ce rapport a été renforcé par la loi sur l'égalité professionnelle du 9 mai 2001. Malheureusement, la situation n'a pas beaucoup évolué depuis.
Ce document sert, d'une part, de fondement au dialogue social sur l'égalité professionnelle et donne, d'autre part, aux comités d'entreprise, puis aux salariés, une information plus précise et plus lisible.
Il comporte désormais des indicateurs pertinents reposant sur des éléments chiffrés, comme la rémunération moyenne mensuelle des femmes et des hommes par catégorie d'emploi occupé.
La qualité et la pertinence des négociations et des mesures, qui figurent dans les accords collectifs conclus, dépendent fortement du diagnostic initial, et donc de l'élaboration de ce rapport de situation comparée.
Or, actuellement, le recours à l'expertise sur ce point n'est pas prévu par notre législation, ce qui constitue à nos yeux une lacune. Cet amendement vise donc à pallier ce manque pour favoriser des négociations performantes, sérieuses et authentiques.
Il prévoit de permettre aux organisations syndicales d'avoir recours plus facilement à un expert. La mission de ce dernier serait centrée sur l'identification des causes mêmes des inégalités de rémunération au sein de l'entreprise, afin de simplifier les négociations ultérieures.
A l'Assemblée nationale, la ministre de la parité et de l'égalité professionnelle avait souligné que le texte initial comportait des dispositions suffisantes en ce sens. Nous ne sommes pas de cet avis.
Il faut souligner que, dans les situations particulièrement complexes, l'appui d'un expert serait une nécessité. Or rien ne prévoit sa présence aujourd'hui. Pourtant, les inégalités de salaires à position égale ne sont pas les seuls problèmes existant dans le milieu salarial.
En effet, d'autre écarts, plus complexes à déterminer et à expliquer, nécessiteraient d'être examinés par une personne experte en la matière.
Pour ce faire, nous vous proposons de considérer notre amendement, qui vise à instaurer la possibilité d'un recours à l'expertise dans les cas que nous venons d'évoquer, afin de favoriser des négociations performantes et de parvenir à l'égalité salariale des femmes et des hommes. Nous la réclamons depuis très longtemps, mais elle n'est pas encore réalité, faute d'une application de la loi !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Les amendements identiques nos 24 et 63 ne me paraissent pas utiles. En effet, le dispositif prévu à l'article 4 est suffisant pour atteindre l'objectif visé par les auteurs de l'amendement : permettre un diagnostic des écarts éventuels de salaires. La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Au moment où le gouvernement de Dominique de Villepin met tout en oeuvre pour relancer la croissance et l'emploi (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.),...
M. Robert Bret. On voit le résultat !
M. Alain Gournac. Du calme !
M. Philippe Bas, ministre délégué. ...je demande pitié pour les entreprises. Le temps n'est plus aux expertises et aux rapports dilatoires, le temps est à l'action et à la négociation,...
M. Alain Gournac. Bravo !
M. Philippe Bas, ministre délégué. ...sous l'impulsion du législateur (Protestations sur les mêmes travées), pour permettre de réduire effectivement et concrètement les écarts de salaires entre les hommes et les femmes de notre pays. (Bravo ! et applaudissements sur certaines travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. Alain Gournac. Oui à la simplification !
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. La loi Roudy a été votée en 1983, la loi Génisson en 2001. Combien de temps faudra-t-il attendre encore ? Les gouvernements changent, mais on nous renvoie toujours à plus tard. Il n'est plus possible de continuer ainsi.
Il y a maintenant un élément nouveau, je veux dire la désignation à la tête du MEDEF d'une femme, Mme Parisot. Or la même Mme Parisot est venue présenter devant la délégation aux droits des femmes le sondage de l'Institut français d'opinion publique, l'IFOP, sur l'égalité professionnelle. Elle nous l'a commenté en long, en large et en travers,...
M. Robert Bret. C'est son métier !
M. Alain Gournac. Ce n'est pas une élue !
Mme Hélène Luc. ...en nous disant qu'il était inadmissible de ne pas parvenir à l'égalité salariale entre les hommes et les femmes. Puisque Mme Parisot est présidente du MEDEF, nous allons voir de quoi elle est capable et si elle peut faire appliquer par le MEDEF les lois que nous votons. Comme dit le proverbe, c'est au pied du mur que l'on voit le maçon !
Cela étant, monsieur le ministre, ce que vous faites aujourd'hui n'est pas de bon augure,...
M. Alain Gournac. Dites-le au MEDEF ! Ici, nous sommes au Sénat !
Mme Hélène Luc. ...parce que le dispositif que nous proposons représente tout de même une garantie supplémentaire de parvenir au but. Or, en émettant un avis défavorable, vous donnez l'impression que vous ne voulez pas faire le maximum.
Nous ne voulons pas ce texte uniquement pour que le problème de l'égalité salariale entre les femmes et les hommes soit posé. Nous le voulons parce que nous souhaitons qu'il soit, lui, réellement appliqué.
M. Alain Gournac. Bravo au gouvernement qui l'a proposé !
Mme Hélène Luc. Et, si nous le voulons, nous le pouvons !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 et 63.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase et la troisième phrase du troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-27-2 du code du travail, supprimer les mots :
engagé sérieusement et loyalement les négociations. L'engagement sérieux et loyal des négociations implique notamment que l'employeur ait
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Comme le précédent amendement à l'article 3 et pour les mêmes motifs, je vous propose de supprimer la mention relative à l'engagement sérieux et loyal exigé de l'employeur qui négocie un accord d'égalité salariale.
M. Robert Bret. Pourtant, cela va toujours mieux en le disant !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 86 rectifié bis, présenté par M. Legendre, Mme Rozier, M. Gournac et Mme Henneron, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-27-2 du code du travail, après les mots :
en toute connaissance de cause et avoir répondu
insérer les mots :
de manière motivée
La parole est à Mme Janine Rozier.
Mme Janine Rozier. Nous souhaitons insérer cette mention, par souci de parallélisme avec ce qu'a ajouté l'Assemblée nationale à l'article L. 132-12-2 du code du travail.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il est effectivement logique de coordonner les articles 3 et 4. La commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cet amendement est satisfait par l'amendement n° 11 de la commission, qui a été adopté tout à l'heure, et qui insère déjà la mention « de manière motivée ». C'est la raison pour laquelle, madame Rozier, je vous demande de bien vouloir le retirer.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je ne pense pas que l'amendement n° 11 apporte cette précision, monsieur le ministre. La commission confirme donc son avis favorable.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Dans ce cas, le Gouvernement y est également favorable. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Madame Rozier, vous avez plus de chance que M. Muzeau, cet après-midi ! (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 86 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
I bis - Les dispositions du I ne s'appliqueront aux entreprises qui ont déjà conclu un accord relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes dans l'année précédant la promulgation de la présente loi qu'à l'expiration dudit accord.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à libérer les entreprises qui ont déjà signé un accord sur l'égalité salariale de l'obligation de conclure un nouvel accord.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 12, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Remplacer les deux premiers alinéas du II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes établit, à partir d'outils méthodologiques dont la liste est fixée par décret, une évaluation à mi-parcours de l'application des articles L. 132-12-3 et L. 132-27-2 du code du travail. Ce rapport d'évaluation est remis au Parlement.
II - En conséquence, supprimer le dernier alinéa du II de cet article.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de simplification rédactionnelle.
M. le président. L'amendement n° 90, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Remplacer les deux premiers alinéas du II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Une Conférence nationale sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes établira un bilan à mi-parcours de l'application des articles L. 132.12-3 et L. 132.27-2 du code du travail, sur la base d'un rapport élaboré par le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes à partir d'outils méthodologiques dont la liste est fixée par décret.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement souhaite s'appuyer sur la Conférence nationale sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes réunissant les partenaires sociaux et l'Etat pour aboutir à un bilan partagé, sur la base de l'évaluation qui sera réalisée par le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par Mmes Demontes, Printz, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le dernier alinéa du II de cet article :
Le Gouvernement présentera, à compter d'un an après la publication de la présente loi, un rapport biannuel d'évaluation au Parlement, après consultation du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
La parole est à Mme Christiane Demontes.
Mme Christiane Demontes. Par cet amendement, nous entendons renforcer le contrôle et la veille parlementaires sur l'application de ce dispositif législatif.
En permettant au Parlement de recevoir un rapport annuel sur l'actualité de l'égalité professionnelle, nous souhaitons renforcer - c'est aussi l'ambition du Gouvernement - la collaboration entre le Gouvernement et le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Celui-ci, créé par la loi Roudy, suit régulièrement l'application du dispositif relatif à l'égalité professionnelle, peut faire des propositions et se prononcer sur la législation concernant le travail des femmes ou pouvant entraîner des conséquences en termes d'égalité salariale.
Ainsi, nous pourrions améliorer l'efficacité du travail effectué par le service des droits des femmes qui, au niveau national, constitue la structure administrative permanente.
Force de proposition et d'impulsion capable de mobiliser le réseau de ses antennes territoriales - les déléguées régionales et les déléguées départementales -, ce service travaille de manière privilégiée avec l'administration du travail tant à l'échelon central qu'aux échelons déconcentrés, à savoir les directions régionales et les directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.
Enfin, nous souhaitons permettre ainsi au Parlement de prendre toutes les initiatives qu'il jugerait nécessaires à l'instauration d'une réelle égalité salariale.
M. le président. L'amendement n° 65, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du II de cet article, remplacer les mots :
six ans
par les mots :
quatre ans
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Il s'agit en fait d'un amendement de cohérence avec les deux précédents qui tendaient à réduire de deux ans le délai obligatoire pour l'ouverture des négociations.
Notre souci est, cette fois encore, d'accélérer la mise en oeuvre de ce texte. Toutefois, les deux précédents amendements n'ayant pas été adoptés, celui-ci n'a plus de sens, puisque l'établissement d'un bilan ne peut intervenir avant la date butoir de mise en place des éléments à évaluer.
Je retire donc cet amendement, mais je le fais avec beaucoup de regret, monsieur le président, car je ne vois rien ici qui puisse favoriser une mise en oeuvre rapide de ce texte.
M. le président. L'amendement n° 65 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 90 et 41 ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission n'est pas favorable à l'amendement n° 90, car elle a elle-même déposé un amendement de simplification de cet article, particulièrement complexe sur le plan de la procédure.
En outre, le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle intervient déjà pour dresser le bilan d'application de l'article 4, et, de surcroît, un rapport est prévu.
Enfin, cette conférence nationale n'est pas une structure juridique ; c'est une sorte de colloque que le Gouvernement pourra réunir pour faire le point. Or, au moment où chacun s'accorde à dire qu'il faut alléger le code du travail, ajouter des dispositions dont en vérité le Gouvernement n'a pas besoin pour agir ne me paraît pas utile.
C'est la raison pour laquelle la commission préfère s'en tenir à l'amendement n° 12.
Pour ce qui est de l'amendement n° 41, le souci d'évaluation exprimé par ses auteurs est satisfait, d'une part, par l'obligation faite au Conseil supérieur de dresser un rapport d'évaluation, et, d'autre part, par l'amendement n° 12 de la commission, qui prévoit que ce rapport sera remis au Parlement.
La commission est donc également défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 12 et 41 ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Pourquoi le Gouvernement est-il attaché à l'existence de la Conférence nationale sur les salaires ? La raison en est simple.
Au bout de deux années et demie, si la négociation n'a pas été engagée dans les branches ou les entreprises, cette conférence sera l'occasion de prendre des initiatives plus contraignantes afin d'accélérer la mise en oeuvre de l'égalité professionnelle. Cette grande conférence réunissant au plus haut niveau les représentants de l'Etat et les partenaires sociaux sera ainsi chargée de tout mettre à plat.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 12, présenté par la commission et tendant à supprimer cette conférence nationale sur les salaires.
S'agissant de l'amendement n° 41, le Gouvernement y est également défavorable, car l'exigence de présenter un rapport annuel lui paraît excessive. Il convient, avant tout, de laisser à la négociation le temps de produire ses effets.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 90 et 41 n'ont plus d'objet.
Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 25, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-27-2 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Une contribution assise sur les salaires est instituée et appliquée aux entreprises qui ne satisfont pas à l'obligation de négociation prévue au présent article, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. L'article 4 instaure une obligation de négociation en vue de diminuer les écarts de rémunération constatés entre les femmes et les hommes. Il convient de noter que, l'objectif ne devant pas être atteint avant le 31 décembre 2010, cela laissera aux employeurs au moins cinq ans pour y parvenir.
Or quelle est la sanction prévue pour l'employeur qui n'aura rien fait ? Il n'y en a pas ! La dernière partie de l'article 4 prévoit qu'un rapport établi dans trois ans pourrait conduire un futur gouvernement à présenter, si nécessaire, et sans préciser de date, un projet de loi instaurant une contribution exceptionnelle pour les cas où les négociations n'auraient pas été engagées.
Nous sommes ici face à une quadruple proposition conditionnelle : il faut, premièrement, que ce rapport soit établi ; deuxièmement, que le futur gouvernement juge nécessaire de présenter un projet ; troisièmement, que ce dernier prévoie une sanction - car le gouvernement en question pourrait après tout se contenter de proposer un report d'échéance ; et, enfin, que ce texte soit voté et les décrets d'application, publiés.
Combien de décennies faudra-t-il en fait pour que des mesures efficaces voient le jour ?
Nous proposons, pour notre part, des dispositions plus énergiques et plus lisibles. Depuis vingt ans, depuis que des efforts sérieux ont été entrepris grâce à la loi Roudy, nous constatons que les écarts persistent.
Sans doute observe-t-on une diminution de ces écarts, mais nous sommes encore très loin de salaires qui reflètent fidèlement le rôle des femmes dans le développement de notre économie et la place qui doit leur revenir.
Des incitations plus fermes sont donc nécessaires. C'est pourquoi nous proposons que les employeurs qui n'auront pas pris la peine, dans le délai d'un an, d'engager des négociations soient passibles d'une sanction financière.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 45 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 132-27-2 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Une contribution assise sur les salaires est applicable aux entreprises ne satisfaisant pas à l'engagement de négociations sérieuses et loyales prévues au présent article ».
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement vise à prévoir dans la loi, sans plus tarder, une contribution financière en cas de manquement des entreprises à l'égalité salariale.
Il semble, en effet, curieux, comme je l'ai dit ce matin, d'anticiper, avant l'adoption de ce projet de loi, l'échec de l'appel à négociation qui en constitue la pierre angulaire.
Si nous comprenons la volonté du Gouvernement de privilégier le dialogue social et la concertation, nous nous demandons pourquoi, alors que les précédentes lois adoptées depuis trente ans n'ont pas permis de réduire les inégalités salariales, il se priverait des moyens permettant de s'assurer effectivement de la réduction de ces inégalités !
Faut-il attendre encore cinq ans avant de prévoir des mesures coercitives à l'égard des entreprises qui auraient manqué à leur obligation de négociation ?
M. Roland Muzeau. Et voilà !
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous savons tous que la bonne volonté ne suffit pas pour faire évoluer les mentalités et les pratiques. Prenons-en donc acte une fois pour toutes et donnons-nous réellement les moyens de parvenir à l'objectif fixé par M. le Président de la République.
M. le président. L'amendement n° 64, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le troisième alinéa du II de cet article :
Au regard du bilan effectué à cette occasion, une contribution assise sur les salaires sera appliquée aux entreprises ne satisfaisant pas à l'obligation d'engagement des négociations prévues à l'article L. 132-27-2 du code du travail. Les modalités en seront fixées par décret.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement est quasi identique aux deux précédents.
Il vise à introduire dans le texte que nous examinons les sanctions applicables aux entreprises qui ne satisferont pas à l'obligation d'engagement des négociations prévue à l'article L .132-27-2 du code du travail, sanctions que vous prévoyez, pour votre part, monsieur le ministre, d'intégrer dans un autre texte, bien incertain et aléatoire.
Compte tenu de la persistance des inégalités salariales, et malgré les dispositions législatives existantes, le Gouvernement ne pourra plus se permettre de se montrer timoré, comme il paraît l'être à travers ce projet de loi, au terme d'un délai de cinq ans.
Vous avez repoussé nos amendements précédents, monsieur le ministre, mais, si celui-ci est adopté, au cas où les entreprises persisteraient à ne pas vouloir respecter la loi, elles pourraient éventuellement, si le gouvernement en place le souhaite, être pénalisées.
En réalité, vous acceptez d'emblée que la législation puisse être bafouée. En effet, ce texte prévoit qu'en cas de non-respect de la législation, le Parlement pourra éventuellement adopter, et encore sur proposition du Gouvernement, une autre loi destinée à pénaliser les auteurs de cette infraction.
Pourquoi ne pas vous inspirer d'autres articles du code du travail tels que l'article L. 152-1, par exemple, qui prévoit que, en cas de non-respect du code du travail, les auteurs des infractions seront pénalisés ?
MM. Robert Bret et Roland Muzeau. Eh oui !
Mme Annie David. Le ministre de l'époque a fait le choix de privilégier la voie de l'incitation, laissant le soin aux partenaires sociaux de négocier le processus qui permettra d'éliminer les disparités salariales. Soit !
Mais l'heure est aussi à l'action sur le terrain social et non plus aux simples déclarations de principe. Sinon, quelle sera la différence entre votre texte et les précédents, monsieur le ministre, alors que le vôtre est censé combler des carences persistantes ?
C'est la raison pour laquelle nous proposons, à travers cet amendement, d'instaurer, dès le vote de ce projet de loi, sans attendre l'éventuelle discussion d'un futur et hypothétique texte, les mesures contraignantes qui nous font cruellement défaut.
C'est donc bien dans un souci d'efficacité que je vous demande à mon tour de voter cet amendement.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par Mmes Demontes, Printz, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa du II de cet article, remplacer les mots :
pourra présenter au Parlement, si nécessaire,
par les mots :
présentera au Parlement dans un délai d'un an
La parole est à Mme Christiane Demontes.
Mme Christiane Demontes. Si l'engagement en faveur de l'égalité salariale nécessite, certes, la mobilisation des moyens tant en matériels qu'en personnels, il repose, avant tout, sur un arsenal législatif adéquat et contraignant.
Le bilan des lois Roudy du 13 juillet 1983 et Génisson du 9 mai 2001 a mis en exergue les limites d'une logique reposant exclusivement sur l'incitation.
Actuellement, nous savons que près de 60 % des entreprises ne disposent pas de rapport de situation comparée entre les deux sexes, que, dans la même proportion, elles n'ont pas prévu d'engager des négociations sur l'égalité professionnelle en 2005 ou dans les prochaines années et, enfin, que 52 % d'entre elles ne prennent pas en compte la dimension de l'égalité professionnelle dans les négociations.
Force est de constater que le patronat ne s'est guère impliqué dans la mise en oeuvre des politiques d'égalité professionnelle.
Mme Hélène Luc. C'est le moins que l'on puisse dire !
Mme Christiane Demontes. En effet !
Ces politiques sont trop souvent perçues, surtout dans les petites et moyennes entreprises, comme relevant plus de logiques féministes que comme des facteurs de modernisation de l'entreprise ou d'amélioration de la gestion des ressources humaines.
Ce constat est préoccupant en raison, notamment, du fait que « la situation comparée » constitue la condition première de toute négociation sur l'égalité salariale.
Il est donc important que le Gouvernement légifère dans un délai relativement court, en laissant toute sa place à la négociation.
Nous souhaitons, pour notre part, mes chers collègues, que, à la suite du bilan effectué à mi-parcours sur l'état de la négociation par le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, le Gouvernement présente au Parlement, dans le délai d'un an, un projet de loi instituant une contribution assise sur les salaires et applicable aux entreprises qui n'auraient pas engagé de négociations durant la première moitié des cinq ans dévolus à l'application de la loi.
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par Mmes Demontes, Printz, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa du II de cet article, remplacer les mots :
les salaires
par les mots :
le bénéfice net consolidé
La parole est à Mme Christiane Demontes.
Mme Christiane Demontes. Comme nous l'avons dit précédemment, nous estimons que les entreprises qui refuseraient d'ouvrir des négociations dans le dessein de supprimer les écarts de rémunération avant la fin de 2010 devront se voir infliger une pénalisation.
A cette fin, nous proposons ici d'introduire une nouveauté, à savoir que la sanction financière soit assise non plus sur la masse salariale ou les salaires mais sur le bénéfice net consolidé des entreprises.
Nous entendons ainsi établir une distinction entre les entreprises dont la masse salariale est importante ou qui pratiquent une politique salariale correcte, et les autres.
La situation de notre pays ne cesse de s'aggraver depuis trois ans. M. Borloo a beau décréter un plan d'urgence tous les six mois, rien n'y fait ! Les choix politiques du Gouvernement demeurent nocifs pour l'emploi, nous le constatons tous les jours. Nous connaissons les chiffres, ils sont éloquents.
La mesure que nous proposons à travers cet amendement est destinée à promouvoir une logique de soutien à l'emploi. Sans pénaliser les entreprises de main-d'oeuvre ou celles dont la masse salariale est importante, nous voulons faire passer un message à toutes les entreprises qui, alors qu'elles sont en situation bénéficiaire, maintiennent délibérément des salaires bas de manière à profiter des allégements afférents et pratiquent une politique discriminatoire à l'encontre des femmes.
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa du II de cet article, après les mots :
les salaires
insérer les mots :
, ou le cas échéant le bénéfice net consolidé,
La parole est à M. le ministre délégué.
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les cinq amendements restants ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Pour l'essentiel, l'amendement n° 25 est satisfait par la rédaction du projet de loi, qui prévoit déjà des sanctions, à la condition, il est vrai, de la présentation d'un projet de loi, comme ultime recours après que toutes les voies de la négociation auront été épuisées ; c'est bien ainsi.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 25, ainsi qu'aux amendements nos 45 rectifié et 64, de même nature.
L'amendement n° 39 pose problème. En effet, le bilan n'intervient que deux ans et demi après la publication de la loi. Dans ces conditions, je vois mal comment le Gouvernement pourrait présenter un projet de loi un an et demi avant l'évaluation prévue.
La commission est donc également défavorable à l'amendement n° 39.
Enfin, s'agissant de l'amendement n° 40, la commission demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer, dans la mesure où il vise à asseoir la sanction financière éventuellement appliquée aux entreprises non pas sur les salaires mais sur le bénéfice net de l'entreprise.
Mme Christiane Demontes. Pourquoi ?
M. Jean-Pierre Godefroy. C'est incroyable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, jamais l'incitation du législateur à négocier pour établir la parité professionnelle entre les femmes et les hommes n'aura été aussi pressante...
Mme Hélène Luc. Si vous appelez cela pressant !
M. Robert Bret. On se hâte lentement !
M. Philippe Bas, ministre délégué. ... qu'avec le projet de loi qui vous est présenté.
Mais chaque chose en son temps !
Deux étapes sont prévues. Pendant deux années et demie, la négociation se développera.
M. Roland Muzeau. Cela fait vingt-cinq ans que cela dure !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Après deux années et demie, il y aura un bilan. S'il est négatif, le projet de loi qui vous est soumis prévoit que des sanctions seront prises, mais il est trop tôt pour prévoir ce cas de figure.
Ce qui est certain, c'est que la contrainte, y compris de calendrier, est très forte. Pour ces motifs, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 25, 45 rectifié, 64, 39 et 40.
M. Alain Gournac. Très bien ! Au moins, c'est clair !
M. Robert Bret. Le patronat va trembler !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Mon explication de vote vaudra pour l'ensemble des amendements.
Avec l'article 4 du projet de loi, vous introduisez, monsieur le ministre, un nouvel article dans le code du travail. Vous instaurez des obligations assez strictes concernant l'égalité salariale entre les hommes et femmes, et j'y souscris. Or, en même temps que de nouveaux droits sont accordés aux femmes, notamment dans l'entreprise, on ne prévoit qu'une éventualité de sanctions.
Il est très regrettable que ces sanctions ne figurent pas tout simplement dans l'article introduit, comme cela se pratique dans d'autres codes. Prenez le code de la route : il stipule clairement qu'un dépassement de la vitesse autorisée est puni d'une amende.
Je ne vois donc pas pourquoi il en va différemment ici, d'autant qu'il s'agit tout de même d'accorder des droits nouveaux aux femmes dans l'entreprise.
Vraiment, je ne comprends pas !
Chacun dans cet hémicycle affirme son attachement à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, mais je ne vois pas beaucoup d'actes forts allant dans le sens de cette égalité que nous souhaitons apparemment tous si vivement !
M. Robert Bret. Le texte n'est pas très crédible !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Les propos de M. le ministre ne m'ont guère convaincue : il faudra, en effet, se donner rendez-vous dans deux ans et demi. Je maintiens donc mon amendement.
Toutefois, pour accompagner le travail approfondi de la commission, notamment de Mme Sittler, je m'abstiendrai.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'amendement n° 40.
M. Jean-Pierre Godefroy. J'ai du mal à comprendre !
Tout à l'heure, monsieur le ministre, quand vous avez décidé de retirer l'amendement n° 91 rectifié, je me suis réjoui, pensant que le Gouvernement se ralliait à notre proposition. D'ailleurs, nous aurions pu tout aussi bien retirer l'amendement n° 40 au profit de celui du Gouvernement.
Ma joie a été de courte durée.
J'ai d'autant plus de mal à comprendre que, ce matin, en commission, on nous a dit que notre amendement était satisfait par celui du Gouvernement. Mais voilà que le Gouvernement, après s'être déclaré sensible à notre argumentation, et l'avoir écrit dans son objet, retire en séance son propre amendement et émet un avis défavorable sur le nôtre !
Monsieur le ministre, peut-être allez-vous me donner une explication, mais cela devient un peu difficile à suivre !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Monsieur le sénateur, c'est très simple !
J'ai dit tout à l'heure qu'il n'était pas temps de déterminer les conditions d'une éventuelle pénalité financière appliquée aux entreprises. C'est par souci de cohérence que j'ai retiré l'amendement n° 91 rectifié du Gouvernement.
M. Alain Gournac. C'est clair !
M. le président. L'amendement n° 66, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La première phrase du premier alinéa de l'article L. 132-27 du code du travail est complétée par les mots : « et tous les deux ans une négociation portant sur l'égalité professionnelle telle qu'elle est définie à l'article L. 132-12 du présent code. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Les auteurs du projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes entendent défendre l'égalité salariale, mais repoussent à cinq ans la mise en place définitive de cette égalité. Si l'on ajoute à cela que ces mesures sont purement incitatives et non pas coercitives - ce qui aurait le mérite de les rendre vraiment obligatoires -, fixer un tel délai n'est absolument pas crédible.
L'égalité salariale que vous prétendez mettre en place, monsieur le ministre, n'échappe donc pas aux règles qui ont présidé jusqu'ici à la politique sociale des différents gouvernements qui se sont succédé ces dernières années : à savoir, d'une part, multiplier les mesures d'affichage qui ne seront pas suivies d'effets, et, d'autre part, briser les droits des salariés en déréglementant, en flexibilisant et en introduisant toujours plus de précarité dans le monde du travail.
Quel est le sens de ce délai supplémentaire de cinq ans quand on sait que bon nombre d'entreprises ne sont pas encore en conformité avec la loi Génisson, ...
Mme Hélène Luc. Oui !
M. Guy Fischer. ... qui impose que soient tenues des négociations sur l'égalité professionnelle ? Des enquêtes menées auprès de directeurs des ressources humaines de PME, il ressort que 12 % d'entre eux seulement déclarent que leur entreprise a tenu des négociations spécifiques tous les ans depuis 2002. Le taux ne grimpe qu'à 22 % au sein des entreprises employant mille salariés et plus.
Il y a donc urgence à mettre en place l'égalité professionnelle dans le monde de l'entreprise. Cela fait longtemps que les femmes salariées attendent, et cinq ans d'écart salarial, ce n'est pas neutre !
Les études montrent que l'écart de salaire inexpliqué, c'est-à-dire celui qui ne peut être attribué au type de poste de travail, à la compétence ou à l'ancienneté, est de 5 % à 7 %. Sur un salaire de 1 000 euros, c'est-à-dire légèrement supérieur au SMIC, la différence atteint ainsi 50 euros, ce qui est énorme pour un tout petit salaire. Attendre cinq ans l'ouverture des négociations, c'est très long ! Et même l'ouverture, ce n'est pas suffisant !
Pour les femmes, quelle déception de penser que cela va durer encore ! Car, même avec ce que vous proposez, rien ne garantit que le Gouvernement présentera un projet de loi au Parlement, nous venons d'en avoir l'illustration.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est sûr !
M. Guy Fischer. Et, à supposer qu'un projet de loi soit déposé, il portera uniquement sur l'ouverture des négociations. Il suffirait donc aux entreprises de mauvaise volonté de traîner encore les pieds et de se contenter d'une ouverture formelle de négociations.
Il faudra donc encore attendre avant que des négociations soient loyalement engagées et, surtout, que soit supprimé cet écart de salaire dont on ne peut pas expliquer la raison d'être.
Par ailleurs, il faut ajouter que la grande absente de ces négociations est la question du temps partiel. N'oubliez pas que 82 % des postes à temps partiel sont occupés par des femmes, le plus souvent sans qu'elles aient eu le choix. Elles sont ainsi condamnées à la précarité et à la dépendance !
