S'orienter pour mieux réussir
Adrien Gouteron, Jean Bernadaux, Jean-Pierre Camoin
Mission d'information sur l'information et l'orientation des étudiants des premiers cycles universiatires - Rapport 81 - 1996 / 1997
Table des matières
- GLOSSAIRE DES SIGLES
-
INTRODUCTION
-
I. UN ÉCHEC EN PREMIER CYCLE RÉSULTANT DE L'INADAPTATION DE L'ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR AU PLUS GRAND NOMBRE ET DES DYSFONCTIONNEMENTS DU SYSTÈME
D'ORIENTATION
- A. UN ÉCHEC RÉSULTANT D'ABORD DE L'INADAPTATION DU SYSTÈME UNIVERSITAIRE À L'AFFLUX DES ÉTUDIANTS
-
B. LES DÉRIVES OBSERVÉES DANS L'ORIENTATION DES BACHELIERS
- 1. L'importance du secteur sélectif
- 2. Le détournement des filières sélectives courtes de leur finalité initiale
- 3. La transformation de fait des filières courtes en premiers cycles
- 4. Une orientation massive par défaut dans les filières générales
- 5. Des orientations erratiques commandées par des phénomènes de mode et par l'absence de motivation des nouveaux étudiants
- C. UN PRÉALABLE À UNE VÉRITABLE POLITIQUE D'ORIENTATION : LA RÉFORME DE LA FILIÈRE TECHNOLOGIQUE SUPÉRIEURE ET LA PROFESSIONNALISATION DES FORMATIONS
-
II. LES INSUFFISANCES DU SYSTÈME D'INFORMATION ET D'ORIENTATION
- A. L'ORIENTATION DANS L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE : UNE PROCÉDURE RESSENTIE COMME SUBIE, AUTORITAIRE ET SYNONYME D'ÉCHEC
-
B. L'ORIENTATION ET L'ACCUEIL DES ÉTUDIANTS : LA FAIBLESSE DU DISPOSITIF
ACTUEL
- 1. Le lycée et l'université : deux mondes étrangers
-
2. Un accueil des nouveaux étudiants qui reste insuffisant
- a) Une semaine d'accueil et d'information obligatoire pour les universités mais parfois formelle et facultative pour les étudiants
- b) L'insuffisance des services universitaires d'information et d'orientation
- c) Une expérience novatrice : la mise en place d'un " CIO de l'après-bac " dans l'académie de Lille
- d) Le problème des locaux universitaires
-
3. L'encadrement pédagogique des premiers cycles : une rupture avec le
lycée
- a) Un encadrement qui pêche par un manque de moyens
- b) La diversité du corps enseignant dans l'enseignement supérieur
- c) Les enseignants-chercheurs dans l'encadrement pédagogique des premiers cycles : une faible mobilisation
- d) La mise en oeuvre de formules d'accompagnement et de soutien aux étudiants en difficulté : le tutorat
-
4. La nécessité de multiplier les possibilités de réorientation au cours de la
première année d'études universitaires
- a) Les propositions de l'IGAEN : une " semestrialisation " de l'année universitaire pour faciliter les réorientations
- b) Les propositions du rapport Fauroux : faciliter les réorientations et généraliser les " quadrimestres " pendant la durée du DEUG
- c) Les propositions formulées par le Gouvernement à l'issue des états généraux de l'université
- d) Les expériences de réorientation précoce engagées à l'université nouvelle de Marne-la-Vallée
- e) Les expériences menées dans l'ensemble du système universitaire pour lutter contre l'échec en premier cycle : des efforts très inégaux
-
III. LES PROPOSITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION : DEUX PRÉALABLES, TROIS
OBJECTIFS ET TRENTE-DEUX MESURES
- A. DEUX PRÉALABLES : LE REFUS DE LA SÉLECTION À L'ENTRÉE À L'UNIVERSITÉ ET DE LA SECONDARISATION DES PREMIERS CYCLES.
-
B. UNE MEILLEURE ARTICULATION ENTRE L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE ET
L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
-
1. La mise en oeuvre d'un processus continu d'orientation par l'éducation aux
choix
- a) Un principe fixé par la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 : un projet d'orientation élaboré par les élèves et les étudiants
- b) Les mesures relatives à l'information et à l'orientation prévues dans le nouveau contrat pour l'école
- c) l'expérimentation des séquences d'éducation à l'orientation dès la classe de cinquième
- d) Les propositions de la mission : la mise en oeuvre effective et rapide de l'éducation aux choix
-
2. Le renforcement de l'efficacité des personnels chargés de l'information et
de l'orientation des étudiants et des lycéens
- a) Les professeurs principaux : les pivots du système d'orientation
- b) Les conseillers d'orientation psychologues : des recrutements nécessaires et une formation élargie
- c) La nécessité de préciser les rôles respectifs des personnels chargés de l'orientation : renforcer le rôle d'expert des conseillers d'orientation
-
3. Les mesures destinées à faciliter le passage des lycéens vers
l'enseignement supérieur
- a) Une généralisation souhaitable des journées d'information réservées aux élèves de terminale
- b) La semaine d'accueil et d'information des nouveaux étudiants : la formaliser davantage et la rendre obligatoire
- c) Le nécessaire suivi de l'évolution des voeux d'orientation des lycéens de terminale et des bacheliers
- d) Renforcer l'efficacité des services communs universitaires d'information et d'orientation (SCUIO)
- 4. L'amélioration de l'encadrement pédagogique des premiers cycles.
-
1. La mise en oeuvre d'un processus continu d'orientation par l'éducation aux
choix
-
C. LA NÉCESSITÉ D'ADAPTER LES FORMATIONS POST-BACCALAURÉAT À LA DIVERSITÉ DES
NOUVELLES POPULATIONS ÉTUDIANTES
- 1. Une nouvelle organisation de l'année universitaire en premier cycle : les propositions de la mission
- 2. Une plus grande ouverture des filières sélectives existantes
- 3. La nécessaire réforme de la filière technologique supérieure
- 4. La nécessité d'une professionnalisation des formations supérieures
- D. LE DÉVELOPPEMENT DES INITIATIVES DES UNIVERSITÉS
-
I. UN ÉCHEC EN PREMIER CYCLE RÉSULTANT DE L'INADAPTATION DE L'ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR AU PLUS GRAND NOMBRE ET DES DYSFONCTIONNEMENTS DU SYSTÈME
D'ORIENTATION
- RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION
- RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION
-
OBSERVATIONS PRÉSENTÉES PAR M. IVAN RENAR,
VICE-PRÉSIDENT DE LA MISSION - ANNEXES
-
ANNEXE I
- I. MERCREDI 17 JANVIER 1996
- II. MERCREDI 24 JANVIER 1996
- III. MERCREDI 31 JANVIER 1996
- IV. MERCREDI 7 FÉVRIER 1996
- V. MERCREDI 14 FÉVRIER 1996
- VI. MERCREDI 21 FÉVRIER 1996
- VII. MERCREDI 6 MARS 1996
- VIII. MERCREDI 20 MARS 1996
- IX. MERCREDI 17 AVRIL 1996
- X. MERCREDI 24 AVRIL 1996
- XI. JEUDI 2 MAI 1996
- XII. MARDI 7 MAI 1996
- XIII. MERCREDI 12 JUIN 1996
- XIV. MERCREDI 19 JUIN 1996
- XV. MERCREDI 26 JUIN 1996
-
ANNEXE II
- I. synthèse des messages reçus, via le réseau internet, par la mission d'information entre le 22 février et le 4 juin 1996
- II. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 22 FÉVRIER ET LE 3 MARS 1996
- III. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 6 ET LE 18 MARS 1996
- IV. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 19 ET LE 29 MARS 1996
- V. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 31 MARS ET LE 13 AVRIL 1996
-
VI. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET,
PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 15 AVRIL
ET LE 3 MAI 1996
- A. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 21 FEVRIER 1996
- B. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 6 MARS 1996
- C. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES AU QUESTIONNAIRE DU 21 MARS 1996
- D. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 4 AVRIL 1996
- E. LES REPONSES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 18 AVRIL 1996
- F. LES INFORMATIONS COMMUNIQUEES À LA MISSION D'INFORMATION
- G. LES REMARQUES SUR LA SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS PAR LA MISSION D'INFORMATION
- VII. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS PAR LE SENAT, VIA LE RESEAU INTERNET, ENTRE LE 6 ET LE 20 MAI 1996
-
VIII. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET,
PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 23 MAI ET LE 4 JUIN 1996
- ANNEXE III
-
ANNEXE V :
LE SYSTÈME UNIVERSITAIRE AMÉRICAIN
par M. André Maman, sénateur, représentant des Français établis hors de France, ancien professeur à l'université de Princeton
GLOSSAIRE DES SIGLES
AES : administration économique et sociale
AFPA : association pour la formation professionnelle des adultes
ATER : attaché temporaire d'enseignement et de recherche
BEP : brevet d'études professionnelles
BTS : brevet de technicien supérieur
CEREQ : centre d'études et de recherche sur les qualifications
CIO : centre d'information et d'orientation
CIP : contrat d'insertion professionnelle
CNE : comité national d'évaluation des établissements
publics à caractère scientifique, culturel et professionnel
COP : conseiller d'orientation-psychologue
CPGE : classe préparatoire aux grandes écoles
DEA : diplôme d'études approfondies
DEP : direction de l'évaluation et de la perspective
DEUG : diplôme d'études universitaires générales
DESS : diplôme d'études supérieures
spécialisées
DEUST : diplôme d'études universitaires en sciences et techniques
DEUT : diplôme d'études universitaires technologiques
DNTS : diplôme national de technologie spécialisée
DRT : diplôme de recherche technologique
IGAEN : inspection générale de l'administration de
l'éducation nationale
IUFM : institut universitaire de formation des maîtres
IUP : institut universitaire professionnalisé
NCE : nouveau contrat pour l'école
ONISEP : office national d'information sur les enseignements et les professions
PRAG : professeur agrégé de l'enseignement secondaire
SAIO : services académiques d'information et d'orientation
SCUIO : service commun universitaire d'information et d'orientation
STAPS : sciences et techniques des activités physiques et sportives
STS : sections de techniciens supérieurs
SUIO : service universitaire d'information et d'orientation
UFR : unité de formation et de recherche
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Lors de sa réunion du 22 novembre 1995, votre commission des affaires
culturelles, sur proposition de son président, M. Adrien Gouteyron,
a décidé de demander la création d'une mission
d'information sur les problèmes des premiers cycles universitaires, et
en particulier sur celui de l'information et de l'orientation des
lycéens et des étudiants qui est, à n'en pas douter,
à l'origine d'une grande part de l'échec universitaire.
Au cours de sa réunion du 6 décembre 1995, la commission des
affaires culturelles a désigné ceux de ses membres appelés
à faire partie de la mission d'information. Outre son Président
et ses rapporteurs pour avis sur les budgets de l'éducation nationale et
de l'enseignement supérieur,
MM. Jean Bernadaux, Jean-Pierre
Camoin et Jean-Louis Carrère
, elle a désigné comme
membres titulaires : MM. Jean-Claude Carle, Pierre Laffitte,
Philippe Richert et Franck Sérusclat
et comme
membres
suppléants : MM. James Bordas, Daniel Eckenspieller,
François Lesein, Mme Hélène Luc, MM. Jean-Marie
Poirier et Henri Weber.
Lors de sa réunion constitutive du 20 décembre 1995, la
mission a constitué son bureau ainsi qu'il suit :
- Président : M. Adrien Gouteyron ;
- vice-Présidents : MM. Jean-Louis Carrère, Jean-Claude
Carle, Pierre Laffitte et Ivan Renar ;
- co-rapporteurs : MM. Jean Bernadeaux et Jean-Pierre Camoin.
Au cours de trente cinq heures d'
auditions
menées entre le
17 janvier et le 26 juin 1996, la mission a entendu quarante trois
personnalités, spécialistes à des titres divers des
problèmes universitaires.
Sur proposition de M. Pierre Laffitte, le président de la mission a
par ailleurs demandé à M. le Président du
Sénat de bien vouloir l'autoriser à lancer une
consultation
sur le réseau Internet
, via le serveur du Sénat, qui lui a
permis de recueillir directement les observations et les propositions des
acteurs et des usagers du système universitaire : sept
questionnaires ont été ainsi lancés sur le réseau
entre le 22 février et le 6 mai 1996 qui ont recueilli
cent cinquante-deux réponses le plus souvent très substantielles.
Ces réponses ont fait l'objet de sept synthèses qui ont
été demandées par deux cent soixante-deux correspondants
sur le serveur du Sénat.
La mission d'information ne peut donc que se féliciter de la
réussite d'une consultation d'un type inédit, qui n'a pas valeur
de sondage, mais qui lui a permis de compléter directement, notamment
auprès des étudiants et des enseignants, les informations
recueillies au cours de ses auditions.
A cet égard, elle tient à remercier l'ensemble de ses
correspondants pour la qualité, le suivi et l'intérêt de
leurs interventions, lesquels ont par ailleurs fréquemment
souligné le caractère novateur de cette consultation
lancée par le Sénat.
Une délégation de la mission d'information a également
effectué un
déplacement à Heidelberg
, les 28 et 29
mai 1996 pour y étudier les problèmes de l'information et de
l'orientation dans une université allemande : elle y a tenu
plusieurs réunions de travail dont le compte rendu figure en annexe du
présent rapport.
Elle s'est déplacée, en outre, à
Lille et à
Cambrai
, le 16 octobre 1996, pour y rencontrer le recteur de
l'académie, les présidents d'université, les responsables
des services universitaires d'orientation et d'information et étudier
les dispositifs mis en place pour lutter contre l'échec en premier cycle.
Enfin la mission d'information a contacté par lettre l'ensemble des
proviseurs de lycée
, des
recteurs d'académie
et des
présidents d'université
afin de recueillir leurs
observations sur les actions engagées en matière d'information et
d'orientation dans les établissements d'enseignement secondaire ou
supérieur : une cinquantaine de proviseurs, une quinzaine de
recteurs ou de services académiques d'information et d'orientation
(SAIO) et plusieurs présidents d'université ou services communs
universitaires d'information et d'orientation (SCUIO) ont répondu
à cet appel en fournissant des éléments d'information
précieux pour la mission.
Avant de formuler ses propositions pour une réforme du système de
l'information et de l'orientation des étudiants, votre commission tient
à souligner la difficulté de faire preuve d'originalité
sur un sujet - les premiers cycles universitaires - qui a fait
l'objet de nombreuses études substantielles qu'il s'agisse pour les plus
récentes en particulier du rapport Lavroff (L'évolution du
premier cycle universitaire), du rapport Laurent (Universités : relever
le défi du nombre), d'une étude de l'Inspection
générale de l'administration de l'éducation nationale (La
rénovation des premier et second cycles universitaires, rapport 1996) et
plus récemment, du rapport de la commission Fauroux (Pour
l'école), ainsi naturellement que des propositions exposées par
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche à la Sorbonne, le
18 juin 1996, à l'issue de la procédure dite des
états généraux de l'université.
Toutes ces contributions consacrent une partie de leurs développements
aux dysfonctionnements constatés dans l'orientation des
étudiants, qui sont à l'origine pour une large part de
l'échec observé dans les premiers cycles, et présentent
des propositions de réforme intéressantes et parfois convergentes.
Si le présent rapport procédera à un constat qui, à
quelques nuances près, reste dans la ligne de l'analyse effectuée
par ces diverses instances, il s'efforcera de présenter des propositions
concrètes dans le but d'améliorer le système d'information
et d'orientation dans le secondaire et le supérieur.
Par ailleurs, la mission d'information a estimé utile de faire figurer
dans son rapport le compte rendu des nombreuses auditions auxquelles elle a
procédé, ainsi que le résumé des réponses
reçues, via le réseau Internet, à ses questionnaires
successifs.
Si ces derniers éléments se prêtent mal à une
synthèse générale du fait de leur diversité, ils
devraient en revanche permettre de présenter les positions des
principaux acteurs et observateurs de notre système universitaire,
qu'ils en soient les inspirateurs, les responsables ou les usagers, enseignants
et étudiants.
En allant souvent très au-delà du seul objet de cette mission,
ils apporteront peut-être le témoignage que ces contacts directs
ou médiatisés avec le monde universitaire auront permis de lever
une part d'incompréhension, voire le malentendu qui s'est
développé depuis maintenant plusieurs décennies entre
l'opinion française - y compris d'ailleurs les élus
nationaux - et le monde universitaire.
Si les acteurs du système universitaire et les
" techniciens "
ont naturellement vocation à réfléchir à l'avenir
de notre université, la représentation nationale est
également fondée à analyser les causes de ses
dysfonctionnements et à formuler des propositions de réforme. Les
travaux de la présente mission d'information ont d'abord pour objet
d'éclairer le Sénat sur les problèmes de l'information et
de l'orientation des étudiants dans les premiers cycles, mais sa
réflexion se situe nécessairement sur un autre plan que celle
menée par les acteurs du monde universitaire. Le Parlement ne saurait en
effet se cantonner au seul examen annuel des incidences financières de
réformes proposées par le Gouvernement et se doit de participer
également à la réflexion engagée pour adapter
l'université aux nouveaux défis qui lui sont lancés.
Dans cette perspective, le présent rapport est aussi destiné
à informer l'opinion sur l'état de notre système
universitaire et a la légitime ambition de contribuer au rapprochement
des Français avec leur université.
*
* *
Force est de constater qu'une grande part de l'échec
universitaire, qui se traduit par des gaspillages humains et financiers
inacceptables pour notre pays, résulte d'une mauvaise orientation des
lycéens et des étudiants.
Le problème de l'information et de l'orientation des étudiants
des premiers cycles universitaires apparaît en outre désormais
d'autant plus aigu que l'enseignement supérieur a été
confronté à une mutation considérable qui se traduit par
une explosion de ses effectifs et l'accès de nouveaux publics à
l'université.
Le défaut d'information et d'orientation des lycéens, des
bacheliers et des nouveaux étudiants apparaît ainsi à
l'origine des principaux dysfonctionnements du système universitaire
français et surtout des difficultés rencontrées dans les
premiers cycles universitaires sur lesquels se concentrent les principales
critiques de l'opinion. L'image de l'université apparaît
aujourd'hui brouillée par les maux dont certains la disent
frappée : délabrement de ses locaux et insuffisance de son
encadrement qui seraient indignes d'un pays développé,
pléthore des effectifs étudiants, chômage de ses
diplômés, incapacité à mener ceux qu'elle accueille
à un diplôme, notamment en premier cycle.
Mais il convient de remarquer que contrairement à cette opinion trop
répandue, notre système universitaire a répondu dans des
conditions honorables au mouvement démographique de ces dernières
décennies et a fait preuve d'une capacité d'adaptation que
pourraient lui envier d'autres secteurs de la société
française, tel celui de la protection sociale par exemple.
Les réussites de notre système universitaire sont ainsi trop
fréquemment passées sous silence, qu'il s'agisse des conditions
dans lesquelles s'est réalisée sa démocratisation, qui
s'est traduite, il convient de le rappeler, par un quadruplement du nombre des
étudiants depuis quinze ans et par un doublement de ses flux
d'entrée en dix ans, mais aussi des efforts importants d'adaptation des
formations supérieures afin de répondre aux besoins de notre
économie : la création de nouvelles écoles
d'ingénieurs, des sections de techniciens supérieurs, des
instituts universitaires de technologie, des instituts universitaires
professionnalisés, de nouveaux DESS a ainsi répondu à ce
souci d'adaptation et de professionnalisation et a contribué à
modifier en profondeur notre système universitaire, sans doute davantage
que dans nombre de pays voisins qui sont pourtant cités en exemple.
Nul ne peut nier par ailleurs que le plan Université 2000,
cofinancé il est vrai par les collectivités locales, a permis de
développer considérablement les conditions d'accueil des
étudiants et que l'implantation des antennes universitaires dans les
villes moyennes, en offrant des premiers cycles aisément accessibles aux
bacheliers modestes, a permis à la fois de répondre au
défi de la démocratisation et aux impératifs de
l'aménagement du territoire.
Alors que beaucoup affirment que les qualifications acquises à
l'université sont inadaptées aux besoins des entreprises et sans
utilité sur le marché du travail et que d'autres dénoncent
le coût financier d'un enseignement supérieur ouvert sans
restrictions à l'ensemble des bacheliers, il convient aussi de rappeler
que le diplôme reste le meilleur passeport pour l'emploi
1(
*
)
et que le coût d'un étudiant
français, notamment en premier cycle, reste largement inférieur
à celui d'un élève de l'enseignement secondaire
2(
*
)
, d'un étudiant engagé dans une
filière sélective
3(
*
)
et aussi d'un
étudiant à l'étranger
4(
*
)
.
Par ailleurs, comment ne pas observer que la massification de l'enseignement
supérieur ne fait que traduire une demande sociale qui semble
aujourd'hui irréversible dans l'ensemble des démocraties
occidentales développées : tout projet de restriction
apporté à l'accès des bacheliers à
l'université serait illusoire et il ne paraît plus utopique que
notre système universitaire accueille la moitié des jeunes d'une
classe d'âge, comme cela devient la règle dans la plupart des pays
développés
5(
*
)
.
Enfin l'image parfois négative de l'université dans l'opinion
doit être également corrigée en prenant en compte les
diverses composantes et le caractère dual de notre enseignement
supérieur.
Certaines de ses composantes, on pourrait même dire les plus nombreuses,
fonctionnent, comme il sera vu plus loin, de manière
satisfaisante ; c'est le cas en particulier de l'ensemble du secteur
sélectif (classes préparatoires, grandes écoles ...) qui
assure traditionnellement le renouvellement des élites
françaises, des formations technologiques courtes également
sélectives, mais aussi des deuxièmes cycles, qui connaissent
cependant un échec non négligeable, et surtout des
troisièmes cycles qui développent le plus souvent une recherche
de qualité.
Les problèmes de l'université se concentrent donc principalement
dans les premiers cycles dont l'accès est librement ouvert à
l'ensemble des bacheliers. Encore convient-il de rappeler que l'échec
est loin d'y être aussi général que certains le
prétendent et que celui-ci résulte pour une grande part de
l'accès de nouveaux publics à l'université et des
dysfonctionnements enregistrés dans l'orientation des nouveaux
étudiants.
*
* *
Après avoir tenté de mesurer l'échec dans
les premiers cycles, le présent rapport s'efforcera d'analyser les
raisons de cet échec et notamment la part résultant des
défaillances du système d'information et d'orientation des
lycées et des étudiants.
Il proposera ensuite les mesures pour remédier à ces
défaillances, sans ignorer les propositions formulées
récemment en ce domaine par le ministre chargé de l'enseignement
supérieur à l'issue des états généraux de
l'université et par le rapport de la commission Fauroux.
I. UN ÉCHEC EN PREMIER CYCLE RÉSULTANT DE L'INADAPTATION DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AU PLUS GRAND NOMBRE ET DES DYSFONCTIONNEMENTS DU SYSTÈME D'ORIENTATION
A. UN ÉCHEC RÉSULTANT D'ABORD DE L'INADAPTATION DU SYSTÈME UNIVERSITAIRE À L'AFFLUX DES ÉTUDIANTS
S'il reste trop important et inacceptable du fait des
gaspillages humains et financiers qu'il engendre, l'échec universitaire,
notamment en premier cycle, doit d'abord être évalué
à sa juste mesure.
En préalable, quelques rappels doivent être effectués
concernant les conséquences de la démocratisation du
baccalauréat qui commande l'accès à l'enseignement
supérieur et pour mesurer la part désormais occupée par
les premiers cycles au sein de notre système universitaire.
1. Les conséquences de la montée en puissance du baccalauréat : l'accès de la moitié d'une classe d'âge à l'enseignement supérieur
a) L'explosion du nombre des bacheliers
Il convient d'abord de rappeler que les résultats du
baccalauréat ont enregistré en 1996 un taux de réussite
record de 76 % : sur 609.000 candidats, 463.000 sont ainsi
devenus bacheliers.
Ces résultats flatteurs ne doivent cependant pas écarter la
nécessité d'une réflexion générale sur
l'évolution du niveau moyen des nouveaux bacheliers.
Sur ce total, le nombre de bacheliers généraux
s'élève à 258.000, soit le double de celui des bacheliers
technologiques (130.000) tandis que les bacheliers
" professionnels "
représentent moins du quart de l'ensemble, soit environ 71.000 :
56 % des lauréats ont obtenu en 1996 un bac général,
29 % un bac technologique et 15 % un bac professionnel.
Le nombre des lauréats est cependant en recul par rapport à 1995
(- 17.000) du fait d'un creux démographique (- 5 % de
candidats présentés) et des efforts d'orientation
engagés depuis 1992 en faveur de l'enseignement professionnel. Depuis
cette date, en effet, de moins en moins d'élèves sont
orientés vers le lycée général ou technologique, au
profit du lycée professionnel qui conduit moins souvent au
baccalauréat. Depuis cette date, il convient également de noter
que la proportion d'une génération qui parvient au niveau du
baccalauréat tend à diminuer depuis deux ans (61 % en 1996
contre 63,7 % en 1995 et 67,1 % en 1994) après avoir connu une
forte progression de 30 à 50 % entre 1986 et 1992. Il n'en reste
pas moins que ces pourcentages traduisent les progrès spectaculaires de
scolarisation intervenus ces dernières années et se rapprochent
de l'objectif des 80 % d'une classe d'âge au niveau du
baccalauréat qui avait été fixé par les
responsables de l'éducation nationale au milieu des années 80.
b) Un accès massif des bacheliers généraux et technologiques à l'enseignement supérieur
Etant rappelé que le baccalauréat constitue le
premier grade universitaire et qu'il donne automatiquement accès
à l'enseignement supérieur, il convient de noter que la quasi
totalité des bacheliers généraux et que plus de 80 %
des bacheliers technologiques, depuis 1989 (contre moins de 60 % en 1980),
s'inscrivent dès la rentrée suivant l'obtention de leur
diplôme dans des formations supérieures.
En revanche, 15 % seulement des bacheliers professionnels accèdent
à l'enseignement supérieur, mais une enquête récente
révèle que la moitié d'entre eux regrettent de ne pas
être en mesure de le faire.
L'université en accueille le plus grand nombre (6 %), tandis que
les classes de STS ne sont choisies que par 4 % des bacheliers
professionnels. Les autres optent pour diverses formations supérieures,
1 % entrant dans un IUT.
Au total, la moitié d'une classe d'âge se dirige désormais
vers l'enseignement supérieur, soit une proportion voisine de celle
observée dans des pays comparables au nôtre, à l'exception
de la Grande-Bretagne.
ÉVOLUTION DES EFFECTIFS EN UNIVERSITÉS
c) L'importance des premiers cycles dans l'enseignement supérieur
Alors que les premiers cycles entendus au sens large,
c'est-à-dire regroupant les étudiants inscrits dans une formation
post-baccalauréat, représentent les 3/5e des effectifs de
l'enseignement supérieur, les premiers cycles universitaires (hors IUT)
rassemblaient 690.300 étudiants en 1995, soit un peu plus de la
moitié des premiers cycles et assimilés auxquels il convient
d'ajouter 103.000 étudiants inscrits en IUT.
Pour leur part, les deuxième et troisième cycles regroupent
respectivement 486.900 et 205.700 étudiants.
RÉPARTITION DES ÉTUDIANTS PAR CYCLE
Classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) |
76 500 |
Sections de techniciens supérieurs (STS) |
230 500 |
Instituts universitaires de technologie (IUT) |
103 000 |
Premier cycle |
690 300 |
Deuxième cycle |
486 900 |
Troisième cycle |
205 700 |
Instituts universitaires de formation des maîtres(IUFM) |
86 200 |
Ingénieurs (autres qu'universités) |
51 400 |
Autres (paramédical, social, commerce, gestion, ...) |
239 800 |
Total post-baccalauréat |
2 170 300 |
2. La mesure de l'échec en premier cycle
Du fait d'une coordination imparfaite des systèmes
statistiques, de la fréquence des redoublements, des
réorientations ultérieures et de la position d'attente de
nombreux étudiants, l'estimation des taux de succès et
d'échec des étudiants de premier cycle s'avère
malaisée.
Les diverses enquêtes menées en particulier par la DEP et le CEREQ
concordent cependant largement et révèlent un pourcentage
d'échec important, même s'il n'atteint pas les chiffres
catastrophiques annoncés par certains et s'il doit être
analysé en fonction de l'origine des bacheliers.
a) Un échec important mais qu'il convient d'interpréter
D'après l'enquête menée par le CEREQ en
1992
6(
*
)
auprès des entrants en premier
cycle de la rentrée 1988, 37 % de ces étudiants obtiennent
le DEUG en deux ans, 24 % en trois ans et 7 % en quatre ans, soit
61 % en deux ou trois ans et 68 % au total, dont un sur dix dans une
autre spécialité que celle de la première inscription.
D'après la même enquête, les 32 % d'étudiants
qui échouent se ventilent en trois catégories :
· 10 % se réorientent vers d'autres filières
supérieures (STS, IUT, écoles diverses) et obtiennent un
diplôme de niveau bac + 2 ;
· 6 % également réorientés, sont encore en
cours d'études ;
· 16 % abandonnent l'enseignement supérieur sans autre
diplôme que le baccalauréat dont un tiers après avoir
tenté une filière extérieure à l'université.
Ces résultats peuvent être comparés aux taux de
réussite observés dans les filières sélectives
courtes : 80 % des étudiants d'IUT obtiennent leur diplôme
tandis que 70 % des élèves de STS réussissent leur
BTS, l'échec du diplôme dans ce dernier cas n'empêchant pas,
par ailleurs, des perspectives d'insertion professionnelle très
satisfaisantes.
Pour sa part, M. Claude Thélot, directeur de la DEP, lors de son
audition devant la mission a indiqué que 57 % des étudiants
inscrits en DEUG passaient en licence dans la discipline choisie lors de leur
entrée à l'université et a comparé ce taux de
réussite non négligeable à celui constaté dans les
IUT et les BTS ainsi que dans les classes préparatoires scientifiques
(60 %). Il convient cependant de rappeler que la réussite au DEUG
est obtenue, dans près de la moitié des cas, au prix d'un ou de
deux redoublements, à la différence des résultats
enregistrés dans les filières sélectives.
b) un échec qui varie selon les disciplines et l'origine des bacheliers
-
la répartition des étudiants par types de
formation
Classes supérieures (Public + Privé) |
307 000 |
dont CPGE |
76 500 |
STS primaire + secondaire |
86 500 |
STS tertiaire |
144 000 |
IUT secondaire |
48 000 |
IUT tertiaire |
55 000 |
Droit et sciences économiques |
358 700 |
Lettres |
529 500 |
Sciences (y compris STAPS et ingénieurs universitaires) |
342 000 |
Médecine, pharmacie, odontologie |
152 700 |
Ingénieurs (autres qu'universités) |
51 400 |
-
un échec inégal selon les disciplines
Alors que le taux d'accès en deuxième cycle, en deux, trois ou
quatre ans, se situe pour l'ensemble des disciplines à 57 %, les
DEUG scientifiques (63 %) enregistrent un taux de réussite
supérieur à celui des DEUG de lettres (61 %) et de droit et
de sciences économiques (52 %) du fait notamment de l'exigence d'un
niveau mathématique, alors que les études littéraires et
juridiques ne disposent pas d'un filtre similaire pour éviter l'afflux
massif d'étudiants. En revanche, la médecine, l'odontologie et la
pharmacie enregistrent des taux très inférieurs du fait de la
sélection qui intervient à l'issue de la première
année.
D'après l'enquête du CEREQ précitée menée en
1992, la situation des étudiants quatre ans après leur
entrée en premier cycle en 1988, est extrêmement variable selon
les disciplines.
Si le taux d'abandon d'études sans autre diplôme que le
baccalauréat est en moyenne de 16 %, il atteint 26 % en droit
et sciences politiques, 27 % en administration économique et
sociale (AES), 18 % en langues et en psychologie alors qu'il n'est que de
5 % et 6 % en médecine-pharmacie, 8 % en
mathématiques et en physique, 9 % en éducation physique et
sportive, 12 % en lettre et 15 % en sciences économiques.
Le taux de réussite moyen au DEUG en deux, trois ou quatre ans serait
pour sa part de 68 %, de 57 % en AES, de 78 % en
mathématiques et physique, de 76 % en lettres et de 66 % en
langues.
Enfin à partir d'une première année, 69 % des
étudiants de droit et 70 % des étudiants d'AES finissent par
décrocher un diplôme à bac + 2, contre 81 % en
sciences économiques, 84 % en lettres, 77 % en langues,
83 % en histoire-géographie, 79 % en sociologie, 81 % en
psychologie, 89 % en maths-physiques, 80 % en sciences de la vie et
91 % en éducation physique et sportive.
-
une situation très contrastée selon l'origine des
bacheliers
S'agissant des premiers cycles universitaires
, les enquêtes
révèlent que les taux de réussite sont très
contrastés entre les bacheliers généraux et les bacheliers
technologiques.
