1. Un consensus local sanctionné par un label national
Le fonctionnement d'un parc naturel régional est, dès l'origine, caractérisé par le consensualisme, puisque la procédure de création nécessite l'accord convergent de l'Etat et des collectivités territoriales.
a) Une initiative locale et collective
L'article L. 244-1 du code rural issu de la loi
n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en
valeur du paysage dispose que
l'initiative de la création d'un parc
naturel régional revient à la région avec l'accord de
l'ensemble des collectivités territoriales concernées
et en
concertation avec les partenaires intéressés.
Parmi les collectivités territoriales, le rôle de la
région est déterminant tant en ce qui concerne l'initiative de la
démarche qui fait l'objet d'une délibération
motivée du Conseil régional, que lors de l'élaboration de
la charte et de la définition du périmètre, ainsi que pour
la définition des modalités de participation des autres
collectivités locales à l'élaboration de la charte.
Mais si l'action de la région est déterminante à chaque
étape de la procédure,
l'accord des collectivités
territoriales comprises dans le périmètre est incontournable
et le régime juridique des parcs naturels régionaux a
été progressivement renforcé sur ce point. En effet
initialement, le décret de 1967, au-delà de l'initiative
laissée aux communes et aux départements, donnait tous les
pouvoirs à l'administration de l'Etat pour gérer le
déroulement de la procédure sans imposer la consultation des
collectivités concernées, sur le projet de charte ni leur accord
final.
La reconnaissance en 1982 du principe d'autonomie des collectivités
territoriales, ayant pour corollaire l'exclusion de toute tutelle d'une
collectivité sur une autre, la réglementation sur les parcs
naturels régionaux a été adoptée afin
d'éviter qu'une initiative régionale ne puisse s'imposer aux
communes sans leur laisser la possibilité de revenir en arrière
pendant le déroulement de la procédure.
L'article L. 244-1 du code rural issu de la loi du
8 janvier 1993 donne donc force législative au principe de
l'accord de l'ensemble des collectivités territoriales concernées.
Le décret du 1er septembre 1994 fait application de ce
principe en prévoyant que la délibération du Conseil
régional doit prévoir les modalités de l'association des
communes à l'élaboration de la charte et qu'in fine, le projet de
charte est transmis pour accord aux départements et aux communes
territorialement concernés. L'absence de réponse dans un
délai de quatre mois vaut refus du projet de charte. Enfin, la liste des
communes ayant approuvé la charte et adhéré à
l'organisme de gestion est annexée à la charte.
S'agissant de
l'organisme de gestion d'un parc naturel régional
,
la réglementation encourage également une large participation de
toutes les collectivités territoriales concernées :
" l'évolution des textes met l'accent sur la liberté des
communes et le volontarisme qui caractérisent l'esprit des
PNR
"
19(
*
)
. Si, à
l'origine, les autorités locales avaient toute latitude pour choisir la
forme juridique de l'organisme chargé de la mise en oeuvre de la charte
-association de la loi de 1901, fondation reconnue d'utilité publique,
syndicat mixte-, la formule du syndicat mixte s'est progressivement
imposée et la circulaire du 28 juillet 1989 indique qu'il est
préférable que l'organisme de gestion soit un syndicat mixte
" regroupant toutes les collectivités territoriales
concernées ".
Cette formule présente de nombreux avantages : tout en laissant aux
collectivités territoriales la maîtrise de la gestion du parc,
elle permet la participation des chambres professionnelles et garantit la
pérennité de l'institution. Dans les faits cependant, et pour des
raisons budgétaires -admission au fonds de compensation pour la TVA,
éligibilité à la dotation globale d'équipement,
exonération de la taxe sur les salaires- les deux-tiers des syndicats
mixtes qui gèrent des parcs sont des syndicats mixtes fermés,
composés des seules collectivités territoriales. Les autres
organismes publics peuvent participer aux réunions du comité
syndical avec voix consultative ou être associés à des
actions spécifiques par la voie de conventions signées avec le
syndicat mixte.
Rappelons, enfin, que les communes adhérant à la charte doivent
en appliquer les orientations dans l'exercice de leurs compétences sur
le territoire du parc. Elles assument également une part essentielle du
financement de celui-ci, aux côtés de la ou des régions
concernées.
b) L'engagement de l'Etat à travers la délivrance d'un label national
"
Tout parc naturel régional doit
procéder d'un esprit commun, aussi faut-il déposer la marque pour
la protéger et garder l'attribution de cette marque au niveau national,
par une instance officielle unique pour que soit préservée
l'unité
"
20(
*
)
.
Le concept des parcs naturels régionaux s'appuie sur la
décentralisation, qui suppose un financement partagé entre Etat
et collectivités locales, et sur un système de codécision
pour la création et le contrôle des parcs qui assure la
cohérence interne et l'unité du réseau. L'Etat,
responsable de l'attribution du label national, est donc le garant de cette
cohérence, et en contrepartie, il prend un certain nombre d'engagements.