Vous le voyez, il existe une véritable urgence, et vous ne semblez pas la prendre en compte dans ce projet de loi. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement, qui vise à rendre obligatoires - c'est-à-dire assorties de sanctions en cas de non exécution - les négociations collectives relatives au temps partiel et à l'égalité professionnelle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Hélène Luc. Je ne vois pas comment la commission pourrait être contre !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Je suis désolée de vous décevoir, mais la rédaction de cet amendement ne permet pas d'atteindre le but de ses auteurs.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Je tiens à rappeler que les négociations sur les salaires comme sur les objectifs en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes auront lieu, grâce à ce projet de loi, tous les ans !
Cela n'est pas parce que la première échéance est fixée à deux années et demie et la deuxième à cinq ans qu'il n'est pas obligatoire de négocier annuellement. Par conséquent, l'exigence est déjà très forte ; il n'est pas utile de modifier la loi Génisson pour ramener de trois ans à deux ans la périodicité de la négociation spécifique portant sur l'égalité professionnelle.
Mme Hélène Luc. C'est renvoyer aux calendes grecques !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Excusez-nous de poser cette question, monsieur le ministre, mais, s'il n'y a aucune obligation pour les entreprises de négocier sur ce point précis lors des négociations salariales, en quoi la loi apporte-t-elle quelque chose de neuf par rapport à un dispositif existant dont on voit qu'il n'a pas permis d'avancer en matière d'égalité professionnelle ?
Nous posons cette question par simple curiosité. En effet, légiférer, c'est bien, mais à condition que la loi apporte quelque chose de nouveau, en l'occurrence une obligation à la charge des acteurs de la vie sociale.
Les négociations salariales auront lieu tous les ans, mais, en l'absence d'obligation, nous aimerions bien savoir en quoi la loi apportera quelque chose de plus par rapport à ce qui existe déjà en matière d'égalité professionnelle !
Mme Hélène Luc. Ils ne veulent pas nous répondre !
M. le président. L'amendement n° 59 rectifié, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - Après le 6° de l'article 225-2 du code pénal, il est inséré un 7° ainsi rédigé :
« 7° A justifier un écart de salaire entre deux emplois identiques. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Participant à la table ronde sur le projet de loi organisée par la commission des affaires sociales, M. Jean-Luc Vergne, directeur des ressources humaines du groupe PSA-Peugeot-Citroën, a confirmé qu'aucun facteur objectif ne pouvait justifier les écarts salariaux entre les hommes et les femmes lorsque ces dernières sont aussi compétentes dans leur catégorie professionnelle.
Pourtant, pour les mêmes emplois, le salaire moyen des femmes reste inférieur de 5% à 6 % à celui des hommes. Les entreprises, au quotidien, sont discriminantes, bien qu'elles aient du mal à l'admettre.
Très peu d'entre elles satisfont à leur obligation annuelle de négocier spécifiquement sur l'égalité salariale, comme le révèle le sondage réalisé pour la délégation aux droits des femmes du Sénat : 72 % des entreprises n'ont jamais organisé des telles négociations et beaucoup confondent bilan social et rapport de situation comparée.
Quant aux salariés, ils peinent, comme les syndicats, d'ailleurs, à faire appliquer les principes d'égalité professionnelle et de non-discrimination salariale, alors même que la charge de la preuve en matière de discrimination a été aménagée.
La jurisprudence demeure limitée, vous l'admettez, mais vous ne pouvez vous empêcher de pointer « les risques du recours au juge dans les rapports de travail » pour justifier des amendements à un article 10 qui intègre notamment l'état de grossesse parmi les motifs de discrimination invocables par la candidate à un recrutement.
Par conséquent, je me fais très peu d'illusions sur le sort qui sera réservé à notre présent amendement, lequel prévoit de modifier l'article 225-2 du code pénal afin de préciser que l'écart de salaire entre deux emplois identiques constitue une discrimination passible de sanctions pénales, en l'occurrence trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende.
Je ne demeure pas moins convaincu de son opportunité et de sa complémentarité par rapport à l'objectif central de ce texte, à savoir la responsabilisation des entreprises s'agissant des écarts de rémunérations entre hommes et femmes.
L'adoption d'un dispositif plus coercitif que ce qui est prévu par le projet de loi inciterait véritablement les sociétés engagées par accord au niveau de l'entreprise à investir pour résorber les inégalités et permettrait de sanctionner celles qui sont manifestement discriminantes.
Adopter cet amendement, ce serait aussi dire aux femmes que les discriminations dont elles sont victimes ne sont pas une fatalité.
Enfin, ce serait faire un pas en avant, après vingt-cinq ans de mesures restées inefficaces, comme toutes les études le démontrent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à sanctionner pénalement les employeurs qui mettraient en place une politique salariale différenciée à emploi identique. Tous les cas de figure ne sont cependant pas prévus.
En effet, deux personnes occupant des emplois identiques peuvent très bien être payées différemment si l'une des deux est plus performante que l'autre : c'est là tout le sens de la politique d'individualisation des salaires en fonction des performances.
S'il fallait sanctionner toutes les entreprises qui pratiquent une individualisation des salaires, il faudrait quasiment toutes les sanctionner !
Si, en revanche, les auteurs de l'amendement entendent sanctionner des écarts salariaux que rien ne « justifie » si ce n'est le sexe, alors ils ont raison. Il aurait fallu, dans ce cas, le préciser. Toutefois, un tel amendement n'aurait rien ajouté au droit actuel, qui prévoit déjà de sanctionner ce genre de pratiques.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 4
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 611-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les inspecteurs du travail bénéficient d'une formation spécifique afin de les sensibiliser aux problèmes d'égalité salariale et professionnelle entre les femmes et les hommes. »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Il s'agit d'un amendement à vocation pédagogique.
Nous souhaitons que les inspecteurs du travail bénéficient d'une formation spécifique afin d'être sensibilisés aux problèmes d'égalité salariale et professionnelle.
Il serait en effet paradoxal, alors que nous nous efforçons de créer des outils permettant d'améliorer la négociation et de mettre un terme à ces discriminations, que les représentants de l'administration, qui sont au plus près de l'entreprise, n'y soient pas particulièrement sensibilisés.
En jouant, auprès des employeurs comme auprès des salariés, un rôle d'information sur les droits et les obligations des uns et des autres, les inspecteurs du travail complèteraient notre action.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Robert Bret. La commission est-elle pour la pédagogie ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement ne me semble pas utile. A partir du moment où les inspecteurs du travail ont pour mission de faire appliquer le droit du travail, y compris donc les dispositions légales sur l'égalité salariale, il n'y a pas besoin de prévoir une quelconque formation de sensibilisation. Ils doivent simplement faire appliquer la loi.
Mme Hélène Luc. Oui, mais comme on ne la fait jamais appliquer, la loi...
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par Mmes Demontes, Printz, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes peut se substituer ou s'associer au salarié et saisir les prud'hommes dans le cas où il constaterait que la législation relative à la non discrimination ne serait pas respectée.
La parole est à Mme Christiane Demontes.
Mme Christiane Demontes. Cet amendement s'inspire du modèle de la Suède qui, en matière d'égalité professionnelle, peut être considéré comme un exemple de bonne pratique : on va jusqu'à prévoir la saisine des tribunaux en cas de non-respect de l'égalité ou en cas d'actes de discrimination notoires.
Les victimes de discriminations n'osent pas forcément intenter des actions en justice. Il est dès lors indispensable qu'une institution comme le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes puisse se substituer à elles.
Le choix de cet organisme nous semble d'autant plus pertinent que le Conseil supérieur regroupe quatre collèges comprenant respectivement des représentants des syndicats de salariés, des organisations patronales et de l'administration ainsi que des personnalités qualifiées.
De plus, le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes suit régulièrement l'application du dispositif relatif à l'égalité professionnelle ; il met en oeuvre des études et des recherches ; il formule des propositions pour faire progresser l'égalité professionnelle et peut se prononcer sur la législation concernant le travail des femmes ainsi que sur les modifications du droit du travail lorsque celles-ci peuvent avoir une incidence sur l'égalité professionnelle.
Nous vous proposons donc de copier le modèle suédois en rendant le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes plus efficace. Ainsi, dans le cas de non-respect des dispositions légales, ce dernier pourra s'associer ou se substituer à la victime auprès des juridictions compétentes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'ambition est louable, mais je m'interroge sur les modalités de la mise en oeuvre de ce qui nous est proposé.
Il me semble raisonnable de demander l'avis du Gouvernement sur cette question puisque c'est le ministre délégué à la cohésion sociale et à la parité qui assure la présidence du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est un organisme consultatif à vocation générale.
Or nous avons créé, par la loi du 31 décembre 2004, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, ou HALDE. C'est cette dernière qui est compétente pour les problèmes de discrimination, notamment entre hommes et femmes dans le monde professionnel.
C'est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas transformer le Conseil supérieur de l'égalité professionnel entre les femmes et les hommes en une « HALDE bis ». La Haute autorité a été installée, elle est présidée par M. Louis Schweitzer et elle remplira pleinement son rôle. Il n'est donc pas nécessaire de modifier les attributions du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
M. le président. A la fin de sa vie, Jean-Baptiste Bernadotte, alors roi de Suède - pays que vous venez de prendre en exemple, madame Demontes - n'enlevait jamais sa chemise, même devant son médecin.
Cela avait intrigué la cour. Moyennant quoi, quand le roi rendit son âme à Dieu, on se précipita pour voir ce que dissimulait la chemise. Or, sur la poitrine du défunt, étaient tatoués les mots : « Mort aux rois ».
Lorsqu'il s'était fait tatouer, Jean-Baptiste Bernadotte ne savait certainement pas que Napoléon allait permettre qu'il fût fait un jour roi de Suède. Alors, monsieur Muzeau, faites attention avant de vous faire tatouer ! (Rires.)
Article 4 bis
Après le premier alinéa de l'article L. 311-10 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les maisons de l'emploi favorisent les objectifs d'égalité professionnelle et de réduction des écarts de rémunération entre les hommes et les femmes. A ce titre, elles mènent auprès des employeurs privés et publics en activité dans leur ressort des actions de sensibilisation et d'information. »
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par Mmes Garriaud-Maylam et Brisepierre, MM. Cantegrit, Cointat, Del Picchia, Duvernois, Ferrand et Guerry et Mme Kammermann, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 311-10 du code du travail, après les mots :
les maisons de l'emploi
insérer les mots :
et pour les Français établis hors de France, les comités consulaires compétents
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Cet amendement, cosigné par l'ensemble des sénateurs du groupe UMP représentant les Français établis hors de France, vise à introduire une référence aux Français de l'étranger dans le texte.
Il serait effectivement anormal que les Français de l'étranger, ou plus exactement les Françaises de l'étranger soient excluent de ce grand principe du droit national : l'égalité salariale entre homme et femme.
Il y a de plus en plus de Françaises à l'étranger : elles représentent actuellement 52 % de notre population expatriée, dont 55 % en Europe, et beaucoup d'entre elles se trouvent victimes de discriminations salariales.
Nous souhaitons donc l'inscription d'une référence de ces Françaises de l'étranger dans le texte. Les comités consulaires compétents se devront ainsi d'effectuer des opérations de sensibilisation sur cette question de l'égalité salariale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui vise à prendre en compte les Français de l'étranger, souvent oubliés dans notre législation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Il est heureux que nous ayons à débattre de cet amendement qui, effectivement, va renforcer la situation des Français de l'étranger.
Le Gouvernement émet un avis favorable. (Bravo ! et applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La démagogie à ce point !
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Quelque chose m'a certainement échappé.
J'ai bien compris qu'il fallait donner un peu aux Français établis hors de France. Cela étant, jusqu'à preuve du contraire, nous légiférons pour les salariés qui travaillent en France ou dans les territoires français comme pour ceux des entreprises françaises établies à l'étranger.
Cela me semblait jusqu'à maintenant aller de soi, mais j'aimerais obtenir une précision sur ce sujet. Monsieur le ministre, les dispositions dont nous parlons aujourd'hui s'appliquent-elles aussi aux salariés des entreprises françaises situées hors du territoire national ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je ne savais pas que nous légiférions pour les entreprises de l'étranger !
M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert Del Picchia. La loi française ne peut pas s'appliquer à l'étranger, et ce pour une raison fort simple : les sociétés françaises à l'étranger sont de droit local. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et alors ? C'est de la pure démagogie !
M. Robert Del Picchia. Vous ne pouvez dès lors pas faire appliquer la loi française localement. Imaginez, dans la même logique, ma chère collègue, que soient appliquées en France la loi chinoise ou la loi américaine !
M. Roland Muzeau. Tout cela ne tient pas debout !
M. Robert Del Picchia. Et pourquoi pas la loi polonaise ?
Nous ne demandons pas l'application de la loi française dans les entreprises françaises établies à l'étranger et qui sont de droit local dans ces pays ; nous demandons simplement que les comités consulaires pour l'emploi sensibilisent les entreprises françaises établies à l'étranger au principe d'égalité tel qu'il sera appliqué en France. C'est tout !
Vous n'allez pas vous opposer à cette demande de sensibilisation par les comités consulaires pour l'emploi, tout de même !
M. Roland Muzeau. Ce n'est pas sérieux !
Mme Annie David. Comment peut-on légiférer de cette manière ?
M. le président. C'est Bolkestein à l'envers !
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je comprends bien votre volonté de faire un signe à vos électeurs. (Protestations sur certaines travées de l'UMP.)
Je demande, moi aussi, que l'on sensibilise les entreprises françaises installées à l'étranger, mais à l'ensemble de notre droit du travail !
Ce que vous proposez, c'est le comble de la démagogie. Les entreprises françaises sont censées appliquer la loi française. Si elles ne l'appliquent pas déjà, ne pensez pas qu'en les « sensibilisant » vous les amènerez à le faire.
Je demande que le code du travail, particulièrement s'agissant des droits des salariés, soit appliqué dans sa totalité et en tout lieu par les entreprises françaises. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. -Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je suis déçue de cette attitude cynique qui réduirait presque cet amendement à une manoeuvre visant uniquement à satisfaire nos électeurs.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est vous qui êtes cynique ! Les délocalisations sont même le comble du cynisme !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Bien évidemment, nos électeurs, mais aussi les Français de l'étranger dans leur ensemble sont attentifs à ce que nous, Haute Assemblée, faisons pour leur rendre service.
M. Roland Muzeau. Bien sûr !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Nous examinons un texte sur l'égalité salariale entre hommes et femmes. Comme mon collègue vous l'a très bien expliqué, les sociétés françaises implantées à l'étranger sont de droit local et nous ne pouvons malheureusement pas appliquer de mesures coercitives à l'étranger.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et vous pensez pouvoir « sensibiliser » des entreprises qui délocalisent précisément pour payer moins leurs salariés ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Nous souhaitons simplement un progrès.
Mme Hélène Luc. Ce que vous proposez ne servira à rien !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. C'est un premier pas.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et les salaires ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Bien évidemment, nous souhaiterions qu'il y ait le même droit salarial partout, mais nous sommes aussi réalistes : c'est notre devoir d'élus !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les mêmes salaires partout ? Cent euros par mois, comme en Chine ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Nous souhaitons un progrès, et cet amendement en est un.
M. Roland Muzeau. Vous vous payez de mots !
M. Michel Guerry. Nous ne manquerons pas de faire savoir à nos électeurs ce que vous pensez de nos propositions !
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Dans le texte proposé par cet article pour insérer un alinéa à l'article L. 311-10 du code du travail, supprimer les mots :
favorisent les objectifs d'égalité professionnelle et de réduction des écarts de rémunération entre les hommes et les femmes. A ce titre, elles
II. - Compléter le même texte par les mots :
relatives à l'égalité professionnelle et à la réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement rédactionnel tend à renforcer le caractère normatif de l'article 4 bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 4 bis, modifié.
(L'article 4 bis est adopté.)
TITRE II
ARTICULATION ENTRE L'ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE ET L'EXERCICE DE LA RESPONSABILITÉ FAMILIALE
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans l'intitulé de ce titre, remplacer les mots :
l'exercice de la responsabilité familiale
par les mots :
la vie personnelle et familiale
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement rédactionnel vise à harmoniser l'intitulé du titre II avec le contenu des articles 5 et 6 du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cet amendement est mieux que rédactionnel puisque, en introduisant dans l'intitulé du titre II la notion de vie personnelle et familiale, il met l'accent sur la nécessité de concilier celle-ci avec la vie professionnelle.
M. le président. En conséquence, l'intitulé du titre II du projet de loi est ainsi modifié.
Article additionnel avant l'article 5 ou après l'article 6
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 46 rectifié, présenté par M. Mercier, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Avant l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé:
Après l'article L. 121-9 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé:
« Art. L. ... - Les salariés à temps partiel ne peuvent se voir imposer des plages de travail fractionnées. »
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. L'objet du présent amendement est d'insérer un nouvel article dans le code du travail, au chapitre des dispositions générales régissant le contrat de travail, article en vertu duquel les salariés à temps partiel ne pourront se voir imposer des plages de travail fractionnées.
La question est importante. En effet, il arrive que les employeurs profitent du fait que leurs salariés soient à temps partiel pour leur imposer des horaires « à la découpe » ou encore des horaires « saucissonnées ».
M. Roland Muzeau. C'est vrai !
M. Robert Bret. Comme pour les appartements !
Mme Catherine Morin-Desailly. Dans le cadre de ces emplois du temps dont l'employeur a l'entière maîtrise, les salariés concernés, qui, il faut le préciser, sont en très grande majorité des femmes, peuvent se voir contraints d'effectuer, moyennant de nombreux déplacements dans une même journée, des horaires extravagants. Nous entendons ici protéger les femmes se trouvant dans ces situations extrêmes.
Les plages de travail fractionnées sont attentatoires au droit à valeur constitutionnelle de mener une vie familiale normale et au respect de la vie privée.
Du point de vue de la cohérence de notre action législative, je tiens à rappeler que mon groupe avait présenté un même amendement lors de l'examen du projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures d'urgence pour l'emploi.
Le Gouvernement nous avait alors suggéré de retirer cet amendement pour le présenter au moment de l'examen du projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, ce que nous faisons aujourd'hui.
M. le président. L'amendement n° 68, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 322-11 du code du travail, il est inséré un article rédigé comme suit :
« Art. L. ....- L'embauche d'un salarié sous contrat à durée indéterminée à temps partiel n'ouvre pas de droit à un abattement sur les cotisations dues par l'employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales.
« Ce contrat ne peut prévoir plus d'une interruption d'activité au cours de la même journée. Les horaires de travail des salariés à temps partiel ne peuvent comporter, au cours d'une même journée, plus d'une interruption d'activité ou une interruption supérieure à deux heures.
« Il doit également être conforme aux dispositions de l'article L. 212-4-3
« L'avenant au contrat de travail du salarié dont l'emploi à temps plein est transformé en emploi à temps partiel doit en outre comporter des mentions expresses écrites de la main de l'intéressé, et suivies de sa signature, attestant du caractère volontaire que revêt cette transformation pour le salarié.
« Ces dispositions s'appliquent aux employeurs visés aux articles L. 351-4 et L. 351-12 (3º et 4º), ainsi qu'aux employeurs de pêche maritime non couverts par lesdits articles, à l'exception des particuliers employeurs. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Nous entendons mettre en place des mesures concrètes de lutte contre les inégalités et instaurer des dispositifs visant à limiter l'usage du temps partiel imposé, dont les femmes sont les premières victimes.
Cet amendement vise ainsi à supprimer l'exonération de charges sociales liées à la création de contrats à temps partiel.
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail, les mots : « soit expressément, soit en définissant les amplitudes horaires » sont remplacés par les mots : « expressément en définissant les amplitudes horaires proportionnelles au temps de travail effectué dans la journée ».
II. En conséquence, le sixième alinéa (4°) de l'article L. 212-4-6 du même code est complété par les mots : «, sous réserve que l'amplitude horaire soit proportionnelle au temps de travail effectué dans la journée. »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement porte sur un problème récurrent, notamment dans la grande distribution et dans le secteur du nettoyage, à savoir le temps partiel fragmenté.
Il n'est en effet pas rare que les salariés concernés - pour une écrasante majorité, des femmes - soient obligés de commencer leur journée de travail tôt le matin, puis de s'interrompre et de recommencer à travailler en fin de journée jusqu'à une heure tardive, tout cela pour un demi SMIC ou deux tiers de SMIC, avec des problèmes insurmontables de transport et de garde d'enfants, particulièrement dans les très grandes agglomérations, et avec la perspective d'une retraite au prorata !
Il importe donc de revenir à des temps rémunérateurs et gérables, conciliables avec une vie personnelle et familiale normale, comme nous avions proposé de le faire dans le cadre des lois relatives à la réduction du temps de travail et de la loi de modernisation sociale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Je comprends que les auteurs de l'amendement n° 46 rectifié veuillent se saisir de la question du temps partiel subi par les femmes. Toutefois, Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité a annoncé, devant la commission puis en séance, ce matin, que le travail à temps partiel subi ferait l'objet d'une négociation avec les partenaires sociaux et le ministère du travail. Je sais qu'elle a conscience de ce phénomène que nous dénonçons tous...
M. Roland Muzeau. Non !
Mme Esther Sittler, rapporteur. ...et, dans ces circonstances, j'estime qu'il conviendrait de laisser à la négociation le temps de commencer et d'aboutir avant de prendre toute décision définitive.
S'il pourra avoir des conséquences pratiques assez rapides, l'amendement que la commission a adopté sur le temps partiel ne bouleverse pas fondamentalement la vie des entreprises et laisse de plus le champ libre à la négociation ; j'invite le Gouvernement à nous exposer sa vision, mais, pour les amendements nos 68 et 32, il me paraît plus judicieux d'attendre l'aboutissement des négociations, Mme la ministre nous ayant assurés, et je lui fais confiance, de l'ouverture de la discussion collective.
Mme Hélène Luc. Depuis 1983, bien du temps s'est écoulé !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement est très attentif aux conditions du développement du travail à temps partiel dans notre pays.
Mme Eliane Assassi. C'est la moindre des choses !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Un groupe de travail a été mis en place par Gérard Larcher pour examiner les conditions d'une amélioration du régime de l'emploi des personnels à temps partiel.
Nous ne voulons pas couper l'herbe sous le pied aux partenaires sociaux, qui sont aujourd'hui réunis sur l'initiative du ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
C'est la raison pour laquelle, tout en étant particulièrement sensible à ces questions et tout en souhaitant réguler le développement du travail à temps partiel, le Gouvernement ne souhaite pas l'adoption de ces trois amendements. Il se réserve la possibilité d'intervenir à la suite des négociations qui ont été engagées pour améliorer le régime du travail à temps partiel.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Même en adoptant la logique de M. le ministre, ces amendements pourraient être retenus.
Que des négociations soient en cours n'implique en effet pas du tout qu'il faille rejeter nos propositions, d'autant que nous sommes en début de navette et que le texte va continuer à « circuler » : en marquant à ce stade notre volonté d'améliorer les conditions du travail à temps partiel, nous ne coupons pas l'herbe sous le pied aux partenaires sociaux ; au contraire, nous confortons les négociations. Il faut justement voter ces amendements !
M. Robert Bret. Nous sommes là pour légiférer !
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Monsieur le ministre, les dizaines d'ordonnances que nous venons de subir n'ont-elles pas, de la même manière, coupé l'herbe sous le pied aux partenaires sociaux ? Ce sont autant d'interdictions de négocier !
Et, pour répondre aux objections du Gouvernement et de la commission quant aux pénalités que nous souhaitons appliquer aux employeurs qui ne respectent pas la loi et qui ne font rien pour corriger les écarts de salaires et les inégalités professionnelles entre hommes et femmes, j'invite la majorité à s'inspirer du discours, très en vogue en ce moment au sein du Gouvernement, de MM. Sarkozy et Clément sur la récidive !
M. Gérard César. Curieuse comparaison !
M. Roland Muzeau. Cela fait vingt-cinq ans au moins que les employeurs récidivent dans le non-respect de la législation en matière d'égalité salariale et professionnelle. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Après un quart de siècle, on aurait tout de même pu franchir un pas supplémentaire et donner un tant soit peu de sens à ce texte qui vise prétendument à réduire la fracture sociale entre les hommes et les femmes !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Rappel au règlement
M. Jean-Pierre Godefroy. Sans vouloir me substituer à mes collègues du groupe centriste, je relève que, lorsqu'elle a présenté l'amendement n° 46 rectifié, Mme Morin-Desailly a elle-même bien rappelé que c'était à la demande du Gouvernement que son groupe avait accepté de retirer un amendement identique déposé sur le projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures d'urgence pour l'emploi afin de le redéposer sur le présent texte.
Cette démarche, nous l'avions soutenue, et il serait tout de même de bonne pratique que le Gouvernement continue à respecter la règle du jeu qu'il a lui-même fixée. Aujourd'hui, on nous dit qu'elle n'est plus d'actualité. A qui se fier ? C'est à se demander si l'on peut valablement débattre dans cet hémicycle ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Monsieur Godefroy, je vous donne acte de ce qui n'était sans doute pas un vrai rappel au règlement et je précise que l'amendement n° 46 rectifié a été mis aux voix et repoussé dans les règles !
Article 5
A la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 432-3-1 du code du travail, les mots : « et de rémunération effective » sont remplacés par les mots : «, de rémunération effective et d'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ».
M. le président. L'amendement n° 92, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
A la fin de cet article, remplacer les mots :
la vie personnelle et familiale
par les mots :
l'exercice de la responsabilité familiale
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Autant le Gouvernement comprend la volonté qui a conduit le Sénat à remplacer la formule : « exercice de la responsabilité familiale » par la formule : « vie personnelle et familiale » dans l'intitulé du titre II, autant il regrette cette même modification à l'article 5. Je le rappelle, cet article vise à mettre en place un nouvel indicateur qui, construit par le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, doit rester centré sur la responsabilité familiale.
Il semble difficile d'élaborer un indicateur imposant aux entreprises de prendre en considération la vie personnelle de leurs salariés. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement voudrait le rétablissement des mots : « l'exercice de la responsabilité familiale » à la fin de l'article 5.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement n'est pas compatible avec l'amendement n° 16 de la commission. Il contredit de surcroît l'avis favorable émis par M. le ministre sur l'amendement n° 14.
M. Robert Bret. Il y a en effet un problème de cohérence !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. On peut comprendre la volonté de mettre en avant, dans un titre, la vie personnelle et familiale à côté de la vie professionnelle, mais je ne vois pas comment le législateur pourrait, dans un article, imposer aux entreprises de porter une appréciation sur la vie personnelle de leurs collaborateurs.
Ce n'est franchement pas le rôle des entreprises et c'est pourquoi il nous semble important d'en rester à « l'exercice de la responsabilité familiale ».
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Selon moi, demander à l'entreprise d'intervenir sur des critères qui sont d'ordre personnel, c'est une atteinte à la vie privée. En effet, permettre au chef d'une entreprise, quelle que soit la taille de celle-ci, de demander à ces salariés s'ils prennent leur après-midi pour s'occuper de leurs enfants, pour aller au cinéma, pour jouer au tennis ou pour se rendre chez le médecin revient à lui donner le droit de s'immiscer dans leur vie privée.
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5
M. le président. L'amendement n° 85 rectifié, présenté par M. Legendre, Mme Rozier, M. Gournac et Mme Henneron, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début de l'article L. 122-26-4 du code du travail est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La salariée bénéficie, avant la suspension de son contrat de travail prévue à l'article L. 122-26, d'un entretien avec son employeur. Au cours de cet entretien sont notamment évoqués les modalités permettant à la salariée de maintenir le contact avec son entreprise ainsi que les souhaits de l'intéressée quant à son évolution professionnelle. »
L'amendement n° 87 rectifié bis, présenté par M. Legendre, Mme Rozier, M. Gournac et Mme Henneron, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 122-28-1 du code du travail, est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L... - Le salarié bénéficie, avant la suspension de son contrat de travail prévue à l'article L. 122-28-1, d'un entretien avec son employeur. Au cours de cet entretien sont notamment évoqués les modalités permettant au salarié de maintenir le contact avec son entreprise ainsi que les souhaits de l'intéressé quant à son évolution professionnelle. »
La parole est à Mme Françoise Henneron, pour défendre ces deux amendements.
Mme Françoise Henneron. La disposition prévue par ces deux amendements reprend les termes de l'accord national interprofessionnel relatif à la mixité et à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, du 1er mars 2004. La loi de programmation pour la cohésion sociale n'a pas intégré toutes les dispositions de cet accord. Il paraît donc souhaitable de profiter de la discussion du présent projet de loi pour le faire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n° 85 rectifié et 87 rectifié bis ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Ces amendements sont utiles mais satisfaits par l'article 133 de la loi de programmation pour la cohésion sociale, qui prévoit que « la femme salariée qui reprend son activité à l'issue d'un congé de maternité a droit à un entretien avec son employeur en vue de son orientation professionnelle ». Je demande donc le retrait de ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Même avis, monsieur le président, pour les mêmes raisons, puisque l'article L. 122-26-4 du code du travail prévoit ces dispositions.
M. le président. Les amendements sont-ils maintenus ?
Mme Françoise Henneron. Non, monsieur le président, je les retire.
M. Robert Bret. Pour une fois qu'ils en déposaient...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comme cela, ils ne servent absolument à rien !
