B. EXAMEN DU RAPPORT D'INFORMATION DE M. PHILIPPE FRANÇOIS SUR LA PROPOSITION DE HUITIEME DIRECTIVE CONCERNANT L'HEURE D'ETE
Le mercredi 9 octobre 1996, la
délégation a examiné le projet de rapport d'information de
M. Philippe François sur la proposition de huitième directive
concernant l'heure d'été.
La discussion du rapport a lieu en présence de M. Charles
de Cuttoli, convié à y prendre part en sa qualité
d'auteur d'une proposition de loi, votée par le Sénat le 23 mai
1990, " tendant à rétablir un régime horaire conforme
aux exigences de la situation géographique de notre pays ".
M. Philippe François
souligne tout d'abord que, depuis
l'instauration de l'heure d'été en France, en 1976, des voix de
plus en plus nombreuses s'élèvent dans l'opinion publique pour
critiquer ce dispositif artificiel qui consiste à avancer l'heure
légale de soixante minutes au printemps, puis à revenir à
l'heure initiale à l'automne.
Il indique que la généralisation de cette pratique à
l'ensemble des pays de l'Union européenne a conduit à
l'élaboration d'un calendrier commun des changements horaires par des
directives successives, depuis 1980. La septième directive arrivant
à échéance fin 1997, un projet de huitième
directive applicable à la période 1998-2001 est actuellement en
cours de négociation.
Ce projet traitant d'une matière réglementaire, il n'a pas
été soumis à l'examen du Parlement dans le cadre de
l'article 88-4 de la Constitution en dépit de la demande formulée
en ce sens par le Président du Sénat. Il est donc proposé
à la délégation d'étudier les avantages et les
inconvénients de l'heure d'été sous la forme d'un rapport
d'information afin de juger de l'opportunité de poursuivre, ou non,
l'application de ce dispositif dans le cadre de la huitième directive.
Dressant le bilan de l'heure d'été, M. Philippe François
déclare que l'objectif d'économiser l'énergie, qui a
initialement présidé à l'instauration de ce
mécanisme horaire, n'est plus aujourd'hui au centre des
préoccupations. Il considère que les économies attendues -
1,2 milliard de kilowatts-heure, soit 0,5 % de la consommation
électrique - ne sont pas suffisamment importantes pour contrebalancer
les inconvénients qu'entraîne l'heure d'été,
notamment pour la santé publique, le niveau de pollution
atmosphérique et l'activité de plusieurs secteurs professionnels
comme le bâtiment-travaux publics ou l'agriculture.
Il explique que les effets de ce dispositif sont plus pénalisants en
France que dans la majorité des autres Etats-membres de l'Union en
raison du fait que l'avancement estival s'est ajouté au décalage
permanent d'une heure de l'heure légale sur l'heure solaire qui existait
dans notre pays depuis 1945. Il en résulte que, depuis 1976, l'heure
légale est en avance d'une heure sur le soleil en hiver, et de deux
heures en été, ce qui en accroît le caractère
perturbant.
Le rapporteur souhaite donc, comme l'a fait M. Alain Juppé, Premier
ministre, en avril dernier, que l'on en revienne à une heure unique,
stable tout au long de l'année. Il indique que, dans le cadre des
négociations en cours sur la huitième directive, il convient de
faire connaître à nos partenaires la volonté de la France
de renoncer, pour sa part, à ce dispositif horaire en application du
principe de subsidiarité qui conduit à confier à l'Union
le soin d'harmoniser les calendriers, mais doit laisser à chaque Etat le
choix d'appliquer ou non le système de l'heure d'été sur
son territoire.
Pour l'heure unique à retenir pour l'ensemble de l'année,
M. Philippe François examine les trois options concevables :
l'heure solaire, l'heure GMT + 1 (l'actuelle heure d'hiver) et
l'heure GMT + 2 (l'actuelle heure d'été). Il constate que, dans
deux de ces hypothèses (l'heure solaire et l'heure GMT + 2), la France
se trouvera, pendant six mois de l'année, à n'avoir l'heure
d'aucun de ses voisins immédiats, ce qui perturbera notablement
l'organisation des transports et des communications.
Le rapporteur propose donc de retenir la solution de l'heure GMT + 1 qui
permet, tout à la fois, de conserver une heure unique, de limiter
l'amplitude du décalage de l'heure légale sur l'heure solaire et
de maintenir une logique cohérente des horaires dans l'espace
européen : la France aurait ainsi l'heure de l'Allemagne pendant l'hiver
et l'heure du Royaume-Uni pendant l'été, ce que justifie sa
position géographique centrale dans l'Europe de l'ouest.
A l'issue de la présentation du rapport,
M. Charles de Cuttoli
rappelle que sa proposition de loi, prévoyant le retour à l'heure
solaire l'hiver, a bien été adoptée par le Sénat,
mais n'a jamais été discutée à l'Assemblée
nationale. Pour le choix de l'heure unique à retenir, il se montre
très inquiet devant l'éventualité d'opter pour l'heure
d'été permanente, qui aurait des conséquences plus graves
encore que celles de la situation actuelle, en plaçant la France toute
l'année deux heures en avance sur l'heure solaire : il en
résulterait, par exemple, que le lever du jour n'aurait lieu qu'entre
neuf et dix heures au plus fort de l'hiver. En conclusion, il se déclare
en accord avec les propositions du rapporteur visant à garder l'actuelle
heure d'hiver pendant l'ensemble de l'année.
A
M. Lucien Lanier
qui souhaite avoir confirmation des décalages
horaires avec nos partenaires européens qu'entraînerait le choix
de l'heure GMT + 1,
le rapporteur
répond qu'il aboutirait
à donner à la France l'heure du Royaume-Uni pendant
l'été et l'heure de l'Allemagne pendant l'hiver et à ne
jamais avoir plus d'une heure de différence avec l'un ou l'autre de nos
voisins.
M. James Bordas
confirme l'hostilité constante qu'inspire aux
agriculteurs le principe du changement semestriel de l'heure.
M. Jacques Habert
souligne, toutefois, que le maintien de l'heure
d'hiver en permanence réduira la durée des soirées
d'été dont il apprécie l'agrément.
M. Christian de La Malène
déclare qu'il convient, en
application des conclusions du rapporteur, d'intégrer, dans la
huitième directive, la volonté française de renoncer
à l'heure d'été.
M. Pierre Lagourgue
précise que, en tant qu'élu de La
Réunion, il est favorable à l'heure d'été, qui
rapproche son département de la métropole durant la
période estivale, mais qu'il comprend les désagréments qui
peuvent résulter de ce dispositif en France métropolitaine.
Le rapport est adopté à l'unanimité avec l'abstention de
MM. Jacques Habert et Pierre Lagourgue.
Le rapport de M. Philippe François :
"
Faut-il en finir avec l'heure d'été
"
a été publié sous le n° 13 (1996-1997)