CHAPITRE VII :

LES TROISIÈMES CONTRAT DE PLAN ETAT-RÉGIONS ET L'ÉVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES

I. LA PROCÉDURE DES TROISIÈMES CONTRATS DE PLAN ETAT-RÉGION ENCOURAGEAIT ET ORGANISAIT L'ÉVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES

A. LA PROCÉDURE DE CONTRAT DE PLAN ETAT-RÉGION FACILITE L'ÉVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES

A priori , la procédure de contrat de plan devrait favoriser , selon diverses modalités, l'évaluation des politiques publiques contractualisées.

En premier lieu, l'élaboration des contrats de plan représente pour l'Etat et les collectivités locales un cadre privilégié pour confronter leurs diagnostics et leurs stratégies, et pour s'interroger sur la pertinence de leurs politiques, notamment en matière d'aménagement du territoire.

De plus, le calendrier d'élaboration des contrats de plan peut constituer un horizon mobilisateur pour la réalisation d'études d'impact.

Au total, la procédure des contrats de plan pourrait favoriser l'évaluation ex ante des politiques publiques.

Les études d'impact et les évaluations ex ante des politiques publiques contractualisées, qui n'étaient pas rendues obligatoires par la procédure, furent toutefois très rares lors de l'élaboration des troisièmes contrats de plan.

Cela s'explique sans doute par les difficultés particulières de ce type d'exercice, comme par le manque de ressources humaines disponibles, les personnes compétentes étant par ailleurs mobilisées par la préparation, la négociation et la rédaction des contrats.


L'ÉVALUATION ET LES CONTRATS DE PLAN ETAT-RÉGION : DÉFINITIONS 160( * )


1) Qu'est-ce que l'évaluation ?

La circulaire du Premier ministre du 28 décembre 1998 propose pour l'évaluation des politiques publiques la définition suivante :

" L'évaluation d'une politique publique consiste à comparer ses résultats aux moyens qu'elle met en oeuvre (juridiques, administratifs ou financiers) et aux objectifs initialement fixés. Elle se distingue du contrôle et du travail d'inspection en ce qu'elle doit aboutir à un jugement partagé sur l'efficacité de cette politique et non à la simple vérification du respect de normes administratives ou techniques ".

2) Quels peuvent être les objectifs de l'évaluation ?

D'une manière générale, l'évaluation répond à un besoin de rationalité et de cohérence des choix publics. L'évaluation cherche ainsi à apprécier dans quelle mesure la politique évaluée présente les qualités d'une bonne politique :

- Cohérence dans la conception et la mise en oeuvre : les différents objectifs sont-ils cohérents entre eux ? Les moyens mis en place sont-ils adaptés à ces objectifs ?

- Effectivité de la mise en oeuvre : la politique annoncée a-t-elle effectivement mise en oeuvre ?

- Atteinte des objectifs : dans quelle mesure les évolutions constatées sont-elles conformes aux objectifs de la politique poursuivie ?

- Efficacité : dans quelle mesure la politique étudiée a produit les effets escomptés ? L'efficacité doit être distinguée de l'atteinte des objectifs. En effet, certains des objectifs peuvent être atteint grâce à des évolutions indépendantes des politiques mises en oeuvre, et sans que ces politiques soient efficaces ou utiles.

- Efficience : les ressources financières mobilisées par la politique mise en oeuvre ont-elles été bien mobilisées ? La politique mise en oeuvre constitue-t-elle le moyen le moins coûteux pour atteindre les objectifs fixés ? Notons qu'une politique peut-être efficace sans être efficiente, c'est à dire produire les effets escomptés au prix d'un gâchis de ressources.

- Impact socio-économique : quels sont l'ensemble des effets socio-économiques de la politique mise en oeuvre ?

- Pertinence : les objectifs explicites de la politique mise en oeuvre sont-ils adaptés à la nature des problèmes que cette politique est censée résoudre ou prendre en charge ?

3) Quels sont les différents niveaux d'évaluation possibles pour les contrats de plan ?

Il convient de distinguer l'évaluation de la procédure de contrat de plan Etat-Région de l'évaluation d'ensemble du contenu des contrats de plan, comme de l'évaluation des politiques contractualisées.

- Evaluer la procédure de contrat de plan, c'est se demander dans quelle mesure cette procédure a permis des politiques publiques plus efficaces, plus efficientes, plus transparentes et davantage en adéquation avec les souhaits de nos concitoyens. C'est la démarche adoptée dans l'ensemble de ce rapport .

- Evaluer l'ensemble du contenu des contrats de plan, c'est se demander si les politiques contractualisées sont globalement efficaces, c'est à dire notamment si les grands objectifs assignées aux contrats de plan ont été atteints.

Le ministère de l'Equipement indique à cet égard que " les contrats de plan font l'objet de deux types d'évaluation : une évaluation au niveau régional conduite par le préfet qui porte sur l'adéquation de chaque contrats à la stratégie de l'Etat en région ; des évaluations conduites par les l'administration centrale qui portent sur l'adéquation de l'ensemble des contrats aux politiques globales conduites au niveau nationales ".

Ces évaluations sont toutefois très formelles . Elles consistent pour l'essentiel à vérifier que les actions contractualisées sont bien conformes aux critères d'éligibilité établis à Paris. Ces exercices sont en outre conduit dans un cadre sectoriel.