M. le président. Les amendements nos 85 rectifié et 87 rectifié bis sont retirés.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les femmes ne sont pas seulement des mères de famille !
Article 6
I. - L'intitulé de la section 2 du chapitre II du titre II du livre III du même code est ainsi rédigé : « Aides à l'adaptation des salariés aux évolutions de l'emploi et à l'articulation de l'emploi et de l'exercice de la responsabilité familiale ».
II. - Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article L. 322-7 du même code, après les mots : « à assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leurs emplois », sont insérés les mots : « ou des actions favorisant l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, en particulier grâce à des mesures améliorant l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ».
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le I de cet article, remplacer les mots :
l'exercice de la responsabilité familiale
par les mots :
la vie personnelle et familiale
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec l'amendement n 14.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement est tout à fait d'accord avec Mme le rapporteur, puisque, en l'occurrence, il s'agit non pas d'indicateurs, mais de conseils. Ces derniers ne posant aucun problème, le Gouvernement émet bien sûr un avis favorable.
M. Robert Bret. Cela ne mange pas de pain !
M. le président. Les conseilleurs ne sont pas les payeurs ! (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 15.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 6
M. le président. L'amendement n° 71, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux dernières phrases du premier alinéa de l'article L. 212-4-2 du code du travail sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, les représentants du personnel, ou à défaut les salariés après information de l'inspecteur du travail, disposent d'un droit de veto suspensif sur la mise en place d'horaires à temps partiel. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Les inégalités salariales ne sont qu'un volet des inégalités professionnelles entre hommes et femmes, que nous connaissons depuis toujours. En effet, qu'il s'agisse des écarts de rémunération, de la position occupée dans l'entreprise ou des conditions de travail, les disparités de situation entre femmes et hommes sont considérables.
Au titre des injustices dans le monde du travail s'ajoute notamment le problème du temps partiel subi, qui touche de plein fouet les femmes.
Depuis vingt ans, plusieurs législations ont tenté de supprimer les inégalités professionnelles, mais faute de dispositions véritablement contraignantes, elles n'y sont pas parvenues. De plus, la question des temps partiels subis a été peu évoquée, et ne reçoit pas l'attention qu'elle mérite bien que le problème qu'ils posent soit aujourd'hui aigu.
En effet, 82 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes. Ces dernières sont considérées comme une variable d'ajustement, et c'est ce contre quoi nous devons nous élever aujourd'hui. Egaliser les salaires doit, bien sûr, être un objectif prioritaire, mais dans la lutte contre les inégalités, il s'agit également de ne pas perdre de vue le fait que, trop souvent, les femmes se trouvent dans des situations professionnelles précaires, et sont obligées d'accepter des emplois qui ne correspondent pas pleinement à ce qu'elles savent, ou veulent, faire.
Nous avons laissé perdurer une vision sexiste du marché du travail, refusant de prendre les décisions qui s'imposaient. Aujourd'hui, la réalité est lourde de conséquences. Les femmes vont vivre dans la précarité pendant leur activité professionnelle et seront dans la misère au moment de leur retraite. Il est donc urgent de traiter ce sujet.
Au lieu de résoudre le problème dès maintenant, alors que vous en avez les moyens et l'opportunité, vous appelez de vos voeux, madame la ministre, la mise en place de commissions, de missions de réflexion et autres dispositifs qui ne visent qu'à enterrer le sujet, alors que vous prétendez faire le contraire.
Pourtant, ce ne sont pas les expertises et les propositions qui manquent. Mais les déclarations de bonne volonté ne remplacent pas les actes. Nous attendons de vous non pas que vous vous contentiez de formuler des voeux pieux, mais que vous preniez le problème à bras-le-corps, en faisant figurer dans ce texte des dispositifs pour lutter contre l'imposition aux salariés de contrats à temps partiel. Nous connaissons le sujet par coeur, nous avons donc la possibilité de faire des propositions concrètes dès maintenant, et vous avez pu remarquer que nous ne nous en privions pas
Jusqu'à présent, vous n'avez su qu'aggraver les choses. Alors que l'organisation du travail à temps partiel avait été encadrée dans la loi Aubry II, la loi du 4 mai 2004 a aggravé la situation en ramenant le délai de prévenance de sept à trois jours. Or, une grande partie des femmes concernées sont chefs de famille monoparentale et assurent seules des charges familiales.
Aujourd'hui, vous avez, madame la ministre, la possibilité de concrétiser vos promesses en matière de travail précaire et de temps partiel subi. Nous entendons vous donner les moyens nécessaires grâce à cet amendement qui tend à donner plus de pouvoir aux représentants du personnel pour refuser l'imposition des contrats à temps partiel.
Il est d'autant plus nécessaire de profiter de ce texte pour avancer sur cette question du temps partiel imposé qu'elle est au coeur du sujet dont nous débattons.
Mme Hélène Luc. Nous avons, dans notre groupe, des hommes qui défendent bien les femmes.
M. Robert Bret. Et nous pratiquons la parité !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à donner un droit de veto aux représentants du personnel pour la mise en oeuvre d'horaires à temps partiel. Là encore, il faut rappeler qu'une concertation est prévue pour étudier la question du temps partiel subi. Je fais confiance à Mme le ministre pour mener à terme, comme elle nous l'a promis, l'action déjà engagée afin d'évoquer et de régler cette question dramatique du temps partiel subi par les femmes.
Mme Hélène Luc. On jugera !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a que la foi qui sauve !
M. Robert Bret. Nous sommes là pour légiférer, et non pour signer un chèque en blanc !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Aussi, je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. A défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Depuis ce matin, nous avons évoqué à plusieurs reprises le temps partiel. J'ai l'ai déjà dit, le Gouvernement s'est engagé sur ce sujet puisque nous menons des négociations pour étudier la question du temps partiel subi et de son organisation, ainsi que la façon dont nous pouvons notamment aider les femmes à en sortir. Les négociations ont commencé et, parallèlement, j'ai saisi le Conseil économique et social.
L'amendement qui nous est proposé tendrait en quelque sorte à n'imposer que des contrats à temps plein dans l'entreprise. D'un point de vue strictement économique, je ne suis pas sûre que ce soit vraiment réaliste et c'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l'article L. 212-4-3 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrat de travail mentionne les conditions dans lesquelles le salarié a la faculté de refuser d'effectuer des heures complémentaires, d'accepter ou de refuser de changer la répartition de sa durée de travail ou de ses horaires de travail au sein de chaque journée travaillée, sans que son refus constitue une faute ou un motif de licenciement. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vient compléter l'amendement précédent. Il est fréquent que le coût collatéral occasionné par l'obligation d'effectuer des heures complémentaires non majorées aboutisse à une absence de bénéfice pour le salarié, voire à une perte.
Il en est de même en cas de changement dans la répartition des horaires ou de la durée du travail au sein de chaque journée.
Cette pratique est pourtant courante dans certains secteurs, comme la grande distribution, par ailleurs très largement bénéficiaires. On y voit des femmes, en majorité, travailler en matinée puis en fin d'après-midi jusqu'à vingt-deux heures. Et si elles refusent, elles sont licenciées et remplacées par des femmes encore plus en difficulté.
Cette pratique désorganise totalement la vie des familles, obligeant ces femmes à jongler avec les horaires. Le salarié doit donc pouvoir refuser ce type d'horaires sans que cela constitue une faute ou un motif de licenciement
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Pour les raisons que j'ai exposées précédemment, avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité, y compris d'un point de vue écologique, de mettre un terme à ces coupures du temps de travail auxquelles sont soumises les femmes. La Suisse où j'ai eu l'occasion de travailler incite fortement les entreprises à mettre en place des horaires continus. C'est la voie dans laquelle nous devrions nous orienter.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Je partage bien sûr l'opinion de Mme Schillinger. Ce matin, dans la discussion générale, je n'ai d'ailleurs pas manqué de dire que, parmi les points à étudier, figurait naturellement la question de l'amplitude horaire et des difficultés rencontrées par un certain nombre de femmes qui travaillent deux heures le matin et quelques heures le soir. Il convient d'examiner l'ensemble de la question.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 28, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Les deux premières phrases du premier alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail sont supprimées.
II. Le début de la troisième phrase du premier alinéa du même article est ainsi rédigé : « Une convention ou un accord de branche étendu peut porter... (le reste sans changement) »
III. En conséquence, après les mots : « le salarié en a été informé », la fin du dixième alinéa (8°) de l'article L. 212-4-6 du même code est supprimée.
L'amendement n° 29, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 212-4-4 du code du travail est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : « ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement » et dans la deuxième phrase du même alinéa, les mots : « ou la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement », sont supprimés ;
2° Dans la première phrase du troisième alinéa, les mots : « ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement » sont supprimés.
II. L'article L. 212-4-6 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le sixième alinéa (4°), les mots : « ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement » sont supprimés ;
2° Dans le dixième alinéa (8°), les mots : « ou convention ou accord d'entreprise ou d'établissement » sont supprimés.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour défendre ces deux amendements
Mme Patricia Schillinger. Je défendrai d'un seul élan ces deux amendements relatifs au délai de prévenance, par accord de branche, d'entreprise ou d'établissement.
Par ces amendements, nous proposons de supprimer la possibilité de faire varier le délai de prévenance pour modifier la répartition de la durée du travail à temps partiel en deçà de sept jours. Il est en effet possible, sous réserve d'accord collectif, de descendre à un délai de trois jours, ce qui rend très difficile la vie des personnes concernées et les empêche d'organiser une vie familiale dans des conditions acceptables.
Nous notons d'ailleurs que le projet de loi relatif aux services à la personne prévoit une absence totale de délai de prévenance si l'employeur estime avoir besoin du salarié en cas d'urgence, ce qui équivaut à une disponibilité permanente et immédiate.
Pour autant, vous avez refusé notre amendement qui tendait à assimiler cette disponibilité à une astreinte, avec les conséquences en découlant en termes d'équivalence et de rémunération.
Si j'évoque ce point, c'est parce que là, comme sur d'autres aspects du droit du travail, on voit, éparpillées dans divers textes, des mesures disparates mais qui constituent un cheminement très clair.
En l'occurrence, il s'agit de diminuer, par accord de branche, par accord d'entreprise et d'établissement, et directement par la loi si nécessaire, le délai de prévenance, qui, au bout du compte, pourrait disparaître sans bruit. Ce faisant, le Gouvernement non seulement diminue les droits des salariés et aggrave leurs conditions de vie, mais s'abstient de mettre en place tout dispositif compensatoire.
Nous voulons signifier notre opposition à ce processus, et nous proposons de revenir au texte de la loi du 19 janvier 2000. Ce dernier prévoyait toute une série de mesures relatives au délai de prévenance et aux conditions de recours aux heures complémentaires, qui respectaient la dignité des salariés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Pour les raisons qu'elle a exposées précédemment au sujet du travail à temps partiel, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Concernant l'amendement n° 28, le Gouvernement émet un avis défavorable, pour les raisons évoquées tout à l'heure.
Quant à l'amendement n° 29, il va à l'encontre des principes développés par la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle et au dialogue social, qui étend l'autonomie des partenaires sociaux dans le cadre de la négociation d'entreprise. Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Demande de réserve
M. Alain Gournac, vice-président de la commission des affaires sociales. La commission demande la réserve des amendements nos°44 et 98 tendant à insérer un article additionnel après l'article 10, jusqu'à la fin du texte, c'est-à-dire jusqu'après l'examen de l'article 17.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 16, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 212-4-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'accord collectif de travail précise également les conditions dans lesquelles les heures supplémentaires ou les heures choisies visées à l'article L. 212-6-1 sont proposées en priorité aux salariés à temps partiel qui souhaitent effectuer un nombre d'heures supérieur à celui mentionné dans leur contrat de travail. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'article L. 212-6-1 du code du travail dispose que, « lorsqu'une convention ou un accord collectif de branche, de groupe, d'entreprise ou d'établissement le prévoit, le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, effectuer des heures choisies au-delà du contingent d'heures supplémentaires applicable dans l'entreprise ou dans l'établissement ».
Pour remédier aux situations encore très fréquentes de temps partiel subi, surtout par les femmes, cet amendement vise à permettre à l'accord collectif de travail de fixer les conditions dans lesquelles les salariés à temps partiel imposé se voient proposer en priorité les heures supplémentaires et les heures choisies qui peuvent être effectuées par des salariés à temps plein, sur des postes de travail relevant de la même catégorie.
Madame la ministre, cet amendement est le seul amendement proposé par la commission sur le temps partiel. J'ai bien compris les arguments que vous avez développés sur ce sujet, d'autant que je les ai moi-même défendus.
Par cet amendement, la commission tient cependant à signifier aux partenaires sociaux que le législateur est prêt à se saisir de cette question si aucune avancée n'intervient dans les prochaines semaines.
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'accord collectif précise également les conditions dans lesquelles les heures supplémentaires ou les heures choisies visées à l'article L. 212-6-1 sont proposées en priorité aux salariés à temps partiel qui souhaitent effectuer un nombre d'heures supérieur à celui mentionné dans leur contrat de travail, ainsi que les conditions dans lesquelles ces heures sont portées à la connaissance des salariés à temps partiel par l'employeur. »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Il s'agit, par cet amendement, de prévoir que les salariés à temps partiel se voient proposer en priorité les heures supplémentaires ou les heures choisies par leur employeur.
Nous observons avec satisfaction que la commission a déposé un amendement analogue au nôtre, qui est d'ailleurs identique à un amendement proposé par le groupe socialiste à l'Assemblée nationale.
Chacun reconnaît donc l'existence d'un vrai problème lié au temps partiel imposé, comme nous ne cessons de le souligner.
L'amendement de la commission n'indique pas, pour sa part, que l'accord collectif devrait préciser les conditions dans lesquelles les heures accessibles sont portées à la connaissance des salariés à temps partiel. Nous pensons, quant à nous, qu'il faudrait prévoir une procédure transparente afin que les personnes les plus en difficulté, en particulier les mères de famille monoparentale, soient en mesure de répondre immédiatement à cette sorte d'appel d'offres interne.
Néanmoins, nous nous rallions à la rédaction proposée par la commission.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 31 ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission souhaiterait entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 16 et 31 ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Ces deux amendements reviennent, d'une part, sur le sujet du temps partiel subi et, d'autre part, sur celui du temps partiel. Il faut faire en sorte que les salariés à temps partiel qui souhaitent travailler plus puissent le faire.
Je veux dire à Mme le rapporteur combien ce combat me paraît juste. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement entend ouvrir des négociations sur le sujet, je l'ai dit à plusieurs reprises depuis ce matin, afin que, tous ensemble, nous puissions apporter des réponses sur le temps partiel subi, l'amplitude horaire, les possibilités éventuelles d'évolution vers un travail à temps complet, ce qui implique également des réponses en matière de formation.
Le message du Sénat me paraît important. Je souhaite que les partenaires sociaux comprennent la nécessité d'entreprendre des négociations. A défaut, il serait bien évidemment indispensable que nous nous retrouvions ici pour en débattre.
A ce stade, je demande donc le retrait de ces amendements.
M. le président. Madame le rapporteur, l'amendement n° 16 est-il maintenu ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Comptant fortement sur la parole de Mme la ministre, à plusieurs reprises ce matin mais aussi lors de son audition par la commission, je retire l'amendement n° 16.
Par voie de conséquence, je demande le retrait de l'amendement n° 31.
M. le président. L'amendement n° 16 est retiré.
Madame Printz, l'amendement n° 31 est-il maintenu ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Gisèle Printz. Oui, monsieur le président, je le maintiens !
Mme Hélène Luc. Il ne s'agit pas de compter sur la parole de Mme la ministre, il s'agit de légiférer !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 30, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Chaque heure complémentaire donne lieu à une majoration de 25 % pour les huit premières heures effectuées au-delà de la durée hebdomadaire fixée dans le contrat de travail ou les trente-quatre premières heures effectuées au-delà de la durée mensuelle prévue dans le contrat de travail. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %. »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Le temps partiel imposé, ou subi, selon le point de vue où l'on se place, est un véritable fléau pour les femmes. Faut-il rappeler que 82 % des travailleurs à temps partiel sont des femmes ?
De plus, lorsqu'il est imposé, le temps partiel s'adresse le plus souvent à des femmes peu qualifiées, et il s'accompagne d'horaires irréguliers et fragmentés, qui sont également imposés. Or chacun sait aussi que 60 % de ces femmes souhaiteraient travailler plus pour d'impératives raisons financières, ce qui se comprend d'autant mieux que la rémunération moyenne du travail à temps partiel est de six cents euros par mois.
Avec cet amendement, nous proposons de supprimer l'injustice que constitue la non-majoration des heures complémentaires. A l'heure actuelle, pour beaucoup de femmes, les sommes gagnées en effectuant des heures complémentaires ne suffisent pas à couvrir les frais de garde de leurs enfants. Voilà qui n'est pas vraiment motivant !
Certes, nous savons que cet amendement va à l'encontre des orientations du Gouvernement puisque, avec les textes qui ont été votés récemment, les cas seront de plus en plus fréquents où la rémunération des heures supplémentaires effectuées par les salariés à temps complet ne sera majorée que de 10 %, à moins qu'un accord d'annualisation ou un forfait en jours ne fasse tout simplement disparaître les heures supplémentaires. Et que dire du temps partiel annualisé, qui cumule tous ces inconvénients !
Néanmoins, pour les salariés dont le temps de travail est encore calculé sur une base hebdomadaire, nous proposons que la rémunération des heures complémentaires soit majorée, comme celle des heures supplémentaires dans les entreprises de plus de vingt salariés, de 25 % pour les huit premières heures et de 50 % pour les suivantes.
Il faut garder présent à l'esprit que le travail à temps partiel est le pourvoyeur de travailleurs pauvres. Car si les salaires sont partiels, les loyers, le prix de l'alimentation ou de l'essence, fournis d'ailleurs largement par la grande distribution, eux, ne le sont pas. Aujourd'hui, grâce aux allégements de cotisations sociales patronales, il reste plus intéressant pour un employeur d'avoir deux salariés à temps partiel plutôt qu'un salarié à temps plein. Cela s'appelle non pas « développer l'emploi », mais « développer le nombre d'emplois », sans se soucier de leur qualité.
La majoration des heures complémentaires est d'autant plus importante que les personnes concernées souhaitent « travailler plus pour gagner plus », selon le célèbre slogan de M. Sarkozy. En adoptant cet amendement, mes chers collègues, vous avez une occasion unique d'aller au-delà de l'effet d'affichage et de vous mettre en conformité avec cette déclaration fracassante.
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Chaque heure complémentaire donne lieu à une majoration de 25 %, pour les huit premières heures effectuées au-delà de la durée hebdomadaire fixée au contrat ou les trente-quatre premières heures effectuées au-delà de la durée mensuelle fixée au contrat. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 % ».
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Notre amendement pose le principe d'une majoration des heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel, au taux qui est appliqué aux heures supplémentaires.
Cet amendement est le premier d'une série de propositions visant toutes à mettre en débat la question du temps partiel qui structure et caractérise l'emploi des femmes aujourd'hui, question pourtant paradoxalement absente de ce projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Dans son rapport le plus récent, Françoise Milewski, soulignant la nécessité de cohérence des pouvoirs publics, a invité le Gouvernement à prendre en compte les effets de toutes les mesures de politique publique à l'aune de leurs incidences sur les inégalités.
Alors que le sous-emploi progresse en France - en 2004, il a touché 60 000 personnes de plus qu'au cours des deux années précédentes - et sachant que, pour les trois quarts des cas, ce sont des femmes qui travaillent à temps partiel, cette économiste de l'Observatoire français des conjonctures économiques préconise fort justement de veiller à la qualité des emplois occupés par les femmes et aux parcours professionnels qui leur sont offerts.
Quels sont les principaux facteurs qui aggravent le risque de précarité des femmes ? Comme vous le savez, madame la ministre, il s'agit de leur surreprésentation dans l'emploi peu qualifié et faiblement rémunéré, du temps partiel majoritairement contraint et des contraintes familiales.
Défendant ce projet de loi en mai dernier devant les députés, Nicole Ameline avait alors déclaré : « De mon point de vue, l'égalité salariale suppose et légitimera la refonte d'un certain nombre de dispositifs, et le temps partiel n'est pas le seul, même s'il est au coeur du problème. »
Pourtant, votre prédécesseur a systématiquement et obstinément refusé d'intégrer dans ce texte toutes les propositions concrètes d'amendements visant à s'attaquer aux causes de cette pauvreté laborieuse féminine. Elle a de ce fait bien compromis les résultats de vos efforts en matière d'égalité salariale et, plus globalement, en matière d'égalité professionnelle.
Eu égard à l'interdépendance des questions d'égalité salariale et des normes d'emplois proposés aux femmes, le principal argument avancé, en l'occurrence le refus d'anticiper sur des négociations devant être engagées sur le temps partiel, n'est pas recevable.
Il l'est d'autant moins aujourd'hui que le Gouvernement lui-même s'est affranchi du préalable des partenaires sociaux en décidant, dans le cadre du projet de loi relatif au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, de déroger aux règles de droit commun applicables aux salariés à temps partiel, s'agissant notamment du délai de prévenance.
Je ne vois donc pas ce qui s'oppose désormais à la discussion de nos amendements encadrant le recours au temps partiel ou améliorant la situation financière des femmes qui le subissent, si ce n'est votre volonté politique de préserver le rôle de variable d'ajustement des emplois occupés par les femmes. (Très bien ! sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Ces amendements visant à majorer de 25 % les heures complémentaires au-delà de la durée initiale de travail, je ne reprendrai pas l'argumentation que j'ai développée à plusieurs reprises au sujet du temps partiel.
J'ajoute cependant que les heures complémentaires prennent place dans des dispositifs spécifiques de temps partiel et, à ce titre, ne donnent lieu à aucune majoration de ce type.
Le recours aux heures complémentaires est déjà encadré. En effet, le nombre d'heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel au cours d'une semaine ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire prévue dans son contrat.
De plus, ce plafond peut être augmenté d'un tiers par accord collectif et, dans ce cas, les heures complémentaires sont majorées de 25 % au-delà de la limite du dixième de la durée hebdomadaire prévue par le contrat initial.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 30 et 70.
Je ne reviendrai pas sur le débat que nous avons eu sur le temps partiel subi. Quant à la majoration prévue, notamment par l'amendement n° 30, je laisse aux sénateurs le soin d'évaluer l'alourdissement très important du coût du travail qui pourrait en résulter, au point de conduire tout simplement à supprimer des emplois.
M. Alain Gournac, vice-président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas le but recherché !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 33 est présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 69 est présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 212-6-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le dispositif défini au présent alinéa n'est ouvert aux salariés que si, dans l'entreprise ou l'établissement, aucun salarié à temps partiel n'a fait connaître son souhait d'effectuer des heures complémentaires. »
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° 33.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement, le dernier de notre série relative au temps partiel, tend à instaurer une priorité de choix pour ce qui concerne les heures choisies au bénéfice des salariés à temps partiel subi qui ont besoin d'un meilleur salaire.
Il serait en effet paradoxal que des salariés qui travaillent déjà à temps plein et ont atteint le contingent de 220 heures annuelles supplémentaires que vous avez imposé, madame la ministre, réalisent des heures dites choisies au détriment de leur vie familiale et de leur santé, alors que des salariés à temps partiel ne parviennent pas à atteindre un salaire correct. Sur ce point, nous sommes en accord avec Mme le rapporteur.
Par cet amendement, nous proposons d'accentuer ce rééquilibrage en précisant que l'employeur ne peut passer outre le résultat obtenu par son appel à candidatures. En effet, il n'est pas très cohérent de proposer une information prioritaire aux salariés à temps partiel, qui va susciter des candidatures et donc des espoirs, si l'employeur peut ensuite passer outre.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 69.
Mme Annie David. Cet amendement concerne encore le temps partiel, car il nous semble important de prendre en compte cette donnée, qui n'est pas du tout prévue dans le texte que nous examinons aujourd'hui.
Au début des années quatre-vingt, 8 % des salariées étaient à temps partiel ; elles sont aujourd'hui 17 %. Ainsi, ce sont plus d'un million d'emplois salariés, les emplois que je qualifierai d' « emplois normaux », c'est-à-dire des emplois en CDI, à temps complet, qui ont disparu. Dans le même temps, le nombre des « emplois atypiques », les « emplois anormaux », l'intérim, les stages, les temps partiels, les CDD, a augmenté d'autant.
Selon l'INSEE, ce sont souvent les moins de trente ans qui sont touchés par cette précarité et, en premier lieu, les femmes.
Dans la grande distribution, par exemple, 60 % des salariés sont aujourd'hui à temps plein et donc 40 % à temps partiel. Force est de constater que 56 % des femmes sont à temps partiel, contre 11 % chez les hommes. Sur 207 000 salariés à temps partiel, 183 000 sont des femmes ; autrement dit, 88 % du total. Pour les employeurs, la féminisation du temps partiel est un modèle de flexibilité !
Nous ne pouvons donc raisonnablement croire que le temps partiel est un temps « choisi ». C'est d'ailleurs ce que nous essayons de vous faire comprendre depuis un certain temps !
Dans un contexte de crise grave de l'emploi, de chômage de masse, de réduction massive du montant des allocations, et de contraintes toujours plus fortes exercées sur les demandeurs d'emploi, qui sont perçus comme étant « responsables » de leur situation, les femmes salariées ont-elles véritablement le choix ? Selon les statistiques, une grande majorité d'entre elles déclarent vouloir travailler plus ! En effet, 60,3 % d'entre elles répondent ne pas avoir le choix.
Vous le voyez bien, madame la ministre, le temps partiel est donc subi ! Le temps partiel est un mode de gestion patronale qui vise à instaurer toujours plus de flexibilité. Les conséquences sont graves.
Outre la très grande précarité dans laquelle se retrouvent bon nombre de salariés à temps partiel, ce phénomène a pour effet d'opposer les salariés entre eux et d'instaurer des critères sélectifs : travail le dimanche, les jours fériés, en nocturne, etc. Qui nous fera donc croire que le temps partiel est un moyen choisi par les salariés pour concilier travail et vie de famille ? Il s'agit là d'une conception rétrograde de la position des femmes dans notre société.
Aussi, les salariés à temps partiel doivent pouvoir travailler plus s'ils le souhaitent. Or, dans le secteur du grand commerce, par exemple, pour 60 % des salariés, l'augmentation de la durée des contrats n'est actuellement que d'une heure par semaine.
C'est pourquoi nous proposons, par cet amendement, que l'entreprise ne puisse permettre à des salariés à temps plein d'effectuer des heures supplémentaires qu'à la seule condition qu'aucun salarié à temps partiel n'ait fait connaître son souhait d'effectuer des heures complémentaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'amendement n° 33 s'inspire de la même philosophie que l'amendement n° 16 de la commission, à savoir proposer en priorité aux salariés à temps partiel les heures choisies.
Toutefois, pour les raisons que j'ai exposées tout à l'heure, la commission a retiré son amendement. Nous demandons donc à Mme Printz de bien vouloir retirer l'amendement qu'elle vient de présenter. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Mon argumentaire vaut également pour l'amendement n° 69, qui est identique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Pour les raisons que j'ai invoquées s'agissant de l'amendement n° 16, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 33 et 69.
En effet, ces amendements tendent à neutraliser le dispositif des heures supplémentaires choisies nouvellement instauré par la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise dès lors qu'un des salariés à temps partiel souhaiterait effectuer des heures complémentaires. Ils alourdissent la procédure de recours aux heures supplémentaires choisies, alors que la loi du 31 mars laisse aux partenaires sociaux la possibilité d'encadrer le recours à ce nouveau dispositif.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 33 et 69.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 72, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 322-11 du code du travail, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - La baisse de l'activité au-dessous de la durée légale ne peut être imposée au salarié et ne saurait constituer ni une faute, ni un motif de licenciement »
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. La durée du travail relève de l'ordre public social. Les lois sont faites pour protéger la santé et l'emploi. Le progrès, c'est travailler moins en gagnant plus.
Dans un contexte de profits record pour les entreprises et avec des dividendes qui représentent 7 % du PIB, contre 5,3 % aux Etats-Unis, pays qui ne connaît pas les 35 heures, le slogan que vous nous rabâchez, madame la ministre, « travailler plus pour gagner plus » est plus qu'inexact, il est mensonger et provocateur pour ceux qui voudraient travailler mais n'ont pas d'emploi ou sont contraints au temps partiel.
Aujourd'hui, vous présentez un projet de loi qui est censé effacer les inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes. Comment lui accorder la moindre crédibilité alors que, depuis plusieurs années, vous appliquez une politique de paupérisation du salariat ? Votre objectif, c'est la smicardisation de la société ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Cela ne vous fait pas plaisir, je le sais, mais c'est ainsi !
M. Roland Muzeau. C'est la vérité !
M. Guy Fischer. En effet, 15 % en un an !
Mme Eliane Assassi. Chaque fois que nous le disons, vous réagissez, mes chers collègues de l'UMP ! C'est révélateur !
M. Alain Gournac, vice-président de la commission des affaires sociales. On connaît la musique !
Mme Eliane Assassi. Vous osez prétendre défendre les droits des femmes et l'égalité salariale alors que, en remettant en cause la durée légale du temps de travail, en paupérisant le salariat et en favorisant l'emploi précaire, vous rendez encore plus difficile la condition des femmes.