Cet engagement se concrétise tout au long de la procédure de
création d'un parc puisque le Préfet de région,
destinataire de la délibération du Conseil régional
prescrivant l'élaboration du parc définit avec le
Président du Conseil régional les modalités d'association
de l'Etat à son élaboration, notamment la liste des services de
l'Etat qui seront associés. Le projet de charte approuvé,
accompagné des accords des collectivités territoriales est
transmis au Ministre chargé de l'environnement par le Préfet de
région qui donne un avis motivé.
La décision de classement appartient in fine au Ministre en charge de
l'environnement qui peut consulter les différents ministères
intéressés (agriculture, intérieur, finances, industrie,
tourisme, aménagement du territoire) et soumet le projet à l'avis
du Conseil national de la protection de la nature et de la
Fédération des parcs naturels régionaux.
Faute de réponse dans les deux mois pour ces consultations et avis, il
est passé outre. La décision de classement prise par
décret vaut adoption de la charte constitutive pour une durée
maximale de dix ans.
Le classement permet d'utiliser la dénomination " parc naturel
régional " ainsi que l'emblème du parc, déposé
par le ministre chargé de l'environnement, à l'Institut national
de la propriété industrielle, sous la forme de marque collective.
Responsable de ce label
décerné au niveau national,
l'Etat s'assure que les collectivités adhérentes et
l'organisme chargé de la gestion
du parc respectent le contenu de
la charte. Ce contrôle s'exerce notamment à l'occasion du
renouvellement de la charte, qui est assuré par le gestionnaire du parc
naturel régional selon les mêmes règles de fond et de
procédure qu'au départ. Elle se fait à partir d'un
inventaire du patrimoine et des enjeux culturels sociaux et économiques,
accompagné d'un bilan des actions du parc comparé aux engagements
inscrits dans la charte.
Très récemment, a été mise en place à
l'initiative du ministère en charge de l'environnement une
procédure d'évaluation intermédiaire à cinq ans de
la mise en oeuvre de la charte. Répondant à une question
écrite posée par M. Jean-Pierre Raffarin, la ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement justifie ce nouveau
dispositif compte tenu de la durée du classement, et souligne
l'intérêt d'une meilleure "
concertation entre les acteurs
du parc et leurs partenaires impliqués dans la mise en oeuvre de la
politique des parcs naturels régionaux au niveau régional et
national
". Cette évaluation peut ainsi fonctionner comme un
système d'alerte ou souligner les progrès accomplis dans la mise
en oeuvre de la charte, ce qui devrait "
renforcer l'efficacité
de l'action du parc sur les dernières années de validité
de son classement et ainsi préparer le renouvellement de classement
à terme
".
21(
*
)
En cas de non respect du contenu de la charte, la seule sanction envisageable
est ministérielle et se traduit par le retrait du label ou son non
renouvellement. Le seul exemple à ce jour est celui du Parc naturel du
Marais Poitevin, en 1997. Sur ce territoire, l'Etat a constaté
l'insuffisante préservation du patrimoine et la disparition de 40% des
prairies humides, du fait d'un système administratif et
économique aberrant, favorisant le remembrement et le drainage des
terres.
Outre son pouvoir de contrôle, l'Etat est également partenaire et
donc signataire de la charte du parc. Dans les trois mois suivant la
publication du décret de classement, le Préfet de région
signe une convention d'application de la charte qui précise les
modalités selon lesquelles l'Etat exerce ses compétences sur le
territoire du parc pour respecter les orientations de la charte, ainsi que les
moyens qu'il y consacre.
Enfin, l'Etat apporte une aide financière tant au fonctionnement qu'aux
dépenses d'équipement des parcs naturels régionaux. Depuis
1978, cette participation figure sur une ligne budgétaire
spécifique du ministère de l'environnement.
Ces crédits figurent aux contrats de plan Etat-région, ce qui
assure aux parcs naturels régionaux une certaine stabilité
financière, et renforce le caractère partenarial de
l'intervention de l'Etat. Globalement, au titre de la loi de finances pour
1998, la dotation de l'Etat -fonctionnement et intervention- s'est
élevée à 43 millions de francs.
En moyenne la participation de l'Etat, s'agissant du financement des
études préalables à la création d'un parc ou des
dépenses d'équipements s'élève à 13 %,
mais avec de fortes disparités selon les parcs (3 % pour le parc
naturel de La Brenne et 33,7 % pour le parc des Ballons des Vosges). On
constate les mêmes différences pour la participation aux
dépenses de fonctionnement, qui s'élève, en moyenne,
à 10 % mais varie de 3 % (parc naturel de la Corse) à
22,5 % pour le parc de Haute Vallée de Chevreuse.