B. QUI TROUVE SES LIMITES DANS LES ZONES PÉRIURBAINES
L'utilisation de cet outil de protection dans les zones périurbaines se révèle, à l'examen, complexe car de toute évidence le parc naturel régional a été conçu -et s'est affirmé - pour le monde rural . Il ne dispose pas de moyens suffisants pour constituer un contrepoids efficace à la périurbanisation.
1. Un outil conçu pour préserver des espaces naturels remarquables en milieu rural
Conçus principalement comme des outils d'aménagement du territoire en faveur du développement local, les parcs naturels régionaux sont progressivement devenus des instruments incontournables pour la protection et la gestion des espaces naturels. Ceci explique les très fortes exigences en ce qui concerne la qualité des territoires proposés au classement. Tant la définition d'un territoire de qualité que l'élaboration d'un projet de qualité pour le développement de ce territoire sont les conditions de fond permettant d'obtenir le classement du parc.
a) De la lutte contre la désertification rurale à la préservation d'espaces naturels remarquables
Les parcs naturels régionaux ont été
créés, dès l'origine, comme des outils de
développement pour l'espace rural, et plus particulièrement pour
revitaliser des espaces ruraux en voie de désertification
Dans les textes fondateurs des parcs naturels régionaux, les
critères d'appréciation faisaient plus intervenir la
fonctionnalité du territoire proposé au classement : la
qualité des sites et leur intérêt étaient
appréciés en fonction de leur destination, c'est-à-dire le
développement rural par le tourisme. Ainsi, le décret en Conseil
d'Etat au 1er mars 1967 évoque les sites aptes
" à accueillir les citadins des grandes
agglomérations
" et le décret du
24 octobre 1975 parle des territoires présentant
" un
intérêt pour la détente, l'éducation, le repos des
hommes et le tourisme
"
24(
*
)
.
A ces critères fonctionnels initiaux, ce sont progressivement
ajoutés des éléments permettant de prendre en compte la
qualité intrinsèque d'un paysage et la nécessité de
sa protection.
L'espace rural n'a plus été seulement envisagé dans sa
dimension fonctionnelle et économique potentielle, mais il a
été pris en compte pour ses qualités propres. Celles-ci
doivent être "
remarquables, pour la ou les régions
concernées et comporter un intérêt reconnu au niveau
national
"
25(
*
)
. En
outre, ce territoire doit présenter un caractère fragile, voire
menacé pour justifier une protection.
La préservation d'un territoire naturel et fragile s'impose en tant
qu'objectif principal et se traduit dans les objectifs de la charte,
d'où la nécessité de délimiter un territoire
cohérent et homogène. Lors de la détermination du
périmètre du futur parc, il faudra parfois exclure certaines
zones sans intérêt particulier, trop dégradées ou
sur lesquelles des projets d'infrastructures sont envisagés, qui sont
incompatibles avec l'objectif de protection des espaces naturels. A contrario,
il faudra éviter qu'un excessif morcellement des superficies ne remette
en cause la cohérence interne du territoire.
b) La qualification insuffisante des espaces naturels en milieu périurbain
Force est de constater qu'en zone périurbaine, le
volume des richesses naturelles est moins élevé que celui de la
moyenne des parcs existants.
Or, compte tenu du succès grandissant de la formule des parcs, le niveau
d'exigence augmente tout naturellement, tant en ce qui concerne les projets de
parcs que pour les parcs existants au moment de la révision de leur
charte. Les parcs régionaux affichent désormais des objectifs
d'excellence, en revendiquant leur mission d'expérimentation et leur
succès.
Dans les zones périurbaines, il est certain que les sites exclusivement
" naturels " sont devenus rares, et que parfois les zones naturelles
d'intérêt écologique faunistique et floristiques
protègent des sites artificiels, comme d'anciennes gravières, des
bassins de décantation, ou des champs d'épandage, ce qui ne
correspond pas parfaitement aux objectifs initiaux des parcs naturels.
Enfin, la simple comparaison des densités entre les parcs existants et
les projets en zone périurbaine illustre l'implantation des parcs dans
des zones rurales, parfois en voie de désertification. La densité
moyenne pour les parcs s'élève à 46,98 habitants par
km² -la plus faible étant celle du parc de Queyras (3,81) et la
plus élevée se rencontrant dans le parc du Nord-Pas-de-Calais,
éclaté en trois zones (226,26) -dans ce dernier au
côté de zones urbaines très denses, se trouvent des marais
totalement inhabités-.
Or, les projets de parcs situés en zone périurbaine ont des
densités allant de 133,92 à 266,66 habitants par km²
sur de petites surfaces, ce qui implique a priori que tout le territoire est
relativement urbanisé.
Cette forte urbanisation se caractérise, comme il a été
rappelé dans le chapitre précédent, par la multiplication
de zones dégradées, une présence importante des
infrastructures de transports ou d'équipements, et des paysages
" mités ".
Pour toutes ces raisons, la définition d'un territoire " encore
naturel " homogène, cohérent et lisible devient alors
très difficile.
D'une part, les territoires sélectionnés n'auraient pas la
dimension ni la cohérence interne suffisantes pour promouvoir une
politique de développement local dynamique. Le risque est grand de ne
favoriser -sans raisons objectives- qu'une sanctuarisation de ces espaces en
les renfermant sur eux-mêmes.
D'autre part, votre rapporteur pense que le choix d'une telle structure en
milieu périurbain pérenniserait une séparation
désormais totalement artificielle entre espaces naturels et zones
urbanisées en interdisant de prendre en compte la globalité du
phénomène périurbain. De plus, ceci aboutirait à
détourner cet outil d'aménagement de son objectif premier et
unique à savoir l'aménagement de l'espace rural. Personne ne
sortirait gagnant d'une telle manipulation.