Pour mieux me faire comprendre, je reprendrai les propos de Margaret Maruani, sociologue et directrice de recherche au CNRS, le Centre national de la recherche scientifique : « La plupart des employées à temps partiel sont donc vendeuses, caissières ou femmes de ménage. Bon nombre d'entre elles n'ont pas choisi d'avoir un emploi à temps partiel : elles ont choisi d'avoir un emploi de quelques heures plutôt que d'être au chômage. Beaucoup travaillent pour un salaire largement inférieur au SMIC avec des horaires extrêmement éclatés. [...] Beaucoup de femmes se retrouvent ainsi en situation de sous-emploi selon les critères des statisticiens, ce qui revient à dire qu'elles travaillent moins qu'elles ne le souhaiteraient. Au fil des ans, le temps partiel est devenu la figure emblématique de la division sexuelle du marché du travail. Contrairement à d'autres questions, à propos desquelles on peut parler d'une "tradition" d'inégalité, s'agissant du temps partiel, on peut dire que l'on a créé, de toutes pièces, une forme d'emploi spécifiquement féminine. »
Le temps partiel est un des problèmes majeurs qui expliquent les inégalités professionnelles entre hommes et femmes ; il est donc insupportable que ce projet de loi qui prétend lutter contre ces inégalités reste muet sur ce problème.
C'est pourquoi nous présentons un nouvel amendement sur le temps partiel, qui vise cette fois-ci à protéger du licenciement les salariés qui ne voudraient pas se voir imposer un contrat à temps partiel. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'amendement n° 72 vise à protéger du licenciement les salariés qui refuseraient de passer à temps partiel. L'amendement semble carrément interdire le contrat de travail à temps partiel.
M. Alain Vasselle. Eh oui !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Or je rappelle que notre souhait à tous est de limiter le temps partiel subi, et non pas d'interdire le temps partiel que certains peuvent délibérément choisir.
Mme Annie David. C'est pour un temps précis !
Mme Esther Sittler, rapporteur. De plus, un contrat de travail suppose l'assentiment des deux parties, à savoir l'employeur et le salarié. Si un salarié refuse de passer à temps partiel, il n'est pas obligé de signer ce contrat, sans que cela signifie son licenciement.
Mmes Annie David et Eliane Assassi. Dans les faits, ce n'est pas vrai, vous le savez !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Si tel était le cas, des sanctions sont prévues dans le droit actuel.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. André Lardeux. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Madame Assassi, vous parlez de la politique que le Gouvernement conduit depuis trois ans. Or, sans vouloir polémiquer, je vous rappelle que la revalorisation du SMIC a permis une augmentation de 11,3 % du pouvoir d'achat en trois ans. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.) C'est tout de même bien nous qui l'avons fait !
Mme Eliane Assassi. C'était déjà prévu !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Oui, mais on l'a fait ! Les actes sont là et c'est ce qui compte !
M. Roland Muzeau. Les actes, c'est 10 % de chômeurs en plus !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Pas « en plus » !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 72.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 7
Après l'article L. 122-25-2 du même code, il est inséré un article L. 122-25-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 122-25-2-1. - Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, l'Etat accorde aux employeurs une aide forfaitaire pour chaque personne recrutée ou mise à leur disposition par des entreprises de travail temporaire ou des groupements d'employeurs définis au chapitre VII du titre II du livre Ier pour remplacer un ou plusieurs salariés en congé de maternité ou d'adoption. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 73 est présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 34.
Mme Patricia Schillinger. L'article 7 du projet de loi institue, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, une aide au remplacement d'un ou de plusieurs salariés en congé de maternité ou d'adoption.
Or, lorsqu'une salariée part en congé de maternité, ce n'est pas l'entreprise qui la paie durant cette période. Bien sûr, l'employeur peut toujours octroyer une prime, mais cela représente une somme modique par rapport à la rémunération totale qui est réglée par la caisse d'assurance maladie maternité. En fait, le plus souvent, cela ne coûte pratiquement rien à l'employeur.
Dès lors, on peut se demander quel est le motif de cette aide. Bien entendu, on nous répondra que les entreprises sont soumises à une féroce concurrence internationale et sont, de surcroît, plus fragiles que les autres. La concurrence internationale ne joue cependant pas de la même manière dans tous les secteurs.
Par ailleurs, à moins qu'il ne s'agisse de personnels très spécialisés, les presque trois millions de chômeurs doivent permettre de trouver des salariés remplaçants.
A la rigueur, ce qui peut se concevoir lorsqu'un salarié part pour une formation de longue durée ne se justifie pas en cas de congé de maternité ou d'adoption.
De plus, cela tend à faire accroire que la maternité constitue une sorte de risque pour l'entreprise et que l'embauche de femmes en âge d'enfanter est un désavantage, presque un sacrifice pour l'employeur. Il faudrait compenser ce handicap par une prime à l'employeur méritant. Il ne s'agit en réalité que d'une aubaine supplémentaire pour s'offrir un salarié remplaçant en partie aux frais de la collectivité.
Cette disposition n'est pas très flatteuse pour les femmes, ni d'ailleurs pour les chefs d'entreprise, surtout si elle répond à l'une de leurs demandes. On renforce ainsi le postulat selon lequel les femmes sont des salariés à problèmes, et ce de par leur nature physiologique.
Enfin, cette disposition soulève une dernière question. Veut-on réellement que les femmes travaillent ou préfère-t-on qu'elles restent chez elles à élever leurs enfants en bas âge, moyennant une allocation parentale d'éducation ? Est-ce un hasard si le rapport Brin propose d'ailleurs une augmentation significative de son montant ?
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour présenter l'amendement n° 73.
Mme Hélène Luc. Jusqu'à présent, nous n'avons cessé de reprocher à ce texte de ne contenir aucune mesure concrète. Or, c'est faux, il y en a une : l'article 7 prévoit, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, d'accorder une aide forfaitaire de 400 euros en cas de départ en congé de maternité.
Il est stupéfiant de constater que la seule mesure concrète de ce texte soit un cadeau supplémentaire aux employeurs ; cela en dit long sur le reste !
M. Robert Bret. Ce n'est pas fait pour les salariés !
Mme Hélène Luc. En effet !
Il est très rare qu'une petite entreprise verse une prime à ses salariées qui partent en congé de maternité. Si elle leur accorde une prime supplémentaire aux indemnités versées par la caisse d'allocations familiales, il est normal de l'aider, mais il n'y a pas lieu de prévoir une aide forfaitaire.
L'aide doit correspondre à la prime versée, sous réserve qu'elle soit plafonnée. Mais, dans la majeure partie des cas, les entreprises n'engagent pas de frais supplémentaires et l'aide que vous proposez, madame la ministre, s'assimile donc purement et simplement à un cadeau fiscal.
Pour une entreprise, quel est le coût d'un départ en congé maternité ? Certes, il faut former la personne qui assure le remplacement, mais ce n'est pas systématique et, à vrai dire, se révèle plutôt rare. Là non plus, l'aide forfaitaire ne se justifie pas, car il suffit parfois de deux heures pour mettre quelqu'un au courant. Quant à la petite entreprise très « pointue », dont les salariés ont une très grande compétence, si elle ne trouve pas la perle rare sur le marché du travail, elle n'a pas d'autre solution que de s'adapter en attendant, sauf à interdire aux femmes enceintes de partir en congé de maternité !
En outre, une fois de plus, en réservant la prime aux entreprises de moins de cinquante salariés, un effet de seuil est créé. Ce genre de disposition incite les entreprises à ne jamais dépasser le seuil fatidique, pour éviter de perdre divers avantages.
Nous ne cessons de parler de l'emploi à temps partiel, qui est volontairement ignoré dans ce projet de loi alors qu'il constitue l'un des aspects majeurs des inégalités professionnelles. A votre avis, madame la ministre, que feront les entreprises pour remplacer une salariée en congé de maternité ? Pendant trois ou quatre mois, elles embaucheront des intérimaires ou recourront à des salariés en CDD. Autrement dit, ce cadeau fiscal accentuera encore le travail précaire au détriment des femmes.
En somme, ce dispositif consiste à faire miroiter un dédommagement de 400 euros aux entreprises dont les salariées partiraient en congé de maternité. C'est intolérable, car cela revient en quelque sorte à considérer la maternité comme une forme de handicap ! (Très bien ! sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. L'amendement n° 35, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 122-25-2-1 du code du travail, remplacer les mots :
ou mise à leur disposition par des entreprises de travail temporaire ou
par les mots :
en contrat à durée déterminée ou indéterminée ou mise à leur disposition par
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Il s'agit d'un amendement de repli, pour éviter que l'employeur ne bénéficie de cette prime dans le cas où il fait appel à un salarié d'une entreprise de travail temporaire. En effet, cela conduirait la collectivité à subventionner une entreprise d'intérim, qui réalise déjà un bénéfice en fournissant un personnel de remplacement. Ce serait donc un véritable détournement, que nous souhaitons empêcher par cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'article 7, que les amendements identiques nos 34 et 73 visent à supprimer, est important, pour trois raisons.
D'abord, cet article reprend le principe retenu pour le remplacement des salariées en formation, sans qu'il ait jamais été dit que cette aide fût discriminante pour les salariés en formation remplacés. Ensuite, il évite aux femmes de ne pas être embauchées sous prétexte qu'elles s'absenteraient pour cause de maternité. Enfin, il permet de créer des emplois puisque cette aide financière est accordée à l'employeur qui embauche pour assurer le remplacement du salarié absent.
La commission est donc défavorable à ces deux amendements identiques.
En ce qui concerne l'amendement n° 35, l'article 7 n'a absolument pas pour objet d'accorder une aide financière aux entreprises de travail temporaire : l'aide est accordée à l'entreprise dont la salariée est en congé de maternité et qui embauche des salariés d'entreprise temporaire pour la remplacer. Ce n'est pas pareil.
De plus, comme ce remplacement est temporaire, il n'est pas utile d'indiquer que le remplacement est assuré par une personne recrutée en CDI, alors que, précisément, un congé de maternité ou d'adoption a vocation à être provisoire.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 34 et 73. L'objet de l'article 7 est d'aider les petites entreprises à accompagner le congé de maternité de l'une de leurs salariées en leur permettant, le cas échéant, de faire face au surcoût lié à son remplacement. Il s'agit donc d'une disposition incitative à l'embauche des femmes.
Quant à l'amendement de repli n° 35, rien ne justifie de priver les employeurs qui ont légalement recours aux contrats de travail temporaire de l'aide financière instaurée par cette loi. Le Gouvernement y est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 34 et 73.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article additionnel après l'article 7
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 36, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 122-26-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les absences pour maladie liées à l'état de grossesse sont assimilées à une période de travail effectif dans des conditions fixées par décret. »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Par cet amendement, il s'agit de préciser que les absences pour maladie liées à la maternité sont assimilées à une période de travail effectif dans des conditions fixées par décret.
L'expérience montre qu'une femme enceinte peut se trouver contrainte d'arrêter son travail en dehors de la période de congé pathologique alors que son affection est liée à sa grossesse.
Nous défendons cet amendement qui a déjà été présenté à l'Assemblée nationale parce qu'aucune réponse n'avait alors été apportée. La ministre de l'époque, Mme Nicole Ameline, a parlé du congé pathologique, ce que cet amendement ne vise absolument pas.
Nous prenons plutôt l'exemple, fréquent chez les femmes enceintes, de maux de dos, sans que ceux-ci surviennent pendant la période de congé pathologique. Dans ce cas, les femmes ne bénéficient pas de la même protection, alors que la cause est la même.
Cet amendement vise à améliorer la protection des femmes enceintes afin que tout arrêt maladie reconnu par l'assurance maladie comme étant lié à sa grossesse soit assimilé à une période de travail effectif.
M. le président. L'amendement n° 74, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 122-26-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les absences pour maladie liées à la maternité, notamment les congés pathologiques, sont assimilées à une période de travail effectif. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à assimiler les absences pour maladie liées à la maternité à une période de travail effectif.
Il s'agit d'améliorer la protection des femmes enceintes afin que tout arrêt maladie reconnu par l'assurance maladie comme étant lié à la grossesse soit assimilé à une période de travail effectif.
L'adoption d'une telle mesure aurait d'importantes conséquences : d'une part, en matière d'augmentation de salaires, au titre de l'article 1er du projet de loi ; d'autre part, en matière de retraite, compte tenu de l'augmentation du nombre de trimestres requis pour bénéficier d'une retraite à taux plein.
Mme Hélène Luc. Oui !
M. Guy Fischer. En effet, en l'état actuel des choses, une femme qui aurait eu plusieurs grossesses au cours de sa carrière professionnelle peut être gravement désavantagée au moment du calcul de sa retraite.
Une femme enceinte peut en effet se trouver contrainte d'arrêter son travail en dehors de la période dite de « congé pathologique ». Or, dans l'état actuel du droit, un tel arrêt de travail n'est pas assimilé à une période de travail effectif.
Voilà donc une mesure concrète et simple d'application...
M. Alain Gournac, vice-président de la commission des affaires sociales. Avec la planche à billets !
M. Guy Fischer. ...dont les conséquences bénéficieraient aux femmes salariées.
C'est pourquoi nous vous invitons à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'amendement n° 36 vise à considérer les périodes d'absence pour maladies liées à la grossesse comme du temps de travail effectif.
Dès lors qu'une absence pour maladie est liée à la maternité, elle est définie comme un congé pathologique et bénéficie d'un traitement social particulier. Le Gouvernement avait confirmé, lors des débats à l'Assemblée nationale, que cette absence était prise en charge par l'assurance maladie et assimilée à du temps de travail effectif.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 36 ainsi qu'à l'amendement n° 74.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 8
Le III de l'article L. 932-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'un accord de branche le prévoit, une majoration d'au moins 10 % de l'allocation de formation est accordée au salarié qui engage des frais supplémentaires de garde d'enfant afin de suivre une action de formation en dehors de son temps de travail. Pour l'application de la législation de sécurité sociale, cette majoration ne revêt pas le caractère de rémunération au sens du deuxième alinéa de l'article L. 140-2 du présent code, de l'article L. 741-10 du code rural et de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 37 est présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 75 est présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour compléter le III de l'article L. 932-1 du code du travail, remplacer les mots :
une majoration d'au moins 10 % de l'allocation de formation
par les mots :
une indemnité correspondant aux frais supplémentaires de garde d'enfants
II. En conséquence, dans la seconde phrase du même texte, remplacer le mot :
majoration
par le mot :
indemnité
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° 37.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement vise à améliorer le texte proposé en le rendant plus proche de la réalité. Prévoir une majoration d'au moins 10 % de l'allocation de formation accordée au salarié qui engage des frais supplémentaires de garde d'enfant afin de suivre une formation en dehors de son temps de travail est une idée louable à laquelle nous souscrivons.
Le texte indique d'ailleurs que cette majoration sera « d'au moins 10 % ». Elle peut donc être supérieure. Il est cependant à craindre que cela ne soit assez peu souvent le cas. L'objet de cet amendement est donc de préciser que la majoration doit correspondre aux frais supplémentaires de garde d'enfant engagés par le salarié.
M. Alain Gournac, président de la commission des affaires sociales. Toujours plus !
Mme Gisèle Printz. Ainsi, le salarié qui suit une formation ne sera pas pénalisé financièrement, alors qu'il doit déjà suivre cette formation en plus de son temps de travail.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 75.
Mme Annie David. Depuis quatre décennies, le renouvellement des forces de travail dans notre pays s'est entièrement accompli par la croissance de l'activité féminine, tout le monde l'a souligné. Les femmes sont devenues l'élément actif du marché du travail. Ce phénomène se vérifie partout en Europe puisque, dans les années soixante, les femmes représentaient 30 % de la population active européenne, alors qu'elles en représentent aujourd'hui 43 %.
Pour la sociologue Margaret Maruani, cette évolution est sous-tendue par deux facteurs majeurs : la salarisation de la main-d'oeuvre féminine et la continuité des trajectoires professionnelles des femmes. Aujourd'hui - et c'est vrai depuis 1975 -, les femmes ont accéléré le mouvement de salarisation du monde du travail.
Ces changements ont bien évidemment eu aussi des répercussions sur les trajectoires professionnelles. Dans les années soixante, la majorité des femmes s'arrêtaient de travailler lorsqu'elles avaient des enfants. Le taux d'activité des femmes âgées de 25 ans à 49 ans était à l'époque de 40 %, alors qu'il s'élève aujourd'hui à 80 %. En d'autres termes, dans leur majorité, les femmes ne s'arrêtent plus de travailler à la naissance de leurs enfants. Cela n'est pas vrai, je le précise, pour nombre de pays qui nous entourent, notamment l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas.
C'est donc dans la tranche d'âge comprise entre 25 ans et 49 ans que l'activité féminine a véritablement explosé. En outre, ce sont les mères de famille qui ont assuré l'essentiel de la croissance de la population active.
Cette évolution concerne également les places des femmes et des hommes dans le système de formation. Elle se traduit par une percée des scolarités féminines telle que, aujourd'hui, le niveau scolaire et universitaire des femmes est, en France, supérieur à celui des hommes.
Malgré tout, les femmes se voient encore obligées de cumuler tâches professionnelles et tâches domestiques. Dans bien des cas - surtout pour les familles monoparentales -, cette contrainte est très lourde et limite les possibilités de progression professionnelle et de formation des femmes.
Cela est particulièrement vrai dans le cas d'emplois peu qualifiés et faiblement rémunérés. L'accès à la formation pouvant être suivie en partie en dehors du temps de travail est rendu difficile du fait des frais supplémentaires de garde d'enfant qu'elle engendre. L'article 8 prévoit donc que les heures supplémentaires de garde seront partiellement compensées par une majoration de 10 % de l'allocation de formation.
Par cet amendement, nous vous proposons d'aller plus loin et de rendre réellement possible la formation professionnelle pour les mères de familles en leur permettant de se voir intégralement indemnisés les frais supplémentaires de garde d'enfant liés à leur formation professionnelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Les amendements identiques nos 37 et 75 visent à remplacer la majoration de 10 % de l'allocation de formation pour garde d'enfant par le remboursement des frais de garde. Il est difficile de mettre en application un tel dispositif. Faudrait-il que, sur présentation de justificatifs de frais, un remboursement soit effectué ? Nous savons tous que les justificatifs ne sont pas très fiables.
Par ailleurs, le relèvement de l'allocation prévu à l'article 8 du projet de loi reprend le voeu exprimé par les partenaires sociaux dans l'accord national interprofessionnel. Les dispositions de cet article vont même plus loin puisque le relèvement est non pas de 10 % mais « d'au moins 10 % ». Cela laisse donc la possibilité aux branches de proposer un relèvement bien supérieur.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements identiques. Je souhaiterais souligner le coût de gestion lié à l'examen des justificatifs.
Par ailleurs, le caractère forfaitaire de la disposition prévue par l'article 8 me semble très juste dans la mesure où il permet d'éviter d'examiner les différents modes de garde choisis.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 37 et 75.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
I. - Le I de l'article 244 quater F du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le c et le d deviennent respectivement le d et un e ;
2° Le c est ainsi rétabli :
« c. Des dépenses de formation engagées par l'entreprise en faveur de nouveaux salariés recrutés à la suite d'une démission pendant un congé parental d'éducation mentionné à l'article L. 122-28-1 du code du travail, lorsque cette formation débute dans les trois mois qui suivent le terme de ce congé ; ».
II. - Les dispositions du c de l'article 244 quater F du code général des impôts s'appliquent aux formations qui commencent à compter de la publication de la présente loi.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le 2° du I de cet article pour le c. du I de l'article 244 quater F du code général des impôts,
I. - après le mot :
démission
insérer les mots :
ou d'un licenciement
II. - remplacer les mots :
qui suivent le terme de ce congé
par les mots :
de l'embauche
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise, d'une part, à rendre éligibles au crédit d'impôt famille les dépenses de formation engagées par les entreprises en faveur des salariés recrutés à la suite d'un licenciement pendant le congé parental d'éducation.
En effet, un licenciement économique, sans lien avec le congé de la salariée, peut intervenir de manière collective. Dans ce cas, si les autres salariés bénéficient de mesures de reclassement, les salariés, qui étaient en congé parental pendant trois ans et donc déconnectés de la vie de l'entreprise, ont un besoin de formation encore plus important que les autres, ce qui justifie que le crédit d'impôt famille s'applique aux entreprises qui les recrutent.
L'amendement tend, d'autre part, à ouvrir cette disposition aux formations ayant lieu dans les trois mois suivant l'embauche dans la nouvelle entreprise afin de préserver les chances d'une meilleure réinsertion professionnelle des salariés qui auront, entre deux emplois, connu une période de chômage plus longue que le délai prévu à l'article 9.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Article 10
I. - L'article L. 123-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Dans le b, les mots : « ou de la situation de famille » sont remplacés par les mots : «, de la situation de famille ou de l'état de grossesse » ;
2° A la fin du même b, les mots : « ou la situation de famille » sont remplacés par les mots : «, la situation de famille ou l'état de grossesse » ;
3° Au c, après les mots : « prendre en considération du sexe », sont insérés les mots : « ou de l'état de grossesse » ;
4° A la fin de la première phrase de l'avant-dernier alinéa, les mots : « ou la situation de famille » sont remplacés par les mots : «, la situation de famille ou l'état de grossesse ».
II. - Dans le premier alinéa de l'article 225-1 du code pénal, après les mots : « de leur situation de famille, », sont insérés les mots : « de leur état de grossesse, ».
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Dans le I de cet article, remplacer (quatre fois) les mots :
l'état de grossesse
par les mots :
la grossesse justifiée par un certificat médical
II.- En conséquence, dans le II de cet article, remplacer les mots :
état de grossesse
par les mots :
grossesse justifiée par un certificat médical
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. C'est un amendement de coordination avec l'amendement présenté par la commission à l'article 2 du projet de loi. Il tend à préciser que l'employeur n'est passible de poursuite pour discrimination que s'il avait connaissance de la grossesse de la salariée contre laquelle il a pris une décision.
Dans la mesure où notre assemblée a adopté tout à l'heure, à l'article 2, un amendement tout à fait identique, j'espère que, par coordination, elle soutiendra la position de notre commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement a un peu de mal à se faire comprendre sur un amendement de ce type. Je vais essayer encore de vous convaincre.
Chacun ici sait bien que la maternité en tant que telle n'est pas une maladie. Par ailleurs, l'amendement qui vient de nous être présenté semble contraire aux dispositions du code du travail.
En effet, l'employeur ne peut pas rechercher ou faire rechercher toute information sur l'état de grossesse de l'intéressée. En outre, il ne doit surtout pas - car là est le risque de dérive - prendre en compte cet état pour refuser une embauche ou pour résilier le contrat de travail.
Ce sont ces éléments qui nous interpellent dans la mesure où ils constitueraient un risque de dérive. Pour ces raisons, le droit de laisser à la femme la possibilité d'alerter son employeur par tout moyen et de ne pas se voir imposer un mode de preuve particulier nous semble extrêmement important. Si l'employeur est au courant de la grossesse, l'absence de certificat médical ne saurait faire obstacle à la protection de la salariée contre la discrimination. Une fois encore, je demanderai le retrait de cet amendement.
M. le président. Madame le rapporteur, l'amendement n° 18 est-il maintenu ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Par coordination avec l'amendement qui a été adopté à l'article 2, je ne peux retirer le présent amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
Au premier alinéa de l'article L. 122-30 du code du travail, la référence : « L. 122-28-7 » est remplacée par la référence : « L. 122-28-10 ». - (Adopté.)
Article 12
L'article L. 223-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les salariés de retour d'un congé de maternité ou d'adoption visé à l'article L. 122-26 ont droit à leur congé payé annuel, quelle que soit la période de congé payé retenue, par accord collectif ou par l'employeur, pour le personnel de l'entreprise. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 12
M. le président. L'amendement n° 47, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L 122-28-1 du code du travail est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Dans le cas où le salarié ne fait pas valoir son droit à prolongation, il conserve le bénéfice de celui-ci et peut le faire valoir en cas de nécessité familiale, à tout moment, dans la limite de la période obligatoire de scolarisation. Le congé parental et la période d'activité à temps partiel sont transférables en cas de démission et de licenciement, sauf pour faute grave ou faute lourde. »
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Aujourd'hui, le congé parental d'éducation et la période d'activité à temps partiel prennent fin au plus tard au troisième anniversaire de l'enfant. Si le salarié ou la salariée n'use pas de la totalité de son droit, le bénéfice de celui-ci tombe aux trois ans de l'enfant.
Or, si la présence parentale est nécessaire durant la petite enfance, elle peut l'être tout autant à d'autre moment de la vie. La période charnière et parfois malheureusement critique de la vie de l'enfant qu'est l'adolescence nécessite, de la part des parents, un encadrement et une disponibilité plus soutenus.
De façon à permettre aux familles de surmonter ces périodes délicates, il convient de rendre possible le fractionnement du droit au congé parental et l'allocation qui l'accompagne ou la période d'activité à temps partiel. Ainsi, le salarié ou la salariée qui n'a pas utilisé la totalité de son droit pourra en bénéficier au-delà du troisième anniversaire de l'enfant. Par ailleurs, le salarié ou la salariée doit pouvoir conserver le bénéfice de ce droit en cas de changement d'entreprise.
Tel est le sens de l'amendement que nous vous proposons d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'intention est louable. Toutefois, il conviendrait d'évaluer les conséquences pratiques et les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif dans les entreprises. En effet, ces dernières n'ont pas besoin d'affronter des difficultés administratives supplémentaires, pourtant inévitables dans ce genre de cas !
Je vous propose de nous en remettre à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement comprend bien le sens de l'amendement proposé. Pour autant, il faut être conscient de ce qui nous anime : nous souhaitons non seulement conjuguer vie professionnelle et vie familiale et personnelle mais également faciliter l'employabilité des femmes.
Fractionner le congé parental jusqu'aux seize ans de l'enfant revient à laisser aux parents la possibilité de prendre ce congé lorsqu'ils le souhaitent. En d'autres termes, au moment où la femme recherchera un travail, on lui posera une nouvelle question : « Au fait, ne vous reste-t-il pas un peu de congé parental à prendre ? ».
Selon nous, un tel dispositif éloignerait encore une fois la femme de l'emploi à un moment où nous souhaitons au contraire mettre en place des passerelles entre l'emploi et la vie familiale.
C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Le taux de suicide des adolescents est en perpétuelle augmentation et constitue la première cause de mortalité de cette classe d'âge. Aussi, je soutiendrai cet amendement.
En effet, à une période difficile de la vie de certains de nos jeunes, il est important que des parents, le père ou la mère, puissent se libérer de leurs activités, pour être aux côtés de leur enfant. Il s'agit de se libérer de ses obligations professionnelles non pas pour exercer une quelconque activité charitable mais bien pour accompagner ces jeunes qui ont parfois les plus grandes difficultés à affronter la période de l'adolescence.
Nous sommes aujourd'hui amenés à débattre de l'égalité salariale entre les femmes et les hommes. Or, dans beaucoup d'entreprises, ce sont bien souvent les femmes qui sont obligées de démissionner à l'adolescence de leurs enfants. Elles perdent très souvent leur emploi sans pouvoir bénéficier d'aucun droit, car cela se fait toujours dans la précipitation. En effet, de telles périodes ne sont pas annoncées.
Si une femme ou un homme pouvait, à un moment donné, s'absenter de son emploi en étant sûr de le retrouver, cela aiderait sans doute quelques-uns de nos jeunes à vivre cette période difficile.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la ministre, j'ai bien entendu vos remarques, je les comprends fort bien.
Vous évoquez l'employabilité des femmes qui serait ainsi rendue difficile. Cependant, comme nous intervenons sur l'égalité salariale entre les hommes et les femmes, nous pouvons donc également parler de l'employabilité des hommes.
En tout état de cause, je maintiens cet amendement, mesurant bien les problématiques qui en résultent mais retenant aussi tout l'intérêt qu'il revêt pour les familles, et notamment pour tous ces jeunes que la vie moderne rend sans doute parfois un petit peu plus fragiles.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 12 bis
La dernière phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 620-10 du même code est complétée par les mots : «, notamment du fait d'un congé pris en application des articles L. 122-26 ou L. 122-28-1 ». - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 12 bis
M. le président. L'amendement n° 49 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Cambon et Etienne, est ainsi libellé :
Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 122-28-1 du code du travail, il est inséré deux phrases ainsi rédigées :
« S'il s'avère que le salarié est dans l'impossibilité de faire intégrer son enfant à l'école maternelle alors qu'il a atteint trois ans, qu'il n'a aucun mode de garde possible, le congé parental peut être prorogé de plein droit pour une durée de six mois maximum et ce, jusqu'à la date de la rentrée scolaire. Cette prorogation est sans effet sur l'extinction du droit à l'allocation parentale d'éducation, laquelle prend fin aux trois ans de l'enfant. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Par cet amendement, il s'agit non pas de proroger systématiquement de six mois les congés parentaux des salariés, mais de résoudre un problème pratique qui se pose dans quelques cas.