En fait, comme votre rapporteur l'a souligné au chapitre précédent, l'Etat avait expressément écarté toute évaluation d'ensemble du contenu des troisièmes contrats de plan Etat-Région.

- Enfin, il est également possible d'essayer d'évaluer les effets isolés de certaines des politiques publiques contractualisées, sans chercher à porter une appréciation globale sur les disposition du contrat de plan. C'est ce type d'évaluation, plus modeste, qui avait été préconisée par le Commissariat général du Plan.

4) A quel moment peut intervenir l'évaluation ?

Les évaluations des politiques publiques contractualisées peuvent intervenir aux différents stades des contrats de plan : lors l'élaboration des contrats (études d'impact, évaluations ex ante ), pendant l'exécution des contrats (évaluations concomitantes ou au fil de l'eau), ou bien après l'achèvement des contrats (évaluations ex post ).

5) Quelles sont les différentes méthodes d'évaluation ?

Le terme " d'évaluation " peut recouvrir des pratiques très différenciées, depuis des évaluations lourdes, longues, coûteuses, à la méthodologie élaborée, et à visée " scientifique ", jusqu'à des audits plus ponctuels ou plus " politiques ", toutes ces pratiques ayant leur champ de pertinence propre.

6) Quels sont les critères d'une " bonne " évaluation ?

Le Conseil scientifique de l'évaluation a retenu cinq critères de qualité d'une évaluation :

- utilité-pertinence : c'est le fait que l'évaluation produise de l'information compréhensible et utile ;

- fiabilité : l'évaluation doit être digne de confiance, en particulier éviter les biais résultant des techniques de collecte et de traitement des informations ;

- objectivité : le fait que les résultats de l'évaluation n'ont pas été influencés par les préférences personnelles ou les positions institutionnelles des responsables de l'évaluation, ou du moins que ces préférences ont été suffisamment explicitées ou contrôlées pour que l'on puisse supposer qu'une autre évaluation répondant aux mêmes questions et utilisant les mêmes méthodes conduirait aux mêmes conclusions ;

- possibilité de généralisation : dans quelle mesure les conclusions peuvent-elles être étendues à d'autres situations, d'autres contextes, voire à des politiques différentes ;

- transparence : l'évaluation doit expliciter ses méthodes, son mode d'emploi et ses limites.

On peut certes considérer, avec le ministère de la Défense, que la " contractualisation participe [en principe] implicitement d'une évaluation [légère] ", dès lors que " pour contractualiser certaines propositions et les rendre attrayantes, il convient d'avoir au préalable défini le projet et, au minimum, l'avoir évalué sommairement, non pas seulement en termes de coûts mais également par référence à ses effets sur l'activité, l'emploi et plus généralement les critères du développement durable ".

Néanmoins, comme le reconnaît le ministère de la Défense, " la négociation peut faire varier sensiblement l'assiette de l'opération envisagée et les priorités de chaque partenaire se révèlent dans les faits aussi importantes que l'optimalisation intrinsèque du projet ".

En d'autres termes, au moment de l'élaboration des contrats de plan, les impératifs de la négociation l'emportent sur ceux de l'évaluation.

En outre, la Direction du Budget souligne que " la procédure de contrat de plan ne permet pas toujours d'allouer des crédits à des projets parfaitement identifiés, dont la pertinence aurait pu être appréciée au fond par les services compétents... la logique qui prévaut est parfois celle de l'allocation d'enveloppes dont l'affectation précise est déterminée ultérieurement ".

• La procédure des contrats de plan facilite toutefois l'évaluation concomitante ou ex post des politiques publiques contractualisées.

En effet, la procédure contractuelle invite à affecter des moyens bien délimités à des objectifs clairs, dans un cadre formalisé, pluriannuel et transparent. Le CIAT du 23 juillet 1992 avait d'ailleurs insisté sur la définition d'objectifs précis , exprimés en termes d'effets attendus . Cette démarche facilite évidemment l'évaluation des politiques publiques.

Par ailleurs, la contractualisation Etat-Régions favorise a priori le décloisonnement de l'Etat, les échanges d'information entre administrations, l'émergence de référentiels communs à l'Etat et aux collectivités locales (comme des schémas directeurs), ainsi que la constitution de bases de données partagées (indicateurs socio-économiques, indicateurs budgétaires et financiers, etc.), qui constituent souvent des préalables à la mise en oeuvre d'une évaluation réussie.

Les contrats de plan Etat-Régions pourraient ainsi avoir favorisé le développement des observatoires régionaux de l'emploi et de la formation (OREF), comme des réseaux d'information économique et sociale , placés sous l'égide des Conseils économiques et sociaux régionaux et animés par des chargés de mission de l'INSEE, avec pour missions de mettre en réseau les services de l'Etat et de la Région, ainsi que de réaliser et de diffuser des informations socio-économiques locales (par exemple des atlas des zonages).

Enfin, certains ministères ont diffusés des guides méthodologiques pour l'évaluation des politiques publiques dans leur domaine. En particulier, un " dossier-ressources pour l'évaluation des contrats de ville " et un " guide méthodologique des tableaux de bord socio-démographiques des quartiers " ont été produits à l'initiative de la Délégation interministérielle à la Ville, pour aider à la mise en oeuvre de l'évaluation des contrats de ville.

Par ailleurs, les troisièmes contrats de plan prévoyaient l'évaluation d'un certain nombre de politiques publiques contractualisées.

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