c) L'avis d'une entreprise utilisatrice de la réglementation européenne
Au
delà de la simple description des procédures
réglementaires, votre rapporteur a souhaité interroger quelques
entreprises " utilisatrices " de cette législation, qui
demandent des autorisations européennes pour leurs produits issus du
génie génétique.
Ce point de vue -certes subjectif- est intéressant : il montre que
la principale " faiblesse " du dispositif européen par rapport
aux autres systèmes mondiaux est la longueur et l'incertitude du
délai nécessaire pour obtenir une autorisation, alors que les
examens scientifiques requis sont jugés relativement proches dans les
différents systèmes d'autorisation.
LE POINT DE VUE D'UNE ENTREPRISE SUR LA PROCÉDURE D'AUTORISATION EUROPÉENNE COMPARÉE AU RESTE DU MONDE
Les
entretiens avec des responsables d'une entreprise américaine de
biotechnologie chargés de l'autorisation, de par le monde, de produits
transgéniques, ont fait ressortir l'analyse suivante :
Les informations
requises des industriels par les autorités
réglementaires chargées de l'évaluation de la
sécurité des produits sont identiques dans toutes les
régions du monde. Les mêmes analyses sont requises, qu'il s'agisse
de l'environnement ou de la santé humaine.
La principale différence réside dans le délai
nécessaire pour obtenir une autorisation
:
- aux Etats-Unis, le temps d'instruction par chaque agence est le
suivant :environ 6 à 8 mois pour l'USDA, 6 mois pour la FDA et
12 à 16 mois pour l'EPA, mais les trois instructions sont menées
simultanément. Le système d'autorisation se caractérise
par la prévisibilité des délais. Une trentaine de produits
sont déjà approuvés ;
- au Japon, deux périodes d'examen annuel ont été
mises en place par le ministère de la santé et le
ministère de l'agriculture. Le délai d'examen est d'environ six
mois ; une vingtaine de produits ont été
approuvés ;
- au Canada, la procédure se rapproche du système
américain et le délai d'instruction est de 6 à
9 mois ; environ 25 produits ont été déjà
approuvés ;
- en Europe, "
L'entreprise sait quelles informations elle aura
précisément à fournir mais elle ignore quel sera le
délai nécessaire pour obtenir son autorisation
".
"
Le temps d'instruction des dossiers est très
variable
". Il serait en moyenne supérieur à 2 ans.
Du point de vue d'une entreprise pétitionnaire, la principale
caractéristique de la procédure européenne est donc
l'
absence de prévisibilité des délais d'instruction
.
Source : Entretiens avec le département chargé de
l'homologation, chez Monsanto, à Saint-Louis, Missouri.
Votre rapporteur a pu constater que l'administration communautaire
était avertie de cette appréciation.
Force est de constater que le délai qui sépare la mise au point
en laboratoire de l'autorisation de commercialisation est parfois long. La
chronologie des différentes étapes d'autorisation du maïs de
la société Novartis en est un bon exemple :
-
1989
première transformation du maïs ;
-
1991
introduction du gène de résistance
à la pyrale dans le maïs et premiers tests en plein champ à
Colmar, mais aussi aux Etats-Unis et en Argentine ;
-
1993
poursuite des tests en plein champ,
expérimentation avec l'AGPM et avec l'INRA de Versailles ;
-
novembre 1994
dépôt en France du dossier de
demande d'autorisation de mise sur le marché par la
société CIBA (Novartis) ;
-
1995
autorisation de mise en marché aux USA ;
-
28 février 1995
avis favorable adopté par la
Commission du Génie Biomoléculaire, signé le 1er mars ;
-
3 mars 1995
début de la procédure
d'autorisation et de notification de la demande à la Commission
européenne ;
- 1996
autorisation d'importation au Japon
-
11 avril 1996
projet de décision favorable de la
Commission mais absence de majorité qualifiée pour l'adopter ;
-
24 juillet 1996
dépôt auprès de la
Commission d'éléments scientifiques présentés comme
nouveaux par l'Autriche. Nouvelle saisine de trois comités scientifiques
européens ;
-
13 décembre 1996
opinions favorables des trois
comités scientifiques confirmant l'évaluation française ;
-
8 décembre 1996
adoption par la Commission
européenne du projet de décision d'autorisation de mise sur le
marché ;
-
24 janvier 1997
notification officielle de la décision
à la France ;
-
27 novembre 1997
conférence de presse du Gouvernement
français indiquant sa volonté d'autoriser la culture du maïs
Novartis ;
-
8 février 1998
parution au Journal Officiel de
l'arrêté du 5 février 1998 inscrivant au Catalogue
officiel des espèces et variétés de plantes
cultivées en France les trois variétés de maïs
résistant à la pyrale de la société Novartis.
Les deux directives européennes n°s 90- 219 et 90-220 sont
dites " horizontales " par opposition aux législations
" sectorielles " qui concernent plus particulièrement des
secteurs précis issus de la biotechnologie comme par exemple les
médicaments (règlement 2309-93) ; les produits
phytopharmaceutiques (directive 91-414) ; les additifs dans
l'alimentation des animaux (directive 93-1141). Pour les textes sectoriels en
discussion, citons les règlements alimentation animale et semences, qui
devraient être prochainement adoptés.
Ces textes sectoriels répondent à la volonté d'avoir
"
une clé, une porte
" pour l'introduction des produits
transgéniques. Ils intègrent donc le dispositif de la directive
90-220 dans leur secteur réglementaire particulier. Le règlement
sur les nouveaux aliments est un de ces textes dits sectoriels. Il traite,
notamment, de l'étiquetage des produits alimentaires issus d'OGM.