En l'occurrence, à l'issue d'un congé parental de trois ans prenant fin en février, mars ou avril, jamais un enfant ne trouvera une place à l'école puisque cette dernière n'accepte pas les enfants en cours d'année ; c'est le cas dans la plupart des villes à partir de l'hiver ou du printemps. En outre, lorsque les entreprises ont accordé un congé parental de trois ans, elles ne sont plus à quatre ou six mois près ! Ce n'est pas, pour elles, une véritable préoccupation.
Mon assistante et moi-même avons rencontré beaucoup de difficultés pour trouver des chiffres concernant le nombre de congés parentaux. En 2004, il y a eu 176 330 prestations jeune enfant avec complément de choix d'activité. En ne retenant que les enfants nés entre les mois de janvier et de juin, environ 1 % de la population en congé parental pourrait être concerné par la situation mentionnée.
L'idée principale est de préserver l'emploi. Nous avons tous rencontré, lors de nos permanences, des femmes ou des hommes complètement démunis parce qu'ils devaient reprendre leur activité et n'avaient trouvé aucun mode de garde. En effet, un enfant de trois ans ne peut entrer à l'école en cours d'année ; il ne peut pas non plus entrer à la crèche, l'âge étant dépassé. Or, en ville, on connaît les problèmes de garde et d'assistants maternels !
L'amendement tend donc à prévoir la possibilité de demander une prolongation du congé parental sur justificatif. Il ne s'agit pas de n'importe quel justificatif, puisque celui-ci ne peut être émis que par la mairie ou par l'école, deux institutions auxquelles on peut faire confiance.
Pour ces raisons, je souhaiterais que cet amendement soit adopté : il résoudrait quelques situations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement nous paraît relever du bon sens et semble utile pour concilier vie familiale et vie professionnelle. Il est d'autant plus recevable qu'il ne génère pas de coût financier supplémentaire.
Il s'agit de résoudre un problème crucial pour nombre de familles, problème que les maires, qui sont au contact de la population, ressentent clairement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Lorsqu'il s'agit d'arranger les uns et les autres, le Gouvernement est toujours prêt. Pour autant, madame la sénatrice, il y a une chose qui m'interpelle : ce sont principalement les mères qui demanderont une prolongation du congé parental ! En reculant l'échéance de six mois supplémentaires, ne les éloigne-t-on finalement pas encore un peu plus de l'emploi ?
Il y a un moment où les mères vont probablement devoir suivre une formation, essayer de retrouver un emploi. Je sais bien que, lorsque l'on est face à un problème de garde d'enfant, on ne laisse pas l'enfant tout seul. Mais, dans cette situation, il y a un recours ! En effet, un autre texte, la loi relative au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, permet incontestablement d'opérer la jonction entre la fin du congé parental et la scolarisation de l'enfant. Ce texte permet à des personnes de prendre le relais au moment où la femme souhaite et doit retravailler.
Pour autant, sur un tel amendement, même si, selon moi, le père peut prendre le relais, la garde des enfants étant l'affaire non pas exclusivement de la mère, mais du couple, comme vous l'avez très bien dit tout à l'heure, madame Morin-Desailly, je laisse la sagesse du Sénat s'exprimer, en faisant part tout de même de mes très grandes réserves.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12 bis.
Article additionnel avant l'article 12 ter
M. le président. L'amendement n° 97, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 12 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase de l'article L. 933-1 du code du travail est supprimée.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet article concerne le DIF, ce fameux nouveau droit individuel à la formation accordé aux salariés, femmes ou hommes. Comme, je l'ai vigoureusement dénoncé lors du débat parlementaire sur ce sujet, la notion de prorata temporis attachée à ce nouveau droit est particulièrement discriminante pour les personnes travaillant à temps partiel, notamment les femmes.
En général, ce temps partiel leur est imposé - nous l'avons vu - et ne correspond donc pas à leur libre choix.
En revanche, la durée de formation est la même pour toutes et tous, que la personne soit salariée à temps partiel ou à temps complet. Cela signifie que la salariée ou le salarié à temps partiel devra acquérir plus d'années d'ancienneté dans l'entreprise pour avoir droit au même temps de formation et à la même possibilité d'évolution vers un poste plus intéressant.
Eu égard à notre volonté d'assurer l'égalité des droits pour l'ensemble des salariées et des salariés, cette notion de temps partiel attachée au temps de formation est vraiment inacceptable, d'autant que le DIF - nous l'avons dit voilà un instant - peut également s'exercer en dehors du temps de travail.
C'est donc une double peine qui est imposée aux femmes salariées : non seulement, en effet, elles sont à temps partiel et auront donc une formation à temps partiel, mais, de plus, il leur faudra accomplir cette formation en dehors de leur temps de travail, ce qui ne va pas non plus leur faciliter la tâche.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission des affaires sociales, saisie au fond du projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, avait approuvé ce mode de calcul prorata temporis.
Mme Annie David. Je m'en souviens bien !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Elle est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 97.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 12 ter
L'article L. 933-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le calcul des droits ouverts au titre du droit individuel à la formation, la période d'absence du salarié pour un congé de maternité ou d'adoption est prise en compte. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 19, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article:
I. - Le second alinéa de l'article L. 122-28-6 du code du travail est supprimé.
II. - L'article L. 933-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le calcul des droits ouverts au titre du droit individuel à la formation, la période d'absence du salarié pour un congé de maternité, d'adoption, de présence parentale ou pour un congé parental d'éducation est prise en compte. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à mettre la disposition prévue à cet article en conformité avec l'accord national sur la formation, signé par les partenaires sociaux en 2003, en permettant que la période d'absence du salarié qui a bénéficié d'un congé lié à la maternité soit prise en compte pour le calcul de ses droits au titre du droit individuel à la formation, le DIF.
Les mesures contenues dans ce projet de loi se limitent, en effet, au congé de maternité et au congé d'adoption, tandis que l'article L. 122-8-6 du code du travail, issu de la loi de programmation pour la cohésion sociale, vise le congé de présence parentale et le congé parental d'éducation.
Dans un souci de plus grande clarté, je propose la fusion de ces deux textes.
Dans le même temps, nous en profiterions pour préciser que tous les congés liés à la maternité ouvrent droit au DIF, ce dont semblent douter les acteurs sociaux à la lecture de la loi de programmation pour la cohésion sociale. Celle-ci est en effet confuse sur ce point et certains directeurs des ressources humaines refuse d'appliquer le DIF aux femmes de retour de congé, alors que c'est précisément pour elles que le dispositif est le plus nécessaire.
M. le président. Le sous-amendement n° 93, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après les mots :
la période d'absence du salarié
rédiger comme suit la fin du texte proposé par le II de l'amendement n° 19 pour compléter l'article L. 933-1 du code du travail :
est notamment prise en compte pour un congé de maternité, d'adoption, de présence parentale ou pour un congé parental d'éducation. »
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement, s'il approuve l'amendement n° 19, souhaite toutefois le rendre plus clair et c'est pourquoi il propose ce sous-amendement, qui est purement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 933-1 du code du travail, après les mots :
ou d'adoption
insérer les mots :
ou pour un congé maladie lié à l'état de grossesse
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement va dans le même sens que celui de Mme le rapporteur et, me semble-t-il, le complète.
Je regrette que mon amendement précédent n'ait pas été adopté, mais je m'y attendais.
S'il est vrai que, par cet article et par les amendements que vous proposez, vous permettez que l'état de grossesse ne soit pas davantage pénalisant, en assimilant le congé lié à la maternité à du temps de travail effectif, ce qui est une bonne chose, qu'en est-il du congé maladie lié à l'état de grossesse ?
Il sera désormais assimilé à un congé pathologique, l'amendement n° 56 que je vous ai proposé en début de séance ayant été adopté, et je m'en réjouis. En effet, comme je l'ai déjà souligné, les congés maladie liés à l'état de grossesse, quelle que soit leur durée, doivent être considérés, à l'instar du congé maternité, comme une suspension de travail et doivent donc ouvrir les mêmes droits, notamment en termes d'ancienneté.
Dans la continuité, le présent amendement pourrait, lui aussi, être adopté, puisqu'il vise à ce que, dans le calcul de l'ancienneté à accorder aux femmes demandeuses d'un DIF, soient prises en compte également les périodes de maladie liées à leur état de grossesse. Ainsi, les femmes qui, du fait de la mise au monde de leur enfant, auraient dû prendre un congé maladie supplémentaire ne seraient pas pénalisées.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 93 et sur l'amendement n° 76 ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Par son sous-amendement, le Gouvernement n'ajoute que l'adverbe « notamment », afin, je le suppose, de ne pas exclure d'autres types de congés parentaux.
La liste des congés cités dans notre amendement concerne bien tous les types de congés parentaux. Si le Gouvernement pense que tel n'est pas le cas, mieux vaudrait qu'il le dise clairement, plutôt que d'ajouter cet adverbe, que les membres des commissions permanentes du Sénat n'aiment pas beaucoup !
Que le Gouvernement nous dise clairement quels sont les autres congés qu'il entend viser à travers ce « notamment », et nous pourrions alors rectifier notre amendement en conséquence. Sinon, nous préférons notre texte.
Quant à l'amendement n° 76, il traite d'une question sur laquelle nous nous sommes déjà prononcés tout à l'heure, lors de l'examen de l'amendement n° 36 : même avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 19 et 76 ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 19.
En revanche, il est défavorable à l'amendement n° 76, parce que, l'article L. 933-1 du code du travail couvrant tous les cas de suspension du contrat de travail, le congé maladie est considéré comme le congé de formation. C'est pourquoi il n'a pas semblé utile au Gouvernement de le citer.
Je réponds à présent à Mme le rapporteur : dans notre sous-amendement n° 93, l'adverbe « notamment » concerne les congés de formation et de maladie.
M. Alain Gournac, président de la commission des affaires sociales. Nous pouvons l'écrire !
M. le président. Le sous-amendement n° 93 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 19.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 12 ter est ainsi rédigé et l'amendement n° 76 n'a plus d'objet.
TITRE III
ACCÈS DES FEMMES À DES INSTANCES DÉLIBÉRATIVES ET JURIDICTIONNELLES
Article 13
La loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public est ainsi modifiée :
1° Après le quatrième alinéa de l'article 5, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les représentants relevant du 1° et les personnalités relevant du 2° sont désignés en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes. Chaque catégorie comprend une proportion de représentants de chacun des deux sexes ne pouvant être supérieure à 80 %. L'écart de représentation entre les sexes dans chaque catégorie est supprimé dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes.
« Dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la même loi, les représentants des salariés relevant du 3° sont élus sur des listes qui respectent, à l'unité près, la proportion de femmes et d'hommes parmi les salariés électeurs. » ;
2° L'article 6 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les membres du conseil d'administration ou de surveillance sont nommés en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes. La proportion de représentants de chacun des deux sexes ne peut être supérieure à 80 %. L'écart de représentation entre les sexes dans chaque catégorie est supprimé dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes.
« Dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la même loi, les représentants des salariés sont élus sur des listes qui respectent, à l'unité près, la proportion de femmes et d'hommes parmi les salariés électeurs. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 13
M. le président. L'amendement n° 77, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 432-3-1 du code du travail, après les mots : « la situation respective des femmes et des hommes » sont insérés les mots : « en matière de candidature »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Comme mes collègues et moi-même l'avons déjà dit, ces dernières années ont vu se développer non seulement la féminisation de la population active, mais aussi un surchômage féminin, qui s'est solidement incrusté dans le paysage social.
Or force est de constater qu'un silence total règne sur cette question. Tous les mois, les courbes du taux de chômage sont commentées comme si elles constituaient une sorte de baromètre social, ce qui, d'ailleurs, n'est pas faux. Ainsi, on distingue le taux de chômage des jeunes, le taux de chômage des seniors, le taux de chômage des cadres, celui des personnes qualifiées et celui des personnes moins qualifiées, mais on ne parle jamais du chômage des femmes.
Pourtant, selon l'enquête la plus récente de l'INSEE, en 2002, si le taux de chômage global est de 8,9 % - il atteint à l'heure actuelle10, 2 % - il est de 7,9 % pour les hommes et de 10,1 % pour les femmes. La différence est encore plus forte chez les moins de vingt-cinq ans : 18 % de chômeurs chez les hommes contre 23 % chez les femmes. Ces chiffres illustrent bien la sélectivité du marché du travail, car c'est précisément chez les moins de vingt-cinq ans que les taux de chômage devraient accuser de moindres écarts entre les hommes et les femmes.
Il s'agit, en effet, de générations où les filles sont plus diplômées que les garçons, comme cela a été répété tout au long de la journée, et d'une tranche d'âge où l'effet famille ne joue pas, puisque la première maternité, en France, intervient en moyenne à vingt-neuf ans. Si les femmes ne travaillent pas, c'est non pas parce qu'elles ont des enfants ou sont moins diplômées, mais parce que le marché du travail filtre, sélectionne et produit de la discrimination, de la ségrégation.
Si l'on s'intéresse aux inégalités entre les hommes et les femmes dans le monde du travail, il faut donc nécessairement s'intéresser aux inégalités dans l'accès même à ce monde du travail.
L'article L. 432-3-1 du code du travail prévoit que le chef d'entreprise est obligé de soumettre un rapport sur la situation d'emploi et de formation des femmes et des hommes dans l'entreprise. Ce rapport doit reposer sur une liste d'indicateurs pertinents auxquels nous proposons d'ajouter un indicateur concernant les candidatures. En effet, cela permettrait, selon nous, de rendre publiques les possibles ségrégations qui ont lieu au moment même de l'embauche, lorsque, généralement, l'employeur privilégie la candidature d'un homme à celle d'une femme pour les raisons dont nous avons parlé précédemment.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La rédaction de l'amendement n'est malheureusement pas tout à fait conforme à l'esprit qui le sous-tend. Il conviendrait de préciser les domaines dans lesquels postulent les femmes, à savoir les élections professionnelles et les instances de décision.
Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 77.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 13 bis
Après le premier alinéa de l'article L. 225-17 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil d'administration est composé en recherchant une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. Il comprend un nombre de représentants de chacun des deux sexes ne pouvant être supérieur à 80 %, et au moins un représentant de chaque sexe lorsque le nombre total des membres est inférieur à cinq. »
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-17 du code de commerce :
Le règlement intérieur du conseil d'administration prévoit les mesures permettant d'atteindre cet objectif.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Si l'Etat est libre de décider de la composition des instances dirigeantes de ses entreprises publiques - article 13 du projet de loi -, il n'est toutefois pas opportun de soumettre les conseils d'administration des grandes entreprises privées à une obligation chiffrée de parité. Une telle obligation constituerait une ingérence dans le fonctionnement de leurs organes de direction et pourrait s'avérer complexe à mettre en oeuvre dans de nombreuses sociétés anonymes, notamment lorsque les représentants des actionnaires majoritaires revendiquent tous les mandats d'administrateurs.
La plupart des personnels des organes dirigeants ne sont pas des salariés ; ce sont des mandataires sociaux, extérieurs à l'entreprise et non rémunérés. Pour ces publics, seule leur compétence à définir la stratégie de l'entreprise est décisive.
C'est la raison pour laquelle une formulation plus souple est préférable, pour donner à ces entreprises des objectifs de parité, sans quotas, comme cela est prévu à l'article 3 bis pour les petites entreprises.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 13 bis, modifié.
(L'article 13 bis est adopté.)
Article 13 ter
Après le huitième alinéa de l'article L. 433-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces listes respectent, à l'unité près, dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, la proportion d'hommes et de femmes de chaque collège électoral. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 99, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le huitième alinéa de l'article L. 433-2 du code du travail est complété par les mots : « et notamment dans chaque collège électoral ».
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Cet amendement a pour objet de faire progresser le nombre de femmes élues au sein des comités d'entreprise sans pour autant instaurer aujourd'hui une obligation de résultat.
En effet, nous mesurons combien le monde du travail a besoin de s'approprier ce nouvel enjeu, défini dans une loi extrêmement récente. Il nous semble prématuré, à ce stade, comme le prévoit l'article 13 ter, d'instaurer une obligation de résultat d'ici à cinq ans. Nombreux sont en effet les partenaires sociaux qui ne cachent pas qu'il est difficile d'évoluer sur ce sujet.
Même si le Gouvernement souhaite que les partenaires sociaux, comme l'ensemble des partenaires, se mobilisent sur ce sujet pour faire avancer la représentation des femmes, devons-nous fixer des objectifs inatteignables ou choisir la voie de la raison ?
Avec cet amendement, le Gouvernement opte pour la voie de la raison. Pour autant, il incite fortement les partenaires sociaux à permettre aux femmes de prendre plus de responsabilités, et ce dans les meilleurs délais.
M. le président. L'amendement n° 78, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour insérer un alinéa après le huitième alinéa de l'article L. 433-2 du code du travail, remplacer les mots :
dans un délai de cinq ans à compter de
par les mots :
dès les premières élections qui suivent
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Les articles 13 ter et 13 quater introduits par l'Assemblée nationale, sur proposition de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, visent tous deux à garantir une représentation équilibrée des salariés des deux sexes dans les instances représentatives du personnel dans l'entreprise.
Nous ne pouvons, bien évidemment, que nous satisfaire de ce pas en avant volontaire, et nécessaire, comme en témoignent les avancées obtenues grâce à une contrainte et non simplement grâce à la volonté de convaincre.
Toutefois, une interrogation légitime demeure, mes chers collègues, sur le délai retenu - cinq ans - à l'issu duquel les organisations syndicales représentatives devront présenter des listes respectant, à l'unité près, une stricte proportion d'hommes et de femmes dans chaque collège pour les élections des comités d'entreprise et des délégués du personnel.
Vous nous dites, madame la ministre, qu'il s'agit là d'un délai raisonnable. Or celui-ci est, selon nous, un peu long. En effet, aux termes de la loi du 9 mai 2001, les organisations syndicales auraient déjà dû prendre des initiatives dans le sens de la parité. Nous préférons donc retenir comme échéance les prochaines élections.
Par ailleurs, madame la ministre, les dispositions que vous proposez nous incitent à la plus grande prudence. Elles ne sauraient en effet nous faire oublier vos intentions réelles concernant le devenir des institutions représentatives du personnel, que ce gouvernement n'a de cesse de vouloir torpiller, à la plus grande satisfaction du MEDEF, comme en témoigne la modification introduite dans le projet de loi relatif aux petites et moyennes entreprises, aux termes de laquelle la fréquence des élections aux comités d'entreprise est passée de deux ans à quatre ans.
En outre, cet affichage en faveur de la gestion par les salariés des questions les intéressant directement ne saurait effacer l'attitude plus que complaisante du Gouvernement s'agissant des dérives constatées actuellement en matière de licenciements de salariés protégés, dont le nombre est en hausse, et des peines et des sanctions infligées à l'occasion de conflits sociaux.
Ce contexte, peu propice à l'exercice des libertés syndicales, me contraint à relativiser l'apport de l'article 13 ter.
Telles sont les observations que je tenais à formuler sur cet amendement. Ces explications valent également pour l'amendement n° 79.
Enfin, je tiens à rappeler des faits d'actualité extrêmement graves. Nous avons appris, il y a quelques jours, le licenciement de six délégués de la CGT et de Sud, les postiers de Bègles. Chacun a lu la presse. Par ailleurs, la direction de Peugeot a engagé une demande de licenciement du secrétaire général de sa section CGT. De multiples autres atteintes aux droits des représentants du personnel et à l'activité des organisations syndicales nous conduisent à nous interroger sur les véritables intentions du Gouvernement et du patronat qu'il soutient abondamment.
Cette dernière explication vous aura permis de comprendre le sens de notre proposition et de mesurer la vigilance qui est la nôtre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'amendement du Gouvernement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, je n'y suis pas opposée. Toutefois, vous le savez, madame la ministre, nous n'aimons pas l'adverbe « notamment ». Aussi, nous vous demandons de bien vouloir le supprimer de votre amendement, car il n'apporte vraiment rien à ce texte.
Si l'amendement du Gouvernement était adopté, l'amendement n° 78 n'aurait plus d'objet.
M. le président. Madame la ministre, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par Mme le rapporteur ?
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 99 rectifié, présenté par le Gouvernement, et qui est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le huitième alinéa de l'article L. 433-2 du code du travail est complété par les mots : « et dans chaque collège électoral ».
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 78 ?
M. le président. En conséquence, l'article 13 ter est ainsi rédigé et l'amendement n° 78 n'a plus d'objet.
Article 13 quater
Après le quatrième alinéa de l'article L. 423-3 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces listes respectent, à l'unité près, dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, la proportion d'hommes et de femmes de chaque collège électoral. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 100, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le quatrième alinéa de l'article L. 423-3 du code du travail est complété par les mots : « et notamment dans chaque collège électoral ».
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. L'objet de cet amendement est similaire à celui de l'amendement n° 99 rectifié. Il concerne cette fois les comités d'entreprise.
Dès à présent, je modifie cet amendement afin de supprimer l'adverbe « notamment », comme Mme le rapporteur ne manquera pas de m'y inviter !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 100 rectifié, présenté par le Gouvernement, et qui est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le quatrième alinéa de l'article L. 423-3 du code du travail est complété par les mots : « et dans chaque collège électoral ».
L'amendement n° 79, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour insérer un alinéa après le quatrième alinéa de l'article L. 423-3 du code du travail, remplacer les mots :
dans un délai de cinq ans à compter de
par les mots :
dès les premières élections qui suivent
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Je l'ai déjà défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 100 rectifié. Elle est en revanche défavorable à l'amendement n° 79.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Madame la ministre, le troisième collège électoral est celui des cadres. Dans quatre-vingt-dix cas sur cent, celui-ci ne compte qu'un seul représentant. Ce poste est imposé, même si les effectifs ne permettent pas de dégager une représentation. Peut-être aurions-nous pu aller au bout de votre démarche et préciser que dans le cas d'un poste unique celui-ci devrait revenir à une femme ?
M. le président. En conséquence, l'article 13 quater est ainsi rédigé et l'amendement n° 79 n'a plus d'objet.
Article 14
Pour le prochain renouvellement des conseils de prud'hommes, les organisations présentant des listes de candidats devront faire en sorte de présenter une proportion de femmes et d'hommes réduisant d'un tiers, par rapport au précédent scrutin, l'écart entre la représentation du sexe sous-représenté au sein des listes et sa part dans le corps électoral, selon les modalités propres à favoriser la progression du pourcentage d'élus du sexe le moins représenté.
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par Mmes Demontes, Printz, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans cet article, supprimer les mots :
faire en sorte de
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement est à la fois sémantique et volontariste. L'écart entre le nombre de femmes et d'hommes qui seront présentés sur les listes à l'occasion du prochain scrutin prud'homal devrait, aux termes du projet de loi, être réduit d'un tiers par rapport au précédent scrutin.
Nous n'ignorons pas qu'il n'est pas toujours facile, dans un premier temps, de trouver un nombre équilibré de candidates et de candidats. Mais notre expérience des élections territoriales et politiques en général montre que l'on y parvient souvent beaucoup plus facilement qu'on ne le croit. Même si elle a suscité quelque incrédulité, la loi sur la parité a montré que l'ouverture fait naître des bonnes volontés.
Dans le cas des prud'hommes, il paraît assez clair que le problème ne se posera pas tant pour les organisations représentatives des salariés que pour les représentants des employeurs. Trop peu de femmes, en effet, sont chefs d'entreprise, ce qui peut être un obstacle sérieux pour le collège patronal.
Néanmoins, considérant la faiblesse relative de l'amélioration proposée, que l'on pourrait qualifier de très progressive, nous proposons que les organisations patronales et syndicales soient amenées plus vigoureusement à proposer des listes équilibrées.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement souligne en effet le caractère impératif de la présentation de listes paritaires à l'occasion des élections des conseils de prud'hommes. Il est vrai que l'expression « faire en sorte de » n'apporte pas grand-chose et n'est pas très juridique. L'avis est plutôt favorable, mais la commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Là encore, le Gouvernement voudrait essayer d'être concret. Notre objectif depuis ce matin est de tenter de permettre aux femmes d'accéder le plus possible aux responsabilités.
L'article 14, dans sa rédaction actuelle, introduit un objectif de progrès, similaire à celui qui avait été fixé dans la loi du 9 mai 2001 pour les élections de 2002. Cet objectif a d'ailleurs été atteint, comme le montre l'étude qui a été réalisée en 2004 à la demande du service des droits des femmes et de l'égalité et du ministère du travail.
Toutefois, les organisations professionnelles et syndicales, c'est-à-dire les organisations qui présentent les listes pour les élections prud'homales, nous expliquent qu'elles rencontrent des difficultés considérables pour trouver des candidats à ces élections.
M. Roland Muzeau. Répression anti-syndicale !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement considère qu'il est difficile d'introduire une obligation dans le projet de loi. Il souhaite toutefois mettre en avant sa détermination et la nécessité d'aller plus loin en la matière. L'expression « faire en sorte de » montre que l'alternance n'est probablement pas encore possible aujourd'hui.
Je vous demande donc, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Madame Printz, l'amendement n° 43 est-il maintenu ?
Mme Gisèle Printz. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par Mmes Printz, Demontes, Schillinger, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Godefroy, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Sur chacune des listes, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Au sein de chaque groupe entier de six candidats dans l'ordre de présentation de la liste doit figurer un nombre égal de candidats de chaque sexe.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Si nos ambitions ne sont pas sans limites, elles sont fortes. Dans le droit-fil de l'amendement précédent, nous estimons que, pour être vraiment représentatives, les listes de candidats aux élections prud'homales doivent être le plus proche possible de la réalité du monde du travail.
Or 10,8 millions de femmes travaillent, contre 9,6 millions il y a dix ans. Le taux d'activité des femmes est particulièrement élevé dans notre pays. Le taux d'activité des jeunes femmes mères d'un enfant reste de 81,4 %. Ce taux ne baisse qu'à la naissance du troisième enfant, où il passe temporairement à 36 %, avant de remonter lorsque tous les enfants sont scolarisés.
Une évidence s'impose : le monde du travail est mixte. Dans certains métiers, malheureusement les moins qualifiés, il est même féminin.
Dans ces conditions, il est nécessaire que le législateur envoie un signal fort aux partenaires sociaux et les incite fermement à permettre une représentation réellement équilibrée du monde du travail dans les conseils de prud'hommes.
Ce que nous avons fait pour les élections territoriales et générales doit pouvoir être fait par les représentants du monde du travail.
Tel est l'objet de cet amendement « parité ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. C'est l'amendement « un homme, une femme » pour la constitution des listes de candidats aux élections des conseils de prud'hommes, qui avait déjà été évoqué par M. Godefroy lors de la présentation de mon rapport en commission. Nous n'allons pas refaire ici le débat sur la parité en politique.
La commission s'en remet à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Il paraît extrêmement difficile aujourd'hui de parvenir, comme en politique, à des listes comprenant six candidats et un nombre égal de candidats de chaque sexe. En effet, les listes pour les élections prud'homales sont établies par sections, lesquelles correspondent aux grands secteurs d'activité, et par collèges. Cela pose donc une difficulté très importante.
Nous sommes ici non pas pour nous faire plaisir, mais pour être concrets. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme Gisèle Printz. Oh !
Mme Nicole Bricq. Il faut être ambitieux dans la vie !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Tout d'abord, permettez-moi de vous dire, madame la ministre, que nous ne présentons pas cet amendement pour nous faire plaisir !
Je constate que le dialogue avec le Gouvernement est vraiment très difficile. Je ne pense pas abuser du temps de parole, j'essaie de vous expliquer notre position, mais cela semble d'emblée vous fâcher !
Dans ce débat sur l'égalité salariale entre les hommes et les femmes, l'équilibre dans la répartition des sièges de conseillers prud'homaux doit être abordé. Concernant les listes politiques, il a fallu prendre des mesures très fortes avant de constater un début d'amélioration.
Madame la ministre, puisque vous m'avez interpellé, je vous fais remarquer que lorsqu'il s'agissait d'élire trois sénateurs, la proportionnelle a favorisé l'élection de femmes. Si vous remettez en cause le système existant, vous le ferez au détriment des femmes. Passons, c'est la réponse du berger à la bergère !
Cela étant dit, notre amendement est une proposition de bon sens. Nous comprenons bien la difficulté. Nous avons tous participé à la constitution de listes : on convenait qu'il fallait y faire figurer des femmes, mais l'on s'arrangeait pour qu'elles soient placées en fin de liste. Nous proposons en l'occurrence de découper les listes visées en tranches pour avoir l'assurance que, dans la première portion de la liste, puissent se trouver des femmes dans une position éligible. Madame la ministre, je le répète : ce n'est pas du tout pour nous faire plaisir que nous avons déposé l'amendement n° 38.
Je veux bien admettre que notre proposition est sans doute un peu difficile à mettre en oeuvre, mais, puisque nous examinons ce projet de loi en première lecture, réfléchissons à la possibilité de trouver une rédaction assurant que les femmes ne seront pas reléguées en fin de liste.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. En employant les termes « faire plaisir », je ne cherchais absolument pas à être provocatrice, monsieur le sénateur. Je souhaitais simplement attirer votre attention sur le fait que nous voulons essayer de prendre ensemble des dispositifs qui seront applicables.
Vous savez à quel point la nature même du scrutin des élections prud'homales est particulière. C'est pourquoi le système que vous proposez semble particulièrement difficile à mettre en place. Je ne veux pas décourager des organisations professionnelles qui ne cessent de nous dire qu'elles connaissent de réelles difficultés. J'essaie au contraire de les encourager et de ne pas leur imposer des dispositifs contraignants.
