7. Des réticences culturelles
Enfin,
les partenaires du contrat de plan Etat-Région n'ont pas toujours su
"
apprivoiser
" l'évaluation.
En effet, alors que la culture anglo-saxonne, plus pragmatique, est
traditionnellement sceptique quant aux capacités décisionnelles
des autorités publiques, la culture politique et administrative
française reste très imprégnée par l'idée de
l'omniscience des pouvoirs publics.
Dans le monde anglo-saxon, l'échec d'une politique publique peut
être ainsi imputé au manque de données pertinentes dont
disposaient les autorités publiques au moment de leur décision,
ou bien plus simplement à un changement de circonstances. En revanche,
en France, si une politique ne donne pas les résultats escomptés,
c'est qu'elle avait été mal conçue ou qu'elle est mal mise
en oeuvre.
Dès lors, l'évaluation est encore perçue en France moins
comme un outil de gestion que comme une forme de
contrôle
,
appelant
in fine
des admonestations, voire des
sanctions
,
à l'instar des "
inspections
" réalisées
par les corps d'inspection de l'Etat.
Les préfets et les élus, comme leurs services respectifs,
étaient donc au départ souvent
méfiants
vis
à vis de l'évaluation, voire " angoissés " par
l'idée d'être ainsi " jugés ". Les élus
contestaient d'ailleurs parfois la légitimité de ce jugement, au
regard de la légitimité conférée par les
élections.
Dans ces conditions, les décideurs publics pouvaient estimer avoir en
fait
peu intérêt
à l'évaluation des
politiques publiques.
Dans le cadre des contrats de plan Etat-Région, ce risque était
d'ailleurs accru par les modalités de la négociation. En effet,
la signature des contrats de plan s'accompagne d'un discours d'autosatisfaction
peu propice à l'évaluation. En particulier, les partenaires des
contrats de plan étaient peu enclins à évaluer les
programmes qu'ils avaient " arraché " en fin de
négociation à leurs cocontractants.
Certaines Régions soulignent ainsi que, dans le cadre des instances
régionales d'évaluation, les préfets ou les SGAR ont
chercher davantage à évaluer les politiques impulsées par
les Régions dans leur champ de compétence que les dispositifs
inscrits dans le noyau dur imposé par l'Etat
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*
)
.
Au total, ces éléments de contexte expliquent très
largement les résultats parfois décevants des évaluations
entreprises à titre expérimental dans le cadre des
troisièmes contrats de plan Etat-Région.