L'enquête du CEREQ sur le devenir des bacheliers de 1988, trois ans
après l'obtention du baccalauréat, révèle les
résultats suivants :
|
Taux de réussite au DEUG |
Taux de réorientation |
Taux d'abandon d'études |
Encore en 1er cycle |
Bacheliers scientifiques |
68 % |
18 % |
3 % |
11 % |
Bacheliers littéraires et économiques |
65 % |
16 % |
8 % |
11 % |
Bacheliers technologiques industriels |
27 % |
40 % |
25 % |
8 % |
Bacheliers technologiques tertiaires |
31 % |
31 % |
31 % |
7 % |
Les données fournies par la DEP confirment ces
inégalités entre les bacheliers généraux et
technologiques : si 57 % des étudiants inscrits en DEUG
accèdent à la licence dans la discipline choisie au
départ, ce taux est de 63 % pour les bacheliers
généraux et seulement de 25 % pour les bacheliers
technologiques.
Enfin, même s'il ne saurait être envisagé de s'opposer
à l'accès des bacheliers professionnels à
l'université, leurs chances d'accéder aux deuxièmes cycles
restent faibles. Il appartiendrait à tous les responsables de rappeler
que le " bac pro " en raison de sa finalité d'insertion
professionnelle immédiate, n'a pas vocation à permettre avec
succès la poursuite d'études supérieures
générales : des efforts d'information et d'orientation des
bacheliers professionnels ainsi que l'organisation d'une formation
complémentaire spécifique, apparaissent en ce domaine
particulièrement nécessaires. En 1994, leur taux d'accès
au second cycle s'établissait à près de 14 % soit une
hausse de trois points par rapport à 1993, et de 12 % en
économie-AES où ils sont les plus nombreux, dont seulement la
moitié à l'issue d'un cursus de deux ans en premier cycle.
·
S'agissant des IUT
, la situation apparaît beaucoup moins
contrastée selon l'origine des bacheliers. Alors que le taux de
réussite en IUT est déjà non négligeable au bout de
deux ans (69 % dans le secteur secondaire et 70,5 % dans le secteur
tertiaire), les résultats obtenus sont beaucoup plus homogènes si
l'on prend en compte les baccalauréats d'origine : 88 % des
bacheliers scientifiques, 83 % des bacheliers littéraires et
économiques, 74 % des bacheliers technologiques industriels et
75 % des bacheliers technologiques tertiaires obtiennent ainsi le DUT en
deux ou trois ans. Il convient également de remarquer que les rares
bacheliers professionnels admis en IUT connaissent un taux de réussite
en deux ou trois ans non négligeable de l'ordre de 50 %
étant cependant précisé que sur 35.438
diplômés d'IUT en 1995, 229 seulement étaient des
bacheliers professionnels (hors formation par apprentissage ou alternance).
·
S'agissant des BTS
, il convient de rappeler que le nouveau
contrat pour l'école préconise une revalorisation des
baccalauréats professionnels, notamment en favorisant les poursuites
d'études en BTS, avec une première année aux horaires
adaptés. Les bacheliers professionnels y obtiennent des résultats
satisfaisants, même s'ils restent inférieurs à ceux des
bacheliers généraux et technologiques : 45 % obtiennent leur
BTS, dont 39 % au bout de deux ans.
*
* *
Si les enquêtes précitées permettent de
nuancer son importance, l'échec en premier cycle reste
préoccupant pour les étudiants mais aussi pour leurs familles,
pour les finances publiques et pour le fonctionnement de notre système
universitaire.
Les redoublements et les réorientations ont en effet un coût
important et se traduisent par des locaux suroccupés, des enseignants
découragés, des étudiants mécontents.
Les quelques indications qui viennent d'être rappelées permettent
de mesurer l'ampleur et l'inégalité de l'échec dans les
premiers cycles : si celui-ci est lié directement à
l'inadaptation de notre enseignement supérieur, il résulte aussi
largement des dysfonctionnements constatés dans l'orientation des
bacheliers et des étudiants.
B. LES DÉRIVES OBSERVÉES DANS L'ORIENTATION DES BACHELIERS
Confronté à une massification de
caractère " tellurique ", notre système universitaire
qui, en dépit des évolutions intervenues depuis près de
trente ans, reste organisé pour recevoir l'élite scolaire du
pays, n'est plus en mesure d'accueillir de manière satisfaisante une
population étudiante désormais profondément
diversifiée.
L'évolution récente se traduit notamment par un
détournement des filières sélectives courtes à
finalité professionnelle et par un afflux d'étudiants mal
préparés dans les filières d'enseignement
général pour suivre avec succès des études
supérieures de caractère abstrait.
1. L'importance du secteur sélectif
Alors que l'absence de sélection est
présentée comme la caractéristique principale de notre
enseignement supérieur, ce système est en réalité
à la fois le plus ouvert pour l'entrée à
l'université et parmi le plus sélectif du monde, à
l'exception peut-être du Japon, pour l'accès à certaines
filières, telles les grandes écoles qui fournissent l'essentiel
des quelques 30 ou 40.000 cadres ou dirigeants nécessaires au
fonctionnement de la société française.
Il convient d'ailleurs de remarquer que, dans une perspective d'ascension
sociale, les classes préparatoires et les grandes écoles
paraissent en fait plus égalitaires et plus favorables aux
élèves doués d'origine modeste que les filières
générales non sélectives, y compris dans les
troisièmes cycles.
Ce système est cependant coûteux puisque le " prix de
revient " d'un étudiant en classe préparatoire est de
70.000 F contre 32.000 F en DEUG.
Dans ce système dual, les classes préparatoires aux grandes
écoles, les instituts d'études politiques, les
établissements privés, les formations sociales et
médicales, les IUFM, les filières médicales en fin de
première année et enfin les IUT et les STS, qui ne disposent que
de capacités d'accueil limitées, n'acceptent les bacheliers
qu'après une sélection plus ou moins rigoureuse. Au total, les
filières sélectives accueillent environ 40 % des
étudiants des deux premières années
post-baccalauréat.
2. Le détournement des filières sélectives courtes de leur finalité initiale
Dans la réalité les filières
sélectives courtes à finalité d'insertion professionnelle
comme les IUT et les STS sont investies par les meilleurs bacheliers
généraux alors que les bacheliers technologiques, auxquels ces
filières étaient primitivement destinées, se trouvent
massivement dans l'obligation de se tourner vers les filières
générales universitaires et de s'inscrire en DEUG.
Ce détournement se constate tout particulièrement dans les IUT
puisque 70 % de leurs étudiants sont titulaires du
baccalauréat général et que plus de la moitié de
leurs effectifs sont des bacheliers scientifiques.
Les bacheliers technologiques ne représentent donc que 30 % des
étudiants des IUT alors qu'ils y réussissent de manière
plutôt satisfaisante puisque 74 % d'entre eux obtiennent le DUT en
deux ou trois ans. En outre, en dépit d'une augmentation importante des
places offertes, la proportion des bacheliers technologiques du secteur
industriel qui était de 38 % en IUT il y a une quinzaine
d'années tend à se réduire et ne représente plus
aujourd'hui que 25 % des étudiants des spécialités
industrielles, alors que la proportion des bacheliers du secteur tertiaire
reste stable.
Enfin, les bacheliers technologiques accèdent plus largement aux STS
où ils représentent 47 % des inscrits.
3. La transformation de fait des filières courtes en premiers cycles
Les filières courtes étant
détournées de leur vocation initiale deviennent pour un nombre de
plus en plus grand d'étudiants, notamment pour les bacheliers
généraux, des premiers cycles mieux équipés et
mieux encadrés : le taux de poursuite d'études après
un BTS ou un DUT a ainsi doublé de 1980 à 1988 et atteignait
à cette dernière date 30 % en BTS et plus de 50 % en
IUT.
Cette attirance pour les filières courtes, et le détournement de
ces dernières, qui deviennent dans la pratique des premiers cycles,
s'expliquent par les difficultés rencontrées actuellement par les
diplômés sur le marché du travail et par le souci des
bacheliers de bon niveau, d'origine modeste, de bénéficier d'un
encadrement satisfaisant et d'acquérir en deux ans un diplôme
apprécié par les entreprises.
Il convient cependant de remarquer que le caractère appliqué et
concret de l'enseignement dispensé dans les IUT ne garantit pas aux
titulaires de DUT une poursuite aisée d'études en deuxième
cycle, qui sont à la fois plus générales et plus
théoriques notamment dans des disciplines fondamentales comme la
physique ou les mathématiques.
4. Une orientation massive par défaut dans les filières générales
La réforme Fouchet de 1966 concevait le DEUG comme un enseignement préparatoire au deuxième cycle. Son organisation apparaît aujourd'hui inadaptée pour accueillir des populations étudiantes dont l'hétérogénéité résulte de la diversification des baccalauréats et qui n'ont pas nécessairement l'intention de poursuivre des études longues, ni les compétences requises pour le faire.
a) Les tentatives d'adaptation des DEUG à une population diversifiée
Afin de remédier à cette inadaptation et au taux
d'échec en premier cycle qui en résultaient, plusieurs
réformes ont été engagées pour rénover les
DEUG.
-
la rénovation Savary
Une première réforme issue de la loi de 1984 a permis d'augmenter
sensiblement le taux d'accès des nouveaux étudiants en
deuxième cycle.
Cette rénovation introduisait plusieurs mesures nouvelles qui seront
reprises, comme il sera vu plus loin, dans les réformes
ultérieures : mise en place d'une période d'information et
d'orientation en première année d'une durée maximum d'un
semestre, division du DEUG en deux composantes, l'une principale, l'autre
optionnelle entre lesquelles l'étudiant pourra choisir afin
d'éviter une spécialisation trop précoce,
amélioration de l'accueil et de l'information des étudiants lors
de leur entrée à l'université.
La réforme Savary prévoyait également l'extension de
l'enseignement en petits groupes, par opposition aux cours magistraux et un
suivi individualisé des étudiants par les enseignants.
Si les premiers résultats enregistrés par les
établissements qui ont mis en oeuvre cette réforme ont
été encourageants, le taux de réussite au DEUG
étant passé de 49 % pour les étudiants entrés
à l'université en 1983 à 61 % pour ceux entrés
en 1988, de 28 % à 40 % pour le DEUG scientifique en deux ans
à Paris-XI Orsay, de 30 % à 50 % pour le DEUG
maths-physique et de 35 % à 60 % pour le DEUG sciences de la
vie à Grenoble I, la montée des effectifs,
l'hétérogénéité des nouvelles populations
étudiantes, les difficultés d'organisation d'un enseignement
optionnel pour chaque DEUG et une certaine démobilisation des
enseignants se sont conjuguées pour faire remonter les taux
d'échec.
Enfin, il convient de rappeler que seulement deux tiers des universités
ont mis en place cette réforme, la plupart des professeurs en droit et
en sciences économiques notamment la jugeant inapplicable, et que les
DEUG pluridisciplinaires prévus dans le projet de loi initial ont
été réduits à deux disciplines du fait de
l'opposition des enseignants.
-
la réforme Jospin-Lang
La rénovation pédagogique introduite par l'arrêté du
26 mai 1992 et modifiée par celui du 12 avril 1994 avait pour ambition
d'élargir la finalité initiale du DEUG en lui assignant
également un objectif d'insertion professionnelle.
Cette seconde réforme a été mise en oeuvre dès la
rentrée 1993 pour les universités volontaires, tandis que
d'autres dispositions ont complété le dispositif initial au
rythme des contrats passés par les établissements avec l'Etat.
Cette réforme reprend les principes de la rénovation de 1984 :
semestre d'orientation, pluridisciplinarité des cursus par
l'introduction d'une majeure, d'une mineure et d'options.
Elle prévoit en outre que les programmes seront divisés en
modules capitalisables, compensables et transférables, sans notes
éliminatoires, afin de permettre aux étudiants d'obtenir leur
diplôme en plusieurs années, de se réorienter ou de
reprendre leurs études sans recommencer la totalité du cursus.
Elle met également en place un tutorat assuré par des
étudiants de troisième cycle et introduit une formation
d'informatique et de langues étrangères dans l'ensemble des
filières, qui est d'ailleurs restée lettre-morte, ainsi qu'une
semaine d'accueil et d'information pour les nouveaux étudiants.
Ces innovations devaient permettre de diversifier les DEUG en mettant notamment
en place des options spécifiques pour les bacheliers technologiques, en
renforçant les soutiens aux étudiants en difficultés, en
favorisant la capitalisation des acquis et en autorisant les DEUG en trois ans
ainsi que les dérogations pour redoublements.
Si la rénovation des DEUG engagée en 1992 s'est traduite dans les
faits par de nombreuses habilitations nouvelles et par quelques
expériences intéressantes, elle n'a pu être menée
à son terme et produire tous ses effets du fait de la complexité
de son organisation, de son caractère quelque peu technocratique, de son
application progressive, d'une hétérogénéité
croissante des effectifs étudiants, des réticences
ministérielles et des résistances de certains enseignants
attachés à la défense et à la primauté de
leur discipline.
Dans la pratique, cinq universités seulement en 1993 ont appliqué
la totalité de la réforme et une soixantaine ne l'ont mis en
oeuvre que pour quelques filières tandis qu'une quinzaine l'ont
complètement ignorée. Par ailleurs, alors que le tutorat et
l'organisation en modules nécessitaient des moyens
supplémentaires, ceux-ci n'ont été accordés que
parcimonieusement après 1993, même si le ministre de
l'époque avait fixé à la rentrée 1996 le terme de
l'application intégrale de la réforme, en écartant
toutefois de celle-ci les filières juridiques et économiques.
Cette réforme a cependant rempli une partie de ses objectifs, puisque la
DEP a constaté que le taux d'accès au second cycle était
passé de 56 % en 1992 à 59 % en 1995.
b) L'hétérogénéité des étudiants de premier cycle
Outre l'hétérogénéité qui
résulte de la coexistence de bacheliers généraux et de
bacheliers technologiques, on peut observer également une
disparité de niveau, notamment en mathématiques, entre les
bacheliers généraux dans les DEUG scientifiques selon la nature
de leur baccalauréat.
Alors que les bacheliers généraux constituent encore les
effectifs les plus nombreux en DEUG, les bacheliers technologiques qui s'y
orientent le plus souvent par défaut sont généralement
contraints de s'inscrire en lettres et en sciences humaines du fait de leur
niveau insuffisant en mathématiques.
L'hétérogénéité des premiers cycles
résulte également de la coexistence entre nouveaux
étudiants et ceux qui se sont réorientés après un
échec dans une filière sélective (classes
préparatoires, médecine).
On observe ainsi une cohabitation difficile entre étudiants ayant choisi
volontairement une discipline dans une perspective d'études longues et
ceux qui se trouvent orientés par défaut dans des filières
où ils n'ont que peu de chances de succès, sauf redoublements et
dérogations, et qui se trouvent fréquemment en difficultés
faute d'une maîtrise des prérequis permettant de suivre des
formations longues.
Cette remarque vaut plus encore pour les bacheliers professionnels qui se
dirigent de plus en plus vers les formations générales
supérieures où ils sont massivement condamnés à
l'échec, faute d'une orientation adaptée et d'avoir trouvé
une place dans une filière courte.
Cette orientation par défaut en DEUG a des conséquences
préjudiciables, d'abord pour les étudiants mal
préparés à des études générales, mais
aussi pour les étudiants de bon niveau qui ne travaillent pas à
leur rythme et qui se trouvent ainsi incités à se tourner vers
des filières sélectives ou des formations privées.
Outre cette mauvaise répartition des bacheliers entre les
filières universitaires générales et les filières
professionnalisées courtes, on constate également des
orientations erratiques de bacheliers souvent indécis qui souhaitent
cependant tenter leur chance à l'université, répondant en
cela notamment à des engouements massifs parfois imprévisibles
vers des filières aux capacités et aux débouchés
limités.
5. Des orientations erratiques commandées par des phénomènes de mode et par l'absence de motivation des nouveaux étudiants
Des enquêtes récentes révèlent une sous-information préoccupante des élèves de terminale et des bacheliers pour leur orientation universitaire tandis que l'engouement pour certaines filières traduit leur méconnaissance des réalités universitaires et des débouchés offerts.
a) Une sous-information préoccupante des nouveaux étudiants
Selon deux enquêtes récentes de la DEP
menées auprès d'un échantillon représentatif de
1600 étudiants et de 700 élèves de terminale, seuls deux
tiers d'entre eux se seraient informés sur le contenu exact des
études avant de s'inscrire dans une filière et moins d'un sur
deux se serait inquiété des chances d'accès en seconde
année. En outre, moins de la moitié des étudiants auraient
d'abord choisi leur orientation en fonction des débouchés
professionnels, leur niveau scolaire n'ayant été pris en compte
que pour un tiers d'entre eux : pour les trois quarts des étudiants,
l'intérêt pour la filière commande en priorité leur
choix.
D'une manière générale, les intéressés
s'estiment sous-informés pour choisir une filière
supérieure, même s'ils ont bénéficié d'une
information multiforme, souvent diffuse et vague, auprès des conseillers
d'orientation, de leurs professeurs et surtout des parents, obtenue à
l'issue d'une démarche personnelle.
D'après ces enquêtes, l'orientation des étudiants
découlerait donc d'abord de leur intérêt pour les
filières choisies tandis que les débouchés, le contenu et
le niveau requis pour ces filières ne semblent être pris en compte
que de manière vague et incomplète.
S'agissant du calendrier des choix effectués, le tiers des
élèves prendraient leur décision d'orientation avant la
classe de terminale, la moitié au cours de cette classe et un
huitième d'entre eux après l'obtention du baccalauréat.
Par ailleurs, le quart des étudiants interrogés déclarent
regretter ensuite cette orientation initiale, soit qu'ils aient pris conscience
de leur niveau scolaire insuffisant, soit qu'ils aient méconnu les
réalités du monde universitaire ; la moitié d'entre
eux, compte tenu de ces éléments, auraient choisi une autre
filière.
En outre, la moitié des étudiants entrés en DEUG
déclarent éprouver des difficultés à suivre un
enseignement supérieur et dénoncent notamment la faiblesse de
l'encadrement qui ne les incite pas à travailler.
Enfin, la moitié de l'échantillon consulté, lycéens
et étudiants, estime qu'une orientation plus sélective à
l'entrée dans l'enseignement supérieur serait souhaitable, la
proportion de ceux qui y sont opposés étant en progression par
rapport à une précédente enquête effectuée en
1990.
Même si les étudiants ont conscience des risques d'échec en
DEUG, ils souhaitent cependant tenter une expérience universitaire.
b) L'afflux d'étudiants vers des filières attractives mais à capacités et à débouchés limités : l'exemple des filières sportives
La loi de 1984 sur l'organisation de l'enseignement
supérieur pose le principe de la liberté de choix de
l'étudiant, ce principe qui fonde notre système universitaire
étant strictement appliqué par les tribunaux administratifs,
comme en témoignent des décisions récentes rendues
à l'occasion de recours portés contre les tests d'aptitude
institués par certaines universités pour l'accès aux
filières sportives.
C'est ainsi qu'après des disciplines comme l'histoire, la psychologie et
la médecine qui ont connu un fort engouement jusqu'en 1994, les
filières sportives (DEUG de sciences et techniques des activités
physiques et sportives) ont fait l'objet depuis deux ans d'une très
forte demande des bacheliers qui apparaît disproportionnée par
rapport aux capacités des unités de formation et de recherche
correspondantes et aux débouchés offerts qui, pour l'essentiel,
se réduisent aujourd'hui au professorat. Lors des dernières
inscriptions universitaires, 35.000 candidats se seraient manifestés
dans les 32 UFR qui proposent ces formations, les capacités
d'accueil ayant pourtant été portées de 3.800 à
7.400 places entre 1995 et 1996. Cette demande massive et quelque peu
imprévisible n'épargne aucune région :
2.000 postulants pour 800 places en Ile-de-France, 800 pour 250
à Aix-Marseille, 1.300 pour 340 à Rennes, 750 pour 180 à
Nice.
Afin de répondre à ces demandes, trois nouvelles UFR ont
été habilitées et plusieurs délocalisations ont
été décidées.
Votre mission d'information ne peut que s'interroger sur le bien-fondé
de la réponse apportée par le Gouvernement à cet
engouement irrationnel et massif des bacheliers pour les filières
sportives, compte tenu notamment du coût de leur encadrement et des
infrastructures nécessaires à ces formations, et surtout de leurs
débouchés limités.
C. UN PRÉALABLE À UNE VÉRITABLE POLITIQUE D'ORIENTATION : LA RÉFORME DE LA FILIÈRE TECHNOLOGIQUE SUPÉRIEURE ET LA PROFESSIONNALISATION DES FORMATIONS
Une politique d'orientation efficace des lycéens et des
étudiants à finalité notamment professionnelle, suppose
que la filière technologique supérieure soit clairement
définie et revalorisée pour permettre notamment à ses
étudiants d'accéder aux diplômes universitaires les plus
élevés.
Par ailleurs, l'inadaptation constatée entre les formations
supérieures dispensées et leurs débouchés
potentiels ne pourra être réduite qu'en introduisant une certaine
dose de professionnalisation dans l'ensemble des filières.
1. Les perspectives de réforme de la filière technologique supérieure
Les propositions de réforme les plus récentes de la filière technologique ont été formulées par la commission Lavroff, par la commission Fauroux et par le ministre à l'issue des états généraux de l'université.
a) Les propositions de la commission Lavroff
La commission Lavroff préconise de développer
des premiers cycles à finalité professionnelle, notamment dans le
secteur tertiaire et de créer de nouveaux types de formation.
La commission est favorable, en outre, au développement d'années
spéciales post-premier cycle, en IUT et dans les filières
générales mais recommande aussi la création de formations
diversifiées à finalité professionnelle pour accueillir
des " bacs pro " et donner un complément de formation
professionnelle en alternance pour les étudiants qui échouent en
premier cycle.
Elle propose également de mettre en place des formations
intermédiaires non sélectives entre les filières
universitaires scientifiques et celles à finalité professionnelle
directe, c'est-à-dire des formations courtes à la fois
générales et professionnelles inspirées du modèle
des DEUST mais comportant un profil moins pointu, qui n'interdiraient pas
à leurs étudiants de poursuivre des études
générales.
b) Les propositions issues des états généraux de l'université : une réforme à échéances lointaines
D'après les indications fournies par le ministre, la
réforme de la filière technologique ne prendra son plein effet
qu'à un terme de six à dix ans...
Elle est définie comme une filière universitaire associant
l'enseignement à la recherche et devrait être organisée au
sein des universités et en cohérence avec les STS et les IUT qui
seraient maintenus.
Elle s'accompagnerait d'une carte nationale des passerelles pour les
étudiants des filières courtes permettant à ceux-ci
d'anticiper leurs perspectives de poursuite d'études, et de la recherche
d'accords avec des IUT ou des écoles d'ingénieurs pour
l'utilisation des plates-formes techniques.
c) Les propositions de la commission Fauroux
La commission Fauroux propose de mettre en cohérence
les DUT, les BTS et les DEUT et de limiter à une centaine (contre
près de 600 actuellement) les diplômes agréés
au niveau national afin d'améliorer la lisibilité des cursus
professionnels.
Elle souhaite en outre développer les diplômes d'études
universitaires technologiques préparés par alternance.
2. Une nécessaire professionnalisation des formations supérieures
En dépit d'une position qui reste encore parfois frileuse par rapport à l'entreprise, l'éducation nationale a considérablement évolué en ce domaine en développant depuis quelques années un partenariat institutionnalisé permettant notamment de proposer de nouveaux diplômes, d'organiser des stages, de mettre en place des passerelles entre les formations, de définir des programmes régionaux de formation et de développer des formations en alternance notamment fondées sur l'apprentissage.
a) Les propositions de la commission Fauroux
Pour la commission Fauroux, la promotion de l'identité
de l'enseignement professionnel passe d'abord par des mesures institutionnelles
: création d'une direction générale de l'enseignement
professionnel et de l'insertion au sein du ministère,
indépendance du Haut comité éducation-économie
à l'égard de celui-ci et création d'une instance associant
Etat, régions et partenaires sociaux pour définir les contenus
des enseignements professionnels et les diplômes.
Il convient de noter que la commission Fauroux a renoncé au principe
d'une régionalisation de l'enseignement professionnel qui aurait
notamment concerné sa gestion, les contenus des formations et la
définition des diplômes et a admis le principe que seule une
politique nationale était de nature à donner toute sa place
à l'enseignement professionnel.
Elle propose également de promouvoir la coéducation en
sollicitant les entreprises afin que celles-ci s'ouvrent davantage aux jeunes
selon des formules d'alternance sous statut scolaire ou salarié, et ce,
à tous les niveaux d'enseignement hors DEUG généraux et
classes préparatoires. Dans cette perspective, les entreprises, les
services publics et l'administration devraient accueillir d'ici à cinq
ans dix fois plus de stagiaires qu'actuellement pendant quatre mois en moyenne.
Elle préconise par ailleurs l'ouverture de centres de formation
professionnelle dans cinq cents nouveaux lycées et propose que les
grandes écoles puissent recruter leurs élèves sur des
critères d'expérience grâce au développement de la
validation des acquis.
b) Les propositions issues des états généraux de l'université
Les mesures annoncées par le ministre s'ordonnent autour de quatre thèmes : l'introduction d'une professionnalisation dans l'ensemble des cursus universitaires, l'institution d'un module de professionnalisation dans les premiers et les seconds cycles universitaires, une relance de la politique des stages en entreprise et une professionnalisation qui serait offerte à chaque niveau de sortie, notamment par la voie de la formation en alternance et de l'apprentissage.
II. LES INSUFFISANCES DU SYSTÈME D'INFORMATION ET D'ORIENTATION
Les dysfonctionnements qui viennent d'être
rappelés, et leurs conséquences sur l'échec en premier
cycle, commandent d'évaluer les structures et les procédures
d'information et d'orientation existant dans notre système
éducatif pour chaque ordre d'enseignement.
Alors que l'orientation devrait être un processus continu engagé
précocement dès le secondaire, son fonctionnement actuel, son
caractère tardif, brutal et subi, l'absence de moyens et l'inadaptation
des procédures hypothèquent dans la pratique une large part des
bénéfices que l'on pouvait attendre des progrès de la
scolarisation et de la démocratisation de l'enseignement
supérieur.
A. L'ORIENTATION DANS L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE : UNE PROCÉDURE RESSENTIE COMME SUBIE, AUTORITAIRE ET SYNONYME D'ÉCHEC
Comme le rappelle à juste titre, le rapport de la
commission Fauroux, l'orientation, de la classe de 6e jusqu'à
l'entrée dans l'enseignement supérieur, apparaît comme le
produit d'un " ajustement perpétuel entre les aspirations du jeune
et ses capacités " et résulte d'un jeu complexe où se
mêlent les résultats scolaires, les acquis sociaux et des
décisions de caractère autoritaire.
L'orientation scolaire est commandée ainsi par une
hiérarchisation entre les filières - des filières
nobles qui conduisent au baccalauréat général jusqu'aux
filières de relégation - dans un système où
l'enseignement technologique et surtout professionnel, est
considéré par les familles comme une voie d'orientation par
défaut sanctionnant un échec ou l'insuffisance de
résultats dans la voie générale.
Tant que les voies technologiques et professionnelles ne seront pas
revalorisées, notamment pour permettre la poursuite d'un cursus
supérieur de formation jusqu'aux diplômes les plus
élevés -grandes écoles ou troisième cycles
universitaires - sans emprunter à un moment ou à un autre un
passage par les filières d'enseignement général, toute
démarche d'orientation restera entendue comme le constat d'un
échec scolaire sanctionné par un verdict d'ailleurs souvent
refusé par les familles.
La dernière livraison de l'" Etat de l'école ", qui
vient d'être présenté par la DEP, semble cependant annoncer
un tournant dans l'équilibre qui s'était établi depuis les
années 60 entre les formations générales et technologiques
d'une part, et les formations professionnelles, d'autre part.
D'après cette étude, une réduction du taux de passage en
classe de 3ème générale peut s'observer en effet depuis
1991, au profit du lycée professionnel et le ministre a pu se
réjouir à cette occasion que moins d'élèves
étaient désormais attirés par les études longues,
et que l'orientation professionnelle était choisie par un nombre
croissant d'élèves.
Convient-il d'interpréter cette évolution si elle se poursuivait,
et surtout les commentaires qui en ont été faits, comme
annonçant un tournant dans la politique du gouvernement ?
Si c'était le cas, il faudrait que les moyens budgétaires
accordés à l'enseignement professionnel du second degré
traduisent cette nouvelle priorité, que cette filière se trouve
revalorisée, que soient développées des passerelles entre
les divers ordres d'enseignement, que soient activés les dispositifs
permettant des reprises d'études ultérieures et enfin, que cette
nouvelle tendance se trouve prise en compte dans la réforme de la
filière technologique supérieure et dans la professionnalisation
des formations post-baccalauréat.
1. Une orientation tardive et brutale au collège
En dépit de ses objectifs ambitieux, la réforme
du collège unique n'a pas permis de prendre en compte la
diversité et l'hétérogénéité des
élèves et de mettre en place une diversification des parcours par
des innovations pédagogiques efficaces.
D'après les conclusions du " Livre blanc des
collèges ", élaboré en 1994 par le groupe de travail
présidé par Alain Bouchez, les classes technologiques
fonctionnement plus comme " une structure d'accueil d'élèves
en difficulté que comme une option revalorisante répondant
à un choix positif ", et l'évaluation des performances des
élèves par les professeurs et le fonctionnement des conseils de
classe qui orientent les élèves sans appel font également
l'objet de critiques.
Afin de remédier à cette situation, le nouveau contrat pour
l'école prône une adaptation du collège à
l'hétérogénéité des élèves et
des parcours de réussite pour chacun. Il a permis d'expérimenter
en 1995 des classes de 6e de consolidation destinée à mettre
l'accent sur les méthodes de travail et la maîtrise des
apprentissages fondamentaux ; ces classes devaient être
généralisées lors de la dernière rentrée
scolaire.
Subsiste cependant une interrogation sur le sort des élèves en
grande difficulté et sur la finalité des filières
technologiques qui sont trop souvent considérées comme des
filières de relégation.
L'absence d'une voie professionnelle sous statut scolaire au collège
sous la forme d'un cycle professionnel individualisé en 5e et en 4e, ne
permet pas de traiter l'échec scolaire et les refus de scolarisation de
certains élèves en grande difficulté ni d'éviter
des décisions tardives et brutales d'orientation en fin de 3e.
Une orientation efficace passerait ainsi par le développement d'une
véritable éducation au choix des élèves, la mise en
oeuvre des mesures prévues dans le nouveau contrat pour l'école
et par la mise en place d'un volet d'orientation qui permettrait d'harmoniser
au sein de chaque collège les actions d'information et d'orientation des
équipes éducatives.
2. L'orientation au lycée : des dispositifs inadaptés et sous-utilisés
Au lieu de préparer aux études
supérieures, aux méthodes de travail de l'université et au
choix d'une filière de formation liée à un premier
objectif de professionnalisation, le lycée concentre exclusivement ses
efforts sur le baccalauréat et n'apprend pas à ses
élèves à s'orienter. Dans la réalité, les
dispositifs d'orientation mis à la disposition des lycéens
apparaissent trop discrets, excessivement complexes, peu connus de leurs
utilisateurs et voués, comme le remarque le rapport de la commission
Fauroux, " à une auto-consommation excessive de littérature
spécialisée qui demeurent inconnue des familles et des
élèves ".
En dépit de leurs efforts, l'ensemble des enseignants, les professeurs
principaux et les conseillers d'orientation-psychologues ne disposent pas des
moyens, du temps et d'une formation adaptée pour répondre aux
besoins d'une population lycéenne de plus en plus
hétérogène.
De nombreux intervenants entendus par la mission d'information et de nombreux
messages transmis au Sénat, via le réseau Internet, ont en
particulier souligné, à tort, parfois avec
sévérité, l'inefficacité des conseillers
d'orientation psychologues, qui sont présentés comme les
responsables du mauvais fonctionnement du système.
a) Les conseillers d'orientation psychologues : les boucs-émissaires d'un système d'orientation inefficace
L'information des élèves de l'enseignement
secondaire et des étudiants est notamment assurée par 4.700
conseillers d'orientation, devenus psychologues (COP) depuis la réforme
de 1985, et directeurs de centres d'information et d'orientation (CIO) dont
4.300 accomplissent effectivement cette mission, les autres étant
notamment chargés de mission auprès des rectorats, des
délégations régionales de l'ONISEP, des missions locales
et des ministères.
Depuis 1986, les COP se partagent pour moitié entre les lycées et
les universités au sein des services communs universitaires
d'information et d'orientation.
Leurs missions
sont définies par l'article 2 du décret du
20 mars 1991 ainsi qu'il suit :
- assurer l'information des élèves et de leurs familles ;
- contribuer à l'observation continue des élèves et
à la mise en oeuvre de leur réussite scolaire ;
- participer à l'élaboration et à la réalisation
des projets scolaires, universitaires et professionnels des
élèves et des étudiants en formation initiale afin de
satisfaire au droit des intéressés au conseil et à
l'information sur les enseignements et les professions ;
- participer à l'action des CIO en faveur des jeunes qui, à
l'issue de la scolarité obligatoire, n'ont pas atteint le premier niveau
de qualification reconnu ;
- participer à l'action des CIO pour d'autres publics, notamment adultes.
En outre, des circulaires stipulent que les CIO sont mis à la
disposition des partenaires du système éducatif et que les
directeurs de CIO et les COP sont les conseillers techniques des chefs
d'établissement et des professeurs principaux participant au projet des
établissements pour l'information et l'orientation.