Mme Annie David. Ce sont les femmes qui sont découragées !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement a émis un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Article 14 bis
Le deuxième alinéa de l'article 14 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces listes respectent, à l'unité près, la proportion de femmes et d'hommes de chaque corps de fonctionnaires. » - (Adopté.)
TITRE IV
ACCÈS À LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET À L'APPRENTISSAGE
Articles additionnels avant l'article 15
M. le président. L'amendement n° 80, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation est ainsi rédigée : « Il contribue à la lutte contre toutes les inégalités, notamment sociales, scolaires et à caractère sexiste. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise à rédiger différemment l'article L. 111-1 du code de l'éducation. On a beaucoup parlé du code du travail, mais je voulais également aborder le code de l'éducation.
Vous pourriez me reprocher de tenter d'introduire un cavalier, mais les deux amendements suivants concernent également le code de l'éducation et sont complémentaires à notre volonté de vouloir combattre les schémas et stéréotypes misogynes de certains de nos concitoyens, car le respect de l'autre, essentiel à une réelle égalité entre les sexes, reste à conquérir. L'école a un rôle clé à jouer dans ce sens et, de manière générale, dans la lutte contre toutes les inégalités, car sa mission ne saurait se borner à la seule acquisition des connaissances indispensables. Elle doit aussi participer à prévenir les inégalités à caractère sexiste en promouvant une éducation fondée sur le respect mutuel des deux sexes.
Une éducation non sexiste permet de s'attaquer dès le plus jeune âge aux stéréotypes traditionnels relatifs au rôle des femmes et des hommes et de lutter ainsi contre les préjugés et la discrimination.
Bien évidemment, il est illusoire de croire que l'école peut, à elle seule, résorber toutes les inégalités - j'ai d'ailleurs eu l'occasion de le dire ici même lors du débat sur la loi Fillon - mais affirmer qu'elle n'y peut rien n'est pas responsable du tout.
L'école est le lieu des premiers apprentissages, notamment celui du respect mutuel. L'action contre les inégalités doit donc commencer dès les premières années de scolarité et se poursuivre au-delà.
L'objet de cet amendement est bien d'agir à la source des inégalités, c'est-à-dire dès le plus jeune âge, en inscrivant dans la loi que la lutte contre les inégalités est une mission essentielle de l'école.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. L'objectif recherché relève plutôt de la déclaration de principe. Pour ma part, je préfère les mesures concrètes.
Par ailleurs, cet amendement aurait trouvé une place plus appropriée dans la loi d'orientation pour l'avenir de l'école, qui comporte d'ailleurs des mesures de ce type. Pour la commission, de telles dispositions déclaratoires contribuent à alourdir le code du travail. Mais, considérant que l'éducation nationale doit s'associer à l'objectif de parité, notamment dans l'orientation scolaire des filles, elle émet un avis de sagesse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement ne peut qu'être ouvert à un amendement de principe relatif à la lutte contre les discriminations à l'école. Comme la commission, il s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. L'amendement n° 82, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux dernières phrases du deuxième alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« Elle offre un premier apprentissage d'une langue vivante étrangère ou régionale, de l'art, de l'éducation physique, de l'histoire et de la géographie, des sciences et des technologies, ainsi que des luttes contre les représentations identitaires à caractère sexiste et ségrégative. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Il s'agit à nouveau de modifier le code de l'éducation. Cet amendement est bien dans la continuité du précédent.
Pour permettre à l'école d'être un facteur efficace de la lutte contre toutes les inégalités, y compris celles qui ont un caractère sexiste, il convient d'inscrire dans les programmes de l'école élémentaire les luttes contre les représentations archaïques des deux sexes, notamment. Il nous faut agir sur des schémas comportementaux souvent acquis dès le plus jeune âge. Dans cette perspective, l'école me semble être le lieu d'apprentissage le plus pertinent pour inculquer à nos enfants le respect mutuel, l'école maternelle jouant aussi un rôle clé en permettant de briser le tabou et de casser les stéréotypes.
Or, aujourd'hui, comme l'a démontré Leila Acherar, docteur en sciences de l'éducation et chargée de cours à l'université Montpellier-III, dans une étude publiée pour le compte de la délégation régionale aux droits des femmes et à l'égalité de Languedoc-Roussillon, l'école, « que l'on persiste à appeler "maternelle", transmet un modèle archaïque de rapport entre les sexes ». En cela, elle participe donc à créer des stéréotypes qui engendrent les inégalités entre les femmes et les hommes.
Je veux rappeler en cet instant l'anecdote qu'a relatée Leila Acherar dans son étude dont je vous ai déjà parlé lors de l'examen de la proposition de loi renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple. A de jeunes enfants de grande section de maternelle auxquels leur maîtresse devait apprendre la signification du mot « gant », cette dernière expliquait comme suit un dessin : il y a des gants de moto pour le papa et des gants de vaisselle pour la maman.
Pour véritablement juguler toutes les inégalités entre les femmes et les hommes, nous devons d'abord revoir certains stéréotypes relayés au sein des écoles. Bien évidemment, cet enseignement doit être approfondi dans le secondaire pour être efficace ou, en tout cas, pour ne pas perdre le bénéfice de son action. Tel est l'objet de cet amendement, que j'avais déjà déposé lors de l'examen de la loi Fillon.
Mme le rapporteur m'a fait remarquer qu'il aurait été plus judicieux d'engager ce débat à ce moment-là. Mais M. Fillon m'avait alors répondu que, dans le cadre de la lutte contre les inégalités, des mesures seraient certainement proposées et que cet amendement pourrait alors être examiné sous un angle favorable. C'est pour cette raison que je vous le présente aujourd'hui à nouveau. S'il n'est pas adopté ce soir, je vous le présenterai très certainement de nouveau.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement procède des mêmes intentions que le précédent. Par conséquent, l'argumentaire de la commission est identique. Même si elle trouve que de telles formules sont plus incantatoires que pratiques, la commission s'en remet à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 81, présenté par Mme David, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux derniers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation sont ainsi rédigés :
« La formation des enseignants est organisée sous l'égide des instituts universitaires de formation des maîtres. Elle met l'accent sur la transversalité des disciplines d'enseignement et sur le travail en équipe, pour faire de chaque enseignant un véritable enseignant-concepteur, capable d'élaborer des stratégies et dispositifs pédagogiques de lutte pour la réussite scolaire de tous adaptés à la réalité des élèves dont il a la charge. La formation, d'une durée de trois ans, ouvrant l'accès à un diplôme universitaire de niveau mastère et répondant à un cahier des charges qui assure une formation professionnelle en relation avec la recherche en didactique des disciplines et en sciences de l'éducation, prépare les futurs enseignants à la diversité des élèves et de leur situation. Elle comprend également des modules de formation spécifique pour la lutte contre les discriminations, notamment à caractère sexiste.
« Les instituts universitaires de formation des maîtres peuvent organiser des formations complémentaires, initiales et continues destinées aux personnels conseillers d'orientation, psychologues, assistants sociaux et personnel administratif, technicien ouvrier et de service de l'éducation nationale. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement est de la même veine que le précédent. Ce dernier n'ayant malheureusement pas été adopté, je ne me fais guère d'illusions quant au sort qui sera réservé à celui-ci.
Afin de pouvoir inculquer à nos jeunes le respect mutuel des deux sexes, nous devons également agir sur la formation des enseignants. Le défi d'une école démocratique exige à la fois un effort dans le domaine de la recherche relative à l'éducation et une meilleure appropriation de ses résultats par les enseignants afin de les préparer au mieux à la diversité des élèves et de leur situation.
Cet amendement a donc pour objet de proposer, en lien avec la recherche en didactique des disciplines et en sciences de l'éducation, que des modules de formation spécifique pour la lutte contre les discriminations, notamment à caractère sexiste, soient créés dans les IUFM.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement tend à revoir les missions des IUFM. Il dépasse largement le cadre de ce projet de loi. Il aurait été préférable de le présenter lors de l'examen de la loi d'orientation pour l'avenir de l'école.
Mmes Annie David et Nicole Borvo Cohen-Seat. On l'a fait, madame !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 81.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 15
I. - La première phrase du troisième alinéa de l'article L. 214-12 du code de l'éducation est complétée par les mots : « en assurant un égal accès des femmes et des hommes à ces filières ».
II. - L'article L. 214-13 du même code est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase du premier alinéa du I est complété par les mots : « en assurant un égal accès des femmes et des hommes dans chacune de ces filières de formation » ;
2° La première phrase du premier alinéa du II est complétée par les mots : « et veille à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans ces filières de formation professionnelle » ;
3° Après le premier alinéa du V, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces contrats déterminent notamment les objectifs qui concourent à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les métiers auxquels préparent les différentes voies de formation professionnelle initiale et continue. »
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par Mme Sittler, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Dans le I de cet article, remplacer les mots :
assurant un égal accès
par les mots :
favorisant un accès plus équilibré
II. - Dans le 1° du II de cet article, remplacer les mots :
assurant un égal accès des femmes et des hommes dans
par les mots :
favorisant un accès plus équilibré des femmes et des hommes à
III. - Dans le texte proposé par le 3° du II de cet article pour insérer un alinéa à l'article L. 214-13 du code de l'éducation, remplacer les mots :
assurer une représentation équilibrée
par les mots :
favoriser une représentation plus équilibrée
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Cet amendement est assorti de trois sous-amendements, présentés par le Gouvernement.
Le sous-amendement n° 94 est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du I de l'amendement n° 21, remplacer les mots :
favorisant un accès plus équilibré
par les mots :
favorisant un accès équilibré
Le sous-amendement n° 95 est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du II de l'amendement n° 21, remplacer les mots :
favorisant un accès plus équilibré des femmes et des hommes à
par les mots :
favorisant un accès équilibré des femmes et des hommes à
Le sous-amendement n° 96 est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du III de l'amendement n° 21, remplacer les mots :
favoriser une représentation plus équilibrée
par les mots :
favoriser une représentation équilibrée
La parole est à Mme la ministre déléguée, pour présenter ces trois sous-amendements.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. A ce stade du débat, nous n'allons pas faire de sémantique. Cependant, si la commission n'aime pas les « notamment », le Gouvernement, quant à lui, n'aime pas trop les « plus ». (Sourires.) C'est la raison pour laquelle, tout en étant favorable à l'amendement de la commission, il souhaite supprimer de la rédaction que celle-ci propose l'adverbe « plus », ce qui permettrait d'éviter des phrases un peu redondantes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Ces sous-amendements visent à modifier l'amendement de la commission qui confie aux régions le soin d'assurer une représentation plus équilibrée des femmes au sein de la formation professionnelle et de l'apprentissage. La commission émet un avis de sagesse, étant précisé que certains présidents de région m'ont sollicitée pour que figurent les mots « plus équilibré », car ils seraient autrement confrontés à des difficultés dans le cadre de l'apprentissage.
M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 15
M. le président. L'amendement n° 84, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 311-1 du code du travail, après les mots : « chargés de l'emploi » sont insérés les mots : « et de l'égalité professionnelle ».
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Avec cet amendement, nous voulons attirer votre attention, mes chers collègues, sur la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale et plus précisément sur les conséquences de l'article L. 311-1, définissant les composantes du service public de l'emploi.
Dans cet article, le service des droits des femmes et de l'égalité n'est plus identifié comme participant du service public de l'emploi. Ce changement interpelle, sachant que, depuis la mise en oeuvre de la déconcentration et de la globalisation des moyens de lutte contre le chômage de longue durée et d'action en faveur de l'insertion des publics en difficulté, il est inscrit que le service des droits des femmes et de l'égalité doit être associé régulièrement à la préparation et au pilotage du programme globalisé de la politique de l'emploi. Cette participation a d'ailleurs permis la définition d'un objectif de résultat quantifié visant à réduire le chômage de longue durée des femmes.
Cette orientation, définie depuis 2001 dans la stratégie d'action du service public de l'emploi, est à ce titre conforme aux engagements pris au travers des plans nationaux d'action pour l'emploi. Il est par conséquent fondamental que le service des droits des femmes et de l'égalité reste membre à part entière du noyau dur du service public de l'emploi en tant que garant de la mise en oeuvre de l'approche intégrée de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.
Par cet amendement, nous souhaitons donc revenir sur la disposition de l'article L. 311-1 et tout mettre en oeuvre pour donner toutes les garanties juridiques et pérenniser l'action du service des droits des femmes dans le nouveau service public de l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Le projet de loi comporte déjà des dispositions sur la sensibilisation des maisons de l'emploi et l'objectif de parité. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
M. Alain Gournac, vice-président de la commission. Attendez la suite !
Mme Esther Sittler, rapporteur. Toutefois, associer les services chargés des droits des femmes est utile. La commission est donc favorable à cet amendement.
M. Guy Fischer. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Robert Bret. C'est louche ! (Sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15.
L'amendement n° 48, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 322-12 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé
« Le salarié à temps partiel bénéficie en priorité d'un droit d'affectation aux emplois à temps plein vacants ou créés par son employeur qui requièrent une qualification équivalente. »
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Ce projet de loi ne s'attaque malheureusement pas au problème du temps partiel subi, dont nous avons beaucoup parlé aujourd'hui.
Or le temps partiel subi implique un rythme de travail irrégulier, souvent difficilement conciliable avec les tâches d'une mère de famille, et entraîne une faible protection sociale. Il est aussi l'une des causes des écarts de salaire entre les hommes et les femmes.
C'est pourquoi un projet de loi qui se donne pour objectif de réduire les écarts de rémunération doit s'attaquer au temps partiel subi, même si ce thème exige, nous l'avons compris, un travail de réflexion et d'approfondissement.
Le Gouvernement a certes pris l'engagement de réunir les partenaires sociaux sur ce thème. Mais pourquoi ne pas profiter de cette loi pour définir des mesures visant à résorber le temps partiel subi par les femmes ?
C'est pourquoi, avec cet amendement, nous proposons que, dès lors qu'ils requièrent une qualification équivalente, les salariés à temps partiel bénéficient en priorité d'un droit d'affectation aux emplois à temps plein vacants ou créés par l'employeur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission est favorable au principe de cet amendement, qui procède de la même philosophie que son amendement n° 16. Toutefois, l'article L. 322-12 du code du travail n'existant plus, madame Morin-Desailly, votre amendement n'a plus d'assise. Or vous ne l'avez pas rectifié, comme nous vous l'avions demandé ce matin, afin qu'il puisse être inséré à un autre endroit...
M. Roland Muzeau. Il faut l'intégrer !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, monsieur le président.
M. Robert Bret. Oh là là ! C'est tout dire !
M. le président. L'amendement n° 83, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la dernière phrase de l'article L. 321-2-1 du code du travail, les mots : « un mois » sont remplacés par les mots : « trois mois ».
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. A niveau égal, le salaire des femmes est inférieur à celui des hommes, 80 % des emplois à temps partiels sont occupés par des femmes, les « travailleurs pauvres » sont en majorité des femmes et le chômage touche en priorité les femmes. Bref, dans le monde du travail, les femmes sont victimes de multiples ségrégations qui les relèguent au bas de l'échelle sociale.
Pour lutter contre les inégalités homme-femme, il faut donc lutter contre la précarisation et la paupérisation du monde du travail ; il faut défendre les droits des salariés. En somme, il faut aller à l'encontre de votre politique, qui vise plus que jamais à démanteler le droit du travail.
Ainsi, lorsque vous facilitez les règles des licenciements, comme dans la loi de programmation pour la cohésion sociale, par exemple, vous aggravez le sort des travailleurs qui sont déjà dans les situations les plus précaires, et, parmi eux, sans aucun doute figure une majorité de femmes.
Voilà pourquoi nous déposons cet amendement qui vise à augmenter les indemnités versées à l'occasion d'un licenciement. Celles-ci sont actuellement équivalentes à un mois de salaire brut. Nous demandons qu'elles soient désormais équivalentes à trois mois de salaire brut.
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. Cet amendement vise à accorder aux salariés licenciés une indemnité d'au moins trois mois de salaire brut au lieu d'un mois, comme le prévoit le droit actuel.
La commission y est défavorable, car cela n'a rien à voir avec le thème qui nous préoccupe aujourd'hui, à savoir l'égalité professionnelle homme-femme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Fischer. Ce n'est pas tous les jours dimanche ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 16
L'article L. 900-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnels concourant à la formation professionnelle tout au long de la vie sont formés aux règles mentionnées aux alinéas précédents et contribuent dans l'exercice de leur activité à favoriser l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. » - (Adopté.)
(M. Philippe Richert remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
TITRE V
DISPOSITIONS DIVERSES
Article 17
L'article 1er du code de l'industrie cinématographique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour l'exercice de ses missions, le Centre national de la cinématographie peut recruter des agents non titulaires sur des contrats à durée indéterminée.
« Sans distinction de sexe, restent régis par les stipulations de leur contrat les agents contractuels du Centre national de la cinématographie en fonction à la date de publication de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes et qui ont été recrutés sur des contrats à durée indéterminée. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 53 est présenté par M. Lagauche, Mme Printz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 54 est présenté par MM. Ralite, Renar, Muzeau, Fischer et Autain, Mmes Demessine, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° 53.
Mme Gisèle Printz. Nous souhaitons la suppression de cet article, car il constitue un cavalier législatif et vise à légaliser les pratiques actuelles du Centre national de la cinématographie, le CNC, pourtant jugées illégales par le Conseil d'Etat.
Sur la forme, il est pour le moins surprenant qu'une disposition concernant le secteur de la production soit ajoutée par le Gouvernement, lors de la navette parlementaire, dans un projet de loi qui concerne un tout autre secteur, celui de l'égalité salariale entre les hommes et les femmes. Cet artifice de procédure a permis au Gouvernement d'éviter l'éventuel et probable avis négatif du Conseil d'Etat sur l'insertion d'un tel cavalier législatif. Ce n'est pas l'ajout de la mention préalable : « Sans distinction de sexe... », qui permettra de déguiser cette disposition en faveur de l'égalité salariale !
Sur le fond, le CNC, établissement public à caractère administratif, est soumis aux dispositions découlant de la loi de décentralisation du 13 juillet 1983, qui fixe, de manière extrêmement limitative les fonctions pour lesquelles cet organisme peut avoir recours à des agents non titulaires de la fonction publique. En 1986, le Conseil d'Etat a annulé les dispositions du décret de 1984 qui autorisaient le CNC à recruter des contractuels de manière élargie, considérant que « les missions du CNC, [....] assimilables à celles d'une direction d'administration centrale compétente à l'égard d'un secteur d'activité économique déterminé, ne présentent aucun caractère particulier de nature à permettre une dérogation à la règle selon laquelle les emplois permanents des établissements publics de l'État à caractère administratif sont occupés par des fonctionnaires. »
Le Conseil d'Etat a ainsi formellement interdit, à compter de 1986, tout recrutement d'agents contractuels sous CDI par le CNC.
Le CNC a néanmoins poursuivi, pendant quinze ans, le recrutement d'agents non contractuels pour l'ensemble de ses missions, et ce malgré le refus du contrôleur financier, en 2000, de viser les nouveaux CDI que le CNC a, depuis, été contraint de transformer en CDD !
Aujourd'hui, environ 20 % de l'effectif global du CNC - environ 460 personnes - serait composé, de façon illégale, d'agents non titulaires.
Avec l'article 17, on nous propose, non seulement de légaliser de façon rétroactive la pratique d'embauche sur CDI du CNC, mais aussi d'ouvrir de façon illimitée, pour l'avenir, cette possibilité.
Nous ne pouvons cautionner ce cavalier législatif que le Gouvernement nous propose d'adopter à la sauvette, qui n'a fait l'objet d'aucune concertation préalable et qui va à l'encontre des règles fondamentales de la fonction publique.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 54.
M. Robert Bret. Ce cavalier législatif est d'autant plus pervers qu'il vise, avant toute autre considération, à permettre au CNC, sur le long terme, de recruter des agents non titulaires sous CDI et donc de rendre définitivement caduc l'arrêt du Conseil d'Etat de 1989.
Cette analyse ne peut raisonnablement être contredite, la rédaction du premier alinéa de cet article étant suffisamment explicite. Des écrits récents, émanant de la direction du CNC, le confirment d'ailleurs sans ambiguïté.
La direction générale a rappelé le processus en cours, afin que soit défini un statut des agents contractuel du CNC et que la situation des agents contractuels en place soit consolidée définitivement, les titulaires restant, bien sûr, régis par le statut de la fonction publique.
De surcroît, le second alinéa de l'article portant précisément sur la « régularisation » des agents en fonction - ceux qui sont en CDI - n'est qu'un artifice de présentation, puisque la direction du CNC a écrit, après une expertise juridique menée avec les services spécialisés du ministère de la culture : « La jurisprudence du Conseil d'Etat a affirmé que les contrats à durée indéterminée qui avaient été signés dans le passé ne peuvent être remis en cause ». Cela figure dans la note d'information émise par le secrétariat général du CNC le 21 mars 2005.
A la lumière de ce qui précède, on ne peut comprendre ni admettre que la ministre chargée de présenter le texte devant les députés ait affirmé le 11 mai : « Le CNC, en liaison avec les ministères de la culture, de la fonction publique et des finances, a voulu régulariser la situation des agents non titulaires, parfois recrutés depuis quinze ans ».
Ce cavalier, sans aucun rapport avec l'objet de la loi précitée, n'est conforme ni à l'esprit ni à la lettre de notre Constitution, madame la ministre, même avec un artifice consistant à introduire, en tête du second alinéa, les mots : « Sans distinction de sexe ».
Les dérogations accordées à certains établissements publics de l'Etat afin qu'ils puissent recruter des agents contractuels ne relèvent aucunement d'un texte de portée législative, comme le demandent les règles qui sont édictées par la Constitution et qui définissent précisément le champ des mesures entrant dans le domaine de la loi.
Enfin, cette procédure présente le risque, pour les responsables du CNC et du ministère de la culture, de rencontrer un sérieux désaccord de la part de la fonction publique, ou encore une forte opposition au sein du Conseil supérieur.
Objectivement, dans le cas présent, nous sommes devant un contournement manifeste des règles applicables à l'ensemble des établissements publics posées par la loi.
Cela constituerait par ailleurs, à n'en pas douter, un précédent fâcheux sur lequel pourraient, à l'avenir, s'appuyer d'autres établissements et d'autres ministères.
C'est pourquoi, et sans plus de commentaires sur les méthodes employées par le Gouvernement pour éviter des débats parlementaires sérieux et approfondis, nous demandons la suppression du présent amendement.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 55, présenté par MM. Ralite, Renar, Muzeau, Fischer et Autain, Mmes Demessine, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le texte proposé par cet article pour compléter l'article 1er du code de l'industrie cinématographique :
« Les agents employés par le Centre national de la cinématographie à la date de publication de la loi n° du relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, exerçant des fonctions correspondant à un besoin permanent et qui ont été recrutés sur contrat sont engagés par des contrats à durée indéterminée.
« Ces contrats à durée indéterminée prennent effet à la date du premier recrutement de l'agent. »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Le Centre national de la cinématographie est un établissement public à caractère administratif placé sous l'autorité du ministre de la culture, créé et organisé par la loi du 25 octobre 1946.
Il emploie des personnels régis par le droit public qui forment aujourd'hui un effectif de 460 personnes environ. A la suite de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et promulguée en 1984, la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat impose à l'Etat et à ses établissements publics de recourir à des agents titulaires.
Le CNC a donc l'obligation de recruter, pour les besoins permanents à temps complet de l'établissement, des fonctionnaires titulaires. Les dérogations à cette règle sont en nombre très limité : il ne peut recruter des contractuels que lorsque certaines fonctions le justifient véritablement et seulement sous la forme de CDD de trois ans, néanmoins reconductibles.
En février 1986 est publié un décret qui complète le décret n° 84-38 du 18 janvier 1984 fixant la liste des établissements publics de l'Etat à caractère administratif et qui habilite le CNC à recruter des CDI pour pourvoir l'ensemble de ses emplois dans les catégories A et B. Mais le Conseil d'Etat annule les dispositions du décret instituant un régime dérogatoire pour le CNC.
En avril 1986, l'Union des syndicats des personnels des affaires culturelles - regroupant CGT et Syndicat national des affaires culturelles -- et Force ouvrière saisissent le Conseil d'Etat - section du contentieux - d'une requête tendant à faire annuler la disposition inscrivant le CNC sur le « décret-liste » dérogatoire.
Par arrêt du 5 juillet 1989, le Conseil d'Etat annule les dispositions du décret de février 1986 au motif que les missions du CNC, qui sont d'ailleurs assimilables à celles d'une direction d'administration centrale compétente à l'égard d'un secteur d'activité économique déterminé, ne présentent aucun caractère particulier de nature à permettre une dérogation à la règle selon laquelle les emplois permanents des établissements publics de l'État à caractère administratif sont occupés par des fonctionnaires. Ce faisant, il interdit totalement, à compter de cette date, tout recrutement d'agents contractuels sous CDI.
Malgré tout, la direction du CNC persiste à recruter des personnels contractuels en ne respectant ni l'arrêt du Conseil d'Etat ni les textes législatifs fixant les règles selon lesquelles doivent être pourvus les emplois dans la fonction publique de l'Etat et dans ses établissements publics.
En 2000, le contrôleur financier du CNC refuse catégoriquement de viser de nouveaux contrats en CDI et exige de l'établissement qu'il se conforme enfin aux textes en vigueur.
Récemment, le CNC a lui-même reconnu que, depuis la fin des années quatre-vingt, tout ce processus a abouti à ce que 171 agents contractuels des catégories B et C actuellement présents au CNC occupent des emplois budgétaires normalement réservés à des titulaires.
Certes, madame la ministre, le CNC compte une part de fonctionnaires affectés par le ministère de la culture, mais ils représentent moins de 20 % de l'effectif total et leur nombre ne cesse de se réduire. Il demeure urgent de remédier à la situation des agents actuellement employés sous CDD - au nombre de 82 selon nos informations -, d'autant que la plupart d'entre eux assurent, depuis plusieurs années, des missions permanentes du CNC.
Pour cette raison, il nous semblerait judicieux de substituer au texte du Gouvernement un amendement visant à accorder à cette seule catégorie de salariés, à titre très exceptionnel, pour régularisation, le bénéfice de CDI à compter de la date de publication de la loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements nos 53 et 54 qui tendent à supprimer l'article 17.
En effet, pourquoi lancer une concertation alors qu'il est nécessaire de répondre à une situation d'urgence, comme le fait l'article 17 ?
La commission est également défavorable à l'amendement n° 55, qui vise à transformer les contrats des agents non titulaires en CDI dans le cadre de leur emploi au Centre national de la cinématographie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. L'article 17 répond à une exigence économique et à une urgence sociale. Une mention particulière a été faite sur la nécessité de procéder à cette régularisation, sans distinction de sexe. Cela a un lien avec le présent texte et rend légitime l'intégration de cette disposition dans le présent projet de loi.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression n°s 53 et 54.
L'amendement n° 55 autorise le CNC à régulariser la situation des agents non titulaires, qu'ils soient recrutés sur des contrats à durée déterminée ou indéterminée. Mais son adoption priverait le CNC de la possibilité de pourvoir à l'avenir à ces emplois permanents par des agents recrutés sur contrat à durée déterminée. Le fonctionnement du CNC s'en trouverait rapidement et profondément affecté.
Il est donc absolument indispensable de trouver un cadre juridique stable au recrutement et à la gestion de ces personnels non titulaires. C'est l'intérêt même des agents, hommes ou femmes.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 55.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 53 et 54.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 17.
(L'article 17 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 10 (précédemment réservés)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 44, présenté par M. Godefroy, Mmes Schillinger, Printz, Demontes, Le Texier, Tasca et Voynet, MM. Domeizel, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 331-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'accouchement intervient plus de six semaines avant la date prévue et exige l'hospitalisation de l'enfant, la période d'indemnisation de seize ou de trente-quatre semaines, quarante-six semaines en cas de naissance de plus de deux enfants, est prolongée du nombre de jours courant entre la date effective de la naissance et la date prévue. »
II. Ces dispositions sont applicables à partir de la promulgation de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, pour les femmes ayant bénéficié du droit à congé supplémentaire prévu au quatrième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail.
III. Les charges éventuelles qui résulteraient pour les régimes sociaux et pour l'État de l'application de la présente disposition sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux contributions visées à l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement vise à ce que soient mieux prises en compte les situations de grande prématurité, afin de préserver les relations entre la mère et son enfant, qui sont essentielles pour le développement psychoaffectif de l'enfant.
Les naissances survenant entre la vingt-quatrième et la trente-septième semaine de grossesse sont suivies d'une forte médicalisation de l'enfant, parfois aussi de la mère. Le risque de mortalité est important pour les très grands prématurés, c'est-à-dire pour les enfants nés vingt-huit semaines avant terme. Il nous est donc apparu essentiel de favoriser une disponibilité maximale des parents, notamment de la mère, auprès du nouveau-né afin d'établir et de maintenir un niveau et une qualité de contact, de grande importance pour le pronostic ultérieur.
C'est dans cet esprit que nous avions préconisé, dans le projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, le droit à un congé supplémentaire pour les femmes qui sont dans cette situation.
