III. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 6 ET LE 18 MARS 1996
La mission d'information est aujourd'hui en mesure
d'établir un premier bilan des messages qui lui ont été
adressés depuis le lancement de la consultation sur le réseau
Internet :
- 19 messages lui sont parvenus à la suite du premier questionnaire
envoyé le 21 février 1996 ;
- 36 messages ont été transmis à la suite du
deuxième questionnaire et de la première synthèse du
6 mars 1996 ;
- 150 demandes ont été formulées pour disposer de la
synthèse bimensuelle de ces messages.
La plus grande part de ces messages proviennent d'étudiants
engagés dans des études supérieures longues, et
émanent également d'enseignants universitaires.
Il convient également de noter que les messages proviennent
d'établissements et de grandes écoles répartis sur
l'ensemble du territoire national et que plusieurs d'entre eux émanent
d'étudiants ou d'enseignants français travaillant dans des
universités étrangères, par exemple aux Etats-Unis et au
Japon.
La mission d'information tient à remercier tous ses correspondants pour
la qualité et le sérieux de leurs remarques et sur le refus de la
fausse démagogie de la plupart des réponses ; elle souligne
que de nombreux messages félicitent le Sénat et sa commission des
affaires culturelles d'avoir engagé cette consultation et expriment leur
souhait de poursuivre le contact.
Dans cette perspective, il serait souhaitable que les correspondants qui le
souhaitent indiquent leur accord pour que soit éventuellement reproduite
dans la synthèse une partie de leurs réponses, l'origine du
message restant confidentielle.
Il convient d'ajouter que certains intervenants ont répondu aux deux
questionnaires et que certains, outre leur réaction personnelle,
présentent les programmes de leur organisation syndicale.
Par ailleurs, il faut rappeler que les synthèses transmises sur le
réseau n'expriment pas l'opinion de la mission d'information mais
s'efforcent de résumer les principales contributions des intervenants
qui peuvent refléter, par exemple, les oppositions existantes entre
diverses catégories de personnels.
I. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU PREMIER QUESTIONNAIRE DU 21
FEVRIER 1996
1. Les causes de l'échec universitaire dans les premiers
cycles :
- lacunes du système d'information et d'orientation dans l'enseignement
secondaire et inadaptation de la méthodologie scolaire à
l'enseignement supérieur ;
- réticences des universitaires à participer à une mission
d'information auprès des lycéens ;
- inadaptation des conditions de travail à l'université, absence
de motivation et dilettantisme de nombreux étudiants, problèmes
de leur passage à l'âge adulte, d'un système assisté
à un système de responsabilité ;
- accès trop ouvert en première année de DEUG alors que la
sélection apparaîtra ultérieurement pour les
étudiants ;
- méconnaissance par les élèves de leurs capacités
et des différences de contenu et de méthode entre l'enseignement
secondaire et supérieur ;
- distance maintenue entre les enseignants et les étudiants, voire
relations conflictuelles, et organisation trop rigide des cursus
universitaires ;
- réforme pédagogique des lycées engagée sans
concertation avec l'université ;
- l'université serait un " parking anti-chômage " pour
20 à 30 % des étudiants inscrits en première
année, ce qui relativise le taux d'échec constaté.
2. L'appréciation portée sur le système actuel
d'information et d'orientation au lycée et à
l'université
- absence d'information sur le contenu des programmes universitaires ;
- information disponible mais pas exploitée : une démarche
personnelle des lycéens est nécessaire pour y
accéder ;
- l'orientation devrait être conduite dès la classe de seconde par
des étudiants et les professeurs de lycée ;
- l'orientation devrait permettre d'exercer des choix entre les filières
courtes et longues, ce qui implique une meilleure définition des
filières technologiques et professionnelles par rapport aux
filières générales ;
- la connaissance des formations et des métiers par les
élèves est caricaturale et le système éducatif ne
peut remédier seul à cette carence.