-
Les obstacles à leur action
En raison de leur statut, les COP cumulent ainsi trois types de fonction qui
leur interdisent de se consacrer à l'orientation des
élèves de manière satisfaisante, en exerçant une
fonction d'accueil des lycéens et de leur famille.
Dans la réalité la multiplicité de leurs tâches ne
leur permet pas de consacrer à cette dernière fonction plus de la
moitié de leurs temps et la faiblesse de leurs effectifs (un conseiller
d'orientation pour 1.400 élèves) ne leur permet d'accorder qu'une
demi-heure par an à chaque élève.
En raison de cette faible disponibilité, les conseillers
s'intéressent plus particulièrement aux élèves en
difficulté et apparaissent comme des personnels
spécialisés dans l'échec scolaire. Il leur est ainsi
souvent reproché de privilégier le volet psychologique de leur
fonction par rapport à leur rôle de conseil, de ne pas
répondre de manière précise aux demandes des
élèves concernant le choix de leur future orientation et
même de présenter de manière trop pessimiste les
perspectives de réussite dans certaines filières et les
débouchés offerts en matière d'emploi.
En effet, ils ne disposent guère de temps pour compléter leur
information personnelle sur la réalité des
débouchés locaux, sur l'évolution des besoins en
matière d'emploi des entreprises, ainsi que sur les multiples formations
offertes par les filières d'enseignement supérieur.
Les critiques formulées à l'égard des COP sont
injustes : ils remplissent un rôle indispensable pour l'orientation
des élèves et des futurs étudiants, du fait notamment
qu'ils sont leurs seuls interlocuteurs institutionnels placés à
l'interface des établissements secondaires et supérieurs mais
aussi des entreprises.
A cet égard, le principal reproche qui peut leur être
opposé est celui de leur nombre : comment chaque conseiller pourrait-il
suivre l'orientation de 1.400 élèves et de 18.000
étudiants, alors que son intervention reste liée à une
démarche personnelle des jeunes, de leur famille ou de leurs
professeurs, qu'il s'adresse à une population d'élèves et
d'étudiants de plus en plus diversifiée et dépourvue de
références familiales universitaires et que les
débouchés de nombreuses filières supérieures se
réduisent ou sont affectés par une évolution rapide ?
b) Les enseignants du secondaire
Même si les conseillers d'orientation-psychologues
exercent une fonction indispensable dans l'orientation des
élèves, les enseignants, professeurs et professeurs principaux
jouent un rôle prioritaire dans la décision finale des
lycéens.
S'agissant des professeurs, ceux-ci sont par la force des choses
focalisés sur la discipline qu'ils enseignent et ne peuvent avoir qu'une
connaissance très partielle de leurs élèves en
dépit des rencontres épisodiques organisées avec les
familles.
Quant aux professeurs principaux, qui jouent pourtant un rôle essentiel
dans l'orientation, leur fonction en ce domaine apparaît
complémentaire à leur service d'enseignement et ne fait pas
l'objet d'aménagements qui permettraient de l'individualiser et de
l'exercer de manière satisfaisante, en dépit de la
création d'une indemnité de suivi et d'orientation des
élèves.
Alors que l'avis de leurs professeurs est un élément fort dans la
décision d'orientation des lycéens, comme en témoignent
les réponses apportées à la mission dans le cadre de la
consultation Internet, les enseignants ne semblent pas revendiquer le monopole
des tâches d'orientation, en raison notamment de l'évolution
rapide des métiers et de la diversification croisante des formations
post-baccalauréat, ni être en mesure de répondre davantage
aux fortes attentes de leurs élèves.
De nombreux enseignants du secondaire ignorent en effet largement les
évolutions récentes de l'université, en restent à
leur expérience universitaire personnelle et ne soulignent
peut-être pas suffisamment le hiatus qui existe entre l'enseignement
d'une même discipline au lycée et dans l'enseignement
supérieur.
D'une manière générale, les professeurs de lycées
devraient avoir une meilleure connaissance des formations
post-baccalauréat et participer comme leurs élèves
à une découverte des diverses filières
(présentation et visite des premiers cycles universitaires, des STS, des
IUT, des CPGE) centrée notamment sur leurs perspectives de
réussite et sur les débouchés offerts.
c) Les chefs d'établissement
Avec les enseignants et les COP, les chefs
d'établissement jouent un rôle important dans l'orientation de
leurs élèves, au sein des conseils de classe en cours de
scolarité, par le dialogue qu'ils entretiennent avec les familles et les
élèves, et par leurs conseils d'orientation dans les
études supérieures.
Mais n'est-il pas parfois tentant pour un proviseur, afin de maintenir ou de
rehausser le niveau des classes supérieures de son établissement,
de conseiller aux élèves de terminale de bon niveau, de
s'orienter vers une classe préparatoire, ou une STS qui se trouvera
ainsi difficilement accessible à des bacheliers non
généraux ?
Il conviendrait donc de leur rappeler que les classes menant au BTS sont
prioritairement destinées aux bacheliers technologiques, qui autrement
seront obligés de se tourner par défaut vers les DEUG, et de les
inciter fermement à ouvrir les STS aux bacheliers technologiques, voire
professionnels, qui se sont fourvoyés dans les filières
générales et qui devraient pouvoir être accueillis selon
une procédure spécifique et simplifiée dans ces formations
courtes, après avoir enregistré un échec en DEUG.
d) Les propositions du gouvernement et de la commission Fauroux pour renforcer l'orientation dans l'enseignement secondaire
-
La commission Fauroux
préconise dans son
rapport qu'un livret de projet personnel associé au livret scolaire
accompagne l'élève tout au long de son cursus et que
l'information sur les filières et les métiers commence dès
la classe de 5e.
Elle propose en outre la mise en place de parcours individualisés afin
de permettre aux lycéens de moduler leurs horaires en fonction de leurs
points faibles.
- Pour sa part, le
ministre
de l'éducation nationale, de
l'enseignement et de la recherche a annoncé, en conclusion de la
procédure des états généraux de
l'université, qu'un horaire serait institué dès la classe
de seconde pour élaborer le projet d'avenir de l'élève,
cet horaire étant assuré par l'ensemble des professeurs en
liaison avec les conseillers d'orientation et les professeurs principaux.
Il a ajouté que seraient organisées pendant les trois
années de lycée, des rencontres avec des universitaires, des
étudiants et des professionnels et que seraient
généralisées les semaines portes-ouvertes dans
l'enseignement supérieur.
B. L'ORIENTATION ET L'ACCUEIL DES ÉTUDIANTS : LA FAIBLESSE DU DISPOSITIF ACTUEL
Si l'afflux de nouveaux étudiants dans les premiers
cycles et les taux d'échec qui y sont constatés appellent une
indispensable réforme du DEUG, cette réforme doit d'abord
substituer à l'actuel système de sélection-exclusion un
mécanisme efficace et précoce d'orientation dès la
première année de DEUG.
En dépit d'expériences engagées dans quelques
académies, le système actuel n'est pas satisfaisant, du fait
d'une absence de continuité entre le lycée et
l'université, d'un accueil et d'un encadrement pédagogique
souvent insuffisants des nouveaux étudiants et des faibles
possibilités de réorientation précoce pour les
étudiants qui se sont aventurés dans des filières
où ils sont voués à l'échec.
1. Le lycée et l'université : deux mondes étrangers
Comme il a été dit, les professeurs de
lycée et les conseillers d'orientation témoignent
fréquemment d'une méconnaissance de l'évolution du monde
universitaire, de la diversité des formations post-baccalauréat,
de la réalité et du contenu des filières
supérieures, de leurs perspectives d'insertion professionnelle et ne
soulignent pas, d'une manière générale, les
spécificités des formations supérieures, notamment sur le
plan méthodologique, par rapport à l'enseignement des mêmes
disciplines dans le second degré.
Si les conseillers d'orientation exerçant dans les services communs
universitaires d'information et d'orientation (SCUIO) travaillent
également pour la moitié de leur service dans les lycées,
et devraient contribuer à renforcer les liaisons entre les enseignements
supérieurs et ceux du second degré, et si les COP des cellules
universitaires devraient être en mesure de fournir des informations
à leurs collègues conseillers dans les CIO ainsi qu'aux
enseignants des lycées, le transfert et la qualité des
informations apparaissent, dans la réalité, tout à fait
insuffisants.
Dans le même temps, il faut bien constater que la plupart des
universitaires répugnent à venir informer les lycéens de
ce qui les attend, et qu'ils seraient le plus souvent bien en peine de fournir
des indications précises sur la finalité de certaines
filières, sur les chances de réussite de leurs étudiants,
sur le devenir professionnel des diplômés et sur les perspectives
d'évolution des métiers.
D'une manière générale, notre système
d'enseignement supérieur, en dépit de la qualité des
travaux du comité national d'évaluation, souffre d'une absence
d'évaluation globale de ses filières, alors que la mise en place
d'une véritable politique d'orientation des étudiants supposerait
un travail préalable d'évaluation de chaque établissement
et des formations offertes.
Bien plus, alors que le secondaire et le supérieur s'ignorent
mutuellement, en dépit du fait que le second cycle du premier et le
premier cycle du second utilisent largement des personnels de même
origine, l'université ne semble pas en mesure d'adapter ses formations
aux nouveaux besoins collectifs et contribue à ce titre aux
difficultés que rencontrent les diplômés sur le
marché de l'emploi.
Ainsi, en se focalisant sur l'obtention du seul baccalauréat, en
négligeant la préparation méthodologique des
lycéens aux études supérieures, en ne les préparant
suffisamment pas à assumer avec succès un travail personnel, le
lycée ne permet pas de prévenir des orientations
irréalistes ou par défaut qui conduisent de trop nombreux
bacheliers à l'échec universitaire.
a) Les tentatives engagées pour améliorer l'information des futurs étudiants
En dépit des initiatives engagées par certaines
académies pour sensibiliser les lycéens à leur future
orientation, le dispositif d'information et d'orientation des étudiants
reste caractérisé par sa faiblesse et son manque de moyens.
Afin de répondre aux besoins d'information des élèves de
terminale, la plupart des universités ont organisé des semaines
d'information et de nombreux établissements ont développé
des journées portes-ouvertes permettant aux lycéens de rencontrer
enseignants et étudiants déjà engagés dans un
cursus universitaire.
Dans le même sens, certains CIO tentent également d'organiser des
rencontres entre élèves de terminale et étudiants
avancés dans leurs études afin que ces derniers puissent faire
part de leur expérience universitaire qui ne concerne cependant que leur
seule discipline.
Par ailleurs, l'organisation de forums et salons de l'étudiant qui
rencontrent souvent un grand succès permet aux futurs bacheliers de
compléter leur information sur leur orientation.
Enfin, depuis cette année, le ministère diffuse à tous les
élèves de terminale des brochures d'information indicatives de
l'ONISEP sur les carrières et les débouchés adaptés
à chaque filière du baccalauréat.
L'information des lycéens et des futurs étudiants n'est donc pas
négligeable et même surabondante mais n'est pas exploitée
d'une manière satisfaisante ; son accès reste
commandé par une démarche individuelle des élèves
et certains lycéens, du fait de leur situation favorisée ont
davantage de facilités pour l'utiliser utilement. D'une manière
générale, ces sources d'information sont sous-utilisées
par la majorité des étudiants, alors que les étudiantes y
recourent plus largement.
Afin de renforcer la nécessaire continuité entre les deux ordres
d'enseignement et faciliter le passage du lycée à
l'université, certaines académies, notamment celle de Lyon, ont
engagé des expériences qu'il serait sans doute souhaitable
d'étendre.
b) Les expériences menées dans l'académie de Lyon7( * )
Prenant acte d'un échec trop important en
première année, tant à l'université que dans les
filières sélectives, l'académie de Lyon a adopté un
dispositif POSES (Programme d'orientation entre le second degré et
l'enseignement supérieur) ayant pour objectif d'améliorer cette
situation.
-
Une meilleure appréhension du passage entre le secondaire et le
supérieur
Deux enquêtes, ADES (accès dans l'enseignement supérieur)
et VIVALDI (évolution du projet d'orientation d'élèves de
terminale) ont été engagées pour analyser les conditions
de passage des lycéens à l'enseignement supérieur.
· L'enquête ADES, de nature quantitative, engagée depuis
1987, fait apparaître notamment une diminution sensible des voeux
d'orientation des lycéens vers les filières professionnelles
courtes (BTS, DUT) et une augmentation de ces voeux vers les DEUG.
· L'enquête VIVALDI, plus qualitative, conduite depuis 1995, tente
d'analyser les critères de choix des lycéens de terminale et les
raisons des changements intervenant en matière d'orientation entre les
mois de mai, de juillet et d'octobre. Selon cette enquête, les
trois-quarts de ceux qui sont à l'université souhaitaient
déjà y être au mois d'avril précédant le
baccalauréat, et la moitié des bacheliers STT et STI ont le plus
souvent changé de projet d'études en raison notamment de leur non
affectation en STS ou en IUT. Les changements de projets par contrainte
semblent par ailleurs être une cause importante d'échec, alors que
les élèves se disent dans l'ensemble bien adaptés aux
filières mais regrettent de manquer d'information sur les exigences de
ces dernières.
-
Une meilleure information des élèves de terminale et des
professeurs principaux
·
Les journées du lycéen
: à la fin du
mois de janvier, les élèves de terminale
bénéficient de deux journées d'information, prises sur le
temps scolaire, pour visiter des établissements d'enseignement
supérieur de leur choix (premiers cycles, BTS, CPGE, Ecole d'architecte,
...) ;
·
la formation des professeurs principaux de terminale et des
conseillers d'orientation-psychologues
: en janvier-février,
deux journées d'information obligatoires sont organisées à
l'intention des professeurs principaux et des COP de l'académie ;
l'une de ces journées, organisée en même temps que les
journées du lycéen, est consacrée à une meilleure
connaissance de l'université, la seconde étant organisée
au niveau de chaque bassin de formation selon un programme laissé
à leur initiative ;
·
le dossier des professeurs principaux
: en février 1996,
le service académique d'information et d'orientation a
élaboré un dossier pratique, complétant les publications
de l'ONISEP, afin de leur permettre de répondre aux questions des
élèves de terminale.
-
L'examen de la demande d'orientation des élèves
Le système OCAPI (organisation et coordination des affectations par
informatique) permet à tous les élèves de terminale
d'inscrire en avril leurs voeux d'orientation pour l'année suivante (dix
au maximum mais quatre en moyenne dans la réalité).
Cette procédure permet d'anticiper l'organisation de la rentrée
en organisant une concertation avec les responsables des établissements
d'enseignement supérieur et de mettre en oeuvre une politique
concertée d'accueil entre les diverses filières
post-baccalauréat tenant compte des places disponibles et des
critères d'admission.
Certaines filières universitaires très sollicitées (STAPS,
psychologie...) ont fait l'objet de procédures spécifiques :
les postulants doivent expliciter leurs motivations tout en recevant un
descriptif très précis des exigences et objectifs des
filières concernées.
-
L'affectation des bacheliers
· Les places vacantes font l'objet d'un suivi tout au long du mois de
septembre par le service académique d'information et d'orientation
(SAIO) et sont annoncées dans les chaînes d'inscription des
universités ;
· les universités organisent des entretiens d'orientation afin de
vérifier l'adéquation entre les attentes, les souhaits des
bacheliers et les exigences des filières ;
-
Les actions nouvelles de réorientation
Durant le premier trimestre de l'année universitaire, les
universités et les lycées s'efforcent de prendre en charge
solidairement les populations les plus fragiles.
Ceci se traduit dans les universités par la confirmation du projet
universitaire de l'étudiant moyennant éventuellement une
année de mise à niveau avant le DEUG et dans certains
lycées par une rentrée en BTS au mois de janvier : cette
première année raccourcie à six mois comporte un programme
spécifique et permet de reprendre une scolarité habituelle en
deuxième année : cette solution permet aux étudiants
de valider une première année en BTS sans perdre un an avant de
se réorienter.
Enfin, ces actions nouvelles de réorientation s'appuient dans les
lycées et les universités sur des formations professionnelles
courtes prises en particulier en application de l'article 54 de la loi
quinquennale pour l'emploi de 1993.
A titre d'exemple, l'université Louis-Lumière (Lyon II) a
expérimenté une nouvelle politique d'orientation qui
s'intègre dans un dispositif d'accueil et d'accompagnement des nouveaux
étudiants. Lors des inscriptions, une commission d'aide à
l'orientation siégeant en permanence reçoit des étudiants
qui ne disposent pas des prérequis suffisants afin de vérifier
les choix et les motivations des candidats, et éventuellement d'aider
à trouver des solutions en cas d'erreur manifeste d'orientation.
Cet entretien préalable est obligatoire notamment pour l'inscription en
sociologie et le passage devant la commission est également requis pour
la plupart des bacheliers technologiques et professionnels dépourvus de
mention ou pour ceux dont les notes au baccalauréat sont jugées
insuffisantes dans les matières fondamentales. Bien sûr, l'avis de
cette commission n'est que consultatif et tout étudiant dispose d'un
recours devant le rectorat en cas de refus d'inscription ; son rôle
apparaît en revanche essentiel lorsque les capacités d'accueil de
certaines filières sont dépassées.
2. Un accueil des nouveaux étudiants qui reste insuffisant
Si certaines universités ont mis en place des formules
destinées à familiariser les nouveaux étudiants avec
l'organisation des études supérieures et le fonctionnement des
établissements, l'accueil des nouveaux étudiants en
première année de DEUG n'est pas satisfaisant et ses
insuffisances contribuent à accuser un peu plus la rupture existante
entre l'enseignement secondaire et supérieur, et par là,
l'échec universitaire.
En effet, un accueil de qualité donnant rapidement, en début
d'année, aux nouveaux étudiants toutes les informations pratiques
sur la vie universitaire et le déroulement des enseignements
contribuerait fortement à les sécuriser et à leur
permettre de suivre leurs études avec profit.
Un meilleur accueil des étudiants passe aussi par une meilleure
formation des personnels administratifs au sein de chaque unité de
formation et de recherche.
Il suppose une signalisation claire de l'information dans les locaux
universitaires qui apparaissent comme autant de labyrinthes pour les nouveaux
étudiants : l'affichage des horaires de cours, et la mise à
disposition de banques d'informations aisément accessibles
constitueraient par exemple autant d'innovations peu coûteuses qui
faciliteraient l'intégration des bacheliers dans un monde qui leur est
encore inconnu.
En dépit des possibilités offertes aux établissements
-tutorat d'accueil notamment prévu par la réforme des DEUG,
semaine de bilan et d'orientation, modules de préprofessionnalisation-
ces diverses formules n'ont pas été mises en place et n'ont pas
réellement permis d'améliorer la difficile transition entre le
lycée et l'université et d'aider les nouveaux étudiants,
en particulier ceux qui auraient besoin d'un soutien pédagogique et
d'une aide méthodologique, à élaborer dès la
première année du DEUG un projet de formation qui pourrait
ensuite être affiné tout au long de leurs études.
a) Une semaine d'accueil et d'information obligatoire pour les universités mais parfois formelle et facultative pour les étudiants
Les modalités proprement dites de l'accueil des
étudiants à l'université sont fixées par
l'arrêté du 26 mai 1992, relatif au DEUG, à la licence
et à la maîtrise.
L'article 13 de cet arrêté institue d'abord une semaine d'accueil
obligatoire destinée aux nouveaux étudiants qui semble avoir
été mise en place dans la plupart des universités.
L'organisation de cette semaine se réalise selon des modalités
diverses selon les établissements, tant dans son déroulement que
dans son contenu, et se caractérise en fait souvent par un
caractère quelque peu formel.
La semaine d'accueil et d'information permet ainsi aux nouveaux
étudiants, qui l'estiment utile, de rencontrer par petits groupes des
étudiants avancés dans leurs études, des enseignants et
des conseillers des services universitaires d'information et d'orientation.
b) L'insuffisance des services universitaires d'information et d'orientation
Depuis 1986, les conseillers d'orientation-psychologues
exerçant dans les services communs universitaires d'information et
d'orientation (SCUIO) apportent leur concours à la mise en oeuvre des
objectifs arrêtés par le président de l'université,
en travaillant par ailleurs pour l'autre moitié de leur temps, dans les
lycées.
·
les SCUIO : des compétences larges
Créés en application des articles 25 et 44 de la loi du
26 janvier 1984, les SCUIO ont une mission définie par le
décret du 6 février 1986. Celle-ci consiste à
organiser l'accueil, l'information et l'orientation des étudiants de
leur entrée à l'université jusqu'à la fin du cursus
universitaire, ainsi qu'à assurer avec les enseignants le suivi de leur
insertion professionnelle.
A cet effet, chaque SCUIO doit contribuer à l'information des futurs
bacheliers sur les formations universitaires, en liaison avec les
délégations régionales de l'ONISEP, constituer une
documentation sur les études, les professions et l'insertion
professionnelle, favoriser la réalisation de la mission d'orientation
confiée aux enseignants-chercheurs, établir des relations avec le
monde des professions et les services de l'emploi et élaborer un rapport
sur l'insertion professionnelle des anciens étudiants.
Son directeur est choisi, il convient de le rappeler parmi les
enseignants-chercheurs et nommé par le président de
l'université après avis du conseil d'administration. Cet
enseignant a pour mission de servir de trait d'union entre ses collègues
enseignants et le SCUIO, ainsi qu'avec les services administratifs et les
secrétariats d'UFR de l'université.
Le SCUIO dispose d'un budget propre intégré au budget de
l'établissement et de moyens nécessaires en personnels, locaux et
équipements.
A la demande des universités, et sur décision du recteur, des
conseillers d'orientation peuvent contribuer au fonctionnement du SCUIO dans la
limite de la moitié de leur temps de service.
Enfin, les emplois attribués à l'université et
affectés par convention à la cellule universitaire d'information
et d'orientation sont transférés au SCUIO dès la
constitution de celui-ci.
·
un fonctionnement décevant
Dans la réalité, les SCUIO n'assurent pas leur fonction de
manière satisfaisante et se bornent à privilégier le
quotidien en parant au plus pressé.
Ceci résulte d'abord d'une insuffisance des effectifs de conseillers
d'orientation, justement dénoncée par le rapport Fauroux. Chaque
conseiller d'orientation est en moyenne, en charge de
18.000 étudiants, et souvent davantage dans les grandes
universités (un pour 40.000 étudiants à Paris I).
Dans la pratique, les SCUIO sont fréquemment peu accessibles et peu
accueillants et fonctionnent selon des horaires d'ouverture contraignants.
Par ailleurs, leur personnel est accaparé par la mise à jour de
la documentation sur les entreprises et par la gestion des offres de stage. Ils
se consacrent également à l'organisation de sessions de recherche
d'emploi par petits groupes d'étudiants et tentent de susciter la
création de forums consacrés à l'emploi des
diplômés.
c) Une expérience novatrice : la mise en place d'un " CIO de l'après-bac " dans l'académie de Lille
Malgré l'importance de ses effectifs
(132.000 inscrits), et leur forte progression (+ 75 % en huit
ans), l'académie de Lille ne disposait que de onze conseillers
d'orientation-psychologues à mi-temps, soit un conseiller pour plus de
11.000 étudiants ; jusqu'en 1994, ces COP exerçaient
leur autre mi-temps dans huit CIO différents et avaient chacun la charge
d'un lycée.
Afin de renforcer les compétences des personnels d'orientation, un CIO
spécialisé, dit " CIO de l'après-bac ", a
été mis en place à la rentrée 1994 : ce centre
regroupe neuf COP exerçant à mi-temps dans les
universités, le second mi-temps étant consacré au recueil
et à la diffusion des informations.
Ce nouveau système permet de mettre les compétences acquises par
les COP en université au service de l'ensemble de l'académie, de
renforcer les compétences de chaque conseiller et de chaque CIO en
matière d'enseignement post-bac, de centraliser en un lieu unique la
documentation relative aux enseignements post-bac et contribuer à
l'information des élèves de terminale.
Le " CIO de l'après-bac " a développé son
activité autour de trois axes :
·
enquêtes et documents d'information sur l'enseignement
supérieur
: le centre développe un fonds documentaire
spécialisé et exhaustif privilégiant les
particularités régionales et complétant les études
de la délégation régionale de l'ONISEP ; il fournit
également une synthèse d'informations de caractère
qualitatif portant en particulier sur l'étude des flux
d'étudiants et les taux de réussite et d'insertion.
Dans cette perspective, le centre a pris contact avec les responsables des
SUAIO des sept universités de l'académie et assure le relais
CIO-Université dans les trois établissements qui ne disposent pas
de poste de COP, avec l'observatoire local de la vie étudiante et avec
le groupe statistique du pôle universitaire européen de Lille,
ainsi qu'avec le réseau des CIO existants pour les filières de
type STS ou CPGE.
Le centre diffuse aux informateurs une publication régulière
dénommée " Après-bac infos ",
complétée par des fiches thématiques par
université, auprès des COP de l'académie, des SCUIO, des
SAIO et de l'ONISEP et collabore à l'élaboration d'autres
documents, pour réaliser le dossier des professeurs principaux de
1ère et de terminale.
·
formation sur l'enseignement supérieur
: le centre
participe aux actions de formation pour les COP stagiaires et leur propose des
réunions d'information thématiques avec des représentants
de plusieurs établissements.
A ce titre, six journées d'information sur l'enseignement
supérieur ont été proposées aux COP de
l'académie pendant l'année 1994-1995 sur des thèmes
variés (nouveaux premiers cycles universitaires, professions du secteur
social, insertion professionnelle des diplômés...), une
journée de stage au SCIO a été organisée dans le
cadre de leur formation continue, et une journée d'information a
été prévue au profit des enseignants de premier cycle de
Lille-I pour leur présenter la réforme des lycées et les
nouveaux baccalauréats.
·
conseil en orientation
: alors que les CIO et les SCUIO restent
les interlocuteurs privilégiés du public, le CIO de
" l'après-bac " intervient comme centre relais et
reçoit en priorité les étudiants déjà
engagés dans des études supérieures ou les adultes
souhaitant reprendre une formation, originaires d'autres académies et
envoyés par des COP de l'académie qui auront jugé ces
demandes très spécifiques ou trop complexes.
Chaque conseiller du centre assure une demi-journée de permanence
téléphonique et une demi-journée de réceptions sur
rendez-vous.
Trente et un CIO de l'académie ont fait appel au centre dans ce cadre ou
pour préparer des réunions d'information en cycle terminal de
lycée, et le centre a également participé à
l'organisation du salon régional de l'orientation et des professions.
Pour l'avenir, le centre envisage de nouvelles actions en direction des
enseignants de lycée, pour la formation des professeurs principaux,
ainsi que des échanges thématiques entre enseignants du
secondaire et du supérieur.
d) Le problème des locaux universitaires
En dépit d'un effort financier important de l'Etat et
des régions, dans le cadre du schéma Université 2000, les
locaux existants ne permettent souvent pas d'accueillir de manière
satisfaisante les nouveaux étudiants de premier cycle.
Cette insuffisance se traduit notamment par de mauvaises conditions de travail
notamment dans des salles de travaux dirigés, insuffisamment nombreuses,
surpeuplées et dépourvues de moyens audiovisuels ou
pédagogiques adaptés qui ne permettent pas un travail par petits
groupes.
Enfin, les
bibliothèques universitaires
témoignent tout
particulièrement de la grande pauvreté de notre enseignement
supérieur.
Le rapport Fauroux rappelle à cet égard que la centaine de
bibliothèques universitaires existantes disposent au total d'un budget
de 1,3 milliard de francs, soit un budget équivalent à la
seule bibliothèque du Congrès des Etats-Unis : elles
n'offrent qu'une place pour dix-huit étudiants, contre une pour cinq en
Allemagne ou en Grande-Bretagne et ne permettent que très rarement un
accès libre aux fonds qui seul autorise une initiation individuelle
à la recherche et à la documentation personnelle.
On observe par ailleurs un déséquilibre des capacités
d'accueil en ce domaine entre l'Ile-de-France et la province puisque
près de la moitié des ouvrages sont concentrés en
région parisienne alors que la province accueille 67 % des lecteurs
inscrits.
Enfin, le manque de personnels nécessaires à leur fonctionnement
(deux fois moins qu'en Allemagne et en Grande-Bretagne) et des horaires
d'ouverture particulièrement contraignants en restreignent les
conditions d'usage.
Dans ces conditions, comment les nouveaux étudiants en premier cycle,
notamment dans les antennes universitaires, pourraient-ils avoir accès
à des locaux indispensables pour mener à bien un travail
individuel et pour s'initier aux premiers rudiments de la recherche
documentaire ?
Ces insuffisances sont d'autant plus pénalisantes qu'elles viennent
s'ajouter à celles qui résultent d'un encadrement
pédagogique qui est loin d'être satisfaisant pour les nouveaux
étudiants.
3. L'encadrement pédagogique des premiers cycles : une rupture avec le lycée
La consultation sur le réseau Internet lancée
par la mission a permis de recueillir de nombreux messages critiquant la
faiblesse de l'encadrement des étudiants de premier cycle qui serait
largement à l'origine de l'échec universitaire.
Si les meilleurs bacheliers généraux qui maîtrisent la
méthodologie requise par un travail personnel s'accommodent de ce
système, il n'en est pas de même pour les autres et surtout pour
les bacheliers technologiques, voire professionnels qui passent du
système relativement sur-encadré du lycée à une
structure plus lâche qui les laisse livrés à
eux-mêmes et qui les condamne rapidement à l'échec.
Cette situation résulte d'une insuffisance de l'encadrement, notamment
par rapport aux filières sélectives, des caractéristiques
des personnels enseignants et aussi d'une mise en oeuvre encore balbutiante des
formules de soutien aux étudiants en difficulté.
a) Un encadrement qui pêche par un manque de moyens
Alors que le coût annuel d'un étudiant
français est de 32.000 francs, il est de 62.000 francs aux
Etats-Unis ou au Japon et de 35.000 francs en Allemagne ou au Danemark.
D'après les estimations de la DEP, les filières sélectives
bénéficient d'un meilleur encadrement pédagogique :
le coût d'un cycle en classe préparatoire serait de
70.000 francs, en STS de 56.000 francs et en IUT de
52.000 francs et en DEUG de 32.000 F.
Dans ces conditions, comment ne pas faire un lien entre le taux d'encadrement
de ces filières et les chances de réussite de leurs
étudiants ? Il apparaît en effet paradoxal que les meilleurs
bacheliers généraux engagés dans les filières
sélectives, où ils connaissent un taux de réussite
largement supérieur, bénéficient des meilleures conditions
d'études alors que les moins bons qui se tournent par défaut vers
les filières générales universitaires doivent s'accommoder
d'un encadrement pédagogique calculé au plus juste qui tranche
avec leurs habitudes acquises dans le secondaire.
Si le droit de réussir a un coût important, comme le montre
l'exemple des filières sélectives, le coût de
l'échec, aussi bien humain que financier pour les étudiants qui
échouent au DEUG au bout de trois ou quatre ans, l'est plus encore et ce
taux d'échec doit être impérativement réduit en
adaptant les conditions d'études des trop nombreux
laissés-pour-compte de notre système universitaire.
b) La diversité du corps enseignant dans l'enseignement supérieur
En 1994-1995, le nombre des enseignants en fonction dans
l'enseignement supérieur était d'environ 68.000 (hors enseignants
du second degré) et a enregistré une progression globale de
38 % depuis 1985.
Les professeurs représentent environ le quart de cet effectif, les
maîtres de conférences près de 40 % et les
attachés et moniteurs moins de 10 %.
Les professeurs agrégés et certifiés du second
degré participent pour leur part d'une manière importante au
fonctionnement de l'enseignement supérieur (près de 16 %),
et sont répartis à peu près également entre les
IUFM, les IUT et les universités, les agrégés
représentants près de la moitié de ces personnels.
Le pourcentage des professeurs d'université varie selon les disciplines
et ces derniers sont proportionnellement plus nombreux en droit et en sciences
que dans le secteur de la santé.
Il convient de rappeler que les créations de postes des personnels de
statut du second degré ont été particulièrement
importantes entre 1991 et 1993 puisque 2.600 postes ont été
créés, que ces personnels n'ont pas statutairement d'obligation
de recherche et qu'au terme du décret du 25 mars 1993, ils sont
astreints à un service horaire double de celui des
enseignants-chercheurs.
Les enseignants de type " second degré " représentent
42 % de l'effectif dans les IUT et 9 % dans les universités
(hors IUT) : 616 professeurs agrégés du secondaire
exerçaient en 1994-1995 en droit, 2316 en lettres, 2028 en sciences,
soit au total environ 4.800 professeurs agrégés contre
4.200 professeurs certifiés auxquels il faut ajouter environ un
millier de professeurs d'éducation physique et sportive.
Selon les filières de premier cycle, la représentation des
personnels de l'enseignement secondaire apparaît variable :
- entre 5 et 12 % des intervenants en lettres et sciences humaines (y
compris les langues étrangères), étant rappelé
qu'un nombre important d'agrégés affectés dans les
lycées dispensent des heures complémentaires à titre de
vacataire à l'université ;
- moins de 10 % des intervenants en droit et en sciences
économiques, du fait de l'absence d'agrégation du secondaire dans
les disciplines juridiques, cette filière faisant largement appel aux
vacataires, aux ATER et aux allocataires moniteurs ;
- 5 % des intervenants dans les disciplines scientifiques.