Comme nous l'avions souligné à l'époque, il existe de fortes disparités entre les conventions collectives. Certaines femmes ayant accouché prématurément sont amenées à devoir reprendre leur travail alors que leur enfant est encore en couveuse et qu'il devrait bénéficier au maximum de la présence de sa mère.
Il s'agit aussi de préserver un temps de congé au moment du retour à domicile, après la phase de réanimation néonatale. On sait que les prématurés sont mieux auprès de leur maman, voire sur leur maman, plutôt que dans une couveuse. C'est la raison d'être de l'expérience des « mamans kangourous ». Il se crée dans ces conditions un lien maternel plus fort, propice à un meilleur développement futur. En fait, les prématurés ne retrouvent un développement normal qu'après deux ou trois ans.
Bien que l'article 10 de la loi du 11 février 2005 relative à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ait introduit dans le code du travail un droit à la prolongation du congé de maternité en cas de naissance prématurée nécessitant l'hospitalisation de l'enfant, bien que ce droit soit effectivement applicable depuis la publication de la loi, la prise en charge financière de ce congé supplémentaire n'est pas assurée. Il en résulte qu'aujourd'hui, quelle que soit la date de l'accouchement, les mères assurées sociales bénéficient de seize semaines de congé indemnisé : au-delà, elles ne sont plus rémunérées. Quelle maman peut prendre un congé sans solde, même pour rester auprès de son enfant prématuré ? Nous avions pensé, en toute bonne foi, qu'elle pourrait prendre ce congé en étant indemnisée.
Il est évident que l'allongement du congé de maternité postnatal en cas de naissance prématurée n'a aucun sens s'il s'agit d'un congé sans solde. En tout cas, ce n'est pas dans cet esprit que le législateur a travaillé.
C'est pourquoi le présent amendement vise à prolonger la période pendant laquelle la mère d'un enfant prématuré et hospitalisé perçoit une indemnité journalière de repos.
J'ajoute que des amendements analogues ont été présentés sur l'initiative de MM. Lardeux et Vasselle, ici présents.
L'amendement qui a été présenté sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 a été « retoqué » par le Conseil constitutionnel ; je ne ferai pas de commentaires !
Je le répète, alors que le droit à congé supplémentaire figure dans la loi, il reste maintenant à trouver des mesures d'indemnisation des jours de congé que prennent ces mamans.
Tel est l'objectif que nous poursuivons avec cet amendement qui, nous l'espérons, fera l'objet d'un avis favorable du Gouvernement et recueillera l'assentiment unanime du Sénat.
M. le président. L'amendement n° 98, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - L'article L. 331-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Quand la naissance de l'enfant a lieu plus de six semaines avant la date présumée de l'accouchement, la période pendant laquelle la mère perçoit l'indemnité journalière de repos est augmentée du nombre de jours courant entre la naissance de l'enfant et six semaines avant la date présumée de l'accouchement. »
II - Après les mots : « du nombre de jours », la fin de la seconde phrase du quatrième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail est ainsi rédigée : « correspondant au nombre de jours courant entre la naissance de l'enfant et six semaines avant la date présumée de l'accouchement. »
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement attache une très grande importance à cet amendement.
Le Sénat lui-même a pris l'initiative, dans le cadre des discussions du projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui a été adopté en février dernier, d'allonger la durée du congé de maternité des mères d'enfants nés prématurément, c'est-à-dire plus de six semaines avant la date présumée de l'accouchement.
Toutefois, si ce congé de maternité est dû, il n'est assorti d'aucune indemnité supplémentaire, ce qui induit une très forte inégalité entre les femmes selon qu'elles ont, ou non, les moyens de s'arrêter plus longtemps de travailler.
Or la naissance d'un enfant prématuré crée d'énormes difficultés pour les parents.
Tout d'abord, le prématuré est toujours un enfant hospitalisé. Le lien entre la mère, le père et l'enfant ne peut pas se construire normalement au travers des vitres d'une couveuse. Il est en effet impossible de toucher un grand prématuré dans les premières semaines de sa vie. Le lien entre les parents et l'enfant doit donc être construit après l'hospitalisation.
Ensuite, même en ajoutant les six semaines de congé prénatal qui sont accordées aux mères d'enfants prématurés, comme aux autres mères, aux dix semaines qui suivent le congé de maternité, c'est-à-dire après seize semaines, l'enfant grand prématuré reste fragile. Il ne peut être confié à une garde d'enfants ou à une crèche comme on le ferait pour un enfant né à terme.
C'est pourquoi il est nécessaire de permettre aux mères d'enfants prématurés qui exercent un emploi de prendre un congé de maternité indemnisé plus long que celui qui est actuellement prévu par notre législation.
La solution qui est proposée par le Gouvernement consiste à prévoir que la totalité de la période de prématurité sera reportée après la naissance. On ne se limitera donc plus au seul congé prénatal de six semaines qui constituait, en réalité, un bien maigre forfait pour la mère d'un enfant né huit, voire dix semaines avant terme.
C'est une solution juste parce qu'ainsi, quelle que soit la date de sa naissance, aucun enfant ne sera séparé de sa mère avant ses dix semaines d'âge réel, c'est-à-dire d'âge par rapport à la date présumée de l'accouchement.
C'est aussi une solution équitable puisqu'elle permet aux mères qui n'auraient pas les moyens de profiter d'un congé sans solde de rester plus longtemps auprès de leur enfant.
Enfin, c'est une solution simple parce que la date de la naissance de l'enfant suffit à calculer la durée du congé supplémentaire.
Par cet amendement, notre société apportera une réponse nouvelle au défi de la prématurité : défi posé d'abord à nos politiques de santé publique en matière de prévention de la prématurité et de prise en charge des enfants nés prématurément ; défi posé aussi à nos politiques familiales, qui doivent préserver le lien entre la mère et l'enfant dans les premiers temps de la vie, ce qui est compliqué dans le cas de naissance prématurée ; défi posé, enfin, quant à la place des femmes dans le monde du travail puisqu'il s'agit de permettre à ces mères de ne retourner travailler que lorsque leur enfant sera suffisamment fort pour supporter la séparation et pouvoir être déposé en crèche ou laissé à une garde d'enfants.
Cet amendement apporte ainsi un élément supplémentaire de conciliation entre vie familiale et vie personnelle, force du modèle français de politique familiale. La France est, en Europe, le pays dont à la fois le taux de natalité est le plus élevé et le taux d'activité des femmes le plus important, puisqu'il atteint aujourd'hui 80 %. Contrairement aux idées reçues, ces deux données sont liées. En effet, ce qui fait augmenter le revenu de la famille et lui permet donc d'élever le nombre d'enfants qu'elle souhaite, ce sont bien sûr le quotient familial et les allocations familiales, mais c'est aussi et surtout l'activité professionnelle des deux membres du couple.
Le Gouvernement n'a pas retenu l'amendement n° 44, car il déboucherait sur une situation que ses auteurs n'ont sans doute pas souhaitée. En effet, si cet amendement était adopté, la mère d'un enfant né deux jours après le début du congé prénatal aurait droit à seize semaines de congé indemnisé tandis que la mère qui aurait accouché deux jours avant le début de ce congé aurait droit, elle, à vingt-deux semaines et deux jours d'indemnités journalières. Il en résulterait une inégalité : pour deux naissances séparées de quatre jours, l'une des mères aurait droit à vingt-deux semaines de congé indemnisé et l'autre à seize semaines seulement.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement souhaite l'adoption de l'amendement n°98.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Esther Sittler, rapporteur. S'agissant de l'amendement n°44, la commission souscrit aux arguments de M. le ministre. En conséquence, elle en souhaite le retrait.
S'agissant de l'amendement n° 98, la commission se félicite que les observations présentées par le groupe socialiste et par M. Paul Blanc aient été entendues. Je tiens à féliciter le Gouvernement de sa réactivité sur cette question à laquelle nous étions particulièrement sensibles. La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Monsieur Godefroy, l'amendement n° 44 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Godefroy. Vos arguments, monsieur le ministre, sont tout à fait recevables, et vos explications tout à fait judicieuses.
Certes, notre amendement tendait en outre à ce que le dispositif soit applicable dès la promulgation de la loi relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes ; néanmoins, nous le retirons au profit de celui du Gouvernement. (Applaudissements.)
M. le président. L'amendement n° 44 est retiré.
Je vous remercie, monsieur Godefroy, de ce geste qui, sur un sujet aussi important, est, je crois, apprécié par l'ensemble de la Haute Assemblée et par le Gouvernement.
Je mets aux voix l'amendement n° 98.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que cet amendement est adopté à l'unanimité des présents.
Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Bernard Seillier, pour explication de vote.
M. Bernard Seillier. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, inscrit dès 1972 dans le code du travail, le principe de l'égalité de rémunération entre les hommes et les femmes pour un même travail a été depuis réaffirmé et précisé dans plusieurs lois. Pourtant, nous ne pouvons que déplorer aujourd'hui la persistance d'écarts salariaux élevés entre les hommes et les femmes.
Le projet de loi, présenté par le Gouvernement à la demande du Président de la République, répond à l'objectif ambitieux de réduire ces écarts d'ici à cinq ans afin de répondre à « une urgence économique, démocratique et sociale ». Je me félicite de cette nouvelle et forte impulsion donnée à une cause qui, même si elle paraît très naturelle, n'en est pas moins difficile à faire aboutir.
Le texte mise sur le dialogue social, et je souscris pleinement à cette méthode. Il faut d'ailleurs souligner un changement d'attitude manifeste depuis quelques années de la part des partenaires sociaux et des entreprises, qui ont fortement relayé l'action de Mme Nicole Ameline sur tous les fronts de l'égalité professionnelle, notamment la création du label « Égalité ».
Le projet de loi vise également à mieux prendre en compte la responsabilité d'une mère ou d'un père salariés dans l'entreprise et à assurer une représentativité équilibrée dans les instances professionnelles et les instances de décision.
Pour toutes ces raisons, la majorité du groupe du RDSE le soutiendra.
Cela étant, j'aimerais rappeler l'importance de la négociation sur l'égalité professionnelle définie dans la loi du 9 mai 2001 : l'égalité salariale ne sera pas véritablement atteinte si elle ne s'accompagne pas de mesures simultanées portant sur l'ensemble des autres facteurs qui y concourent, comme le temps de travail. En effet, la moitié des écarts moyens de salaire entre les femmes et les hommes est imputable au travail à temps partiel, qui touche aujourd'hui 30 % des femmes actives, contre 5 % des hommes, et qui cantonne massivement les femmes dans les bas et les très bas salaires.
Dans ce domaine, madame le ministre, vous avez arrêté un plan de travail rationnel que vous nous avez exposé. Nous resterons très attentifs à votre démarche et nous formons des voeux pour son succès. L'exercice est délicat, puisqu'il s'agit de trouver la très fine ligne de partage entre temps partiel contraint et temps partiel choisi. Abstraitement, le problème est facile à poser ; nous souhaitons vous aider à le résoudre en pratique, car son enjeu est considérable, tant pour les parents que pour les entreprises. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, j'ai tenu à rappeler au cours de la discussion générale un fait incontestable : depuis 1972, l'égalité entre les hommes et les femmes devrait être une réalité - à travail égal, salaire égal.
Toutes les lois votées depuis vingt-cinq ans, l'article du traité de Rome adopté voilà un demi-siècle... rien n'a été suffisant pour établir enfin l'égalité salariale et professionnelle entre les hommes et les femmes.
Ce triste constat devrait être la pierre angulaire de la réflexion du Parlement et aurait dû fonder un projet de loi novateur, offensif et créant enfin un droit opposable. Tel n'est pas le cas, et le Gouvernement, par les réponses qu'il a apportées au cours de nos débats, confirme son positionnement, qu'il est possible de résumer ainsi : la situation dure depuis si longtemps, les inégalités sont si anciennes qu'il est urgent d'attendre.
De nouveau, la principale motivation avancée pour justifier que l'employeur ne soit pas contraint d'appliquer la loi est que cela aboutirait à mettre l'emploi en danger. Vous avez malheureusement déjà oublié, madame la ministre, les 38,5 millions d'euros octroyés à M. Daniel Bernard, P-DG de Carrefour, et qui, eux, à vous écouter, ne mettraient pas en danger l'emploi !
M. Josselin de Rohan. Cela n'a rien à voir !
M. Roland Muzeau. Cela n'a rien à voir ? C'est là que se fondent le temps partiel et les salaires de misère ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Hors sujet !
M. Roland Muzeau. Chacun défend son camp !
M. Alain Gournac. Nous ne défendons aucun camp !
M. Roland Muzeau. Mais si ! Vous défendez le camp du MEDEF et du patronat !
M. Robert Bret. Tout le monde le sait !
M. Roland Muzeau. L'argument du danger que courrait l'emploi est éculé, certes, mais suffisamment révélateur de ce qu'est votre politique : tout ce qui est progrès social et réduction des inégalités est pour vous inacceptable. Cela n'est pas pour étonner nos concitoyens, qui ont parfaitement pris la mesure de vos priorités : déréglementation, flexibilité, liquidation du code du travail, Fillon I, Fillon II, Larcher I, Larcher II..., au-delà de ces évocations, c'est une vaste palette d'atteintes au droit du travail qui a suivi votre arrivée au pouvoir voilà trois ans.
Le résultat, c'est une situation économique et sociale désastreuse, un chômage qui a progressé de 10 %, des temps partiels occupés à 82 % par des femmes. En outre, 80 % des 8,5 millions d'actifs qui perçoivent un salaire inférieur au SMIC sont des femmes ; ce chiffre, qui progresse tous les jours, a augmenté de 10 % en dix ans.
Nos débats, madame la ministre, ont démontré que, de fait, l'emploi féminin est considéré comme une simple variable d'ajustement. Ce n'est pas tolérable, pas plus que ne l'est la situation faite aux femmes à la retraite : huit sur dix d'entre elles, je le rappelle, touchent moins que le minimum vieillesse.
Au cours des débats, le groupe CRC a formulé plus de trente propositions visant à progresser réellement vers l'égalité salariale et professionnelle. Nous avons voulu peser sur le fléau que représente le recours toujours plus important au temps partiel et aux contrats a minima. Ainsi, nous avons proposé que les personnes contraintes au temps partiel puissent effectuer un temps complémentaire rémunéré suivant les mêmes règles que les heures supplémentaires, c'est-à-dire avec une majoration de 25 % ou 50 %.
Concernant la maternité et la formation, notre groupe a également été force de proposition. Il s'est montré de bout en bout à la fois offensif, face aux injustices, et constructif, pour qu'enfin nous avancions sur la voie de la justice sociale.
Que dire encore de cette prime de 400 euros accordée aux entreprises au motif de favoriser l'égalité professionnelle ?
Mme Annie David. C'est fort !
M. Roland Muzeau. Ainsi, il faudrait une prime de plus, sans retour d'intérêt pour l'emploi et l'égalité ! Une telle prime n'est-elle pas le signe du regard méprisant que l'on porte sur les femmes ?
Madame la ministre, c'est avec résolution que nous avons abordé ce projet de loi, parce que nous croyons d'une nécessité absolue de mettre fin à ces injustices considérables faites aux femmes dans l'emploi et dans la recherche d'emploi.
Deux amendements du groupe CRC ont été adoptés ; c'est bien, mais cela reste si loin de ce qui serait nécessaire que nous ne pouvons considérer, au terme de nos débats, avoir perçu le moindre signe d'une inversion significative.
En conséquence, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre ce projet de loi trop complaisant envers des attitudes patronales qui durent depuis tant et tant d'années ! Le Président de la République a voulu faire un coup politique ; nous aurions préféré un acte politique et législatif.
Je tiens, pour terminer, à remercier Mme le rapporteur de sa disponibilité dans les débats et de la capacité d'écoute dont elle a su faire preuve bien que, vous l'aurez compris, nous ne partagions pas du tout son point de vue. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà vingt-cinq ans que les choses n'avancent que trop peu pour les femmes dans le domaine du travail, vingt-cinq ans pourtant que les textes de loi s'empilent sans produire d'effet majeur. Le constat est alarmant et nous impose de ne pas désarmer.
Une véritable égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine du travail est un impératif élémentaire de justice et d'équité sociale. Cette égalité doit être à la fois réelle et totale ; c'est dire qu'elle doit être non seulement salariale, mais aussi, plus largement, professionnelle.
Mme Annie David. Exactement !
Mme Catherine Morin-Desailly. A se vouloir consensuel, le projet de loi que nous venons d'examiner en est devenu timide.
Nous l'avons accueilli favorablement parce qu'il est sous-tendu par un objectif de justice sociale et que, contrairement à ce que son intitulé peut laisser croire, il ne traite pas seulement de l'égalité salariale : abordant également des aspects fondamentaux de l'inégalité entre les sexes tels que l'accès à la formation professionnelle, à l'apprentissage ou à certaines instances délibératives et juridictionnelles, il est plutôt intéressant.
Toutefois, nous craignons que les mesures qu'il contient, qui semblent utiles et positives, ne produisent qu'un effet marginal.
En effet, nous redoutons que, en l'absence de mécanisme coercitif, cette loi, comme celles qui l'ont précédée, ne reste lettre morte.
M. Robert Bret. Oui !
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous avions donc proposé un amendement visant à instituer un mécanisme contraignant comparable à celui qui s'applique aux entreprises qui ne respectent pas leur obligation d'emploi de personnes handicapées. Malheureusement, mes chers collègues, vous n'avez pas souhaité le retenir, et nous le regrettons.
Autre regret : le rejet de notre amendement tendant à interdire que puissent être imposées aux salariés à temps partiel des plages de travail fractionnées ; nous y tenions vraiment.
Ainsi, madame la ministre, nous pensons que, s'il apporte des aménagements intéressants, votre texte était très largement perfectible : sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes, toute avancée doit être retenue.
Toutefois, pour laisser aux avancées que contient ce projet de loi une chance de changer le quotidien professionnel des femmes, nous le voterons. Mais le doute qui nous habite nous conduira à être très attentifs à la manière dont la loi sera appliquée.
Nous croyons plus que jamais indispensable que le pouvoir réglementaire - comme vous vous êtes engagée à le faire, madame la ministre - établisse des indicateurs sérieux et solides ainsi que des objectifs chiffrés, sur la base desquels pourront s'engager les négociations collectives.
Nous serons aussi très vigilants sur la concrétisation de l'engagement que vous avez pris, madame la ministre, de vous pencher rapidement sur la question du travail à temps partiel et de la précarité qu'il induit.
M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontes.
Mme Christiane Demontes. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, nous l'avons souligné, a des objectifs louables que personne dans cette assemblée ne saurait remettre en cause.
Cependant, comme le relevait Mme le rapporteur, « l'égalité ne se décrète pas », elle participe de la dignité. Or, une fois de plus, le Gouvernement et la majorité se limitent avec complaisance à des mesures d'incitation. Ce n'est pas suffisant quand on sait que dans notre pays, malgré les lois précédemment adoptées, les femmes sont payées en moyenne 23 % de moins que leurs collègues masculins, qu'elles sont les premières et les plus importantes victimes de la précarité, qu'elles forment l'immense majorité du contingent des salariés subissant un temps partiel imposé.
Face à une telle réalité, et alors que ce gouvernement, avec la complicité active de sa majorité, organise un nouveau train de mesures de précarisation, de remise en cause des acquis sociaux et de démantèlement du code du travail, l'incitation n'est plus de mise.
Il aurait été important de ne pas céder une nouvelle fois aux blocages du MEDEF sur ce sujet et, au contraire, de répondre concrètement à nos concitoyennes, à toutes celles - et à tous ceux - qui ne peuvent concevoir qu'à travail égal le salaire ne soit pas égal. Il aurait été essentiel de passer de l'incantation à l'action pour qu'enfin, dans nos entreprises, le principe constitutionnel d'égalité soit respecté.
Telle n'a pas été la volonté du Gouvernement ni de sa majorité. A travers nos amendements, nous avons formulé au cours du débat un certain nombre de propositions. Vous n'en avez retenu qu'un, mes chers collègues : vous n'avez donc pas vraiment voulu tenir compte de nos initiatives. Nous en prenons acte et le déplorons.
Aussi nous abstiendrons-nous au moment de voter ce projet de loi, qui nous laisse au milieu du gué. C'est regrettable, car cela ne répond pas au souhait de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi dont nous avons débattu aujourd'hui est le fruit d'une réflexion approfondie sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Conformément au souhait exprimé par le Président de la République lorsqu'il a adressé ses voeux aux forces vives de la nation, au début de l'année, le texte prévoit la suppression d'ici à cinq ans des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes. Je me réjouis que le Gouvernement se soit emparé du problème, car, si le législateur est déjà intervenu à plusieurs reprises au cours des trente dernières années, l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est encore loin d'être atteinte. Je vous remercie, madame le ministre, de votre force de persuasion et de votre détermination.
Le texte est le résultat d'un excellent travail qui a pris en compte la réalité de l'entreprise en trouvant un équilibre délicat entre l'entière liberté de la négociation collective et l'instauration de mécanismes permettant d'en renforcer l'efficacité.
Le projet de loi privilégie le dialogue social dans une logique de confiance et de responsabilité. Il partage l'esprit de l'accord national interprofessionnel du 1er mars 2004, par lequel les représentants des entreprises et des syndicats de salariés ont reconnu qu'il était de leur responsabilité de garantir la mixité et l'égalité professionnelle au travail.
Mais le texte n'exclut pas la contrainte, dans un souci d'efficacité, puisque des sanctions pourront être inscrites dans la loi, si nécessaire, pour les entreprises qui n'auront pas atteint l'objectif d'égalité salariale d'ici à 2010.
M. Roland Muzeau. Un jour !...
M. Alain Gournac. Au-delà de cette relance du dialogue social, le projet de loi comporte, par ailleurs, des dispositions concrètes pour faciliter la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale des femmes. Il est, en effet, nécessaire de prendre en compte les contraintes qui pèsent sur les femmes du fait de leur maternité et de leur implication dans la vie de leur foyer. Les mesures se caractérisent par leur diversité et leur cohérence. Bien entendu, le chemin est encore long pour convaincre les femmes qu'il est possible d'être mère tout en poursuivant une carrière.
Je rappelle qu'il s'agit d'une urgence sociale, car les femmes ne doivent pas être empêchées de faire ce choix personnel de la maternité, mais aussi d'une urgence économique, tant leur engagement professionnel est important pour la nation.
Par ailleurs, il était important de considérer l'insuffisante représentation des femmes dans les fonctions d'encadrement et les postes de responsabilité. Le texte réalise d'importants progrès en la matière, en favorisant l'accès des femmes à l'exercice de fonctions délibératives et juridictionnelles.
Je tiens à vous remercier, madame le rapporteur, de la grande attention que vous avez portée au texte et de la clarté des explications que vous nous avez données en commission. Vos propositions ont enrichi le projet de loi sur plusieurs points importants.
Sans doute est-il possible d'aller plus loin, notamment en matière de temps partiel. J'ai bien noté, madame le ministre, que ce thème sera l'objet de prochaines concertations, et je vous fais toute confiance pour que celles-ci aboutissent.
Je tiens à souligner que les dispositions adoptées pourront inspirer nos voisins européens, également concernés par ce débat de l'égalité professionnelle. Bien évidemment, mes chers collègues, le groupe UMP votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Esther Sittler, rapporteur. Au terme de cette discussion, qui fut mon baptême du feu, vous l'avez bien compris, mes chers collègues, je tiens particulièrement à remercier les trois présidents de séance qui nous ont accompagnés tout au long des débats : Mme Michèle André, MM. Jean-Claude Gaudin et Philippe Richert.
Je remercie également mes collègues du groupe UMP de l'aide qu'ils m'ont apportée et de leur soutien aux amendements que j'ai présentés, au nom de la commission. Je remercie d'ailleurs les membres de cette dernière de leurs propositions qui ont enrichi la discussion. Je n'aurais garde d'oublier les membres de la majorité dans son ensemble, ainsi que les membres de l'opposition : chacun, avec conviction, a su faire partager sa passion.
Mes remerciements vont à vous aussi, madame la ministre. Vous avez porté avec persuasion votre projet de loi qui est aussi celui de Mme Ameline. Il fera date assurément de par son audace et son ambition. Je sous sais gré de l'engagement que vous avez pris au sujet du temps partiel subi ; je vous ai fait part à plusieurs reprises de ma confiance à cet égard.
Merci à M. Philippe Bas, qui, avec sensibilité, a défendu un amendement très attendu sur le congé de maternité des mères d'enfants prématurés. Cet amendement a été voté à l'unanimité, ce qui est rare, et je suis heureuse que ce soit à l'occasion de la discussion du premier texte dont j'étais rapporteur. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Au terme de cette discussion, je tiens à remercier l'ensemble des sénateurs, avec qui nous avons pu échanger nos points de vue et, incontestablement, enrichir le texte.
Plusieurs amendements ont constitué des avancées : je pense à la volonté de ne pas couper un dialogue social qui est engagé, à la reconnaissance du droit individuel à la formation, à l'affirmation de la place des femmes dans le service public de l'emploi, mais aussi à l'accompagnement par les services consulaires des Français de l'étranger et, bien sûr, au très bel amendement relatif au congé de maternité des mères d'enfants prématurés.
Ce projet de loi vise, bien sûr, à relancer le dialogue social, à conjuguer la bonne articulation entre la vie professionnelle, la vie familiale et la vie personnelle. Bien entendu, les textes réglementaires, indispensables compléments, conféreront à ce texte, toute son efficacité ; je veillerai personnellement à ce qu'ils soient pris rapidement.
Enfin, tout au long de cette discussion, j'ai pris de très nombreux engagements sur le temps partiel, en rappelant l'attachement et la volonté du Gouvernement de travailler en profondeur sur ce dossier. Je me réjouis que les hasards du calendrier parlementaire fassent que mon collègue Gérard Larcher soit présent dans l'hémicycle au moment où, solennellement, je veux réitérer nos engagements.
Le temps partiel subi, l'amplitude des horaires de travail, l'évolution aussi fréquente que possible vers un temps complet, l'accès à une formation adaptée, sont autant d'éléments sur lesquels le Gouvernement s'est engagé à travailler, ce qu'il fera dès la rentrée, par le biais de consultations et de négociations.
Tout à l'heure, M. Gournac a fait allusion à l'Europe. Bien entendu, j'aurai mon texte sous le bras lors des réunions européennes à Birmingham. La France joue incontestablement, par ses initiatives, un rôle d'aiguillon s'agissant de la place des femmes dans la société, en Europe, mais également dans le monde.
Mes remerciements iront également à la délégation aux droits des femmes, qui, dans le sillage de sa présidente, a toujours à coeur de faire avancer les dossiers.
Madame le rapporteur, c'est par vous que je terminerai en vous disant combien chacun a apprécié votre implication. La présentation d'un premier texte est toujours un grand moment d'émotion. Vous vous y êtes adonnée avec beaucoup de coeur ; c'est ce qui a permis des avancées dont nous ne pouvons que nous féliciter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 200 :
Nombre de votants | 326 |
Nombre de suffrages exprimés | 222 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 112 |
Pour l'adoption | 199 |
Contre | 23 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements.)
Madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi à mon tour de féliciter Mme le rapporteur pour l'autorité, la compétence, mais aussi la sérénité et la courtoisie avec lesquelles elle a défendu les positions de la commission.
7
Mesures d'urgence pour l'emploi
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures d'urgence pour l'emploi (n° 472).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Gournac, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons aujourd'hui au terme du processus législatif qui doit autoriser le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures d'urgence pour l'emploi. La commission mixte paritaire qui s'est réunie hier à l'Assemblée nationale est, en effet, parvenue à un accord sur une rédaction commune du projet de loi d'habilitation.
L'examen de ce texte aura été relativement rapide : il ne s'est écoulé que cinq semaines depuis la présentation publique par le Premier ministre de ses propositions pour l'emploi dans le cadre de sa déclaration de politique générale. Cette célérité vise à répondre à l'urgence ressentie par nos compatriotes face à la dégradation du marché du travail.
Toutefois, elle n'a pas empêché le Sénat d'enrichir le texte présenté par le Gouvernement.
Sur l'initiative du groupe de l'UC-UDF notamment, notre Haute Assemblée s'était efforcée de préciser le champ de l'habilitation. Elle avait, en particulier, mieux défini les garanties apportées aux salariés titulaires d'un contrat « nouvelles embauches » mais n'ayant pas encore acquis de droits à l'assurance chômage, en cas de rupture de leur contrat sur l'initiative de l'employeur. Ils bénéficieront d'un accompagnement personnalisé, assuré par le service public de l'emploi, avec de larges possibilités de formation, ainsi que d'un revenu de remplacement versé dans des conditions plus favorables que le droit commun. Les employeurs devraient contribuer au financement de ce suivi personnalisé.
La commission mixte paritaire a largement approuvé les apports du Sénat. Elle a conservé l'esprit de la disposition que je viens d'évoquer, mais en a modifié la rédaction, et ce pour deux raisons.
Il fallait, d'une part, que le texte soit plus clair, car il avait été singulièrement compliqué par l'adoption, au Sénat, de deux amendements mal coordonnés.