3. Les suggestions proposées pour améliorer ce système
d'information et d'orientation
- l'école devrait responsabiliser ses élèves ;
- les futurs étudiants devraient tester leur choix dans l'enceinte du
lycée, en bénéficiant notamment d'un enseignement intensif
pour les disciplines qu'ils choisiront à l'université ;
- des sessions d'information assurées par des étudiants dans les
lycées seraient plus efficaces que l'information dispensée par
les CIO ;
- une période de réflexion devrait être instituée au
cours du premier trimestre universitaire ;
- l'amélioration de l'orientation au lycée devrait passer
par :
· un développement des moyens des CIO ;
· la mise à disposition des lycéens de statistiques sur les
résultats universitaires des bacheliers selon le type de
baccalauréat et des sujets d'examen en première année de
DEUG ;
· un avis d'orientation donné par les conseils de professeurs ;
· la recherche d'une meilleure adéquation entre formations
scolaires et formations supérieures selon des procédures plus ou
moins contraignantes de sélection ;
- les réorientations en premier cycle devraient être
favorisées par :
· l'établissement d'une grille d'équivalence nationale
entre les diplômes ;
· le maintien du droit aux bourses après réorientation ;
· le rétablissement de la spécialisation et du
caractère national des DEUG et des " savoirs de
base " ;
- la diversification de l'offre de formation devait être assurée
par :
· une adaptation des formations supérieures aux nouveaux
métiers ;
· une année de spécialisation liée à une
profession à l'issue du DEUG ;
· un développement de la formation en alternance ;
· de nouveaux diplômes et un cursus professionnalisé pour les
bacheliers technologiques et professionnels ;
- une simplification du fonctionnement des universités passerait
par :
· une réduction du nombre des antennes universitaires ;
· une diversification du financement des universités ;
· un rapprochement de l'université des entreprises avec le
développement des stages et de l'alternance ;
- l'information sur l'orientation dans les lycées devrait consister en
conseils personnalisés donnés aux élèves compte
tenu de leurs résultats scolaires et de leurs aspirations,
dispensés par les enseignants du secondaire, des classes
préparatoires et des universités : une orientation
satisfaisante apparaît comme le complément indispensable à
l'obtention du baccalauréat ;
- l'échec universitaire ne pourrait être réduit que par
l'institution de concours spécifique pour chaque filière
universitaire du fait que le baccalauréat ne joue plus son
rôle ;
- le système éducatif doit améliorer sa connaissance du
monde socio-économique, notamment les enseignants et les conseillers
d'orientation : des passerelles devraient être
développées entre les emplois d'enseignants du secondaire et du
supérieur.
II. LES REACTIONS A LA PREMIERE SYNTHESE DU 6 MARS 1996
- le recours aux professeurs agrégés du secondaire (PRAG) a
été rendu nécessaire du fait de la massification de
l'enseignement supérieur et parce que le recrutement des enseignants et
enseignants-chercheurs n'a pas accompagné l'afflux d'étudiants
à l'université : il serait injuste de leur faire porter la
responsabilité de l'échec dans les premiers cycles ;
- les critiques formulées contre les PRAG émanent des doctorants
et des enseignants-chercheurs qui disposent d'un accès
privilégié sur le réseau Internet ;
- le recours aux PRAG pour remédier au sous-encadrement des
étudiants s'explique pour des raisons budgétaires ;
- une orientation progressive des étudiants des premiers cycles risque
de transformer l'université en " hall de gare " accueillant
les laissés-pour-compte du système éducatif.
III. LES REPONSES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 6 MARS 1996
1. Les formations supérieures courtes, à finalité
professionnelle, de type IUT et STS, vous paraissent-elles
exagérément sélectives, compte tenu notamment des besoins
des entreprises ?