Il convient enfin de rappeler que la commission Fauroux a
préconisé une plus grande participation des professeurs
agrégés aux premiers cycles, pour une période de cinq ans
au maximum, à la condition qu'ils préparent une thèse leur
permettant d'accéder au statut d'enseignant-chercheur, et a
proposé que les agrégés issus des écoles normales
supérieures accomplissent une période triennale d'enseignement en
IUFM.
Dans le même sens, le ministre a annoncé, à l'issue des
états généraux de l'université, une
évolution des statuts des professeurs agrégés afin que ces
derniers puissent assumer une partie de la recherche universitaire.
c) Les enseignants-chercheurs dans l'encadrement pédagogique des premiers cycles : une faible mobilisation
Contrairement à une idée parfois
répandue, les enseignants-chercheurs constituent encore le pivot de
l'encadrement pédagogique des premiers cycles même si une
diversification des personnels enseignants s'est développée au
cours des dernières années en faveur notamment d'enseignants
à statut précaire et surtout des professeurs
agrégés du secondaire.
La présence des enseignants-chercheurs reste ainsi indispensable pour
diriger et animer les DEUG et pour y maintenir la place de la recherche
universitaire, sauf à courir le risque d'une secondarisation rampante et
d'une " ghettoïsation " des premiers cycles.
Il reste que le recours à d'autres catégories ne saurait
être écarté du fait notamment de la massification de
l'enseignement supérieur ; c'est le cas notamment pour les
professeurs agrégés du secondaire qui ont une vocation
évidente, en raison de la qualité de leur formation, à
compléter l'encadrement pédagogique assuré par les
enseignants-chercheurs.
Ces derniers doivent cependant rester de façon pleine et entière
les véritables concepteurs et les principaux acteurs des premiers et des
deuxièmes cycles universitaires. Toutefois, alors que beaucoup de
nouveaux étudiants considèrent la première année en
université comme une année initiatique et de tâtonnements
leur permettant d'affiner leur orientation en l'absence d'un projet individuel
de formation, la plupart des enseignants-chercheurs considèrent encore
que cette première année doit rester la première marche
vers l'excellence universitaire.
A cet égard, la récente étude menée par
l'Inspection générale de l'administration de l'éducation
nationale
8(
*
)
confirme que " les
universitaires s'identifient par la recherche et les particularités de
leur discipline où s'exprime leur professionnalisme " et rappelle
que " le rôle que tous les enseignants-chercheurs acceptent est
d'enseigner leur discipline à des étudiants aptes à la
comprendre et à travailler par eux-mêmes ".
S'agissant des responsabilités administratives, ceux qui assurent un
rôle d'encadrement et de soutien pédagogique le font sur la base
du volontariat, en accord avec la politique de l'université, avec ou
sans décharges de service ou heures spécifiques, selon des
modalités fixées par l'article 55 de la loi du 26 janvier 1984
sur l'enseignement supérieur et par le décret n° 84-431
du 6 juin 1984.
D'après l'étude de l'IGAEN, les primes pédagogiques et les
possibilités locales de promotion ne sont pas réellement de
nature à faire évoluer cette situation et le rôle
pédagogique des enseignants-chercheurs n'est pris en compte que pour une
faible part dans ces promotions : il n'est pas admis qu'un enseignant-chercheur
fasse carrière uniquement par l'enseignement, sans se préoccuper
de la recherche, ce qui d'ailleurs ne serait pas souhaitable, et d'une
manière plus générale, ces universitaires s'estiment
incompétents pour orienter les étudiants alors que la loi de 1984
sur l'enseignement supérieur le leur impose.
Selon la même enquête de nombreux universitaires considèrent
en outre que les taux d'accès du premier au deuxième cycle
(52 % en droit et sciences économiques, 61 % en lettres et
sciences humaines, 63 % en STAPS...), qui ont d'ailleurs progressé
toutes disciplines confondues de près de 5 % au cours des cinq
dernières années, sont normaux et force est de constater que les
incantations relatives au niveau important des taux d'échec restent sans
effets réels sur les enseignants.
Le même rapport nous indique que la mobilisation pédagogique en
faveur de la réussite des étudiants de premier cycle semble ne
pas être prioritaire pour de nombreux professeurs d'université qui
apparaissent essentiellement préoccupés par leurs
activités de recherche et la qualité de leurs thésards.
Cette attitude peut s'expliquer du fait que l'activité de soutien aux
étudiants n'est pas valorisée dans le cadre de leur
carrière universitaire, à la différence des publications
et des communications dans des colloques internationaux. Ceci conduit nombre
d'enseignants-chercheurs à se décharger de leurs travaux
dirigés de premier cycle sur leurs jeunes collègues, sur les
assistants et les chargés de cours alors qu'ils ne sont astreints
statutairement, il convient de le rappeler, qu'à un service de six
heures de travaux dirigés par semaine pendant les trente-deux semaines
que compte l'année universitaire.
Par ailleurs, leur formation à la différence de celle des
enseignants du secondaire qui empruntent désormais la filière des
IUFM, ne comporte pratiquement pas de volet pédagogique et leur
recrutement universitaire reste fondé sur la qualité de leurs
activités de recherche.
Afin de remédier à cette situation, certains universitaires
éminents, tels les professeurs Lavroff et Laurent, ont
préconisé que l'activité pédagogique soit
désormais prise en compte dans l'évolution de leur
carrière. Cet objectif a par ailleurs été repris par le
ministre en conclusion des états généraux de
l'université qui a annoncé que les enseignants-chercheurs
devraient accepter d'exercer une part de leur service en premier cycle, et que
leur carrière devrait être définie en tenant compte de
leurs missions d'enseignement, de recherche et d'animation.
Cette attitude générale de nombre d'enseignants-chercheurs
appelle ainsi des mesures nouvelles qui devraient avoir pour objectif de les
impliquer davantage dans le soutien pédagogique aux étudiants de
premier cycle : un tel objectif suppose d'abord un aménagement de leurs
règles de promotion, une diversification de leur carrière entre
la recherche et l'enseignement et une plus grande disponibilité.
S'il ne saurait être question de leur imposer une condition de
résidence sur le campus universitaire comme au Etats-Unis, ou même
dans la ville qui accueille l'université de rattachement pour ceux qui
exercent également dans des antennes universitaires, il conviendrait
pour le moins que des bureaux soient réservés aux enseignants
titulaires dans les locaux universitaires afin que ces derniers puissent
recevoir et conseiller leurs étudiants selon des horaires
déterminés.
d) La mise en oeuvre de formules d'accompagnement et de soutien aux étudiants en difficulté : le tutorat
Prévu dans son principe par l'article 6 de
l'arrêté du 26 mai 1992 précité, un tutorat a
été introduit dans le premier niveau du DEUG pour individualiser
l'encadrement des étudiants.
Cette formule de tutorat d'accompagnement, reposant sur l'intervention
d'étudiants de second ou troisième cycle auprès des
débutants a été mise en place dans la plupart des premiers
cycles, y compris en droit.
D'après l'enquête menée par l'IGAEN déjà
évoquée, certains responsables pédagogiques paraissent lui
préférer la formule du monitorat assuré par des
enseignants qui laisse subsister le lien direct existant avec les
étudiants.
En l'absence d'une évaluation générale portant sur
l'organisation et l'efficacité du tutorat, il semble cependant que ce ne
sont pas les étudiants les plus en difficulté qui
bénéficient de cette formule de soutien.
Il serait donc souhaitable que chaque établissement d'enseignement
supérieur établisse un protocole pour formaliser et
contrôler davantage la formule du tutorat et la développer en
direction des étudiants qui en ont le plus besoin. Dans le même
sens, à l'issue des états généraux de
l'université, le ministre a annoncé la
généralisation du tutorat qui serait assuré par des
étudiants de deuxième et de troisième cycle, par petits
groupes d'étudiants et coordonné par un universitaire. Dans le
projet de budget pour 1997, 100 millions de francs devraient être
destinés à rémunérer ces tuteurs, qui devraient
assurer une dizaine d'heures par mois pour une rémunération
mensuelle de l'ordre de 1.000 francs ; ces crédits seraient
versés aux universités sur la base de projets inscrits dans leur
contrat quadriennal de développement.
Outre le tutorat, certaines universités ont d'ores et déjà
mis en place des innovations pédagogiques telles que des groupes de
travaux dirigés à faibles effectifs ou des options permettant de
valoriser les acquis des étudiants.
Force est cependant de constater que les initiatives de soutien et de conseil
restent subordonnées aux moyens que l'établissement est en mesure
de dégager pour accorder les décharges de service ou les horaires
spécifiques aux enseignants concernés.
4. La nécessité de multiplier les possibilités de réorientation au cours de la première année d'études universitaires
La réduction de l'échec universitaire dans les
premiers cycles passe d'abord par des réorientations aussi
précoces que possible et adaptées au profil des bacheliers.
Cette logique d'orientation suppose ainsi une réorganisation
pédagogique de l'année universitaire et la possibilité
d'une modulation individuelle de l'obtention des unités de valeur
nécessaires pour décrocher le diplôme.
La rénovation pédagogique des DEUG, engagée depuis 1992, a
ainsi permis de généraliser la capitalisation des acquis, les
modules et l'information préalable des étudiants.
Cependant, la seule information des lycéens et le suivi de
l'évolution des voeux des élèves de terminale et des
bacheliers déjà évoqués ne peuvent empêcher
des orientations irréalistes ou par défaut et il importe de
mettre en place au niveau des premiers cycles une nouvelle organisation de
l'année universitaire permettant des réorientations rapides.
Diverses propositions ont été formulées et plusieurs
expériences ont été engagées pour repérer
précocement et systématiquement les difficultés
rencontrées par les étudiants au cours du premier semestre et
pour leur proposer avant la fin de la première année une
réorientation vers une filière adaptée.
a) Les propositions de l'IGAEN : une " semestrialisation " de l'année universitaire pour faciliter les réorientations
L'étude de l'IGAEN précitée constate que
l'orientation, la réorientation et le soutien aux étudiants en
difficulté pourraient être grandement facilités par
l'organisation des premières années en semestres fonctionnant en
continu, afin de leur permettre de redoubler sans rupture, dès le
semestre suivant les modules non obtenus.
Le coût de cette semestrialisation est évalué à
50 % pour les cours magistraux et à environ 10 % pour les
travaux dirigés et pratiques, du fait des besoins nouveaux
entraînés en personnels et en locaux.
La semestrialisation qui pourrait être expérimentée dans
quelques universités et qui s'appliquerait aussi bien aux formations
générales qu'aux IUT et aux STS permettrait notamment d'assurer :
- une orientation progressive des étudiants sans réduire la part
de l'enseignement disciplinaire ;
- des réorientations à la fin du premier trimestre de la
première année, à l'aide de passerelles à
créer entre des formations proches ;
- un allongement éventuel du premier cycle sur trois ans sans
interrompre la formation ;
- un soutien direct des étudiants fragiles, notamment en les faisant
bénéficier d'un redoublement immédiat ;
- une double rentrée universitaire, la première en septembre et
une rentrée " latérale " en février ;
- un rapprochement de l'organisation de l'année universitaire avec celle
d'autres pays européens.
Cette nouvelle organisation, si elle était retenue, supposerait en cours
et fin d'année, de confronter l'orientation initiale aux
résultats obtenus, ce qui permettrait de repérer les
étudiants en difficulté et de passer une sorte de contrat entre
l'étudiant et son université portant notamment sur
l'assiduité.
Cette confrontation pourrait également permettre une
réorientation vers un cycle court selon une procédure qui devrait
être prévue dans le cadre général du dispositif
post-baccalauréat.
b) Les propositions du rapport Fauroux : faciliter les réorientations et généraliser les " quadrimestres " pendant la durée du DEUG
Le rapport Fauroux préconise en préalable un
repérage précoce et systématique des difficultés
des étudiants au cours du premier trimestre par les enseignants, en
concertation permanente avec le directeur d'UFR, le conseiller d'orientation et
le responsable de l'unité de valeur ou du module qui assure le suivi de
l'étudiant à la fin de chaque semestre.
Par ailleurs, chaque étudiant en situation d'échec se verrait
proposer avant la fin de la première année une
réorientation, notamment sous la forme d'une réinscription en
janvier dans une STS. Ceci suppose une généralisation des
passerelles entre les diverses composantes de premier cycle, un allongement et
une réorganisation de l'année universitaire sous la forme de
" quadrimestres " qui se substitueraient aux quatre périodes
semestrielles des DEUG.
Dans cette nouvelle organisation, chaque période, comprenant deux
modules d'enseignement, devrait être validée pour accéder
à la suivante : l'allongement de l'année universitaire, de
septembre à juillet, permettrait aux étudiants d'obtenir un DEUG
en un an et demi et de compléter la seconde année en suivant
d'autres enseignements ou un stage, tandis que ceux qui échouent aux
épreuves d'un trimestre se verraient proposer un redoublement
immédiat et auraient cependant la possibilité d'obtenir leur
diplôme en deux ans, à condition de ne pas essuyer plus de deux
échecs.
Une telle organisation en quadrimestres serait fondée sur les modules et
sur la capitalisation des acquis, conformément à la
réglementation en vigueur des DEUG.
Elle permettrait enfin d'accueillir des étudiants venant de
l'extérieur ou changeant d'orientation à l'intérieur de
l'établissement.
Un système proche de ces propositions a déjà
été expérimenté avec succès dans certaines
universités, notamment à l'université nouvelle de
Marne-la-Vallée
9(
*
)
.
c) Les propositions formulées par le Gouvernement à l'issue des états généraux de l'université
En conclusion de la procédure dite des états
généraux de l'université, M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et
de la recherche, a notamment exposé un certain nombre de propositions
relatives à la nouvelle organisation de l'année universitaire.
Reprenant l'une des mesures du rapport Laurent, il a annoncé que les
études universitaires seraient organisées en semestres et que
l'année universitaire serait portée à dix mois.
Il a également indiqué qu'un semestre d'adaptation serait
institué au début des premiers cycles permettant notamment aux
étudiants d'aborder des disciplines ou des voies de formation proches
les unes des autres, d'offrir une assistance et un conseil
méthodologique au travail personnel, aux travaux dirigés, aux
cours magistraux et au travail de recherche en bibliothèque.
Il a par ailleurs annoncé une simplification des DEUG, une
réduction de leur nombre, l'inclusion dans toutes les formations de
premier cycle d'un module de culture générale et d'expression,
l'instauration de modules disciplinaires clairement identifiés et d'une
rencontre même sommaire, en fin de cycle, des étudiants avec un
sujet de recherche.
Ce ministre a enfin évoqué la création d'une carte
nationale des passerelles pour les étudiants des filières courtes
qui permettrait aux étudiants d'anticiper leurs perspectives de
poursuite d'études.
d) Les expériences de réorientation précoce engagées à l'université nouvelle de Marne-la-Vallée
En procédant à l'audition de M. Daniel
Laurent, président de l'université de Marne-la-Vallée, qui
fut président du groupe de réflexion sur l'avenir de
l'enseignement supérieur et auteur d'un rapport ayant suscité
nombre de commentaires, la mission a pu observer que l'expérimentation
engagée dans cette université nouvelle avait permis
d'améliorer notablement le taux de réussite des étudiants
de premier cycle, même si ses résultats n'avaient pas
été évalués par le comité national
d'évaluation ; après trois ans d'expérience, les deux
tiers des étudiants obtiendraient leur DEUG en deux ans.
Ceci suppose des moyens supplémentaires du fait des surcoûts
engendrés par des besoins nouveaux en locaux et en heures
d'enseignement, mais aussi une organisation particulièrement
poussée de la scolarité et une mobilisation des enseignants.
M. Daniel Laurent a ainsi précisé au cours de son audition que
les principales innovations expérimentées dans son
université s'étaient d'abord traduites par une organisation de la
première année de DEUG en semestres, avec un examen en
février, cette désynchronisation des rythmes universitaires
permettant d'optimiser l'occupation des locaux, d'autoriser des redoublements
immédiats pour les étudiants qui perdent rapidement pied et
d'organiser une rentrée " latérale "
supplémentaire au mois de février.
En outre, ont été mis en place, en début d'année
universitaire, des tests d'évaluation des étudiants qui ont
notamment révélé des lacunes très graves en
français de certains bacheliers. Ces tests d'évaluation, qui
avaient été établis à partir des épreuves
organisées à l'attention des étudiants étrangers
souhaitant poursuivre leurs études en France, afin d'évaluer
leurs connaissances en français, ont été abandonnés
en raison de la médiocrité des résultats constatés.
Il n'en reste pas moins qu'une insuffisante maîtrise de la langue
française explique nombre d'échecs en premier cycle, y compris
dans les DEUG scientifiques.
L'université de Marne-la-Vallée a par ailleurs innové en
organisant la première année du DEUG de sciences
économiques selon un système de quadrimestres, afin
d'accroître encore les chances de réussite des
étudiants ; cette innovation suppose une équipe
pédagogique motivée, un accord des étudiants
concernés, une organisation rigoureuse de la scolarité ainsi que
des horaires de cours aussi chargés que ceux des classes
préparatoires aux grandes écoles : ce système permet
de réduire le nombre des redoublements, de repérer encore plus
rapidement les étudiants en situation d'échec et de
réorienter ceux-ci en IUT, voire éventuellement vers des formules
de type AFPA.
Ces expériences, qui ont un coût non négligeable, peuvent
être plus aisément mises en oeuvre dans des établissements
à taille humaine, entraînent une nécessaire refonte des
cours mais permettent aussi d'accueillir en février des étudiants
qui n'auraient pas été retenus lors de la rentrée
d'octobre.
D'après M. Daniel Laurent, cette expérience ne nécessite
pas un aménagement de la loi de 1984, la seule prolongation du statut
dérogatoire des universités nouvelles apparaissant
nécessaire.
Cette organisation suppose un consensus et le concours d'enseignants dynamiques
renonçant en particulier aux avantages de carrière
procurés par une activité de recherche ; ces premiers cycles
expérimentaux peuvent, selon lui, fonctionner avec une majorité
d'agrégés du second degré, notamment en sciences et en
lettres, avec l'appui d'enseignants-chercheurs.
e) Les expériences menées dans l'ensemble du système universitaire pour lutter contre l'échec en premier cycle : des efforts très inégaux
La récente enquête menée par
Le Monde
de l'éducation
10(
*
)
auprès des
quatre-vingt universités de métropole révèle que
leurs efforts pour réduire l'échec en premier cycle reposent
davantage sur la mise en place du tutorat que sur la diversification des
parcours universitaires. D'après les réponses fournies, une
trentaine d'universités offrent un service minimum (tutorat d'accueil et
assistance méthodologique limitée à quelques
filières), vingt-sept universités auraient
généralisé ces aides à l'ensemble de leurs DEUG et
dix-sept universités proposeraient des cursus adaptés pour aider
l'étudiant à réussir ou à se réorienter.
Si le tutorat demeure le dispositif le plus répandu, les cursus
aménagés en trois ans, en semestres ou en quadrimestres sont plus
rarement proposés tandis que de nombreuses universités ont mis en
place des systèmes d'information et d'orientation plus ou moins
développés.
-
le développement du tutorat
Le tutorat d'accompagnement est assuré par des étudiants de
deuxième ou troisième cycle qui sont formés par les
enseignants et consiste en un encadrement des groupes de première
année : cette formule qui se généralise semble se
révéler efficace puisqu'à Mulhouse par exemple, sa mise en
oeuvre s'est traduite par une amélioration de l'accès en seconde
année (38 à 46,4 % des étudiants
bénéficiant d'un tutorat selon les disciplines contre 22 à
30 % pour les étudiants non tutorés). Sa réussite
apparaît cependant subordonnée à une mise en oeuvre
précoce, intervenant avant les résultats des premiers examens
partiels, et à un choix privilégiant les étudiants qui en
ont le plus besoin. On constate en effet que ce sont parfois les meilleurs
étudiants qui bénéficient du tutorat et que
l'absentéisme est parfois important.
D'après le bilan réalisé par l'université de Paris
VII, les groupes qui fonctionnent le mieux sont ceux où les tuteurs sont
les plus directifs, disposent d'une bonne formation pédagogique et
offrent des séances structurées répondant aux attentes des
étudiants : préparation des travaux dirigés et exercices
en rapport avec le cours.
- un moindre recours aux cursus aménagés
En ce domaine, huit universités ont mis en place des cursus de
rattrapage pour les étudiants en difficulté, notamment un DEUG en
trois ans, tandis que sept établissements ont proposé aux
étudiants en situation d'échec un itinéraire de mise
à niveau et de réorientation.
A l'issue de ce cursus, sanctionné par un diplôme universitaire de
niveau bac + 1, ceux qui ont obtenu des résultats satisfaisants pourront
s'inscrire en DEUG tandis que les autres pourront se diriger vers des
filières courtes (IUT, STS, écoles professionnelles,
apprentissage). Enfin, trois universités, dont celle de
Marne-la-Vallée pour le DEUG d'économie-gestion, ont
réorganisé les DEUG en trimestres ou en quadrimestres permettant
d'améliorer le taux de réussite du DEUG en deux ans.
-
les tentatives pour améliorer l'orientation
L'enquête menée auprès des universités a permis de
mettre en évidence certains facteurs qui influent sur l'échec
universitaire, et d'abord l'âge des étudiants : selon une
étude menée à Paris X, un bachelier de dix-huit ans aurait
59 % de chances d'avoir la licence, contre 20,6 % pour celui de
vingt-et-un ans.
Une mauvaise information et une orientation peu réfléchie
constitue le second de ces facteurs : à Paris XI, les étudiants
en biologie qui se sont réorientés se sont dirigés vers
des études d'optique, d'aménagement paysager, de
kinésithérapie, d'ingénierie de la santé,
d'histoire, de sociologie, de musicologie, de langues orientales, de
tourisme... c'est-à-dire des filières dépourvues de tout
lien avec leur orientation initiale. Par ailleurs toute action de
réorientation se heurte à la méfiance voire à
l'indifférence des étudiants, notamment ceux qui sont en
situation d'échec : à Lyon I, un cinquième des
étudiants en difficulté qui avaient été
conviés à une réunion d'information dans le cadre du
dispositif de réorientation ont répondu à l'appel, la
moitié de ceux-ci se sont inscrits à un entretien et le quart
seulement ont participé à un groupe de travail ou de
réorientation.
Les résultats de cette enquête montrent ainsi que si certaines
universités ont fait de la lutte contre l'échec une
priorité, d'autres la considèrent comme n'entrant pas dans leurs
missions.
III. LES PROPOSITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION : DEUX PRÉALABLES, TROIS OBJECTIFS ET TRENTE-DEUX MESURES
Après avoir rappelé l'importance de
l'échec universitaire en premier cycle, souligné les
dysfonctionnements et les insuffisances du système d'orientation dans
l'enseignement secondaire et supérieur, votre mission d'information est
désormais conduite à formuler ses propositions.
Celles-ci s'ordonneront autour de trois objectifs :
- le rétablissement d'une continuité entre l'enseignement
secondaire et l'enseignement supérieur, et notamment entre le
lycée et les premiers cycles universitaires ;
- l'adaptation des formations post-baccalauréat à la
diversité de la population étudiante ;
- l'élargissement du pouvoir d'initiative des universités pour
répondre avec succès au défi de la démocratisation
de notre enseignement supérieur.
Avant de présenter ses propres propositions, la mission souhaiterait au
préalable dissiper toute équivoque et écarter deux
solutions extrêmes qui sont avancées parfois pour réduire
l'échec universitaire : la mise en place d'une sélection à
l'entrée à l'université d'une part, la secondarisation des
premiers cycles, d'autre part.
A. DEUX PRÉALABLES : LE REFUS DE LA SÉLECTION À L'ENTRÉE À L'UNIVERSITÉ ET DE LA SECONDARISATION DES PREMIERS CYCLES.
Une analyse rapide des raisons de l'échec universitaire
pourrait conduire à proposer des mesures radicales susceptibles,
à n'en pas douter, de réduire fortement l'échec en premier
cycle, en éliminant de l'université des populations de bacheliers
mal préparés à suivre un enseignement supérieur
traditionnel, général et abstrait.
Force est cependant de constater que la grande majorité des
interlocuteurs de la mission d'information, personnalités
auditionnées, participants à la consultation lancée sur le
réseau Internet, recteurs d'académie et responsables des
établissements d'enseignement secondaire et supérieur, à
l'exception de quelques spécialistes parfois éminents, ont
écarté la solution apparemment simple qui consisterait à
instaurer une sélection pour accéder à l'université.
La plupart d'entre eux se sont également refusé à
envisager une secondarisation des premiers cycles, notamment par la
création de collèges universitaires non sélectifs à
finalité d'insertion professionnelle directe, qui auraient vocation
à accueillir un certain type de bacheliers ne disposant pas des
prérequis nécessaires pour suivre avec succès des
études supérieures.
1. La sélection à l'entrée à l'université : une fausse bonne idée socialement inapplicable
a) Vers une quasi-généralisation du baccalauréat
La généralisation de l'enseignement secondaire
et l'accès d'une proportion de plus en plus importante d'une classe
d'âge au baccalauréat, qui commande l'accès à
l'enseignement supérieur, ont compté parmi les bouleversements
majeurs de la société française au cours des
dernières décennies.
L'objectif annoncé au milieu des années 80 par les responsables
en charge de l'éducation nationale, des 80 % d'une classe
d'âge au niveau du baccalauréat, est en passe d'être
réalisé puisque 61 % des jeunes d'une
génération parviennent désormais à ce niveau,
contre 30 % en 1986, et que 76 % des candidats en 1996 ont obtenu le
diplôme.
Force est de remarquer que cette tendance lourde vers la démocratisation
de l'enseignement secondaire et l'obtention du baccalauréat se serait
sans doute développée spontanément sans une
déclaration ministérielle quelque peu solennelle et
découlait naturellement de la forte demande sociale de scolarisation
exprimée par les familles.
Il convient cependant de rappeler que l'objectif des 80 % supposait une
diversification des baccalauréats et prévoyait notamment la
montée en puissance du baccalauréat professionnel qui n'avait pas
- tous les responsables devraient le répéter - une
vocation à permettre la poursuite d'études supérieures
avec succès.
Dans la réalité, ce développement du baccalauréat
s'est réalisé au profit de la filière
générale et au détriment des filières
technologiques.
Si les derniers résultats traduisent un rééquilibrage
attendu au profit des séries littéraires et scientifiques et le
souci de faire de la filière littéraire une voie d'excellence,
ils révèlent aussi un déséquilibre persistant entre
les enseignements généraux et technologiques qui sont
affectés par une certaine perte d'identité, tandis que le
succès des " bacs pro " se confirme.
Enfin, le baccalauréat reste le premier diplôme universitaire et
confère automatiquement le droit d'accéder à
l'enseignement supérieur : sa double fonction -diplôme de fin
d'études secondaire et premier diplôme universitaire donnant
accès à l'enseignement supérieur- le rend durablement
intangible.
Compte tenu de sa dimension symbolique et de l'attachement de l'opinion
française à un examen qui n'a pas d'équivalent dans les
pays voisins, il paraît donc irréaliste d'envisager sa suppression
et même des aménagements substantiels quant à son
organisation.
b) Un système universitaire cependant largement sélectif : l'acceptation générale d'une sélection officielle et souterraine
Si l'accès à l'université est ouvert sans
restriction à l'ensemble des bacheliers, le secteur sélectif de
l'enseignement supérieur, comme il a déjà
été dit, accueille une forte proportion de nouveaux
étudiants et ignore du fait de sa sélectivité, qui
apparaît variable selon les filières, les problèmes que
connaissent les premiers cycles universitaires généraux.
Tout un secteur qui fonctionne de manière satisfaisante pratique donc
sans complexe la sélection, qu'il s'agisse des grandes écoles, et
des moins grandes, mais aussi des IUT, des STS, des classes
préparatoires ainsi que les filières médicales à
l'issue de la première année et nul ne songe à remettre ce
système en cause.
S'agissant de l'université, une certaine hypocrisie en matière de
sélection est de mise.
L'opinion ne semble pas prête à instaurer une sélection
à l'entrée dans les premiers cycles universitaires : si
l'accès en est libre, s'y pratique en revanche tout au long des deux
années du DEUG une sélection " souterraine " par
l'échec qui est d'autant mieux acceptée dans la pratique qu'elle
n'est pas officiellement affirmée.
Comme il paraît inconcevable de rendre le baccalauréat plus
sélectif du fait de la généralisation de l'enseignement
secondaire, les premiers cycles universitaires sont donc condamnés
à s'adapter au plus grand nombre.
Ainsi le libre accès à l'université permet-il à
tous les bacheliers, quelle que soit leur origine, de tenter leur chance dans
l'enseignement supérieur et de " se frotter " à un
système de formation inédit.
A cet égard, tous les orienteurs constatent que les dispositifs
d'information et d'orientation les plus sophistiqués sont ou seront
impuissants à dissuader tel ou tel bachelier, motivé ou non,
ayant procédé à un choix précis de filière
ou désireux de " zapper " entre plusieurs types de
formation,
de " s'essayer " à l'université.
Plutôt que de les en empêcher, il convient de leur laisser leur
chance et de prévoir des possibilités de réorientations
précoces pour leur permettre de trouver la filière la plus
adaptée.
c) Une demande sociale incontournable en faveur des études supérieures
Après les années des trente glorieuses qui ont
vu la majorité des Français accéder à la
société de consommation, les dernières décennies se
sont caractérisées par l'afflux de nouvelles populations de
bacheliers qui ont découvert l'enseignement supérieur, ce
mouvement correspondant à une forte demande sociale des familles.
Cette aspiration aux études supérieures et à l'obtention
d'un statut étudiant qui reste auréolé d'un certain
prestige, est particulièrement vive et s'explique d'abord par le souci
légitime de promotion sociale des familles pour leurs enfants.
Elle traduit aussi leurs inquiétudes devant l'avenir, du fait des
sombres perspectives en matière d'emploi des jeunes ; l'allongement des
études supérieures qui est aujourd'hui observé traduit
à la fois à une position d'attente, et la conviction que le
diplôme universitaire, mais aussi le passage dans l'enseignement
supérieur, restent, quoi qu'on en dise, les meilleurs passeports pour
trouver un emploi.
Une même demande sociale peut s'observer dans la plupart des pays
comparables au nôtre où, peu ou prou, la moitié d'une
génération accède désormais à l'enseignement
supérieur sans être confrontée d'ailleurs à une
sélection plus rigoureuse que dans notre système universitaire.
En effet, si chacun s'accorde à reconnaître les mérites de
l'université américaine, celle-ci apparaît, contrairement
à une opinion trop répandue moins sélective que notre
système d'enseignement supérieur entendu au sens large. A
l'exception de quelques établissements prestigieux, le plus souvent
privés (Princeton, Harvard, Yale, Stanford, MIT...) ou
d'université d'Etat (Indiana, Wisconsin, Californie, Texas...), il
n'existe pas de véritable sélection dans les quelque
3.600 autres collèges ou universités.
S'agissant de l'Allemagne, le déplacement effectué par une
délégation de la mission à l'université
d'Heidelberg, qui reste l'une des plus prestigieuses du pays, a permis de
constater que le libre accès à l'enseignement supérieur,
qui ne comporte pas de grandes écoles, était la règle, que
les taux d'échec n'étaient pas éloignés des
nôtres et que l'absence de motivation, voire d'assiduité des
étudiants se traduisaient même par une entrée plus tardive
à l'université et par une durée des études qui est
sensiblement plus longue.
d) La position de la mission à l'égard de la sélection
Au début et au cours de ses travaux, certains membres
de la mission d'information ont pu exprimer des opinions opposées sur le
thème du libre accès des bacheliers à l'université.
Parvenue au terme de ses réflexions, la mission a constaté
l'impossibilité de rendre le baccalauréat plus sélectif,
l'intensité de la demande sociale en faveur de l'enseignement
supérieur, la nécessité de laisser leurs chances à
l'ensemble des bacheliers, et a observé que la plupart des
systèmes universitaires étrangers ne pratiquaient pas de
sélection à l'entrée à l'université.
Elle a également pris acte d'un assez large consensus dans l'opinion en
faveur d'une coexistence entre filières ouvertes et filières
sélectives, et a estimé que la sélection n'aurait pas pour
conséquence de réduire de manière sensible, le coût
des premiers cycles universitaires, même si cet argument est souvent
invoqué.
Dans ces conditions, la mission a jugé opportun et réaliste
d'écarter tout dispositif de sélection à l'entrée
dans les premiers cycles universitaires, en lui préférant une
logique de diversification des filières post-baccalauréat et une
multiplication des possibilités de réorientation des
étudiants.
2. Un deuxième préalable : le refus de la secondarisation des premiers cycles
a) Une tentation récurrente : créer une structure de cantonnement des populations étudiantes en difficulté
A côté de la sélection, l'échec
universitaire en premier cycle pourrait selon certains être radicalement
réduit en dirigeant les étudiants en difficulté des
filières générales (certains bacheliers technologiques et
la plupart des bacheliers professionnels) vers des structures d'accueil courtes
et non sélectives qui dispenseraient des formations adaptées aux
besoins de l'économie locale et régionale.
Cette tentation récurrente présenterait évidemment
l'avantage de cantonner ces étudiants mal préparés
à suivre des études abstraites et générales dans
des structures qui ne relèveraient plus directement de
l'université et par-là même d'améliorer
spectaculairement le taux de réussite dans les premiers cycles
universitaires.
Cette proposition n'apparaît nullement extrémiste puisqu'elle est
préconisée par exemple par la commission
Fauroux qui
recommande que de nouvelles formations technologiques courtes non
sélectives soient créées, en souhaitant cependant que les
IUT soient appelés à ouvrir plus largement leurs portes.
Dans le même sens, M. Daniel Laurent proposait dans son rapport de
créer des instituts universitaires régionalisés permettant
de développer des solutions alternatives à
l'université ; dans son esprit, ces formations courtes devraient
être de bon niveau et suffisamment attractives pour les
intéressés. Elles résulteraient d'initiatives locales et
pourraient être définies notamment en liaison avec les
organisations consulaires.
Enfin, des personnalités éminentes, comme M. Laurent Schwartz,
préconisent également la création de collèges ou
d'instituts universitaires de premier cycle, relevant de l'université,
et qui seraient susceptibles d'offrir un éventail de disciplines
suffisamment large (droit, lettres, sciences, ...) dans chaque ville
universitaire pour accueillir sans sélection notamment les
étudiants de premier cycle actuellement en situation d'échec : le
diplôme qui y serait préparé s'écarterait de la
finalité actuelle du DEUG qui est de préparer les
étudiants à des études longues et son programme serait
allégé et orienté vers une formation plus
appliquée. Dans le même temps, l'ancien DEUG serait rendu plus
sélectif et plus axé vers les disciplines fondamentales pour les
étudiants qui sont susceptibles de poursuivre avec succès des
études longues, des passerelles pouvant cependant être
créées avec le DEUG de collège.
Ces propositions convergentes peuvent apparaître séduisantes au
premier examen : elles permettraient évidemment d'améliorer le
taux de réussite dans les premiers cycles, mais aussi en licence et en
maîtrise et elles s'inspirent par ailleurs du système
américain qui apparaît particulièrement démocratique
puisqu'il prévoit des formations de rattrapage notamment pour les
élèves du secondaire dont le niveau est très faible.
Par ailleurs, ce système qui fonctionnerait principalement avec des
personnels enseignants de l'enseignement secondaire, certifiés et
agrégés, serait moins coûteux que celui des premiers
cycles, puisque les charges d'enseignement des professeurs de lycée sont
moins lourdes que celles des professeurs d'université.
Même si une certaine " secondarisation " des premiers
cycles a
la faveur d'une partie de l'opinion, du fait notamment d'un meilleur
encadrement qui contribuerait à améliorer les taux de
réussite, la mission d'information considère que les
inconvénients d'une telle formule l'emporteraient sur les avantages
attendus.
b) Les inconvénients d'une secondarisation des premiers cycles
Il convient d'abord de remarquer que la création de
collèges universitaires conduirait d'abord à casser
artificiellement l'organisation des premiers cycles pour réduire leur
taux d'échec et la méthode préconisée peut
être comparée à celle qui a été
développée dans le secteur bancaire pour améliorer la
présentation du bilan de certains établissements, en cantonnant
certains de leurs actifs dans des structures ad hoc.
En premier lieu, l'organisation de collèges universitaires conduiraient
à déconnecter les premiers cycles de l'activité de
recherche qui est consubstantielle à l'enseignement supérieur et
de secondariser ces derniers.
Même si la recherche universitaire ne joue qu'un rôle limité
dans les premiers cycles, la mission considère qu'il importe de la
maintenir, voire de la développer, et estime qu'une présence
minimale d'enseignants-chercheurs est indispensable pour diriger et animer les
enseignements, même si ceux-ci sont assurés pour partie par des
professeurs agrégés du secondaire, voire des professeurs
certifiés.
En second lieu, ces collèges universitaires, qui seraient
créés en fonction des besoins des entreprises locales, risquent
de ne dispenser que des formations de proximité et des qualifications
trop pointues qui se prêteront mal à l'évolution rapide des
qualifications et des métiers et constitueront ainsi un obstacle
à la reconversion future de leurs diplômés.
Par ailleurs, cette déconnexion des collèges du système
universitaire risquerait d'enfermer les bacheliers technologiques et
professionnels dans des " formations-ghettos " se prêtant
difficilement à l'établissement de passerelles avec les
véritables filières supérieures et à la reprise
ultérieure d'études.
Enfin, ces nouvelles formations feraient double emploi avec les IUT et les STS
qui ont été créés à l'origine pour
accueillir les bacheliers technologiques.
En conséquence, la mission ne peut qu'être hostile à la
création de tels collèges qui s'éloigneraient trop de la
nature des premiers cycles universitaires et qui s'ajouteraient à des
structures existantes créées pour accueillir les bacheliers
concernés.
Elle serait également défavorable à une nouvelle
organisation systématique des premiers cycles qui se traduirait par une
réactivation des anciennes classes de propédeutique et qui
conduirait à prolonger de deux ans la scolarité des
lycéens, ainsi qu'à décaler de fait l'obtention du
véritable baccalauréat donnant accès à
l'enseignement supérieur.
Elle serait en revanche favorable à une plus grande diversification des
premiers cycles et à un élargissement de la palette des
formations offertes aux étudiants qui pourraient être
adaptées au contexte économique local et régional. Cette
diversification devrait cependant se concilier avec une simplification de
l'organisation des DEUG autour de quelques grandes filières.
De nouvelles formations courtes à bac + 1 ou + 2,
conservant un caractère universitaire pourraient ainsi être
proposées, soit aux nouveaux étudiants convenablement
informés des caractéristiques de ces nouvelles filières,
soit à ceux qui se sont fourvoyés dans les DEUG.
B. UNE MEILLEURE ARTICULATION ENTRE L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE ET L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
Les développements qui précèdent ont
évoqué les difficultés rencontrées par les
bacheliers pour passer du lycée à l'université, et la
plupart des interlocuteurs de la mission ont souligné la
nécessité de réduire la rupture ressentie par de nombreux
lycéens, existant entre l'enseignement secondaire et supérieur.
Cette rupture qui résulte pour l'essentiel de deux conceptions du
savoir, du passage d'un " savoir que l'on reçoit " à un
" savoir que l'on construit " explique pour une large part
les taux
d'échec constatés dans les premiers cycles universitaires.
Ce passage est rendu particulièrement difficile pour nombre de
bacheliers non généraux qui passent du
" sur-encadrement " du lycée à une liberté sans
doute excessive, d'un enseignement de type scolaire à une formation qui
fait la part belle au travail personnel, d'un système d'études
focalisées sur le seul baccalauréat à une filière
supérieure choisie qui devra nécessairement déboucher un
jour sur un métier...
Dans la perspective d'une meilleure articulation entre le second cycle du
secondaire et les premiers cycles du supérieur, il importe de donner
à la fonction d'orientation toute sa dimension, de solliciter les
compétences de tous les enseignants concernés, de coordonner
l'action des différents personnels chargés de l'orientation des
élèves et des lycéens, d'améliorer leur information
en les éclairant et en prenant davantage en compte leurs souhaits
d'orientation.
1. La mise en oeuvre d'un processus continu d'orientation par l'éducation aux choix
Au lieu d'apparaître comme la sanction de l'échec
scolaire, l'orientation doit devenir un processus continu du début de la
scolarité jusqu'à l'université, une partie
intégrante du processus éducatif et emprunter la forme de cours
spécifiques qui doivent impliquer l'ensemble de l'équipe
éducative.
Les élèves et les étudiants devront, ainsi
désormais être reconnus comme des responsables directs de leur
orientation et non plus subir les décisions des divers personnels
chargés de l'orientation qui ont trop tendance, dans un enseignement
désormais massifié, à opérer un tri entre des
populations scolarisées souvent dépourvues de tout projet
personnel.
Cette exigence, qui n'est pas nouvelle, a été affirmée par
le législateur et le gouvernement au cours des années
récentes, mais sa mise en oeuvre en est restée au stade de
l'expérimentation.
a) Un principe fixé par la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 : un projet d'orientation élaboré par les élèves et les étudiants
La thématique de l'orientation joue traditionnellement
un rôle primordial dans l'organisation scolaire : les cycles
d'observation, d'orientation, de détermination et
" terminaux " des collèges et des lycées
témoignent ainsi de l'importance des opérations d'orientation
dans le parcours des élèves.
La loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 place
l'élève au centre du système éducatif,
prévoit que chaque jeune construit progressivement l'orientation que le
lycée lui permet de réaliser et consacre le rôle de
l'élève dans son orientation.
D'après son article premier, " les élèves et les
étudiants élaborent leur projet d'orientation scolaire,
universitaire et professionnelle en fonction de leurs aspirations et de leurs
capacités avec l'aide des parents, des enseignants, des personnels
d'orientation et des professionnels compétents. Les administrations
concernées, les collectivités territoriales, les entreprises et
les associations y contribuent ".
En dépit de l'affirmation de ce principe et d'une nouvelle organisation
des études au lycée tendant à rééquilibrer
les séries, l'orientation se réduit encore pour l'essentiel en
une " distillation fractionnée " des populations scolaires,
comme le remarque le rapport Fauroux : si les inégalités sociales
n'empêchent plus d'accéder à l'école, elles se
traduisent désormais par une affectation autoritaire dans certains
parcours scolaires lorsque les familles ne sont pas en mesure d'élaborer
une véritable stratégie d'orientation.
L'école, et notamment l'enseignement secondaire, doit désormais
apprendre à ses élèves à s'orienter et à
définir un projet personnel, qui passe nécessairement par le
développement d'une véritable éducation au choix selon des
modalités qui ont été précisées
solennellement dans le nouveau contrat pour l'école.
b) Les mesures relatives à l'information et à l'orientation prévues dans le nouveau contrat pour l'école
Il convient d'abord de rappeler que les quelque 150
propositions présentées le 9 mai 1994 par le ministre sont
devenues, depuis lors, des décisions assorties d'un calendrier
précis d'application.
Sept de ces mesures sont relatives explicitement à la mission
d'information et d'orientation de l'éducation nationale et leur mise en
oeuvre devait intervenir à la rentrée scolaire de 1995.
D'après leur exposé des motifs, " la préparation
à l'orientation devient une mission à part entière de
l'école. Elle trouve sa place dans les horaires dès la
cinquième. Elle permet, au lycée, d'éviter les erreurs
d'orientation trop fréquentes à l'université, par une
information directe et objective sur les débouchés de toutes les
voies universitaires ".
- Après avoir rappelé cette mission générale, la
mesure n° 46 du NCE précise que celle-ci est de la
responsabilité de l'ensemble de l'équipe pédagogique et
des COP ;
- la mesure n° 47 précise que les CIO contribuent
prioritairement à cette tâche d'information des
élèves, en étroite liaison avec les collectivités
locales et les milieux professionnels ;
- la mesure n° 122 prévoit que les relations entre les CIO et
les établissements sont redéfinies et que les CIO se consacrent
en priorité à l'information sur les métiers et à
l'éducation des choix auprès des élèves ;
- la mesure n° 48 stipule que, dès la 5e, un véritable
système d'information sur l'orientation est mis en place sous la forme
de séquences périodiques de réflexion sur les
métiers et l'éducation des choix ;
- la mesure n° 49 indique que l'information sur l'orientation
s'appuie largement sur les techniques du multimédia et qu'elle fait
également appel à la chaîne du savoir et de la connaissance
;
- la mesure n° 63 précise que l'information sur les
filières universitaires et les métiers est
développée ;
- enfin, la mesure n° 123, qui n'est pas assortie d'un calendrier
d'application, indique que la mission des COP est recentrée sur
l'orientation des jeunes et l'aide à l'élaboration de leurs
projets d'études ou professionnels.
c) l'expérimentation des séquences d'éducation à l'orientation dès la classe de cinquième
Le NCE prévoyait, dès la rentrée 1995, la
mise en place d'un véritable système d'information sur
l'orientation à partir de la classe de cinquième.
En fait, la mesure n° 48 n'a pas fait l'objet d'une application dans
l'ensemble des établissements mais seulement d'une
expérimentation, au cours de l'année 1995-1996, dans les
362 collèges publics et privés choisis pour la
rénovation pédagogique prévue dans le NCE, qui avait
été validée par le législateur dans
l'article 2 de la loi de programmation du 13 juillet 1995.
L'expérimentation a consisté à mettre en oeuvre dans ces
établissements, en classe de cinquième, des séquences de
réflexion sur les métiers et d'éducation au choix, mais
aussi à développer la place de l'éducation à
l'orientation au sein de la classe dans les enseignements, notamment par des
conseils individualisés prodigués par chaque membre de
l'équipe éducative.
·
les objectifs recherchés
Les objectifs de l'expérimentation ont été définis
dans une note du 3 juillet 1995 tandis que le choix des actions, des
méthodes et leur organisation pédagogique étaient
laissées à l'initiative des équipes éducatives.
D'après l'enquête effectuée en novembre 1995 auprès
des 362 collèges, 80 % d'entre eux avaient été
volontaires pour mettre en place des séquences d'éducation
à l'orientation. Une évaluation quantitative de cette
expérimentation a été réalisée par ailleurs
par l'inspection générale vie scolaire.
Au vu des résultats de cette évaluation, une circulaire
n° 96-204 du 31 juillet 1996 a été publiée
afin de préciser les objectifs assignés à
l'éducation à l'orientation :
- favoriser l'acquisition des compétences des élèves pour
former des choix autonomes ;
- permettre à chaque élève d'élaborer en fin de
collège un premier choix éclairé, adapté à
ses capacités et aspirations au regard des formations offertes.
Les connaissances attendues en fin de collège en ce domaine
relèvent de trois domaines :
- une approche des activités professionnelles et de l'environnement
social et économique ;
- les grandes lignes des systèmes de formation ;
- la construction d'une " représentation positive de soi ",
de
la part des élèves.
·
l'implication des établissements
Alors que les modalités d'organisation des séquences
n'étaient pas précisées, notamment les horaires et le
financement, les chefs d'établissement et les équipes
éducatives semblent s'être impliqués fortement dans cette
expérimentation : la mise en oeuvre des séquences s'est
traduite par l'introduction d'un temps scolaire réservé à
la préparation de l'orientation d'environ dix heures par an et par
division.
Ce temps scolaire a été diversement réparti selon les
établissements, soit une heure par quinzaine, soit une
répartition globalisée sur certaines périodes de
l'année.
Le financement a été assuré sur la dotation
globalisée de l'établissement et 40 % des collèges
ont eu recours à des heures supplémentaires d'enseignement.
Enfin, si l'éducation à l'orientation a été mise en
oeuvre collectivement par l'équipe éducative, la participation
des professionnels aux séquences a été effective dans
75 % des collèges.
Outre le chef d'établissement qui est responsable de l'ensemble du
dispositif, et notamment du programme d'orientation de son
établissement, l'équipe éducative est constituée du
conseiller d'orientation-psychologue, du professeur principal qui assure le
liaison entre tous les membres de l'équipe, du documentaliste, du
conseiller principal d'éducation et des délégués de
parents d'élèves au conseil d'administration et au conseil de
classe qui sont associés à l'élaboration et au suivi des
actions d'éducation à l'orientation.
·
la réaction des élèves
D'après l'évaluation réalisée, les
élèves concernés auraient montré leur
intérêt pour une telle initiative et auraient, en matière
d'orientation, appris à dialoguer, à relativiser leurs points de
vue en se montrant autonomes et responsables.
Les séquences d'éducation à l'orientation auraient permis
de développer leur motivation pour les études, leur
curiosité à l'égard du monde professionnel et d'enrichir
le dialogue avec les familles.
·
le bilan et les perspectives d'extension
D'après les informations fournies par le ministère,
l'expérimentation de l'éducation à l'orientation a
répondu aux besoins antérieurement non satisfaits des
élèves et des enseignants et a permis d'enclencher une dynamique
qui devrait être poursuivie au collège et au lycée.
L'expérimentation devrait être développée pour
l'année scolaire 1996-1997 en classe de quatrième et
étendue aux classes de cinquième dans les conditions
définies par la circulaire du 6 septembre 1996.
Des instructions devraient être données, par ailleurs, pour mettre
en oeuvre une éducation à l'orientation au lycée afin de
préparer la transition avec les poursuites d'études vers le
supérieur.
Enfin, les académies seront sollicitées par la direction des
lycées et collèges, en liaison avec l'inspection
générale, pour l'élaboration d'un bilan plus
général au début de l'année 1997.
d) Les propositions de la mission : la mise en oeuvre effective et rapide de l'éducation aux choix
Votre mission d'information observe d'abord que le principe
fixé par la loi de 1989 - l'élaboration de leur projet
d'orientation par les élèves et les étudiants - n'a
guère été explicité par les mesures du NCE qui
devaient pourtant être mises en oeuvre à la rentrée de 1995.
·
le rapport d'étape 1996 de la loi de programmation
Le récent rapport d'étape au Parlement sur l'état
d'exécution de la loi de programmation du " nouveau contrat pour
l'école " du 13 juillet 1995 apporte cependant quelques
indications.
Les CIO devront ainsi veiller à la cohérence des
différentes actions d'information menées au profit des jeunes en
élaborant, dans le cadre du district ou du bassin de formation, et en
collaboration avec les collectivités locales et les milieux
professionnels notamment, un projet d'intervention assurant l'articulation des
différents carrefours, forums ou stages de découverte. Ils
doivent, par ailleurs, collaborer à la mise en place des diverses
actions d'information qui figurent dans les conventions de partenariat conclues
avec les branches professionnelles.
Les CIO devront également élaborer des dispositifs
spécifiques de repérage, d'accueil et de prise en charge des
jeunes avec l'objectif d'éviter au maximum les périodes d'errance
entre la sortie du système scolaire et l'insertion professionnelle. Ces
mesures devraient être renforcées lors de la mise en oeuvre de
l'accord-cadre interministériel relatif au réseau public de
l'insertion des jeunes, conçu le 20 mars 1996.
Le rapport indique ensuite que la mission d'information et d'orientation
assignée à l'école doit s'appuyer sur une meilleure
utilisation des outils modernes de communication.
Aussi des développements de logiciels ont-ils été
entrepris par l'intermédiaire des conseillers d'orientation-psychologues
et des conseillers chargés d'une mission nationale ou académique
informatique. Depuis février 1996, un logiciel permet au conseiller
d'orientation-psychologue de puiser à diverses sources les
renseignements dont il a besoin.
L'ONISEP, en collaboration avec la direction des lycées et
collèges, a édité une série de CD-ROM
intitulés :
Itinéraires pour un métier
, qui
aident à rectifier la représentation erronée que se font
les jeunes élèves de certaines professions.
Enfin, un projet de collaboration entre le ministère et le CNDP est en
cours, concernant l'édition de produits multimédias,
destinés à informer les élèves, les parents et les
enseignants sur les divers aspects de l'orientation, notamment en enrichissant
leur connaissance des formations et de l'environnement économique.
·
le bilan de l'expérimentation engagée dans certaines
classes de 5e
La mission d'information remarque que l'innovation qui lui paraît la plus
importante et la plus concrète -
les séquences
périodiques de réflexion à partir de la classe de 5e, sur
les métiers et l'éducation des choix,
prévues par la
mesure n° 48 du NCE- n'a été expérimentée
que dans 362 collèges et ne devait être
généralisée dans toutes les classes de 5e qu'à la
rentrée de 1996, une expérimentation devant être
engagée parallèlement dans les classes de 4e de ces mêmes
collèges.
Dans ces conditions, et à ce rythme, l'ensemble des élèves
des quelque 7.000 collèges ne devraient bénéficier de
ces séquences qu'à la rentrée de 1998, date à
laquelle le dispositif serait étendu à toutes les classes de 3e.
Ces échéances apparaissent trop tardives, notamment pour les
collégiens en fin de scolarité qui doivent choisir une
orientation au lycée, et il serait souhaitable que les séquences
d'orientation soient généralisées à toutes les
classes de 3e dès la rentrée de 1997 et que soit mise en oeuvre
parallèlement sans délai l'éducation à
l'orientation pendant les trois années de lycée, comme le
ministre l'a annoncé.
S'agissant des modalités d'organisation de ces séquences au
collège, le premier bilan de l'expérimentation engagée au
cours de la dernière année scolaire fait apparaître une
formalisation sans doute insuffisante du dispositif.
En effet, les instructions contenues dans la note du 3 juillet 1995
et la circulaire du 31 juillet 1996 restent muettes sur les horaires que
les établissements devraient consacrer aux séquences et qui sont
laissés à leur appréciation;
D'après la première évaluation réalisée, les
collèges concernés auraient consacré dix heures par
an et par division à l'orientation, organisées par quinzaine ou
réparties plus globalement sur certaines périodes de
l'année.
La mission considère que la périodicité de cet horaire
devrait être précisée et proposera ainsi qu'au moins une
heure par mois soit réservée dans l'ensemble des collèges
à l'orientation afin que celle-ci devienne partie intégrante des
enseignements dispensés, et que la mise en oeuvre de ce dispositif fasse
l'objet d'une évaluation aussi rapide que possible.
Elle souhaiterait également, outre la participation des personnels
chargés traditionnellement de l'information et de l'orientation (chefs
d'établissement, professeurs et professeurs principaux, COP, conseillers
d'éducation, documentalistes) que soit mentionnée la
participation systématique de professionnels à ces
séquences, ainsi que celle de bénévoles extérieurs
au système éducatif, notamment de jeunes retraités,
justifiant d'une expérience professionnelle récente et
adaptée, et d'étudiants de deuxième ou de troisième
cycle. Elle souhaiterait, enfin, que les familles soient associées
à ces actions de formation à l'orientation, selon des
modalités arrêtées au niveau de chaque établissement.
·
la nécessité de mettre rapidement en oeuvre une
formation à l'orientation dans les lycées
D'après le rapport d'étape relatif à la mise en oeuvre de
la loi de programmation du NCE, un horaire devrait être consacré,
dès la classe de seconde, à l'information et à la
formation des élèves à l'orientation, dont les
modalités, très générales, ont été
précisées par la circulaire n° 96-230 du
1er octobre 1996 : pour les
classes de seconde
, plages
obligatoires d'information, rencontres avec des intervenants
extérieurs..., pour les
classes de première
, rencontres
thématiques obligatoires sur les débouchés et sur les
réussites par séries du baccalauréat, pour les
classes
de terminale
, connaissance des enseignements supérieurs, des
procédures d'inscription, intervention d'anciens élèves et
d'enseignants-chercheurs, une évaluation des actions d'orientation
entreprises dans les établissements étant prévue
dès la fin de la présente année scolaire.
Le rapport d'étape précise également que des
journées " portes-ouvertes " seront organisées dans les
établissements d'enseignement supérieur à partir de 1997
et que des conférences disciplinaires indiqueront aux lycéens la
nature du travail à fournir dans les principales voies de formation de
l'enseignement supérieur.
A l'exemple du collège, la mission d'information souhaiterait que ces
actions de formation à l'orientation soient mises en oeuvre dans les
meilleurs délais dans les trois années de lycée, sous la
responsabilité des professeurs principaux.
2. Le renforcement de l'efficacité des personnels chargés de l'information et de l'orientation des étudiants et des lycéens
La mission d'information considère qu'une politique efficace et continue en faveur de l'orientation des étudiants et des lycéens suppose d'abord une formation spécifique des personnels concernés et une augmentation des moyens qui leur sont consacrés.
a) Les professeurs principaux : les pivots du système d'orientation
A cet égard les professeurs principaux devront
bénéficier d'une formation renforcée sur les diverses
filières post-baccalauréat et notamment sur leur contenu et leurs
perspectives d'emploi.
Dans cette perspective, la mission préconisera d'abord que les
professeurs principaux bénéficient d'une formation adaptée
dans le cadre des plans de formation continue des personnels enseignants,
à laquelle pourraient être associés les universitaires et
les conseillers d'orientation des SCUIO.
La mission proposera en outre qu'une décharge spécifique de
service soit instituée au profit des professeurs principaux, et que
l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves,
prévue par le décret du 15 janvier 1993, se trouve sensiblement
revalorisée.
Elle recommandera également, comme il a été dit, que les
professeurs principaux, qui connaissent le mieux les capacités et les
souhaits de leurs élèves, assument la responsabilité de
l'animation des séquences périodiques de réflexion sur les
métiers et l'éducation des choix prévues par la mesure
n° 48 du NCE.
Afin de compléter et d'actualiser leur connaissance des diverses
formules post-baccalauréat et de leurs débouchés, elle
proposera que tous les professeurs principaux de terminale
bénéficient chaque année à la fin du mois de
janvier de deux journées d'information obligatoires prises sur leurs
horaires de cours, la première étant consacrée à la
visite d'établissements d'enseignement supérieur (premiers cycles
universitaires, BTS, CPGE, IUT, écoles diverses, ...) en même
temps que leurs élèves, le programme de la seconde étant
laissé à leur initiative au niveau de chaque bassin de formation.
Ces journées d'information devraient leur permettre de développer
des contacts avec les enseignants et des équipes de recherche.
Enfin, afin de leur permettre de répondre aussi
précisément que possible à toutes les questions concernant
l'orientation de leurs élèves de terminale, les professeurs
principaux, devront recevoir un dossier pratique sur les carrières et
les débouchés les plus adaptés à chaque
filière du baccalauréat, ce dossier devant être
établi par chaque service académique d'information et
d'orientation (SAIO).
Il serait donc souhaitable que ces dernières mesures déjà
expérimentées avec succès, notamment dans
l'académie de Lyon, soient généralisées dans
l'ensemble des académies.
b) Les conseillers d'orientation psychologues : des recrutements nécessaires et une formation élargie
- le renforcement de leur formation
Outre leur participation aux deux journées d'information prévues
pour les professeurs principaux, la première étant
organisée avec les lycéens de terminale, les conseillers
d'orientation-psychologues devront bénéficier de stages
d'information sur les métiers et les qualifications, en particulier
celles qui sont requises au plan local et régional, ces stages pouvant
être organisés par les chambres consulaires et les groupements
professionnels, en utilisant notamment les nouvelles techniques de la
communication. Participeraient à ces stages des équipes de
recherche, des représentants notamment de l'ANPE, de l'APEC, des
délégations départementales à l'emploi, afin
d'informer les conseillers d'orientation sur les tendances du marché de
l'emploi.
Cette formule lui paraît plus efficace que celle proposée par le
ministre qui consisterait à créer une instance
indépendante chargée d'indiquer les débouchés de
chaque filière et qui risque de ne fournir que des informations
très générales ne répondant pas aux interrogations
précises des lycéens et des étudiants.
Chaque COP devrait être par ailleurs destinataire, comme les professeurs
principaux, du dossier pratique sur les carrières et les
débouchés de chaque filière du baccalauréat
établi par les SAIO.
-
l'augmentation de leurs effectifs
Afin de pallier l'insuffisance de leurs effectifs, la mission préconise,
à l'instar des propositions de la commission Fauroux, d'affecter
à terme à chaque collège et lycée de dimension
importante un conseiller d'orientation à temps plein, ce qui suppose un
triplement du nombre des COP dans les dix ans à venir.
Elle propose, en outre, qu'au moins un conseiller d'orientation à temps
plein se consacre exclusivement à la fonction d'accueil et de conseil
des étudiants dans chaque université et dans les antennes
universitaires les plus importantes.
c) La nécessité de préciser les rôles respectifs des personnels chargés de l'orientation : renforcer le rôle d'expert des conseillers d'orientation
Alors que l'orientation et l'affectation des
élèves sont actuellement assurées aux termes du
décret du 15 juin 1990 par des personnels divers, professeurs et
professeurs principaux, conseillers d'orientation-psychologues, mais aussi,
conseillers d'éducation, il importe de préciser la place revenant
à ces différents intervenants dans un système
cohérent d'orientation, étant entendu que la décision
finale d'orientation doit revenir aux familles et aux élèves.
La mission d'information considère que le rôle des enseignants, et
notamment celui des professeurs principaux, via les conseils de classe,
apparaît primordial et souhaiterait que la vocation professionnelle et
d'expertise des conseillers d'orientation qui se trouvent placés
à l'interface entre le lycée, l'université mais aussi les
entreprises, se trouve renforcée.
Elle se demande enfin si l'orientation des étudiants doit relever
exclusivement de personnels relevant du système éducatif et si
cette fonction d'orientation et de conseil ne pourrait pas également
être assurée, à titre complémentaire, par des
bénévoles, notamment des cadres de la vie économique ou
des jeunes retraités, susceptibles d'apporter des réponses
très précises aux étudiants sur les carrières et
les métiers. L'organisation d'une campagne nationale dans les
médias permettrait de mobiliser ces bénévoles qui
viendraient épauler les personnels d'orientation.
3. Les mesures destinées à faciliter le passage des lycéens vers l'enseignement supérieur
Diverses mesures déjà expérimentées ou généralisées ont pour objectif de faciliter le délicat passage des lycéens aux formations supérieures. Elles consistent pour l'essentiel à dispenser une information aux élèves de terminale et aux nouveaux bacheliers sur le contenu, la finalité et les perspectives de poursuite d'études ou de débouchés professionnels des diverses filières post-baccalauréat et à mettre en place un suivi des décisions d'orientation successives des lycéens et des bacheliers.
a) Une généralisation souhaitable des journées d'information réservées aux élèves de terminale
Comme il a déjà été
indiqué, l'académie de Lyon a déjà
expérimenté la formule des journées dites du
lycéen, qui permet à la fin du mois de janvier aux
élèves de terminale de bénéficier de deux
journées d'information prises sur le temps scolaire pour visiter divers
établissements d'enseignement supérieur de leur choix, qu'il
s'agisse de premiers cycles universitaires ou de formations plus ou moins
sélectives.
La mission préconise une généralisation de ce dispositif
dans l'ensemble des académies en y associant les professeurs principaux
et les conseillers d'orientation pour la première de ces journées
d'information.
Une telle formule, qui serait obligatoire pour l'ensemble des
élèves de terminale, permettrait aux futurs bacheliers de
découvrir concrètement le fonctionnement des diverses
filières supérieures d'une manière plus approfondie
qu'à l'occasion des traditionnelles journées portes-ouvertes
déjà organisées par de nombreuses universités.
Cette proposition s'inscrit dans la perspective de la mesure
préconisée par le ministre tendant à organiser pendant les
trois années de lycée, des rencontres avec des universitaires,
des étudiants et des professionnels, ainsi qu'à
généraliser les semaines portes-ouvertes dans l'enseignement
supérieur.
b) La semaine d'accueil et d'information des nouveaux étudiants : la formaliser davantage et la rendre obligatoire
L'article 13 de l'arrêté du 26 mai 1992 qui
tendait à rénover les DEUG institue une semaine d'accueil dans
les universités pour les nouveaux étudiants. Sa mise en oeuvre
est devenue effective dans la plupart des établissements et elle permet
aux nouveaux étudiants qui le souhaitent de rencontrer des
étudiants avancés, des enseignants et des conseillers du SUIO.
Cependant son organisation apparaît trop souvent formelle et la
présence des étudiants n'y est pas obligatoire. Afin de
conférer à ce dispositif toute son efficacité, la mission
d'information souhaiterait que cette semaine soit considérée
comme une formalité obligatoire pour tous les nouveaux étudiants
et que son déroulement et son contenu se trouvent précisés
(visite des locaux universitaires, des services administratifs, des salles de
cours et de travaux dirigés, des laboratoires, des locaux des oeuvres
universitaires, information exhaustive sur les diverses filières, leur
contenu, leurs finalités, leurs débouchés, les
perspectives d'insertion professionnelle, les taux d'échec par
filières selon l'origine des bacheliers, le devenir des
diplômés...).
Ceci suppose une véritable évaluation de chaque université
qui sera par ailleurs préconisée ci-après.
c) Le nécessaire suivi de l'évolution des voeux d'orientation des lycéens de terminale et des bacheliers
Les enquêtes et les expériences engagées
par l'académie de Lyon ont notamment permis de mieux appréhender
les modalités du passage des bacheliers du secondaire au
supérieur, d'anticiper l'accueil entre les diverses filières
supérieures, de faciliter l'orientation et la réorientation des
nouveaux étudiants.
Ce dispositif permet d'assurer le suivi des voeux d'orientation des
élèves de terminale et leur évolution de la phase de
préinscription qui intervient au mois d'avril précédant le
baccalauréat jusqu'à leur entrée à
l'université.
Cette procédure facilite la mise en oeuvre d'une politique
concertée d'accueil entre les diverses filières
supérieures tenant compte des capacités et des critères
d'admission et permet d'apporter une aide aux bacheliers en leur rappelant
à l'occasion d'entretiens personnalisés les exigences et les
objectifs de certaines filières très demandées.
Elle permet en outre d'afficher les places vacantes dans l'ensemble des
établissements et d'organiser des entretiens d'orientation permettant de
vérifier l'adéquation entre les souhaits des bacheliers et les
exigences des filières, et ultérieurement, en cours de premier
trimestre universitaire de procéder à des réorientations
entre les STS et les premiers cycles universitaires.
La mission considère que la prise en compte des préinscriptions
universitaires et de l'évolution des voeux d'orientation des bacheliers
peut contribuer à éviter des choix irréalistes en faveur
de certaines filières, un tel système supposant une gestion
informatique des voeux d'orientation et un développement des entretiens
personnalisés.
d) Renforcer l'efficacité des services communs universitaires d'information et d'orientation (SCUIO)
Les réformes intervenues au cours des années
récentes concernant l'attribution des moyens de fonctionnement aux
universités -contractualisation et globalisation des crédits-
permettent désormais aux établissements de développer une
politique en faveur des actions d'information, d'orientation et d'insertion
professionnelle.
La mission souhaiterait ainsi que dans le cadre des contrats de
développement, les universités prennent en compte les missions
des SCUIO et que chaque service d'orientation bénéficie des
moyens nécessaires pour les accomplir dans la répartition de la
dotation globale de la subvention de fonctionnement.
Enfin, outre une plus grande implication des enseignants-chercheurs dans les
activités des SCUIO, ces services ont également besoin de
personnels spécialisés, conseillers d'orientation mais aussi
documentalistes et spécialistes de la préparation à la
recherche d'un emploi.
Chaque SCUIO devrait enfin disposer d'un réseau de correspondants
enseignants dans chaque unité de formation et de recherche (UFR) de
l'université.
4. L'amélioration de l'encadrement pédagogique des premiers cycles.
Afin de remédier aux insuffisances de l'encadrement
pédagogique des premiers cycles, qui a bien des égards n'est pas
digne d'un pays comme le nôtre, il apparaît nécessaire
d'utiliser toutes les ressources humaines et les compétences de notre
système d'enseignement.
Dans cette perspective, la mission préconisera un recours plus large aux
professeurs agrégés du secondaire, une redéfinition du
rôle des enseignants-chercheurs et un développement adapté
du monitorat.
a) Un recours souhaitable aux professeurs agrégés mais sous certaines conditions
Considérant que les professeurs du secondaire, et
notamment les agrégés s'acquittent à la satisfaction
générale de l'encadrement des élèves des
filières les plus sélectives, en particulier les classes
préparatoires aux grandes écoles, ainsi que les sections de
techniciens supérieurs qui relèvent des lycées, la mission
ne peut être que favorable à un plus large recours aux professeurs
agrégés dans les premiers cycles universitaires.
Du fait de leur expérience de l'enseignement secondaire, de leur
connaissance des élèves et de la qualité de leur
formation, ces enseignants ont une vocation naturelle à renforcer
l'encadrement des étudiants de premier cycle, sans bien entendu en avoir
le monopole.
L'affectation des enseignants du secondaire dans l'enseignement
supérieur est en effet de nature à faciliter la transition entre
ces deux ordres d'enseignement et leur apport peut être précieux
pour mieux coordonner les programmes et assurer une certaine transition dans
les méthodes de travail.
Si ce recours aux agrégés doit être
développé, il ne saurait être général et
devrait l'être sous certaines conditions. Son développement est
ainsi souhaitable dans les disciplines technologiques, comme il l'est dans les
IUT et les IUP (le tiers des enseignants), dans la perspective d'un essor des
enseignements professionnalisés.
Il l'est également dans les disciplines non dominantes, comme
l'informatique et les langues étrangères.
Il peut l'être aussi dans certaines disciplines dominantes de premier
cycle à la condition que ces personnels présentent un profil de
recherche adapté à la vocation des études universitaires
qui n'est pas celle des classes préparatoires, notamment en lettres et
sciences humaines où la formation générale donnée
par l'agrégation peut être préférable à la
formation plus spécialisée des docteurs (étant
rappelé que 90 % des maîtres de conférence sont
à la fois agrégés et docteurs dans ces disciplines et que
les meilleurs étudiants de maîtrise s'orientent souvent vers
l'agrégation plutôt que vers le DEA).
Au total, le développement du recours aux professeurs
agrégés ayant une expérience du lycée dans les
premiers cycles peut se révéler bénéfique en
facilitant le difficile passage du lycée à l'université et
en permettant de remettre à niveau certains bacheliers qui n'auraient
pas acquis toutes les bases nécessaires pour suivre des études
supérieures.
La mission d'information considère donc que les nouveaux
étudiants devraient bénéficier des méthodes
pédagogiques qui ont fait leurs preuves dans l'enseignement secondaire
et dans les classes préparatoires et propose en conséquence de
développer le recours aux professeurs agrégés dans les
premiers cycles afin de pourvoir notamment aux besoins d'encadrement des
disciplines non dominantes de chaque filière, aux enseignements
technologiques, et aux besoins spécifiques de certaines disciplines
dominantes comme les lettres et les sciences humaines.
Par ailleurs, la mission serait favorable à la création d'un
service d'agrégé doctorant qui pourrait être accordé
aux professeurs agrégés s'engageant à préparer une
thèse, et qui leur permettrait de bénéficier d'un
allégement de service (192 heures au lieu de 384 heures par an).
Enfin, si le recours aux professeurs agrégés dans l'enseignement
supérieur ne doit pas conduire à dépouiller l'enseignement
secondaire, et notamment les classes préparatoires de ses meilleurs
éléments, il devrait également s'accompagner du
développement de la formule d'un service partagé entre les deux
ordres d'enseignement, et de la constitution d'équipes enseignantes
mixtes lycée-université.
b) La redéfinition du rôle des enseignants-chercheurs
Si les premiers cycles universitaires doivent utiliser
davantage les compétences des professeurs agrégés de
l'enseignement secondaire, le rôle des enseignants-chercheurs doit
également être redéfini. La mission souhaiterait ainsi
soulever la question de l'adaptation du système de recrutement des
enseignants-chercheurs à un enseignement supérieur
désormais ouvert au plus grand nombre.
Comme il a été dit, les enseignants-chercheurs doivent rester les
vrais concepteurs, les animateurs et les principaux acteurs des premiers
cycles, mais il apparaît anormal que leur activité de recherche et
leurs publications à caractère scientifique qui en
découlent soient exclusivement prises en compte dans leurs perspectives
de carrière et que les règles de promotion ne prennent en compte
que de manière subsidiaire leur rôle d'encadrement et de soutien
pédagogique.
La mission d'information proposera donc de redéfinir la
carrière-type des enseignants-chercheurs et d'envisager une modification
des règles d'avancement en faisant évoluer le système des
primes pédagogiques, en assouplissant les quotas par grade et par
discipline ainsi que les règles d'ancienneté afin que leur
carrière ne repose pas uniquement sur la recherche en négligeant
les activités d'enseignement, d'encadrement et de soutien
pédagogique.
Cet objectif suppose un changement des mentalités prévalant
encore chez la plupart des enseignants-chercheurs qui considèrent que
leur seule fonction est d'enseigner leur discipline à des
étudiants aptes à l'acquérir par un travail personnel et
sans doute un nouveau déroulement de leur carrière : alors
que les jeunes enseignants-chercheurs ont sans doute vocation à se
consacrer davantage à une activité de recherche au cours de leurs
premières années, ceux qui sont plus avancés dans leur
carrière pourraient se consacrer à des tâches d'encadrement
et de soutien pédagogique assorties de décharges de service ou
d'heures spécifiques, ces deux types d'activité, auxquelles il
convient d'ajouter les fonctions de responsabilités à la
tête des établissements, et leurs activités en
matière de formation continue, devant être prises en compte
équitablement dans leurs perspectives de promotion.
Par ailleurs, une plus grande disponibilité des enseignants-chercheurs
à l'égard de leurs étudiants de premier cycle, et leur
participation à l'orientation de ceux-ci, passe par l'implantation dans
les locaux universitaires de bureaux qui leur seraient affectés qui leur
permettrait de recevoir les étudiants selon un horaire défini.
c) La nécessité de développer la formule du tutorat
Le tutorat a été mis en place dans la plupart
des premiers cycles, en vertu de l'article 6 de l'arrêté du 26 mai
1992, et repose sur l'intervention d'étudiants avancés dans leurs
études auprès des débutants.
Ses modalités viennent d'être précisées par une
circulaire du 24 octobre 1996.
Si cette formule de soutien apparaît porteuse d'avenir, son
efficacité semble hypothéquée par le fait qu'elle ne
semble pas actuellement bénéficier en priorité aux
étudiants les plus en difficulté.
La mission d'information considère que son développement et son
efficacité supposent que chaque établissement élabore un
protocole permettant d'identifier les étudiants
bénéficiaires, de préciser les modalités et
l'évaluation de ces actions de soutien, d'assurer l'encadrement des
tuteurs, de vérifier l'utilisation des moyens qui y sont
consacrés et de s'assurer que cette formule bénéficie
d'abord aux étudiants qui en ont le plus besoin et qui sont susceptibles
d'en tirer profit.
d) Elargir l'horizon professionnel des étudiants
Outre un choix judicieux de stages en entreprise
convenablement encadrés, la mission considère qu'un recours accru
aux enseignants associés et à des professionnels venant
participer à temps partiel à l'enseignement universitaire serait
de nature à aider les étudiants à découvrir le
monde professionnel. Dans ce domaine, les IUT depuis longtemps et les IUP, plus
récemment, ont montré la voie.
Dans le même sens, il conviendrait d'encourager leur mobilité en
France et à l'étranger : le développement des programmes
communautaires et la présence accrue des étudiants
français dans ces programmes contribueraient à cette ouverture.
C. LA NÉCESSITÉ D'ADAPTER LES FORMATIONS POST-BACCALAURÉAT À LA DIVERSITÉ DES NOUVELLES POPULATIONS ÉTUDIANTES
La massification de l'enseignement supérieur et
l'hétérogénéité des nouvelles populations
étudiantes suscitée par la diversité des
baccalauréats impose d'adapter l'offre des formations supérieures.
Cette adaptation passe notamment par une nouvelle organisation de
l'année universitaire, une plus grande ouverture des filières
sélectives courtes une réforme de la filière technologique
et un développement de l'enseignement supérieur par la voie de
l'alternance.
1. Une nouvelle organisation de l'année universitaire en premier cycle : les propositions de la mission
La mission d'information ne peut qu'être en accord avec
la philosophie des propositions et des expérimentations
évoquées précédemment, qui ont pour objet de
réduire l'échec en premier cycle en réorganisant les deux
années du DEUG.
Outre un allongement et une nouvelle organisation de l'année
universitaire, en semestres ou en quadrimestres selon les possibilités
offertes par les différentes filières permettant de
repérer précocement les étudiants en difficulté,
elle proposera de mettre en place une période d'adaptation au
début des premiers cycles, d'une durée de trois mois ou de six
mois, permettant d'aborder des disciplines et des formations proches et faisant
l'objet d'un véritable renforcement pédagogique, en particulier
de nature méthodologique.
Dans cette perspective, elle préconisera également le
développement de la formule des " DEUG d'orientation " qui
associent plusieurs disciplines en première année, la
spécialisation étant réservée à la
deuxième année.
Elle soulignera ensuite la nécessité de réduire le nombre
des DEUG autour de grandes filières généralistes et de
remédier à l'insuffisance des prérequis nécessaires
pour poursuivre des études supérieures en introduisant des
modules de culture générale et d'expression dans toutes les
formations de premier cycle.
Plusieurs interlocuteurs de la mission ont en effet souligné la
maîtrise insuffisante des acquis fondamentaux chez de nombreux nouveaux
étudiants et notamment une maîtrise de la langue française
qui ne leur permet de poursuivre avec succès un enseignement
supérieur, y compris dans des filières mathématiques ou
scientifiques.
Une action de rattrapage scolaire apparaît donc nécessaire en
premier cycle, même si certains universitaires considèrent que
cette fonction n'entre pas dans leurs attributions : les professeurs
agrégés et les tuteurs pourraient avoir une vocation
particulière à animer ces modules de culture
générale et d'expression.
Enfin, la consolidation des acquis scolaires pourrait être assurée
par les universités en multipliant les travaux pratiques, notamment dans
les filières scientifiques, tandis qu'un recours aux technologies
nouvelles, en lettres ou en sciences humaines, permettrait aux nouveaux
étudiants d'acquérir une maîtrise syntaxique ou
linguistique qui leur fait parfois défaut.
2. Une plus grande ouverture des filières sélectives existantes
Ayant pris position pour les raisons
sus-énoncées contre la secondarisation des premiers cycles et la
création de collèges universitaires, la mission d'information est
conduite à préconiser une plus grande ouverture des
filières sélectives courtes technologiques aux bacheliers
technologiques et professionnels.
Comme il a été dit, ces filières courtes (STS et IUT) ont
été détournées de leur vocation initiale
d'insertion professionnelle et elles ont été investies par les
bacheliers généraux au détriment notamment des bacheliers
technologiques, pour lesquels elles avaient été
créées.
La relative pause démographique constatée au niveau du
baccalauréat et les effets persistants de l'" affaire du
CIP ", qui se traduisent par un moindre afflux vers les IUT, devraient
inciter les directeurs d'IUT à accueillir plus largement les bacheliers
technologiques qui connaissent par ailleurs un taux de réussite
très satisfaisant dans ces filières, même si les bacheliers
généraux restent sensibles aux avantages d'une formule qui permet
à la fois d'obtenir un diplôme apprécié sur le
marché de l'emploi et d'envisager la poursuite d'études
universitaires ultérieures dans un deuxième cycle
général.
Il conviendrait à cet égard de rappeler que le caractère
appliqué de la formation en IUT ne prépare pas
particulièrement les titulaires de DUT à suivre sans
difficulté des études longues de nature plus théorique et
générale.
S'agissant des STS, il serait souhaitable de développer leur fonction
d'accueil pour les étudiants qui souhaitent se réorienter en
cours ou en fin de DEUG.
Il conviendrait ainsi d'ouvrir les STS à ces étudiants et
d'adapter les programmes pour les recevoir en cours de première
année afin de leur permettre de passer ultérieurement sans
redoublement en seconde année.
Certaines universités qui ont engagé une politique de
réorientation précoce en première année de DEUG ont
développé en concertation avec les lycées ce type de
réorientation à la satisfaction générale et cette
faculté offerte aux étudiants devrait être étendue.
Une telle généralisation suppose cependant que les proviseurs
abandonnent une attitude trop répandue qui consiste à inciter
leurs meilleurs bacheliers à s'orienter vers les STS relevant de leur
établissement, afin notamment d'en maintenir ou d'en élever le
niveau et qu'une coordination plus satisfaisante soit mise en place entre les
responsables des premiers cycles universitaires, des IUT et des STS aussi bien
dans le domaine de l'affectation initiale des bacheliers que dans celui des
réorientations rendus nécessaires par la situation d'échec
que connaissent rapidement de trop nombreux étudiants.
3. La nécessaire réforme de la filière technologique supérieure
a) Un dispositif rendu complexe par les réformes successives
La réforme de la filière technologique
apparaît comme le serpent de mer de l'enseignement supérieur et le
dispositif actuel résulte d'aménagements successifs qui n'ont pas
contribué à éclairer ceux auxquels il est destiné.
Le système actuel se ventile entre des filières courtes (STS et
IUT) et des filières longues conduisant à des diplômes de
niveau bac + 4 (IUP, maîtrises professionnalisées, formations
d'ingénieurs et formations menant au DESS).
Les innovations introduites depuis 1994 se sont traduites par l'ouverture de
nouveaux départements d'IUT et de filières nouvelles d'IUP, par
la création de la commission consultative des IUT et des IUP et par la
mise en place du diplôme de recherche technologique (DRT) de niveau
bac + 6.
Pour améliorer la cohérence entre les cursus de l'enseignement
secondaire et ceux de l'enseignement supérieur, les bacheliers
technologiques devaient bénéficier d'un accueil prioritaire en
STS, et d'une attention particulière pour leur accès en IUT, mais
sans quota ni priorité par rapport aux bacheliers généraux.
Les étudiants de DEUG, ou en situation d'échec en premier cycle
devaient bénéficier d'années spéciales leur
permettant d'intégrer un IUT ou d'autres formations
professionnalisantes, tandis qu'un DNTS (diplôme national de technologie
spécialisée) sanctionnant une année d'études
complémentaires par alternance était expérimenté.
Enfin, les voies d'accès au titre d'ingénieur devaient être
élargies et ce titre peut désormais être
délivré aux diplômés d'IUT après une
expérience professionnelle de deux ans au moins, sur avis de la
commission des titres d'ingénieur.
Afin de simplifier et de rendre plus lisible ce système une
réflexion globale a été engagée qui avait pour
objet d'établir une continuité dans le cursus, de la classe de
seconde jusqu'au niveau bac + 5, d'identifier les différentes
filières technologiques en fonction de leur vocation et d'articuler les
filières courtes (IUT et STS) et les filières longues par
l'organisation de passerelles et la création de parcours de formation
continue.
b) Les propositions de la mission d'information
La mission d'information considère d'abord que le
calendrier de la réforme de la filière technologique
annoncée par le gouvernement est trop imprécis (six à dix
ans) et surtout que les échéances de sa mise en oeuvre effective
sont trop tardives.
Quel serait en effet l'intérêt de mettre en place un
système sophistiqué d'information et d'orientation des
élèves et des étudiants, notamment pour ceux qui sont en
difficulté, si personne n'est en mesure de leur fournir des indications
claires sur l'organisation et la finalité de filières qui restent
à créer, sur leur contenu incertain et sur des perspectives de
débouchés qui restent vagues ?
Elle renouvelle par ailleurs son opposition à la création de
collèges universitaires généraux ou
professionnalisés qui enfermeraient certains bacheliers dans un ghetto
en les condamnant à des formations courtes adaptées aux besoins
locaux des entreprises et n'ayant pas nécessairement le caractère
de diplôme national.
Elle préconise à plus court terme une articulation claire entre
les IUT et les IUP, le maintien et une plus grande ouverture des
filières sélectives courtes existante, le développement du
DNTS qui ne fait l'objet aujourd'hui que d'une expérimentation, et le
développement de l'alternance dans les IUP pour faciliter l'insertion
professionnelle de leurs diplômés.
Elle proposera ainsi une plus grande ouverture des IUT, des STS et des CPGE aux
bacheliers technologiques, selon des quotas qui pourraient être
fixés au niveau académique.
Par ailleurs, si elle n'est pas opposée, bien au contraire, à la
création d'une future filière technologique au sein des
universités, elle se demande également s'il ne conviendrait
d'instiller parallèlement un enseignement de la technologie dans
l'ensemble des filières générales sous forme de modules,
instillation qui pourrait permettre de rendre plus aisés les
réorientations et le passage entre les filières
générales et technologiques, via des passerelles adaptées.
Elle proposera enfin au Gouvernement de mettre à l'étude le
problème de l'accès des diplômés de la
filière technologique aux grandes écoles, ainsi que le principe
de la création de grandes écoles spécifiques dans cette
filière, cette étude devant faire l'objet d'un rapport
préalable à la définition de la réforme de la
filière technologique supérieure. Cette initiative lui
paraît de nature à conférer une noblesse propre à
cette filière et à diversifier l'actuel monopole de nos
élites : toute revalorisation de la filière technologique et
professionnelle supérieure risque d'être vouée à
l'échec si le passage par l'enseignement général reste,
à un moment donné, la voie obligée pour parvenir aux
diplômes les plus élevés et si un cursus spécifique
et continu conduisant jusqu'aux grandes écoles n'est pas organisé.
4. La nécessité d'une professionnalisation des formations supérieures
Depuis vingt ans, les conditions de l'insertion
professionnelle des diplômés de l'enseignement supérieur
ont été profondément modifiées. Alors que la
majorité des diplômés se dirigeaient vers le secteur public
ou les professions réglementées, la moitié des titulaires
de maîtrise et de licence et 70 % des diplômés de
troisième cycle se tournent désormais vers le secteur
privé : la professionnalisation de l'enseignement supérieur
constitue donc aujourd'hui un enjeu majeur et à cet égard, les
IUP peuvent être considérés comme des
références.
La mission d'information considère d'abord que la professionnalisation
doit s'appliquer aussi largement que possible à l'ensemble des cursus
universitaires, y compris aux filières générales et que
cette exigence est de nature à réduire l'écart existant
entre les diplômes et les besoins des entreprises, et plus largement du
monde économique. C'est notamment le cas pour les filières
juridiques ou littéraires pour lesquels l'instauration de stages en
entreprises et la formation en alternance, en particulier par la voie de
l'apprentissage, surtout en troisième cycle, est susceptible de
faciliter considérablement l'insertion professionnelle de leurs
diplômés.
A cet égard, il convient de rappeler, que contrairement aux idées
reçues, le quart des diplômés en lettres obtiennent un
emploi dans le secteur privé et que les diplômés
littéraires de niveau bac + 4 sont embauchés plus vite que les
diplômés des filières scientifiques, même si ce n'est
pas toujours à un niveau correspondant à leur formation.
La mission estime également qu'une professionnalisation d'une partie de
la formation dispensée par les universités et le
développement de l'alternance dans les formations supérieures
devraient bénéficier aux jeunes qui sont sortis
précocement et volontairement du système éducatif,
notamment au niveau du BEP ou après avoir obtenu un baccalauréat
professionnel, en autorisant les intéressés à reprendre
des études ultérieures débouchant sur un diplôme et
en prenant en compte pleinement leur expérience professionnelle
préalablement acquise.
Cette idée d'une formation récurrente permettant à un
jeune de revenir à l'université suppose une concertation entre le
système éducatif et les représentants des employeurs, mais
les textes existants permettent d'ores et déjà de procéder
à des expérimentations en autorisant une modulation des
formations selon les diplômes obtenus et un découpage de celles-ci
en unités capitalisables.
Par ailleurs, si le développement de l'apprentissage dans les formations
supérieures est éminemment souhaitable pour adapter ces
formations aux qualifications demandées par les entreprises, ce
développement suppose que les étudiants en apprentissage puissent
bénéficier d'un statut particulier permettant de prendre en
compte la spécificité de leur situation, notamment au regard de
leur rémunération et de leur protection sociale.
A cet égard, il convient de regretter que l'apprentissage qui est
régi dans notre pays par une législation particulièrement
avancée ne concerne que trop peu d'étudiants, alors que cette
formule de formation en alternance pourrait bénéficier, selon les
estimations les plus autorisées, à 200.000 étudiants
dans l'ensemble des formations supérieures, comme en témoigne sa
mise en oeuvre récente dans certaines grandes écoles commerciales
et dans certaines universités.
Enfin, la mission d'information ne peut pas ignorer le discours
11(
*
)
selon lequel le lien encore existant entre le
diplôme et l'emploi risque bientôt de se trouver rompu du fait
notamment, qu'à la fin du siècle, 200.000 diplômés
à bac + 4 devraient se présenter sur le marché
du travail alors que l'économie française ne pourrait leur
proposer que 80.000 postes d'encadrement.
Elle estime à cet égard qu'une professionnalisation des
formations supérieures, et notamment des troisièmes cycles,
devrait permettre de limiter le risque de déclassement
12(
*
)
annoncé, et rappelle que si 50 % des
jeunes d'une classe d'âge accèdent désormais à
l'enseignement supérieur, cette proportion équivaut à
celle des ingénieurs, cadres et professions intermédiaires alors
que la proportion des cadres " montés par le rang " est en
constante diminution depuis dix ans.
Il convient donc de relativiser le risque de déclassement des
diplômés de l'enseignement supérieur pour les années
à venir, d'autant que de nouveaux besoins sociaux ne sont pas encore
satisfaits et qu'ils devront l'être par la création de nouvelles
formations supérieures adaptées.
En tout état de cause, la réduction des besoins d'encadrement des
entreprises, au profit des techniciens supérieurs impose de
développer ce type de formations en liaison notamment avec les
collectivités locales et les partenaires sociaux dans un cadre de
dimension régionale.
Au total, la mission considère que la revalorisation de l'enseignement
professionnel, la professionnalisation des formations supérieures et la
mise en oeuvre d'une politique ambitieuse d'insertion professionnelle
conditionnent la réussite d'un système continu d'orientation
à partir de l'enseignement secondaire.
D. LE DÉVELOPPEMENT DES INITIATIVES DES UNIVERSITÉS
La mission estime enfin que les universités devraient
développer certaines initiatives pour répondre plus
étroitement à la demande de formation de leurs étudiants
et à leurs souhaits d'orientation.
Cet objectif passe par un renforcement de leur autonomie, une évaluation
de leurs performances et par la définition de formations nouvelles
répondant à certaines demandes sociales actuellement peu ou mal
satisfaites.
1. Le développement de l'autonomie des universités
Si le développement de l'autonomie des
universités n'entre pas directement dans le champ d'étude de la
mission, celle-ci est néanmoins fondée à examiner les
propositions formulées en ce domaine par le gouvernement et par la
commission Fauroux, notamment celles qui auraient pour conséquence de
mieux adapter les formations supérieures à la diversité
des nouvelles populations étudiantes et par-là même de
faciliter leur choix d'orientation.
A cet égard, elle ne peut qu'être séduite par la
perspective d'une libre organisation par les universités de leurs
structures d'enseignement, de leur liberté de traiter avec les
collectivités locales, de contrôler l'efficacité
pédagogique des enseignants-chercheurs, alors qu'un contrôle de
leur activité de recherche risquerait, selon elle, de stériliser
le potentiel de recherche des plus imaginatifs.
Elle serait par ailleurs favorable à la mise en place d'un
système qui permettrait d'abord d'habiliter a priori les nouvelles
filières et de faire évaluer les enseignements par les
étudiants, comme il est de règle aux Etats-Unis et dans certaines
de nos grandes écoles.
Elle préconise à cet égard, la création de bases de
données fondées sur l'évaluation par les étudiants
des enseignements qui leur sont dispensés.
Elle proposera en outre d'élargir l'offre de diplômes
décentralisés sous réserve que leur évaluation
permette de maintenir le caractère national des diplômes et de
faire participer les universités à la constitution des
équipes de personnels non enseignants.
Elle préconisera également de mettre en place des
procédures permettant d'assurer un suivi universitaire des
étudiants, le renforcement des structures existantes pour faciliter les
relations entretenues entre les universités, les collectivités
locales et les entreprises ainsi qu'un développement de contrats
pluriannuels avec les collectivités locales qui ont déjà
beaucoup investi dans les constructions universitaires.
Au total, elle considère que les universités doivent utiliser
à plein les possibilités que leur offre leur autonomie,
développer des formations professionnalisantes originales
répondant aux besoins de leur environnement entendu d'une manière
large et pratiquer une transparence qui permettra aux étudiants de
s'assurer de l'efficacité de ces formations.
S'agissant des collectivités locales, l'établissement de
relations entre les universités et les régions apparaît
inéluctable dans l'avenir même si ce thème reste tabou.
En effet, en raison de l'importance de l'échec universitaire, du
rôle des premiers cycles dans l'aménagement du territoire, de
leurs compétences exercées dans le fonctionnement des
lycées et l'élaboration du schéma régional des
formations, les régions ont naturellement vocation à participer,
tant à la mise en place de formations courtes de proximité
débouchant sur des diplômes immédiatement utilisables
qu'à celle de formations longues de type DESS adaptées aux
réalités économiques régionales.
Le développement d'un partenariat régional ne devrait toutefois
pas conduire à remettre en cause la " trinité
républicaine " dans le domaine de l'habilitation des formations, du
statut des enseignants et du caractère national des diplômes.
2. Une véritable évaluation des établissements d'enseignement supérieur
a) Les insuffisances de l'actuel système d'évaluation
Si les établissements d'enseignement supérieur
sont soumis à de multiples formes d'évaluation (évaluation
scientifique des laboratoires et des équipes de recherche,
évaluation des projets de diplômes en vue de leur habilitation,
évaluation institutionnelle sur l'activité des
établissements par le comité national d'évaluation), le
CNE
13(
*
)
a pu constater que l'évaluation
interne des établissements par eux-mêmes était
insuffisamment développée et que l'appréciation des
étudiants sur la pédagogie et les contenus de leurs enseignements
restaient exceptionnels, à la différence des pays anglo-saxons.
Dans le souci d'aider les établissements à développer leur
évaluation interne, le CNE leur fournit désormais un cadre
méthodologique et des instruments de mesure avant de procéder
lui-même à une nouvelle évaluation, les invite à
disposer d'une information précise et estime nécessaire de
multiplier les évaluations par discipline.
Il reste que les universités n'ont pas toujours une perception claire de
leur fonctionnement, ne disposent souvent pas d'un appareil statistique
satisfaisant et même que certaines ne connaissent pas le nombre
réel de leurs étudiants.
Comme le CNE n'a pas pour mission d'établir une base de données
sur les cursus universitaires et le suivi professionnel de l'ensemble des
étudiants, celui-ci a recommandé aux établissements
d'assurer le suivi professionnel de leurs diplômés, à
l'instar des grandes écoles qui disposent d'associations actives
d'anciens élèves.
b) Les observations et les propositions de la mission
La mission ne peut que constater que toute rénovation
de l'actuel système d'information et d'orientation des lycéens et
des étudiants restera vaine si les universités ne sont pas en
mesure de leur fournir des indications précises.
En effet, elle a pu observer que les établissements d'enseignement
supérieur tendaient à privilégier l'offre de leurs
formations au détriment de la demande des étudiants et ne sont
pas en état actuellement de préciser le contenu, la
finalité, les perspectives d'emploi de chacune de leurs filières
ainsi que le devenir professionnel de leurs diplômés du fait
notamment d'une organisation des études qui reste largement
définie par des enseignants-chercheurs trop enfermés dans leur
seule discipline : pour sa part, le CNE se borne à évaluer
la qualité professorale des études et ses conclusions, à
la différence du système anglais d'évaluation, n'emportent
aucune conséquence, notamment financière pour les
établissements évalués.
Afin de remédier à ces lacunes, la mission préconisera
d'abord, comme il a déjà été dit, de
développer un système d'évaluation par les
étudiants eux-mêmes qui leur permettrait d'apprécier la
pédagogie et le contenu des enseignements qui leur sont
dispensés. Elle souhaite également que chaque université
soit en mesure d'établir et de rendre public dans un proche avenir
l'état des flux de ses étudiants et de leur devenir en fonction
de l'évaluation du marché de l'emploi et de leurs projets
universitaires et professionnels.
Elle proposera enfin de mettre en place des observatoires universitaires
permettant de suivre le devenir des étudiants inscrits et les
possibilités d'insertion professionnelle.
3. La contribution des universités au renouvellement de l'offre de formations supérieures
a) Le constat
L'organisation des études supérieures reste
commandée par l'offre des filières existantes et par l'attitude
des enseignants qui tendent naturellement à privilégier leur
propre discipline au détriment de formations nouvelles, et à
s'opposer à la pluridisciplinarité des formations de premier
cycle, comme l'a montré l'échec sur ce point de la
rénovation des DEUG engagée à partir de 1984.
A sa manière, et même si le problème de l'insertion
professionnelle des étudiants ne relève pas exclusivement de
l'université, l'enseignement supérieur contribue aussi dans une
certaine mesure au chômage des jeunes en refusant de se préoccuper
de l'évolution des perspectives générales du marché
de l'emploi, alors qu'il serait sans doute de sa responsabilité
d'inventer des formations qui optimiseraient les chances des étudiants
de trouver un métier.
Il serait ainsi souhaitable de développer une approche nouvelle des
enseignements qui privilégierait la demande plutôt que l'offre de
formation en développant notamment une organisation multidisciplinaire
des formations.
Lors de son audition devant la mission, le professeur Alain Touraine a
estimé que, dans cette perspective, les deuxièmes cycles
pourraient plutôt être axés sur l'apprentissage des
disciplines universitaires, tandis que les premiers cycles pourraient
être redéfinis autour d'une autre organisation du " champ du
savoir " orientée prioritairement vers la satisfaction de nouveaux
besoins collectifs.
b) Les observations et les propositions de la mission
Sans souscrire totalement à ces thèses qui
contribueraient à bouleverser profondément l'organisation des
cycles universitaires, la mission d'information considère cependant que
les universités ont vocation à rechercher un renouvellement de
l'offre de leurs formations.
Elle préconisera ainsi un élargissement de l'offre de formations
en développant des enseignements thématiques, répondant
notamment aux besoins collectifs nouveaux en matière d'environnement, de
santé publique et de politique urbaine, et qui pourraient faire l'objet
de DEUG multidisciplinaires.
Elle souhaiterait enfin que chaque université définisse une
politique de l'emploi permettant de préciser les finalités des
formations, d'assurer le suivi des flux d'étudiants et de l'insertion
professionnelle des diplômés et d'évaluer l'adaptation des
formations offertes à l'environnement économique et social.
*
* *
Considérant que la démocratisation de
l'enseignement supérieur doit être considérée comme
une chance pour notre pays, la mission d'information est persuadée que
notre système universitaire dont les racines plongent dans un
passé lointain, et qui a su faire face avec un certain bonheur à
l'explosion de ses effectifs, saura dans les années à venir
répondre au défi de la qualité de l'accueil de ses
étudiants et adapter ses formations à leur nouvelle
diversité.
Dans cette perspective, si le principe du libre accès à
l'université doit être conservé, il doit s'accompagner
d'une nécessaire diversification des enseignements proposés,
d'une redéfinition de la fonction enseignante supérieure, d'un
souci de l'insertion professionnelle des diplômés et de la mise en
place d'un système d'orientation continu, du collège jusqu'aux
premiers cycles universitaires.
*
* *
Après avoir examiné les orientations et le
contenu de son rapport au cours de ses réunions du 22 octobre et du
5 novembre 1996, la mission d'information a procédé à
son adoption le 12 novembre 1996.
A l'issue de cette dernière réunion, la commission des affaires
culturelles a adopté les conclusions de la mission et
décidé de les publier sous la forme d'un rapport d'information.
RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION
·
Mieux articuler l'enseignement secondaire et
l'enseignement supérieur
1. Généralisation dès la rentrée 1997 des
séquences périodiques relatives à l'éducation des
choix et à l'orientation, de la classe de 5e jusqu'à la classe de
terminale : mise en place d'au moins une heure par mois consacrée
à l'orientation, aux formations et aux métiers, assurée
par les personnels chargés de l'orientation, par des professionnels et
par des étudiants avancés dans leurs études ;
évaluation rapide de ce dispositif et participation des familles
à ces actions de formation à l'orientation selon des
modalités arrêtées au niveau de chaque
établissement ;
2. Renforcer la fonction d'orientation des professeurs principaux :
- en instituant pour les professeurs principaux de terminale deux
journées d'information dans les diverses filières d'enseignement
supérieur et en incluant une formation spécifique dans le cadre
des plans académiques de formation continue des personnels
enseignants ; participation d'équipes de recherche à ces
journées d'information ;
- en leur distribuant un dossier pratique sur les carrières et les
débouchés par filière du baccalauréat ;
- en prévoyant une décharge spécifique de service et une
augmentation de leur indemnité de suivi et d'orientation ;
3. Améliorer l'efficacité de l'action des conseillers
d'orientation psychologues :
- en les invitant à participer aux journées d'information
prévues pour les professeurs principaux de terminale et en leur
distribuant le même dossier pratique sur les carrières et les
débouchés par filière du baccalauréat ;
- en augmentant progressivement leurs effectifs, afin d'affecter à terme
un conseiller d'orientation-psychologue à temps plein dans chaque
lycée et collège de dimension importante, ainsi que dans chaque
université et dans les antennes universitaires les plus
importantes ;
- en renforçant leur fonction d'expertise, notamment par des
journées d'information sur les métiers organisées par les
chambres consulaires et les groupements professionnels, utilisant notamment les
nouvelles techniques de communication ; participation d'équipes de
recherche, de représentants notamment de l'ANPE, de l'APEC, des
délégations départementales à l'emploi à ces
journées afin d'informer les conseillers d'orientation des tendances du
marché de l'emploi ;
4. Recours subsidiaire à des orienteurs bénévoles
extérieurs au système éducatif ; organisation d'une
campagne nationale dans les médias pour mobiliser notamment des cadres
de la vie économique en activité ou en retraite, ainsi que des
étudiants de fin de deuxième et de troisième cycles ;
5. Généralisation progressive à tous les lycéens de
terminale, d'au moins deux journées d'information obligatoires, prises
sur le temps scolaire, sur les filières post-baccalauréat, avec
visite des établissements concernés ;
6. Formalisation de la semaine d'accueil et d'information à
l'université qui deviendrait par ailleurs obligatoire pour tous les
nouveaux étudiants ;
7. Prise en compte de l'évolution des voeux d'orientation des
lycéens de terminale et des bacheliers et développement
d'entretiens personnalisés sur leur orientation ;
8. Renforcement de la présence des professeurs agrégés de
l'enseignement secondaire dans les formations technologiques, dans les
disciplines non dominantes des DEUG et dans les disciplines dominantes de
certains DEUG (lettres et sciences humaines) ;
9. Création d'un service d'agrégé doctorant pour les
professeurs agrégés qui s'engagent à préparer une
thèse et allégement de moitié de leur service ;
10. Mise en place d'un service partagé pour les professeurs
agrégés entre le lycée et les premiers cycles
universitaires ;
11. Redéfinition de la carrière et des règles d'avancement
des enseignants-chercheurs en prenant en compte équitablement leur
activité de recherche, d'enseignement, d'encadrement administratif et de
formation continue ;
12. Formation pédagogique des enseignants-chercheurs et création
d'une prime pédagogique plus incitative pour ceux qui se consacrent
principalement à l'enseignement en premier cycle ;
13. Mise à la disposition des enseignants-chercheurs dans les locaux
universitaires de bureaux leur permettant de recevoir les étudiants
selon des horaires définis ;
14. Mise en place d'un protocole dans chaque établissement pour
formaliser et développer la formule du tutorat ;
15. Développement des moyens et généralisation des SCUIO
dans chaque université, institution d'un correspondant enseignant du
SCUIO dans chaque UFR ;
·
Adapter les formations post-baccalauréat à la
diversité des nouvelles populations étudiantes
16. Recours accru à des enseignants-associés et à des
professionnels participant à temps partiel à l'enseignement
universitaire ;
17. Nouvelle organisation de l'année universitaire en semestres ou en
quadrimestres, selon les possibilités offertes par les
différentes filières, permettant de repérer rapidement les
étudiants en situation d'échec et de faciliter les
réorientations précoces ;
18. Mise en place d'une période d'adaptation de trois à six mois
en première année de DEUG axée sur la méthodologie
propre aux enseignements supérieurs ; développement de la
formule des " DEUG d'orientation " associant plusieurs
disciplines en
première année et réservant la spécialisation en
deuxième année ; développement de DEUG
multidisciplinaires regroupant des enseignements répondant aux besoins
collectifs nouveaux, notamment en matière d'environnement, de politique
urbaine et de santé publique ;
19. Réduction du nombre des DEUG autour de quelques grandes
filières généralistes ;
20. Introduction de modules de culture générale et d'expression
dans toutes les formations de premier cycle ;
21. Ouverture plus large des STS aux étudiants qui souhaitent se
réorienter en cours ou en fin de DEUG ; mise en place d'une
procédure d'accueil accélérée en cours de
première année de STS, et adaptation du programme pour les
étudiants de DEUG qui souhaitent se réorienter ;
22. Mise en oeuvre accélérée de la réforme de la
filière technologique supérieure ; mise en place d'une
articulation claire entre les IUT et les IUP ; ouverture plus large des
IUT, des STS et des CPGE aux bacheliers technologiques, selon des quotas qui
seront fixés au niveau académique ; développement de
la formule du DNTS ; mise à l'étude du problème de
l'accès des diplômés de la filière technologique aux
grandes écoles et du principe de la création de grandes
école spécifiques dans cette filière, cette étude
devant faire l'objet d'un rapport qui serait déposé avant
l'engagement de la réforme de la filière technologique
supérieure ;
23. Création de modules de technologie dans l'ensemble des
filières générales ;
24. Introduction d'une professionnalisation par la voie de l'alternance aussi
bien dans les filières générales, en particulier dans les
formations juridiques et littéraires, que dans les filières
technologiques (développement de l'apprentissage dans les IUP) ;
25. Mise en place de dispositifs permettant la reprise d'études
supérieures, en particulier pour les titulaires de BEP et pour les
bacheliers professionnels, par validation de leur expérience
professionnelle ;
26. Définition d'un statut pour les étudiants suivant une
formation en alternance en apprentissage, permettant de prendre en compte la
spécificité de leur situation, notamment au regard de leur
rémunération et de leur protection sociale ;
·
Favoriser le développement des initiatives universitaires
27. Elargissement de la libre organisation par les universités de leurs
structures d'enseignement, notamment en développant des formations
professionnalisantes, et mise en place d'un système d'évaluation
des nouvelles filières créées permettant de maintenir le
caractère national des diplômes ;
28. Mise à l'étude d'un système d'évaluation des
enseignements par les étudiants ; création éventuelle
d'une base de données fondée sur l'évaluation par les
étudiants des enseignements qui leur sont dispensés ;
29. Participation des universités à la constitution des
équipes de personnels non enseignants ;
30. Renforcement des structures permettant de faciliter les relations entre les
universités, les collectivités locales et les entreprises ;
développement de contrats pluriannuels avec les collectivités
locales ;
31. Mise en place d'observatoires universitaires régionaux permettant de
suivre le cursus universitaire des étudiants et leur insertion
professionnelle.
32. Définition d'une politique de l'emploi dans chaque
université, permettant de préciser les finalités des
formations, d'assurer le suivi des flux d'étudiants et de l'insertion
professionnelle des diplômés et d'évaluer l'adaptation des
formations offertes à l'environnement économique et social.
RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION
·
Mieux articuler l'enseignement secondaire et
l'enseignement supérieur
1. Généralisation dès la rentrée 1997 des
séquences périodiques relatives à l'éducation des
choix et à l'orientation, de la classe de 5e jusqu'à la classe de
terminale : mise en place d'au moins une heure par mois consacrée
à l'orientation, aux formations et aux métiers, assurée
par les personnels chargés de l'orientation, par des professionnels et
par des étudiants avancés dans leurs études ;
évaluation rapide de ce dispositif et participation des familles
à ces actions de formation à l'orientation selon des
modalités arrêtées au niveau de chaque
établissement ;
2. Renforcer la fonction d'orientation des professeurs principaux :
- en instituant pour les professeurs principaux de terminale deux
journées d'information dans les diverses filières d'enseignement
supérieur et en incluant une formation spécifique dans le cadre
des plans académiques de formation continue des personnels
enseignants ; participation d'équipes de recherche à ces
journées d'information ;
- en leur distribuant un dossier pratique sur les carrières et les
débouchés par filière du baccalauréat ;
- en prévoyant une décharge spécifique de service et une
augmentation de leur indemnité de suivi et d'orientation ;
3. Améliorer l'efficacité de l'action des conseillers
d'orientation psychologues :
- en les invitant à participer aux journées d'information
prévues pour les professeurs principaux de terminale et en leur
distribuant le même dossier pratique sur les carrières et les
débouchés par filière du baccalauréat ;
- en augmentant progressivement leurs effectifs, afin d'affecter à terme
un conseiller d'orientation-psychologue à temps plein dans chaque
lycée et collège de dimension importante, ainsi que dans chaque
université et dans les antennes universitaires les plus
importantes ;
- en renforçant leur fonction d'expertise, notamment par des
journées d'information sur les métiers organisées par les
chambres consulaires et les groupements professionnels, utilisant notamment les
nouvelles techniques de communication ; participation d'équipes de
recherche, de représentants notamment de l'ANPE, de l'APEC, des
délégations départementales à l'emploi à ces
journées afin d'informer les conseillers d'orientation des tendances du
marché de l'emploi ;
4. Recours subsidiaire à des orienteurs bénévoles
extérieurs au système éducatif ; organisation d'une
campagne nationale dans les médias pour mobiliser notamment des cadres
de la vie économique en activité ou en retraite, ainsi que des
étudiants de fin de deuxième et de troisième cycles ;
5. Généralisation progressive à tous les lycéens de
terminale, d'au moins deux journées d'information obligatoires, prises
sur le temps scolaire, sur les filières post-baccalauréat, avec
visite des établissements concernés ;
6. Formalisation de la semaine d'accueil et d'information à
l'université qui deviendrait par ailleurs obligatoire pour tous les
nouveaux étudiants ;
7. Prise en compte de l'évolution des voeux d'orientation des
lycéens de terminale et des bacheliers et développement
d'entretiens personnalisés sur leur orientation ;
8. Renforcement de la présence des professeurs agrégés de
l'enseignement secondaire dans les formations technologiques, dans les
disciplines non dominantes des DEUG et dans les disciplines dominantes de
certains DEUG (lettres et sciences humaines) ;
9. Création d'un service d'agrégé doctorant pour les
professeurs agrégés qui s'engagent à préparer une
thèse et allégement de moitié de leur service ;
10. Mise en place d'un service partagé pour les professeurs
agrégés entre le lycée et les premiers cycles
universitaires ;
11. Redéfinition de la carrière et des règles d'avancement
des enseignants-chercheurs en prenant en compte équitablement leur
activité de recherche, d'enseignement, d'encadrement administratif et de
formation continue ;
12. Formation pédagogique des enseignants-chercheurs et création
d'une prime pédagogique plus incitative pour ceux qui se consacrent
principalement à l'enseignement en premier cycle ;
13. Mise à la disposition des enseignants-chercheurs dans les locaux
universitaires de bureaux leur permettant de recevoir les étudiants
selon des horaires définis ;
14. Mise en place d'un protocole dans chaque établissement pour
formaliser et développer la formule du tutorat ;
15. Développement des moyens et généralisation des SCUIO
dans chaque université, institution d'un correspondant enseignant du
SCUIO dans chaque UFR ;
·
Adapter les formations post-baccalauréat à la
diversité des nouvelles populations étudiantes
16. Recours accru à des enseignants-associés et à des
professionnels participant à temps partiel à l'enseignement
universitaire ;
17. Nouvelle organisation de l'année universitaire en semestres ou en
quadrimestres, selon les possibilités offertes par les
différentes filières, permettant de repérer rapidement les
étudiants en situation d'échec et de faciliter les
réorientations précoces ;
18. Mise en place d'une période d'adaptation de trois à six mois
en première année de DEUG axée sur la méthodologie
propre aux enseignements supérieurs ; développement de la
formule des " DEUG d'orientation " associant plusieurs
disciplines en
première année et réservant la spécialisation en
deuxième année ; développement de DEUG
multidisciplinaires regroupant des enseignements répondant aux besoins
collectifs nouveaux, notamment en matière d'environnement, de politique
urbaine et de santé publique ;
19. Réduction du nombre des DEUG autour de quelques grandes
filières généralistes ;
20. Introduction de modules de culture générale et d'expression
dans toutes les formations de premier cycle ;
21. Ouverture plus large des STS aux étudiants qui souhaitent se
réorienter en cours ou en fin de DEUG ; mise en place d'une
procédure d'accueil accélérée en cours de
première année de STS, et adaptation du programme pour les
étudiants de DEUG qui souhaitent se réorienter ;
22. Mise en oeuvre accélérée de la réforme de la
filière technologique supérieure ; mise en place d'une
articulation claire entre les IUT et les IUP ; ouverture plus large des
IUT, des STS et des CPGE aux bacheliers technologiques, selon des quotas qui
seront fixés au niveau académique ; développement de
la formule du DNTS ; mise à l'étude du problème de
l'accès des diplômés de la filière technologique aux
grandes écoles et du principe de la création de grandes
école spécifiques dans cette filière, cette étude
devant faire l'objet d'un rapport qui serait déposé avant
l'engagement de la réforme de la filière technologique
supérieure ;
23. Création de modules de technologie dans l'ensemble des
filières générales ;
24. Introduction d'une professionnalisation par la voie de l'alternance aussi
bien dans les filières générales, en particulier dans les
formations juridiques et littéraires, que dans les filières
technologiques (développement de l'apprentissage dans les IUP) ;
25. Mise en place de dispositifs permettant la reprise d'études
supérieures, en particulier pour les titulaires de BEP et pour les
bacheliers professionnels, par validation de leur expérience
professionnelle ;
26. Définition d'un statut pour les étudiants suivant une
formation en alternance en apprentissage, permettant de prendre en compte la
spécificité de leur situation, notamment au regard de leur
rémunération et de leur protection sociale ;
·
Favoriser le développement des initiatives universitaires
27. Elargissement de la libre organisation par les universités de leurs
structures d'enseignement, notamment en développant des formations
professionnalisantes, et mise en place d'un système d'évaluation
des nouvelles filières créées permettant de maintenir le
caractère national des diplômes ;
28. Mise à l'étude d'un système d'évaluation des
enseignements par les étudiants ; création éventuelle
d'une base de données fondée sur l'évaluation par les
étudiants des enseignements qui leur sont dispensés ;
29. Participation des universités à la constitution des
équipes de personnels non enseignants ;
30. Renforcement des structures permettant de faciliter les relations entre les
universités, les collectivités locales et les entreprises ;
développement de contrats pluriannuels avec les collectivités
locales ;
31. Mise en place d'observatoires universitaires régionaux permettant de
suivre le cursus universitaire des étudiants et leur insertion
professionnelle.
32. Définition d'une politique de l'emploi dans chaque
université, permettant de préciser les finalités des
formations, d'assurer le suivi des flux d'étudiants et de l'insertion
professionnelle des diplômés et d'évaluer l'adaptation des
formations offertes à l'environnement économique et social.
OBSERVATIONS PRÉSENTÉES PAR M. IVAN
RENAR,
VICE-PRÉSIDENT DE LA MISSION
membre du groupe communiste républicain et citoyen
La mission d'information sur l'information et l'orientation
des étudiants des premiers cycles universitaires a effectué un
important travail, riche, diversifié. Les nombreuses auditions, les
déplacements sur le terrain ont permis de mieux cerner la
problématique et d'affiner des propositions parfois très
pertinentes. Je ne peux également que me féliciter du respect
constant des apports, des idées de chacun de ses membres.
Au-delà de ce travail, le rapport et les conclusions souffrent à
mon sens d'une faiblesse de fond qui a guidé mon abstention à
leur sujet. Cette prise de position peut tenir en deux arguments majeurs :
- l'absence de références précises aux moyens
nécessaires à la réussite en premier cycle,
- la tentation de rendre l'université responsable de tous les maux de la
société.
·
Quels moyens pour l'université du XXIe siècle ?
Le rapport formule plusieurs propositions intéressantes : meilleure
orientation, meilleure connaissance du milieu universitaire dès le
lycée, multiplication des passerelles entre les différentes
filières, etc... Il y a là quelques pistes qui permettraient
d'améliorer l'orientation des étudiants et de réduire
ainsi le taux d'échec.
Ces propositions permettront-elles d'atteindre l'objectif d'une
réduction de l'échec sans que soit menée une
réflexion parallèle sur les moyens nécessaires en termes
humains, financiers, matériels pour permettre à
l'université d'accomplir ses missions ?
Rien n'indique que l'échec des étudiants trouve son origine dans
le processus de démocratisation de notre enseignement supérieur,
à l'inverse même, la démocratisation est aujourd'hui une
réalité et une nécessité, économique,
culturelle, pour notre pays. Cette démocratisation se doit donc de
permettre au plus grand nombre de réussir.
C'est à l'aune de cette exigence que doivent se mesurer les efforts
à entreprendre.
Soyons clairs. Pour nombre d'étudiants aujourd'hui la réussite
à l'université, et tout particulièrement au sein des
premiers cycles, relève d'un véritable " parcours du
combattant " : difficulté d'inscription dans les
filières de son choix, manque d'enseignants, de personnels
administratifs et techniques, exiguïté des locaux pour
étudier, difficultés matérielles pour se loger, se
nourrir, parfois se soigner... Ce sont là autant d'obstacles à
surmonter alors que l'entrée dans " ce monde inconnu "
nécessiterait un encadrement et un soutien plus importants.
L'échec relatif du système d'orientation est celui du manque des
moyens qui lui sont consacrés. La bonne volonté, les
idées, les compétences sont là, elles doivent être
encouragées et multipliées : c'est une affaire de budget et
de volonté politique. Lutter contre l'échec, c'est aussi et
surtout mener une action de grande ampleur contre la sélection sociale
qui demeure et qui atteint durement les étudiants d'origine sociale
modeste.
Une révolution des esprits est à mener dans ce pays,
l'échec coûte plus cher à la Nation que la réussite.
·
L'université ne peut régler à elle seule tous
les maux de la société.
On ne saurait également appréhender la question de
l'université en dehors de son contexte, à savoir la crise
très forte qui marque toute la société.
L'université ne vit pas en vase clos : la réalité de
la société française aujourd'hui c'est l'existence de plus
de trois millions de chômeurs, de plus de cinq millions de sans emploi.
C'est la généralisation de la précarité.
L'échec à l'université, c'est aussi et très
largement l'absence de débouchés et d'emplois à la sortie.
Aussi efficaces soient-elles, l'orientation et la formation resteront
impuissantes si les emplois n'existent pas. D'où la
nécessité d'une autre politique économique et sociale
axée sur l'emploi et la satisfaction des besoins de tous.
N'est-il pas temps de concilier progrès économique et
progrès social ? Poser l'hypothèse d'une
société de croissance nouvelle et de plein emploi justifie le
besoin de formation de haut niveau pour la majorité des citoyens. La
démocratisation de l'enseignement supérieur, incluant la
réussite du grand nombre est bien entendu une question de justice mais
elle est aussi une nécessité pour le développement de la
société. L'enseignement supérieur doit posséder les
moyens nécessaires pour former les citoyens de demain, les former
à un travail, les former pour leur permettre de maîtriser les
évolutions scientifiques et techniques d'un monde en continuelle
transformation.
On ne saurait traiter des problèmes des premiers cycles universitaires
sans sortir du strict cadre de l'université. Des questions
extérieures au système universitaire comme le chômage,
pèsent pourtant lourdement sur lui. Réforme de
l'université et réformes dans la société sont
étroitement liées.
ANNEXES
I - Compte rendu des auditions de la mission d'information.
II - Synthèse des messages reçus, via le réseau Internet,
par la mission d'information.
III - Compte rendu du déplacement d'une délégation de la
mission d'information à Heidelberg.
IV - Compte rendu du déplacement d'une délégation de la
mission d'information à Lille et à Cambrai.
V - Contribution de M. André Maman, sénateur représentant
les Français établis hors de France, ancien professeur à
l'université de Princeton, sur le système universitaire
américain.
VI - Audition par la commission des affaires culturelles de
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche, sur les états
généraux de l'université.
ANNEXE I
COMPTE RENDU DES AUDITIONS DE LA MISSION D'INFORMATION
DATE |
PERSONNALITES AUDITIONNEES . |
PAGES |
Mercredi 17 janvier 1996 |
M. Bernard Alluin, vice-président de la conférence des présidents d'université et président de l'université Lille III - Charles de Gaulle. |
4 |
Mercredi 24 janvier 1996 |
M.
Christian
Forestier
, directeur
général des
|
8 |
Mercredi 31 janvier 1996 |
M. Alain Boissinot , directeur des lycées et collèges. |
14 |
|
M.
Daniel
Laurent
,
président de
l'Université de
|
18 |
Mercredi 7 février 1996 |
M. Michel Valdiguié , directeur de l'ONISEP (Office national d'information sur les enseignements et les professions), et Mme Françoise Jourdan , directeur des publications. |
25 |
|
M. Dominique de Calan , délégué général adjoint de l'Union des industries métallurgiques et minières. |
28 |
Mercredi 14 février 1996 |
M. Jean-Pierre Boisivon , directeur général du groupe ESSEC. |
31 |
|
M. Jean de Boishue , ancien secrétaire d'Etat chargé de l'enseignement supérieur, auteur du rapport à monsieur le Premier ministre sur les voies d'un nouveau partenariat entre l'Etat, les établissements d'enseignement supérieur et les collectivités locales. |
35 |
Mercredi 21 février 1996 |
M. Alain Touraine , professeur à l'Ecole des hautes études en sciences sociales. |
40 |
|
MM. Jean Garagnon , président, Christian Merlin , vice-président, et Sylvère Chirache , secrétaire général, du Haut comité éducation-économie. |
43 |
Mercredi 6 mars 1996 |
M. Claude Thélot , directeur de l'évaluation et de la prospective |
48 |
|
M. Vincent Merle , directeur du Centre d'études et de recherches sur les qualifications. |
51 |
Mercredi 20 mars 1996 |
M. Ivar Ekeland , président de la commission consultative nationale des IUT et des IUP, M. Gilles Raynaud , vice-président, chargé de la commission IUP, et M. Jean-Pierre Finances , vice-président, chargé de la commission IUT. |
56 |
|
M. Laurent Schwartz. |
61 |
Jeudi 28 mars 1996 |
M. Alain Minc. |
64 |
|
M. Dimitri Lavroff, professeur à l'université de Bordeaux I, président de la commission sur l'évolution du 1er cycle universitaire. |
69 |
Mercredi 17 avril 1996 |
M. Roger Fauroux , président de la commission chargée d'une mission de réflexion sur le système éducatif . |
74 |
|
M. Jean-Marc Monteil, premier vice-président de la Conférence des présidents d'université. |
77 |
Mercredi 24 avril 1996 |
MM. Philippe Evanno , délégué général, et Michel Legrand , chargé de mission de l'Union nationale universitaire (UNI). |
81 |
|
Mme Isabelle Martin , chargée de mission de la Mutuelle nationale des étudiants de France (MNEF). |
83 |
|
M. Pouria Amirshahi , président de l'Union nationale des étudiants de France indépendante et démocratique (UNEF-ID). |
86 |
|
M. Sylvain Tranoy , vice-président de la Fédération des associations générales des étudiants (FAGE). |
89 |
Jeudi 2 mai 1996 |
M. Lachenaud , secrétaire général du SUP Recherche FEN (Fédération de l'éducation nationale). |
92 |
|
Mme Joëlle Guignard et M. Vincent Guillon du Syndicat général de l'éducation nationale (SGEN) Sup CFDT. |
95 |
|
MM. Daniel Monteux et Jean-Claude Garric , secrétaires nationaux du Syndicat national de l'enseignement supérieur (SNESUP). |
97 |
|
Mme Frédérique Piel, secrétaire nationale, Mme Catherine Remermier et de M. Jean-Luc Brun , du Syndicat national des enseignements du second degré (SNES). |
101 |
Mardi 7 mai 1996 |
Mme Danièle Pourtier , présidente de l'Association des conseillers d'orientation-psychologues (ACOP France) et Mme Maryse Hénoque , présidente du centre d'information et d'orientation du 16e arrondissement. |
104 |
|
M. Jean-Pierre Laheurte , président de l'université de Nice-Sophia Antipolis. |
108 |
Mercredi 12 juin 1996 |
M. Bertrand Girod de l'Ain , Professeur émérite, université Paris-Dauphine. |
112 |
Mercredi 19 juin 1996 |
M. Daniel Bancel , recteur de l'Académie de Lyon. |
116 |
|
M. Jean-Louis Aucouturier , président du Comité national d'évaluation (CNE), et Mme Renée Ridier , chargée de mission. |
120 |
Mercredi 26 juin 1996 |
M. André Maman , sénateur, ancien professeur à l'université de Princeton |
124 |
I. MERCREDI 17 JANVIER 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La mission d'information a procédé
à l'audition de
M. Bernard Alluin, vice-président de la
conférence des présidents d'université
,
président de l'université Lille III-Charles de Gaulle.
En introduction à cette audition,
M. Adrien Gouteyron,
président
, a rappelé les objectifs de la mission
d'information et souligné la spécificité d'une
démarche qui s'inscrit dans la même ligne que celle engagée
par le ministre de l'éducation nationale sur l'avenir de l'enseignement
supérieur.
Après avoir précisé que ses mandats de président
d'université et de vice-président de la conférence des
présidents d'université touchaient à leur fin,
M. Bernard Alluin
a estimé que le problème de
l'information et de l'orientation des étudiants des premiers cycles
universitaires était d'une particulière actualité, alors
que l'enseignement supérieur était confronté à une
mutation considérable, engagée depuis la fin des
années 60, se traduisant notamment par une explosion des effectifs
étudiants et le passage des universités d'un régime de
" gestion familiale " à une véritable gestion
d'entreprise.
Rappelant que les problèmes des 3e cycles universitaires, de la
recherche, et même des 2e cycles avaient fait l'objet au cours de
cette période de mutation d'un traitement satisfaisant, en raison
notamment des moyens qui y avaient été affectés, il a en
revanche indiqué que les problèmes des premiers cycles restaient
entiers.
S'agissant d'abord de l'information des lycéens sur les filières
universitaires, il a souligné que, malgré les efforts des
différents acteurs chargés en amont de cette information, qui ont
le plus souvent une perception dépassée de l'université,
l'opinion n'avait pas pris conscience des bouleversements intervenus ;
contrairement aux idées reçues, qui sont encore transmises dans
les lycées et même dans les universités, il a
indiqué par exemple que le quart des diplômés
littéraires trouvaient un emploi dans le secteur privé, et
souligné que les diplômés littéraires de niveau bac
+ 4 trouvaient plus vite un emploi que les diplômés des
filières scientifiques, bien que ce ne soit pas toujours à un
niveau correspondant à leur formation.
Analysant ensuite les structures de formation post-baccalauréat
(bac + 2), il a rappelé que les choix des étudiants
pouvaient s'exercer théoriquement entre les filières
sélectives (classes supérieures et préparatoires aux
grandes écoles, instituts universitaires de technologie) et les
filières non sélectives de l'université.
A cet égard, il a souligné que les élites restaient
formées dans des filières non universitaires, cette
spécificité française n'étant infirmée que
pour le droit et la médecine.
Il a ensuite constaté que les filières supérieures courtes
à caractère sélectif (BTS, IUT) étaient
désormais détournées de leur vocation professionnelle
prévue à l'origine : les meilleurs élèves des
lycées sont ainsi encouragés à choisir ces filières
sélectives professionnalisées alors que les bacheliers
technologiques et professionnels doivent se replier sur les filières
générales des premiers cycles universitaires, auxquelles ils ne
sont pas préparés.
Cette évolution commande de réexaminer l'articulation entre ces
filières sélectives, qui ont la faveur des étudiants et
des familles modestes, et la poursuite d'études dans les 2e cycles
universitaires, et de mettre en place des passerelles avec des filières
de formation adaptées à la situation du marché du travail.
Il a également estimé que l'orientation était en fait
entendue par les étudiants comme une forme de sélection et qu'un
dispositif d'orientation dans les lycées et à l'entrée
à l'université ne pourrait être accepté qu'à
la condition d'avoir fait la preuve de son efficacité.
Il a rappelé que la vocation de notre système universitaire
restait d'accueillir tous les étudiants, de leur assurer une formation
et de leur promettre une insertion professionnelle, conformément
à la mission assignée par la loi de 1984 à l'enseignement
supérieur, la conciliation de ces objectifs pouvant se
révéler difficile comme l'ont montré les inscriptions
massives enregistrées dans les filières sportives lors de la
dernière rentrée universitaire.
Ce choix de l'ouverture de l'enseignement supérieur à l'ensemble
des bacheliers conduit à écarter toute idée d'orientation
préalable à l'entrée à l'université dont le
rôle est aussi de rétablir l'égalité entre les
élèves, de donner une chance à tous et de leur permettre
d'accéder à des disciplines nouvelles.
Il s'est cependant demandé si le système universitaire
était actuellement en mesure de répondre à l'attente
sociale et au souci d'insertion professionnelle des nouveaux étudiants.
A cet égard, il a estimé que la mise en place de périodes
d'adaptation, de mise à niveau et d'une information sur les professions
était nécessaire, en particulier pour les bacheliers
technologiques et professionnels s'inscrivant dans les filières
générales de premier cycle.
Il a ensuite rappelé que les services d'information et d'orientation des
universités avaient multiplié depuis une vingtaine
d'années les formules tendant à faciliter l'accueil et
l'information des étudiants et que les textes réglementaires
relatifs à la rénovation pédagogique des premiers cycles
permettaient la mise en place d'une orientation progressive à partir
d'une formation initiale pluridisciplinaire.
Cette perspective se heurte cependant, selon lui, à la résistance
du milieu universitaire qui reste attaché à l'apprentissage
immédiat et au maintien du niveau de chaque discipline, ainsi
qu'à une conception traditionnelle de la carrière des
enseignants, dont le déroulement dépend largement de leur
activité de recherche : cette conception tend à
pénaliser les enseignants qui voudraient s'engager dans des
activités de soutien, de tutorat, d'accueil et d'information des
nouveaux étudiants.
Si la double mission de l'enseignement supérieur -formation des
élites, développement de la recherche et accueil du plus grand
nombre- suppose des moyens supplémentaires en postes et en
crédits, elle nécessite aussi une évolution des structures
universitaires privilégiant l'encadrement, l'animation
pédagogique et la recherche de l'insertion professionnelle.
M. Bernard Alluin
a ajouté que les présidents
d'université n'étaient pas opposés au recours aux
professeurs agrégés (PRAG), qui sont susceptibles d'apporter leur
expérience acquise dans l'enseignement secondaire et à qui
devrait être conféré un statut reconnu, à la
condition que soit maintenue une proportion suffisante d'enseignants-chercheurs
dans les premiers cycles.
Il a en revanche exprimé son opposition à la création de
collèges universitaires et leur a préféré une
première année de premier cycle spécifique incluant une
information sur les professions, une formation pluridisciplinaire coexistant
avec les enseignements traditionnels par discipline, et un système de
passerelles entre les diverses filières. Une habilitation de
procédures d'orientation incitative et des aménagements
structurels de la carrière des enseignants apparaissent ainsi, selon
lui, indispensables, pour résoudre les problèmes des premiers
cycles universitaires.
A l'issue de cette intervention,
M. Jean Bernadaux, co-rapporteur
,
a souligné l'intérêt de cet exposé mais s'est
interrogé sur les possibilités de donner aux étudiants les
moyens de choisir leur orientation et a souligné l'intérêt
d'une formation pluridisciplinaire ou d'une expérience professionnelle
non universitaire pour les professeurs d'université.
Adhérant à la conception selon laquelle l'université a
vocation à corriger les inégalités constatées entre
les bacheliers,
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a cependant
estimé que celles-ci résultaient moins d'une orientation
défaillante, ou de leur situation géographique, que d'une absence
d'accès à l'information.
Afin de remédier à ces inégalités, il a
préconisé une information générale qui serait
dispensée, dès la classe de troisième, puis dans les
lycées et les universités et qui bénéficierait
à tous les intéressés, ce qui n'est actuellement pas le
cas avec les opérations de type " journées portes
ouvertes " qui restent limitées.
M. Ivan Renar
a estimé que l'orientation était
vécue par les étudiants comme une sélection, que son
contenu apparaissait d'autant plus négatif aux familles et aux jeunes
que l'avenir professionnel de ces derniers n'était pas assuré,
les inégalités observées entre les étudiants
étant, selon lui, davantage d'origine sociale que géographique.