Il convenait, d'autre part, de garantir que la convention de reclassement personnalisé puisse être étendue, sans difficulté juridique, aux titulaires d'un contrat « nouvelles embauches » licenciés par leur employeur. En effet, la rédaction issue des débats du Sénat pouvait, de ce point de vue, être jugée un peu trop restrictive.
Ce travail de réécriture ne remet pas en cause, bien entendu, les apports souhaités par le groupe de l'UC-UDF.
Comme lui, la commission est attachée à ce qu'un équilibre soit trouvé entre les souplesses accordées aux employeurs et les protections garanties aux salariés.
Sous le bénéfice de ces observations, mes chers collègues, la commission vous propose d'approuver ce projet de loi d'habilitation, dans lequel s'exprime clairement la volonté du Gouvernement de s'engager pleinement dans la bataille pour l'emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis que la commission mixte paritaire qui s'est réunie hier soit parvenue à élaborer un texte commun.
A cet égard, je souhaite remercier la commission des affaires sociales du Sénat, son rapporteur, ainsi que l'ensemble des membres de la Haute Assemblée de la qualité du travail accompli, tant en commission qu'au cours des débats. La discussion approfondie de ce projet de loi d'habilitation, à l'Assemblée nationale puis au Sénat, a permis de répondre à un certain nombre d'interrogations.
Nous disposons donc d'un cadre clair pour les six ordonnances dont les projets seront soumis au Comité supérieur de l'emploi la semaine prochaine. Nous poursuivons ainsi le travail de consultation des partenaires sociaux, qui, je le rappelle, a été entamé, à notre demande, le 30 juin 2004, afin d'envisager notamment la levée des freins à l'embauche dans les petites et moyennes entreprises. Cette consultation a abouti à l'élaboration du contrat « nouvelles embauches ».
Monsieur le rapporteur, vous l'avez dit, ce texte concrétise la priorité absolue que constitue, pour le Gouvernement, la lutte contre le chômage. Le Gouvernement a fait le choix des ordonnances pour que, de manière urgente, puissent s'appliquer un certain nombre de dispositions susceptibles de conduire à des emplois pérennes, notamment dans le secteur des petites entreprises, qui sont les lieux de la création d'emplois.
A ce titre, nous avons une triple exigence.
D'abord, les mesures doivent être clairement circonscrites aux actions d'urgence présentées par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale.
Ensuite, nous proposons des solutions équilibrées, pour apporter à la fois de la souplesse à l'entreprise et à l'employeur et des garanties aux salariés. Ces propositions s'inscrivent donc dans le cadre de notre modèle social, qu'elles tendent à rénover.
Enfin, c'est bien dans un esprit de concertation que nous avons conduit, depuis un an, nos réflexions sur la levée des freins à la création d'emplois dans les petites et moyennes entreprises.
Au total, six ordonnances seront publiées.
La première mettra en place le contrat « nouvelles embauches » lui-même, qui pourra être conclu dans les entreprises comprenant jusqu'à vingt salariés. Il ouvrira au salarié un accès durable à l'entreprise, en garantissant l'ensemble des droits individuels et collectifs. Je le rappelle, 70 % des embauches se font actuellement dans le cadre d'un CDD.
Avec ce contrat, notre ambition est donc de construire un nouvel équilibre, en offrant plus de souplesse à l'employeur et de nouvelles garanties aux salariés.
Ainsi, la durée du préavis sera allongée en fonction de l'ancienneté. L'indemnité de cessation de contrat sera fixée également en fonction de l'ancienneté.
Il est prévu une allocation forfaitaire pour ceux qui n'auraient pas cotisé suffisamment longtemps, c'est-à-dire, dans le cadre de l'actuelle convention d'assurance chômage, pendant cent quatre-vingts jours.
Un accompagnement renforcé pour le retour à l'emploi est également instauré. Mesdames, messieurs les sénateurs, lors de la discussion du texte au Sénat, vous avez particulièrement insisté sur cette dimension. Il faut veiller à ce que l'accompagnement au retour vers l'emploi soit d'une qualité particulière pour ceux qui verraient leur contrat « nouvelles embauches » interrompu. Cela fera d'ailleurs l'objet d'une proposition de négociation en direction des partenaires sociaux, et nous devrons nous inspirer de la convention de reclassement personnalisé.
Ce contrat fera naturellement l'objet d'une évaluation, comme les deux assemblées l'ont souhaité, en liaison avec les partenaires sociaux.
La deuxième ordonnance créera le chèque emploi pour les très petites entreprises. Il s'agit d'une mesure de simplification, qui n'exonère pas pour autant l'employeur du registre unique, de la déclaration d'embauche et de sa responsabilité eu égard à l'affiliation.
La troisième ordonnance permettra d'alléger le surcoût lié au franchissement du seuil de dix salariés, grâce à la participation à l'effort de construction, à la contribution au Fonds national d'aide au logement et à la participation à la formation. Cette ordonnance comportera également une mesure visant à encourager le retour à l'emploi des jeunes dans les secteurs qui connaissent des difficultés de recrutement.
J'aurai l'occasion de débattre avec les partenaires sociaux des neuf groupes de métiers qui sont confrontés à une pénurie de main-d'oeuvre. Il s'agit notamment de certains métiers de bouche, du bâtiment et des travaux publics, mais aussi de l'électricité industrielle. Voilà les réalités auxquelles nous sommes confrontés.
Une prime sera également versée aux chômeurs de longue durée, bénéficiaires de minima sociaux, qui reprennent un emploi stable.
La quatrième ordonnance vise à faciliter l'accès à l'emploi des jeunes âgés de moins de vingt-six ans.
La cinquième ordonnance permettra d'adapter en métropole le service militaire adapté, qui a déjà fait ses preuves outre-mer.
Enfin, la dernière ordonnance concernera la fonction publique.
C'est ainsi que le contrat « nouvelles embauches » s'inscrit dans un ensemble de réformes de fond. A cet égard, je citerai notamment la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social et la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Cette dernière prévoit l'accompagnement des demandeurs d'emploi dans le cadre du plan de cohésion sociale, la réforme du service public de l'emploi, mais aussi l'allégement du coût du travail et le desserrement d'un certain nombre de freins dans le cadre des dispositifs portant sur le temps de travail.
Ce plan d'urgence est la première étape pour retrouver le chemin d'une croissance dynamique. Mesdames, messieurs les sénateurs, par votre vote aujourd'hui, vous permettrez de franchir cette étape dans la bataille de l'emploi, qui est au coeur de l'action du Gouvernement. Je tiens donc à remercier de nouveau la Haute Assemblée de sa contribution à l'élaboration de ce projet de loi d'habilitation. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sans surprise, entre amis de la majorité acquis aux thèses capitalistes (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF), députés et sénateurs réunis en commission mixte paritaire sont tombés d'accord sur le projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures d'urgence pour l'emploi.
M. Robert Bret. Cela n'a pas été difficile !
M. Guy Fischer. Il est vrai que, sur le fond, l'approche des deux assemblées ne différait guère : l'objectif était de parvenir à une flexibilisation totale du marché du travail, préconisée d'ailleurs dans la stratégie européenne de Lisbonne.
Si d'aucuns sur ces travées - je pense à mes collègues de l'UC-UDF, au premier rang desquels le président du groupe, M. Michel Mercier - ont tenté d'apporter quelques « garanties », monnayant ainsi leur abstention en première lecture, cela n'a rien changé à l'économie générale du projet de loi, lequel prescrit la précarité généralisée et reste donc porteur de tous les dangers.
Sont particulièrement menacés les salariés auxquels les mesures sont censées s'adresser, les jeunes, ceux qui travaillent dans de petites entreprises, voire dans de très petites entreprises. La situation y est plus dure, plus déséquilibrée, du fait notamment de l'absence de représentation du personnel.
Plus généralement, c'est sur l'ensemble du salariat, même si certains bénéficient d'un statut plus stable, que pèsera une pression renforcée.
En définitive, c'est notre modèle social qui est, une fois encore, affaibli par de nouvelles remises en cause majeures du code du travail, suivies, à l'automne prochain, par des restrictions sévères des droits à l'indemnisation du chômage. A cet égard, les conclusions de l'enquête du CREDOC, le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie, risquent de sensibiliser l'opinion publique en faveur d'une réduction à la fois du montant des indemnités de chômage et de la période d'indemnisation.
Confronté à une situation politique et sociale pourtant inédite, le Premier ministre continue de ne vouloir entendre que les seules voix du MEDEF et de la CGPME.
Comme son prédécesseur, dont il critique en creux la politique, M. de Villepin pratique la fuite en avant, en préconisant, pour lutter contre le chômage, toutes les vieilles recettes : exonérations de cotisations sociales, aides fiscales aux entreprises, suppression des garanties liées au régime juridique du licenciement, nouveau contrat de travail « à durée illimitée » de deux ans, prime d'incitation au retour à l'activité. Toutes ces solutions ont fait la preuve, en France ou chez nos voisins européens, de leur redoutable efficacité pour masquer le chômage derrière le sous-emploi précaire, conduisant immanquablement à la pauvreté la plus sévère.
La semaine dernière, en quittant l'hémicycle à l'issue de la discussion générale, sans chercher à corriger un projet qui ne pouvait pas l'être, les sénateurs communistes ont signifié qu'ils ne voulaient pas être une fois de plus ni les acteurs ni les spectateurs de votre nouvelle offensive libérale, qui va totalement à contresens des exigences populaires exprimées, notamment, à l'occasion du référendum.
Nous avons voulu affirmer fortement, sans ambiguïté, notre complet désaccord avec une procédure autoritaire, celle des ordonnances, que rien ne justifie et par laquelle le Gouvernement bâillonne le Parlement et menotte les partenaires sociaux.
Les consultations avec les partenaires sociaux se poursuivent sans que ces derniers parviennent à adhérer à la mise en place de la mesure phare de ces ordonnances, le contrat « nouvelles embauches ».
Et pour cause, monsieur le ministre ! Les syndicats sont conscients des remises en cause des droits et des garanties collectives dont votre projet est porteur. Ainsi, durant deux ans, sans devoir en justifier le motif et sans avoir à verser d'indemnité, l'employeur d'une petite entreprise pourra licencier un salarié. En rendant le licenciement plus facile, ce n'est pas l'embauche sur des emplois stables que vous favorisez, mais c'est le turnover de la main-d'oeuvre, son adaptation et sa mobilité au « travail en miettes ».
Nous savons tous que cela n'est qu'un début et que le pas sera vite franchi, toujours au nom de l'emploi, pour imposer, ensuite, à l'ensemble des salariés l'extension de ces « parenthèses » de protections totalement dérogatoires au droit du travail.
L'un des dispositifs prévus dans ce projet de loi, qui revient à neutraliser l'importance des effectifs âgés de moins de vingt-cinq ans dans le calcul des seuils de salariés, concerne déjà tous les salariés, quel que soit le type de leur contrat de travail.
Pas plus que nous, les syndicats ne sont dupes des prétendues contreparties à une flexibilité bien réelle.
Durant ces débats, il a beaucoup été question de garantir aux salariés bénéficiaires du contrat « nouvelles embauches » une indemnisation chômage supérieure à celle de droit commun, ainsi qu'un parcours de réinsertion personnalisé. Il sera alors très intéressant d'étudier, d'une part, la manière adoptée par l'UNEDIC pour traiter le problème des chômeurs et, d'autre part, les solutions apportées dans les mois à venir au problème des minima sociaux.
La commission mixte paritaire aurait prétendument clarifié le dispositif en question, lequel n'en demeure pas moins extrêmement vague. Il est désormais fait mention d'un revenu de remplacement spécifique pour toutes les personnes dont le contrat « nouvelles embauches » aurait été rompu.
Hier, sur RMC, M. le ministre a précisé que le salarié devra avoir travaillé quatre mois pour percevoir cette allocation, dont le montant serait proche de celui de l'ASS, l'allocation de solidarité spécifique. Il s'agit là d'un système d'aide dérisoire et non de droits ouverts à l'assurance chômage en raison d'une activité professionnelle. Nous sommes loin du supposé équilibre entre la souplesse nécessaire à l'employeur et la protection légitime des salariés !
Avec vous, décidemment, la balance penche toujours du coté de l'arbitraire patronal, du CAC 40. L'audace serait plutôt de refuser l'accentuation des inégalités dans le salariat, de s'attaquer aux causes de la précarité et de viser le plein emploi, au lieu d'accentuer les rotations entre activité, sous-emploi et non-emploi.
Mes chers collègues, aujourd'hui, les sénatrices et les sénateurs communistes confirment leur opposition frontale à ce projet de loi contraire aux intérêts des salariés et des personnes en situation de précarité.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos sera très bref, car nous avons, me semble-t-il, dit tout ce que nous avions à dire jeudi dernier, même si ce fut dans des conditions un peu difficiles. En effet, il n'était pas très facile de nous faire entendre, car, à un moment donné, nous avons dû faire face à un « front reconstitué ».
A l'issue d'une procédure parlementaire accélérée, destinée à débattre de textes qui seront finalisés et publiés pendant l'été, un fait est sûr : il n'existe pas, il faut le dire très clairement, de plan Villepin pour l'emploi. Il existe des mesures, qui se trouvaient déjà dans les tiroirs des gouvernements Raffarin I, II et III et que l'on a ressorties, en les habillant, pour constituer un ensemble. La seule vraie mesure novatrice, c'est le CNE, le contrat « nouvelles embauches », à propos duquel, vous le savez - j'y reviendrai tout à l'heure -, nous sommes extrêmement critiques.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle bien peu de nos questions ont obtenu une réponse, même si, monsieur le ministre, vous avez fait un petit effort pour répondre à quelques-unes de nos interrogations. Mais il est vrai que certaines réponses ne peuvent pas être faites !
Nous sommes tout bonnement en présence d'un arsenal de mesures correspondant précisément aux revendications récurrentes du MEDEF. M. Seillières peut partir, car sa mission, me semble-t-il, est accomplie. A Mme Parisot de se montrer, en apparence, momentanément plus ouverte.
Parmi les différents dispositifs que vous nous avez si brièvement exposés, un seul, sans doute, l'extension du service militaire adapté, ne pose pas de problème majeur, même si une telle mesure est adoptée dans la précipitation et sans que nous ayons obtenu de réponse à l'ensemble des questions que nous avons posées.
Pour le reste, il s'agit d'attaques frontales contre la représentation syndicale et, donc, contre le dialogue social, lequel ne représente à vos yeux qu'une expression servant à masquer le refus du patronat de concéder quoi que ce soit aux salariés.
Sous le prétexte d'une mesure intéressante concernant l'apprentissage et destinée à aider les jeunes non diplômés à accéder à ces catégories d'emplois, le statut de la fonction publique fait l'objet d'une nouvelle attaque.
Chacun sait qu'une telle mesure est prise par ordonnance pour éviter une négociation difficile avec les syndicats sur les conséquences de sa mise en oeuvre. En effet, les précédentes négociations qui ont eu lieu en juin n'ont pas abouti.
Vous proposez par ailleurs des mesures parfaitement traditionnelles pour faire reculer les effets des seuils sociaux et pour officiellement simplifier les formalités d'embauche et de paiement. Cela aboutira en réalité à dématérialiser le contrat de travail et à priver le salarié de bulletins de salaire. Il ne pourra donc même plus s'assurer qu'il a été payé pour les heures effectuées.
En outre, s'il est employé grâce à un contrat « nouvelles embauches », il sera dépourvu d'une bonne partie, pour ne pas dire de la totalité, des droits et des garanties élémentaires. Avec ce contrat, vous avez accompli le rêve du patronat : revenir à une situation que seuls les plus anciens ont connue, celle d'avant le CDI, d'avant les procédures de licenciement, quand le patron était totalement libre de « virer » - c'est le terme qui convient ! - un salarié dans l'heure, sans motif ni procédure. En fait, ce contrat n'est pas nouveau ; vous l'avez plutôt sorti des oubliettes de l'histoire sociale.
Un tel dispositif est à l'opposé de la notion d'entreprise citoyenne. Ce mode de gestion, en s'attaquant à cet élément important qu'est un travail stable, est plutôt un facteur de déstabilisation de la citoyenneté.
Dès aujourd'hui, la négociation sur l'assurance chômage prévue à l'automne s'annonce difficile. En effet, la nouvelle ampleur que souhaite donner le MEDEF au contrat « nouvelles embauches » laisse présager le pire, non seulement au regard du déni du droit, mais aussi parce que les salariés qui auront été virés - on ne peut même plus dire licenciés - dépendront de la solidarité nationale et non pas du régime paritaire d'assurance chômage.
M. Guy Fischer. Voilà !
M. Jean-Pierre Godefroy. Nous craignons fort que la rage de démantèlement de tout notre système de protection sociale ne se poursuive avec la remise en cause des droits à l'assurance chômage. Déjà, sur le terrain, les maisons de l'emploi qui se mettent en place préfigurent la reconfiguration de l'ANPE et de l'UNEDIC, avec des bureaux de placement privés qui assureront une gestion privée et, ce qui est pire, rentable, de la précarité.
Nous sommes en présence d'un projet global, que vous mettez progressivement en place, texte après texte, petites touches par petites touches, pour vous assurer qu'il passera mieux. Ce projet est celui que nous imposent les organismes financiers internationaux et les représentants des différents patronats nationaux. Ce projet est celui d'un ultralibéralisme destructeur du statut salarial et de la cohésion sociale, où l'inégalité est le fondement des rapports humains.
Monsieur le ministre, je terminerai en évoquant rapidement deux points.
Tout d'abord, même si nous vous avons dit tout le mal que nous pensions du contrat « nouvelles embauches », je souhaite l'évoquer de nouveau, au regard de la discussion que nous avons eue cet après-midi sur l'égalité salariale.
Dans le cadre du CNE, l'employeur n'est pas tenu de motiver un licenciement. Vous m'avez dit, monsieur le ministre, qu'une lettre recommandée serait nécessaire. Cependant, si, dans cette lettre, n'est évoqué, par exemple, que le mauvais temps pour justifier ce licenciement, ce sera peut-être une lettre « météo », mais non une lettre dûment motivée. Or je pense que la rupture du lien de travail doit être motivée.
Les femmes âgées de moins de vingt-six ans seront les plus menacées par ces nouveaux contrats !
M. Guy Fischer. C'est un comble !
M. Jean-Pierre Godefroy. En effet, le licenciement n'ayant plus à être motivé, toutes les dispositions dont nous avons parlé cet après-midi ne s'appliqueront pas à ces salariées ! Voilà un bel exemple d'un double discours, d'un double langage !
M. Guy Fischer. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Godefroy. Par ailleurs, je le répète - cela ne vous surprendra pas ! - nous ne pouvons pas accepter que des jeunes âgés de moins de vingt-six ans soient considérés comme des sous-citoyens quand ils entrent dans l'entreprise ! Je l'ai déjà dit et je le répète, car il faut que cela se sache ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Ces jeunes peuvent être élus, ils ont tous les droits des citoyens. L'entreprise ne peut pas être un champ clos à la citoyenneté !
Vous nous avez dit, monsieur le ministre, que ce contrat « nouvelles embauches » était un CDI. Dès lors, je ne comprends pas pourquoi vous ne lui appliquez pas les règles générales du code du travail, qui prévoient déjà des conditions - certes, elles ne sont pas satisfaisantes -, pour comptabiliser les travailleurs, en ce qui concerne, notamment, les comités d'entreprise et la représentation syndicale. Puisqu'il s'agit d'un CDI, n'établissez pas de mesures dérogatoires pour ces jeunes ! Appliquez-leur les mesures générales du code du travail ! Cela devrait être assez simple !
Pourquoi ne le faites-vous pas ? Par facilité ! Le salarié sera « viré », puisque l'employeur ne sera pas obligé de motiver le licenciement.
En fait, nous avons un Gouvernement qui se comporte comme le docteur Jekyll et mister Hyde. D'un côté, on vient nous voir avec un discours social que nous pouvons admettre, on nous dit, la main sur le coeur, qu'il faut aider les gens, notamment les jeunes, à trouver du travail. Puis, de l'autre côté, dans les instants qui suivent, apparaît le gouvernement Mr Hyde, qui prône plus de libéralisme, moins de mesures sociales et plus de mobilité. Mais écoutez-vous donc, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement ! Dans la presse, il n'est pas un jour où l'un ne contredit pas l'autre !
M. Robert Bret. Il n'y a qu'à lire Le Figaro tous les jours !
M. Jean-Pierre Godefroy. Il suffit de lire le journal d'aujourd'hui, par exemple en ce qui concerne l'ISF, l'impôt de solidarité sur la fortune ! Vous tenez un discours totalement contradictoire !
La réalité, monsieur le ministre, c'est que, en définitive, tout en prenant soin de l'habillage - et vous excellez dans ce domaine - vous donnez le pas aux mesures libérales, voire ultralibérales !
Par conséquent, nous sommes absolument opposés à ce projet de loi, qui va à l'encontre des valeurs auxquelles nous sommes attachés ; pour nous, les profits engendrés par le développement économique doivent être répartis dans un esprit de justice et de solidarité. Tel n'est pas le cas ! Aussi, réaffirmant le vote négatif que nous avons émis la semaine dernière et celui que nous avons exprimé hier en commission mixte paritaire, nous voterons contre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.
Article 1er
La Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure visant à :
1° Favoriser l'embauche dans les entreprises et organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 131-2 du code du travail et n'employant aucun salarié ou n'employant qu'un petit nombre de salariés, par l'institution d'un contrat de travail sans limitation de durée comportant pendant une période déterminée des règles de rupture et un régime indemnitaire spécifiques, garantissant au salarié, pendant cette période, une indemnité en cas de rupture à l'initiative de l'employeur supérieure à celle résultant de l'application des règles de l'article L. 122-9 du même code ;
1° bis Evaluer le dispositif prévu au 1° ;
2° Prévoir, pour les salariés dont le contrat mentionné au 1° a été rompu, en particulier ceux qui n'ont pas encore acquis de droits à l'assurance chômage, un revenu de remplacement adapté à leur situation, ainsi qu'un accompagnement renforcé et personnalisé en vue de leur retour à l'emploi, assuré par le service public de l'emploi, comportant des possibilités de formation et financé, le cas échéant, par une contribution spécifique à la charge de leur employeur ;
3° Alléger, pour les employeurs occupant moins de vingt salariés ou atteignant ou dépassant cet effectif, les effets financiers résultant de l'application des articles L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation, L. 834-1 du code de la sécurité sociale, L. 951-1 du code du travail et 235 ter EA du code général des impôts, moyennant une compensation par l'Etat de la diminution éventuelle des ressources pour les bénéficiaires des versements et contributions institués par les articles susmentionnés ;
4° Aménager les règles de décompte des effectifs utilisées pour la mise en oeuvre de dispositions relatives au droit du travail ou d'obligations financières imposées par d'autres législations, pour favoriser, à compter du 22 juin 2005, l'embauche par les entreprises de salariés âgés de moins de 26 ans ;
5° Mettre en place dans les institutions de la défense, par aménagement des textes législatifs appropriés, notamment le code de la défense, le code du service national, la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires et la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense, et en s'inspirant du modèle relatif à la formation professionnelle des volontaires stagiaires du service militaire adapté en vigueur outre-mer, un dispositif d'accompagnement et d'insertion sociale et professionnelle des jeunes en difficulté leur permettant l'obtention de diplômes ou titres professionnels et assorti d'un statut adapté aux exigences particulières de cette formation ;
6° Permettre aux très petites entreprises d'utiliser un dispositif simplifié pour leurs déclarations d'embauche ainsi que pour leurs déclarations relatives au paiement des cotisations et contributions sociales de leurs salariés, et pouvant, le cas échéant, tenir lieu de contrat de travail et de bulletin de paie et servir de titre de paiement ;
7° Supprimer les limites d'âge applicables au recrutement dans la fonction publique de l'Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière, y instituer une nouvelle modalité de recrutement pour l'accès des jeunes de moins de 26 ans aux corps et cadres d'emploi de catégorie C par la voie d'une formation en alternance conduisant à la titularisation après vérification des aptitudes professionnelles, et prévoir une exonération de cotisations sociales pour les personnes recrutées par cette procédure ;
8° Instituer une mesure fiscale :
a) En faveur des personnes inscrites comme demandeurs d'emploi depuis plus d'un an et titulaires de certains avantages sociaux non contributifs accordés sous condition de ressources, qui créent ou reprennent une entreprise, ou qui sont recrutées pour occuper un emploi dans une entreprise ;
b) Encourageant les jeunes de moins de 26 ans à occuper un emploi dans certains secteurs professionnels connaissant des difficultés de recrutement ;
9° Adapter les ordonnances prises en application des 5°, 6° et 8° aux départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon ; rendre applicables à Mayotte, en les adaptant, les ordonnances prises en application des 1° à 7° appropriées à l'organisation particulière de cette collectivité.
M. le président. Je ne suis saisi d'aucun amendement.
Quelqu'un demande-t-il la parole ?...
Je rappelle que le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction du texte proposé par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. André Lardeux, pour explication de vote.
M. André Lardeux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le taux de chômage élevé que nous connaissons depuis plus de vingt ans n'est pas une fatalité. Nous savons que la prospérité ne peut s'installer sans réformes menées avec détermination, qu'elle ne peut exister sans innovations refusant les tabous et que les réformes engagées doivent être évaluées pour être ajustées si cela s'avère nécessaire.
En habilitant le Gouvernement à légiférer sur l'emploi par ordonnances, ce sont ces choix de réforme, d'innovation et d'évaluation que nous faisons.
La commission mixte paritaire s'est déroulée dans les meilleures conditions. Une précision importante a été ajoutée au texte concernant les conséquences de la rupture du contrat « nouvelles embauches » : un revenu de remplacement spécifique est prévu pour toutes les personnes dont ledit contrat aurait été rompu, et non pas seulement pour celles qui n'auront pas été affiliées pendant les six mois ouvrant droit à l'assurance chômage de droit commun. Cette modification va dans le bon sens et nous ne pouvons que l'approuver.
Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, de la qualité des échanges que nous avons eus tout au long de ces débats, comme je remercie la commission, son président, mais aussi notre excellent rapporteur, Alain Gournac, pour la qualité de son travail.
Nous sommes parvenus à un texte équilibré, destiné à la fois à lever les obstacles à l'embauche et à apporter les garanties indispensables aux salariés.
M. Robert Bret. Il ne faut pas exagérer !
M. André Lardeux. Les négociations avec les partenaires sociaux se poursuivent sur les textes des ordonnances en préparation. Soyez assuré, monsieur le ministre, de notre soutien tout au long de leur mise en oeuvre. Le groupe UMP votera donc ce texte avec détermination. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de cette discussion sur ce projet de loi d'habilitation, je souhaite redire que le groupe de l'UC-UDF du Sénat est opposé à la procédure des ordonnances. Nous avons expliqué qu'elle ne nous paraît pas adaptée. Nous étions prêts à étudier au fond les textes que l'on aurait pu nous présenter.
Au demeurant, je reconnais que nous avons eu un vrai débat sur le projet de loi d'habilitation. Des dispositions encadrant très clairement l'exercice du pouvoir réglementaire ont été adoptées. Je pense aux garanties particulières accordées au salarié licencié après avoir signé un contrat « nouvelles embauches » : une indemnité spécifique lui sera assurée en cas de rupture à l'initiative de l'employeur ; en outre, il bénéficiera d'un régime d'assurance chômage immédiat financé, le cas échéant, par une contribution de l'employeur
Je pense qu'il était du devoir des sénateurs de l'UC-UDF de défendre ces mesures qui assurent une plus grande flexibilité à l'entreprise, mais aussi de meilleures garanties aux salariés que le contrat à durée indéterminée.
Je tiens à remercier M. le rapporteur, qui a défendu en commission mixte paritaire la position qui avait été adoptée par le Sénat, avec l'accord du Gouvernement, et je suis heureux qu'il ait pu convaincre les députés de suivre notre assemblée sur ce point.
Je rappelle que, parmi les amendements du groupe de l'UC-UDF qui ont été adoptés, figure la suppression de l'exemption de versement transport. Ainsi, plus de 500 millions d'euros resteront à la disposition des collectivités locales, qui pourront les utiliser pour faire vivre les transports en commun dans les diverses agglomérations.
Nous réitérons donc le vote que nous avons émis lors de la première lecture.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 201 :
Nombre de votants | 323 |
Nombre de suffrages exprimés | 297 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 149 |
Pour l'adoption | 169 |
Contre | 128 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Gournac, rapporteur. Je me réjouis de ce vote et remercie ceux de mes collègues qui ont bien voulu apporteur leur soutien à ce texte.
8
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie
Le rapport sera imprimé sous le n° 475 et distribué.
9
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président. J'ai reçu de M. Paul Girod un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur la gestion de la dette de l'Etat dans le contexte européen.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 476 et distribué.
10
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 13 juillet 2005, à neuf heures trente, quinze heures et, éventuellement, le soir :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 473, 2004-2005) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
2. Discussion en troisième lecture du projet de loi organique (n° 474, 2004-2005), modifié par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.
M. Alain Vasselle, Rapporteur de la commission des affaires sociales.
3. Discussion des conclusions du rapport (n° 467, 2004-2005) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de sauvegarde des entreprises.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
4. Discussion des conclusions du rapport (n° 453, 2004-2005) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
5. Discussion des conclusions du rapport (n° 475, 2004-2005) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie.
M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures trente-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD