La gestion des espaces périurbains
Gérard LARCHER, Sénateur
Rapport d'information 415 - 1997 / 1998 - Commission des Affaires économiques et du Plan
Table des matières
- RÉSUMÉ DU RAPPORT
- INTRODUCTION
-
PREMIÈRE PARTIE -
LES ESPACES PERIURBAINS : CONTRADICTIONS ET ENJEUX -
CHAPITRE II -
LES TENSIONS AU SEIN DES ESPACES PÉRIURBAINS -
CHAPITRE III -
DES MOYENS D'INTERVENTION NOMBREUX MAIS INADAPTÉS-
I. L'APPROCHE DE PLUS EN PLUS ENVIRONNEMENTALE DU PARC NATUREL
RÉGIONAL
- A. LES ATOUTS D'UN PARC NATUREL RÉGIONAL : UN AMÉNAGEMENT FIN DU TERRITOIRE
- B. QUI TROUVE SES LIMITES DANS LES ZONES PÉRIURBAINES
-
II. LE MAUVAIS EMPLOI ET LA FAIBLE EFFICACITÉ DES INSTRUMENTS
D'URBANISME ET DE PROTECTION DANS L'ESPACE PÉRIURBAIN
- A. DES RÈGLES GÉNÉRALES D'AMÉNAGEMENT ET D'URBANISME DONT IL N'EST PAS ASSEZ TIRÉ PARTI
- B. DES INSTRUMENTS D'AMÉNAGEMENT PEU EFFICACES
- C. DES INSTRUMENTS DE PROTECTION DU PATRIMOINE ARCHITECTURAL ET URBAIN ADAPTÉS AUX COEURS DE VILLE
- D. DES MOYENS FINANCIERS INSUFFISANTS
-
I. L'APPROCHE DE PLUS EN PLUS ENVIRONNEMENTALE DU PARC NATUREL
RÉGIONAL
-
SECONDE PARTIE -
POUR UN NOUVEAU LABEL :
LES TERROIRS URBAINS ET PAYSAGERS -
CHAPITRE II -
MIEUX UTILISER L'EXISTANT- I. DÉVELOPPER LES OUTILS ENVIRONNEMENTAUX
- II. RENFORCER LES OUTILS URBANISTIQUES EXISTANTS
- III. DÉVELOPPER LE RÔLE DES SAFER POUR LUTTER CONTRE LES FRICHES ET MAINTENIR L'AGRICULTURE DE FAÇON VOLONTARISTE
-
CHAPITRE III -
INVENTER DE NOUVEAUX OUTILS- I. POUR MAÎTRISER LE FONCIER
-
II. POUR PÉRENNISER L'AGRICULTURE ET LES ESPACES NATURELS
- A. UNE INDISPENSABLE VOLONTÉ POLITIQUE
- B. ACCROÎTRE LA STABILITÉ DES EXPLOITATIONS AGRICOLES À LONG TERME
- C. CRÉER DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS ENVIRONNEMENTAUX SUR LE MODÈLE DE L'AGENCE DES ESPACES VERTS DE LA RÉGION ILE-DE-FRANCE
- III. POUR RENFORCER L'INTERCOMMUNALITÉ D'AGGLOMÉRATION
- CONCLUSION GÉNÉRALE
-
ANNEXE N° 1 -
AUDITIONS ET DÉPLACEMENTS RÉALISÉS DANS LE CADRE DE LA PRÉPARATION DU RAPPORT -
ANNEXE N° 2
LES TRAVAUX DU GROUPE D'EXPERTS " ENVIRONNEMENT URBAIN " AUPRÈS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE SUR LA PLANIFICATION SPATIALE DURABLE6969 Contribution de Mme Nédialka Sougareva, sous-direction de l'évaluation environnementale et de l'aménagement durable au ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement. -
ANNEXE N° 3
TABLE DES SIGLES UTILISÉS DANS LE RAPPORT - EXAMEN DU RAPPORT
N° 415
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 5 mai 1998
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur la gestion des espaces périurbains ,
Par M. Gérard LARCHER,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM. Jean
François-Poncet,
président
; Philippe François,
Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis
Minetti,
vice-présidents
; Georges Berchet, William Chervy,
Jean-Paul Émin, Louis Moinard,
secrétaires
; Louis
Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Michel Barnier, Bernard
Barraux, Michel Bécot, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer,
Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat,
Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere,
Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe
Désiré, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard
Dussaut
,
Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Aubert
Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis
Grignon, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson,
Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Gérard Larcher, Edmond
Lauret, Pierre Lefebvre, Jean-François Le Grand, Kléber
Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Jean-Baptiste Motroni,
Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Bernard
Piras, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Paul
Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger
Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan,
Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, M. Henri Weber.
|
Aménagement du territoire. |
" [...] il n'existe pas seulement entre les Français et la terre de leur pays une relation purement économique, mais, en outre, une attache esthétique... parce que le pays est beau ".
Sully Prudhomme
RÉSUMÉ DU RAPPORT
I. LE CONSTAT
1.
Longtemps, les espaces périurbains ont
été
mal identifiés
. Leur
spécificité
est désormais reconnue depuis la
définition par l'INSEE d'un
zonage en aires urbaines
. Ils sont
caractérisés par la coexistence de
nouveaux quartiers
d'habitation, d'exploitations agricoles
(10 % de la surface agricole
utile nationale) et par une
population diverse : 9 millions de
Français
, aux caractéristiques sociologiques très
variées
y vivent
. Des
populations relativement
aisées
(80 % des ménages y résident dans des
maisons individuelles, 40 % des logements ont été construits
après 1974) y côtoient des
populations
précarisées
qui habitent dans des
quartiers en
difficulté
(barres et tours de Mantes-la-Jolie ou quartiers
marqués par un urbanisme " horizontal " à Valenciennes).
2.
Trois types de tensions se font sentir dans les espaces
périurbains :
LES TENSIONS HUMAINES
- Les rapports des néoruraux et des exploitants agricoles (dont la
population se réduit progressivement) sont marqués par une
méconnaissance mutuelle
. Selon un sondage, seuls 28 % des
Français associent le terme de " campagne " à une
utilisation agricole du sol. Pour 69 % d'entre eux, la campagne n'est
qu'un " paysage ".
- Les habitants des espaces ruraux voisins des villes craignent
l'avancée du " front urbain ". Leur crainte est parfois
justifiée :
l'agriculture périurbaine
est
victime de
déprédations
. Dans le Val de Seine, les vols de fruits
atteignent parfois ¼ de la récolte. Or,
si des mesures
spécifiques d'aide
aux entreprises
ont
été
adoptées
dans le Pacte de relance pour la ville,
elles n'ont pas
d'équivalent pour les exploitations agricoles
qui avoisinent les
quartiers en difficulté.
LES TENSIONS PAYSAGÈRES
Dans le territoire situé à proximité des villes,
l'espace est
considéré comme
un
"
espace
jetable
".
La laideur de bien des
entrées de ville
et l'apparence de
nombreux
grands ensembles
périurbains illustrent ce
phénomène. Si une législation relativement ancienne permet
de protéger le coeur des villes, la prise de conscience sur les
problème des " entrées de ville " est récente.
LA PRÉCARITÉ FONCIÈRE ET LA FRAGILITÉ
AGRICOLE
Les espaces périurbains subissent une
urbanisation en apparence sans
borne
: entre 1982 et 1990 on y a construit près de
18 logements au kilomètre carré, contre 6 en moyenne
sur l'ensemble du territoire.
L'instabilité
chronique du
droit de l'urbanisme
(révision et modification des POS en particulier) entretient les
anticipations à la vente
des propriétaires fonciers, qui font
parfois pression sur les autorités municipales en laissant en friches
les terrains pour lesquels ils souhaitent obtenir un droit à construire.
En conséquence,
l'agriculture
est
progressivement
marginalisée
, même si elle
occupe encore plus de 52 %
des espaces périurbains
.
Le coût du foncier s'envole.
Dès lors, compte tenu de sa rentabilité, l'agriculture
cède le pas à l'urbanisation.
3.
Face aux tensions subies par les zones périurbaines, de
nombreux élus s'interrogent et
souhaitent disposer d'un outil
d'aménagement
pour préserver et souvent
restaurer
un
développement harmonieux
de leur territoire.
Compte tenu du succès incontestable des
parcs naturels
régionaux
, ils souhaitent utiliser à leur tour ce concept
original. Cet outil, initialement conçu pour le développement
économique et la valorisation du patrimoine naturel, s'est vu
progressivement reconnaître des missions de protection des espaces
naturels.
Aujourd'hui, les 35 parcs existants couvrent plus de 10 % de la
superficie du territoire, associant 3.024 communes,
59 départements et 21 régions pour une population de
2,6 millions d'habitants. Ils s'illustrent plus particulièrement
dans quatre domaines : la valorisation du patrimoine culturel et du
territoire, la protection du patrimoine naturel et de sa biodiversité,
des missions d'éducation à l'environnement et des actions de
développement économique dont les retombées se chiffrent
désormais en termes d'emplois créés ou maintenus.
4.
Mais à l'examen, l'utilisation de cet outil dans les zones
périurbaines se révèle complexe, car
il s'agit d'un
dispositif conçu
pour la protection et le développement de
l'espace rural
et qui comporte
de fortes exigences
s'agissant de la
qualité des territoires
proposés au classement.
Les espaces naturels périurbains sont bien souvent trop
dégradés et les moyens juridiques des PNR sont inadaptés
pour encadrer une expansion raisonnée de l'urbanisation : la charte d'un
parc est un document contractuel, dont le contenu n'a pas de réelle
portée normative. Même si ce contenu est devenu beaucoup plus
élaboré, il conserve encore parfois le caractère d'une
déclaration d'intention. Vis-à-vis des tiers, la loi du
8 janvier 1993 sur les paysages n'instaure qu'une obligation de
compatibilité entre le contenu des chartes et les plans d'occupation des
sols. Les conventions actives de " ville-porte " signées entre
un parc et les villes avoisinantes sont rares et ne comportent aucune mesure
contraignante en matière d'urbanisme.
La multiplication de nouveaux PNR en zone périurbaine pourrait
être préjudiciable aux parcs existants et, en définitive,
inopérante. Il est cependant souhaitable de reprendre des
éléments essentiels à l'origine du succès des
PNR : consensus local conforté par l'engagement de l'Etat
(délivrance d'un label national) et adhésion des
collectivités territoriales à un document contractuel.
5.
Les
instruments d'urbanisme et de protection
sont
mal, ou
trop peu utilisés
:
- En principe, le
plan d'occupation des sols
pourrait permettre de
préserver le paysage. En réalité, il est trop souvent
modifié et rarement intercommunal. De ce fait, le POS se transforme bien
souvent, parfois malgré lui, en
instrument de la concurrence
foncière
intercommunale.
- Les
schémas directeurs
permettent de fixer plus solidement
les orientations fondamentales de l'aménagement des territoires
intéressés, ainsi que l'équilibre entre extension urbaine,
activités agricoles et économiques et préservation des
sites. Malheureusement,
ils sont très loin de couvrir tout le
territoire national
et ils souffrent également de transformations
trop fréquentes (45 % d'entre eux étaient en révision
au 1er janvier 1997).
- Les
instruments et les opérations
d'aménagement
(droit de préemption urbain, zones
d'aménagement différé, zones d'aménagement
concerté), s'inspirent d'une "
philosophie de
l'urbanisation
". Les secteurs auxquels ils s'appliquent ont vocation
à être urbanisés.
- Les
opérateurs fonciers
sont
trop peu nombreux
.
On ne compte, outre l'Agence foncière et technique de la région
parisienne, que trois autres
établissements publics fonciers d'Etat,
dotés d'une ressource fiscale propre
, et capables de mener une
politique de
requalification de secteurs urbains et suburbains
dégradés.
Quant aux collectivités locales, celles qui en ont le plus besoin n'ont
pas les moyens de créer les
établissements publics fonciers
locaux
dont le statut résulte de la loi d'orientation pour la ville
(seuls deux de ces établissements ont été
constitués depuis 1991).
6.
Les instruments de
protection du patrimoine architectural et
urbain
sont
adaptés aux coeurs des villes
: les lois
relatives à la protection des monuments historiques, des sites, ou
à la création de zones de protection du patrimoine architectural
et urbain permettent de protéger des éléments
revêtant une richesse particulière :
la législation
sanctuarise le beau et se désintéresse de la réparation
des blessures faites au tissu urbain et au paysage
.
7.
Enfin
les moyens consacrés par l'Etat sont
insuffisants
. Les crédits consacrés par l'Etat aux
interventions foncières, exprimés en francs 1995, sont
passés de 1,4 milliard de francs en 1974 à 160 millions
en 1995. En outre, le Fonds national d'aménagement foncier et
d'urbanisme (FNAFU) a été supprimé.
Dès lors, il convient d'utiliser au mieux la "
boîte
à outils
" dont disposent actuellement les pouvoirs publics et
de définir
un nouveau cadre d'utilisation
adapté aux
problèmes spécifiques de l'espace périurbain.
II. PRINCIPALES PROPOSITIONS
1.
Créer un nouveau label : les " terroirs
urbains et paysagers ", pour valoriser une volonté politique
- Reconnaître la qualité de "
terroir urbain et
paysager
" aux espaces périurbains sur lesquels, les communes,
les départements, les régions, et l'Etat souhaitent mener une
action volontaire, concertée et contractuelle
.
Ce label se concrétiserait par :
- la signature d'une
charte
applicable à
un
territoire
;
- la
définition d'objectifs
sociaux, urbanistiques et
agricoles à respecter pour gérer l'espace et le requalifier
lorsqu'il est dégradé ;
- la
mobilisation d'un financement croisé
Etat-collectivités territoriales.
2.
Edicter des directives territoriales d'aménagement (DTA)
Assurer le
primat de l'intérêt national
, par-delà la
diversité des approches locales, grâce à de
nouvelles
DTA
, -outre les six actuellement en préparation-
à
réaliser sur les principales aires urbaines
.
3.
Relancer l'élaboration de schémas directeurs cantonaux
ou d'agglomération
Les
schémas directeurs
constituent le
seul moyen pour assurer
une gestion intercommunale de l'extension urbaine.
Leur
élaboration
doit être
encouragée
en
n'autorisant
-sauf circonstances exceptionnelles-
les
modifications
et les
révisions de POS que dans les communes dont
le territoire est inclus dans le périmètre d'un schéma
directeur.
4.
Renforcer la stabilité des plans d'occupation des sols
(POS)
Les POS doivent
traduire un choix clair
et
durable
. Aussi,
pourrait-on :
- instituer un
délai minimum pendant lequel une révision
du POS serait impossible,
sauf circonstances exceptionnelles ;
-
réduire l'ampleur des " zones d'urbanisation
future
" ou zones " NA " en définissant leur emprise
maximale au niveau intercommunal, dans le schéma directeur et non plus
seulement au niveau du POS.
5.
Développer le rôle des SAFER dans la lutte contre les
friches et maintenir l'agriculture de façon volontariste
Les SAFER disposent déjà de pouvoirs accrus pour lutter contre
les friches en zones de montagne. Il est souhaitable de leur
permettre
d'intervenir plus aisément, de façon analogue, sur les terres
incultes en zone périurbaine.
6.
Lutter contre l'enrichissement sans cause issu de la vente de terres
agricoles
-
taxer les profits " tombés du ciel " lors de la
vente d'un terrain agricole devenu urbanisable
;
-
affecter
les
sommes recueillies
à un
fonds de
gestion des espaces périurbains
destiné à
acquérir des terrains
pour y maintenir une activité
agricole,
aider l'agriculture
périurbaine,
réhabiliter
les espaces
périurbains
dégradés
.
7.
Développer les politiques foncières des
collectivités locales
- Inclure un
volet agricole et paysager dans les contrats de ville
,
afin de traiter l'espace périurbain comme une composante patrimoniale et
dynamique de la ville ;
- réexaminer la question des
évaluations
foncières,
notamment pour permettre aux communes d'acheter des
terrains si elles le souhaitent et faciliter le maintien de l'agriculture ;
- revenir à une
application stricte de l'article L.13-15 du code
de l'expropriation
relatif à la notion de terrain
" urbanisable " dans l'évaluation des terrains acquis par voie
d'expropriation ;
- créer de
nouveaux établissements publics fonciers
d'Etat
afin de réhabiliter les espaces les plus
dégradés.
8.
Accroître la stabilité des exploitations agricoles pour
conforter leur vocation économique
- En instituant un
délai minimum -
variable selon la
durée du bail restant à courir-
avant le terme duquel le bail
ne peut prendre fin,
même si le terrain est classé en zone
urbanisable au POS ;
- en
valorisant la production des exploitations agricoles
(attribution de quotas spécifiques, augmentation des aides à
la mise aux normes des bâtiments d'élevage
en zone
périurbaine, reconnaissance d'un label de proximité pour les
produits agricoles) ;
- en
accroissant les contacts entre agriculteurs et citadins
(élargissement des actions du type " fermes
pédagogiques " à des fermes appartenant à des
exploitants privés et développement de " jumelages "
entre quartiers urbains et zones rurales) ;
- en
ouvrant le parcellaire par la création de chemins aux
abords des agglomérations
(l'attribution d'aides spécifiques
serait conditionnée à l'existence d'un minimum de mètres
de chemins ouverts au public à l'hectare, ainsi qu'à la
plantation de haies permettant le cheminement le long des terres
cultivées) ;
- généraliser l'élaboration de
plans de
développement durable.
9.
Créer des établissements publics environnementaux
régionaux
- Ces agences assureraient la
protection d'espaces verts et agricoles
périurbains
dans des conditions analogues à l'Agence des
Espaces verts de la région Ile-de-France ;
- leur
affecter
une part du
produit de la taxe
départementale des espaces naturels sensibles.
10.
Renforcer l'intercommunalité d'agglomération
En attribuant à une
autorité d'agglomération :
-
une
compétence urbanistique et foncière
;
- une
ressource fiscale unifiée ou
péréquée
à travers la taxe professionnelle ;
- en
prenant en compte le coût des espaces naturels
dans les
dotations budgétaires versées par l'Etat aux
agglomérations.
* *
*
Expérimenter le concept du terroir urbain et paysager, notamment dans le secteur des boucles de la Marne et de l'Ourcq .
INTRODUCTION
Pour répondre au souhait de Mme Corinne Lepage, alors
ministre de l'environnement, votre rapporteur a engagé, au début
1997, une réflexion sur l'adaptation du système des Parcs
naturels régionaux (PNR) aux territoires urbains et suburbains. Cette
étude se situait dans le droit fil des travaux de la Commission
spéciale constituée par le Sénat, en 1996, lors de
l'examen du Pacte de relance pour la ville.
A la suite de la formation du Gouvernement de M. Lionel Jospin, la Commission
des Affaires économiques a souhaité que cette réflexion
sur l'évolution des équilibres entre zones périurbaines et
espace rural soit poursuivie. Elle a confié à votre rapporteur,
le 11 juin 1997, le soin de présenter des propositions sur la gestion
des espaces périurbains.
Le Sénat a bien pour préoccupation l'ensemble du territoire
-qu'il soit urbain ou rural- dont il assure la représentation. Cette
mission lui fait un devoir d'analyser et de proposer des outils pour la gestion
de cet espace.
Tel est l'objet du présent rapport.
Au cours de son travail, votre rapporteur a rencontré près d'une
centaine de personnes : élus, magistrats et hauts fonctionnaires,
dirigeants de syndicats professionnels, d'entreprises et d'associations.
Il a également effectué plusieurs déplacements aux
Pays-Bas et en France (Amiens, Valenciennes, l'Ile-Saint-Denis, les boucles de
la Marne et de l'Ourcq et dans le parc naturel régional de Brotonne).
De ces auditions et de ces visites, il a tiré la certitude qu'une action
volontariste en faveur des espaces périurbains est indispensable.
En effet, la création de nouveaux parcs naturels régionaux est
parfois présentée comme une solution aux problèmes
fonciers et environnementaux qui surgissent au confluent de la ville et de
l'espace rural. Est-il pour autant possible de multiplier les PNR en
décernant ce titre à des territoires, qui ne possèdent
quasiment plus d'espaces naturels, au risque de dévaloriser ce
label ?
A n'en pas douter, il est nécessaire de sensibiliser nos concitoyens et
les pouvoirs publics à l'urgence qui s'attache à préserver
l'agriculture et le cadre de vie des habitants des territoires
périurbains.
Le problème n'est pas neuf : il se pose depuis un siècle en
raison de l'extension des villes. C'est ainsi que les signataires du projet de
loi portant cession du Bois de Boulogne à la ville de Paris -en 1852-
notaient :
" Chaque jour la campagne recule, envahie par des constructions
nouvelles. Tâchons de ménager aux quartiers, qui ne tarderont pas
à s'ajouter à la ville actuelle, un peu de cet air et de cet
espace que l'imprévoyance de nos pères nous force à
racheter aujourd'hui à si grands frais dans l'enceinte de nos vieilles
cités ".
Comment ménager " l'air et l'espace ", maintenir
l'agriculture, rééquilibrer l'urbanisation, requalifier certains
territoires sans une politique concertée qui associe l'Etat et les
collectivités locales ?
Le présent rapport, dont votre rapporteur a soumis l'ensemble des
conclusions à la Commission des Affaires économiques le
mardi 5 mai 1998, tente de répondre à cette
question.
Ces conclusions et les analyses dont elles procèdent sont
exposées ci-après.
PREMIÈRE PARTIE -
LES ESPACES PERIURBAINS :
CONTRADICTIONS ET ENJEUX
CHAPITRE IER -
L'ESPACE PÉRIURBAIN :
UNE
SPÉCIFICITÉ DÉSORMAIS RECONNUE
L'espace qui s'étend entre les marges de la ville et
les frontières de l'espace rural connaît un mouvement d'extension
sans précédent depuis la fin des années 1960.
L'accroissement du parc automobile et la cherté du foncier -et donc du
logement- en centre-ville ainsi qu'une absence de gestion foncière des
coeurs de ville expliquent, pour partie, ce développement continu.
Pour autant, aucune étude scientifique n'a, avant le milieu des
années 1990, permis d'en donner une définition univoque. Il
est vrai que cet espace-frontière conserve de nombreuses
caractéristiques de l'environnement et du paysage rural, tout en
gagnant, peu à peu, des traits citadins, sans pour autant
" s'agglomérer " à la ville.
Les géographes éprouvent d'ailleurs une véritable
difficulté à qualifier cet espace singulier. Veulent-ils
souligner ses affinités avec l'espace rural ? Ils le qualifieront
d'espace " rurbanisé " en reprenant le néologisme
employé par G. Bauer et J.M. Roux dans "
La
rurbanisation ou la ville éparpillée
",
1(
*
)
l'un des premiers ouvrages consacrés au sujet.
Veulent-ils souligner son caractère périphérique par
rapport à la ville ? Ils l'appelleront espace
" périurbain " ou " périurbanisé ", en
mettant ainsi l'accent sur sa relation privilégiée avec la
cité qu'il entoure.
En Europe, les villes se sont le plus souvent constituées à
partir d'un noyau initial entouré de murailles, autour duquel se sont
développés des faubourgs entre le Moyen-Âge et
l'époque moderne, puis des banlieues à compter du
XIXe siècle. Faubourgs et banlieues se sont constitués sans
solution de continuité " conceptualisée " avec
l'agglomération à laquelle ils étaient accolés.
L'espace périurbain, lui, est caractérisé par une
extension discontinue de l'urbanisation qui laisse subsister de larges
étendues agricoles, des friches, des usines, des voies de communication,
sans qu'il existe de plan d'ensemble
à cette mosaïque
mi-urbaine, mi-rurale. Cet espace est donc avant tout une zone de contact entre
le monde rural et l'univers urbain, qui conserve des traits du premier tout en
subissant peu à peu l'attraction du second.
De cette coexistence résultent une difficulté statistique
à définir l'espace périurbain, ainsi qu'une relative
méconnaissance de ses spécificités. Pourtant, les zones
périurbaines sont caractérisées par des transformations
humaines et sociologiques profondes, soumises à d'importantes tensions
foncières qui entraînent des modifications écologiques,
voire même des déboires paysagers. Le trait commun à tous
les espaces périurbains
est la précarité de leur
statut
.
Il convient de tenter d'appréhender l'ampleur de ce mouvement
général d'extension par lequel la ville devient, peu à
peu, "
le quartier central d'une agglomération
discontinue
"
2(
*
)
, avant d'envisager la
situation de l'espace périurbain au triple point de vue humain, foncier,
et écologique.
Les espaces périurbains ont posé un problème aux
géographes et aux statisticiens désireux de leur assigner des
contours. La délimitation des espaces périurbains est, en effet,
malaisée. Elle doit combiner des critères géographiques,
urbanistiques, économiques et humains susceptibles de rendre compte d'un
mouvement qui affecte, selon un rythme variable, la quasi-totalité des
agglomérations et l'ensemble des régions françaises, dans
leur diversité.
Faute d'autre cadre statistique, on se référa tout d'abord, au
début des années 1960, au concept de zones de peuplement
industriel ou urbain élaboré par l'INSEE. Ultérieurement,
une étude réalisée par la Société d'Etudes
Géographiques, Economiques et Sociologiques (SEGESA) pour la Direction
de l'espace rural et de la forêt du ministère de l'agriculture, la
Délégation interministérielle à la Ville et la
DATAR, contribua à affiner la définition.
Enfin l'INSEE a récemment procédé à
l'établissement d'une nouvelle nomenclature spatiale basée sur
361 " aires urbaines ".
Ces définitions successives montrent bien la difficulté de
définir, par un concept univoque, le territoire périurbain.
A. LE CONCEPT DE ZONES DE PEUPLEMENT INDUSTRIEL OU URBAIN (ZPIU)
Créées par l'INSEE en 1962 afin de tracer les
contours de l'espace situé entre la zone urbaine et le monde rural, les
zones de peuplement industriel ou urbain (ZPIU) sont
caractérisées par :
- la proportion de la population qui ne vit pas de l'agriculture ;
- l'importance des migrations quotidiennes entre domicile et lieu de
travail ;
- le taux d'accroissement démographique.
Les ZPIU comprennent également les communes urbaines au sens de l'INSEE
(celles-ci sont caractérisées par la continuité du
bâti et une population de plus de 2.000 habitants).
Ainsi que le montre le tableau ci-dessous, le nombre des communes appartenant
aux ZPIU, a triplé entre 1962 et 1990, passant de 9.083 à 28.500.
EVOLUTION DES ZPIU
Années |
Nombre de ZPIU |
Nombre de communes |
Pourcentage par rapport au nombre total des communes |
1962 |
844 |
9 083 |
23,9 % |
1968 |
812 |
10 644 |
29,2 % |
1975 |
881 |
12 143 |
33,4 % |
1982 |
877 |
18 956 |
52 % |
1990 |
603 |
28 500 |
78 % |
Source : SEGESA - INSEE
A compter de 1990, la réduction du nombre total des ZPIU est
parallèle à l'accroissement du nombre des communes qui les
composent, notamment du fait de la simplification de la carte des ZPIU que rend
possible leur grande extension sur le territoire. Un tel accroissement montre,
à lui seul, que l'indicateur constitué par les ZPIU
méritait d'être affiné.
Comme le relève la SEGESA dans son étude de 1994 sur
les
espaces de périurbanisation
3(
*
)
, la
définition de ces zones repose sur l'assimilation, dans un même
groupe, de communes de taille très hétérogène.
C'est ainsi qu'en 1982, sur 877 ZPIU, 450, soit plus de la moitié,
avaient moins de 10.000 habitants, alors même que la seule ZPIU de
Paris comportait 1.244 communes comptant au total 10,2 millions
d'habitants. En revanche, la plus petite ZPIU ne regroupait que
2.017 habitants.
La SEGESA notait également que certaines communes n'appartenant pas
à l'espace périurbain faisaient cependant partie des ZPIU : c'est
ainsi que plusieurs ZPIU n'étaient composées que d'une seule
commune et que d'autres étaient soit entièrement rurales, soit
entièrement urbaines.
Au total, selon la même source :
- l'assimilation des communes rurales appartenant aux ZPIU à
l'espace périurbain était abusive ;
- l'augmentation du nombre des communes classées en ZPIU jusqu'en
1982 traduisait l'accroissement de la mobilité individuelle et la
dissociation croissante entre domicile et lieu de travail ;
- le développement des ZPIU n'ayant pas la même signification
autour de toutes les villes, il était nécessaire d'opérer
une distinction en fonction de leur taille.
Cette première approche du monde périurbain a montré
l'extraordinaire extension que connaissent les alentours des villes. Il
revenait à de nouvelles études d'affiner ces premiers
résultats au plan qualitatif.
B. LA DÉFINITION DE L'ESPACE PÉRIURBAIN PAR LA SEGESA
En 1994, à la demande du ministère de
l'agriculture (DERF), de la délégation interministérielle
à la ville (DIV) et de la DATAR, la SEGESA a
élaboré
4(
*
)
une cartographie
spécifique de l'espace périurbain, considéré comme
l'espace situé autour des villes, soumis à leur influence directe
et susceptible d'être significativement touché par les processus
enclenchés par cette proximité. Ces zones périurbaines
sont "
constituées d'agrégats de cantons contigus choisis
autour de villes d'une certaine taille, de manière à cerner au
mieux le développement périphérique de l'habitat. Le rayon
choisi varie de 15 à 30 kilomètres en fonction de
l'importance de l'agglomération centrale
".
Au total, 425 cantons ou groupes de cantons ont été retenus,
autour de 134 agglomérations.
Cette cartographie comprend :
- toutes les unités urbaines de plus de 50.000 habitants, y
compris les fractions françaises des agglomérations
étrangères (Genève et Bâle) ;
- une sélection d'agglomérations comprises entre 25.000 et
50.000 habitants, choisies en fonction de l'intensité des
phénomènes de migrations alternantes et de la dynamique
récente de la population (elle inclut le plus souvent les
préfectures de départements faiblement peuplés) ;
- certaines villes nouvelles.
Le rayon dans lequel les cantons ont été inclus est
fonction :
- de la taille de l'agglomération en 1990 ;
- du pourcentage d'actifs migrants hors cantons ;
- de l'extension des zones de forte croissance démographique.
Cinq critères distinguent, pour les auteurs de l'étude, les
espaces périurbains, à savoir :
- une densité de population médiane par rapport au reste du
pays ;
- une proportion d'espaces non urbanisés significative,
associée à une nette mixité de l'usage du foncier qui
demeure notamment occupé, outre les espaces bâtis, par les espaces
agricoles et les forêts ;
- une forte proportion de constructions neuves telles que des lotissements
regroupant des maisons individuelles ;
- la distance à la ville et la taille de la ville ;
- une proportion d'actifs migrants alternants qui dépasse 50 %
du total.
Il résulte de ces critères que
l'espace périurbain
couvrirait environ
10 % du territoire national
et comprendrait
12 millions d'habitants
, soit
21 % de la population
française
, ainsi que le montre le tableau ci-dessous :
CARACTÉRISTIQUES DE L'ESPACE PÉRIURBAIN
|
|
% de la France entière |
Superficie en km² |
57 770 |
10,6 |
Population 1990 (en millions d'habitants) |
|
|
Nombre d'exploitations agricoles |
|
|
Surface agricole utile (ha) |
2 988 768 |
10,4 |
Population agricole |
401 249 |
12,3 |
Densité |
208 habitants/km² |
_____ |
Source : SEGESA
Les
particularités démographiques
des espaces
périurbains tels que définis par l'étude de la SEGESA
concernent la croissance démographique et la densité de
population.
Comme le relève l'étude précitée : "
La
forte progression démographique apparaît comme un critère
discriminant des espaces périurbains
", aussi bien par rapport
aux espaces ruraux que vis à vis des zones urbaines. C'est ainsi que de
1982 à 1990, la croissance de la population périurbaine fut de
+11,5 %, contre + 1,8 % pour celle des espaces urbains et
+3,3 % pour les cantons à dominante rurale.
Au cours de la même période 1982-1990, les espaces
périurbains ont accueilli 1,2 million de nouveaux habitants, soit
plus de la moitié de l'accroissement total de la population, qui
était estimé à 2,3 millions d'habitants
pour
l'ensemble du pays.
Les espaces périurbains se distinguent des espaces ruraux en termes de
densité démographique. Alors que celle-ci est estimée
entre 30 et 40 habitants par km² en zone rurale, elle atteint
208 habitants au km² en secteur périurbain.
Il convient de souligner la place importante que conserve
l'agriculture périurbaine
puisqu'elle compte
12 % des
exploitations
et
10 % de la surface agricole utile (SAU)
nationale
. On reviendra sur ce point dans le chapitre consacré au
devenir de l'agriculture périurbaine.
En dressant une typologie, nécessairement simplifiée, la
même étude distingue quatre types d'espaces
périurbains en fonction de leurs évolutions spécifiques.
Il s'agit des secteurs périurbains en crise, des zones en forte
croissance, des secteurs à agriculture structurée, enfin des
zones périurbaines à " agriculture faible ".
Le
secteur périurbain en crise
est doté d'une
densité de population proche de 500 habitants par km² et
marqué par une forte présence agricole, puisque les surfaces
agricoles y représentent plus de 45 % de l'espace total. Il est
caractérisé par une faible croissance démographique, un
niveau de revenus peu élevé, des établissements agricoles
assez peu dynamiques. Ce type de canton est principalement localisé dans
le Nord (Lille, Roubaix, Tourcoing, Dunkerque, Calais) et l'Est du pays (Nancy,
Belfort, Forbach) mais aussi près de villes qui ont subi la crise
industrielle (Cherbourg, Vesoul, Le Havre, notamment).
Bien qu'il ne soit pas plus éloigné de la ville que le
précédent, le
secteur périurbain en forte
croissance
est moins densément peuplé. La densité y
avoisine 350 habitants par km². Il connaît une très
forte croissance de la population depuis 1975 (+62 %). L'activité
économique y reste prospère et ses habitants disposent de revenus
individuels nettement supérieurs à ceux des ménages du
secteur périurbain en crise.
Quant aux zones, plus éloignées par rapport à la
ville-centre, qualifiées de
secteurs périurbains à
agriculture bien structurée
, elles sont caractérisées
par une densité nettement plus faible que les deux
précédents groupes, avec 123 habitants par km². La
croissance démographique y demeure soutenue (accroissement de +16 %
entre 1975 et 1982 et +10 % entre 1982 et 1990). L'agriculture occupe les
2/3 de l'espace disponible et le taux de reprise des exploitations agricoles
est nettement supérieur à la moyenne.
Le dernier groupe, qui rassemble les
cantons périurbains à
agriculture faible
, n'est pas plus éloigné de la ville que le
précédent. Il enregistre un accroissement démographique
soutenu (de +23 % entre 1975 et 1982 et de +17 % entre 1982 et 1990),
notamment du fait d'un solde migratoire nettement positif. Les exploitations
agricoles y sont plus petites, et le taux de reprise est inférieur de
moitié à celui du précédent groupe. L'avenir de
l'agriculture y semble donc plus précaire.
Au total, selon l'étude précitée : "
La
métropole moderne a éclaté hors des faubourgs de la
cité, elle est multipolaire, quadrillée par des réseaux de
transports, habitée par des populations beaucoup plus mobiles, mais la
transformation de ces franges découle de processus similaires à
ceux qui ont produit des banlieues au XIXe siècle. Toutefois, une
différence subsiste, c'est le fait que le tissu bâti ne progresse
plus par continuité et que les espaces concernés n'ont aucune
chance d'être, à terme, complètement
urbanisés
".
L'étude de la SEGESA, qui dresse une typologie des espaces
périurbains et affine leur définition a été
complétée par une étude de l'INSEE, tendant à
souligner les relations spatiales entre centres-villes et
périphéries.
