CHAPITRE IV
A L'ÉCHELLE NATIONALE, ASSOCIER
VOLONTARISME
POLITIQUE ET UTILISATION PRAGMATIQUE DES INSTRUMENTS
ÉCONOMIQUES
I. COMBINER LES INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES AVEC PRAGMATISME
1. Pour des politiques graduelles, prévisibles et crédibles
Le rapport efficacité/coût des politiques nationales de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre sera d'autant plus élevé que ces politiques seront judicieusement échelonnées dans le temps, c'est-à-dire que leur calendrier sera adapté à la durée de vie des équipements .
DURÉE DE VIE MOYENNE DE QUELQUES ÉQUIPEMENTS
L'influence du temps |
Durée de vie moyenne |
Taux de renouvellement moyen/an |
Ampoules électriques à incandescence |
|
|
Télévision |
5 à 7 ans |
15 à 20 % |
Réfrigérateur |
8 à 10 ans |
10 à 12 % |
Voiture automobile |
8 à 10 ans |
10 à 12 % |
Chaudière domestique |
10 à 15 ans |
7 à 10 % |
Procédé industriel |
10 à 20 ans |
5 à 10 % |
Chaudière industrielle |
10 à 20 ans |
5 à 10 % |
H.L.M. |
30 à 40 ans |
2,5 à 3 % |
Maison individuelle |
50 à 100 ans |
1 à 2 % |
Réseau d'eau, d'Elec ou de gaz |
50 à 100 ans |
1 à 2 % |
Route, chemin de fer |
> 100 ans |
> 1 % |
1 voie d'eau 1 port |
100 à 300 ans |
0,3 à 1 % |
Source : B. Dessus "
Energy strategies for
sustainable
development
", FPH, 1994.
D'un côté, il serait coûteux - et irréaliste -
d'exiger des entreprises qu'elles installent instantanément des
dispositifs de dépollution ou de demander aux ménages de changer
immédiatement leurs fenêtres au profit de modèles plus
économes en énergie ; de l'autre, il serait inefficace de ne
pas inciter les agents privés à prendre en compte leurs
émissions de CO
2
lorsqu'ils modernisent leurs techniques de
production, renouvellent leurs véhicules, rénovent des
bâtiments ou en construisent de nouveaux.
Les mesures de réduction des émissions doivent donc s'inscrire
dans la durée et être
annoncées à l'avance
,
suivant un calendrier prévisible, afin que les ménages et les
entreprises puissent intégrer efficacement la maîtrise des
émissions dans leurs choix d'investissement. L'OCDE souligne
ainsi
86(
*
)
que "
c'est en
supprimant l'effet de surprise des mesures anti-pollution que l'on
réduit les coûts d'ajustement, et non pas en retardant simplement
leur instauration
"
.
Les politiques de maîtrise des émissions doivent en outre
systématiquement
préparer le long terme
. Les objectifs de
Kyoto ne constituent en effet qu'un "
point de passage
" (F.
MOISANS) : à long terme, nos émissions de gaz à effet
de serre devront sans doute converger vers des niveaux plus faibles que ceux
d'aujourd'hui, alors même que la France aura à faire face entre
2010 et 2030 à l'échéance du remplacement de son parc
électronucléaire, qui risque de se traduire par une hausse des
émissions liées à la production
d'électricité (à moins que les centrales nucléaires
en fin de vie ne soient intégralement remplacées par de nouvelles
centrales nucléaires).
Les politiques de maîtrise des émissions seront par ailleurs
d'autant plus lisibles, crédibles et efficientes qu'elles s'appuieront
en priorité sur des
instruments de marché
ou sur des
mesures utiles en tout état de cause
(en particulier la
suppression des distorsions fiscales), plutôt que sur des dispositifs
administratifs (réglementations, subventions), qui s'avèrent
souvent instables.