- pour la plupart des intervenants, ces filières courtes n'apparaissent
pas exagérément sélectives, et ces formations
correspondant aux besoins des entreprises sont même parfois
considérées comme les " CAP de demain " ;
- pour certains, le caractère sélectif des BTS et des IUT
apparaît indispensable pour maintenir la qualité de ces
formations : ces filières ne sont pas destinées à
devenir des " poubelles " ou à
" amortir " le
chômage des jeunes et doivent retrouver leur finalité
professionnelle immédiate en " collant " aux besoins des
entreprises qui devraient par ailleurs être associées par la voie
d'un partenariat à la définition des cursus, au contenu des
formations, à leur financement et à leur gestion ; il
conviendrait ainsi d'" ouvrir l'accès des estrades aux praticiens
et les portes des entreprises aux étudiants " ;
- un assouplissement de la sélection pour ces formations courtes ne
pourrait résulter que d'une refonte de la philosophie de notre
système universitaire et qui s'accompagnerait d'une sélection
pour les cycles longs lors de l'entrée à
l'université ;
- pour d'autres, ces filières sont trop sélectives, notamment
pour les bacheliers technologiques et professionnels et la formation
dispensée apparaît trop générale par rapport aux
besoins des entreprises qui auraient besoin de diplômés moins
qualifiés, plus nombreux et plus adaptables : ces filières
devraient donc être adaptées aux bacheliers non
généraux et aux métiers ;
- il conviendrait de mesurer les flux d'accès en BTS et en IUT des
étudiants qui ont effectué préalablement une
première année de premier cycle ;
- un quota de 50 % de bacheliers non généraux devrait
être institué, à l'entrée dans les STS et les IUT,
afin d'éviter les gaspillages financiers résultant du
détournement de ces filières d'insertion par les bacheliers
généraux : ces filières ne doivent plus être
considérées comme des " premiers cycles de luxe " ;
- la sélection est inhérente à la vie et les
étudiants la rencontreront in fine lors de leur embauche : il
convient donc de les y préparer suffisamment tôt ;
- les formations sélectives courtes ne sont pas assez nombreuses et
diversifiées et devraient être actualisées en fonction des
nouveaux besoins des entreprises ;
- leur revalorisation passe par la création d'une filière
universitaire technologique, du baccalauréat jusqu'au diplôme
d'ingénieur, en ouvrant celui-ci aux titulaires de DUT et de BTS ;
- les sections technologiques secondaires (STT et STI) apparaissent pour les
élèves et les familles comme dévalorisées par
rapport aux sections " nobles " (ES, L et S) :
l'orientation des
élèves se fait par élimination.
2. A partir de quelle classe de l'enseignement secondaire, et par qui,
devrait être assurée l'information des élèves en vue
de leur orientation ?
- pour de nombreux intervenants, l'orientation devrait être
développée à partir de la classe de seconde, et
assurée en particulier par des étudiants et les professeurs ainsi
que par des stagiaires d'IUFM ;
- certains prônent une orientation des élèves en deux
étapes : découverte de l'entreprise dès la classe de
3e avec une information dispensée par des " professionnels "
au sein de forums organisés dans les collèges, puis
réflexion sur l'orientation avec les conseillers et les enseignants pour
définir un projet professionnel, sans imposer un choix à
l'élève ;
- pour d'autres, cette orientation devrait intervenir aussi tôt que
possible en mobilisant les compétences de la communauté scolaire,
universitaire et du monde du travail ;
- des brochures générales et plus ciblées,
distribuées par l'éducation nationale et les employeurs
potentiels (entreprises, administrations ...) devraient être mises
à la disposition des lycéens en classe de première ;
- le dispositif des CIO devrait être revu et leurs informations mises
à jour après un recyclage des conseillers ;
- une politique d'orientation implique de mettre en place des passerelles entre
filières courtes et filières longues et ne devrait pas conduire
à désorganiser les premiers cycles généraux au
profit des formations courtes : la poursuite d'études après
le DUT et le BTS devrait rester l'exception ;
- l'orientation vers les filières professionnelles courtes, y compris
vers le " bac pro " s'engage dès l'entrée au
collège et résulte aujourd'hui de multiples motivations,
notamment d'origine familiale : il conviendrait de mettre en place un
système d'information continue pour les élèves, les
parents et les professeurs afin de combattre les préjugés sur
l'enseignement technologique ;
- les enseignants doivent jouer un rôle d'intermédiaire et de
conseil entre les représentants du monde du travail et les
élèves ;
- les chambres de commerce et d'industrie au niveau régional devraient
être associées à l'orientation des collégiens et des
lycéens : les formations devraient être davantage
adaptées à l'emploi local ;
- l'orientation doit permettre d'anticiper les conséquences des choix
des élèves qui devraient disposer d'une palette d'options, de
modules et de séquences dans le cadre du lycée, en collaboration
avec des étudiants déjà engagés dans les
études supérieures.
3. Seriez-vous favorable à une orientation progressive au cours du
premier cycle universitaire et accepteriez-vous une certaine sélection
à l'issue de la première année ?