C. LA NOUVELLE DÉFINITION INSEE ET LE ZONAGE EN AIRES URBAINES
Afin de dépasser les limites du concept de zone de peuplement industriel ou urbain, l'INSEE a élaboré, en 1996, une nouvelle grille statistique qui affine les critères caractérisant l'espace périurbain. En conséquence, la population retenue n'est plus que de 9 millions d'habitants.
1. Une grille statistique affinée
Le nouveau
zonage en aires urbaines
repose sur la
distinction entre
l'espace à dominante urbaine
et
l'espace
à dominante rurale
, d'une part, sur les concepts
d'aires
urbaines
composées de pôles urbains, de
couronnes
périurbaines
et de
communes multipolarisées
, d'autre
part
5(
*
)
.
Pour l'INSEE, un
pôle urbain
est une unité urbaine offrant
au moins 5.000 emplois sur son territoire. Il existe 361 pôles
urbains en France. Les plus importants sont Paris, Lyon et Marseille avec
respectivement
9,31 ; 1,26 et 1,23 million d'habitants
.
Autour de chaque pôle urbain ont été recensées
7.900 communes appartenant aux couronnes périurbaines
.
Environ 40 % de la population active résidente ayant un emploi dans
ces communes va travailler soit vers le pôle urbain, soit vers les autres
communes de la couronne périurbaine.
A cela s'ajoutent
2.500 communes multipolarisées
dans
lesquelles la population travaille dans plusieurs aires urbaines. Elles sont
disséminées au sein des grandes nébuleuses urbaines telles
que celles du Nord-Pas-de-Calais ou de l'agglomération lyonnaise.
Les 10.400 communes périurbaines appartiennent donc soit aux
couronnes périurbaines, soit aux communes multipolarisées.
L'intérêt de cette nouvelle nomenclature, qui se substitue
à l'ancien concept de ZPIU -lequel était révisé
lors de chaque recensement-, est de fournir une image plus précise de la
réalité périurbaine française, et en particulier de
quantifier de façon rigoureuse l'importance de la population
établie dans ces zones.
La carte ci-dessous identifie les pôles périurbains et leurs
couronnes périurbaines.
CARTE N°1
2. Une estimation démographique précise
La population qui réside dans les zones
périurbaines est nombreuse
: environ un français sur sept
-15 % de la population totale- vit à proximité des villes.
Sur ce point, les observations de l'INSEE rejoignent celles de l'étude
précitée de la SEGESA.
Cette population est également diverse
: les études
statistiques -souvent trop globales- n'ont, selon votre rapporteur, pas
suffisamment souligné la diversité de la population qui vit dans
des espaces périurbains. Elle comprend, outre les familles
d'agriculteurs installées de longue date, aussi bien des ménages
disposant de revenus stables et relativement élevés qui ont
volontairement quitté le centre-ville, que des populations
menacées par l'exclusion et la pauvreté qui n'ont pas d'autre
choix que d'habiter dans de " grands ensembles " excentrés.
a) Une population de neuf millions d'habitants
Selon l'INSEE, sur 57 millions d'habitants
recensés en 1990 :
43 millions résident dans l'espace à dominante
urbaine, dont notamment :
- 34 millions vivent dans les pôles urbains ;
-
9 millions vivent dans les espaces périurbains
;
13 millions d'habitants résident dans l'espace à
dominante rurale qui représente 71 % de la superficie du territoire
et 2/3 des communes.
L'accroissement démographique
observé dans les espaces
périurbains est
spécialement remarquable
. En effet,
leur population,
qui ne s'élevait qu'à 6 millions
d'habitants en 1982,
a augmenté de 50 % entre cette date et 1990
du fait d'un fort excédent
naturel
, auquel s'est
ajoutée l'arrivée de nombreux ménages venus des
centres-villes.
b) ... aux caractéristiques sociologiques très diverses
La population périurbaine est marquée par des
contrastes tenant à la coexistence de personnes relativement
aisées qui ont choisi de quitter la ville afin de vivre à la
campagne, et de personnes victimes d'une réelle précarisation
économique et sociale.
Des populations relativement aisées
La majorité des ménages
établis en zone
périurbaine
résident dans des maisons
individuelles
(plus de 80 %), alors que ce chiffre ne s'élève
qu'à environ 50 % en banlieue et à
environ 25 % dans les villes-centres.
Leurs logements ont pour
près de 40 % été construits
après 1974, et les occupants en sont très majoritairement
propriétaires.
Selon l'INSEE : "
Les communes périurbaines se sont
révélées attractives pour les familles avec enfants. Le
pourcentage des jeunes de moins de 20 ans y est largement supérieur
à la moyenne nationale
6(
*
)
".
Le
nombre
moyen de personnes par ménage
, trois environ, est
nettement supérieur à celui des villes-centres
. Il
dépasse également celui des banlieues et de l'espace rural (2,5)
ainsi que celui de la France métropolitaine
Les zones périurbaines sont, pour bon nombre d'entre elles,
peuplées par des ménages jeunes qui ont des enfants, qui
travaillent et ont souvent quitté le centre-ville pour pouvoir
bénéficier de logements plus spacieux. Beaucoup d'entre eux ont
fait construire leur résidence.
Outre ces habitants figurent également des personnes attirées par
l'attrait " résidentiel " de l'environnement
périurbain. C'est ainsi que dans l'ouest de Paris nombre de
" néo-ruraux " ont bâti leurs maisons sur des terrains
occupés par des vergers dont ils apprécient l'agrément.
Zone de contraste, le monde périurbain réunit aussi bien des
populations aisées que des personnes frappées par la
pauvreté.
Des populations précarisées
Votre rapporteur constate que les populations qui vivent dans une situation de
précarité -voire de pauvreté- dans les espaces
périurbains ou à proximité de ceux-ci, sont nombreuses,
même si elles ne sont pas majoritaires.
Cette situation très préoccupante résulte d'une politique
du logement qui a sous-estimé la " qualité " pour
répondre à la pénurie observée jusqu'à la
fin des trente glorieuses. De ce fait, pour des raisons financières, les
grands ensembles ont, trop souvent, été implantés aux
abords des villes, aux confins du monde urbain et du monde rural. Les exemples
des Mureaux ou de Mantes-la-Jolie montrent clairement que des populations parmi
les plus menacées par l'exclusion ont été progressivement
" reléguées " aux abords de surfaces qu'il faut bien
qualifier de "
no man's lands
" agricoles, peu propices aux
échanges culturels et au développement de la vie sociale. En ce
sens,
bien des quartiers en difficulté sont doublement exclus. La
ville les rejette à sa périphérie
, tandis que
la
campagne
ou plutôt ce qu'il en reste vu la monotonie des cultures
céréalières -souvent les seules possibles à
proximité des villes-
ne les accueille pas
ou les ignore
.
Au demeurant, la coexistence des quartiers en difficulté et de l'espace
périurbain agricole ne semble pas meilleure dans les villes qui ont la
chance de ne pas compter de grands ensembles. Votre rapporteur a
constaté en se rendant à Valenciennes, ville-symbole d'une France
industrielle profondément touchée par la crise économique,
que les quartiers périphériques les plus pauvres, qui ne sont pas
tous constitués de grands ensembles, n'entretiennent pas de relations
avec l'espace rural qui les environne.
La conjonction de l'exclusion sociale et de l'exclusion spatiale se traduit par
des tensions humaines, urbanistiques et environnementales.
CHAPITRE II -
LES TENSIONS AU SEIN DES ESPACES
PÉRIURBAINS
Les espaces périurbains concentrent les tensions qui
résultent des transformations rapides de la société
française. Zones floues, sans identité propre, manteau d'Arlequin
composé d'un damier de zones industrielles, de quartiers d'habitation et
d'exploitations agricoles, ils échappent au modèle traditionnel
de la ville européenne.
Aujourd'hui,
la ville sort de ses murs et dépasse ses faubourgs et
ses banlieues
. Le modèle de la cité radiale centrée
sur le forum, protégée par son rempart ou ses boulevards, a
volé en éclats. Dans ce mouvement de recomposition, ses marges
elles-mêmes cherchent une nouvelle identité. Le faubourg,
naguère quartier, bâti autour ou en prolongation des murs de la
cité, puis progressivement intégré à la ville,
recevant un nom (qui ne connaît, à Paris, le faubourg
Saint-Germain ou le faubourg Saint-Antoine) se dissout également pour
constituer un espace partiellement ouvert, une zone sans limite aux confins de
la ville et de l'espace agricole ou naturel. L'espace rural n'est pas moins mis
à mal : ce qui était naguère " la nature ", ses
bois, ses champs, ses cours d'eau, est peu à peu gagné par
l'offensive urbaine qui, malgré son avancée
désordonnée, le conquiert peu à peu.
Trop souvent,
l'espace non urbanisé situé autour des villes n'est que le
" supplétif " de leur futur développement, un espace
" d'attente " dont l'identité spécifique
disparaît.
Espace colonisé et dévolu à la construction de centres
commerciaux, de lotissements pavillonnaires, de concessions automobiles et
d'hôtels à bon marché, sillonné de rocades et de
pénétrantes, défiguré par une accumulation de
panneaux publicitaires et de feux tricolores ou de ronds points, il perd peu
à peu son identité rurale sans parvenir à trouver un
visage proprement urbain.
Le manque d'unité, l'absence de réflexion paysagère et,
parfois, la laideur des zones périurbaines, le sentiment
d'inachèvement qu'elles inspirent résultent des tensions
humaines, foncières et paysagères qui s'y exacerbent, et qui ont
détruit l'équilibre prévalant initialement aux abords des
villes.
I. LES PROBLÈMES HUMAINS OU L'IGNORANCE MUTUELLE
Notre pays a connu au cours des 150 dernières
années un véritable bouleversement social puisque sa population
rurale a fortement diminué au profit de la population urbaine. Bertrand
Hervieu et Jean Viar dénomment ce phénomène "
le
triomphe de l'urbanité
"
7(
*
)
.
Or, malgré la rapidité du phénomène, la France
n'abandonne qu'avec difficulté les us, les coutumes et les
mentalités d'une civilisation rurale tri-millénaire pour passer
à une culture urbaine et suburbaine dominante, mais aux
références encore mal définies. Comme le relèvent
les auteurs précités : "
la ligne de partage
millénaire construite entre la mobilité hasardeuse de la ville et
l'hyper-sédentarité sécurisante de la ruralité
paraît être effacée. [...] La mobilité urbaine a
saisi l'ensemble des territoires et des terroirs où qu'ils soient
situés, bousculant le scénario imaginaire qui avait
été construit pour organiser ces espaces et les relations
sociales et identitaires qui y prévalaient. [ ...] Le lointain et le
proche se sont télescopés au moment même où notre
mobilité change les échelles spatiales de nos vies quotidiennes.
C'est pourquoi l'unité fondamentale de notre territoire collectif est
aujourd'hui le paysage. "
8(
*
)
Interrogés en 1994 par l'Institut CSA dans le cadre d'un sondage
réalisé pour le centre d'études de la vie politique
française, 69 % des personnes indiquaient que le terme de
" campagne " leur évoquait des paysages. Seuls 28 % d'entre
elles songeaient tout d'abord à son utilisation par les activités
agricoles ! C'est dire le fossé qui se creuse dans la
représentation collective de la " nature " entre une
réalité économique et une image quelque peu
surannée.
On constate symétriquement que nos concitoyens ne se représentent
pas clairement la nouvelle réalité périurbaine. Ils
gardent à l'esprit une conception paysagère et bucolique de
l'espace rural à laquelle ils opposent l'image de la ville, sans pour
autant prendre conscience du troisième lieu, intermédiaire entre
l'un et l'autre, que constitue le monde périurbain.
Ceci explique pour partie les tensions sociales qui apparaissent le plus
souvent dans les zones de contact entre la ville et la campagne. A
côté de populations mobiles et diverses, parfois installées
récemment pour jouir de la " campagne " et qui travaillent
souvent en ville, résident des exploitants agricoles qui
considèrent l'espace périurbain non pas comme un musée ou
une base de loisirs mais comme leur outil de travail, support essentiel d'une
activité professionnelle souvent mal connue des nouveaux arrivants.
De nombreuses personnalités l'ont souligné à l'occasion
des auditions auxquelles a procédé votre rapporteur : les
agriculteurs éprouvent des difficultés croissantes à faire
entendre leur voix dans les communes " rurbanisées ". Ce
phénomène provient de la diminution de leur effectif. Ils ne
représentent plus, selon la SEGESA, que 3,3 % de la population
périurbaine. Comme les agriculteurs constituent désormais une
minorité numérique, -il n'est pas rare de compter les
exploitations existantes dans une commune sur les doigts d'une seule main- il
ne sont plus représentés au conseil municipal, si bien que leurs
besoins spécifiques sont ignorés ou déformés.
S'ils connaissent mal les us et coutumes du monde rural, les habitants des
zones périurbaines ne se reconnaissent pas davantage dans la ville
contemporaine. Nombre d'entre eux rejettent les quartiers
périphériques qui représentent trop souvent la forme la
plus laide de l'urbanisme citadin. Comme l'observait un interlocuteur de votre
rapporteur, un
rempart invisible
, une
impalpable muraille
,
s'élèvent entre les quartiers excentrés des villes
-spécialement les quartiers en difficulté- et les zones
périurbaines qui les environnent.
Il est révélateur que dans certaines agglomérations, la
majorité des habitants des quartiers périphériques ne se
rendent que rarement en centre-ville et qu'un nombre plus grand encore d'entre
eux ne mettent jamais les pieds dans les campagnes environnantes. C'est ainsi
par exemple qu'un intervenant du colloque organisé par la commune de
Bouguenais sur le thème de la " ville fertile " en
octobre 1996,
soulignait qu'environ 40 % des jeunes des
cités en difficultés
de l'agglomération nantaise
ne
se rendaient jamais ni en centre ville, ni dans la proche campagne
!
L'espace périurbain constitue aussi le cadre de vie de nombreuses
populations atteintes par l'exclusion, lesquelles ressentent parfois comme une
violence l'exhibition tapageuse des panneaux publicitaires qui vantent des
produits que les habitants des quartiers en difficulté ne peuvent pas
acquérir. Dans ces conditions, les objectifs des politiques
urbanistiques et commerciales rejoignent les préoccupations des
politiques sociales et d'intégration urbaine. Les habitants des
quartiers périphériques en difficulté, " des zones
urbaines sensibles périurbaines " qui existent aussi bien à
Meaux et à Mulhouse qu'à Trélazé
sont donc
doublement exclus
: de la ville et de la campagne !
Quant aux habitants des espaces ruraux voisins des villes, ils craignent
l'avancée du front urbain. Dès lors, tous les moyens sont bons
pour la contenir : il est frappant, à cet égard, de
constater que la constitution des " pays " consécutive
à l'adoption de la loi n°95-115 d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire du 4
février 1995 a parfois été localement envisagée
comme le moyen de dresser un barrage contre l'extension de la ville. Comme le
relevait, en décembre 1996, le rapport de mission de la DATAR sur la
politique des pays : "
Plus de 10 % des pays sont
confrontés au phénomène de la péri-urbanité.
Leurs objectifs consistent d'une part à maîtriser cette tendance
caractérisée par une grande croissance démographique, une
forte pression foncière, une modification de l'identité du
territoire et de manière générale un bouleversement du
cadre de vie et d'autre part à jouer sur les potentialités
économiques
".
9(
*
)
Cette situation provient, pour partie, des relations parfois conflictuelles
qu'entretiennent les habitants des villes et ceux de la campagne.
L'agriculture périurbaine est, plus que l'agriculture située en
zone rurale, victime de déprédations. Ceci est
spécialement vrai à proximité des zones urbaines
sensibles. C'est ainsi, par exemple, que les arboriculteurs ou les
maraîchers d'Ile-de-France sont victimes de dommages et de vols qui
grèvent lourdement leur rentabilité. Ces vols représentent
parfois un quart de la récolte ! Il est superflu d'indiquer qu'à
de tels niveaux, les vols et déprédations absorbent
l'intégralité du bénéfice attendu. Sans tomber dans
la caricature des plaintes pour cause de Chanteclercq, on pourrait
évoquer aussi les relations parfois tendues entre agriculteurs et
habitants lors des moissons (poussière, bruit des machines le soir) ou
au printemps lors des traitements phytosanitaires.
Des mesures spécifiques d'allégement de la fiscalité et
des charges sociales sur les entreprises installées dans les
zones
franches urbaines
(ZFU) ont été prises pour compenser les
difficultés liées à leur implantation, notamment à
l'occasion du Pacte de relance pour la ville.
Ainsi dans les ZFU, le Pacte a prévu une exonération de plein
droit de la taxe professionnelle, de l'impôt sur les
bénéfices, de la taxe foncière et des cotisations
patronales de sécurité sociale. Il a également
institué dans les Zones de redynamisation urbaine (ZRU) une extension de
plein droit de l'exonération de taxe professionnelle applicable aux
établissements existants, afin de venir en aide aux entreprises qui,
contre vents et marées, se sont maintenues dans les quartiers. Or, aucun
dispositif similaire n'existe en faveur de l'agriculture périurbaine qui
jouxte ces mêmes quartiers, alors même que cette dernière
rencontre souvent les mêmes difficultés que les entreprises ainsi
aidées et joue un rôle économique social et paysager majeur.
II. LES DÉBOIRES PAYSAGERS
Si la politique de protection de l'environnement s'est
attachée à préserver de grands espaces naturels
d'intérêt national ou jugés sensibles, elle a trop
longtemps négligé les espaces agricoles proches des cités
-en considérant qu'ils n'étaient pas remarquables- et les
" grands ensembles " en estimant qu'ils étaient sans
intérêt. Votre rapporteur déplore que l'on n'attache pas
une importance suffisante à l'aspect des espaces périurbains dans
ou près desquels vit une large part de la population française.
L'urbanisation des abords des villes s'effectue selon un modèle
très consommateur d'espace, peu différencié, qui gomme
indistinctement les spécifités géographiques, historiques,
ou culturelles des sites préexistants. De plus, le développement
de l'espace périurbain se fait de manière monofonctionnelle :
habitat-travail-loisirs-commerces, ce qui multiplie les besoins de
déplacement, fondus dans un vaste " continuum urbain "
globalement indifférencié. Il en est ainsi des franges ou des
lisières urbaines, comme des nouvelles infrastructures de transport :
ces dernières constituent désormais une nouvelle maille sur le
territoire (rocades, échangeurs, ...) et ont une emprise sur de
très vastes territoires, parfois beaucoup plus vastes que les villes
qu'elles desservent. Sur ces sites, des logiques très
structurées, tant techniquement que du point de vue opérationnel,
comme la construction d'une voie rapide, s'opposent à des structures
anciennes et beaucoup plus fragiles comme l'organisation agricole.
Il est frappant de constater que dans les espaces périurbains, le site
à urbaniser est considéré comme une
"
denrée reproductible et périssable
". Il
suffit d'observer la rapide obsolescence des zones commerciales ou artisanales
ainsi que l'apparition de friches commerciales, pour comprendre que les besoins
de sites à urbaniser reposent souvent plus sur le déplacement de
fonctions déjà remplies que sur la satisfaction de besoins
nouveaux.
Face à cet " espace jetable ", il convient de s'interroger sur
les possibilités encore limitées de recyclage de ces surfaces,
qui condamnent pour le moment une part importante de la population
française à vivre dans, ou à proximité de sites
dévalués.
A. LES ENTRÉES DE VILLE
Les entrées de ville fournissent l'une des
illustrations les plus caractéristiques du peu d'intérêt
que suscite la colonisation progressive de l'espace périurbain par la
ville.
Comme l'écrivent B. Hervieu et J. Viar : "
C'est dans
l'abomination des entrées de villes [...] que l'on voit le mieux la
frontière entre les villes et la campagne [...]. Ces no man's lands
[...] sont des espaces non ou mal organisés et ceux-là ne
relèvent pas des causes sociales ou migratoires que l'on attribue
à la désorganisation des banlieues et des grandes cités.
On voit pour ainsi dire, le non sens à l'état brut et
l'archaïsme d'une pensée spatiale où ville et campagne
relèvent de logiques communales dépassées et où le
lieu de leur frottement est abandonné au mercantilisme
sauvage.
10(
*
)
"
Sans nul doute, le manque d'une volonté politique supracommunale,
qu'elle soit territoriale ou étatique, a fortement pesé sur
l'absence de choix politique s'agissant des entrées de villes.
Chargé en 1994 par MM. Bernard Bosson, Ministre de l'Equipement,
des Transports et du Tourisme et Michel Barnier, Ministre de l'Environnement,
d'une mission de réflexion et de proposition sur les entrées de
ville, M. Ambroise Dupont sénateur, dans un remarquable rapport,
analyse la situation et formule des propositions dont l'une s'est traduite par
l'adoption de l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme lors du
vote de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative
au renforcement de la protection de l'environnement.
Dans le constat qu'il établit, M. Ambroise Dupont rappelle
"
qu'historiquement, " entrer en ville " relevait d'un
parcours qui menait la campagne au coeur de la cité. Il se voulait
initiatique et représentatif des " splendeurs " de la ville.
Celle-ci se donnait à voir durant ce parcours à la fois sous ses
aspects les plus prometteurs mais aussi par l'affichage des lois communes (la
place des gibets n'était pas innocente). "
Mais depuis plusieurs années, le développement de la
périphérie des villes s'est opéré de façon
anarchique, au bénéfice d'implantations commerciales multiples,
sans aucun souci d'aménagement. Force est de constater que les outils de
planification urbaine comme les ZAC (zones d'aménagement
concertée) ont été utilisés pour
soutenir des
intérêts financiers communaux concurrents
en raison de la
quasi-absence de coopération intercommunale.
Plusieurs raisons expliquent ce développement
désordonné :
Dans le souci de préserver les centres-villes, qui concentrent bien
souvent l'essentiel du patrimoine historique et artistique d'une cité,
les aménagements les plus massifs et les moins esthétiques, tels
que les centres commerciaux, les bâtiments industriels et les grands
ensembles d'habitation ont été rejetés à la
périphérie des villes sans faire l'objet de prescriptions
urbanistiques rigoureuses.
Comme le soulignait l'un des interlocuteurs entendus par votre rapporteur, les
politiques urbaines n'ont eu de cesse que soient repoussées à la
périphérie des villes, les activités les moins nobles et
les plus perturbatrices, en termes de nuisances sonores, de feux de circulation
et de production de déchets. Ainsi en est-il de la grande distribution
qui était historiquement installée en ville. Les contraintes
réglementaires ont rendu quasi impossible le maintien en centre-ville
d'activités économiques comme les commerces, les garages
concessionnaires automobiles voire même les hôtels.
Mais, entre 1970 et 1990, l'implantation de ces activités en
périphérie des villes s'est faite sans aucune
préoccupation d'urbanisme, d'environnement, ou d'insertion
paysagère.
Par ailleurs, les entrées de ville constituent des espaces très
convoités par les investisseurs économiques. Ceux-ci veulent
bénéficier au maximum de " l'effet-vitrine " qui
résulte de l'accessibilité, des disponibilités
foncières et de la visibilité des implantations, et qui porte sur
les abords des réseaux d'échange stratégique ou le long
des infrastructures à fort trafic. "
Ce processus se traduit par
la prolifération de constructions à usage d'activité ou de
service, implantées de façon linéaire en
méconnaissance des préoccupations d'urbanisme, architecturales et
paysagères, et en ne se préoccupant que du court terme.
L'urbanisation s'organise de manière linéaire et
monofonctionnelle, sans profondeur et sans structuration véritable au
détriment de la cohérence et de la continuité urbaine,
ainsi que des possibilités de mutations de ces zones. L'activité
commerciale alliée à la fréquentation de la voie appelle
souvent une excessive surenchère de la publicité et des
enseignes. Les contradictions entre les deux fonctions de la voie (voie de
transit et desserte locale) créent de nombreux dysfonctionnements en
matière de circulation et de sécurité
routière
"
11(
*
)
.
Enfin, comme le soulignait M. Ambroise Dupont, ces implantations
commerciales, artisanales ou d'activités de services implantées
de façon si anarchique à la périphérie des villes
ont également accompagné le mouvement démographique
fortement positif caractéristique des territoires périurbains :
elles ont suivi
une clientèle de plus en plus installée
à la périphérie des villes
.
L'exemple saisissant d'un laisser-faire aux conséquences souvent
désastreuses correspond à l'absence de prise en compte de
l'espace périurbain dans la politique de l'environnement. A
côté de centres-villes transformés en musées, on a
laissé échapper l'occasion de gérer de façon
cohérente des espaces où vit la majorité de nos
concitoyens.
B. LES " GRANDS ENSEMBLES " PÉRIURBAINS
La périphérie des agglomérations est
fréquemment " le refuge " de populations
paupérisées et marginalisées. Les " grands
ensembles " périurbains : barres et tours, fruits trop souvent
d'une conception de l'urbanisme que votre rapporteur a qualifié de
" quasi-totalitaire " dans un précédent rapport
constituent le symbole de l'enfermement de quartiers qui sont encore, dans un
rapport freudien, -paradoxalement repliés sur eux-mêmes dans un
espace cependant ouvert tel la plaine-, malgré les efforts menés
depuis quinze ans pour les ouvrir sur la ville et les communes avoisinantes.
La
laideur a un tropisme pour la laideur
: il est frappant et paradoxal
de constater que, pour créer une infrastructure à la
périphérie des villes,
on épargne plus volontiers une
forêt ou un espace naturel qu'un quartier d'habitat social
. C'est
ainsi qu'à Bron, le quartier de Parilly est divisé en deux
parties séparées par huit voies routières où
circulent des dizaines de milliers de véhicules par jour. Il en va de
même dans la commune de Plaisir où une ligne à haute
tension passe à proximité de certains immeubles, tandis qu'un
autre ensemble de logements bâti en bordure d'un champ a pour vis
à vis ...une usine d'incinération d'ordures
ménagères !
Dès 1992, votre rapporteur a dénoncé un urbanisme qu'il
qualifiait, à cette époque, de " criminogène ".
A n'en pas douter, la
violence de la laideur
ou de l'anonymat
qui
caractérise certains grands ensembles périurbains a une incidence
directe sur la violence qui s'y exprime aujourd'hui. C'est pourquoi le
rétablissement d'un "
droit au beau " pour les
citoyens
et d'un "
devoir du beau "
pour les
élus
doit constituer une priorité de la politique de
reconquête des espaces périurbains.
III. PRÉCARITÉ FONCIÈRE ET FRAGILITÉ AGRICOLE
L'espace périurbain est
menacé,
entre une
ville conquérante
et une
agriculture
déstabilisée
qui reflue vers les zones exclusivement rurales.
Ligne de contact fluctuante, parfois difficile à identifier, il semble
promis à une inexorable urbanisation. Sa situation est -toutes choses
égales par ailleurs- analogue à celle que connaissait le littoral
français avant que le Conservatoire du littoral ne soit
créé. Comme le remarque Dominique Legrain, en rappelant les
conclusions du rapport Piquard qui préluda à la création
du Conservatoire du littoral :
"
La décision de construire, d'occuper l'espace, est
irréversible, alors que la décision de le protéger est
toujours provisoire. Le vide attire le plein, le plein ne recule jamais au
profit du vide [...]
12(
*
)
".
Pour l'opinion publique en effet, l'espace avoisinant les villes est bel et
bien une " peau de chagrin " promise à se réduire
inexorablement. La pression qu'il subit provient, on l'a souligné plus
haut, de l'urbanisation croissante qui se traduit par la construction de
lotissements, de centres commerciaux et l'implantation d'infrastructures de
transport (rocades et carrefours giratoires notamment) qui s'avèrent
grands consommateurs d'espace.
Or, actuellement aucun dispositif ne protège, de façon
spécifique, les terres agricoles périurbaines, et n'en favorise
la gestion. C'est pourquoi elles sont souvent peu à peu
dévorées " au fil des décisions et des besoins "
par ce que d'aucuns considèrent comme "l'ogre " citadin.
La précarité foncière et la déprise agricole
sont donc bel et bien l'avers et le revers d'une même médaille.
A. LA PRÉCARITÉ FONCIÈRE
1. Une urbanisation sans borne
Les espaces périurbains ont subi un fort
développement des surfaces bâties depuis le début des
années 1980.
En exploitant les données statistiques issues des derniers recensements,
la SEGESA
13(
*
)
montre que
l'on a construit,
de 1982 à 1990, 17,7 logements par km² dans les cantons
périurbains, contre 6,2 logements en moyenne sur l'ensemble du
territoire
et 2,4 dans les communes rurales. Certes, le rythme de
construction s'est réduit, passant de 75.000 logements construits
par an entre 1976 et 1980 à 53.000 logements bâtis en moyenne
annuelle entre 1986 et 1990. Cependant, la part des logements construits en
zone périurbaine, par rapport au total des logements construits
s'accroît de 19,2 % à 21,2 %.
La zone périurbaine est donc un espace d'élection et de
" facilité " pour l'urbanisation
.
Rien d'étonnant, dès lors, à ce que la fragilité de
l'agriculture s'y manifeste au grand jour.
2. ...en raison d'un droit de l'urbanisme instable, où il y aurait " fatalité à urbaniser "
Le droit de l'urbanisme décentralisé, qui
demeure un progrès, est frappé d'une instabilité
chronique,
fort dommageable à l'utilisation durable des terres
à des fins agricoles. Comme l'observait un interlocuteur de votre
rapporteur : "
aujourd'hui, plus personne ne croit aux documents de
planification urbaine !
"
Ce phénomène n'est pas nouveau puisque le Conseil d'État
en faisait état, dès 1992, dans un rapport intitulé
"
L'urbanisme : pour un droit plus efficace ".
Les
observations de la haute juridiction demeurent toujours
d'actualité ! On recourt trop fréquemment pour urbaniser
rapidement aux procédures de révision, d'application
anticipée en cours de révision ou de modification des plans
d'occupation des sols (POS)
14(
*
)
.
Lorsqu'elle
est justifiée, la modification du POS n'est pas, en soi, condamnable.
Elle contribue cependant si elle devient systématique, à
entretenir les anticipations des propriétaires ou des promoteurs sur la
vente des terrains urbanisables
, et elle incite les administrés
à demander de nouvelles autorisations de construire.
Alors que (selon la définition de la SEGESA) les espaces
périurbains représentent environ 10 % de la surface de
l'Hexagone
, ils sont couverts par des zones urbanisables ou
réservées à l'urbanisation qui représentent entre
le 1/4 et le 1/3 du total national des surfaces urbanisables à terme.
L'existence de " zones d'urbanisation future " ou
zones " NA " souvent situées à la limite des zones
urbanisées encourage d'ailleurs les comportements spéculatifs. En
principe, ces espaces sont, selon l'article R 123-18 du code de
l'urbanisme, ceux qui : "
peuvent être urbanisés à
l'occasion soit d'une modification du plan d'occupation des sols, soit de la
création d'une zone d'aménagement concerté ou de la
réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction
compatibles avec un aménagement cohérent de la zone [tel qu'il
est défini par le règlement du POS]. "
Bien que le texte du code de l'urbanisme précité n'ouvre
qu'une
possibilité d'urbanisation
, il est, en pratique,
interprété comme une semi-obligation ou plutôt comme le
reflet de la "
fatale
" urbanisation de ce qu'il est convenu
d'appeler les " zones pyjama ", du nom des hachures et qui les
représentent sur les plans du POS.
Le classement en zone " NC " dite de " richesses
naturelles " ne répond pas, quant à lui, à la
problématique de l'urbanisation périurbaine, puisqu'il permet de
" geler " momentanément le statut des terres et non pas
d'astreindre les propriétaires à les cultiver. En
réalité, la règle d'urbanisme n'assure qu'un statu quo en
ce qui concerne l'agriculture, sans que cette dernière fasse l'objet
d'une politique spécifique. Elle ne l'inscrit pas dans une vraie
durée ou une démarche planificatrice.
B. LA FRAGILITÉ AGRICOLE
La fragilité de l'agriculture périurbaine se
traduit par une
déprise progressive des zones cultivées.
L'expérience prouve que les herbages et les exploitations
d'élevage disparaissent les premiers. Puis les terres arboricoles et
maraîchères sont gagnées par la friche ou, plus souvent,
loties. Au mieux, les surfaces arables sont exploitées grâce
à des cultures céréalières dont le rendement
financier est meilleur, compte tenu du plus faible investissement qu'elles
nécessitent.
Au total, on assiste à un appauvrissement humain, avec le départ
des agriculteurs, écologique en raison de la disparition des
espèces animales et de la diminution des types de production et
esthétique, car les surfaces sont finalement revêtues d'une
couverture plus monotone ou, pire encore, laissées à l'abandon.
Ce processus de lente dégradation procède largement des
faiblesses intrinsèques de l'agriculture périurbaine et du
problème du coût du foncier.
1. Une agriculture en péril
L'agriculture périurbaine connaît, à quelques exceptions près, un mouvement de régression qui caractérise une activité menacée, -c'est en tout cas la crainte exprimée par les agriculteurs-, à terme, de disparition.
a) Une agriculture diversifiée dont la marginalisation ...
Si l'agriculture périurbaine est aussi diverse que les
traditions culturales de notre pays, elle est cependant
caractérisée par la présence de nombreuses
" ceintures maraîchères " ainsi que de surfaces
horticoles à proximité des agglomérations. C'est ainsi que
les communes urbaines accueillent 60 % des superficies des cultures de
légumes frais de plein air et 70 % des superficies horticoles
françaises.
L'agriculture périurbaine représente en France, selon la SEGESA :
- 10 % de la surface agricole utilisée ;
- 12 % des exploitations et de la population familiale agricole ;
- 12 % de la production agricole.
Bien qu'elle occupe encore 52,5 % du territoire des cantons
périurbains
selon la même source,
l'agriculture
périurbaine est frappée par un mouvement tendanciel de
régression
. C'est ainsi que dans les Bouches du Rhône
22 % de la surface agricole utile a disparu
15(
*
)
au cours des 25 dernières années. La
baisse du nombre des exploitations, la réduction de la surface agricole
utilisée, ainsi que la diminution de la population agricole sont
d'ailleurs plus rapides en zone périurbaine qu'en zone rurale.
Cependant, selon la SEGESA, la dégradation de la situation de
l'agriculture ne suit pas le même rythme sur l'ensemble du territoire
périurbain :
"
D'une manière générale, on n'enregistre qu'un
très faible recul de la SAU dans les périphéries des
villes situées en régions de " grande culture " (Melun,
Meaux, Chartres...) alors qu'à l'inverse, des villes situées sur
le littoral où s'ajoute la pression touristique, connaissent des pertes
très importantes dépassant parfois le quart des superficies
agricoles encore présentes en 1979 (Toulon, Bastia,
Montpellier...) "
.
Néanmoins, le péril encouru par l'agriculture est partout le
même :
" L'urbanisation progressive conduit au mitage des terroirs agricoles
et à une raréfaction des terres disponibles, elle limite ainsi
les possibilités de restructuration et de travail collectif des
agriculteurs et induit une déstabilisation de nombreuses exploitations,
notamment lors des successions
"
16(
*
)
.
Certaines exploitations agricoles ne subsistent d'ailleurs qu'en contrepartie
de la vente de terrains à bâtir, qui permet de moderniser les
bâtiments et le matériel voire seulement de " tenir ".
En conséquence,
l'accroissement de la déprise agricole
entraîne souvent l'apparition de friches
, dans des
agglomérations très diverses. Il en était ainsi à
Perpignan
où, avant le lancement d'une opération de
reconquête, la friche couvrait les deux tiers des espaces naturels de la
commune. Il en va de même dans
l'agglomération nantaise
où seul un agriculteur de plus de cinquante ans sur dix voit sa
succession assurée ! De ce fait, la surface couverte de friches pourrait
passer de 6.500 hectares aujourd'hui à 9.500 hectares dans dix
ans.
b) ... est favorisée par l'article L.411-32 du code rural
L'article L.411-32 du code rural consacre le primat du droit
de l'urbanisme sur le droit rural.
