C. EXAMEN DU RAPPORT D'INFORMATION DE M. CHRISTIAN DE LA MALÈNE SUR LE TRAITÉ D'AMSTERDAM
Le mercredi 1er octobre 1997, la délégation a
examiné le projet de rapport d'information de M. Christian de La
Malène sur le traité d'Amsterdam.
M. Christian de La Malène
présente tout
d'abord les principales dispositions du traité, abordant tour à
tour les questions institutionnelles et les modifications apportées
à chacun des trois piliers de l'Union européenne. Puis, dans un
second temps, il apporte des éléments d'appréciation sur
ce texte, en soulignant notamment les points suivants :
- le traité renvoie à plus tard la solution du principal
problème qu'il a à résoudre, l'adaptation des institutions
dans la perspective de l'élargissement ; le protocole mentionnant
la nécessité d'une réforme avant l'élargissement
n'offre aucune garantie véritable car il est rédigé en de
tels termes qu'il n'a pas par lui-même de force obligatoire ;
- le seul changement important est l'accroissement des pouvoirs du Parlement
européen ; en l'absence d'une réforme corrélative de
la Commission et du Conseil, il pourrait altérer l'équilibre des
institutions et porter atteinte à l'indépendance de la Commission
qui est un des éléments essentiels du système
institutionnel communautaire ;
- quelques avancées non négligeables ont été
accomplies dans le sens d'un renforcement de la PESC, mais elles ne
s'accompagnent d'aucun véritable progrès dans le domaine de la
défense, et la cohérence du dispositif est compromise par le
classement des crédits de la PESC en dépenses non
obligatoires ;
- la réforme du troisième pilier aboutit à un dispositif
complexe qui risque de ne pas apporter le surcroît d'efficacité
qui serait nécessaire dans la lutte contre la grande délinquance
internationale ;
- l'affirmation plus explicite de la dimension humaine et sociale de la
Communauté répond à une attente des opinions, mais les
orientations fondamentales de la construction européenne ne s'en
trouveront pas bouleversées ;
- sur un certain nombre de points particuliers, à la demande de tel ou
tel pays ou groupe de pays, le nouveau traité va combler des lacunes. La
France a ainsi obtenu au moins partiellement satisfaction pour certaines de ses
demandes ponctuelles : meilleure reconnaissance de la notion de service
public, statut particulier des DOM, confirmation du siège du Parlement
européen...
Concluant son propos, M. Christian de La Malène estime
que la réalisation de l'Union économique et monétaire
apparaît plus que jamais comme le ciment essentiel de la construction
européenne dans les années qui viennent, et que, dès lors,
la physionomie de l'Europe à venir semble celle d'une union
économique, certes fortement structurée par des politiques
communes et par une union monétaire, mais sans véritable
dimension politique au sens d'une volonté d'agir ensemble et d'affirmer
une identité commune sur la scène internationale.
Enfin, il ajoute que la jurisprudence du Conseil Constitutionnel donne à
penser qu'il serait nécessaire de réviser la Constitution
préalablement à la ratification du traité d'Amsterdam.
M. Jacques Genton
se félicite que le rapport donne une
vue d'ensemble des problèmes posés par le traité
d'Amsterdam.
M. Xavier de Villepin
demande des précisions sur
la date de ratification du traité et sur l'initiative conjointe de la
Belgique, de la France et de l'Italie pour une relance du processus de
réforme. Il s'interroge sur l'éventualité d'un
résultat négatif lors du référendum au Danemark.
M. Christian de La Malène
indique que, compte
tenu des risques d'interférence entre le débat sur le
traité et les décisions sur l'euro, il lui paraît probable
que le processus de ratification s'engagera plutôt dans la
deuxième moitié du premier semestre de 1998. Il précise
que l'initiative évoquée a pris la forme d'une déclaration
annexée au traité, sans portée contraignante, soulignant
la volonté des signataires d'établir un lien entre la
réforme des institutions et les premières négociations
d'élargissement, et mettant l'accent sur la nécessité
d'étendre le champ des décisions à la majorité
qualifiée.
M. Denis Badré
exprime sa perplexité devant le
dispositif prévu pour les coopérations renforcées,
craignant que ce nouveau dispositif ne décourage les coopérations
renforcées à l'extérieur de l'Union tout en les rendant
très difficiles à l'intérieur de celle-ci, même si
le nouveau texte ouvre malgré tout certaines possibilités. Il se
déclare déçu par l'absence de réforme
institutionnelle préalable à l'élargissement. Le
Gouvernement, estime-t-il, a commis une erreur en relançant inutilement
le débat sur le pacte de stabilité au moment même où
les négociations institutionnelles entraient dans leur phase finale. Le
protocole sur les institutions annexé au traité, ajoute-t-il,
n'offre aucune garantie, et la déclaration de la Belgique, de la France
et de l'Italie n'a en réalité qu'une portée
réduite. Concluant son propos, il s'interroge sur l'opportunité
de ralentir le processus d'élargissement, la réforme des
institutions devant être prioritaire.
M. Christian de La Malène
souligne que
l'élargissement à l'Est est un processus de portée
historique et de caractère irrésistible, tandis que le
déroulement de la Conférence intergouvernementale a montré
qu'il n'existe pas de véritable mouvement de fond pour une
réforme des institutions. Cet écart, ajoute-t-il, est d'autant
plus préoccupant qu'il sera plus difficile encore de réformer les
institutions quand l'Union aura entamé son élargissement.
M. Denis Badré
estime que, dans ces conditions, on ne
peut plus que compter sur le rôle intégrateur de l'euro.
Mme Danielle Bidard-Reydet
s'interroge sur les
modalités de ratification du traité.
M. Christian de La Malène
, approuvé par
M. Jacques Genton
, estime que ce texte ne donnera pas lieu à
un référendum, mais à une approbation parlementaire.
M. Pierre Fauchon
se préoccupe de voir l'Allemagne en dehors
de l'initiative italo-franco-belge. A Maastricht, observe-t-il, l'Allemagne
était prête à avancer vers l'intégration politique,
la France plus prudente : aujourd'hui les rôles sont
renversés. Puis, faisant référence à des propos de
M. Valéry Giscard d'Estaing, il estime que la réforme qui
s'était avérée impossible à quinze le serait
a fortiori avec de nouveaux membres, et que, dans ces conditions, l'Europe
pencherait vers une zone de libre échange améliorée,
même si le rôle intégrateur de l'euro pouvait contrebalancer
quelque peu cette tendance ; dès lors, conclut-il, une
véritable intégration politique suppose le regroupement des Etats
réellement décidés à avancer et la formation d'un
" noyau dur " de l'Union.
M. Christian de La Malène
souligne que les
dispositions relatives aux coopérations renforcées ne paraissent
pas de nature à favoriser la formation d'un " noyau dur ".
M. James Bordas
, après s'être félicité
que le rapport donne une présentation synthétique des principaux
aspects du traité, souhaite que la distinction des rôles
respectifs du Conseil européen et du Conseil de l'Union
européenne apparaisse plus nettement.
Puis la délégation décide à l'unanimité
d'autoriser la publication du rapport d'information.
Le rapport de M. Christian de La Malène :
"
Le traité d'Amsterdam
"
a été publié sous le n° 14 (1997-1998)