- pour certains, cette orientation progressive est nécessaire et
permettrait de faciliter le passage des lycéens du secondaire au
supérieur, des passerelles devant être aménagées
entre les disciplines ;
- pour d'autres, l'orientation et le projet professionnel devraient être
définis le plut tôt possible dans les premiers cycles qui doivent
conserver un caractère sélectif compte tenu du taux de
réussite au baccalauréat : une information satisfaisante
dispensée en amont permettrait de rendre les diplômes
opérationnels dès le début de la carrière
professionnelle ;
- le droit à l'erreur et les possibilités de réorientation
ne doivent pas conduire à une dislocation des diplômes nationaux
de premier cycle ;
- l'orientation progressive doit être " dynamique " et
permettre l'acquisition d'une culture générale supérieure
dans une perspective d'études longues : on pourrait ainsi envisager
la transformation des premiers cycles en un " tronc
commun ",
à l'exclusion cependant des filières scientifiques ;
- un dispositif d'orientation progressive ne devrait pas avoir pour objet de
masquer l'échec universitaire des jeunes ;
- l'organisation réformée du DEUG, avec la mise en place de
modules, permet d'ores et déjà de différer l'orientation
des étudiants mais est à l'origine de graves
dérives : les passerelles mises en place tendent à alourdir
les programmes des DEUG au détriment des matières principales et
en privilégiant les matières secondaires ;
- certains préconisent une orientation progressive mais sélective
respectant une application stricte de la règle des trois ans pour les
DEUG littéraires ;
- le contenu des DEUG devrait être modifié pour être plus
adapté aux besoins des entreprises : la formation dispensée
est trop fondamentale et incite les étudiants à s'engager dans le
" cycle infernal " de la poursuite d'études pour obtenir des
diplômes qui sont peu attractifs pour les entreprises ;
- le recours aux stages en entreprise et à la formation en alternance
permettrait de rendre ces formations universitaires plus intéressantes
pour les entreprises, à l'instar des formations dispensées par
les grandes écoles ;
- l'orientation devrait s'appuyer sur la généralisation d'examens
partiels en fin de semestre universitaire ;
- pour certains, il conviendrait de multiplier les passerelles entre
filières plutôt que de mettre en place une orientation
progressive, l'orientation devant se faire en terminale selon un
mécanisme inspiré des classes préparatoires ;
- l'orientation au cours des premiers cycles n'implique pas une modification de
l'organisation actuelle du DEUG : le libre accès en première
année permet aux étudiants de concilier leurs études et
une activité salariée et autorise des réorientations vers
des formules sélectives ou des filières différentes de
celle choisie à l'origine ; l'échec universitaire dans les
premiers cycles doit ainsi être relativisé et ne condamne pas
l'organisation actuelle de notre système universitaire qui doit
conserver la diversité de l'offre de ses formations en assurant un
rôle d'accueil de tous les étudiants et une égalité
des chances pour tous ;
- l'orientation est vouée à l'échec si elle est
imposée autoritairement aux étudiants : une information
satisfaisante et un élargissement de l'offre des filières
professionnalisées constitueraient au contraire autant de facteurs d'une
orientation réussie ;
- une orientation trop spécialisée risque de se traduire par un
développement de qualifications trop pointues qui se
révéleront rapidement obsolètes et inadaptée
notamment à l'évolution de l'emploi régional : les
formations doivent concilier les études générales et les
compétences plus pratiques et faciliter le choix d'un
métier ;
- la mise en place d'unités de valeur à vocation professionnelle
au sein des universités, sanctionnées par un diplôme,
permettrait de définir des " généralistes
reconfigurables " susceptibles de s'adapter, mieux que les
diplômés très spécialisés, à
l'évolution des emplois ;
- l'institution d'un système d'orientation progressive, impliquant un
changement de cursus au cours de l'année universitaire serait
matériellement difficile à généraliser dans toutes
les universités et ne réglerait en rien le problème de
l'échec universitaire en l'absence d'information des
étudiants : il serait préférable de prévoir un
forum d'orientation en début d'année universitaire
présentant les filières, leur contenu, les options et les
débouchés offerts ;
- certaines universités de la région parisienne ont mis en place,
avant l'installation du système Ravel, un dispositif d'accueil des
bacheliers pour examiner leurs choix en concertation avec les enseignants ;
- la sectorisation universitaire résultant du système Ravel, si
elle a permis une meilleure gestion des flux d'étudiants, a
renforcé l'orientation des étudiants vers les filières
sélectives ou vers les formations sans débouchés : il
conviendrait d'assouplir cette sectorisation lorsque les étudiants
présentent un projet cohérent et de prévoir des entretiens
individualisés avec les bacheliers avant leur inscription à
l'université.
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