Ce texte dispose en effet que :
"
Le propriétaire peut, à tout moment, résilier le
bail sur les parcelles dont la destination agricole peut être
changée en application des dispositions d'un plan d'urbanisme ou d'un
plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé. Dans ce dernier
cas, la résiliation n'est possible que dans les zones urbaines
définies par le plan d'occupation des sols ".
Comme le remarque le professeur L. Lorvellec, le droit rural est, du fait de
ces dispositions, "
balayé par l'exceptionnelle plus-value
née de l'urbanisation de la terre. Il ne peut préserver la
destination agricole : protéger les agriculteurs ou les
propriétaires de terres agricoles et protéger l'agriculture sont
parfois antinomiques "
17(
*
)
.
Cette antinomie est exacerbée par le coût du foncier en zone
périurbaine.
2. Un coût du foncier manifestement élevé
Le problème du coût élevé du
foncier à proximité des agglomérations est la principale
cause de la précarité de l'agriculture périurbaine. En ce
sens, la " malléabilité " des plans d'occupation des
sols n'est que la résultante d'un problème économique :
les citoyens et les opérateurs fonciers sont poussés à
sortir des cités du fait du coût du foncier et des immeubles en
centre-ville. C'est donc par un " effet de diffusion " que les prix
des terrains s'accroissent en raison de leur plus ou moins grande
proximité par rapport à l'agglomération ou aux
infrastructures de transport routier qui la desservent.
Il n'est pas rare, au surplus, que
la construction de grandes
infrastructures
de transports telles que les aéroports, les
autoroutes ou les voies de chemin de fer,
contribue indirectement à
renforcer le phénomène de hausse des prix du foncier
, dans
les régions proches des zones périurbaines.
Au cours des auditions auxquelles il a procédé, votre rapporteur
a ainsi noté que le versement d'indemnités d'éviction
-souvent élevées- à l'occasion de procédures
d'expropriation de terrains avait un effet immédiat sur le prix de la
terre agricole des communes environnantes. En effet, les propriétaires
indemnisés se trouvaient en mesure d'acheter des terrains agricoles
à des prix supérieurs à ceux du marché avoisinant.
D'un point de vue général,
la rentabilité moyenne des
exploitations agricoles n'est pas suffisante pour que l'investissement en terre
cultivable agricole soit rentable
si on le compare aux profits
dégagés par la vente de terrains urbanisables.
Il est d'ailleurs notable que l'agriculture se maintient beaucoup mieux
à proximité des villes lorsqu'elle se consacre à des
productions de plus haute valeur ajoutée : c'est ainsi que des vignobles
de qualité se maintiennent fort bien dans le voisinage de villes
importantes (par exemple pour certaines appellations d'origine
contrôlée des Bouches-du-Rhône). A contrario, les
productions dotées d'une faible rentabilité ne résistent
pas à la pression foncière urbaine.
*
* *
A la lecture de ce constat alarmant, l'enjeu du présent
rapport est de proposer des solutions pour le développement harmonieux
des territoires périurbains, grâce à la mise en valeur des
espaces naturels et agricoles, et pour la reconquête de secteurs
dégradés ou " abandonnés ".
L'espace périurbain peut-il devenir un nouvel objet pour la politique de
la ville, la politique agricole et la politique environnementale ? Ces
politiques peuvent-elles être gérées de façon
concertée par les collectivités locales et par l'Etat ? Les
structures institutionnelles existantes sont-elles appropriées aux
spécificités du monde périurbain ? Telles sont les
questions auxquelles -sans a priori idéologique et avec le souci de
tenir compte de la diversité des situations-, votre rapporteur souhaite
apporter des éléments de réponse.
CHAPITRE III -
DES MOYENS D'INTERVENTION NOMBREUX
MAIS INADAPTÉS
Compte tenu de l'extension des zones périurbaines en
France et des tensions que ces espaces subissent, la mission initiale de votre
rapporteur était de s'interroger sur les moyens à mettre en
oeuvre pour protéger durablement les espaces naturels pris au
piège des zones périurbaines, et prendre en compte de
légitimes préoccupations d'écologie urbaine.
Pour de nombreux acteurs locaux (élus, organismes professionnels,
associations) la création de " parcs naturels régionaux
périurbains " apparaissait souhaitable. L'indéniable
succès de cet instrument d'aménagement du territoire les
conduisait à estimer que son utilisation à proximité des
villes permettrait de limiter l'inexorable transformation des espaces
périurbains.
Il paraît s'avérer, après analyse, que cette solution
séduisante rencontre de réels obstacles et suscite de vraies
interrogations.
I. L'APPROCHE DE PLUS EN PLUS ENVIRONNEMENTALE DU PARC NATUREL RÉGIONAL
A. LES ATOUTS D'UN PARC NATUREL RÉGIONAL : UN AMÉNAGEMENT FIN DU TERRITOIRE
Le concept de parc naturel régional est né des
réflexions de la DATAR, sous l'impulsion d'Olivier Guichard, vers
1965-1967, dans le sillage et en complément des parcs nationaux. Alors
que ces derniers avaient vocation à préserver des espaces rares
presque vierges ou tout du moins inhabités dans leurs zones centrales et
ayant une valeur biologique d'importance internationale, les parcs naturels
régionaux ont été conçus comme des outils
d'aménagement et de revitalisation rurale.
A la suite du texte portant statut des parcs, -le décret en Conseil
d'Etat du 1er mars 1967, assorti d'une circulaire
interministérielle d'information du 1er juin 1967- plusieurs
autres sont venus compléter le dispositif, notamment pour tenir compte
de la création des régions et de la mise en place de la
décentralisation et pour renforcer la mission de protection de
l'environnement des parcs régionaux. Les premières dispositions
législatives relatives aux parcs naturels régionaux et à
leurs missions figurent dans les lois n° 83-8 du
7 janvier 1983 relatives à la répartition des
compétences entre les communes, les départements, les
régions et l'Etat et n° 85-30 du 9 janvier 1985 sur
la protection et le développement de la montagne.
Le dispositif législatif et réglementaire actuellement en vigueur
résulte de :
- l'article 2 de la loi n° 93-24 du
8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages,
qui insère un article L. 224-1 dans le code rural ;
- l'article 41 de la loi n° 95-101 du
2 février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement, qui modifie et complète l'article L. 142-3 du
code de l'urbanisme ;
- le décret n° 94-765 du 1er septembre 1994 pris pour
l'application de l'article L. 244-1 du code rural et relatif aux
parcs naturels régionaux ;
- enfin la circulaire du 5 mai 1995 prise pour l'application du
décret n° 94-765 sur les parcs naturels régionaux.
De l'analyse de ces textes, deux grands principes se dégagent qui
expliquent l'indéniable succès des parcs naturels
régionaux en matière de développement économique.
Cet outil "
d'aménagement fin du territoire
"
18(
*
)
est issu d'une volonté locale
sanctionnée au niveau national pour définir une stratégie
de développement et de protection dans une zone bien identifiée.
1. Un consensus local sanctionné par un label national
Le fonctionnement d'un parc naturel régional est, dès l'origine, caractérisé par le consensualisme, puisque la procédure de création nécessite l'accord convergent de l'Etat et des collectivités territoriales.
a) Une initiative locale et collective
L'article L. 244-1 du code rural issu de la loi
n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en
valeur du paysage dispose que
l'initiative de la création d'un parc
naturel régional revient à la région avec l'accord de
l'ensemble des collectivités territoriales concernées
et en
concertation avec les partenaires intéressés.
Parmi les collectivités territoriales, le rôle de la
région est déterminant tant en ce qui concerne l'initiative de la
démarche qui fait l'objet d'une délibération
motivée du Conseil régional, que lors de l'élaboration de
la charte et de la définition du périmètre, ainsi que pour
la définition des modalités de participation des autres
collectivités locales à l'élaboration de la charte.
Mais si l'action de la région est déterminante à chaque
étape de la procédure,
l'accord des collectivités
territoriales comprises dans le périmètre est incontournable
et le régime juridique des parcs naturels régionaux a
été progressivement renforcé sur ce point. En effet
initialement, le décret de 1967, au-delà de l'initiative
laissée aux communes et aux départements, donnait tous les
pouvoirs à l'administration de l'Etat pour gérer le
déroulement de la procédure sans imposer la consultation des
collectivités concernées, sur le projet de charte ni leur accord
final.
La reconnaissance en 1982 du principe d'autonomie des collectivités
territoriales, ayant pour corollaire l'exclusion de toute tutelle d'une
collectivité sur une autre, la réglementation sur les parcs
naturels régionaux a été adoptée afin
d'éviter qu'une initiative régionale ne puisse s'imposer aux
communes sans leur laisser la possibilité de revenir en arrière
pendant le déroulement de la procédure.
L'article L. 244-1 du code rural issu de la loi du
8 janvier 1993 donne donc force législative au principe de
l'accord de l'ensemble des collectivités territoriales concernées.
Le décret du 1er septembre 1994 fait application de ce
principe en prévoyant que la délibération du Conseil
régional doit prévoir les modalités de l'association des
communes à l'élaboration de la charte et qu'in fine, le projet de
charte est transmis pour accord aux départements et aux communes
territorialement concernés. L'absence de réponse dans un
délai de quatre mois vaut refus du projet de charte. Enfin, la liste des
communes ayant approuvé la charte et adhéré à
l'organisme de gestion est annexée à la charte.
S'agissant de
l'organisme de gestion d'un parc naturel régional
,
la réglementation encourage également une large participation de
toutes les collectivités territoriales concernées :
" l'évolution des textes met l'accent sur la liberté des
communes et le volontarisme qui caractérisent l'esprit des
PNR
"
19(
*
)
. Si, à l'origine, les
autorités locales avaient toute latitude pour choisir la forme juridique
de l'organisme chargé de la mise en oeuvre de la charte -association de
la loi de 1901, fondation reconnue d'utilité publique, syndicat mixte-,
la formule du syndicat mixte s'est progressivement imposée et la
circulaire du 28 juillet 1989 indique qu'il est
préférable que l'organisme de gestion soit un syndicat mixte
" regroupant toutes les collectivités territoriales
concernées ".
Cette formule présente de nombreux avantages : tout en laissant aux
collectivités territoriales la maîtrise de la gestion du parc,
elle permet la participation des chambres professionnelles et garantit la
pérennité de l'institution. Dans les faits cependant, et pour des
raisons budgétaires -admission au fonds de compensation pour la TVA,
éligibilité à la dotation globale d'équipement,
exonération de la taxe sur les salaires- les deux-tiers des syndicats
mixtes qui gèrent des parcs sont des syndicats mixtes fermés,
composés des seules collectivités territoriales. Les autres
organismes publics peuvent participer aux réunions du comité
syndical avec voix consultative ou être associés à des
actions spécifiques par la voie de conventions signées avec le
syndicat mixte.
Rappelons, enfin, que les communes adhérant à la charte doivent
en appliquer les orientations dans l'exercice de leurs compétences sur
le territoire du parc. Elles assument également une part essentielle du
financement de celui-ci, aux côtés de la ou des régions
concernées.
b) L'engagement de l'Etat à travers la délivrance d'un label national
"
Tout parc naturel régional doit
procéder d'un esprit commun, aussi faut-il déposer la marque pour
la protéger et garder l'attribution de cette marque au niveau national,
par une instance officielle unique pour que soit préservée
l'unité
"
20(
*
)
.
Le concept des parcs naturels régionaux s'appuie sur la
décentralisation, qui suppose un financement partagé entre Etat
et collectivités locales, et sur un système de codécision
pour la création et le contrôle des parcs qui assure la
cohérence interne et l'unité du réseau. L'Etat,
responsable de l'attribution du label national, est donc le garant de cette
cohérence, et en contrepartie, il prend un certain nombre d'engagements.
Cet engagement se concrétise tout au long de la procédure de
création d'un parc puisque le Préfet de région,
destinataire de la délibération du Conseil régional
prescrivant l'élaboration du parc définit avec le
Président du Conseil régional les modalités d'association
de l'Etat à son élaboration, notamment la liste des services de
l'Etat qui seront associés. Le projet de charte approuvé,
accompagné des accords des collectivités territoriales est
transmis au Ministre chargé de l'environnement par le Préfet de
région qui donne un avis motivé.
La décision de classement appartient in fine au Ministre en charge de
l'environnement qui peut consulter les différents ministères
intéressés (agriculture, intérieur, finances, industrie,
tourisme, aménagement du territoire) et soumet le projet à l'avis
du Conseil national de la protection de la nature et de la
Fédération des parcs naturels régionaux.
Faute de réponse dans les deux mois pour ces consultations et avis, il
est passé outre. La décision de classement prise par
décret vaut adoption de la charte constitutive pour une durée
maximale de dix ans.
Le classement permet d'utiliser la dénomination " parc naturel
régional " ainsi que l'emblème du parc, déposé
par le ministre chargé de l'environnement, à l'Institut national
de la propriété industrielle, sous la forme de marque collective.
Responsable de ce label
décerné au niveau national,
l'Etat s'assure que les collectivités adhérentes et
l'organisme chargé de la gestion
du parc respectent le contenu de
la charte. Ce contrôle s'exerce notamment à l'occasion du
renouvellement de la charte, qui est assuré par le gestionnaire du parc
naturel régional selon les mêmes règles de fond et de
procédure qu'au départ. Elle se fait à partir d'un
inventaire du patrimoine et des enjeux culturels sociaux et économiques,
accompagné d'un bilan des actions du parc comparé aux engagements
inscrits dans la charte.
Très récemment, a été mise en place à
l'initiative du ministère en charge de l'environnement une
procédure d'évaluation intermédiaire à cinq ans de
la mise en oeuvre de la charte. Répondant à une question
écrite posée par M. Jean-Pierre Raffarin, la ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement justifie ce nouveau
dispositif compte tenu de la durée du classement, et souligne
l'intérêt d'une meilleure "
concertation entre les acteurs
du parc et leurs partenaires impliqués dans la mise en oeuvre de la
politique des parcs naturels régionaux au niveau régional et
national
". Cette évaluation peut ainsi fonctionner comme un
système d'alerte ou souligner les progrès accomplis dans la mise
en oeuvre de la charte, ce qui devrait "
renforcer l'efficacité
de l'action du parc sur les dernières années de validité
de son classement et ainsi préparer le renouvellement de classement
à terme
".
21(
*
)
En cas de non respect du contenu de la charte, la seule sanction envisageable
est ministérielle et se traduit par le retrait du label ou son non
renouvellement. Le seul exemple à ce jour est celui du Parc naturel du
Marais Poitevin, en 1997. Sur ce territoire, l'Etat a constaté
l'insuffisante préservation du patrimoine et la disparition de 40% des
prairies humides, du fait d'un système administratif et
économique aberrant, favorisant le remembrement et le drainage des
terres.
Outre son pouvoir de contrôle, l'Etat est également partenaire et
donc signataire de la charte du parc. Dans les trois mois suivant la
publication du décret de classement, le Préfet de région
signe une convention d'application de la charte qui précise les
modalités selon lesquelles l'Etat exerce ses compétences sur le
territoire du parc pour respecter les orientations de la charte, ainsi que les
moyens qu'il y consacre.
Enfin, l'Etat apporte une aide financière tant au fonctionnement qu'aux
dépenses d'équipement des parcs naturels régionaux. Depuis
1978, cette participation figure sur une ligne budgétaire
spécifique du ministère de l'environnement.
Ces crédits figurent aux contrats de plan Etat-région, ce qui
assure aux parcs naturels régionaux une certaine stabilité
financière, et renforce le caractère partenarial de
l'intervention de l'Etat. Globalement, au titre de la loi de finances pour
1998, la dotation de l'Etat -fonctionnement et intervention- s'est
élevée à 43 millions de francs.
En moyenne la participation de l'Etat, s'agissant du financement des
études préalables à la création d'un parc ou des
dépenses d'équipements s'élève à 13 %,
mais avec de fortes disparités selon les parcs (3 % pour le parc
naturel de La Brenne et 33,7 % pour le parc des Ballons des Vosges). On
constate les mêmes différences pour la participation aux
dépenses de fonctionnement, qui s'élève, en moyenne,
à 10 % mais varie de 3 % (parc naturel de la Corse) à
22,5 % pour le parc de Haute Vallée de Chevreuse.
2. Qui s'incarne dans les chartes d'objectifs
a) Des chartes qui intègrent des exigences en matière de protection et de développement
Le projet d'aménagement d'un parc doit, pour recevoir
un label, être conforme aux objectifs de la politique nationale en
matière de parc naturel régional et des priorités
affirmées en matière de protection de l'environnement.
- Les engagements relatifs à l'aménagement du parc sont
explicités dans la charte constitutive.
Le contenu de ces chartes a progressivement évolué, d'un strict
programme d'équipements, à la définition de
priorités à long terme destinées à atteindre des
objectifs de protection et de mise en valeur des paysages des milieux et des
espèces, ainsi que de développement économique.
Les premières chartes élaborées ont surtout traduit des
objectifs de développement rural, à travers des
équipements touristiques
" afin de favoriser la rencontre
citadins-ruraux et de matérialiser la notion de solidarité
ville-campagne
"
22(
*
)
. La
protection du milieu naturel ne constituait pas alors un objectif en soi,
même s'il devait être pris en compte afin d'éviter des abus
en matière d'équipements.
Progressivement, et à compter de la fin des années soixante-dix,
la mission de protection de l'environnement devient de plus en plus
contraignante et constitue le premier objectif d'un parc naturel
régional. L'évolution des réglementations successives
conforte ces nouvelles orientations, afin d'éviter la création de
parcs trop exclusivement orientés vers le développement
économique.
La loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur les paysages consacre
cette mission prioritaire des parcs dans l'article L.244-1 du code
rural : les parcs sont investis d'une quadruple mission, puisqu'ils
doivent contribuer à la politique de protection de l'environnement,
d'aménagement du territoire, de développement économique
et social, et d'éducation et de formation du public.
De plus, les collectivités publiques ayant adhéré à
la charte du parc s'engagent à mener des actions en faveur de la
préservation des paysages et du patrimoine naturel et culturel.
b) Des collectivités territoriales qui s'engagent à respecter le contenu des chartes
La reconnaissance législative des missions du parc
naturel régional se traduit par un enrichissement du contenu des chartes
dont la rédaction devient de plus en plus fine et rigoureuse, d'autant
que la loi du 8 janvier 1993 précitée donne une valeur
juridique incontestable aux chartes.
Historiquement, ces chartes n'avaient qu'une portée juridique
limitée, et leur contenu était généralement peu
précis. Elles constituaient le plus souvent un document prospectif,
fixant des directions d'actions et des objectifs généraux. Sur la
base de ces documents, il était difficile de considérer que les
collectivités locales étaient effectivement engagées, car
peu de dispositions étaient susceptibles de fonder une action en
responsabilité ou un recours pour excès de pouvoir.
Les règles fixées par le décret du
1er septembre 1994 relatives à l'accord des
collectivités locales, ainsi que celles sur la publicité des
chartes, renforcent désormais le caractère collectif et public de
l'engagement des collectivités publiques adhérant au parc, l'Etat
signe une convention d'application de la charte et des conventions
particulières peuvent être établies avec les
différents partenaires concernés par la mise en oeuvre de la
charte. Plusieurs chartes récentes ont choisi ce mode de
coopération, tant avec des organismes publics comme EDF ou l'Office
national des Forêts qu'avec des associations de chasse, de pêche ou
de protection de la nature.
Surtout, la loi du 8 janvier 1993 confère une valeur juridique
aux chartes qui s'impose aux cosignataires de la charte de manière
générale, et plus spécifiquement en matière
d'urbanisme. En effet, l'article L.244-1, alinéa 4, du code rural
précise que "
l'Etat et les collectivités territoriales
adhérentes à la charte appliquent les orientations et les mesures
de la charte dans l'exercice de leurs compétences sur le territoire du
parc
".
Ainsi, l'ensemble des dispositions de la charte devient contraignant, ce qui
oblige à rédiger le contenu des chartes de façon
suffisamment claire et explicite, sauf à rendre inapplicable
l'article L.244-1 du code rural.
L'avancée juridique effectuée par la loi du
8 janvier 1993 est encore plus nette s'agissant du droit de
l'urbanisme, puisque l'article L.244-1, alinéa 4 du code rural
rend obligatoire la concordance entre les chartes et les documents d'urbanisme
en indiquant que ces derniers " doivent être compatibles avec les
orientations et les mesures de la charte ".
L'article R-244-13 du code rural pris en application de ces dispositions,
précise que les documents d'urbanisme visés sont les
schémas directeurs, les schémas de secteur, les plans
d'occupation des sols ou tout document d'urbanisme en tenant lieu,
c'est-à-dire l'ensemble des documents d'urbanisme situés en aval
des chartes.
S'agissant des orientations contenues dans la charte, l'obligation de
compatibilité implique qu'il n'y ait pas de contrariété
majeure entre les documents. Mais en ce qui concerne les mesures prévues
par les chartes, qui peuvent prendre la forme de prescriptions relatives
à l'enfouissement des nouveaux réseaux de distribution
d'électricité ou de téléphone, l'obligation de
compatibilité pourrait induire que le POS soit tenu de reprendre ces
prescriptions.
3. Un indéniable succès en matière de développement économique
a) Un succès qui ne se dément pas depuis 1967
Au 1er avril 1998, il existe 35 parcs naturels régionaux, dont les plus récents, le parc naturel régional du Perche, celui du Périgord-Limousin et celui de l'Avesnois ont été créés respectivement par les décrets du 16 janvier 1998, du 9 mars 1998 et du 13 mars 1998. Les parcs couvrent environ 10 % du territoire national et intéressent 21 régions, 59 départements, plus de 3.024 communes pour une population de 2,6 millions d'habitants, comme le montre le tableau ci-dessous.
PARCS NATURELS RÉGIONAUX
Noms |
Superficie (ha) |
Nbre régions |
Nbre départ |
Nbre communes |
Population |
Densité hab/km 2 |
Date création |
|||||||
Armorique |
172.000 dont 60.000 terrestres |
1 |
1 |
39 |
56.000 |
32,56 |
30/09/69 |
|||||||
Avesnois |
124.545 |
1 |
1 |
129 |
133.993 |
107,5 |
13/03/98 |
|||||||
Ballons Vosges |
287.539 |
3 |
4 |
204 |
247.598 |
86,10 |
05/06/89 |
|||||||
Brenne |
167.200 |
1 |
1 |
47 |
32.430 |
19,39 |
22/12/89 |
|||||||
Brière |
40.000 |
1 |
1 |
18 |
70.000 |
175 |
16/10/70 |
|||||||
Brotonne |
58.000 |
1 |
2 |
53 |
64.000 |
110,34 |
17/05/74 |
|||||||
Camargue |
86.300 |
1 |
1 |
2 |
7.440 |
8,62 |
25/09/70 |
|||||||
Chartreuse |
69.000 |
1 |
2 |
52 |
32.000 |
46,37 |
06/05/95 |
|||||||
Corse |
350.000 |
1 |
2 |
143 |
26.000 |
7,43 |
12/05/72 |
|||||||
Forêt d'Orient |
71.489 |
1 |
1 |
50 |
20.307 |
28,40 |
16/10/70 |
|||||||
Grands Causses |
315.640 |
1 |
1 |
94 |
64.710 |
20,50 |
6/05/95 |
|||||||
Haut Jura |
145.580 |
2 |
3 |
93 |
62.000 |
42,59 |
10/01/86 |
|||||||
Haut Languedoc |
187.093 |
2 |
2 |
61 |
59.956 |
32,05 |
22/10/73 |
|||||||
Landes de Gascogne |
262.000 |
1 |
2 |
34 |
40.000 |
15,26 |
16/10/70 |
|||||||
Livradois Forez |
323.000 |
1 |
2 |
180 |
112.000 |
34,67 |
4/02/86 |
|||||||
Loire-Anjou-Touraine |
235.000 |
2 |
2 |
136 |
175.000 |
74,47 |
30/05/96 |
|||||||
Lorraine |
208.000 |
1 |
3 |
186 |
61.000 |
29,32 |
17/05/74 |
|||||||
Lubéron |
165.000 |
1 |
2 |
67 |
155.000 |
93,93 |
07/01/77 |
|||||||
Marais Cotentin et Bessin |
150.000 |
1 |
2 |
143 |
64.000 |
42,67 |
14/05/91 |
|||||||
Martinique |
62.725 |
1 |
1 |
32 |
100.100 |
159,68 |
24/08/76 |
|||||||
Massif des Bauges |
80.936 |
1 |
2 |
58 |
46.452 |
57,39 |
07/12/95 |
|||||||
Montagne de Reims |
50.000 |
1 |
1 |
68 |
34.067 |
68,13 |
28/09/76 |
|||||||
Morvan |
230.392 |
1 |
3 |
95 |
36.021 |
15,63 |
16/10/70 |
|||||||
Nord Pas de Calais
|
145.850 |
1 |
2 |
159 |
330.000 |
226,26 |
11/02/86 |
|||||||
Normandie-Maine |
235.813 |
2 |
4 |
150 |
87.777 |
37,22 |
23/10/75 |
|||||||
Perche |
181.287 |
2 |
2 |
118 |
73.538 |
40,44 |
16/01/98 |
|||||||
Périgord-Limousin |
180.000 |
2 |
2 |
78 |
50.500 |
28,05 |
09/03/98 |
|||||||
Pilat |
70.000 |
1 |
2 |
47 |
45.600 |
65,14 |
17/05/74 |
|||||||
Queyras |
60.330 |
1 |
1 |
11 |
2.300 |
3,81 |
07/01/77 |
|||||||
Vercors |
175.000 dont 17000 réserves . naturelles |
1 |
2 |
61 |
30.340 |
17,33 |
16/10/70 |
|||||||
Verdon |
180.000 |
1 |
2 |
44 |
19.000 |
10,55 |
03/03/97 |
|||||||
Volcans d'Auvergne |
395.070 |
1 |
2 |
153 |
91.200 |
23,08 |
05/08/77 |
|||||||
Vosges du Nord |
121.824 |
2 |
2 |
112 |
75.957 |
61,88 |
30/12/75 |
|||||||
SOUS-TOTAL |
5.586.613 |
|
|
2.907 |
2.506.286 |
44,86 |
|
|||||||
Région Ile-de-France |
|
|
|
|
|
|
|
|||||||
Haute Vallée Chevreuse |
29.340 |
1 |
1 |
23 |
43.900 |
149,62 |
11/02/85 |
|||||||
Vexin Français |
65.670 |
1 |
2 |
94 |
66.490 |
101,24 |
09/05/95 |
|||||||
TOTAL |
5.681.623 |
21 |
59 |
3.024 |
2.616.676 |
46,98 |
|
|||||||
En projet |
|
|
|
|
|
|
||||||||
Vallées de la Marne et de l'Ourcq |
56.000 |
1 |
1 |
67 dont 57.200 |
75.000 |
133,92 |
||||||||
Gatinais français |
77.807 |
1 |
2 |
68 |
93.525 |
120,20 |
||||||||
Trois forêts |
60.000 |
2 |
2 |
62 |
160.000 |
266,66 |
(source : Fédération des Parcs naturels
régionaux).
La politique des parcs naturels régionaux a permis un aménagement
fin du territoire qui s'est plus particulièrement
concrétisé dans quatre domaines :
- la
valorisation du patrimoine culturel et du territoire
.
Ceci s'illustre à travers plusieurs écomusées,
conçus comme des " outils pour conjuguer le passé au
présent et l'ancrer dans l'avenir
23(
*
)
.
Ces musées, dans lesquels la population locale s'est fortement
impliquée, transmettent l'image d'un territoire que la structure du parc
a permis de protéger.
En ce qui concerne l'habitat actuel et à venir, plusieurs parcs ont
développé une assistance urbanistique et architecturale
auprès des collectivités locales, membres du parc. Ainsi,
plusieurs d'entre eux sont consultés, voire associés à
l'élaboration des plans d'occupation des sols des communes appartenant
au parc.
- la
protection du patrimoine naturel et de sa biodiversité
.
Les parcs naturels régionaux jouent un rôle déterminant
dans le maintien de la diversité des milieux, des habitats et des
espèces. Conçus comme des laboratoires d'expérimentation,
ils ont apporté la preuve de la faisabilité d'actions
menées in situ, comme la réintroduction d'espèces bovines
ou ovines (l'highland cattle, le mouton boulonnais) ou chevalines (le cheval
camarguais, le cheval boulonnais, le poney merens) pour l'entretien des marais,
ou l'exploitation de forêts en futaies jardinées pour
préserver l'habitat de certaines espèces d'oiseaux. Compte tenu
d'un nouveau contexte agricole, du développement d'un tourisme rural,
d'une demande sociale forte de produits de qualité bien
identifiés, les expérimentations menées dans les parcs
font désormais école.
- des
initiatives en faveur du développement
économique
.
Depuis leur création, nombre de parcs naturels régionaux ont
multiplié des actions pour offrir aux acteurs économiques
installés sur leur territoire, un environnement économique
favorable, voire des outils d'accompagnement financiers pour favoriser la
pluriactivité, dans une logique de protection et de mise en valeur d'un
territoire.
- une
mission d'éducation à l'environnement
Elle s'adresse tout particulièrement aux enfants. De nombreux parcs ont
ainsi développé un partenariat étroit avec l'Education
nationale. Ce partenariat repose sur la création d'outils
pédagogiques, l'accompagnement des classes et la formation des
enseignants.
b) Des retombées positives en matière de développement économique
Les retombées des actions engagées par les parcs se chiffrent désormais en termes d'emplois créés ou maintenus. Une étude de la Caisse des Dépôts et Consignations réalisée pour l'année 1994, sur les 27 PNR existants à l'époque, estime à 5.000 ou 5.500 le nombre d'emplois maintenus ou créés grâce à l'activité des parcs. Outre les 900 emplois directs (salariés des parcs), l'étude recense 1.300 à 1.400 emplois indirects (liés aux dépenses d'investissements effectuées par les parcs sur leur territoire) et 2.800 à 3.200 emplois induits (dans les activités économiques présentes sur leur territoire, ayant bénéficié de l'appui des parcs). Elle met en évidence l'importance de ces emplois induits et pérennes -car ils se maintiendraient même si le parc disparaissait- et confirme ainsi que les parcs ont joué un rôle très important dans la stabilisation des activités, voire même dans leur développement en milieu rural.
B. QUI TROUVE SES LIMITES DANS LES ZONES PÉRIURBAINES
L'utilisation de cet outil de protection dans les zones périurbaines se révèle, à l'examen, complexe car de toute évidence le parc naturel régional a été conçu -et s'est affirmé - pour le monde rural . Il ne dispose pas de moyens suffisants pour constituer un contrepoids efficace à la périurbanisation.
1. Un outil conçu pour préserver des espaces naturels remarquables en milieu rural
Conçus principalement comme des outils d'aménagement du territoire en faveur du développement local, les parcs naturels régionaux sont progressivement devenus des instruments incontournables pour la protection et la gestion des espaces naturels. Ceci explique les très fortes exigences en ce qui concerne la qualité des territoires proposés au classement. Tant la définition d'un territoire de qualité que l'élaboration d'un projet de qualité pour le développement de ce territoire sont les conditions de fond permettant d'obtenir le classement du parc.
a) De la lutte contre la désertification rurale à la préservation d'espaces naturels remarquables
Les parcs naturels régionaux ont été
créés, dès l'origine, comme des outils de
développement pour l'espace rural, et plus particulièrement pour
revitaliser des espaces ruraux en voie de désertification
Dans les textes fondateurs des parcs naturels régionaux, les
critères d'appréciation faisaient plus intervenir la
fonctionnalité du territoire proposé au classement : la
qualité des sites et leur intérêt étaient
appréciés en fonction de leur destination, c'est-à-dire le
développement rural par le tourisme. Ainsi, le décret en Conseil
d'Etat au 1er mars 1967 évoque les sites aptes
" à accueillir les citadins des grandes
agglomérations
" et le décret du
24 octobre 1975 parle des territoires présentant
" un
intérêt pour la détente, l'éducation, le repos des
hommes et le tourisme
"
24(
*
)
.
A ces critères fonctionnels initiaux, ce sont progressivement
ajoutés des éléments permettant de prendre en compte la
qualité intrinsèque d'un paysage et la nécessité de
sa protection.
L'espace rural n'a plus été seulement envisagé dans sa
dimension fonctionnelle et économique potentielle, mais il a
été pris en compte pour ses qualités propres. Celles-ci
doivent être "
remarquables, pour la ou les régions
concernées et comporter un intérêt reconnu au niveau
national
"
25(
*
)
. En outre, ce
territoire doit présenter un caractère fragile, voire
menacé pour justifier une protection.
La préservation d'un territoire naturel et fragile s'impose en tant
qu'objectif principal et se traduit dans les objectifs de la charte,
d'où la nécessité de délimiter un territoire
cohérent et homogène. Lors de la détermination du
périmètre du futur parc, il faudra parfois exclure certaines
zones sans intérêt particulier, trop dégradées ou
sur lesquelles des projets d'infrastructures sont envisagés, qui sont
incompatibles avec l'objectif de protection des espaces naturels. A contrario,
il faudra éviter qu'un excessif morcellement des superficies ne remette
en cause la cohérence interne du territoire.
b) La qualification insuffisante des espaces naturels en milieu périurbain
Force est de constater qu'en zone périurbaine, le
volume des richesses naturelles est moins élevé que celui de la
moyenne des parcs existants.
Or, compte tenu du succès grandissant de la formule des parcs, le niveau
d'exigence augmente tout naturellement, tant en ce qui concerne les projets de
parcs que pour les parcs existants au moment de la révision de leur
charte. Les parcs régionaux affichent désormais des objectifs
d'excellence, en revendiquant leur mission d'expérimentation et leur
succès.
Dans les zones périurbaines, il est certain que les sites exclusivement
" naturels " sont devenus rares, et que parfois les zones naturelles
d'intérêt écologique faunistique et floristiques
protègent des sites artificiels, comme d'anciennes gravières, des
bassins de décantation, ou des champs d'épandage, ce qui ne
correspond pas parfaitement aux objectifs initiaux des parcs naturels.
Enfin, la simple comparaison des densités entre les parcs existants et
les projets en zone périurbaine illustre l'implantation des parcs dans
des zones rurales, parfois en voie de désertification. La densité
moyenne pour les parcs s'élève à 46,98 habitants par
km² -la plus faible étant celle du parc de Queyras (3,81) et la
plus élevée se rencontrant dans le parc du Nord-Pas-de-Calais,
éclaté en trois zones (226,26) -dans ce dernier au
côté de zones urbaines très denses, se trouvent des marais
totalement inhabités-.
Or, les projets de parcs situés en zone périurbaine ont des
densités allant de 133,92 à 266,66 habitants par km²
sur de petites surfaces, ce qui implique a priori que tout le territoire est
relativement urbanisé.
Cette forte urbanisation se caractérise, comme il a été
rappelé dans le chapitre précédent, par la multiplication
de zones dégradées, une présence importante des
infrastructures de transports ou d'équipements, et des paysages
" mités ".
Pour toutes ces raisons, la définition d'un territoire " encore
naturel " homogène, cohérent et lisible devient alors
très difficile.
D'une part, les territoires sélectionnés n'auraient pas la
dimension ni la cohérence interne suffisantes pour promouvoir une
politique de développement local dynamique. Le risque est grand de ne
favoriser -sans raisons objectives- qu'une sanctuarisation de ces espaces en
les renfermant sur eux-mêmes.
D'autre part, votre rapporteur pense que le choix d'une telle structure en
milieu périurbain pérenniserait une séparation
désormais totalement artificielle entre espaces naturels et zones
urbanisées en interdisant de prendre en compte la globalité du
phénomène périurbain. De plus, ceci aboutirait à
détourner cet outil d'aménagement de son objectif premier et
unique à savoir l'aménagement de l'espace rural. Personne ne
sortirait gagnant d'une telle manipulation.
2. Un contrepoids insuffisant face à la périurbanisation
De plus, les parcs naturels régionaux n'ont pas les
moyens suffisants pour encadrer une expansion raisonnée de la
périurbanisation.
En termes juridiques, s'il est vrai que la charte est devenue un document
plus contraignant pour les signataires, elle reste un outil contractuel, que
les parties peuvent ne pas respecter. Même si le contenu des chartes est
beaucoup plus élaboré, il conserve encore le caractère
d'une déclaration d'intention.
Vis à vis des tiers, la loi du 8 janvier 1993 sur la
protection et la mise en valeur des paysages inscrit les chartes dans l'ordre
normatif des documents d'urbanisme ; mais, comme il a été
indiqué plus haut, elle ne crée qu'une obligation de
compatibilité entre le contenu des chartes et les plans d'occupation des
sols.
Bien plus, en ce qui concerne les documents d'urbanisme situés " en
amont " des chartes, comme les directives territoriales
d'aménagement (DTA) et les schémas ayant les mêmes effets,
c'est-à-dire le schéma directeur de la région
d'Ile-de-France (SDRIF), les schémas d'aménagement
régionaux d'outre-mer (SAR) ou de la Corse, ainsi que les schémas
de mise en valeur de la mer (SMVM), rien n'a été
expressément prévu par la loi, ce qui pourrait créer des
problèmes d'articulation vis à vis des documents d'urbanisme
situés " en aval " qui s'avéreraient compatibles tant
avec les chartes qu'avec un document d'urbanisme ou d'aménagement type
DTA
26(
*
)
.
Certes, le Conseil d'Etat, saisi d'une demande d'avis émanant du
Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement
sur l'articulation du SDRIF et des chartes des parcs naturels régionaux
englobés dans le champ d'application territorial de ce
schéma
27(
*
)
, a considéré
que le SDRIF constituait, par sa nature et son objet, un document d'urbanisme
et que ses dispositions devaient être compatibles avec les orientations
et mesures des chartes des parcs naturels régionaux inclus dans son
périmètre. Il a indiqué qu'il appartenait à la
Région et à l'Etat d'assurer cette compatibilité. Ainsi,
dans le cas de l'élaboration ou de la révision d'une charte, si
une incompatibilité apparaissait, il appartiendrait à la
Région, puis à l'Etat en dernier ressort, de faire
prévaloir en opportunité "
soit le choix du parc, et donc
de mettre en révision le SDRIF, soit les options retenues dans le SDRIF
et, en conséquence, amender le projet de charte
".
Inversement, dans le cadre de l'élaboration ou de la révision du
SDRIF, s'il convenait en opportunité de retenir une option relative
à l'aménagement de la région dont la réalisation
est incompatible avec les orientations ou les mesures d'une charte d'un parc
naturel régional, adoptée ou révisée après
1993, une telle alternative ne pourrait être retenue qu'après
révision de cette charte ou après son expiration.
Mais dans la pratique, on peut penser, compte tenu des enjeux, que ce sont les
orientations du SDRIF qui prévaudront et qu'en conséquence tout
nouveau projet de charte devra être mis en cohérence avec le
contenu du SDRIF. Il en sera de même à l'occasion de la
révision des chartes existantes.
Enfin, les rapports juridiques que les parcs ont parfois cherché
à développer pour répondre aux demandes croissantes
émanant de communes périphériques ou de villes
avoisinantes restent d'ordre contractuel et n'ont pas de réelle valeur
contraignante. Il s'agit de développer un partenariat avec des communes
" associées ", sur des programmes spécifiques. Ainsi
avec les villes situées aux " portes " du territoire du parc
-en limite ou sur un axe d'accès- une convention de
" ville-porte " permet d'arrêter des engagements pris par la
ville sur des problèmes urbains, paysagers et environnementaux, en
échange de l'utilisation de la marque du Parc.
En définitive, les parcs naturels régionaux n'ont pas
été dotés de l'autorité politique qui leur
permettrait d'élaborer une politique d'ensemble pour élaborer,
arrêter et, éventuellement, imposer un schéma de
développement cohérent et global sur un territoire qui
engloberait zones urbanisées et zones encore naturelles.
II. LE MAUVAIS EMPLOI ET LA FAIBLE EFFICACITÉ DES INSTRUMENTS D'URBANISME ET DE PROTECTION DANS L'ESPACE PÉRIURBAIN
La législation foncière française tend
à préserver l'équilibre du territoire qui, aux termes de
l'article L-110 du code de l'urbanisme, est "
le patrimoine commun de
la nation
". La gestion des espaces périurbains relève
donc pleinement des compétences des collectivités publiques, qui
doivent harmoniser leurs prévisions et leurs décisions
d'utilisation de l'espace afin "
d'aménager le cadre de vie,
d'assurer sans discrimination aux populations résidentes et futures des
conditions d'habitat, d'emploi, de services et de transports répondant
à la diversité de leurs besoins et de leurs ressources "
et
afin
" de gérer le sol de façon
économe et de promouvoir l'équilibre entre les populations
résidant dans les zones urbaines et rurales.
"
Ces principes sont clairs. Pourtant, leur application rencontre de nombreuses
difficultés dans et à proximité des agglomérations.
Les diverses politiques communales de l'urbanisme, loin d'être
harmonisées, traduisent une concurrence foncière et fiscale qui
ne prend pas assez en compte l'intérêt général
supracommunal. Aussi, les dispositions multiples propres à
réguler l'urbanisation que recèle le code l'urbanisme sont, bien
souvent, inutilisées.
Tel n'est pas le moindre paradoxe d'une législation complexe qui ne
répond pas à l'intégralité du problème que
le présent rapport se propose d'étudier. Alors même qu'il
n'est pas assez tiré parti des procédures de planification
foncière, les instruments de gestion opérationnelle sont encore
conçus pour lutter contre la spéculation et favoriser l'expansion
urbaine. Il en va de même pour les instruments de protection du
patrimoine architectural et urbain. Enfin, les moyens financiers
consacrés par la puissance publique à la politique
foncière s'avèrent nettement insuffisants.
A. DES RÈGLES GÉNÉRALES D'AMÉNAGEMENT ET D'URBANISME DONT IL N'EST PAS ASSEZ TIRÉ PARTI
Dans l'arsenal juridique institué par le premier livre du code de l'urbanisme, consacré aux règles générales d'aménagement, deux documents de planification foncière retiennent spécialement l'attention : le Plan d'Occupation des Sols (POS) et le Schéma Directeur.
1. Le POS : une arme à double tranchant, instrument de la concurrence foncière intercommunale
Le plan d'occupation des sols est l'instrument de
programmation privilégié des politiques communales de
l'urbanisme. Il tend
28(
*
)
à
"
fixer les règles générales et les servitudes
d'utilisation des sols
" qui peuvent notamment comporter
l'interdiction de construire. Sa généralisation progressive
à la majeure partie du territoire en fait l'élément
essentiel de toute politique de l'urbanisme soucieuse du respect de l'autonomie
locale. Au 1er juillet 1997, 15.180 communes
-représentant une population de 51,7 millions d'habitants-
étaient dotées d'un POS
29(
*
)
.
En théorie, ce document répond presque parfaitement à
l'objet que poursuit la politique de préservation et
d'aménagement des espaces périurbains. Les 3/4 de la superficie
des cantons périurbains sont couverts par des POS publiés contre
seulement 30 % des surfaces appartenant aux cantons ruraux
30(
*
)
. L'expérience prouve pourtant que le recours
au POS ne suffit pas pour résoudre les problèmes que connaissent
les espaces périurbains et que son utilisation contribue même
parfois à les aggraver.
a) Un instrument de préservation des paysages ...
L'article L-123-1 précité dispose que le POS
doit "
prendre en compte la préservation de la qualité
des paysages et la maîtrise de leur évolution
" et
qu'il :
-
délimite les zones urbaines
ou à urbaniser, tient
compte des besoins en matière d'habitat de services et de transports des
populations actuelles et futures et
prend notamment en considération
la valeur agronomique des sols et les structures agricoles
;
- définit en fonction des situations locales
les règles
concernant le droit d'implanter des constructions
, leur destination et leur
nature ;
- détermine des règles concernant
l'aspect
extérieur des constructions
, leurs dimensions et
l'aménagement de leurs abords ;
- fixe pour chaque zone un ou des
coefficients d'occupation des
sols
qui déterminent la densité de construction admise ;
- identifie les
éléments de paysage
et
délimite les quartiers, les rues, monuments,
sites et secteurs
à protéger ou à mettre en valeur pour des motifs d'ordre
esthétique, historique ou écologique ;
- localise les
emplacements réservés aux voies et
ouvrages publics, aux installations d'intérêt
général et aux espaces verts
ainsi que,
dans les zones
urbaines, les terrains cultivés à protéger et
inconstructibles
quels que soient les équipements
éventuels qui les desservent.
Les autorités chargées de l'élaboration des plans
d'occupation des sols disposent, par conséquent, de
compétences très étendues pour conduire la politique
foncière communale dans un souci de protection paysagère
.
L'expérience prouve pourtant que les POS ne permettent pas -sauf
volonté très forte- de mener à bien une politique de
gestion cohérente des espaces périurbains. Cette situation
s'explique par des raisons qui tiennent aussi bien à
l'instabilité des plans d'occupation des sols qu'à la
réelle concurrence que se livrent, trop souvent, les communes lors de
l'élaboration de ces documents.
b) ... dont les limites se révèlent dans les espaces périurbains
Les plans d'occupation des sols sont marqués par une
relative instabilité et par un caractère faiblement intercommunal
qui nuisent à leur bonne utilisation.
Les plans d'occupation des sols sont caractérisés par une trop
forte
instabilité
: A la date du 1er janvier 1996
-dernière statistique disponible- dans plus du quart des communes
disposant d'un POS celui-ci était en cours de révision. Dans les
Bouches-du-Rhône, on a dénombré, depuis 1983, pas moins de
450 procédures de modification de POS et 204 révisions dont
123 révisions
31(
*
)
totales !
Le phénomène n'est pas nouveau. Dès 1992, le Conseil
d'Etat dans un rapport intitulé "
L'urbanisme, pour un droit
plus efficace",
soulignait la trop forte instabilité des POS ainsi
que les effets pervers de la transformation continue des documents d'urbanisme
décentralisés. "
Une réglementation qui change au
gré des circonstances et des contraintes particulières voit
nécessairement posée la question de sa justification. Pourquoi en
effet, établir une règle de droit générale et
absolue si c'est pour la remettre en cause à la première occasion
venue ?
"
32(
*
)
La question posée par la Haute juridiction s'exprime avec acuité
dans les espaces périurbains. Bien souvent, en effet, les
propriétaires sont tentés de faire pression sur les communes pour
obtenir une autorisation de construire qui décuplera ou plus la valeur
de la terre agricole. Si le conseil municipal ne répond pas positivement
à une telle demande, certains administrés n'hésiteront pas
à laisser leurs terrains en friche, voire à engager des
procédures, pour faire pression sur la commune. C'est ainsi que dans
bien des cas, des demandes réitérées de permis de
construire sont finalement satisfaites lors de la révision du plan
d'occupation des sols. Dès lors, comme le relevait le conseil d'Etat
dans son rapport précité : "
On assiste à une
inversion des rapports entre la réglementation et les autorisations
individuelles. Ces dernières ne se soumettent plus à la
règle de droit, mais c'est elle qui évolue au gré des
projets particuliers.
"
33(
*
)
Autre faiblesse : les plans d'occupation des sols sont rarement
intercommunaux
. Cette situation se conçoit dans les terroirs ruraux
d'habitat groupé où l'on cherche à éviter le
mitage. Elle n'en demeure pas moins étonnante dans les régions
d'urbanisation à la fois dense et diffuse, " en peau de
léopard ", où l'on ne distingue plus le centre des communes
de leur périphérie. Chacun sait qu'il est, bien souvent, fait
usage de la réglementation urbanistique pour attirer les entreprises et
la taxe professionnelle qui les accompagne. Or, dans de nombreux espaces
périurbains, la taille des communes est trop réduite pour qu'une
seule collectivité puisse gérer à la fois les
problèmes d'emploi et d'activité, de logement, de commerce et de
loisirs. En conséquence, il n'est pas rare que les communes les plus
avisées accueillent les grandes surfaces, et que les autres communes
recueillent les logements sociaux et les infrastructures. Rien ne favorise
actuellement les collectivités locales qui font prévaloir une
gestion économe de l'espace : la vertu ne paie pas !
En conséquence, les communes les plus soucieuses de maintenir un
équilibre entre l'habitat, les infrastructures et les espaces naturels
et agricoles sont constamment menacées par une
" surenchère " causée par la politique moins rigoureuse
de leurs voisines, dont le POS sera plus souple en termes de prescription
normatives (apparence des constructions, ou coefficient d'occupation des sols,
par exemple).
En théorie, ce problème pourrait être réglé
par l'utilisation appropriée des schémas directeurs, qui
harmoniseraient à un niveau supracommunal l'ensemble des composantes du
tissu urbain (logements, grandes surfaces, zones industrielles, notamment). Il
s'avère pourtant, en pratique, que ces instruments ne permettent pas
d'atteindre l'objectif d'une gestion plus intercommunale des documents de
planification de l'urbanisme.
2. Le schéma directeur : une procédure utile mais insuffisamment utilisée
Les schémas directeurs, qui ont succédé, aux termes de la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétence entre les communes, les départements et les régions, aux schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme (SDAU) créés par la loi d'orientation foncière du 30 décembre 1967 sont destinés à assurer une planification urbaine intercommunale, aussi bien en zone urbaine qu'en zone rurale.
a) Un document de planification intercommunale ...
Les schémas directeurs, "
fixent les
orientations fondamentales de l'aménagement des territoires
intéressés
compte tenu de
l'équilibre
qu'il convient de
préserver
entre
l'extension urbaine
,
l'exercice des
activités agricoles
, des
autres
activités économiques
et la
préservation des sites
et paysages naturels ou urbains
34(
*
)
".
Ils déterminent :
- la destination générale des sols et, en tant que de
besoin, la nature et le tracé des grands équipements
d'infrastructure, en particulier de transport, ainsi que la localisation des
services et activités les plus importants ;
- les orientations générales de l'extension de
l'urbanisation et la restructuration des espaces urbanisés ou à
urbaniser ainsi que la capacité d'accueil de ces espaces en tenant
notamment compte de l'équilibre entre emploi, habitat, et moyens de
transport.
Le contenu des plans d'occupation des sols doit être compatible avec
les
orientations des schémas directeurs
, aux termes du
dernier alinéa de l'article L-123-1 du code de l'urbanisme. C'est ainsi
qu'en principe, la combinaison des dispositions des schémas
directeurs et des POS, devrait permettre une gestion intercommunale
satisfaisante.
La pratique prouve cependant que leur utilisation est loin
d'être aussi fréquente qu'il serait souhaitable.
b) ... insuffisamment utilisé
Les schémas directeurs ne couvrent pas tout le
territoire national
. Au 1er juillet 1997, les
210 schémas existants ne concernent que 40 % de la population
française, 19 % des communes et 12 % du territoire
national
35(
*
)
. En outre, ces documents sont
victimes d'une instabilité qui n'est pas sans rappeler celle des plans
d'occupation des sols : 45 % d'entre eux étaient en révision
au 1er janvier 1997.
En étudiant quatre exemples de cantons périurbains, la SEGESA
notait d'ailleurs que :
"
Pour ce qui concerne le schéma directeur, les
périmètres sont rarement apparus adaptés à la
réalité du développement périphérique des
agglomérations. Pour des raisons d'équilibre de pouvoirs entre
centre et périphérie ou de dosage politique, ou tout simplement
par manque d'anticipation,
les contours des secteurs de planification
prennent mal en compte les espaces périurbains.
Quant au contenu, il
est clair
qu'il est avant tout orienté vers la gestion de la
croissance urbaine plus que vers une planification globale du
développement des territoires concernés. Les activités
productives rurales,
notamment l'agriculture,
n'y ont
pas la
place qu'elles méritent, le volet paysager n'a été que
très rarement introduit
, la recherche d'une valorisation
spécifique des potentialités des espaces ruraux
périphériques est rarement présente. Le
développement de l'urbanisation dans les cantons étudiés
n'est pas (ou très peu) " limité " par l'existence d'un
SDAU, même lorsqu'il affiche une priorité à la partie
centrale. [...]
36(
*
)
.
L'élaboration des schémas directeurs
qui
relève, en principe, des communes, peut cependant être mise en
oeuvre à l'initiative de l'Etat.
L'article L-122-1-1 du code de l'urbanisme dispose que l'élaboration ou
la révision du schéma est laissée à la libre
appréciation des communes qui "
présentent une
communauté d'intérêts économique et
sociaux
". Toutefois, l'article L-122-1-4 du même code
prévoit que le représentant de l'Etat peut demander
l'élaboration d'un schéma directeur lorsque celui-ci est rendu
nécessaire notamment pour :
- l'application des directives territoriales d'aménagement ;
- la réalisation d'un projet d'intérêt
général relevant de l'Etat, de la région, du
département ou d'autres intervenants.
Si dans un délai de deux ans suivant la demande du préfet le
schéma n'a pas été approuvé, le représentant
de l'Etat peut en décider l'élaboration par un
arrêté motivé, puis procéder à celle-ci.
Il résulte de ces dispositions que
l'accroissement du nombre des
schémas directeurs, qui permettrait
-sans nul doute-
d'améliorer la gestion de l'urbanisme de la périphérie
des villes est largement subordonnée à l'élaboration des
directives territoriales d'aménagement
prévues par l'article
L.111-1-1 du code de l'urbanisme.
Ainsi, la solution des problèmes que pose la gestion urbanistique
périurbaine ne passe-t-elle pas par une modification du code de
l'urbanisme. Car les textes en vigueur utilisés de façon plus
systématique permettraient d'ores et déjà d'obtenir des
résultats non négligeables.
B. DES INSTRUMENTS D'AMÉNAGEMENT PEU EFFICACES
Les livres II et III du code de l'urbanisme, consacrés aux droits de préemption, aux réserves foncières et aux modalités de l'aménagement foncier ne prennent pas assez en compte les problèmes spécifiques des espaces périurbains. Alors que la gestion de la " zone-frontière " entre l'agglomération et l'espace agricole ou naturel nécessite des outils de protection des espaces naturels et de gestion de la croissance urbaine, les dispositions précitées tendent essentiellement à accompagner le mouvement d'expansion urbaine.
1. Une philosophie de l'urbanisation
L'esprit qui inspire les dispositions relatives aux droits de préemption et à la conduite des opérations d'aménagement repose sur l'idée que les terrains périurbains ont vocation, -sauf intention contraire de la commune- à être urbanisés.
a) Droits de préemption et zones d'aménagement différé : des droits pour urbaniser non pour équilibrer
Les dispositions du Titre I du second livre du code de
l'urbanisme visant l'institution de droits de préemption et de Zones
d'aménagement différé tendent d'une part à
permettre à la puissance publique de s'approprier des terrains, et
d'autre part à lui donner les moyens de conduire une politique
d'aménagement.
Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'urbanisme, le
droit de
préemption urbain
peut être institué dans les zones
urbaines et dans les zones d'urbanisation futures délimitées par
le POS ou dans les espaces ayant fait l'objet d'un plan d'aménagement de
zone. Il s'ensuit que la collectivité publique ne peut pas exercer de
droit de préemption dans des zones non urbanisables, -hormis dans les
ZAD évoquées ci-dessous- celles-là même qui
représentent l'essentiel des espaces périurbains !
La création de
zones d'aménagement différé
(ZAD)
est possible en dehors des zones urbaines et des zones d'urbanisation
future
37(
*
)
. Le droit de préemption
urbain peut s'y exercer pendant une durée de quatorze ans. Le juge
contrôle la légalité des objectifs poursuivis par les
créateurs de la ZAD au regard des dispositions de l'article
L. 300-1 du code de l'urbanisme qui détermine le champ des
opérations d'aménagement. Comme le souligne la doctrine,
"
l'objectif de faire échec à la spéculation
foncière ne figure pas au nombre des finalités du droit de
préemption, mais la création d'une ZAD peut être
justifiée au regard de cet objectif si elle s'accompagne d'un projet
d'aménagement
"
38(
*
)
Il s'ensuit donc que les collectivités ne peuvent pas créer de
réserves foncières par le biais des ZAD si elles ne souhaitent
pas y mener une opération d'aménagement. Ces dispositions
constituent donc une limite importante à l'action foncière
communale.
b) Opérations d'aménagement
Selon l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme,
l'aménagement foncier tend à "
mettre en oeuvre une
politique locale de l'habitat, à organiser le maintien, l'extension ou
l'accueil des activités économiques, à favoriser le
développement des loisirs et du tourisme, à réaliser des
équipements collectifs, à sauvegarder ou à mettre en
valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces
naturels
". Le troisième livre du code de l'urbanisme,
consacré à l'aménagement foncier, distingue notamment
parmi les opérations d'aménagement la procédure de
création des Zones d'aménagement concerté (ZAC) d'une
part, la restauration immobilière et la création des secteurs
sauvegardés d'autre part. Ces deux formules ne répondent pas aux
besoins d'une meilleure gestion de l'espace périurbain, l'une parce
qu'elle tend essentiellement à étendre l'urbanisation, l'autre
parce qu'elle ne s'applique
de facto
qu'au centre historique de
l'agglomération.
Le régime juridique des
zones d'aménagement
concerté
(ZAC) a été défini par la loi
d'orientation foncière du 30 décembre 1967. Les ZAC
sont destinées à "
réaliser l'aménagement
et l'équipement des terrains ",
notamment de ceux acquis par
une collectivité afin de les céder ou de les concéder
ultérieurement à des utilisateurs publics ou privés.
L'article R-311-1 du code de l'urbanisme précise que les ZAC tendent
à la réalisation de constructions à usage d'habitation, de
commerce, d'industrie, de services, d'installations et d'équipements
collectifs publics ou privés, toutes constructions dont il serait
souhaitable de réguler l'afflux dans les abords des
agglomérations.
Quant à la création de
secteur sauvegardés
et
à l'élaboration des
plans de sauvegarde
, elles permettent
de protéger des secteurs "
ayant un caractère historique,
esthétique ou de nature à justifier la conservation, la
restauration et la mise en valeur de tout ou partie d'un ensemble
d'immeubles
"
39(
*
)
. Ces dispositions
répondent au besoin de protéger des secteurs anciens dignes
d'intérêt, lesquels sont bien rares dans les environs des villes.
C'est ainsi que ces deux types d'opérations d'aménagement ne
répondent pas au besoin essentiel de l'espace périurbain :
le maintien du fragile équilibre entre les zones agricoles et les zones
urbanisées ou leur meilleure interpénétration.
2. Des opérateurs fonciers trop peu nombreux
Les établissements publics fonciers d'Etat, et les
établissements publics fonciers locaux
40(
*
)
sont susceptibles de mener à bien des
opérations d'aménagement dans les espaces périurbains.
Les
établissements publics fonciers d'Etat
sont régis,
comme les autres établissements publics d'aménagement par les
articles L-321-1 et suivants du code de l'urbanisme. Établissements
publics industriels et commerciaux créés par décret, ils
sont soumis à la tutelle de l'Etat et peuvent exercer le droit de
préemption (droit de préemption urbain et droit de
préemption en ZAD). Ces établissements publics fonciers sont
actuellement au nombre de quatre.
Il s'agit de :
l'Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne (AFTRP),
créée en 1962.
L'AFTRP, actuellement régie par le décret n° 68-640 du
10 juillet 1968, est habilitée à procéder :
- à toutes opérations immobilières d'acquisition,
à l'amiable ou par voie d'expropriation ;
- à l'aménagement, à l'équipement ou à
la rénovation d'immeubles nécessaires à la
réalisation d'opérations d'urbanisme de toute nature, ou à
l'installation de services publics ou d'intérêt
général :
- à l'acquisition des terrains au nom et pour le compte de l'Etat
et des collectivités locales et à l'exercice du droit de
préemption dans les zones où il est institué.
L'Établissement public de la Basse-Seine (EPBS) et
l'Établissement public de la Métropole Lorraine (EPML).
L'EPBS et l'EPML, respectivement créés par décret
n°68-376 du 26 avril 1968 et n° 73-250 du
7 mars 1973 sont, quant à eux, autorisés à
procéder à toutes opérations immobilières et
foncières de nature à faciliter, pour l'un, la mise en oeuvre des
directives d'aménagement de la Basse Seine, et pour l'autre, la mise en
oeuvre du schéma d'aménagement de la métropole Lorraine.
Enfin, l'Établissement public foncier du Nord-Pas-de-Calais,
créé en 1990.
Il peut procéder à toutes opérations immobilières
de nature à faciliter l'aménagement et spécialement la
reconversion des friches industrielles et de leurs abords.
Les décrets relatifs aux trois derniers établissements publics
précités portent que ceux-ci peuvent, exceptionnellement, et sous
réserve d'y être autorisé par l'Etat, réaliser des
opérations d'aménagement pour le compte des collectivités
et établissements publics.
L'EPBS, l'EPML et l'Établissement public foncier Nord-Pas-de-Calais
bénéficient des ressources issues d'une
taxe spéciale
d'équipement
dont le montant est fixé chaque année par
leur conseil d'administration, dans des limites fixées par la loi de
finances.
Les
établissements publics fonciers locaux
ont été
créés par la loi n°91-662 d'orientation pour la ville du
13 juillet 1991, codifiée aux articles L.324-1 et
suivants du code de l'urbanisme. Ces établissements publics industriels
et commerciaux sont compétents pour réaliser des acquisitions
foncières et immobilières en vue de la constitution de
réserves foncières destinées aux opérations
d'aménagement prévues par l'article L.300-1 du même
code.
On ne compte actuellement que deux établissements publics fonciers
locaux. L'un, situé dans le Puy-de-Dôme comprend
203 communes, l'autre réunit les communes d'Argenteuil et de Bezons
en région parisienne.
Il est clair que la création de la catégorie des
établissements publics fonciers locaux, faute de moyens suffisants, n'a
pas débouché sur des résultats probants. Dès lors,
il serait illusoire de croire qu'ils seront mieux utilisés dans les
zones périurbaines.
En revanche, les établissements publics fonciers d'Etat qui sont
principalement destinés à effectuer le portage foncier des
terrains sur lesquels des collectivités publiques souhaitent
réaliser des opérations d'aménagement ou de
requalification urbaine, ont permis de mener à bien d'importants
chantiers de requalification des friches industrielles, spécialement en
Lorraine et dans le Nord et de préservation des espaces naturels, en
Basse-Seine notamment.
Pour autant, est-il souhaitable de généraliser ce type
d'instrument ? Leur caractère d'établissement publics
d'État et le recours à une ressource fiscale affectée sont
le gage d'une volonté de long terme et d'une indépendance face
aux collectivités locales. Cette autonomie constitue cependant une
limite importante à la généralisation de ces
établissements, plus de quinze ans après la
décentralisation, alors même que chacun s'accorde à
reconnaître que la politique de la ville repose avant tout sur les
élus locaux, et spécialement sur les maires. En outre, la gestion
des espaces périurbains ne saurait se résumer à une seule
et immense opération d'aménagement. Il paraît cependant
souhaitable que de telles structures soient créées au cas par cas
en tant que de besoin.
C. DES INSTRUMENTS DE PROTECTION DU PATRIMOINE ARCHITECTURAL ET URBAIN ADAPTÉS AUX COEURS DE VILLE
De multiples instruments permettent de préserver le
patrimoine architectural urbain et paysager.
Nous ne mentionnerons, parmi ceux-ci, que :
- la loi du 13 décembre 1913 modifiée par la loi
du 25 février 1943 sur la
protection
des
monuments
historiques et de leurs abords
;
- la loi du 2 mai 1930 sur la
protection des sites,
qui
permet leur classement ;
- la loi du 7 janvier 1983 modifiée par la loi du
8 janvier 1993 qui a créé les
zones de protection du
patrimoine architectural, urbain et paysager.
L'ensemble des servitudes d'utilité publiques instituées par ces
divers textes permettent de protéger des monuments ou des sites
présentant une richesse particulière qu'il est souhaitable de
conserver dans un but d'intérêt général. Peut-on
dire pour autant que ces dispositions soient adaptées aux
spécificités des périphéries des villes, objet du
présent rapport, c'est-à-dire à des zones parfois à
demi-agricoles et souvent dégradées au plan urbanistique ?
Il est clair que ces textes permettent de protéger un monument
historique et ses abords ou le coeur d'une ville, parfois une de ses
entrées particulièrement remarquable. Pour autant, ces
dispositifs n'ont pas vocation à " réhabiliter " un
site ou un quartier périphérique dégradé dès
lors qu'il ne contient pas un élément architectural ou paysager
remarquable.
La législation " sanctuarise " le beau et se
désintéresse, de facto, de la réparation des blessures
faites au tissu urbain et à son paysage
!
L'objet trop ponctuel de la législation précitée ne permet
pas, en définitive, de protéger d'une dégradation
irrémédiable des paysages qui, même s'ils ne sont pas
" remarquables " d'un point de vue historique ou esthétique,
méritent d'être respectés car ils constituent le cadre de
vie quotidien de leurs nombreux habitants.
Si le respect du " droit au beau " que votre rapporteur appelle de
ses voeux, passe par une utilisation des moyens existants, il ne peut se
limiter à leur seul usage : la nécessaire protection des coeurs
de ville ne résume pas, à elle seule, toute la politique du
paysage périurbain. Tout comme les coeurs de
ville qui font
l'objet de multiples attentions, la périphérie des
agglomérations mérite de bénéficier d'une politique
de promotion et de requalification.
D. DES MOYENS FINANCIERS INSUFFISANTS
Les collectivités publiques, au premier rang desquelles
figure l'Etat, ne consacrent pas assez de financements à la politique
foncière en général et aux espaces périurbains en
particulier.
En 1950, l'Etat s'était doté d'un compte de commerce, le Fonds
national d'aménagement foncier et d'urbanisme (FNAFU) qui gérait
les acquisitions de terrains à l'occasion de la création des
villes nouvelles, ainsi que les crédits nécessaires à
l'exercice du droit de préemption dans les Zones d'aménagement
différé. Ce compte accordait également des avances
à l'Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne
ainsi qu'aux établissements publics d'aménagement des villes
nouvelles.
Or, en près de trente ans, les moyens consacrés par l'Etat aux
interventions foncières se sont progressivement réduits,
jusqu'à la suppression du FNAFU à compter du
1er janvier 1994, décidée par la loi de finances pour
1993. C'est ainsi que les crédits mobilisés par l'État au
titre de l'action foncière urbaine (évalués en francs
constants 1994), représentant plus de 1,4 milliard de francs en
1974, ne s'élevaient plus qu'à environ 160 millions de
francs en 1995. Cette réduction de l'enveloppe globale résulte
tant de la suppression des acquisitions directes et des avances du FNAFU que de
la baisse des crédits du budget général, au titre du
ministère de l'Équipement.
Dans le budget 1998,
les crédits consacrés aux acquisitions
foncières
(chapitre 55-21 du ministre de l'Equipement)
ont
baissé de 76 % par rapport à 1997, passant de 62,7 à
14,95 millions de francs en crédits de paiement
!
La diminution des crédits consacrés aux interventions
foncières urbaines n'est pas sans incidence sur la crise des espaces
périurbains, dans la mesure où les collectivités locales
ne se sont pas substituées à l'Etat faute de moyens financiers
suffisants ou de fonds spécifiquement créé en remplacement
du FNAFU.
* *
*
Au total, les carences des divers instruments existants militent pour la création d'un instrument spécifique aux espaces périurbains .
SECONDE PARTIE -
POUR UN NOUVEAU LABEL :
LES
TERROIRS URBAINS ET PAYSAGERS
CHAPITRE I -
UNE DÉMARCHE LOCALE,
UN LABEL ET DES
FINANCEMENTS NATIONAUX
Comme l'a montré la première partie du
présent rapport, la transposition pure et simple du concept de parc
naturel régional ne paraît pas souhaitable dans les espaces
périurbains.
Le parc naturel régional s'insère dans l'espace rural pour
protéger et mettre en valeur des milieux naturels d'intérêt
régional voire national et l'emprise des espaces naturels. Tel n'est
souvent pas le cas dans les zones périurbaines où les espaces
naturels sont souvent résiduels et les zones agricoles parfois fortement
menacées par une urbanisation peu contrôlée. L'attribution
du label " PNR " à de nouvelles zones périurbaines
relèverait donc d'une fiction et pourrait dénaturer ce concept,
qui n'est pas un outil " contre la ville ". La présence de
communes de tailles très hétérogènes, le faible
intérêt manifesté jusqu'alors par une majorité des
" villes-portes " pour les parcs naturels régionaux, dont ils
sont l'entrée, plaident d'ailleurs également pour que l'on ne
banalise pas cette procédure.
Est-il souhaitable, en effet, de constituer des PNR un peu " au
rabais ", sans substance, au risque de dévaloriser un label qui a
fait ses preuves et de porter, de la sorte, préjudice aux PNR existants
ou à créer ?
Pour autant, peut-on tirer argument du peu d'adaptation du système des
PNR aux zones périurbaines pour ne rien faire, alors même que
l'équilibre social, économique et écologique des espaces
périurbains influe directement sur la vie quotidienne de 15 % des
Français et indirectement sur celle de tous les citadins ? Est-ce parce
que certaines zones sont dégradées au plan environnemental, qu'il
faudrait ne rien tenter pour les réhabiliter et protéger ce qui
peut l'être encore ? A l'évidence, non !
Votre rapporteur
estime indispensable d'apporter une réponse aux
demandes des communes -et plus particulièrement des groupements de
communes- qui cherchent à remédier à la " crise
d'identité " que traversent les espaces périurbains
.
Pour ce faire, il faut renoncer au concept de " citadelles ou de
périmètres encore verts ", se défendant avec plus ou
moins de bonheur
contre
les agglomérations, au profit d'une
vision globale qui prenne en compte la diversité des espaces
périurbains bâtis ou non. Il n'est plus concevable de
surprotéger les espaces encore naturels en milieu périurbain, et
d'abandonner le reste à l'urbanisation et aux infrastructures.
Quels sont les problèmes rencontrés dans les espaces
périurbains ? On l'a vu plus haut, ils tiennent essentiellement
à la disparition du projet d'agriculture pérenne, à
l'urbanisation croissante et à la difficulté de faire coexister
des populations sociologiquement diverses. Dès lors, au lieu de
" retailler " le régime juridique des parcs naturels
régionaux, votre rapporteur vous propose de créer un cadre
juridique original et " sur mesure " pour les espaces
périurbains.
On ne résoudra pas les problèmes que
ceux-ci rencontrent avec des outils conçus pour l'espace rural.
Il convient cependant de tirer les leçons de l'expérience acquise
depuis la création du parc naturel d'Armorique, le
30 septembre 1969. Certaines caractéristiques des parcs
naturels régionaux méritent, en effet, d'être reprises.
Parmi celles-ci figure en premier lieu la nécessité d'une
démarche volontaire des collectivités locales. Compte tenu des
enjeux démographiques et sociaux, il est indispensable de prévoir
que l'Etat octroiera un label et des financements à ce que l'on pourrait
appeler des "
terroirs urbains et paysagers
", afin qu'il soit
le garant de la cohérence de leur action.
Quoique le terme soit parfois galvaudé ou utilisé sans en
connaître le sens, il ne faut pas hésiter à placer notre
démarche dans la perspective du développement durable.
On fera ainsi application de ce concept énoncé dans le rapport
Brundtland en 1987, qui définit " un mode de développement
qui
répond aux besoins du présent tout en préservant
les besoins des générations futures
".
En matière d'aménagement des villes, le développement
durable s'appuie sur trois priorités : la concertation entre les acteurs
du développement urbain, la constitution d'une véritable
intercommunalité de projet et l'intégration de l'environnement
dans les projets de développement territoriaux.
Dans les zones périurbaines, où la pression sur l'espace est
forte et les conflits d'usage importants, il importe de veiller à rendre
compatibles diverses logiques d'acteurs, souvent contradictoires. On a
souligné, en effet, que peuvent s'y affronter l'extension des surfaces
urbanisées, le maintien ou le développement des exploitations
agricoles, la multiplication des infrastructures, l'installation de zones
industrielles ou commerciales et la préservation des
écosystèmes récréatifs ou de valeur
écologique réelle.
Le souci d'un développement durable pour de telles zones impose que
chaque activité ne crée pas pour elle-même ses propres
obstacles, et en particulier qu'aucune de celles qui constituent un atout
spécifique du territoire concerné ne soit menacée dans son
acceptabilité ou dans son fonctionnement soit par ses propres
excès, soit par un manque de maîtrise des autres. Ainsi, une
ressource en eau trop polluée par certaines pratiques agricoles ou
industrielles par exemple, peut venir à manquer, par défaut de
qualité, non seulement à d'autres activités (tourisme,
approvisionnement en eau potable des villes ou des industries
agro-alimentaires...), mais aussi à celles qui sont à l'origine
des pollutions.
Le développement durable impose donc que les différentes
activités, solidaires de par leur localisation sur le même
territoire, se coordonnent pour préserver au mieux, pour chacune
d'elles, les facteurs déterminants de son existence ou de sa
renommée, dans le souci de privilégier tout à la fois les
atouts économiques spécifiques du territoire et la valorisation
du patrimoine naturel et culturel.
Cette démarche, qui doit être exclusivement volontaire et reposer
sur une initiative décentralisée, à travers la signature
d'une charte, sera orientée par des priorités nationales voire
régionales clairement définies : l'attribution du label
" territoire urbain et paysager " reconnaîtra ainsi la
capacité des acteurs locaux à innover en concertation.
I. UNE DÉMARCHE VOLONTAIRE DE COOPÉRATION DES COLLECTIVITÉS LOCALES
L'exemple des PNR l'a parfaitement montré : plus de
quinze ans après la décentralisation, il serait illusoire
d'imaginer qu'une politique de développement local, de protection et de
réhabilitation patrimoniale puisse être menée sans le
soutien ou contre l'avis des collectivités locales.
"
Pour protéger, il faut d'abord convaincre. C'est la
méthode la plus longue, la plus dure, mais aussi la plus solide, la plus
démocratique et la plus digne
41(
*
)
".
Il appartient à l'Etat, par des incitations, d'encourager la formation
d'une " affectio societatis " entre les collectivités locales,
en leur offrant un cadre contractuel précis qui détermine les
engagements de chacune des parties. L'éclatement actuel des
compétences (l'urbanisme relevant des communes, l'environnement des
départements, voire de la région, si l'on considère
l'action remarquable de l'agence des espaces verts de la région
Ile-de-France) ne facilite en effet pas la conduite d'une politique
cohérente. Tous ces éléments plaident pour que dans les
territoires périurbains, où il est souhaitable de
préserver l'environnement dans ses composantes agricoles et
paysagères ou de le restaurer, un système original s'inspirant
des PNR soit élaboré.
Comme pour un parc naturel régional, la
définition du
territoire
à prendre en compte est une étape essentielle. Il
faut en effet préciser le sens de la démarche poursuivie par la
reconnaissance d'un " terroir urbain et paysager " : s'agit-il
de créer " des lieux de qualité " en imposant que ces
zones périurbaines contiennent un espace naturel ou culturel
méritant d'être préservé ou mis en valeur ? Ou
peut-on proposer un outil d'incitation à une gestion concertée
valable pour toutes les zones périurbaines, quelle que soit leur
" valeur de départ " ? Ceci mettrait davantage l'accent
sur la capacité des acteur à innover plutôt que sur un
héritage particulier à préserver à tout prix. Votre
rapporteur se déclare partisan de la seconde option pour dégager,
à partir d'un territoire identifié et labellisé, des
objectifs communs, acceptés par des partenaires différents -
Etat, collectivités locales, acteurs économiques, usagers- afin
de requalifier certains espaces, restaurer des équilibres et
définir une dynamique interne.
La définition de ces objectifs suppose nécessairement la
rédaction d'une charte
sur le contenu de laquelle s'engageront
les collectivités locales et leurs groupements participant au terroir
urbain et paysager. Il conviendra de privilégier, pour la mise en oeuvre
de ces objectifs, la définition de politiques contractuelles avec les
différents acteurs économiques concernés.
II. UNE POLITIQUE NATIONALE DES ESPACES PÉRIURBAINS COHÉRENTE AVEC LA POLITIQUE DE LA VILLE : LA BANLIEUE, PORTE VERS LA CAMPAGNE
Comme celle des parcs naturels régionaux, la
légitimité de ce nouveau dispositif devra être
consacrée par un label national délivré par l'Etat et se
concrétisera par des engagements financiers significatifs. En
étant ainsi le garant de la procédure mise en oeuvre et du
contenu du projet élaboré pour ce terroir, l'Etat retrouverait
une légitimité et des capacités d'intervention ou
d'orientation sur l'aménagement urbain.
Le temps est venu de mieux intégrer l'espace périurbain à
la politique de la ville. Il suffit de consulter le fascicule jaune
budgétaire
42(
*
)
consacré au
développement urbain pour constater que les termes mêmes
" d'environnement " et " d'agriculture " n'appartiennent
pas à son vocabulaire.
Certes, des progrès ont été réalisés en
matière d'habitat et d'urbanisme, mais aucune action d'ensemble n'a
été menée à bien pour rapprocher la ville de son
environnement et faire de sa reconquête un enjeu important de la
politique de la ville.
Etonnante situation où l'on voit le modèle urbain gagner peu
à peu l'ensemble de la société alors même que les
confins des villes sont en déshérence. Comme le relèvent
D. Hervieu et J. Viar : "
[...] de nouveaux mauvais
lieux sont désignés, lieux bannis ou lieux au ban, qui sont entre
ce qui était hier la ville et ce qui était hier la
campagne : ce sont les banlieues. Et tout se passe comme si, dans cet
univers de mobilité, la part du territoire qui est moins dotée en
capital mémorial et en invention de valeurs se trouvait plongé
dans l'ombre. Ce mouvement nous suggère que la remise à l'honneur
des banlieues relève tout autant du chambardement des lieux et de la vie
qui s'y déroule que de la construction de leurs nouveaux attraits [...].
La banlieue doit revisiter sa mémoire.
Elle doit prendre acte de sa
situation d'égal accès à la ville et à la
campagne
. Ainsi surgira une production culturelle, nouvelle partie
prenante du débat social et de ses nécessaires conflits. La
banlieue, dégagée de l'impératif de devenir autre, ce
à quoi la cantonne la politique dite " de la ville " pourra
enfin se saisir de l'affirmation de son destin. "
43(
*
)
Même si votre rapporteur ne partage pas toutes les conclusions des deux
auteurs précités, il juge que la politique de la ville doit
s'intéresser de façon spécifique et forte aux espaces
périurbains, dans un cadre interministériel.
Il est, par conséquent, indispensable que l'action de l'Etat en
faveur des territoires périurbains soit menée conjointement par
la délégation interministérielle à la ville, par
les services de l'environnement et par ceux du ministère de
l'agriculture.
80 % du territoire étant agricole, sylvicole ou naturel, un projet
d'aménagement du territoire et de développement durable ne pourra
faire l'économie d'une réflexion sur le devenir de l'agriculture.
CHAPITRE II -
MIEUX UTILISER L'EXISTANT
Pour votre rapporteur, la pluralité et la
complexité des problèmes rencontrés dans la gestion des
espaces périurbains appellent des réponses diversifiées
qui relèvent aussi bien de la politique de l'urbanisme que de la
politique de l'environnement. Les limites que comportent les instruments
juridiques existants n'impliquent nullement qu'il soit indispensable d'en
revoir entièrement l'économie.
Aussi, souhaite-t-il, après avoir souligné au chapitre
précédent les insuffisances des politiques menées par les
pouvoirs publics, préconiser une utilisation plus systématique
des moyens dont ces derniers disposent pour résoudre nombre des
désordres que connaissent les espaces périurbains. Cette
observation vaut aussi bien pour les outils environnementaux que pour les
normes urbanistiques dont les collectivités locales et l'Etat assurent
à la fois l'édiction et la mise en oeuvre.
I. DÉVELOPPER LES OUTILS ENVIRONNEMENTAUX
En milieu périurbain l'utilisation des outils
environnementaux doit tendre à la mise en valeur et à la
requalification des espaces naturels proprement dits, et des espaces
déjà urbanisés.
Il s'agit, avant tout, pour ces territoires de retrouver une cohérence
interne suffisante, grâce à une volonté collective
clairement affichée.
Dans la palette des outils disponibles, plusieurs présentent un
intérêt certain, comme la législation sur les
entrées de ville ou la réglementation de la publicité pour
promouvoir l'écologie urbaine. D'autres, comme la politique
départementale des espaces naturels sensibles, peuvent favoriser des
interactions positives entre la ville et la campagne.
A. RÉHABILITER LES ZONES URBAINES DÉGRADÉES
1. Elaborer un projet urbain sur les entrées de villes
Sur la base des propositions du sénateur Ambroise
Dupont
44(
*
)
, le législateur a
modifié le code de l'urbanisme pour remédier aux désordres
urbains constatés le long des voies routières et
autoroutières et notamment aux entrées de villes.
L'article 52 de la loi n° 95-101 du
2 février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement introduit un article L.111-1-4 dans le code de l'urbanisme
pour inciter les communes à promouvoir un urbanisme de qualité le
long des voies routières les plus importantes.
Le mécanisme mis en place est à double détente :
premièrement
,
il édicte à compter du
1er janvier 1997, une règle de constructibilité
limitée sur les espaces non urbanisés situés le long des
autoroutes, route express, déviations et autres routes classées
à grande circulation
. Sur ces terrains, est instituée une
marge de reculement de 50 à 100 mètres selon
l'importance de l'axe routier.
Cette interdiction s'applique de plein droit aux communes ne disposant pas de
plans d'occupation des sols ou de document d'urbanisme en tenant lieu et
opposables aux tiers.
Mais,
deuxièmement
,
cette règle de
constructibilité limitée ne s'applique pas aux communes qui ont
élaboré un projet urbain
pour les espaces bordant leurs
grandes infrastructures routières, dans le cadre d'une réflexion
d'aménagement globale et préalable. Ce projet urbain devra se
traduire dans un plan d'occupation des sols ou un plan d'aménagement de
zone (PAZ) et "
définir des règle d'urbanisme
justifiées et motivées au regard des nuisances, de la
sécurité et de la qualité architecturale, urbaine et
paysagère
45(
*
)
".
La volonté du législateur est bien d'inciter les
autorités communales à se doter de règles d'urbanisme
permettant de garantir la qualité du développement urbain aux
abords des infrastructures, et non pas seulement de faire reculer de 75 ou
100 mètres l'assise de pratiques anarchiques
dénoncées par tous.
La mise en oeuvre de l'article L.111-1-4 doit permettre d'apporter des
réponses adaptées au milieu périurbain. En effet, dans la
périphérie des agglomérations, la situation est
caractérisée par des ruptures dans la composition urbaine avec
des implantations successives et discontinues de quartiers d'habitat social, de
zones pavillonnaires ou commerciales.
L'application ponctuelle de la nouvelle réglementation sur les abords
des voies de communication et à partir des terrains non urbanisés
devrait aider à remodeler la périphérie urbaine en
intégrant des éléments de liaison entre les quartiers
isolés et en favorisant leur mixité.
De façon plus générale, l'obligation d'une
réflexion en amont, imposée par l'article L.111-1-4 du code
de l'urbanisme permet de mieux prendre en compte les risques et nuisances
occasionnés par des choix d'aménagement urbain, afin de les
éviter et parfois même, grâce aux solutions adoptées,
de résoudre certains problèmes analogues dans des quartiers
existants.
Certes, cette nouvelle réglementation ne permet pas de
réhabiliter les abords des entrées de ville déjà
urbanisés, mais elle introduit des éléments de
procédure et de méthode essentiels qui pourraient s'appliquer
à l'ensemble des entrées de villes et plus
généralement aux sites urbains dégradés. Elle
suscite une réflexion préalable avant toute opération
d'envergure, sous la responsabilité des collectivités locales, et
en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, gestionnaire de
transports en commun, aménageurs, promoteurs, entrepreneurs, industriels
ou commerçants, propriétaires fonciers, riverains, habitants et
usagers.
Ainsi, la ville d'Amiens programme le réaménagement de plusieurs
de ses entrées dans le cadre d'un projet d'agglomération avec
l'intervention du district. L'un des objectifs de ces opérations
d'aménagement, outre la mise en valeur de sites environnementaux
intéressants -proximité de la Somme et présence
d'étangs- est de réunir des secteurs disparates isolés par
la multiplication des infrastructures routières et d'établir des
liens entre différentes enclaves.
2. Appliquer plus strictement la législation sur la publicité
La loi n° 79-1190 modifiée du
29 décembre 1979 relative aux enseignes et préenseignes
fixe les règles applicables à la publicité, aux enseignes
et préenseignes afin d'assurer la " protection du cadre de
vie ".
S'agissant des territoires situés en milieu périurbain, cette
réglementation est un bon outil à la disposition des
collectivités locales -voire même du préfet- pour tenter de
mettre fin à la prolifération anarchique des panneaux
publicitaires de toutes tailles et de toutes formes qui constitue une agression
visuelle pour nombre de nos concitoyens et est souvent le signe de la
" débandade " paysagère.
Encore faut-il qu'elle soit
effectivement utilisée !
D'une part, selon l'article 9 de la loi, les collectivités locales
peuvent instituer dans certaines conditions des zones de publicité
restreinte, où celle-ci sera soumise à des prescriptions
spéciales et plus sévères que celles résultant de
l'application du règlement national de publicité du
21 novembre 1980.
La procédure d'élaboration de ces zonages locaux est directement
inspirée de celle appliquée pour l'élaboration des plans
d'occupation des sols, afin d'assurer la plus large concertation possible.
La décision d'instituer ce type de zonage relève en principe de
l'initiative du conseil municipal. Mais l'article 13-I de la loi du
29 décembre 1979 précise qu'à défaut, le
Préfet peut après consultation du maire, enclencher la
procédure. Cette initiative -municipale ou préfectorale- permet
de constituer un groupe de travail mixte qui est chargé
d'élaborer un projet de réglementation. Le décret
n° 80-924 du 21 novembre 1980 pris en application de
l'article 13 de la loi précitée précise les
règles de la publicité donnée à cette initiative
-extrait publié au recueil des actes administratifs du
département et insertion dans deux journaux locaux ou régionaux-
afin que tout organisme puisse demander à participer au groupe de
travail, avec voix consultative.
Le groupe de travail, présidé par le maire ayant voix
prépondérante, est composé en nombre égal, des
membres du conseil municipal et éventuellement d'un représentant
de l'organisme intercommunal compétent en matière d'urbanisme,
d'une part et, d'autre part, des représentants des services de l'Etat.
Sont également associés, mais avec voix consultative, des
représentants des chambres de commerce et d'industrie, des chambres des
métiers ou des chambres d'agriculture, des associations locales
d'usagers agréées, ainsi que des représentants des
entreprises de publicité extérieure, des fabricants d'enseignes
et des artisans peintres en lettres, désignés après
consultation des organisations professionnelles
représentatives
46(
*
)
.
Le projet élaboré est soumis à l'avis de la commission
départementale compétente en matière de sites. En cas
d'avis favorable -exprès ou tacite- de cette commission, la
réglementation est arrêtée par le maire après
délibération du conseil municipal.
En cas d'avis défavorable de la commission, le groupe de travail doit
délibérer sur un nouveau projet présenté par le
Préfet. A l'issue de cette nouvelle délibération, si le
conseil municipal s'oppose ou émet des réserves sur le nouveau
projet, la délimitation des zones et les prescriptions qui s'y
appliqueront sont fixées par arrêté préfectoral ou
par arrêté ministériel si le maire en fait la demande,
assortie de la délibération de son conseil municipal.
Enfin, la loi précise que cette réglementation locale peut
être élaborée dans un cadre intercommunal, ce qui
présente beaucoup d'avantages dans le cas des entrées de ville.
Le groupe de travail est alors présidé par l'un des maires
désignés au scrutin secret par les représentants
élus des communes, mais chaque conseil municipal devra
délibérer sur le projet de réglementation.
La juridiction administrative n'exerce a priori qu'un contrôle restreint,
tant sur la définition du ou des périmètres de
publicité limitée que sur le contenu des prescriptions
adoptées, considérant que l'article 10 de la loi du
29 décembre 1979 confère
à l'autorité
compétente un large pouvoir de réglementation,
notamment en
déterminant "
dans quelles conditions et sur quels emplacements
la publicité est seulement admise "
47(
*
)
.
Certes, certains tribunaux administratifs font application du " principe
de proportionnalité ", utilisé lors du contrôle des
mesures de police, et apprécient si les mesures adoptées portent
atteinte à l'activité des entreprises de publicité dans
des proportions qui excèdent celles normalement exigées pour la
protection du cadre de vie. D'autres tribunaux jugent que l'atteinte à
la liberté de l'affichage est disproportionnée par rapport au but
légal de protection du cadre de vie, notamment si le
périmètre des zones de publicité restreinte recouvre tout
le territoire aggloméré de la commune et fait l'objet de
contraintes importantes. Néanmoins, le Conseil d'Etat maintient le
principe du " contrôle restreint " dès lors que
l'affichage n'est pas totalement interdit, et il accepte que la
publicité sur le mobilier urbain fasse l'objet de mesures
particulières
48(
*
)
.
Une autre mesure, plus récente, réglementant l'affichage et la
publicité, intéresse tout particulièrement les zones
périurbaines : l'article 53 de la loi n° 95-105 du
2 février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement soumet à une obligation de déclaration
préalable " toute installation, remplacement ou modification des
dispositifs de matériels qui supportent de la publicité ".
Cette déclaration préalable doit être faite auprès
du maire et du préfet pour permettre à terme de disposer d'un
inventaire complet des dispositifs de publicité et de leur emplacement
sur le territoire d'une commune.
De plus, la loi du 2 février 1995 soumet les enseignes
à faisceau de rayonnement laser à autorisation préalable,
comme les dispositifs de publicité lumineuse.
La loi n'a prévu aucune procédure d'instruction ou d'opposition
administrative, mais elle sanctionne le défaut de déclaration
préalable, en instituant, sans préjudice des sanctions
pénales déjà prévues par la loi du
29 décembre 1979, une amende administrative d'un montant
maximal de cinq mille francs pour chaque dispositif installé
illégalement. Cette amende est recouvrée au profit de la commune
sur le territoire de laquelle le dispositif a été installé.
Votre rapporteur juge particulièrement important de veiller à la
stricte application de ce dispositif de déclaration préalable
pour mettre fin aux implantations illégales de panneaux publicitaires
aux abords des villes, en particulier le long des axes routiers et dans les
zones commerciales. Cette réglementation est encore insuffisamment
appliquée, alors qu'elle est indispensable pour établir un
inventaire fiable et on ne peut que déplorer l'insuffisante mobilisation
des services de l'Etat.
Dans ce contexte, il faut souhaiter que la volonté affichée par
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement de
retenir les entrées de ville parmi ses priorités d'intervention
se traduise effectivement dans les faits, puisqu'elle exerce désormais
les compétences prévues par la loi du
29 décembre 1979
49(
*
)
.
3. Favoriser la prise en compte du paysage au sein des territoires périurbains, notamment dans le cadre de la politique de la ville
Désormais, le paysage peut être utilisé
comme outil d'intégration urbaine afin de préserver ou de
requalifier des espaces abîmés. Cette approche est récente
puisqu'il y a moins de dix ans que les équipes d'urbanistes et
d'architectes associent des paysagistes à des Grands Projets Urbains
(GPU) ainsi qu'à des opérations de réhabilitation dans le
cadre des programmes Habitat et vie sociale, de développement social des
quartiers ou à travers les contrats de ville.
Cette prise en compte du paysage est devenue un
élément-clé de la politique de la ville, car les espaces
verts -et au-delà l'espace rural périurbain- apparaissent
aujourd'hui comme des lieux d'expérimentations urbaines et sociales. La
délégation interministérielle à la ville soutient
ainsi financièrement 22 projets, après appel à projet
sur le thème du " rôle du paysage comme
élément d'apaisement social ". Les projets
sélectionnés, au-delà du seul accompagnement d'une
politique intervenant sur le bâti, proposent la mise en place d'espaces
verts plantés ou cultivés, dont l'entretien est confié
à des régies de quartiers, ce qui permet parfois des
créations d'emplois et engage le retour d'une " culture " de
la nature qui tend à disparaître.
Ces projets sont conçus en tenant compte des besoins et des souhaits
exprimés par les habitants. Le traitement du paysage prend alors une
véritable dimension sociale.
Ainsi, le " Trophée du paysage " décerné par le
ministère de l'aménagement et du territoire a
récompensé, en 1997, le remodelage d'une cité du
nord-ouest de Villeurbanne, non seulement pour sa conception mais
également pour son " intelligence sociale " : associés
au projet dès l'origine, les habitants entretiennent la majeure partie
des jardins créés.
Enfin, le renouveau récent des jardins familiaux participe de la
même volonté d'améliorer la cohésion sociale par une
requalification du paysage urbain. Par-delà des jardins familiaux
traditionnels loués à des particuliers, et qui pour certains
constituent un apport économique non négligeable, les
collectivités locales encouragent des initiatives plus
pédagogiques ou collectives qui rencontrent un grand succès.
Ainsi la ville de Nantes mène-t-elle plusieurs expériences,
notamment dans des cités d'habitat social, qui associent les
écoles et les centres socioculturels, autour de jardins
pédagogiques. Ailleurs, certaines écoles ont pris l'initiative de
jardins-potagers pour les classes.
L'article L.564-3 du code rural, introduit par l'article 54 de la loi
du 3 janvier 1995, encourage la création des jardins familiaux,
puisqu'il prévoit que les organismes de jardins familiaux peuvent
bénéficier " de subventions d'investissement ou de
subventions annuelles de fonctionnement de la part de l'Etat, des
collectivités locales ou de leurs groupements. "
4. Encourager les chartes pour l'environnement
Le ministère de l'Environnement a
développé à travers les protocoles environnement conclus
avec huit collectivités pilotes, puis les plans municipaux
d'environnement (une centaine signés entre 1990 et 1992) et enfin les
chartes pour l'environnement (46 chartes signées depuis 1992) des
outils faisant appel à des démarches globales, partenariales et
participatives qui se veulent la déclinaison environnementale d'un
projet d'agglomération répondant aux principes et objectifs du
développement durable.
La politique des chartes pour l'environnement encourage les
collectivités à dégager dans leur stratégie de
développement local, des enjeux forts en matière d'environnement.
Trois axes de réflexion pour ces politiques locales d'environnement sont
prioritairement poursuivis, à savoir, une réflexion sur la
manière dont les actions menées en matière d'environnement
contribuent aux objectifs assignés aux autres politiques et comment ces
autres politiques participent à l'amélioration et la protection
de l'environnement, et enfin la mise en place de moyens adaptés pour
développer localement démocratie participative et partenariat.
Le contenu des chartes doit privilégier des choix de gestion favorisant
une consommation économe de l'espace et une utilisation rationnelle des
ressources naturelles, et des choix financiers qui tiennent compte des
coûts d'investissement et de fonctionnement mais aussi du mieux-disant
social et écologique. Il favorise également le choix de la
diversité en terme d'urbanisme, de transports, ainsi que dans la gestion
des milieux naturels.
En milieu périurbain, cette recherche de la diversité dans les
choix d'urbanisme, d'activités et de fonctions, parallèlement
à la définition d'un cadre cohérent pour réguler
les différents systèmes entre eux, constitue un
élément fondamental pour la reconquête de ces espaces.
S'agissant des procédures d'élaboration, les chartes impliquent
la mise en oeuvre de nouvelles pratiques de concertation et de
coopération intercommunale et la recherche de nouvelles formes de
participation démocratique et citoyenne.
B. FAVORISER UNE POLITIQUE DÉPARTEMENTALE DES ESPACES NATURELS SENSIBLES EN MILIEU PÉRIURBAIN
La mise en oeuvre, par les départements
concernés, d'une politique dynamique de protection des espaces naturels
sensibles présente de multiples avantages, spécialement en milieu
périurbain. La grande latitude laissée aux pouvoirs publics
s'agissant de la sélection des espaces, associée à
l'obligation de leur ouverture au public peut, fort utilement, contribuer
à réconcilier les habitants des zones périurbaines avec
les espaces naturels les entourant et répondre au désir, souvent
exprimé à votre rapporteur, d'un type de paysage ouvert et
accessible.
Créé en 1959 pour préserver des " fenêtres
vertes sur le littoral provençal
50(
*
)
", le concept d'espace naturel sensible a
été généralisé à tous les
départements à partir de 1961. La loi n° 85-729 du
18 juillet 1985, modifiée par la loi du
2 février 1995, a affirmé la compétence des
départements dans l'élaboration et la mise en oeuvre d'une
politique de protection, de gestion et d'ouverture au public des espaces
naturels sensibles.
En l'absence d'une définition réglementaire, on entend par
espace naturel sensible, un site présentant des qualités
certaines, compte tenu de l'intérêt des biotopes présents,
ou de ses caractéristiques paysagères ou esthétiques. Il
peut s'agir également de terrains sans réelle valeur
intrinsèque, mais considérés comme fragiles, parce que
soumis à des pressions extérieures, telles que l'urbanisation ou
un tourisme intensif.
Les espaces ainsi identifiés peuvent être inclus dans des zones de
préemption, ou bénéficier de financements au titre de la
taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS).
- Selon l'article L.142-3 du code de l'urbanisme,
les
départements ont la faculté d'instituer des zones de
préemption en concertation avec les communes concernées.
Lorsque la commune est couverte par un plan d'occupation des sols (POS), l'avis
du conseil municipal doit être obligatoirement pris en compte. Dans le
cas contraire, le Conseil général peut passer outre avec l'accord
du préfet.
L'exercice de ce droit de préemption est analogue à celui du
droit de préemption urbain, mais il peut être
délégué au Conservatoire du littoral, à l'Etat,
à une collectivité territoriale ou à l'Agence des espaces
verts de la Région Ile-de-France. De plus, le Conservatoire du littoral,
les établissements publics de coopération intercommunale et les
communes concernées peuvent se substituer au département dans
l'exercice de son droit de préemption. Enfin, le droit de
préemption au titre des espaces naturels sensibles ne peut, a priori,
concerner que des espaces naturels non construits.
Selon l'article L.142-3 du code de l'urbanisme, la préemption d'un
bien bâti n'est possible que si le terrain "
est de dimension
suffisante pour justifier son ouverture au public et qu'il est, par sa
localisation, nécessaire à la mise en oeuvre de la politique des
Espaces naturels sensibles. Dans le cas où la construction est
conservée, elle est affectée à un usage permettant la
fréquentation du public et la connaissance de milieux
naturels
".
- Sont également considérés comme espaces naturels
sensibles, les terrains bénéficiant des financements au titre de
la TDENS.
Depuis la loi du 18 juillet 1985, le département a la
faculté de lever une taxe dont le taux maximum est de 2 % et dont
l'assiette est identique à celle de la taxe locale d'équipement
(TLE). Cette taxe est prélevée sur l'ensemble des constructions
sises sur le territoire départemental.
Le produit de la taxe est affecté :
.
à l'acquisition de terrains
, par voie amiable,
expropriation, ou préemption dans les zones définies
ci-dessus ;
. à la participation du Conseil général pour
subventionner
des
acquisitions de terrain
par le
Conservatoire du littoral ou des communes ;
.
à l'aménagement et à l'entretien des terrains
acquis en direct
ou par les communes ;
.
à l'acquisition
,
à l'aménagement et
à la gestion de sentiers
ou
de
chemins
,
notamment le long des cours d'eau.
Quelles que soient les raisons pour lesquelles un terrain devient espace
naturel sensible, l'objectif fondamental affiché par la loi est son
ouverture au public, ce qui suppose éventuellement la réalisation
de certains aménagements. Selon l'article L.142-10 du code
précité, ces aménagements doivent être compatibles
avec "
la sauvegarde des sites, des paysages et des milieux
naturels
", ce qui autorise seulement des "
équipements
légers d'accueil du public ou nécessaires à la gestion des
terrains, ou à leur mise en valeur à des fins culturelles ou
scientifiques
".
La jurisprudence fait une application stricte de cette obligation d'ouverture
au public en considérant notamment qu'un département ne peut
exercer son droit de préemption au titre des espaces naturels sensibles,
uniquement pour assurer la pérennité de l'affectation agricole
des terrains préemptés
51(
*
)
.
Cependant, la loi du 2 février 1995, introduit une exception
à l'obligation d'ouverture au public, si la fragilité du milieu
naturel en cause le justifie.
La réglementation sur les espaces naturels sensibles peut être
mise en oeuvre avec profit dans les espaces périurbains. Nombre
d'espaces naturels cultivés ou non pourraient être ainsi
aménagés sans présenter pour autant des
caractéristiques à proprement parler " remarquables ".
Les aménagements pourront organiser et réglementer de
façon plus ou moins stricte l'accès du public, afin de
préserver, s'il est besoin, les richesses de ces espaces.
Comme il a été noté plus haut, le produit de la TDENS sert
notamment à l'acquisition, à l'aménagement et à la
gestion des sentiers figurant sur le plan départemental des
itinéraires de promenades et de randonnées (PDIPR).
Rien n'interdit donc, en milieu périurbain, le financement par cette
taxe de " coulées vertes " ou d'un réseau de chemins et
sentiers aménagés dans des espaces naturels jouxtant des zones
urbanisées.
- On pourrait ainsi très utilement s'inspirer du concept de
" voie verte " -voie publique paysagée, conçue comme
espace de loisirs, ou " espace d'interprétation du
patrimoine "- qui se développe très rapidement en
Grande-Bretagne, au Québec et aux Etats-Unis. Largement fondé sur
la reconversion d'une emprise déjà utilisée par l'homme et
tombée en désuétude -comme les voies ferrées, les
canaux ou les anciennes voies navigables- ce concept trouve tout son
intérêt en milieu périurbain, où beaucoup d'espaces
en friches appellent la définition de nouveaux usages.
Votre rapporteur a d'ailleurs observé à Valenciennes ou à
l'Ile-Saint-Denis qu'une habile mise en valeur des abords des voies d'eaux
permettait souvent d'enrichir le paysage urbain ou périurbain.
II. RENFORCER LES OUTILS URBANISTIQUES EXISTANTS
En matière d'urbanisme, il conviendrait de faire un
meilleur usage des instruments existants, tant en ce qui concerne
l'édiction des directives territoriales d'aménagement que par un
recours plus systématique aux schémas directeurs et en
évitant que les plans d'occupation des sols ne soient modifiés,
sauf cas réellement motivés, avant même d'avoir
été appliqués.
De telles orientations permettraient à l'Etat d'encourager ou même
de susciter l'action des communes tout en respectant le principe de leur libre
administration, et de préserver les équilibres menacés
entre les abords des villes et des espaces ruraux.
L'un des objectifs à atteindre par une meilleure utilisation des
instruments existants serait de réglementer plus strictement les droits
à construire dans des zones encore vierges de toute urbanisation. En
incitant à une politique urbaine plus économe de l'espace
naturel, on favoriserait la revitalisation des centres-villes et la
préservation des zones rurales.
L'exemple de la Grande-Bretagne montre
qu'il n'y a pas de fatalité
à l'occupation irréversible de l'espace
. Afin de
protéger les zones rurales qui entourent les villes, fut
instituée en 1938, en vertu du
Green Belt Act
, une ceinture verte
autour de Londres, dispositif qui fut étendu par le
Town and
Country Act
de 1947 aux principales villes du pays. Le régime
juridique de ces zones reposant pour l'essentiel sur des limitations
rigoureuses, voire des interdictions de construire, a eu des résultats
très positifs : les ceintures vertes couvrent 1,5 millions
d'hectares en Angleterre et environ 145.000 hectares en Ecosse -leur
surface ayant doublé de 1979 à 1989- et dans le Sud-est de
l'Angleterre, 58 % des nouvelles constructions ont été
implantées sur des terrains anciennement bâtis puis
réutilisés.
La législation en vigueur offre plusieurs instruments pour parvenir
à un résultat analogue.
A. EDICTER DES DIRECTIVES TERRITORIALES D'AMÉNAGEMENT ASSURANT LE PRIMAT DE L'INTÉRÊT NATIONAL
Créées par l'article 4 de la loi
n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire, les directives
territoriales d'aménagement (DTA) "
peuvent fixer, sur certaines
parties du territoire les orientations fondamentales de l'Etat en
matière d'aménagement et d'équilibre entre les
perspectives de développement, de protection et de mise en valeur des
territoires. Elles fixent les objectifs principaux de l'Etat en matière
de localisation des grandes infrastructures de transport et des grands
équipements, ainsi qu'en matière de préservation des
espaces naturels, des sites et des paysages
".
Les DTA sont élaborées à l'initiative et sous la
responsabilité de l'Etat, en association avec les régions, les
départements, les communes chefs lieux d'arrondissement, les communes de
plus de 20.000 habitants ainsi que les groupements de communes
compétents en matière d'aménagement de l'espace ou
d'urbanisme. Elles permettent ainsi de définir des orientations d'ordre
supra-communal. Les schémas directeurs et les plans d'occupation des
sols -en l'absence de ces derniers- doivent être compatibles avec elles.
De plus, l'article L.122-1-4 du code de l'urbanisme prévoit que
lorsque
l'application locale des DTA le nécessite,
l'élaboration d'un schéma directeur peut être
demandée par le représentant de l'Etat
qui jouit de la
faculté de décider son élaboration et de procéder
à son établissement en cas de carence des communes
intéressées.
Or, que constate-t-on trois ans après la publication de la loi
d'orientation du 4 février 1995 ? Seules six DTA
" expérimentales " sont en préparation. Elles
concernent : les Alpes-Maritimes, l'estuaire de la Seine, l'estuaire de la
Loire, l'aire métropolitaine de Marseille, les Alpes du Nord et l'aire
urbaine Lyonnaise. Comme le relevait le mandat donné au Préfet
chargé de l'élaboration de la DTA des Alpes Maritimes dans une
formule qui vaut pour toutes les DTA "
il conviendra de favoriser une
gestion plus économe d'un espace rare et une organisation
cohérente du fonctionnement de l'aire urbaine
".
A n'en pas douter, l'établissement de DTA dont les dispositions
générales entreraient en pratique par le biais des schémas
directeurs d'agglomération permettrait d'assurer, au niveau des
agglomérations concernées par le phénomène
périurbain, la cohérence des décisions des
collectivités compétentes en matière d'urbanisme.
Votre rapporteur préconise donc l'extension du système des DTA
aux principales aires urbaines.
B. ÉLABORER DES SCHÉMAS DIRECTEURS CANTONAUX OU D'AGGLOMÉRATION POUR ACCROÎTRE LA COHÉRENCE DES CHOIX INTERCOMMUNAUX
La doctrine recommande périodiquement la relance des
schémas directeurs
52(
*
)
. Sans nul doute,
ils sont l'indispensable instrument d'une gestion concertée qui romprait
avec la " concurrence foncière " entre les communes.
Votre
rapporteur estime que la relance des schémas directeurs est plus que
jamais nécessaire
. Plusieurs collectivités locales ne s'y
sont d'ailleurs pas trompées.
Ainsi, à l'occasion de la création récente des
" pays ", un certain nombre de ces schémas ont
été élaborés. Les uns sont destinés à
maîtriser les enjeux liés à la périurbanisation,
comme dans les pays du Compiégnois, du Valois, du Vexin-Sablons ou
encore dans celui de la vallée de l'Arve. D'autres tendent à
résister à l'attraction qu'exercent les grosses
agglomérations, à l'instar des schémas du Pays du
Médoc, du Pays du Val de Lorraine ou du Pays de Sologne Val
Sud
53(
*
)
.
Prenons garde, toutefois, à ne pas reproduire entre la ville et l'espace
rural, à l'échelon du schéma directeur, le problème
posé entre les communes du fait de la plus ou moins grande souplesse des
POS. Il est nécessaire que les schémas directeurs ne soient plus
" à géométrie variable " mais, tout au
contraire, qu'ils s'appliquent à l'ensemble d'une agglomération,
jusques et y compris sa couronne périurbaine. Il convient, en outre, que
des schémas directeurs soient également élaborés
dans les zones rurales entourant les couronnes périurbaines, afin de
prendre en compte globalement l'extension de la ville et son impact sur
l'espace rural. On l'aura saisi :
la multiplication des schémas
directeurs n'est concevable qu'au niveau de l'agglomération
étendue et en liaison avec l'espace rural avoisinant
54(
*
)
.
Enfin, pour favoriser l'élaboration systématique des
schémas directeurs, votre rapporteur estime que les modifications et les
révisions de POS ne devraient être autorisées, sauf
dérogation préfectorale motivée par des circonstances
exceptionnelles, que dans les communes dont le territoire est inclus dans le
périmètre d'un schéma directeur.
C. RENFORCER LA STABILITÉ DES POS
Les POS constituent un instrument irremplaçable, car
ils conjuguent le respect de l'autonomie locale et l'édiction d'une
réglementation protectrice du territoire national.
Il est souhaitable
qu'ils traduisent un choix clair et durable
: une véritable
politique de l'urbanisme ne saurait se satisfaire de leur perpétuelle
remise en cause. Aussi, est-il souhaitable d'explorer deux solutions afin de
contribuer à affermir les POS, aussi bien dans le temps que dans
l'espace. La première consisterait à instituer
un délai
minimum pendant lequel -sauf circonstances exceptionnelles- une révision
du POS serait juridiquement impossible
. La seconde passe par une
diminution de l'ampleur des surfaces foncières dites
" d'urbanisation future
".
La fixation d'un délai pendant lequel toute révision du POS
-sauf dérogations motivées par des circonstances
exceptionnelles-
serait interdite,
permettrait d'alléger, pour
les élus locaux, la pression des demandes émanant
d'administrés ou de propriétaires désireux d'obtenir que
des terrains deviennent constructibles. Un délai minimum de 10 ans entre
deux révisions de POS semble envisageable. Encore ne faudrait-il pas que
l'édiction d'un tel délai entraîne la constitution
" par anticipation " de réserves de terres urbanisables.
C'est pourquoi
il serait également souhaitable de limiter l'emprise
des zones " NA " ou " d'urbanisation future ",
probablement au niveau du schéma directeur qui définirait les
besoins au plan intercommunal.
On notera, enfin, que l'élaboration de plus nombreux schémas
directeurs serait de nature à assurer une meilleure stabilité des
plans d'occupation des sols. Les articles L.123-4 et R-123-35 du code de
l'urbanisme prévoient, en effet, que l'application anticipée des
dispositions d'un POS en révision ne peut être incompatible avec
les dispositions d'un schéma directeur ou d'un schéma de secteur
approuvé ou en cours d'établissement.
III. DÉVELOPPER LE RÔLE DES SAFER POUR LUTTER CONTRE LES FRICHES ET MAINTENIR L'AGRICULTURE DE FAÇON VOLONTARISTE
Le code rural prévoit un important dispositif tendant
à la
mise en valeur des terres incultes ou manifestement sous
exploitées.
Son article L. 125-1 dispose que toute personne physique ou morale
peut demander au préfet l'autorisation d'exploiter une parcelle
susceptible d'une mise en valeur agricole ou pastorale et qui se trouve inculte
ou manifestement sous-exploitée depuis au moins trois ans. Le
préfet saisit alors la commission départementale
d'aménagement foncier, qui se prononce, après une
procédure contradictoire, sur l'état d'inculture ou de
sous-exploitation manifeste des fonds et sur la possibilité de les
mettre en valeur.
Après mise en demeure restée infructueuse du propriétaire
ou du titulaire du droit d'exploitation et après avis de la commission
départementale des structures agricoles et de la commission
départementale d'aménagement foncier, le préfet peut
attribuer l'autorisation d'exploiter.
Il peut en outre, à la demande du conseil général ou de sa
propre initiative, charger la commission départementale
d'aménagement foncier de recenser les zones dans lesquelles il serait
d'intérêt général de remettre en valeur des
parcelles incultes ou manifestement sous-exploitées depuis plus de trois
ans.
Comme on le constate,
la procédure de mise en valeur des terres
incultes existante donne des moyens importants aux pouvoirs publics pour lutter
contre les friches. Reste à savoir si ceux-ci sont
déterminés à les utiliser.
Sur un point précis toutefois, relatif au rôle des
sociétés d'aménagement foncier et d'établissement
rural (SAFER), il pourrait être envisagé de modifier la
législation en vigueur.
En effet, les SAFER peuvent, dans les zones de montagne, demander au
préfet l'autorisation d'exploiter des terres incultes ou
sous-exploitées
, dans les conditions prévues à
l'article L.125-8 du code rural. Pourquoi ne pas leur attribuer une
compétence analogue en zone périurbaine ?
Cette extension de compétences compléterait utilement le concours
technique que les SAFER apportent d'ores et déjà aux
collectivités locales pour la mise en oeuvre d'opérations
foncières
55(
*
)
.
Votre rapporteur recommande donc d'étendre aux zones
périurbaines la possibilité ouverte aux SAFER d'intervenir sur
les terres incultes ou manifestement sous-exploitées comme elles y sont
autorisées dans les zones de montagne.
CHAPITRE III -
INVENTER DE NOUVEAUX OUTILS
Une meilleure gestion des espaces périurbains appelle des réponses innovantes d'un point de vue foncier, agricole et politique.
I. POUR MAÎTRISER LE FONCIER
A. LUTTER CONTRE LA SPÉCULATION ET TAXER L'ENRICHISSEMENT SANS CAUSE
Les vendeurs de terrain agricole à des fins
d'urbanisation réalisent des plus-values considérables qui
échappent dans la majorité des cas à une imposition
significative. Ces plus-values résultent, pour l'essentiel, du
changement de classification, décidé par la collectivité
publique responsable de la gestion de l'urbanisme et de l'espace, lors de la
révision du plan d'occupation des sols.
Or, la terre agricole est un bien rare qu'il convient de protéger,
c'est pourquoi votre
rapporteur estime
souhaitable d'envisager
une taxation des profits " tombés du ciel " lors de la vente
d'un terrain agricole devenu urbanisable.
Les Pays-Bas et le Danemark ont d'ailleurs précédé notre
pays dans cette voie et offrent des exemples dont il conviendrait de s'inspirer.
1. S'inspirer des exemples néerlandais et danois...
Les Pays-Bas et le Danemark, États dont le territoire est nettement plus réduit que celui de la France -respectivement 34.000 et 42.000 km² contre 550.000 km² pour l'hexagone- sont naturellement plus sensibles que notre pays aux problèmes posés par la gestion d'un espace agricole rare. Malgré la pression foncière, tous deux sont parvenus à maintenir un certain équilibre entre l'espace rural et l'espace urbain, et à conserver le support d'une agriculture performante, au moyen d'une importante législation foncière. Celle-ci comporte un volet fiscal qui soumet les plus-values réalisées sur les cessions des terrains agricoles à une taxation. L'expérience prouve cependant que le système de taxation néerlandais reste moins dissuasif, en pratique, que le système danois.
a) Les Pays-Bas : un filet aux mailles trop larges
Depuis 1986, les plus values de cession liées au
changement d'affectation des terres agricoles réalisées aux
Pays-Bas sont soumises à une taxation spécifique, dès lors
que ce changement d'affectation intervient moins de six ans après la
vente.
La
base d'imposition
est constituée par la
différence
entre le prix de vente des terres urbanisables et leur valeur agricole
initiale.
Le
taux d'imposition
de la plus value est de
45 %
, son produit étant versé à l'Etat.
La taxation n'est pas appliquée si un exploitant rachète une
surface de terre égale à celle qu'il a cédée dans
les trois ans qui suivent la vente initiale. Ce système est donc, en
première analyse, fortement pénalisant pour les vendeurs. En
réalité, il comporte des aménagements importants qui en
diminuent la portée.
En premier lieu, un
mécanisme transitoire a été mis au
point afin de ne pas taxer les plus values qui auraient pu être
réalisées avant 1986.
Pour ce faire, entre 1986 et 1992 les
agriculteurs ont demandé à l'administration fiscale, de constater
que leurs terres auraient pu changer de destination avant l'édiction du
système d'imposition. La taxation ne s'applique donc pas aux terrains
qui étaient urbanisables avant 1986.
En second lieu,
la taxation ne s'applique que si les terrains initialement
agricoles changent d'affectation au cours des six années qui suivent la
vente.
Or, il semble que bon nombre d'agriculteurs tirent parti de cette
disposition pour anticiper le changement de destination. Ils vendent leurs
terres et continuent de les exploiter durant six ans afin d'échapper
à l'impôt lors de l'urbanisation qui survient la septième
année.
En troisième lieu, les
agriculteurs bénéficient
d'exonérations assez substantielles
sur la base d'imposition
.
Celles-ci varient de 20.000 florins (soit environ 60.000 francs) si
l'agriculteur a moins de 55 ans, à 45.000 florins (environ
134.000 francs) si l'agriculteur a plus de 55 ans.
Le système de taxation néerlandais est donc, en pratique, plus
dissuasif que réellement pénalisant
, si bien que les pouvoirs
publics envisagent son renforcement.
Il conviendrait sans doute, si la proposition de taxation formulée par
votre rapporteur était retenue, de choisir un mode d'imposition plus
systématique et par conséquent plus proche de celui en vigueur au
Danemark.
b) Le Danemark : une taxation rigoureuse fondée sur le principe d'une discrimination positive
Le Parlement danois a adopté, en 1992, une loi sur la
planification foncière, qui a institué des dispositions
spécifiques aux zones côtières, et procédé
à une distinction entre zones urbaines et zones rurales. La taxation des
plus-values de cession sur les terres agricoles s'inscrit donc dans un
dispositif législatif cohérent et relativement rigide qui
interdit, par exemple, en zone rurale, l'édification de constructions
autres que celles destinées à l'agriculture ou à la
sylviculture, ainsi que le changement d'affectation des bâtiments
existants. Des plans communaux, équivalents à nos plans
d'occupation des sols, déterminent l'emprise des terrains susceptibles
d'être urbanisés.
Il convient, en outre, de souligner que la structure des taux de taxe
foncière est favorable aux possesseurs de terres agricoles : le
taux de la taxe foncière applicable en zone urbaine est de 10
à 20 fois supérieur à celui concernant les biens
situés en zone rurale.
La fiscalité encourage donc les
propriétaires à ne pas demander le classement de leurs biens en
zone urbaine.
La taxe d'urbanisation n'est que l'une des pièces d'un dispositif global
tendant à préserver la terre agricole.
La
base d'imposition
de la taxe d'urbanisation résulte de la
différence entre le prix de vente des terrains urbanisables et la valeur
initiale de la terre agricole (fixée à partir de la valeur
locative cadastrale).
Le
taux de la taxe est élevé
puisqu'il
varie de
40 %
pour les transactions d'un montant inférieur à
200.000 couronnes (soit environ 176.000 francs) à
60 %
pour les transactions d'un montant supérieur à ce plafond.
La taxe est exigible dès le changement de statut des terrains
(passage de la zone " NC " en zone " NA " ou
" U ") -avant même leur urbanisation-. Elle est perçue
par les communes qui conservent 50 % de son montant.
Ce
mode de taxation des plus-values
pénalise fortement le
changement d'affectation des terres
. Il s'avère, en effet, qu'en
pratique, les évaluations du prix de la terre agricole par
l'administration sont
56(
*
)
inférieures
à sa valeur réelle. Pour calculer l'assiette de la taxe, on
recourt, en effet, à la valeur locative cadastrale laquelle est moins
élevée que la valeur du marché. Ceci a pour effet de
majorer l'assiette de la taxe et d'accroître, par conséquent, le
produit de l'impôt.
L'économie générale du système de taxation
pénalise d'autant plus le changement d'affectation des terres que la
taxe est applicable non seulement aux particuliers, mais aussi aux communes qui
réalisent des ventes de terrains agricoles à des fins
d'urbanisation. En outre, si elles procèdent à une modification
du document d'urbanisme équivalent au plan d'occupation des sols, les
communes peuvent être obligées par les propriétaires de
terrains frappés d'une taxe d'urbanisation à les racheter. En
conséquence, ces collectivités sont fortement incitées
à ne pas modifier le zonage qui relève de leur compétence.
Votre rapporteur tient à souligner l'intérêt du
système de taxation en vigueur au Danemark, qui a pour objet de
protéger le terrain, parce qu'il s'agit d'un bien rare et non
reproductible, tout en jugeant sans doute excessif le taux pratiqué dans
ce pays.
Il y a là l'application concrète d'une vraie volonté de
" durabilité ".
2. Pour taxer l'enrichissement sans cause
Votre rapporteur estime que l'institution d'une taxation
des plus-values résultant du changement d'affectation de la terre
agricole est le corollaire de toute politique tendant à protéger
l'espace cultivé
.
Celui-ci fut trop longtemps considéré comme la
" réserve foncière " disponible pour l'extension
urbaine. Il est temps de prendre en considération son
caractère non reproductible
.
Le régime de taxation des plus values actuellement en vigueur ne
permet pas de pénaliser efficacement la vente de terrains agricoles
à des fins d'urbanisation.
En effet, l'article 150 M du
code général des impôts prévoit que les plus-values
immobilières réalisées par des personnes physiques ou des
sociétés de personnes plus de deux ans après l'acquisition
du bien sont réduites de 5 % pour chaque année de
détention au delà de la deuxième année. De ce fait,
les propriétaires qui possèdent un terrain depuis plus de
22 ans ne payent pas d'impôt sur la plus-value
. Ce régime
est également applicable aux agriculteurs soumis au forfait.
Quant aux agriculteurs qui relèvent de droit ou sur option, du
régime du bénéfice réel et qui n'ont pas
opté pour l'inscription des terres dans leur patrimoine privé,
ils peuvent être exonérés de tout impôt sur les
plus-values de cession, s'ils répondent aux conditions posées par
l'article 151 septiès du code général des
impôts. Ce texte dispose que
les plus-values
réalisées
dans le cadre d'une activité agricole
sont exonérées
dès lors que :
- les recettes des contribuables n'excèdent pas le double de la
limite du forfait, soit 1 million de francs ;
- et que l'activité a été exercée pendant au
moins cinq ans.
Comme l'observe le professeur René Hostiou : "
[...] faute
d'une véritable volonté d'instaurer, par le biais de la
fiscalité, un mécanisme de récupération des plus
values d'urbanisation assorti d'une politique de redistribution de celles-ci,
la planification " à la française " relève, pour
les propriétaires fonciers intéressés, de la logique de la
loterie qui, comme chacun le sait, contient ses bons mais aussi ses mauvais
numéros.
"
57(
*
)
L'institution d'une taxation spécifique semble, en
conséquence, opportune.
Cependant, le droit français répugne à la taxation des
plus-values issues de l'urbanisation. Il est révélateur que les
dispositions du code de l'expropriation qui prévoient la taxation des
plus values réalisées à l'occasion d'une expropriation ne
soient jamais entrées vigueur ! L'article 16-4 de ce code
dispose pourtant que "
lorsque par suite de l'exécution de
travaux publics, des propriétés privées auront acquis une
augmentation de valeur [...]
la plus value pourra
être
récupérée sur les intéressés dans les
conditions fixées par un règlement d'administration
publique. "
Or, le décret relatif à la mise en oeuvre de ces dispositions n'a
jamais vu le jour !
Seule une prise de conscience collective sur la rareté du terrain
agricole, notamment dans l'espace périurbain, permettra de vaincre la
réticence des pouvoirs publics à l'encontre d'une taxation des
plus values résultant d'une cession à des fins d'urbanisation.
Le paiement d'une telle taxe ne saurait cependant équivaloir à
" donner quitus " aux propriétaires désireux
d'urbaniser.
Aussi, convient-il de souligner, -en se remémorant l'exemple danois-,
que
le
système de taxation des plus values est
indissociable d'une planification foncière systématique,
ambitieuse
et protectrice des terres agricoles.
Votre rapporteur estime enfin que les
fonds recueillis au titre de la
taxation des plus values ci-dessus évoquée devraient être
affectés à un fonds de gestion des espaces périurbains
destiné :
- à l'acquisition de terrains à vocation agricole
pérenne donnés à bail à des agriculteurs ;
- à l'aide à l'agriculture périurbaine ;
- ou à des actions de réhabilitation des espaces
périurbains dégradés.
B. DÉVELOPPER LES POLITIQUES FONCIÈRES DES COLLECTIVITÉS LOCALES
La politique de la ville qui concerne aussi bien la
préservation du centre-ville que l'embellissement des espaces
périphériques passe par une action volontariste des
collectivités publiques, et spécialement des communes.
Force est de constater qu'en créant la catégorie juridique des
établissements publics fonciers locaux, la loi n° 91-662 du
13 juillet 1991 d'orientation pour la ville n'a pas
réglé le problème posé par l'absence de politique
foncière locale, puisque seuls deux établissements publics
fonciers locaux ont vu le jour !
Il est vrai que pour les communes et spécialement pour celles,
relativement pauvres, qui sont situées en milieu périurbain,
l'absence de moyens financiers disponibles pour une politique
foncière ambitieuse constitue un handicap majeur.
Pour ces communes
périurbaines, les établissements publics fonciers locaux
n'auraient été, dans la majorité des cas, que des
" coquilles vides ", faute de moyens suffisants. Il serait cependant
erroné de conclure de cette situation que rien n'est possible.
Votre rapporteur reste très attaché à l'idée que
la commune, représentée par son maire, doit être partie
prenante de la politique foncière en zone périurbaine
. C'est
pourquoi il vous propose de
mieux utiliser les contrats de villes
ou
leurs futurs équivalents et de
réexaminer les problèmes
posés par l'évaluation des biens fonciers.
Tels sont les deux
axes du renforcement et de la promotion des politiques foncières
locales.
1. Inclure un volet agricole et paysager dans les contrats de ville
L'espace périurbain mérite d'être
traité comme une des composantes patrimoniales de la ville
.
Comme on l'a vu au chapitre II du présent rapport, un certain
nombre de zones urbaines sensibles relevant de la " politique de la
ville ", sont situées à proximité d'espaces
périurbains. La question se pose, dès lors, de savoir comment il
serait possible d'ouvrir ces quartiers défavorisés sur la
campagne environnante, de même que l'on cherche à les relier
à la ville en rétablissant des voies de communication et des
services publics de transport, afin de lutter contre " le sentiment
d'enfermement " que ressentent certains habitants des cités.
Les contrats de ville ou d'agglomération sont l'instrument le plus
adapté à une telle politique.
Depuis 1993, 214 contrats de ville ont été conclus en France
dont 58 en Ile-de-France. Ces contrats-cadre retracent les engagements
pluriannuels de l'Etat, des collectivités locales signataires et, le cas
échéant, d'autres intervenants tels que la Caisse des
Dépôts ou, les Caisses d'allocations familiales.
Ceux qui viendront à échéance en 1998 concernent des
projets relatifs à :
- l'adaptation des services publics ;
- l'amélioration de l'habitat ;
- l'insertion par l'économique ;
- la prévention de la délinquance.
La renégociation des contrats de ville offre une chance de mieux prendre
en compte les problèmes posés par les espaces périurbains.
C'est pourquoi votre rapporteur propose que
les contrats qui
succéderont aux contrats de ville comportent un volet " agricole et
paysager
". Cette vision nouvelle des problèmes
environnementaux et agricoles doit, en outre, se traduire au niveau de
l'agglomération.
De la sorte, une " thérapie de choc " serait prioritairement
administrée dans les espaces périurbains avoisinant les zones
urbaines sensibles, où résident des populations
précarisées.
2. Réexaminer le problème des évaluations foncières
La politique foncière des communes se heurte au
coût élevé des terrains situés en zone
périurbaine. Au cours des auditions auxquelles il a
procédé, votre rapporteur a constaté que de nombreux
élus locaux estimaient excessives
les évaluations
effectuées en cas d'exercice, par une collectivité publique,
de son droit de préemption.
Or,
le coût du foncier est le " noeud gordien " de toute
politique de gestion des espaces périurbains.
En effet,
il est
vain de croire que l'agriculture puisse subsister ou que les communes soient en
mesure d'acheter des terrains pour y réaliser des équipements si
le coût du foncier atteint, comme c'est fréquemment le cas des
prix -déconnectés de toute valorisation par l'agriculture- que
votre rapporteur n'hésitera pas à qualifier d'astronomiques, eu
égard aux caractéristiques des biens auxquels ils
s'appliquent
.
En la matière, les évaluations du service des domaines et celles
du juge de l'expropriation jouent un rôle essentiel en tant que
références, bien qu'elles portent, en pratique, sur un nombre
limité de cas d'espèce.
Après avoir rappelé l'économie générale des
dispositions normatives qui régissent l'évaluation des biens
expropriés votre rapporteur présentera quelques pistes de
réflexion de nature à clarifier la fixation des
évaluations foncières.
a) L'article L.13-15 du code l'expropriation
L'article L.13-15 du code de l'expropriation tend
à concilier le
respect de la propriété privée
et la détermination d'une indemnité équitable avec la
nécessité de
fixer un prix qui ne prenne pas en compte des
opérations spéculatives
et qui serait préjudiciable
aux finances publiques.
Selon le " I " de cet article, les biens sont estimés par le
juge de l'expropriation :
"
à la date de la décision de première instance
[...] "
Seul étant pris en considération "
l'usage effectif des
immeubles et droits réels immobiliers un an avant l'ouverture de
l'enquête d'utilité publique
".
Le texte précise en outre explicitement que : "
quelle que
soit la nature des biens, il ne pourra être tenu compte [...] des
changements de valeur subis depuis cette date de référence s'il
ont été provoqués :
- par l'annonce des travaux ou opérations dont la
déclaration d'utilité publique est demandée ;
- par la perspective de modifications aux règles d'utilisation des
sols ;
- par la réalisation dans les trois années
précédant l'enquête publique de travaux publics dans
l'agglomération où est situé l'immeuble. "
Le " II " du même article précise les
éléments qui permettent de reconnaître la qualité de
" terrain à bâtir " :
" aux terrains qui un an avant l'enquête d'utilité
publique [...] sont, quelle que soit leur utilisation, tout à la
fois :
a) effectivement
desservis par une voie d'accès
, un
réseau électrique
, un
réseau d'eau potable
,
et dans la mesure où les règles relatives à l'urbanisme et
à la santé publique l'exigent pour construire sur ces terrains un
réseau d'assainissement
[...]
b)
situés dans un secteur désigné comme
constructible
par un POS rendu public ou par un document d'urbanisme en
tenant lieu [...] "
Le même texte précise que :
" Les terrains qui, à l'une des dates indiquées
ci-dessus, ne remplissent pas ces conditions sont évalués en
fonction de leur seul usage effectif [...] "
Bien que ce texte interdise clairement de reconnaître le statut de
terrain à bâtir à un bien foncier qui ne répondrait
pas aux conditions énumérées ci-dessus, le juge en a fait
une interprétation audacieuse qui revient à le vider, au fil de
la jurisprudence, de sa substance.
b) Les excès jurisprudentiels
Lors de l'évaluation d'un terrain en vue d'une
expropriation, il s'agit donc de savoir si l'on ne prend en compte que sa
valeur agricole ou si l'on y intègre des éléments
traduisant une possible urbanisation.
La jurisprudence avait initialement jugé, en appliquant strictement
l'article L.13-15 du code de l'expropriation, qu'un terrain affecté
à un usage agricole à la date de référence (un an
avant l'ouverture de l'enquête publique) devait être
évalué comme tel, même s'il était susceptible d'une
urbanisation dans le futur, à cause de son classement en zone NA. Le
juge refusait dans tous les cas de prendre en compte, par anticipation, la
valeur future du terrain.
Mais, la Cour d'appel de Paris, puis la Cour de Cassation, sont partiellement
revenues sur cette position au début des années 1990,
confirmant une évolution de la jurisprudence protectrice des
intérêts privés et ce, malgré la position contraire
adoptée par le législateur.
Dans un arrêt "
Consorts Vigoureux contre SNCF "
du 1er décembre 1993, la Cour de Cassation a
confirmé un arrêt de la Cour d'Appel de Paris qui, en
s'éloignant du texte même de l'article L.13-15 du code de
l'expropriation, a créé ex-nihilo la catégorie des
terrains en situation "
hautement
privilégiée
", lesquels, bien qu'affectés
à un usage agricole, sont évalués bien plus cher que les
terres agricoles.
Dans l'espèce, " Consorts Vigoureux " alors que l'usage
effectif des terrains était à caractère agricole à
la date de référence, le juge judiciaire a estimé que ces
terrains étaient "
en secteur hautement
privilégié, ce qui excluait toute référence
purement agricole
".
Il existe ainsi, depuis lors, une catégorie intermédiaire entre
la terre " purement " agricole et les surfaces
" totalement " urbanisables, constituée par les
" terrains en situation privilégiée ".
Certes, la Cour d'appel de Paris et la Cour de Cassation ont sans nul doute
tenu compte des circonstances de l'espèce " Vigoureux "
puisque les terrains étaient dans ce cas précis :
- bien que classés en zone NC, affectés d'une
constructibilité limitée autorisant des constructions en rapport
avec l'activité agricole ou horticole ;
- mitoyens d'une route départementale dotée de certains
éléments de viabilité.
Ils n'étaient cependant pas " urbanisables " au strict sens de
l'article L. 13-15 du code de l'expropriation. Mais la
décision eut pour conséquence de
porter le prix de
l'évaluation de terrains affectés à un usage agricole
à 95 francs le mètre carré,
alors même que
la simple application des dispositions en vigueur aurait abouti à une
évaluation bien moins favorable aux propriétaires.
D'autres arrêts sont venus confirmer cette jurisprudence, dont
l'application conduit à évaluer des terrains très
au-dessus du prix de la terre agricole. Le tableau ci-dessous montre les
écarts très élevés des évaluations
judiciaires par rapport aux évaluations des services des domaines, pour
des terrains " hautement privilégiés ".
TERRAINS SITUÉS EN ZONE PÉRIURBAINE
ANALYSE
DES ARRÊTS AU REGARD DES ÉCARTS ENTRE LES PRIX OFFERTS PAR LE
DOMAINE ET LES PRIX RETENUS PAR LES COURS D'APPEL
(DE 1994 À 1997)
COMMUNE ET SURFACE
|
ZONE |
OFFRE |
1er JUGE |
APPEL |
Ecarts (Appels/
|
COLLEGIEN (77) |
|
|
|
|
|
4 990 |
NA |
10 F |
70 F |
70 F |
600 % |
410 |
NA |
6 F 80 |
40 F |
40 F |
488 % |
3 310 |
NA |
8 F |
60 F |
60 F |
650 % |
4 250 |
NA |
10 F |
70 F |
70 F |
600 % |
11 530 |
NA |
10 F |
80 F |
80 F |
700 % |
890 |
NA |
6 F 80 |
60 F |
60 F |
782 % |
LIMOURS (91) |
|
|
|
|
|
5 433 |
NA |
85 F |
150 F |
130 F |
53 % |
5 250 |
NA |
80 F |
160 F |
85 F |
6,25 % |
10 565 |
NA |
85 F |
160 F |
160 F |
88 % |
MASSY (91) |
|
|
|
|
|
6 872 |
NC |
30 F |
30 F |
60 F |
100 % |
MONTEREAU FAULT YONNE (77) |
|
|
|
|
|
10 876 |
NC |
10 F |
45 F |
45 F |
350 % |
430 |
NC |
10 F |
45 F |
45 F |
350 % |
19 323 |
NC |
10 F |
45 F |
45 F |
350 % |
630 |
NC |
10 F |
45 F |
45 F |
350 % |
8 083 |
NC |
10 F |
45 F |
45 F |
350 % |
320 |
NC |
10 F |
45 F |
45 F |
350 % |
1 003 |
NC |
10 F |
45 F |
45 F |
350 % |
ROSNY SOUS BOIS (93) |
|
|
|
|
|
1 907 |
NA |
220 F |
250 F |
280 F |
27,27 % |
SAINT FARGEAU PONTHIERRY (77) |
|
|
|
|
|
4 904 |
NA |
20 F |
42 F |
38 F |
90 % |
1 231 |
NA |
20 F |
42 F |
38 F |
90 % |
7 428 |
NA |
42 F |
38 F |
38 F |
90 % |
11 204 |
NA |
20 F |
42 F |
38 F |
90 % |
(Source : ministère du Budget, service des
domaines)
A n'en pas douter, selon votre rapporteur,
seule une intervention du
législateur permettrait de mettre fin à cette situation.
Cette intervention est
d'autant plus souhaitable que l'évaluation
à laquelle procède le juge de l'expropriation sert
elle-même de référence à d'autres évaluations
par le service des domaines. Elle est
d'autant plus urgente que les prix
atteints à la suite d'évaluations excessives rendent très
difficile tout achat de terres par les collectivités publiques, et donc
à terme le maintien de " ceintures vertes " agricoles, tout en
favorisant l'enrichissement sans cause des propriétaires.
C. RENFORCER LES MOYENS DE L'ÉTAT
L'Etat a profité de la décentralisation pour opérer un désengagement financier en matière de politique foncière. La création de la catégorie des établissements publics fonciers locaux par la loi d'orientation sur la ville se situe d'ailleurs dans cette logique, puisque ce texte suppose implicitement que les communes doivent accroître leurs interventions -et donc leurs crédits- pour pallier la carence de l'Etat.
1. Un engagement financier
Pour votre rapporteur, l'Etat doit retrouver un rôle
central dans la politique de gestion des espaces urbanisés, qu'il
s'agisse de l'élaboration des Directives territoriales
d'aménagement dans les grandes conurbations, ou d'actions plus
ciblées dans les espaces périurbains.
La politique de gestion des espaces périurbains implique
spécialement l'action de l'Etat, dans la mesure où elle se situe
aux confins de la politique de l'aménagement du territoire et de la
politique de la ville. Or la politique d'aménagement du territoire, est
"
déterminée au niveau national par l'Etat "
selon l'article 1er de la loi n° 95-115 du
5 février 1995, d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire, et "
conduite par celui-ci en
association avec les collectivités territoriales, dans le respect de
leur libre administration et des principes de la
décentralisation ".
Quant à la politique de la ville, également conduite par l'Etat
et les collectivités territoriales, elle s'insère dans le cadre
de la politique d'aménagement du territoire selon les termes mêmes
du 1er article de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996
relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
Enfin, il est clair que l'équilibre d'un espace où vit un
Français sur sept intéresse la nation toute entière.
Votre rapporteur souhaite que l'Etat soutienne l'action des
collectivités locales au moyen d'instruments financiers analogues au
fond national d'aménagement foncier et d'urbanisme, le FNAFU,
supprimé par la loi de finances pour 1994.
2. La création d'établissements publics fonciers
Les établissements publics fonciers d'Etat ont
apporté une contribution significative à la requalification de
certains espaces dégradés, spécialement dans le Nord et
dans la métropole Lorraine.
Il serait souhaitable de créer, pour une durée limitée,
d'autres établissements publics fonciers dotés d'une ressource
fiscale afin de réhabiliter les zones les plus dégradées
des espaces périurbains
, lorsque les moyens financiers
nécessaires dépassent les possibilités des
collectivités locales.
L'existence d'une ressource fiscale propre, dont la loi de finance fixe le
montant total maximum, est le gage d'une réussite dans le long terme.
L'expérience l'a montré, les établissements publics
fonciers d'Etat ont mené à bien de remarquables programmes de
requalification de friches industrielles dans une optique paysagère,
opérations que des établissements publics fonciers locaux
n'auraient probablement pas pu réaliser, faute de moyens.
Certes, il n'est pas question de multiplier le nombre des établissements
publics fonciers d'Etat, à peine de mettre à mal l'autonomie des
collectivités locales ; mais leur constitution mérite
d'être envisagée pour réaliser les opérations les
plus lourdes et les plus ardues.
II. POUR PÉRENNISER L'AGRICULTURE ET LES ESPACES NATURELS
Pour votre rapporteur, il est indispensable de pérenniser l'agriculture périurbaine afin de protéger un patrimoine humain, économique, culturel et esthétique. Ceci suppose une action politique volontariste qui considère l'agriculteur comme un acteur de la politique du paysage, sans pour autant oublier son rôle dans l'économie.
A. UNE INDISPENSABLE VOLONTÉ POLITIQUE
La persistance d'une agriculture rentable à proximité des centres urbains passe par une action volontariste des pouvoirs publics. Il n'est pas envisageable que l'Etat n'accompagne pas les efforts des collectivités locales, des organisations professionnelles agricoles et des agriculteurs. Plusieurs exemples étrangers le montrent : la détermination des pouvoirs publics à faire prévaloir l'agriculture sur l'urbanisation est le gage de sa pérennité.
1. Le " coeur vert " des Pays-Bas
Les Pays-Bas
ont manifesté le souci de
distinguer, sur leur territoire, les espaces urbains des espaces ruraux et
d'assurer leur complémentarité. A cette fin, un projet de
schéma structurel de l'espace rural a été adopté en
1992. Ce document distingue notamment, les zones horticoles, les prairies
humides, les zones sableuses de l'Est du pays, les cours d'eau, ainsi que trois
types d'aménagement qui intéressent l'environnement
périurbain :
- la structure verte de la Randstad ;
- 16 " projets verts stratégiques " ;
- les paysages de valeur aménagés par l'homme.
La structure verte ou "
coeur vert
"
de la Randstadt,
conurbation qui réunit les plus grandes agglomérations des
Pays-Bas, est protégée contre l'urbanisation. Il est prévu
d'y améliorer la qualité de l'espace rural en créant des
bois, des zones naturelles et des espaces de loisir. Le Gouvernement souhaite y
mener à bien, de 1995 à 2015, six des seize projets verts
stratégiques. La superficie totale des espaces concernés par ces
six projets qui varient de 950 à 2.000 hectares est d'environ
8000 hectares soit le quart de la superficie totale qui sera
consacrée à l'ensemble des projets verts stratégiques dans
tout le pays.
Les dix autres "
projets verts stratégiques
"
concernent des terres essentiellement agricoles. Leur surface totale est
d'environ 22.000 hectares et varie, pour chacun d'entre eux, de 750
à 3.500 hectares.
Les Pays-Bas ont également distingué dix régions
qualifiées de
"
paysages de valeur aménagés par
l'homme
"
qui sont d'une importance historique et ont une
dimension symbolique particulière dans l'opinion publique
néerlandaise.
Dans ces régions, l'État estime qu'une meilleure coordination du
développement de l'agriculture, de la sylviculture, des loisirs et des
paysages est souhaitable. Il a donc décidé de mener une politique
" sur mesure " en collaboration avec les collectivités totales.
En ce qui concerne les
moyens financiers
, les pouvoirs publics ont
estimé à 1,675 milliard de florins (près de
5 milliards de francs) le coût total de la seule politique conduite
dans le " coeur vert " des Pays-Bas, de 1995 à 2005. L'Etat
néerlandais a supporté environ la moitié des
dépenses, sur la période 1992-1997, le reste étant
versé par les provinces et des partenaires privés.
D'un point de vue général, l'ensemble de la politique qui
gère les relations entre ville et espace rural est menée
conjointement par l'Etat et par les provinces.
2. La protection agricole au Québec
La
législation québécoise
relative
à la protection de l'agriculture, qui est depuis longtemps
particulièrement stricte, s'est récemment enrichie de
dispositions destinées à prendre en compte les
spécificités de l'agriculture périurbaine.
La loi sur la protection du territoire confère au Gouvernement du
Québec le pouvoir de déterminer les limites des régions
agricoles. Elle a institué une Commission de protection du territoire
agricole, composée de 16 membres nommés par le Gouvernement.
Cette commission est compétente pour :
- statuer sur les demandes tendant à l'inclusion ou à
l'exclusion d'un lot dans une zone agricole ;
- délimiter, en collaboration avec les municipalités, les
zones agricoles sur le terrain ;
- statuer sur les demandes des municipalités tendant à la
délivrance d'une autorisation de construire en zone agricole.
Comme on le constate, l'arsenal existant au Québec est
particulièrement contraignant. Devant la croissance de l'urbanisation,
les autorités ont cependant décidé de le renforcer.
Le diagnostic que les pouvoirs publics portent sur la situation de
l'agriculture aux abords des villes n'est d'ailleurs pas sans rappeler la
situation française. Le Gouvernement québécois notait
ainsi récemment :
"
Deux phénomènes présentent des contraintes
sévères au développement de l'agriculture. Un premier
concerne l'étalement urbain dont la principale manifestation est la
disparition de superficies importantes de terres agricoles au profit du tissu
urbanisé. Cette considération est spécialement importante
dans les régions métropolitaines vu la concentration des sols et
des activités agricoles [...] Un second phénomène a trait
à la diffusion inconsidérée d'usages non agricoles en zone
agricole. Outre les problèmes de cohabitation qui en découlent,
ce phénomène s'accompagne d'une déstructuration de la zone
agricole qui est de nature à accélérer la
dévitalisation du milieu rural et à avoir un impact
négatif sur la viabilité des noyaux villageois ainsi que sur les
possibilités de développement et d'adaptation des entreprises
agricoles à long terme "
Aussi les autorités québécoises concluent-elles que :
"
La protection du territoire agricole, qui constitue un
préalable au développement durable de l'agriculture, de
même que la préservation du capital-terre, comme outil de
développement et ressource rare et non renouvelable, doivent constituer
une préoccupation majeure dans le cadre de la révision des
schémas d'aménagement
".
A cette fin, le Gouvernement a prévu dans le cadre de sa politique en
matière d'aménagement de :
-
reconnaître l'existence d'une zone agricole
protégée
et d'y assurer l'utilisation prioritaire du sol
à des fins agricoles ;
-
freiner l'empiétement
de l'expansion et de
l'urbanisation agricole
;
-
planifier l'aménagement de la zone agricole
et y
contrôler les usages non agricoles
;
- favoriser l'émergence d'un modèle de
développement durable de l'agriculture basé sur la conservation
des ressources.
En France, comme aux Pays-Bas ou au Québec, l'agriculture
périurbaine constitue une chance pour les collectivités
publiques.
Avant de considérer que le coût des aides dont elle
a besoin est trop élevé, les décideurs publics devraient
les comparer au coût des parcs publics. Sait-on, par exemple, qu'en
France, le coût correspondant à la création d'un hectare de
parc est estimé à 1 million de francs, et que les charges
annuelles de fonctionnement qu'elle occasionne sont d'environ
100.000 francs, ou encore que le coût de l'ouverture d'un hectare de
forêt varie entre 18.000 et 200.000 francs par an ?
A n'en pas douter le soutien de l'agriculture périurbaine par la
puissance publique, se traduit par un échange mutuellement avantageux.
Reste à déterminer la forme que cette aide peut revêtir.
B. ACCROÎTRE LA STABILITÉ DES EXPLOITATIONS AGRICOLES À LONG TERME
1. Améliorer la législation sur les baux ruraux
Les dispositions du code rural actuellement en vigueur
fragilisent la position des exploitants agricoles puisque leur bail est
susceptible de prendre fin, à l'initiative du propriétaire,
dès lors que le terrain est " urbanisable ".
Cette situation n'est plus adaptée.
Il serait souhaitable d'instituer un délai minimum de 2 à
4 ans, variant en fonction de la durée du bail agricole restant
à courir durant lequel les exploitants agricoles ne pourraient
être contraints de quitter les terres qu'ils cultivent
même si
leur propriétaire manifestait la volonté de les vendre à
des fins d'urbanisation.
On mettrait ainsi fin à l'exercice d'une prérogative exorbitante
du droit commun afin de préserver l'espace agricole dans le souci de
l'intérêt général.
Ceci aurait, par ailleurs, l'avantage d'assurer une meilleure vision à
moyen terme pour les agriculteurs en place, ce qui leur permettrait de
rentabiliser leur exploitation (choix des cultures, utilisation des intrants).
2. Valoriser la production des exploitations
L'agriculture périurbaine n'est pas un
" conservatoire du monde rural " en milieu urbain. Elle mérite
mieux qu'une transformation en " rempart-vert " dressé contre
la ville. Il est donc nécessaire de lui permettre de tirer profit de son
activité économique et de reconnaître financièrement
son rôle social. La valorisation des exploitations agricoles passe donc
par l'amélioration de leur rentabilité, le développement
de nouveaux débouchés, et par une intensification des contacts
entre la ferme et la cité.
C'est pourquoi,
un projet de développement agricole
devra
être annexé à la charte des territoires urbains et
paysagers.
a) Accroître la rentabilité des exploitations d'élevage
Par l'attribution de quotas spécifiques
Les auditions auxquelles votre rapporteur a procédé l'ont
montré à de nombreuses reprises : la réduction des
surfaces agricoles s'accompagne d'une diminution des droits à produire.
Ce mouvement est spécialement préoccupant en ce qui concerne les
quotas laitiers. C'est ainsi, par exemple, qu'entre 1989 et 1994, dans la zone
périurbaine située au Nord de Nantes, 28 % des quotas
laitiers (soit 16,5 millions de litres de lait), ont été
perdus
58(
*
)
. Certes, les petits éleveurs
qui disposaient de droits à produire, ont été
dédommagés lorsqu'ils ont cessé leurs activités
laitières, dans le cadre des plans de cessation établis par
l'Etat et la CEE. Quant aux droits à produire des exploitants dont les
exploitations ont été démantelées faute de
repreneurs, bon nombre ont été attribués à des
agriculteurs dont le siège d'exploitation ne se situait pas dans la zone
périurbaine.
Or, comme le soulignent la Direction de l'agriculture et de la forêt et
la Chambre d'agriculture de Loire-Atlantique, "
compte tenu de la
législation actuelle dans la filière lait et de la crise
économique qui secoue la filière viande, les droits à
produire (quotas laitiers) et les droits à prime à la vache
allaitante sont indispensables pour la survie et la pérennité des
exploitations ".
Votre rapporteur préconise, en conséquence, en s'inspirant de
ce qui a été réalisé dans les zones de montagne,
que des quotas spécifiques prélevés sur la réserve
départementale soient attribués aux éleveurs
établis dans l'espace périurbain afin d'assurer
l'équilibre financier -donc la pérennité- des
exploitations.
Par une augmentation des aides attribuées pour la mise aux normes des
bâtiments d'élevage
D'une façon générale, les exploitants rencontrent des
difficultés pour installer des bâtiments agricoles dans les
espaces périurbains, même si le POS le leur permet en
théorie sur certaines zones non urbanisables affectées à
l'usage agricole. Les habitants " néoruraux "
n'apprécient guère le voisinage d'une stabulation ou d'un hangar
métallique. Un effort doit donc être entrepris pour assurer la
coexistence des habitations et des activités agricoles, et
spécialement l'insertion paysagère des bâtiments
d'exploitation.
Je prends bonne note de la réponse apportée au Sénat le 28
avril dernier par M. Louis Besson, Secrétaire d'Etat au logement,
à notre collègue M. Désiré Debavelaere qui
soulignait les difficultés posées à nombre
d'éleveurs du fait de la non réciprocité des règles
d'éloignement qui s'imposent à eux à travers la
législation sur les installations classées, mais qui ne
concernent pas les projets urbains et immobiliers.
La parution prochaine d'un texte modifiant l'article R.112-2 du code de
l'urbanisme permettra "
de refuser ou de soumettre à des
prescriptions spéciales des projets de construction, notamment à
usage d'habitation, dès lors qu'ils seront situés à
proximité de constructions ou installations existantes de nature
à porter atteinte à la salubrité ou à la
sécurité publique "
59(
*
)
.
De plus, le projet de loi d'orientation agricole prévoit une
information renforcée sur les risques de nuisances liés à
la proximité d'une installation classée.
Ces dispositions -notamment l'introduction d'une règle de
réciprocité dans le code de l'urbanisme- devraient aider, plus
particulièrement dans les zones périurbaines, à
prévenir nombre de conflits de voisinage.
En matière d'environnement, les obligations fixées par la
politique de l'eau prennent une importance particulière dans les zones
périurbaines : du fait de la densité des habitats, la
consommation d'eau y est très élevée et les risques
potentiels qui pèsent sur les nappes phréatiques sont
réels en raison de la très forte urbanisation des sols et de
l'implantation des infrastructures et des activité industrielles. Les
activités agricoles -notamment de maraîchage- sont d'ailleurs
pénalisées par des phénomènes de contamination des
nappes d'eau qui peuvent rendre parfois leurs produits impropres à la
consommation.
Mais pour les exploitations d'élevage situées en milieu
périurbain, le respect de ces obligations, tout à fait
justifiées sur le plan environnemental, met en évidence des
contraintes spécifiques :
- la proximité des zones urbanisées limite les
possibilités d'épandage, tant pour des raisons
" psychologiques " de voisinage que pour des raisons techniques
tenant aux superficies de terrain nécessaires ;
- la taille moyenne des exploitations d'élevage en zone
périurbaine ne leur permet pas de relever des aides prévues par
les Agences de l'eau dans le cadre du programme de maîtrise des
pollutions d'origine agricole (PMPOA) décidé en 1992.
En effet, seules les exploitations d'une certaine importance (au-dessus de
40 vaches et 70 unités de gros bétail (pour les bovins)
relèvent du régime des installations classées et peuvent
être aidées, pour le financement de leur mise aux normes, par
l'Etat et l'Agence de l'eau dont elles relèvent. Le maximum des aides
peut alors atteindre 60 % du montant des travaux, alors que pour les
petits élevages relevant du seul règlement sanitaire
départemental, les aides ne viennent que du conseil
général et couvrent seulement 35 % du montant des travaux.
Comme le souligne la Chambre d'Agriculture de Loire-Atlantique, sur
690 exploitations situées dans le périmètre de
l'Association communautaire de la région nantaise (ACRN)
-c'est-à-dire l'espace périurbain situé autour de Nantes-
131 seulement ont la taille suffisante pour bénéficier des
aides de l'Agence de l'Eau. Les autres exploitations ne peuvent
prétendre aux mêmes aides, alors que leur équilibre
financier est plus précaire
60(
*
)
.
Pour assurer la pérennité de ces exploitations
d'élevage qui sont une composante indispensable du paysage agricole
périurbain, votre rapporteur préconise une réorientation
du régime des aides dans le cadre du PMPOA pour prendre en compte les
spécificités du milieu périurbain.
b) Favoriser l'apparition de nouveaux débouchés
Les consommateurs souhaitent, de plus en plus, connaître l'origine des produits qui leur sont vendus. Aussi, les pouvoirs publics pourraient-ils encourager les producteurs locaux en délivrant , moyennant des engagements de qualité , des labels comparables aux appellations d'origine contrôlée (AOC) qui permettent de garantir la qualité et la provenance de proximité du produit. L'expérience prouve d'ailleurs que les productions de qualité se maintiennent mieux en zone périurbaine à proximité des consommateurs.
3. Intensifier les contacts entre la ferme et la ville et favoriser l'apparition de nouvelles activités
La relation très ancienne qui existait entre la ville
et les terres qui l'entourent s'est progressivement distendue. Longtemps,
l'agriculture périurbaine fut à la fois la fille et la
nourricière de la ville. Les producteurs approvisionnaient la
cité et retraitaient ses déchets. Cet équilibre a disparu
à l'heure où le marché agricole est mondialisé.
Il est d'autant plus souhaitable, dans ces conditions, de renforcer les
relations économiques et humaines entre la cité et son
hinterland
.
Accroître les contacts entre agriculteurs et citadins
Plusieurs exemples témoignent de l'intérêt d'établir
des relations entre les fermes et la ville. Nombre de communes ont d'ailleurs
d'ores et déjà créé des " fermes
pédagogiques " destinées à accueillir des enfants
d'âge scolaire pour les familiariser avec des savoirs et des pratiques
inconnus des citadins.
Le cadre des actions conduites en direction des jeunes peut également
s'élargir à des fermes appartenant à des exploitants
privés.
C'est ainsi, par exemple, que dans l'Isère, une association
dénommée " Les Fermes Buissonnières ",
créée voici quatre ans, regroupe neuf exploitations et accueille
les enfants des écoles et des centres de loisirs pour leur faire
découvrir l'exploitation agricole et le métier d'agriculteur. De
même, dans le Vexin normand, la ferme de la Bergerie, qui appartient
à la Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de
l'Homme reçoit, en liaison avec l'association " Ebullition "
de l'Ile-Saint-Denis, les habitants (et non pas seulement les enfants) du
quartier sud de cette commune. Cette relation durable a pris la forme d'un
" jumelage ". Il en est de même pour la Bergerie nationale qui,
avec les organisations agricoles, organise l'accueil d'enfants aux origines
lointaines à la ferme pour des séjours d'une semaine. Selon les
animateurs de ce projet, l'objectif final vis à vis des citadins est de
renforcer le lien avec une zone rurale proche
.
Votre rapporteur souhaite que ce type de " jumelages " entre les
quartiers urbains et des zones rurales proches de la ville soit
financièrement encouragé dans le cadre de la politique de la
ville. Ces jumelages constituent un trait d'union entre l'agglomération
et l'espace périurbain.
Il serait en outre souhaitable de rémunérer cette activité
d'accueil des enfants et des adultes qui constitue un service annexe aux
fonctions proprement agricoles.
" Ouvrir l'espace rural " à proximité des
agglomérations
Les champs situés aux abords des agglomérations sont souvent
marqués par un paysage ouvert, et leur parcellaire limite les contacts
positifs entre les citadins et la campagne, faute de chemins, de haies ou de
bosquets.
Il serait envisageable de
conditionner des aides spécifiques à
l'ouverture d'un minimum de mètres de chemins ouverts au public par
hectare, ainsi qu'à la plantation de haies, pour autoriser des
cheminements le long de vergers, de terres cultivées ou de prairies,
tout en assurant leur protection contre toute divagation.
Comme il a été indiqué plus haut, dans le cadre de leur
politique " espaces naturels sensibles ", les départements
incluant des zones périurbaines pourraient financer ce type
d'aménagement.
Ceci répondrait à l'objectif d'ouverture des espaces au public,
tout en permettant le maintien d'une activité agricole et en assurant
l'entretien de ces espaces.
4. Généraliser la mise en place de plans de développement durables
Votre rapporteur préconise d'encourager
l'élaboration des plans de développement durable pour
l'agriculture périurbaine, comme celui en cours de réalisation
dans le Sud-Yvelines, car des espaces agricoles " correctement "
gérés qui représentent une richesse patrimoniale et un
cadre de vie apprécié par la population, ouvrent des perspectives
pour une agriculture adaptée au milieu et qui s'inscrit dans la
perspective de la nouvelle politique agricole commune.
Dans le cadre de l'expérimentation engagée en 1993 par le
ministère de l'agriculture et de la pêche, en liaison avec le
ministère de l'environnement, 700 projets, répartis dans
cinquante départements, sont en cours d'expérimentation. Les
plans de développement durable privilégient une approche globale
incluant des thèmes tels que la biodiversité, le patrimoine
bâti et le paysage, pour élaborer un projet permettant de
concilier de façon cohérente, dans le cadre des systèmes
de production, les fonctions d'ordre économique, écologique et
social, assurées simultanément par les agriculteurs et les enjeux
du territoire sur lequel travaillent ces mêmes agriculteurs.
La mise en oeuvre d'un plan de développement durable, sur la base du
volontariat, s'effectue en trois temps :
- le
diagnostic de territoire
permet d'analyser les enjeux en
termes socio-économiques, agricoles et environnementaux, en instaurant
un dialogue entre les agriculteurs et les divers acteurs du
développement local ;
- le
diagnostic agri-environnemental d'exploitation
élaboré pour chaque exploitation volontaire permet d'analyser la
cohérence du système d'exploitation en termes de
durabilité ;
- l'élaboration du
projet individuel d'exploitation
à
partir des deux diagnostics précédents intègre les
modifications des pratiques agricoles sur lesquelles s'engage l'agriculteur. Ce
projet est examiné par un comité technique regroupant les
différents partenaires. Il est soumis à l'agrément du
préfet après avis de la commission départementale
d'orientation agricole.
L'agriculteur signe alors avec l'Etat un contrat de cinq ans par lequel il
s'engage à réaliser les actions prévues par le projet. En
contrepartie, il bénéficie de plusieurs aides, notamment des
mesures agri-environnementales, même si son exploitation ne se trouve pas
dans la zone retenue pour leur application.
Selon le bilan effectué sur un échantillon de 205 contrats,
le produit brut d'exploitation ramené à l'unité de main
d'oeuvre évoluerait peu, mais les résultats seraient positifs
s'agissant de la maîtrise des charges et de l'efficacité
économique. En effet, l'endettement diminue de 6 %, le produit brut
par UTH
61(
*
)
augmente de 4 % et le revenu
disponible par UTH progresse de 28 % en moyenne.
A compter de 1998, l'expérimentation doit être élargie avec
environ 1 500 agriculteurs par an pendant cinq ans ; il serait tout
à fait judicieux que l'agriculture périurbaine y soit fortement
impliquée.
C. CRÉER DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS ENVIRONNEMENTAUX SUR LE MODÈLE DE L'AGENCE DES ESPACES VERTS DE LA RÉGION ILE-DE-FRANCE
La loi n° 76-394 du 6 mai 1976 portant
création de la Région d'Ile-de-France a institué une
agence des espaces verts
.
Cet établissement public régional à caractère
administratif est "
chargé de mettre en oeuvre la politique
régionale en matière d'espaces verts, de forêts et de
promenades
". Son budget est alimenté par des crédits
votés par la région, des contributions de l'Etat, des
collectivités locales et des personnes publiques ou privées.
Aux termes du décret n° 85-317 du 8 mars 1985,
l'agence :
- établit chaque année un programme général
d'action ;
- contribue par l'octroi d'aides financières à
l'acquisition, l'aménagement et l'entretien des espaces verts, des
forêts et des promenades, par des personnes publiques ou des
associations ;
- accorde des aides en vue de favoriser l'ouverture au public d'espaces
verts privés, dans le cadre de conventions signées avec les
propriétaires ;
- procède aux opérations d'acquisition, de gestion et
d'aliénation ou d'échange d'espaces verts de forêts et de
promenades.
L'agence des espaces verts a mené, depuis sa création, une
politique d'achat d'espaces verts, qui concerne les espaces verts urbains, les
forêts et les espaces d'intérêt biologique particulier, les
vallées et, enfin, les espaces verts périurbains.
Au titre des
espaces verts urbains
, l'agence a créé mille
parcs et jardins.
En ce qui concerne les
forêts et les espaces d'intérêt
biologique particulier
, l'Agence a acheté des forêts et a
procédé à des reboisements en mobilisant des
crédits européens.
Dans les
vallées,
l'Agence a acheté les Iles Saint-Louis
et Saint-Martin La Garenne dans les Yvelines et les berges de
Crécy-sur-Marne en Seine-et-Marne.
S'agissant enfin des
espaces verts périurbains
, la Région
a, grâce à l'Agence des Espaces Verts, choisi de préserver
des espaces ouverts, des zones boisées et des surfaces agricoles. Sa
politique s'est concrétisée par des acquisitions, notamment dans
le Val-d'Oise (Plateau d'Andilly), le Val de Marne (Grosbois et le
Plessis-Saint-Antoine), en Seine Saint-Denis (Bondy) dans l'Essonne (Plateau de
Saclay), les Yvelines (Forêt de Rosny) et en Seine-et-Marne (Mitry-Mory).
Une attention particulière est portée à la protection des
terres agricoles, grâce à la signature d'une convention avec la
SAFER, afin de protéger le site de Saclay. En vertu de cet accord,
l'Agence des espaces verts s'engage à racheter les terres agricoles
lorsque la SAFER a fait jouer son droit de préemption. Ces terrains sont
ensuite donnés à bail (18 ans) à des exploitants
agricoles.
En pratique, le Conseil Régional d'Ile-de-France a
déterminé 35 périmètres d'acquisition
régionaux, qui correspondent à une superficie totale de
près de 22.000 hectares, et l'Agence a acquis près de
8.000 hectares au total.
Au vu des résultats obtenus grâce à l'Agence des espaces
verts, votre rapporteur juge souhaitable de favoriser la création de
structures analogues dans d'autres régions, notamment les plus
urbanisées
.
Il conviendrait en outre de leur donner les moyens financiers de leur
politique, par exemple
en leur affectant une part du produit de la taxe
départementale des espaces naturels sensibles.
Celle-ci comporterait
deux tranches
, la première "
part
départementale
" serait conservée par le
département et la seconde "
part péréquée
périurbaine
", serait affectée à la gestion des
terrains urbains et paysagers
Comme il a été indiqué plus haut, aux termes de
l'article L.142-2 du code de l'urbanisme, les départements ont la
faculté d'instaurer une taxe pour mettre en oeuvre une politique de
protection des espaces naturels sensibles. Le taux de cette taxe, assise,
liquidée et recouvrée dans les mêmes conditions que la taxe
locale d'équipement, ne peut excéder 2 %.
Selon les dernières statistiques connues -soit l'année 1995- sur
les 66 départements ayant institué la TDENS, huit appliquent
le taux maximum, 35 ont voté un taux de 1 ou 1,5%, les autres ayant
opté pour un taux variant de 0,1 à 1,40 %.
En 1995, le montant de la taxe s'est élevé à
709,66 millions de francs.
Par delà le caractère facultatif de la taxe, les conditions de
recouvrement et les modalités d'utilisation de son produit sont loin
d'être identiques sur tout le territoire.
D'une part, les modalités de recouvrement -50 % versés dans
un délai de dix-huit mois à compter de la date de
délivrance du permis de construire, et le versement du solde trente-six
mois à compter de la même date- ne favorisent pas un bon rendement
de la taxe. D'après plusieurs études, la différence entre
les montants liquidés et les sommes recouvrées pourrait avoisiner
25 %
62(
*
)
;
D'autre part, on constate une très grande diversité en ce qui
concerne la consommation des crédits issus de la TDENS.
En effet, plusieurs départements n'utilisent pas la totalité de
ces crédits, et il a été constaté que certains
reports de taxe inutilisée sont supérieurs au produit annuel de
la taxe. On estime que 40 % environ des recettes ne sont pas
consommées
63(
*
)
.
Ayant démontré tout l'avantage à ce que les
départements développent une politique des espaces sensibles en
milieu périurbain, on ne peut que regretter la
" sous-utilisation " de crédits disponibles ainsi que le
mauvais rendement de la taxe. Dans un souci d'équité et de
solidarité vis-à-vis des espaces périurbains,
votre
rapporteur se déclare favorable à la généralisation
de la taxe aux départements dans lesquels sont identifiées les
principales aires urbaines.
Afin d'améliorer le rendement de la taxe, il soutient le principe d'un
versement intégral dès la réalisation de la construction
projetée
64(
*
)
.
Enfin, pour permettre une meilleure utilisation des fonds disponibles, il
conviendrait également d'instituer une péréquation d'une
partie du produit de cette taxe au niveau régional. Cette part
péréquée devrait être affectée aux
établissements publics environnementaux dont votre rapporteur souhaite
la création sur le modèle de l'Agence des espaces verts de la
région Ile-de-France et destinée à la politique de gestion
des espaces périurbains.
III. POUR RENFORCER L'INTERCOMMUNALITÉ D'AGGLOMÉRATION
En France, l'agglomération est une
réalité géographique
et souvent sociologique qui
n'a pas encore de statut juridique.
Malgré les premiers pas que constituent les communautés de
villes
65(
*
)
, l'émiettement du territoire
urbanisé entre de nombreuses communes constitue un important obstacle
à la conduite de la politique de la ville en général, et
à la gestion des espaces périurbains, en particulier. C'est
pourquoi une volonté politique nationale doit favoriser
l'émergence de véritables " autorités
d'agglomération ", disposant de compétences urbanistiques et
de ressources fiscales propres, issues de la libre volonté des communes
et dotées de pouvoirs réels.
A. UNE NÉCESSITÉ POLITIQUE INCONTOURNABLE : L'AUTORITÉ D'AGGLOMÉRATION
Dans le cadre de la préparation du projet de
schéma national d'aménagement et de développement du
territoire, votre rapporteur a présidé la commission
thématique consacrée aux villes, à l'organisation des
territoires et aux services collectifs. Une des conclusions majeures de cette
commission fut de préconiser la création d'une autorité
d'agglomération élue au suffrage universel, capable
d'opérer la transformation d'une intercommunalité fonctionnelle
en une intercommunalité citoyenne.
Seule une telle autorité, dotée d'une
légitimité
politique reconnue,
paraît en mesure d'assurer la cohérence du
développement de l'agglomération en mettant fin à la
compétition que se livrent parfois les communes en matière de
fiscalité et d'urbanisme, tout en préservant l'apport de leur
identité. Une réflexion sur les modalités
d'élection de cette autorité d'agglomération revêt
un caractère essentiel.
Pour que l'autorité d'agglomération gère les
problèmes posés aux frontières de la ville, il est
indispensable qu'elle exerce la responsabilité des espaces
périurbains, et qu'elle entretienne des relations étroites avec
les différents " pays " qui l'environnent. Faute d'une telle
articulation entre agglomération et pays, le " front urbain "
poursuivra son avancée anarchique dans un rapport conflictuel avec
l'espace rural proche ou plus lointain.
Ces autorités d'agglomération devront avoir des
compétences urbanistique et foncière et la maîtrise de
l'outil fiscal (notamment foncier et taxe professionnelle).
B. UNE COMPÉTENCE URBANISTIQUE, FONCIÈRE ET FISCALE
1. Une compétence urbanistique et foncière
On a vu ci-dessus combien l'absence de politique
foncière globale et de moyens financiers adéquats était
préjudiciable à la gestion des espaces périurbains, et
combien il était souhaitable d'élaborer des schémas
directeurs d'agglomération.
Comme le relevait le Conseil économique et social dans son rapport sur
La Question foncière
publiée en 1995 :
"
Le territoire pertinent de l'habitat n'est pas celui de la commune.
C'est à une échelle géographique à mi-chemin entre
la commune et le département que se développe le " bassin de
vie ", regroupant l'essentiel des fonctions de services, d'emplois et de
logements. Dans les zones rurales, le périmètre d'intervention
pourrait être proche de la notion de pays. Dans les zones urbaines, la
taille nécessaire pour agir efficacement sur le marché foncier
est l'agglomération. C'est à cette échelle que la
planification urbaine acquiert une dimension suffisante
[...] "
66(
*
)
.
Seule une autorité d'agglomération pourra mener de front une
politique foncière, une politique de l'urbanisme qui suppose
l'élaboration d'un schéma directeur, et d'une politique globale
d'environnement, des transports et des infrastructures.
Ce dernier point est d'autant plus important que les infrastructures de
communication, -grandes consommatrices d'espace- sont souvent rejetées
à la périphérie des villes, au coeur des espaces
périurbain. Les pouvoirs publics doivent, en la matière,
résoudre une
contradiction majeure,
puisque la
majorité
des habitants souhaitent disposer de voies de communication
tandis que
les propriétaires et les riverains répugnent à les voir
s'installer
à proximité de leur domicile.
Seule une
instance à terme issue du suffrage universel serait en mesure de
résoudre ces contradictions
.
Reste à savoir comment une telle politique serait financée.
2. Une compétence fiscale
La concurrence fiscale à laquelle se livrent parfois les communes résulte du manque d'harmonisation des taux de la taxe professionnelle et de la mauvaise prise en compte du coût des espaces naturels dans la fiscalité locale.
a) Une indispensable harmonisation de la fiscalité locale
Votre rapporteur estime que
le système fiscal actuel
encourage les égoïsmes locaux
et méconnaît la
réalité des échanges et des intérêts communs
aux communes urbaines et périurbaines.
La traduction fiscale de cette
indépendance reste la fixation d'un taux propre de taxe professionnelle
pour chaque commune,
afin d'attirer des entreprises ou des
supermarchés.
Est-il normal que certaines communes abritent des habitants de
l'agglomération, que d'autres accueillent les supermarchés et les
zones industrielles et que les troisièmes soient transformées en
" réserves naturelles miniature ", sans aucune contrepartie
financière ? Une telle situation n'est certainement pas satisfaisante.
Serait-il concevable qu'à Paris, Lyon et Marseille, chacun des
arrondissements détermine sa propre politique fiscale ?
Comme le relevait la SEGESA dans son étude sur les espaces
périurbains : "
le sentiment dominant est qu'il vaut mieux avoir
l'hypermarché chez soi que de le voir chez le voisin avec, dans ce cas,
aucune retombée financière
".
Lors de son déplacement à Valenciennes, votre rapporteur a
constaté que tout près de l'étang du Vignoble,
aménagé par cette commune pour les promeneurs, les communes
" mitoyennes " avaient autorisé des constructions ayant sans
doute une utilité commerciale, mais dont l'apparence dénaturait
le paysage environnant et ruinait les efforts d'aménagement et de mise
en valeur de l'étang du Vignoble.
Dans le domaine de la fiscalité des biens non bâtis, beaucoup
reste également à faire.
Le coût du foncier non
bâti, est, en zone périurbaine, souvent prohibitif eu égard
à la rentabilité des exploitations ou au revenu du fermage.
Cette fiscalité est quelque peu archaïque dans la mesure où
elle pénalise une activité agricole qu'il serait souhaitable
d'encourager, tout en apportant des ressources, somme toutes minimes, eu
égard à la totalité des produits fiscaux que les
collectivités locales recouvrent. En outre, elle s'applique à
toutes les terres agricoles quel que soit le mode de culture, alors même
que la diversité du paysage supposerait que l'on privilégie la
diversité de pratiques culturales autres que les seules cultures
céréalières, voire que l'on encourage une agriculture
alternative.
Au total, il est indispensable de reconnaître à
l'autorité d'agglomération une compétence fiscale qui
assure une péréquation des recettes de taxe professionnelle entre
toutes les communes, afin que les fonctions d'habitation et de loisir soient
mieux financées
et que la solidarité qui unit les
habitants de l'agglomération se traduise dans les faits
.
b) ...pour une meilleure prise en compte du coût des espaces naturels dans les politiques fiscales
Il convient de souligner que le système fiscal
français est loin de favoriser la protection et la mise en valeur des
espaces naturels. Le foncier non bâti supporte, en effet, une
fiscalité très pénalisante, par rapport au foncier
bâti, qui est lui-même plus imposé que les valeurs
mobilières.
Ainsi, en ce qui concerne l'imposition du capital, l'égalité du
taux de prélèvement sur des biens dont les taux de rendement
varient considérablement pénalise fortement les détenteurs
de patrimoines fonciers non bâtis dont le taux de rendement est souvent
faible (inférieur à 2 %). De plus, l'égalité
du taux de prélèvement sur des biens fonciers non bâtis
exploités de manière différente (agriculture extensive ou
intensive, exploitation forestière ou paysagère...)
pénalise les usages non intensifs, moins productifs, et entraîne
une intensification du rendement des biens fonciers non bâtis pour
dégager de nouveaux revenus.
Plus généralement, l'impôt sur le capital, d'un strict
point de vue économique, incite à la recherche d'une allocation
optimale des facteurs de production. Les acteurs économiques
sélectionnent leurs actifs en choisissant la rentabilité à
court terme la plus forte. Ces orientations sont très
pénalisantes en ce qui concerne les espaces naturels, "
qui sont
d'autant plus riches qu'ils sont exploités moins intensivement et
d'autant plus protégés qu'ils sont immobiles
"
67(
*
)
.
S'agissant de la taxe sur le foncier non bâti, le rapport
précité de M. Guillaume Sainteny démontre
également, outre les problèmes posés par cette taxe
-impôt sur le capital assis sur des valeurs locatives
évaluées de façon hétérogène et
déconnectées des loyers réels, dont les taux varient
fortement selon les communes- que la fiscalité locale directe est plus
favorable à la mise en valeur économique des espaces naturels
qu'à leur conservation et à leur gestion écologique.
Cette fiscalité pénalise d'autant plus les espaces naturels
situés en milieu périurbain que l'espace y est rare et cher, ce
qui incite à en retirer une rentabilité économique maximum
et immédiate.
Or, la reconnaissance sociale de la valeur de ces espaces et de la
nécessité de leur entretien implique, comme le soulignait notre
collègue Jean-François Le Grand dans son excellent rapport sur la
protection de l'environnement rural, "
que soient définies les
conditions de l'exercice de la solidarité financière de la Nation
à leur égard, le coût de la gestion de ces espaces ne
pouvant, à l'évidence, être laissé à la
charge exclusive des collectivités rurales ou des
propriétaires "
68(
*
)
.
Votre rapporteur fait sienne plusieurs des propositions émises dans les
rapports précités de MM. Jean-François Le Grand,
sénateur, et Guillaume Sainteny pour recommander que, dans le cadre de
l'expérimentation des terroirs périurbains, plusieurs mesures
fiscales favorables aux espaces naturels soient mises en oeuvre.
- S'agissant de la fiscalité du patrimoine foncier non bâti,
il conviendrait de mieux prendre en compte le coût de son entretien,
notamment par une extension au patrimoine naturel protégé des
avantages attachés au patrimoine immobilier soumis aux dispositions des
lois de 1913 et 1930
. On autoriserait ainsi des déductions de
l'impôt sur le revenu des personnes physiques ou du revenu global au
titre des frais de réparation ou d'entretien des espaces naturels
présentant un intérêt pour la collectivité. Sur ces
mêmes espaces, des exonérations de droits de mutation à
titre gratuit ou de l'impôt de solidarité sur la fortune
pourraient être consenties.
Bien entendu, ces exonérations ou ces abattements seraient
modulés en fonction du statut de protection reconnu à ces espaces
et surtout en fonction des aménagements consentis pour l'ouverture au
public de ces espaces.
- En ce qui concerne les impôts fonciers locaux, une révision
de la valeur locative apparaît indispensable pour mieux prendre en compte
certains milieux naturels, et surtout les types d'activités et les modes
d'exploitation de ces espaces, et favoriser ainsi ceux d'entre eux qui,
au-delà d'une stricte exploitation économique du fonds, assurent
son entretien et sa mise en valeur d'un point de vue paysager ou
environnemental. Ceci devrait sans doute s'accompagner d'un plafonnement des
taux votés par les communes et les départements, et d'une remise
en cause de certaines exonérations comme celle de la taxe
foncière sur les sols de construction et les constructions nouvelles.
La suppression de cet encouragement indirect à l'artificialisation du
sol se justifie particulièrement en milieu périurbain et
permettrait de dégager des ressources nouvelles pour les
collectivités locales.
- Enfin, on ne peut que plaider pour une meilleure prise en compte de la
préservation des espaces naturels dans les critères d'attribution
des dotations de l'Etat aux communes et à leurs groupements. Comme il a
été rappelé plus haut, ces critères,
essentiellement fondés sur l'aménagement,
désavantagent
les collectivités qui protègent et entretiennent leurs espaces
naturels
, alors même que, bien souvent, elles ne disposent pas de
rentrées importantes au titre de la taxe professionnelle. Il faudrait
définir un nouveau critère calculé à partir de la
superficie des espaces protégés dans la commune et d'un
coefficient de protection de ces mêmes espaces évaluant la
qualité de leur protection, de leur mise en valeur ou de leur mise
à disposition du public. Ce nouveau critère pourrait être
introduit dans le calcul des dotations de l'Etat versées aux groupements
de communes à fiscalité propre, afin d'encourager le
développement de l'intercommunalité en milieu périurbain.
CONCLUSION GÉNÉRALE
Sans volonté des élus et de l'Etat, l'extension
progressive et désordonnée de la ville au détriment de
l'espace rural se poursuivra. Prenons garde aux conséquences
urbanistiques et sociales de cette extension en tâche d'huile : face
à la facilité du " laissez-faire ", les pouvoirs
publics doivent choisir l'exigence d'un développement
équilibré.
La voie est étroite et les contraintes nombreuses. Il ne saurait
être question de rejeter hors de la cité les entreprises et les
infrastructures (transport, énergie) indispensables aux besoins des
habitants et au développement économique. La politique de
l'espace périurbain nécessite le concours des acteurs
économiques et sociaux, dans le cadre d'un plan d'ensemble
déterminé par les autorités démocratiquement
élues.
A quel échelon cette politique doit-elle être conduite ?
Pour votre rapporteur, le concours de l'Etat et des collectivités
territoriales est nécessaire. C'est pourquoi, il préconise, d'une
part, la signature d'une charte d'objectifs et de l'autre, la création
d'agences régionales environnementales. En dernière analyse, seul
l'Etat doit assurer la cohérence nationale d'une politique globale, les
choix stratégiques et la coordination de l'action des services
déconcentrés (agriculture, équipement, environnement, en
liaison avec la délégation interministérielle à la
ville).
La " boîte à outils " décrite dans le
présent rapport est d'ores et déjà assez abondamment
dotée. Elle doit simplement s'enrichir de quelques nouveaux instruments.
Afin de tester l'efficacité des uns et des autres, votre rapporteur
estime qu'une expérimentation serait nécessaire sur quelques
sites emblématiques des difficultés rencontrées par
l'espace périurbain : les Boucles de la Marne et de l'Ourcq semblent
répondre à cette problématique. Dans ces espaces, les
collectivités locales et l'Etat pourraient ainsi engager une
démarche de classement en " terroirs urbains et paysagers ".
Les acteurs locaux attendent une réponse à leurs problèmes
quotidiens et sont désireux d'agir. L'Etat commettrait une erreur en
n'assumant pas sa part de responsabilité et en " renvoyant la
balle " aux régions, qui ne sont pas dotées des
compétences institutionnelles appropriées.
Le Gouvernement commettrait une erreur en perdant à
délibérer le temps qui lui reste pour agir...
ANNEXE N° 1 -
AUDITIONS ET
DÉPLACEMENTS RÉALISÉS DANS LE CADRE DE LA
PRÉPARATION DU RAPPORT
I.
AUDITIONS
A/ Ministère
- Mme Corinne Lepage
, ministre de l'environnement
-
M. Guillaume Sainteny
, conseiller technique au cabinet de
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement
-
M. Jean-Pierre Raffin
, conseiller technique au cabinet de
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement
B/ Élus
- M. François Autain
, Questeur du Sénat, Sénateur
de Loire-Atlantique
- M. Ambroise Dupont
, Sénateur du Calvados
- M. Philippe François,
Sénateur de Seine-et-Marne,
- M. Pierre Hérisson,
Sénateur de Haute-Savoie,
Vice-Président du Conseil régional Rhône-Alpes
-
M. Didier Julia
, Député de Seine-et-Marne,
Vice-Président du Conseil régional d'Ile-de-France
- M. Jean-François Le Grand,
Sénateur de la Manche
- M. Michel Souplet
, Sénateur de l'Oise
-
M. Claude Courtier,
Maire d'Ocquerre, Président du
District du Pays de l'Ourcq,
-
M. Francis Élu,
Maire de Congis-sur-Thérouanne
- M. François Kosciusko-Morizet,
Maire de Sèvres
-
M. Pierre Meutey
, Maire de Vendrest, conseiller
général de Seine-et- Marne, Conseiller régional
d'Ile-de-France,
-
M. Jacques Rousseau
, Maire de Trocy en Multien
-
M. Jean-Jacques Demaure
, adjoint au maire de Nantes, conseiller
régional des Pays de Loire
- M. Raymond Leduc
, conseiller municipal
délégué de Bouguenais
- M. Jean-Pierre Blanchelande,
conseiller régional
d'Ile-de-France
-
M. Dominique Julien-Labruyère
, conseiller
régional d'Ile-de-France
-
M. Alain Rist
, conseiller régional, vice-président
de la région Ile-de-France
C/ Magistrature et administrations
- Mme Anne Bain
, Directeur des activités foncières
et immobilières et
M. Pierre-Louis Soldaini
, Directeur
général adjoint de l'Agence foncière et technique de la
Région parisienne
- M. Philippe Balny
, Directeur de l'Agence des espaces verts de la
Région Ile-de-France
- M. Robert Batailly,
Vice-Président de la
Fédération européenne pour les espaces naturels,
Président-Directeur général du parc des Iles de
Miribel-Jonage
- M. Henri de Belloy,
Vice-président de la
Fédération Parcs Naturels et Président du PNR de Brotonne
- M. Gilles Cariven
, Directeur départemental
à la Direction nationale d'interventions domaniales
- M. Gérard Claudel
, Président du PNR du Vexin
français
- M. Jean-Raymond Cohen
, Responsable du département
Périurbain de la Bergerie nationale
- M. Luc Coppin
, Président d'Espace Naturel région
Nord-Pas de Calais et
M. Daniel Mio
- M. Patrice Danneel
, Directeur divisionnaire du
Bureau III A3 de la Direction Générale des Impôts
- M. Jean Daubigny,
Préfet, Délégué
interministériel à la ville
- M. Jean-Pierre Duport,
Préfet de la Seine-Saint-Denis
- M. Jean-Pierre Drevon
, Directeur départemental de la
jeunesse et des sports des Yvelines
- M. André Fleury
, Professeur à l'École
supérieure du paysage
-
M. Gilbert Ganez Lopez
, Magistrat, Vice-Président du
Tribunal de Grande Instance de Nantes
- M. André Grammont
, Directeur de l'espace rural et de la
Forêt, et
M. Guy Poirier
, Conseiller technique
- M. François Lefebvre
, Préfet honoraire
- M. Dominique Legrain,
Directeur adjoint du Conservatoire du
littoral
- Mme Jaqueline Morand-Deviller,
Professeur à
l'Université Paris I-Sorbonne
-
M. Patrick Niamiah,
Direction générale de
l'Urbanisme, de l'Habitation et de la Construction du Ministère de
l'Equipement
- M. Paul Perpère,
administrateur civil, chargé du
Bureau III A de la Direction Générale des Impôts
- M. Alain Pialat
, Directeur régional de l'environnement
Rhône- Alpes
- M. Jean-Christophe Piequet,
Secrétaire
général du District du Pays de l'Ourcq,
- Mme Michèle Prats
, Secrétaire général
du Comité national des entrées de villes
-
M. Jean-Paul Rivère,
Président de la Maison
régionale de l'Agriculture Indre et Loire
- M. Jean-Luc Sadorge
, Directeur de Fédération
nationale des PNR
- M. Claude Truchot
, Directeur régional de l'environnement
Ile-de- France
-
Mme Nédialka Sougareva,
sous-direction de
l'évaluation environnementale et de l'aménagement durable au
ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement
(et contribution).
D/ Syndicats et associations
-
M. Rémi Bailhache
, Président de la chambre
d'agriculture de la Manche et
M. Guillaume Baujin,
Assistant
parlementaire à l'APCA
- M. Jérôme Bédier,
Président de la
Fédération des entreprises du commerce et de la distribution et
Mme Véronique Etienne-Martin
, Conseiller, chargée des
relations avec le Parlement et les Institutions européennes
- M. Jean-Michel Claude,
Directeur de la Fédération
nationale des Conseils d'architecture d'urbanisme et de l'environnement
(CAUE),
M. Bruno Letellier
, Directeur CAUE 49,
M.
Christian Faliu
, Directeur CAUE 95,
M. Roger Desbiens
,
Directeur CAUE 77
- M. Pascal Dubus,
Membre du bureau du Centre National des Jeunes
Agriculteurs
- M. Bertrand Favereul,
Président et
M. Jean Pierre
Duval,
Directeur général de l'Union de la Publicité
Extérieure
- M. Yves Jego
, Président de l'Association des maires de
zones franches
-
M. Jean-Paul Fuchs,
Président de la
Fédération nationale des Parcs Naturels Régionaux (deux
auditions)
- M. Etienne Lapeze,
Vice-Président de la
Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles
- M. Philippe Motte
, Président de SEDAF (architecture et
maîtrise d'ouvrage, région Nord-Pas-de-Calais)
- M. Daniel Yon
, Membre de France Nature Environnement, Membre du
Conseil national de la Protection de la Nature
E/ Sociétés et entreprises
- M. Olivier Danziger,
Directeur de Société
d'économie mixte d'Athis-Mons
-
M. André Grange
, Directeur de la
Société d'économie mixte pour la Gestion et
l'aménagement du parc de loisirs et du lac de Miribel- Jonage
- M. Gerd Maibourg
, Directeur de l'Environnement du groupe
Loréal
- M. Michel-Edouard Leclerc
, Co-Président de l'Association
nationale des Centres Leclerc
F/ Colloque national sur l'agriculture péri-urbaine au Centre
d'Enseignement zootechnique
II. DÉPLACEMENTS
Aux Pays-Bas
-
M. Faassen
, direction de la nature au Ministère de
l'agriculture, de la nature et de la pêche
-
M. Bal
, coordinateur de la politique de l'espace et de la
qualité de l'environnement au Ministère de l'agriculture , de la
nature et de la pêche.
-
M. Hefter
, attaché agricole
-
Mme
Divanach
, attaché agricole adjoint
Dans les boucles de la Marne et de l'Ourcq
(77), sous la conduite
de M. Didier Julia, député de Seine-et-Marne,
vice-président du Conseil régional d'Ile-de-France
En Haute-Normandie (Parc naturel régional de Brotonne)
-
M. Jean-Marc Bérépion
, directeur
A Valenciennes
-
M. Henri Masse
, Sous-Préfet
-
M. Jean-Louis Borloo
, Député, Maire de Valenciennes
-
M. Dominique Riquet
, Premier adjoint de la mairie de
Valenciennes, Conseiller régional
-
M. Jean-Marie Desfossez,
Adjoint à l'habitat,
- Mme Frédérique Henry,
Directeur de cabinet
- M. Bruno Leclercq,
Secrétaire général de la
mairie de Valenciennes
- M. Pascal Dubois,
chargé de mission
En Yvelines (Vallée de la Seine et Val de Gally)
-
M. Jacques Bourdreux
, Directeur de la Bergerie nationale de
Rambouillet
-
M. Jean-Raymond Cohen
, responsable du département
périurbain de la Bergerie nationale de Rambouillet
-
M. Jean-Pierre Debrosse
, Département Péri-urbain de
la Bergerie nationale de Rambouillet
-
M. Xavier Guiomar
, Département Péri-urbain de la
Bergerie nationale de Rambouillet
A Amiens
-
Mme Brigitte Fourré
, adjoint au maire, chargée de
la Rive droite
-
M. Yves Cordier
, adjoint au maire, chargé du secteur Amont
-
M. Bernard Flinois
, adjoint au maire, chargé de la Rive
gauche
-
M. Hubert Hénno
, adjoint au maire, chargé de
l'urbanisme
-
M. Yves Magnani
, directeur du service jeunesse
-
M. Jean-Luc Godard
, directeur du service urbanisme
A l'Ile-Saint-Denis
-
MM. Mathieu Calame
,
Philippe Cacciabue
,
Olivier Ranke,
la Ferme de la Bergerie
-
Mme Élisabeth Bourgain
, Directeur de l'Association
Ebullition
-
MM. David Delaunay
et
Laurent Autier
, Animateurs de
l'Association Ebullition
-
Mme Awa Traoré
-
Mme Josyane Belabdelkader
-
Mme Martine Crépin
-
M. Salah Taïbi
, Directeur de l'Association Halage
-
M. Dieter Becker
, Directeur de l'Association Idemu (Institut
d'écologie en milieu urbain)
-
Mme Houria Seddiki
, Présidente de l'Association Soleils.
III. PERSONNES AYANT CONTRIBUÉ À LA DÉFINITION DU
CADRE INITIAL DE LA MISSION TERRITOIRES PÉRIURBAINS
-
Mme Céline Braillon
, Chargée de mission
" Environnement et développement durable " -
Délégation interministérielle à la ville et au
développement social urbain ;
-
Mme Mireille Celdran
, Chargée de mission, Ministère
de l'Agriculture, Direction de l'Espace Rural et de la Forêt ;
-
Mme Liliane Duport
, chargée du bureau de l'environnement
urbain et de l'aménagement du territoire, ministère de
l'environnement, direction de la nature et des paysages ;
-
M. Jean Lafont
, Ingénieur en chef des Ponts et
Chaussées, chargé de la sous-direction de l'Évaluation
environnementale et de l'aménagement durable, Ministère de
l'Environnement, Direction de la Nature et des Paysages ;
-
M. Christian Moreau
, Architecte et urbaniste ;
-
M. Guy Poirier
, conseiller technique auprès du Directeur
de l'Espace Rural et de la Forêt au Ministère de
l'Agriculture ;
-
M. Jacques Pouye
, Chef de la Mission de l'Environnement urbain,
Direction régionale de l'Environnement, région Ile de
France ;
-
Mme Carolle Reboul
, Chargée de mission pour les PNR,
Ministère de l'Environnement, Direction de la Nature et des
Paysages ;
-
Melle Corinne Sausse
, Directrice de " Rambouillet Animation
Jeunesse " ;
- Mme Marie-Noëlle Sereni
, Chargée de mission,
délégation à l'aménagement du territoire et
à l'action régionale.
ANNEXE N° 2
LES TRAVAUX DU GROUPE
D'EXPERTS " ENVIRONNEMENT URBAIN " AUPRÈS DE LA COMMISSION
EUROPÉENNE SUR LA PLANIFICATION SPATIALE DURABLE69(
*
)
En
1989
, " le Livre vert sur
l'environnement ", publié par la Commission européenne,
montre clairement combien les préoccupations d'environnement dans la
ville sont complexes à traiter. La ville est considérée
comme un écosystème qui comprend le paysage urbain, un milieu
avec ses caractéristiques propres (favorables et défavorables),
et une organisation sociale particulière, avec des problèmes
économiques aigus à résoudre.
Le " Livre vert " constate aussi le caractère commun des
problèmes auxquels les villes européennes sont
confrontées. A la lumière des lignes d'actions de ce texte, une
résolution du Conseil européen de janvier 1991 a invité la
commission à créer un groupe d'experts (constitué
d'experts indépendants et de représentants nationaux) avec la
mission de formuler des recommandations sur les moyens de développer la
dimension " environnement urbain " dans la politique de
l'environnement de la communauté.
La complexité du concept de développement urbain durable
va de pair avec la prise en compte de l'incertitude et la
nécessité de " précautions " pour
préserver le bien être des générations futures.
Cette évolution induit, dans les champs professionnels, des pratiques
plus souples et plus proches des habitants des villes. C'est aussi une nouvelle
expression de la démocratie plus participative qui permet
d'élaborer si ce n'est des consensus au moins des compromis acceptables
et transparents.
En
1993
, reconnaissant l'extension des concepts d'environnements urbain
et de ville écologique vers la dimension de
développement
urbain durable
, le groupe d'experts a mis en place le projet " villes
durables européennes " dans la perspective de la deuxième
conférence européenne des villes durables en octobre 1996
à Lisbonne. Ce projet visait principalement à :
- encourager une réflexion approfondie sur la durabilité
dans les établissements urbains européens et susciter un vaste
échange d'expériences ;
- faire connaître les meilleures pratiques en matière de
développement urbain durable, notamment sur la mise en oeuvre de
l'approche écosystémique à travers des stratégies
globales et intégrées ;
- formuler des recommandations destinées à orienter la
politique de l'Union européenne, des Etats membres, des régions
et des collectivités locales, comme le préconise la
résolution du Conseil de 1991.
Le
rapport " villes durables européennes
" est un des
principaux fruits de ce projet. Il a constitué un document de
réflexion essentiel pour la conférence de Lisbonne et a pour
thème central l'application du concept de durabilité en zone
urbaine. Il s'intéresse non seulement aux villes, mais aussi aux
agglomérations urbaines de toutes tailles, groupements de villes, villes
moyennes, centres urbains, banlieues. Il aborde également la question de
la durabilité des régions urbaines et de tout le système
urbain. Le groupe d'experts estime que les principes du développement
durable et les mécanismes qui mènent à ce
développement sont applicables à tous les échelons de la
hiérarchie des établissements urbains. Cependant, ses travaux ont
essentiellement porté sur la ville. La réalisation du
développement urbain durable suppose un regard neuf sur les politiques
et les mécanismes actuels, et un ensemble cohérent de principes
capables d'étayer des
mesures écologiquement rationnelles
.
La planification spatiale est un sujet fondamental pour les travaux du groupe
d'experts sur l'environnement urbain, dont le mandat officiel consiste
notamment à " examiner de quelle manière les
stratégies de planification concernant les zones urbaines et
l'affectation des sols pourront à l'avenir englober des objectifs
environnementaux ". Le projet " villes durables " a permis au
groupe d'experts d'aborder également cette question et d'étendre
son champ d'activité pour y inclure non seulement des objectifs
écologiques, mais aussi des objectifs de durabilité.
Le rapport " villes durables européennes " constate que le
développement urbain durable peut se réaliser uniquement dans le
cadre d'une planification respectueuse de l'environnement.
La planification écologique de la ville présente des outils
intéressants pour progresser sur la voie du développement urbain
durable, si les impacts environnementaux sont pris en compte au stade des
démarches préalables (du type diagnostics urbains ou
éco-audits) ou à travers des politique horizontales des plans et
des programmes.
La planification spatiale vise à réguler l'occupation des sols en
fonction de l'intérêt public. Des systèmes poursuivant cet
objectif ont été mis en place dans tous les pays de l'Union
européenne, mais le champ d'action et le mode de fonctionnement de
chacun différent. Appelés tantôt systèmes de
planification urbaine, spatiale, physique ou territoriale, tantôt
systèmes de gestion de l'espace, ils remplissent
généralement deux fonctions :
élaboration de plans (mise en place de cadres au moyen de
stratégies et de projets d'aménagement définis à
des échelles géographiques diverses allant du niveau national au
niveau local) ;
contrôle du développement par des procédures
législatives ou administratives applicables au niveau local pour
contrôler l'implantation et la forme des aménagements.
Une des préoccupations majeures en matière de planification
durable est la vitesse à laquelle l'urbanisation " consomme "
la ressource limitée qu'est le sol dans les pays de l'Union
européenne. Les modifications irréversibles de l'utilisation des
sols, et surtout celles qui réduisent la diversité biologique,
posent un problème particulier du point de vue de la durabilité.
Sur un plan plus général, malgré la tradition de vie
urbaine que cultivent beaucoup de pays européens, la plupart des villes
ont connu, ces dernières décennies, une déconcentration de
la population et de l'emploi qui a conduit à un étalement des
banlieues.
A l'extension des villes vers la périphérie est venue s'ajouter
l'apparition de nouvelles formes de développement du commerce et des
affaires. Les années quatre-vingts ont été marquées
par des investissements considérables dans de nouveaux types de parcs
industriels et de centres commerciaux périphériques qui ont
cherché à s'implanter dans des endroits faciles d'accès en
bordure des villes, où ils ont créé leur propre
environnement. Ces tendances se sont particulièrement manifestées
en France, en Espagne et en Grande-Bretagne, entre autres parce que les
systèmes de planification territoriale de ces pays ont été
plus sensibles aux pressions du marché. Mais, ces aménagements
péri-urbains commencent à menacer la vitalité des centres
urbains.
L'étalement des villes et la séparation de plus en plus nette des
activités (habitation, travail, commerce) ont renforcé la
croissance du trafic automobile qui, à son tour, a accru la consommation
d'énergie et les émissions. Elles ont également
réduit l'efficacité et donc la fréquentation des
transports publics. Les systèmes de zonage rigide et les
préférences en matière d'investissements ont trop souvent
encouragé des aménagements monovalents, contraires à la
diversité que les villes européennes ont hérité de
leur histoire et de leur géographie complexes.
Les recommandations formulées par le groupe d'experts au sujet de
l'occupation du sol
reconnaissent les difficultés et cherchent
à renforcer les régimes de planification spatiale existants, en
encourageant des méthodes plus globales et intégrées
à savoir :
La planification urbaine doit informer très en amont sur la
destination future des sols et elle doit obligatoirement être
accompagnée d'une étude environnementale.
Les POS doivent assurer la mixité fonctionnelle des espaces. Les
systèmes de planification spatiale qui se fondent sur le zonage doivent
être assouplis pour s'adapter à cette évolution.
La restructuration de l'industrie et des grands équipements a
laissé des friches souvent contaminées dans le tissu urbain tout
en augmentant la pression foncière sur les espaces ouverts et ruraux. Il
est urgent d'assurer la réutilisation des terrains
désaffectés, ou abandonnés qui n'ont jamais
été aussi nombreux dans l'histoire industrielle de la ville.
La reconversion de sites déjà aménagés et, le
cas échéant, de bâtiments existants peut être
considérée en soi comme une contribution à l'objectif de
durabilité
; elle offre la possibilité de conserver des sites
vierges ainsi que de protéger les espaces ouverts et la nature.
La décontamination des sols pollués est une des grandes
préoccupations de nombreux projets de régénération
urbaine. Les techniques de nettoyage entraînent parfois des
opérations coûteuses. La décontamination doit être
considérée comme une étape d'un processus
intégré qui envisage le site à réhabiliter dans son
contexte global.
Le patrimoine culturel, qui est l'expression de l'identité
culturelle d'une ville et de ses habitants doit se manifester dans le centre
historique, la banlieue et les zones d'influences de manière
diversifiée.
Les activités récréatives et touristiques peuvent
avoir une incidence considérable sur la qualité du patrimoine
culturel d'une localité. Une ville historique ou architecturalement
remarquable attire les touristes ; ce phénomène a des effets
économiques et sociaux favorables, mais il peut aussi compromettre le
développement durable de la cité, surtout du point de vue social
et écologique.
Afin de réduire les besoins de déplacements automobiles, la
planification spatiale doit être complétée par des mesures
fiscales restrictives, telles la tarification routière et la
modération du trafic mais aussi par la mise en place de transports en
commun performants et confortables.
L'utilisation de la planification pour influencer le métabolisme
urbain est un mécanisme à long terme car les réalisations
nouvelles représentent une faible proportion de l'urbanisation existante
; elles sont cependant essentielles pour l'élaboration de mesures plus
strictes, afin de préserver le cadre de vie des
générations à venir.
ANNEXE N° 3
TABLE DES SIGLES
UTILISÉS DANS LE RAPPORT
ACRN |
Association communautaire de la région nantaise |
AFTRP |
Agence foncière de la Région parisienne |
AOC |
Appellation d'origine contrôlée |
DATAR |
Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale |
DERF |
Direction de l'espace rural et de la forêt |
DIV |
Délégation interministérielle à la ville |
DTA |
Directive territoriale d'aménagement |
EDF |
Electricité de France |
EPBS |
Etablissement public de la Basse Seine |
EPML |
Etablissement public de la métropole Lorraine |
FNAFU |
Fonds national d'aménagement foncier et d'urbanisme |
INSEE |
Institut national de la statistique et des études économiques |
PAZ |
Plan d'aménagement de zone |
PDIR |
Plan départemental des itinéraires et randonnées |
PMPOA |
Programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole |
PNR |
Parc naturel régional |
POS |
Plan d'occupation des sols |
SAFER |
Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural |
SAR |
Schémas d'aménagement régional |
SAU |
Surface agricole utile |
SDAV |
Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme |
SDRIF |
Schéma directeur de la Région Ile-de-France |
SEGESA |
Société d'études géographiques, économiques et sociologiques |
SMVM |
Schéma de mise en valeur de la mer |
TDENS |
Taxe départementale des espaces naturels sensibles |
TLE |
Taxe locale d'équipement |
TVA |
Taxe à la valeur ajoutée |
ZAC |
Zone d'aménagement concerté |
ZAD |
Zone d'aménagement différé |
ZFU |
Zones franches urbaines |
Zones " NA " |
Zones d'urbanisation future |
Zones " NC " |
Zones de richesse naturelle |
ZPIU |
Zone de peuplement industriel ou urbain |
ZRU |
Zones de redynamisation urbaine |
EXAMEN DU RAPPORT
Au cours d'une réunion tenue le mardi 5 mai sous la
présidence de M. Jean François-Poncet, président, la
commission des Affaires économiques a procédé à
l'examen du rapport d'information de M. Gérard Larcher sur la gestion
des espaces périurbains.
Après que M. Gérard Larcher, rapporteur, eut
présenté les grandes lignes de son rapport et ses propositions,
M. Jean François-Poncet, président, est intervenu pour souligner
l'importance du sujet traité, en termes d'aménagement du
territoire, et observer que la réalité des espaces
périurbains concernait désormais tout le territoire national.
Répondant à M. François Gerbaud qui s'inquiétait du
sort réservé à l'espace rural, en évoquant la
perspective d'une modification de la loi d'orientation n° 95-115 du 4
février 1995 pour l'aménagement et le développement du
territoire, M. Gérard Larcher, rapporteur, a souligné que la
reconnaissance d'une vocation particulière des espaces
périurbains s'inscrivait pleinement dans la politique
d'aménagement du territoire et mettait fin à une opposition
stérile et destructrice entre villes et campagne.
M. Pierre Hérisson s'est déclaré favorable aux
propositions du rapporteur et a rappelé l'impact très positif des
parcs naturels régionaux (PNR) en matière de développement
économique. Soulignant que la formule des PNR ne devait pas être
utilisée sans discernement, il a précisé qu'en zone de
montagne les PNR pouvaient constituer une réponse appropriée car
moins de 10 % de ce territoire spécifique était urbanisable.
Lui répondant, M. Gérard Larcher, rapporteur, a fait valoir que
la création de terroirs urbains et paysagers reprenait les
éléments forts qui sous-tendaient la réussite des PNR,
à savoir un consensus local concrétisé par une charte et
un engagement de l'Etat exprimé par la délivrance d'un label.
Répondant à M. Jean-Paul Emorine, qui s'interrogeait sur la
nécessité d'octroyer des droits à produire
spécifiques dans les zones périurbaines, M. Gérard
Larcher, rapporteur, a cité une enquête de la Chambre
d'Agriculture et de la Direction départementale de l'Agriculture et de
la Forêt de Loire-Atlantique qui conclut à la
nécessité de protéger les droits à produire -et
notamment les quotas laitiers dans ces zones-, afin d'assurer la
pérennité agricole.
A M. Philippe François qui lui faisait part de son accord sur le
principe d'une expérimentation d'un terroir urbain et paysager dans le
secteur des boucles de la Marne et de l'Ourcq, M. Gérard Larcher,
rapporteur, a indiqué qu'il s'agissait d'apporter une réponse
spécifique et novatrice aux demandes des collectivités locales.
Après l'intervention de M. Gérard César qui souhaitait
qu'une suite concrète puisse être donnée aux propositions
du rapporteur, MM. Jean François-Poncet, président, et
Gérard Larcher, rapporteur, ont fait valoir que l'examen du projet de
loi à venir sur l'aménagement du territoire offrirait une
première occasion d'inscrire dans le droit ces propositions.
1
Cf. G. Bauer et J.M. Roux,
" La rurbanisation ou la ville éparpillée ", Paris,
éditions du Seuil, 1976, 189 pages.
2
Cette formule de M. Jean-François Gravier est reprise par
MM. Bauer et Roux dans l'ouvrage précité.
3
SEGESA, Entre ville et campagne, les espaces de
périurbanisation, Paris, 1994, 97 pages.
4
SEGESA, Entre ville et campagne, les espaces de
préurbanisation, Paris, 1994, 97 pages.
5
Cf. Thomas Le Jeannic : " Une nouvelle approche territoriale
de la ville ", dans Economie et statistique, n° 294-295, 1996,
pages 25 à 46.
6
Thomas le Jeannic " Radiographie d'un fait de
société : la périurbanisation " dans INSEE
Première n° 535, juin 1997.
7
Bertrand Hervieu et Jean Viar, Au bonheur des campagnes, Paris Les
éditions de l'Aube, 1996, p. 110.
8
Bertrand Hervieu et Jean Viar, Au bonheur des campagnes, Paris Les
éditions de l'Aube, 1996, p. 110.
9
Michel Kotas, Rapport de mission sur la politique des pays, Paris,
DATAR, 1996, page 56.
10
Bertrand Hervieu et Jean Viar, Au bonheur des campagnes, Paris
Les éditions de l'Aube, 1996, p. 116.
11
Circulaire n° 96-32 du 13 mai 1996.
Ministère de l'Equipement du Logement, des Transports et du Tourisme.
12
Dominique Legrain, Le conservatoire du littoral, Paris-Arles,
Actes Sud, 1997, p.24.
13
SEGESA, Entre ville et Campagne : les espaces périurbains,
Paris, 1994, pages 42 et suivantes.
14
Le régime juridique de chacune de ces procédures
est fixé par les articles L.123-4, L.123-7-1, R.123-34 et R.123-35
du code de l'urbanisme.
15
Source DDAF des Bouches du Rhône
16
Segesa, Entre villes et campagne [...], ouvrage cité,
page 43.
17
Louis Lorvellec, " La prise en compte du
développement urbain dans les procédures d'aménagement
rural ", dans la Revue de droit rural, n° 179, janvier 1990,
page 48.
18
En installant la Fédération des Parcs naturels de
France, le 17 novembre 1971, Robert Poujade assigne aux Parcs
naturels régionaux le rôle de " zones
privilégiées d'aménagement fin du territoire ".
19
Marie-Laure Lambert - Les parcs naturels régionaux -
Juris-Classeur Environnement 1995.
20
Jean-François Théry - Journées de la DATAR
- Aix-en-Provence, septembre 1966.
21
Réponse à la question écrite de M. J.P.
Raffarin sur l'évaluation des actions des parcs naturels
régionaux. J.O. Sénat 12 mars 1998.
22
Les parcs naturels régionaux, Marie-Laure Lambert - Juris
Classeur 1995.
23
" Les parcs naturels ont 30 ans ", Magazine de la
Fédération des PNR (n°30-Juin 1997).
24
Parcs naturels régionaux, Marie-Laure Lambert - Juris
Classeur 1995.
25
Article R.244-4 du code rural.
26
L'articulation de la charte avec les autres documents d'urbanisme
ou de planification de l'environnement. Henri Jacquot. RJDE 1997, n°4
27
Avis du Conseil d'Etat (27 octobre 1997) sur
l'applicabilité du schéma directeur de la région
Ile-de-France (SDRIF) sur les territoires des parc naturels régionaux
28
Article L-123-1 du code de l'urbanisme.
29
Selon les statistiques de la Direction de l'aménagement
foncier et de l'urbanisme du ministère de l'Équipement.
30
SEGESA, " Entre ville et campagne [...] ", ouvrage
cité, page 23.
31
DDAF des Bouches-du-Rhône
32
Conseil d'État, L'urbanisme, pour un droit plus
efficace
,
Paris, 1992
,
page 84.
33
Conseil d'État, L'urbanisme, pour un droit plus
efficace
,
Paris, 1992
,
page 87.
34
Code de l'urbanisme, article L-122-1, 1er alinéa.
35
Selon les statistiques de la Direction de l'aménagement
foncier et de l'urbanisme du ministère de l'Équipement.
36
SEGESA, " Entre ville et campagne [...] ", ouvrage
cité page 38.
37
Code de l'urbanisme, article L-212-1 et suivants.
38
Pierre Soler-Couteau, Droit de l'urbanisme, Paris, Dalloz, 1996,
page 249.
39
Code de l'urbanisme, article L.313-1.
40
On n'évoquera ici ni les huit établissements
publics d'aménagement des villes nouvelles ni l'Établissement
public d'aménagement de la Défense.
41
Henri Beaugé, Lurs en Provence - 1966 - Extrait de
"Les parcs naturels régionaux ont 30 ans !
Fédération des PNR en France, 1997.
42
Cf projet de loi de finances pour 1997, Effort financier
consacré à la politique des villes et au développement
urbain, Paris, Imprimerie Nationale, 1996, 99 pages.
43
Bertrand Hervieu et Jean Viar, Au bonheur des campagnes, Paris
Les éditions de l'Aube, 1996, p. 113.
44
Les entrées de villes ou redonner le goût de
l'urbanisme. Rapport de M. Ambroise Dupont, sénateur, octobre 1994.
45
Circulaire n° 96-32 du 13 mai 1996 pour
l'application de l'article L.111-1-4 du code de l'urbanisme.
46
Articles 4 et 6 du décret n° 80-924 du
21 novembre 1980.
47
CE 29 juillet 1994 - Société Seyag
Electronique.
48
CE 31 juillet 1996 - Commune d'Alberville.
49
Réponse à la question écrite de M.
Léonce Desprez n° 3308 (JO AN du 9 mars 1998 p.1332).
50
Michèle Prats. Rapport d'évaluation des politiques
d'ENS menées par les départements, 1997.
51
Conseil d'Etat. 16 juin 1995 ; préfet des Yvelines.
52
cf. par exemple Patrick Hockreitère,
" Problèmes actuels des schémas directeurs " dans Droit
et ville, 1991, n° 32 pages 133-142 ; Luc Vasselin, " La relance
des schémas directeurs " dans Études foncières, 1991,
n° 50 pages 20-23 ; Jean-Luc Maillot, " Une nouvelle donne pour
le schéma directeur " dans Les Petites Affiches, 1993,
n° 20, pages 4-7 et plus récemment dans le rapport
établi par M. Gilbert Santel, délégué à la
modernisation et à la déconcentration, 1997, page 9.
53
cf. Michel Kotas, Rapport sur la politique des pays, DATAR,
1997, page 37.
54
Comme l'ont montré les travaux de la commission
thématique " Ville organisation des territoires et services
collectifs ", l'agglomération est dessinée par son
réseau de transport en commun péréqué. (cf.
schéma national d'aménagement du territoire, propositions des
commissions thématiques, la Documentation Française, 1995, page
66).
55
Article L.141-5 du code rural.
56
L'administration fiscale procède cependant à une
majoration systématique de la valeur locative cadastrale qui sert
à calculer le prix agricole des terres, afin de limiter l'ampleur de la
sous-évaluation par rapport au marché.
57
René Hostiou, " La non-indemnisation des servitudes
d'urbanisme " dans L'Actualité juridique droit administratif, 20
mai 1993, page 27.
58
Source : DDAF, Chambre d'Agriculture, Opération
groupée d'aménagement foncier, Nord de Nantes, 1997, page 10.
59
Journal officiel Sénat, séance du 28 avril 1998,
page 1918.
60
Développement urbain et Agriculture - Diagnostic -
Propositions - District de Nantes.
61
UTH : Unité de Travail Humain
62
Jean-Louis- Lenclos - la taxe départementale des espaces
naturels sensibles - RJDE n° 2-1997, page 196 et suivantes.
63
Jean-Louis Lenclos (étude précitée).
64
Jean-Louis Lenclos (étude précitée).
65
Comme le rappelle le XVè rapport du Conseil des
Impôts, 39 groupements de communes dont
quatre communautés de ville ont opté pour le régime
de la taxe professionnelle d'agglomération.
66
CES, Rapport sur la question foncière
précité, page 78.
67
La fiscalité de l'espace naturel en France - Guillaume
Sainteny - Mars 1991.
68
M. Jean-François Le Grand - La protection de
l'environnement rural - Rapport au Premier Ministre - 1993.
69
Contribution de Mme Nédialka Sougareva,
sous-direction de l'évaluation environnementale et de
l'aménagement durable au ministère de l'aménagement du
territoire et de l'environnement.