Il a souligné que le problème du choix des filières
d'enseignement supérieur devait être préparé
dès le lycée, à condition de prévoir toutes les
passerelles nécessaires, et a rappelé que les proviseurs de
lycée tendaient aujourd'hui à orienter les meilleurs
élèves vers les BTS, l'université accueillant ceux qui ne
peuvent accéder aux diverses filières sélectives.
Il a par ailleurs souligné que certaines universités, comme les
établissements scolaires, n'échappaient plus aux problèmes
des banlieues et que les jeunes éprouvaient des difficultés pour
passer de l'univers du lycée à celui du campus.
Il a enfin rappelé que les problèmes des universités
découlaient de ceux rencontrés dans l'enseignement secondaire,
que l'existence de deux millions d'étudiants appelait la
définition d'un véritable statut social et s'est interrogé
sur les effets de mode qui se sont traduits au cours des dernières
années par un afflux d'étudiants dans certaines filières,
notamment celles de la psychologie, de la communication et des activités
sportives.
Mme Hélène Luc
a souligné l'importance de
l'orientation qui devrait, selon elle, également être
engagée au collège, voire dès l'enseignement primaire et a
rappelé les expériences développées à
l'université d'Orsay dans les premiers cycles en matière
d'orientation.
Elle a également estimé qu'une politique d'orientation et de
suivi des étudiants supposait des moyens supplémentaires,
notamment en personnels.
Elle a ensuite exprimé sa préoccupation devant la faible
participation des représentants des étudiants aux conseils
universitaires.
M. Franck Sérusclat
a dénoncé la dimension
excessive des établissements universitaires et les problèmes qui
en résultaient pour les étudiants. Il a regretté l'absence
de réflexion sur la mise en place de structures de taille plus
réduite, permettant un meilleur accueil des étudiants, et sur
l'utilisation des ressources de l'enseignement à distance.
M. Adrien Gouteyron
,
président,
a souhaité
obtenir des précisions supplémentaires quant à la position
exprimée par M. Bernard Alluin sur l'orientation sélective des
étudiants lors de leur entrée à l'université et a
relativisé la portée des inégalités qui
résulteraient pour les bacheliers de l'implantation géographique
de leur lycée, en particulier dans les petites villes.
Il a également souhaité pouvoir disposer du document exprimant
l'opposition de la conférence des présidents d'université
(CPU) à la création de collèges universitaires.
Répondant à ces interventions,
M. Bernard Alluin
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- toute orientation suppose un choix préalable des lycéens qui
devrait s'appuyer sur une information dispensée dans les lycées,
en particulier par des équipes universitaires ;
- si l'absence de sélection universitaire répond à une
demande sociale et apparaît socialement indispensable, une
pré-orientation apparaît ensuite nécessaire entre les
diverses disciplines : des regroupements pluridisciplinaires d'une
durée d'un semestre, prévus par les textes réglementaires,
permettent à cet égard aux étudiants de procéder
à des choix progressifs qui seront ensuite confortés par les
résultats obtenus dans chaque discipline ;
- si la diversité du profil des enseignants doit être
recherchée, il convient de rappeler que les présidents
d'université, même si certains le souhaitent, n'ont pas le pouvoir
de choisir les professeurs de leur établissement, à l'exception
des professeurs agrégés (PRAG) ;
- l'envoi d'équipes pédagogiques universitaires dans les
lycées constitue l'une des propositions de la conférence des
présidents d'université ;
- la conférence des présidents d'université a
demandé une loi de programmation pour affecter des moyens
supplémentaires à l'université, étant
rappelé que la dépense par étudiant en France est
inférieure à celle d'autres pays industrialisés, comme par
exemple l'Allemagne et le Japon et qu'une diversification du profil des
enseignants serait en outre nécessaire pour faire face à la
démocratisation universitaire ;
- la faible participation des étudiants aux conseils universitaires,
comme celle d'ailleurs des intervenants extérieurs, s'explique sans
doute par un certain rejet de ces institutions et une inadaptation des
structures de concertation et de prise de décision ; la
définition d'un statut social de l'étudiant pourrait constituer
un élément de la réflexion à mener en ce
domaine ;
- la taille des établissements universitaires doit être
appréciée selon les disciplines, en particulier dans les
filières scientifiques qui doivent disposer d'un seuil minimum
d'étudiants, la tendance récente étant de rapprocher
l'enseignement supérieur de la population dans une perspective
d'aménagement du territoire ;
- l'enseignement à distance ne doit pas être utilisé pour
réaliser des économies budgétaires et le retard pris en ce
domaine devra être comblé dans les dix années à
venir : la conférence des présidents d'université
travaille actuellement avec le ministère pour définir et mettre
en place des technologies nouvelles interactives qui ne sauraient cependant se
substituer aux lieux de rencontre nécessaires entre étudiants et
enseignants.
II. MERCREDI 24 JANVIER 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La mission d'information a procédé
à l'audition de
M. Christian Forestier, directeur
général des enseignements supérieurs.
A titre liminaire,
M. Christian Forestier
a rappelé les
différentes phases de la procédure de concertation, dite des
états généraux de l'enseignement supérieur, qui
venait d'être engagée par le ministre et a indiqué que le
défaut d'information et d'orientation des étudiants était
à l'origine des principaux dysfonctionnements du système
universitaire français.
Il a cependant estimé que ce système était souvent
présenté d'une manière excessivement sombre, notamment en
ce qui concerne l'échec universitaire.
Analysant les difficultés rencontrées en amont et en aval de
l'université, il a estimé que les secondes étaient moins
importantes que les premières et qu'une meilleure adéquation
entre la formation suivie au lycée et celle choisie en premier cycle
universitaire permettrait d'améliorer les résultats des
étudiants.
S'agissant du nombre des étudiants, jugé par certains trop
élevé, il a estimé que la moitié d'une classe
d'âge dans l'enseignement supérieur constituait la proportion la
plus souvent observée dans des pays comparables au nôtre et que le
système universitaire français était susceptible, le cas
échéant, de recevoir encore davantage d'étudiants, la
difficulté étant cependant de les accueillir dans des conditions
plus satisfaisantes.
Il a rappelé que l'enseignement supérieur
post-baccalauréat associait un secteur sélectif, constitué
des classes préparatoires aux grandes écoles, IUT, STS, qui
accueille environ la moitié des bacheliers, et le premier cycle
universitaire, qui se doit d'accueillir sans aucune sélection ni
régulation l'autre moitié, et concentre les problèmes
principaux de l'enseignement supérieur.
Il a ensuite tenté d'analyser les raisons, ou les mouvements
irrationnels, qui conduisent de nombreux bacheliers vers des disciplines,
telles que la psychologie, la sociologie, les arts plastiques, les
activités physiques et sportives, qui n'offrent que de faibles
débouchés professionnels ; ces choix résultent selon
lui d'un déficit d'information et d'une " orientation par
défaut ", notamment pour les bacheliers technologiques tertiaires
dont la formation est inadaptée aux filières sélectives,
mais aussi de l'attrait de disciplines nouvelles ignorées par
l'enseignement fondamental du secondaire.
Il a également souligné les dysfonctionnements résultant
d'un détournement de la finalité des sections de techniciens
supérieurs et des instituts universitaires de technologie qui ont
été mis en place au milieu des années 50 et 60 pour
déboucher, dans la continuité de l'enseignement technique de
l'époque, sur la vie active en formant des techniciens supérieurs
à bac + 2.
Cependant, du fait de la crise économique et des difficultés du
marché de l'emploi, les bacheliers généraux se sont
massivement engagés dans ces filières sélectives, tout en
ayant l'intention de poursuivre ultérieurement leurs études,
détournant ainsi de leur objet initial ces filières d'insertion
professionnelle qui sont plus coûteuses pour la collectivité que
celles de l'enseignement général, et les transformant en fait en
premier cycle universitaire.
Il a par ailleurs constaté que l'augmentation de la capacité des
IUT, qui était destinée à accueillir davantage les
bacheliers technologiques, s'était au contraire traduite par une
légère régression de leur proportion au sein de ces
instituts. La plus grande part des bacheliers technologiques s'engagent donc
soit dans les DEUG généraux auxquels ils ne sont pas
préparés, soit dans des DEUG plus adaptés mais qui ne sont
pas prolongés par des deuxièmes cycles.
Ce phénomène est encore aggravé par la mise en place de
DEUG " attrape-tout ", qui attirent trop de jeunes non
informés, aboutissant soit à un échec massif soit à
une impossibilité de prolonger ces formations en deuxième cycle.
S'interrogeant ensuite sur les pistes susceptibles d'apporter des solutions
à ces dysfonctionnements,
M. Christian Forestier
a
noté en préalable la difficulté de les faire accepter par
un milieu universitaire vivant encore sur certains clichés.
Citant l'exemple des filières sportives, il a rappelé que
l'institution de tests physiques, institués par les universités
et destinés à des candidats de plus en plus nombreux, avait
été censurée par les tribunaux administratifs comme
contraires à la loi de 1984 sur l'enseignement supérieur qui
écarte toute idée de sélection à l'entrée
à l'université. Il a noté que l'institution d'une
sélection à l'entrée de l'université ne serait pas
admise par les étudiants, même si ceux-ci admettent parfois la
sélection à l'issue de la première année
universitaire. Il a également noté que certaines formations
pourraient être mises en place en application de l'article 33 de la loi
de 1984 ; ceci supposerait toutefois une délibération des
conseils universitaires statuant à une majorité qualifiée
dont l'issue apparaît des plus incertaines et un risque d'extension d'une
forme de sélection à d'autres formations.
Il a d'autre part relevé que le problème général de
la sélection devait désormais être appréhendé
en fonction des capacités du système universitaire à
accueillir aujourd'hui l'ensemble des bacheliers, du fait notamment d'une
évolution démographique à la baisse et d'un effort de
construction universitaire très important mené dans le cadre du
plan université 2000, même si subsistaient des problèmes de
fonctionnement et d'encadrement.
Cette situation pourrait, selon lui, permettre d'envisager une réflexion
sur une procédure de régulation des flux d'étudiants,
notamment à l'occasion d'une prise de conscience nationale qui pourrait
intervenir à l'issue des travaux des états généraux
de l'enseignement supérieur, cette perspective restant
hypothéquée par la dimension symbolique et politique du
problème de la sélection universitaire.
Il a par ailleurs estimé que d'autres pistes pourraient être
explorées, qu'il s'agisse de la mise en place d'une véritable
politique d'information dans l'enseignement scolaire, permettant une
" éducation au choix " des élèves, laquelle a
déjà été expérimentée dans plusieurs
régions, de l'institution d'une première année de premier
cycle suffisamment générale précédant une
diversification ultérieure ou d'une réduction de la durée
du premier cycle et d'un allongement de celle du deuxième cycle.
Concluant son propos, il a estimé que la situation préoccupante
des premiers cycles universitaires appelait nécessairement des solutions
urgentes ; dans le cas contraire, les diplômés des filières
dépourvues de débouchés seraient fondés dans
quelques années à demander des comptes aux responsables
d'aujourd'hui.
A l'issue de cette intervention, et après avoir remercié M.
Christian Forestier pour la clarté, la franchise et le caractère
stimulant de ses propos,
M. Adrien Gouteyron, président
, a
demandé des précisions sur la mesure exacte de l'échec
universitaire en premier cycle, sur la répartition des divers bacheliers
selon les filières universitaires, sur les solutions consistant à
mettre en place des sections suffisamment générales, ou une
période d'orientation, au cours de la première année, et
sur les perspectives d'évolution du taux d'accès à
l'enseignement supérieur.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a estimé que les
événements de l'automne dernier avaient permis de faire
connaître à l'opinion la réalité de
l'université, plaçant ainsi chacun devant ses
responsabilités, et que l'organisation des états
généraux sur l'enseignement supérieur devrait permettre de
poser les problèmes et d'y apporter des réponses, en liaison avec
les différents acteurs concernés.
Il a souhaité obtenir des précisions sur la ventilation des
bacheliers dans les diverses filières générales et
sélectives des premiers cycles, sur l'importance de l'échec selon
ces filières, et sur l'efficacité des directives données
aux directeurs d'IUT tendant à ouvrir plus largement les filières
sélectives aux bacheliers technologiques.
Il s'est également enquis des modalités de l'orientation
progressive des nouveaux étudiants des DEUG mise en oeuvre au titre de
la rénovation pédagogique et a souligné la
nécessité d'une information assurée par des
professionnels, qui serait obligatoire pour tous les élèves au
sein des lycées.
M. Pierre Laffitte
a rappelé que la création des IUT
n'avait pas entraîné une disparition des BTS, qui aujourd'hui ont
au contraire tendance à se développer, du fait notamment d'une
préférence des responsables de petites et moyennes industries
pour ces formations.
Il a par ailleurs rejoint M. Jean-Pierre Camoin pour estimer qu'une information
dans les lycées, préalable à l'orientation, devrait
être dispensée par des professionnels et a estimé qu'elle
devait s'appuyer sur des stages en entreprise, les expériences
engagées à son initiative ayant révélé une
forte demande des élèves en ce domaine.
Après avoir rappelé que certaines universités avaient mis
en place des DEUG comportant des enseignements en alternance, il a
estimé que l'exemple du système d'orientation à
l'allemande, qui faisait une large part à l'apprentissage, devrait
permettre de développer des voies de formations originales combinant la
formation en alternance et la formation continue, jusqu'aux troisièmes
cycles et aux écoles d'ingénieurs, sous réserve d'une
médiatisation adaptée.
Il a enfin estimé que le mouvement de désaffection
constaté à l'égard des IUT et des classes
préparatoires, au profit d'études réputées plus
faciles mais dépourvues de débouchés était de
nature à fragiliser le consensus social et républicain.
M. Jean-Louis Carrère
s'est enquis de la répartition des
BTS et des IUT sur le territoire national. Il a souligné
l'intérêt de la procédure des " états
généraux ", qui devront notamment aborder les
problèmes évoqués (carences de l'information et de
l'orientation, cursus des bacs professionnels et technologiques, mise en place
d'un tronc commun en première année de premier cycle...) mais a
estimé que cette procédure n'était pas exclusive d'une
politique tendant à donner des moyens suffisants à l'enseignement
supérieur, notamment pour achever la mise en oeuvre du schéma
Université 2000, et d'une réflexion globale apportant des
réponses aux inquiétudes des familles et des étudiants.
Il a ainsi souligné que la progression continue des moyens
attribués à l'enseignement supérieur avait
été sensiblement réduite au cours des années les
plus récentes et que la prise en compte des aspects qualitatifs d'une
politique universitaire ne devait pas conduire à négliger les
moyens qui y sont affectés.
M. Jean-Claude Carle
a évoqué le problème de la
finalité du bac professionnel et a souligné la
nécessité de prévoir des possibilités de retour en
formation au cours de la vie active.
S'appuyant sur l'exemple de l'enseignement agricole, il a rappelé que la
valorisation de certaines filières, comme l'environnement et le
tertiaire, s'était traduite par un afflux d'élèves dans
des filières aujourd'hui saturées, alors que des bacheliers
professionnels font défaut pour répondre aux emplois
proposés dans certaines branches industrielles.
Répondant à ces interventions,
M. Christian Forestier
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- les deux tiers des étudiants inscrits en DEUG obtiennent un
diplôme bac + 2 après deux à quatre années
d'études, tandis qu'un peu moins de 40 % obtiennent le DEUG en deux
ans ;
- sur une promotion d'environ 400.000 bacheliers, 200.000 à 250.000
s'inscrivent à l'université, les autres se répartissant
comme suit : 100.000 en BTS, 30 à 40.000 en IUT, 25 à 30.000 en
classes préparatoires ;
- le taux de réussite en BTS est de l'ordre de 70 %, l'échec
au diplôme n'empêchant pas, par ailleurs, des perspectives
d'insertion professionnelle très satisfaisantes ;
- 75 % des étudiants obtiennent leur DUT en deux ans ; si l'
" affaire du CIP " a provoqué un effondrement spectaculaire
des inscriptions, le nombre de places vacantes a été
réduit du fait des efforts d'orientation effectués avant la
dernière rentrée, mais reste important dans certaines
filières (informatique à Orsay, par exemple) et dans certains
sites du fait d'une " balkanisation " excessive du réseau
des
IUT ;
- la moyenne de réussite au DEUG recouvre des résultats
très différents selon les bacheliers ; les taux sont
satisfaisants pour les bacheliers généraux mais très
faibles (10 %) pour les bacheliers technologiques tertiaires ;
- la mise en oeuvre des directives tendant à ouvrir davantage les IUT
aux bacheliers technologiques s'est traduite par une augmentation
générale des effectifs mais ne semble pas avoir eu d'incidence
notable sur la répartition des bacheliers admis ;
- si on comptait autant d'inscriptions en BTS qu'en IUT en 1985, le rapport est
actuellement de trois à un en faveur des BTS pour des raisons tenant
à une plus grande facilité des études et à un
comportement malthusien des responsables d'IUT : après une
période de fermeture des BTS engagée au milieu des années
60, une nouvelle politique d'ouverture, avec avis des directeurs d'IUT, a
été ensuite engagée puis poursuivie ;
- la carte de l'implantation des BTS et des IUT s'efforce de répondre
aux besoins des académies, compte-tenu notamment des flux de sortie des
bacheliers technologiques mais révèle encore certaines
inégalités sur l'ensemble du territoire ;
- la France est l'un des rares pays à posséder un corps de
conseillers d'orientation qui tendent sans doute à privilégier
d'une manière excessive la dimension psychologique de leur
fonction ;
- les équipes éducatives des DEUG ont la responsabilité de
définir les modalités de l'orientation progressive des nouveaux
étudiants ; si la rénovation pédagogique
engagée a permis d'améliorer le fonctionnement des DEUG, celle-ci
n'a pas encore été conduite à son terme ;
- la réflexion engagée par les présidents
d'université sur l'accès des étudiants aux filières
sportives a permis d'envisager l'idée d'une première année
générale qui serait suivie d'une spécialisation ; la
mise en place d'une première année d'orientation, si elle
rencontre la faveur de certains, suppose cependant un accord politique et une
adhésion de l'opinion, comme d'ailleurs toute proposition qui tendrait
à réguler les flux de bacheliers du secondaire vers le
supérieur ;
- le chômage des ingénieurs reste marginal tandis que celui des
diplômés d'IUT se traduit plutôt par un allongement de la
période de recherche d'emploi et par une réduction de la
rémunération offerte, mais la situation de ces derniers reste
largement plus favorable, que celle des titulaires de certaines
maîtrises ;
- l'idée d'une éducation récurrente, permettant à
un jeune de revenir à l'université, suppose un accord des
représentants des employeurs : les textes existants permettent
d'ores et déjà de procéder à des
expérimentations en autorisant une modulation de la durée des
formations selon les diplômes obtenus et un découpage de celles-ci
en unités capitalisables ;
- les derniers budgets ont sans doute privilégié l'enseignement
scolaire par rapport à l'enseignement supérieur, même si
l'effort de la nation en faveur de ce dernier peut apparaître
satisfaisant ;
- l'objectif de conduire 80 % d'une classe d'âge au niveau du
baccalauréat est aujourd'hui en passe d'être atteint ; mais
la répartition constatée entre les baccalauréats
généraux technologiques et professionnels fait une place plus
importante que prévue aux bac généraux ;
- si la moitié des jeunes accède désormais à
l'enseignement supérieur, ce mouvement concerne la quasi totalité
des bacheliers généraux, 80 % des bacheliers technologiques
et le sixième des bacheliers professionnels ;
- la formule du baccalauréat professionnel qui est désormais
obtenu par 7 % des élèves d'une classe d'âge doit
être développée : il reste que parmi les cinquante
" bac pro " offerts aux élèves, un seul, le
baccalauréat professionnel bureautique, regroupe la moitié de
l'effectif des bacheliers professionnels, alors que de nombreuses places
vacantes existent par exemple dans les sections du bâtiment.
III. MERCREDI 31 JANVIER 1996
-
Présidence de M. Pierre Laffitte,
vice-président, puis de M. Adrien Gouteyron, président
.
- La mission d'information a d'abord procédé à l'audition
de
M. Alain Boissinot, directeur des lycées et
collèges.
Dans une remarque liminaire,
M. Alain Boissinot
a rappelé
que la direction des lycées et collèges exerçait une
responsabilité particulière aussi bien dans la définition
des enseignements et des diplômes du second degré permettant
d'accéder à l'enseignement supérieur que dans
l'organisation des classes supérieures de Sections de techniciens
supérieurs (STS) et des classes préparatoires aux grandes
écoles des lycées, qui rassemblent environ 30 % des
formations de premier cycle universitaire et qui fonctionnent, comme l'a
souligné
M. Pierre Laffitte, président
, d'une
manière satisfaisante, au prix cependant d'un encadrement plus
coûteux.
Il a ensuite indiqué que le souci d'une meilleure orientation des
élèves et d'une articulation plus satisfaisante entre les deux
ordres d'enseignement était au coeur de la rénovation
pédagogique engagée depuis trois ans dans les lycées,
celle-ci consistant principalement à diversifier les modalités de
l'excellence scolaire et s'inscrivant dans la perspective d'une poursuite
d'études supérieures.
A cet égard, les premiers résultats enregistrés traduisent
un rééquilibrage attendu du baccalauréat au profit des
séries littéraires et scientifiques mais révèlent
un déséquilibre persistant entre les enseignements
généraux et les baccalauréats technologiques, qui sont
affectés par une certaine perte d'identité, cette tendance
appelant une relance de l'orientation en classe de seconde, notamment en faveur
des formations industrielles.
Il a ajouté que la rénovation pédagogique des
lycées s'était également traduite par un
rééquilibrage plus satisfaisant des élèves des
diverses Classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) en
fonction des filières du baccalauréat.
Il a en revanche regretté que les bacheliers technologiques ne se soient
pas davantage orientés vers les IUT et les STS et se retrouvent, du fait
de dysfonctionnements du système d'orientation, dans les premiers cycles
universitaires généraux.
Cette situation anormale impose, selon lui, de repenser d'une manière
claire, notamment pour les bacheliers technologiques, le problème de la
poursuite des études supérieures, qui n'a pas été
traité de manière satisfaisante au cours des années les
plus récentes en dépit d'une véritable demande qu'il
conviendrait de réguler, le tiers des diplômés de STS et
d'IUT poursuivant actuellement leurs études.
Il a également estimé qu'un " couplage " devait
être maintenu entre ces deux types de formation qui sont bien
perçues et considérées comme relativement interchangeables
par les employeurs.
M. Alain Boissinot
a par ailleurs noté que la régulation
de la demande vers une poursuite des études supérieures supposait
un effort considérable d'information des élèves, une
clarification de la carte trop complexe des formations supérieures, une
connexion entre les IUT et les instituts universitaires
professionnalisés, et la mise en place de passerelles, dans les deux
sens, entre filières générales et technologiques.
Il conviendrait ainsi, selon lui, d'améliorer l'information des
élèves de lycées sur l'organisation de l'enseignement
supérieur, à partir de la classe de seconde, en fournissant
notamment des indications, pour chaque série du baccalauréat, sur
le taux de réussite selon les filières universitaires et sur les
perspectives d'insertion professionnelle correspondantes.
A l'issue de cet exposé général,
M. Jean Bernadaux,
co-rapporteur
, s'est enquis des moyens qui avaient été mis en
oeuvre pour parvenir à ce rééquilibrage entre les
séries du baccalauréat, a rappelé la vocation
traditionnelle des professeurs principaux à assurer l'information et
l'orientation des élèves et a souhaité obtenir des
précisions sur la formation des enseignants qui seront chargés de
l'information des élèves.
Il s'est enfin interrogé sur la proportion d'élèves qui
ont, en classe de terminale, d'ores et déjà arrêté
leur orientation.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, s'est demandé si les taux
de réussite constatés dans les classes supérieures et
préparatoires des lycées ne plaidaient pas en faveur de la
création de collèges universitaires, création d'ailleurs
préconisée par certains membres de la commission Fauroux, et qui
répondrait également à l'attente de certaines villes
moyennes dans une perspective d'aménagement du territoire.
Manifestant son opposition à cette formule, il a cependant
dénoncé le caractère quelque peu péjoratif d'un
discours officiel qui tend à jeter un discrédit sur une
éventuelle " secondarisation " des premiers cycles, alors
que
les meilleurs bacheliers engagent en fait leurs études
supérieures dans des classes préparatoires et supérieures
de lycée.
M. Pierre Laffitte
a souligné que la première
finalité des études supérieures était celle d'une
insertion dans la société.
Il a ensuite constaté que l'exposé de M. Alain Boissinot n'avait
pas évoqué les possibilités de recours à
l'apprentissage, à la formation en alternance, aux stages en entreprises
et à la participation des professions à l'effort d'information
des élèves et des étudiants.
Il s'est par ailleurs enquis des perspectives d'utilisation de la chaîne
de télévision éducative et du recours à des
formules telles que le chèque formation, la formation continue et la
mise en place de passerelles entre filières permettant notamment un
retour en formation après une période d'activité
professionnelle.
Il s'est par ailleurs inquiété de l'adaptation des CPGE aux
grandes écoles à vocation technique, une formation technologique
facilitant selon lui l'accès à ces établissements.
Il a enfin évoqué la possibilité d'instituer des
formations préparatoires à l'entrée dans les
deuxièmes cycles universitaires.
M. Ivan Renar
, rejoignant le souci exprimé par M. Pierre
Laffitte, a souligné le détournement de la vocation des BTS et
des IUT et a souhaité obtenir des précisions sur le
développement de passerelles entre les diverses filières
supérieures.
Il a estimé que l'orientation était en fait entendue par les
jeunes comme une sélection déguisée et s'est
inquiété des conséquences pour l'enseignement secondaire
d'un recours massif aux professeurs agrégés du second
degré dans l'enseignement supérieur.
M. Franck Sérusclat
a demandé quelle était la place
faite aux nouvelles technologies de l'information et de la communication dans
les formations supérieures et s'est étonné qu'elles ne
suscitent pas plus d'intérêt de la part des élèves,
en particulier, des grandes écoles d'ingénieurs.
Il a par ailleurs souhaité obtenir des précisions sur les
motivations des lycéens, les modalités d'orientation et les taux
de réussite dans les grandes écoles.
M. André Maman
s'est enquis des modalités concrètes
de l'information et de l'orientation des élèves ainsi que du
profil des orienteurs.
M. Daniel Eckenspieller
a estimé que les causes de l'échec
scolaire et universitaire résultaient d'abord d'une " orientation
par défaut ", qui intervient dès le collège pour les
élèves en difficulté, et d'une absence de motivation
conduisant à suivre des formations à la mode.
Il a ajouté que le mouvement de poursuite d'études
constaté chez les diplômés d'IUT et de STS s'expliquait par
les difficultés du marché du travail et par des
rémunérations jugées insuffisantes, incitant ainsi les
étudiants peu motivés à différer leurs choix
professionnels.
M. François Lesein
a pris acte du rééquilibrage
intervenu entre les séries du baccalauréat et s'est
inquiété des moyens supplémentaires qui devraient, selon
lui, être consacrés à une meilleure orientation des
élèves.
M. Henri Weber
a estimé que l'efficacité de l'information
et de l'orientation des élèves dépendait des partenariats
qui sont susceptibles de s'établir entre les établissements
scolaires et les acteurs économiques et sociaux régionaux ainsi
que des potentialités des bassins d'emploi. Il a observé que les
progrès enregistrés dans le mouvement de déconcentration
de l'éducation nationale permettaient aux chefs d'établissements
motivés d'effectuer un véritable travail d'information et
d'orientation.
M. Adrien Gouteyron, président
, rappelant que l'objectif de
conduire 80 % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat
était en cours de réalisation, au prix cependant d'une
dérive dans la répartition prévue entre les
baccalauréats généraux, technologiques et professionnels,
a souhaité obtenir des explications et des précisions sur cette
évolution et sur l'accès de ces différents bacheliers
à l'enseignement supérieur.
Il s'est ensuite interrogé sur les rôles respectifs des
enseignants et des personnels spécialisés chargés de
l'orientation dans une véritable politique d'information et
d'orientation des élèves.
Répondant à ces interventions,
M. Alain Boissinot
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- notre système d'enseignement supérieur a vocation à
assurer une insertion professionnelle des étudiants, même si cet
objectif est obscurci par leur souci de poursuite d'étude
résultant soit de la recherche d'une qualification plus poussée,
soit d'une attitude d'attente et de refus d'une activité professionnelle
découlant d'ailleurs largement de la situation difficile du
marché de l'emploi ;
- le système d'enseignement ne doit pas exclusivement être
jugé en termes d'insertion professionnelle, mais aussi dans une
perspective d'insertion sociale ;
- en dépit d'une position qui reste encore parfois frileuse par rapport
à l'entreprise, comme l'a illustré le débat récent
sur la redéfinition des diplômes de BTS, l'éducation
nationale a considérablement évolué en ce domaine en
développant un partenariat institutionnalisé avec le monde des
entreprises, qu'il s'agisse de la définition de certains diplômes,
de l'organisation de stages en entreprise, du développement des
formations en alternance, et notamment de l'apprentissage, de la mise en place
de passerelles entre les diverses formations et de l'association des recteurs
à la définition des programmes régionaux de
formation ;
- l'objectif de conduire 80 % d'une classe d'âge au niveau du
baccalauréat suppose un renforcement de la place de l'enseignement
technologique et professionnel par rapport à l'enseignement
général ;
- le détournement des filières technologiques supérieures
au profit des bacheliers généraux appelle des messages clairs en
direction des bacheliers technologiques, insistant d'une part sur les
perspectives satisfaisantes d'insertion professionnelle de ces filières
et sur les possibilités de poursuite d'étude, notamment vers les
instituts universitaires professionnalisés, les diplômes nationaux
de technologie spécialisés, voire les formations longues
d'ingénieurs ;
- en sens inverse, les étudiants en DEUG fourvoyés dans des
études générales doivent pouvoir rejoindre des
filières technologiques supérieures moyennant une formation
accélérée ;
- l'encadrement des premiers cycles universitaires pourrait s'inspirer des
méthodes et des pratiques pédagogiques d'encadrement des CPGE et
des STS afin notamment de faciliter le passage délicat entre le
lycée et l'université ;
- le débat engagé sur la " secondarisation " des
premiers cycles universitaires, terme qui n'a selon lui rien de
péjoratif, dissimule en fait le problème de la place de la
recherche et des enseignants-chercheurs, les premiers cycles ayant tout
à gagner à utiliser des méthodes pédagogiques qui
ont fait leurs preuves dans l'enseignement secondaire ;
- l'information des élèves est assurée par les conseillers
d'orientation-psychologues (COP), les professeurs principaux, mais aussi
l'ensemble des professeurs, ainsi que par les conseillers d'éducation,
le problème étant de définir la place de ces divers
intervenants dans un système cohérent, et notamment des COP en
intégrant ceux- ci dans une démarche collective et en
privilégiant leur rôle d'expert ;
- la mise en oeuvre des dispositions sur la validation des acquis et celles de
la loi quinquennale pour l'emploi concernant l'orientation suppose une gestion
plus fine des parcours des élèves par ces intervenants ;
- l'utilisation des technologies nouvelles a dépassé le stade
expérimental et permet notamment d'ores et déjà aux
académies et aux chefs d'établissement, en matière
d'information et d'orientation, de disposer d'une carte prospective des
formations et des professions ;
- le rôle des chefs d'établissement se développe dans une
logique de déconcentration et connaît une évolution
profonde, du fait notamment de leurs relations avec les élus
régionaux ;
- le recours aux professeurs agrégés du second degré dans
l'enseignement supérieur ne doit pas conduire à dépouiller
l'enseignement secondaire, et notamment les classes préparatoires, de
ses meilleurs enseignants, et pourrait s'accompagner de la mise en place d'un
service partagé entre les deux ordres d'enseignement ;
- les CPGE permettent déjà d'accéder aux deuxièmes
cycles universitaires et les grandes écoles confèrent aussi des
diplômes universitaires.
La mission d'information a ensuite procédé à l'audition de
M. Daniel Laurent, président de l'université de
Marne-la-Vallée, président du groupe de réflexion sur
l'avenir de l'enseignement supérieur
.
M. Daniel Laurent
a indiqué que son intervention porterait aussi
bien sur les problèmes d'information des lycéens et des
étudiants que sur les expériences d'orientation qu'il avait
engagées dans les premiers cycles à l'université nouvelle
de Marne-la-Vallée.
Il a d'abord constaté que l'information dispensée dans les
lycées était dépourvue de tout lien avec la
réalité des formations universitaires et a estimé que les
premiers cycles universitaires étaient au carrefour des problèmes
de la société française.
En dépit des diverses initiatives engagées (journées
" portes ouvertes " dans les universités, envoi
d'équipes pédagogiques universitaires dans les lycées
...), l'information passe mal du fait d'une méconnaissance des
pré-acquis nécessaires pour accéder à
l'enseignement supérieur et d'une absence de projet professionnel des
lycéens et des étudiants, leur choix restant souvent
commandé par une image trop générale de
l'université et les modes du moment.
Il en résulte que les meilleurs bacheliers s'orientent vers les
filières sélectives des classes préparatoires et des BTS
et que les autres se replient sur les premiers cycles universitaires
généraux.
A cet égard, il a indiqué qu'il s'était refusé
à créer à Marne-la-Vallée des diplômes
d'études universitaires générales (DEUG) de psychologie ou
de droit, qui ne correspondaient pas à la vocation scientifique de cette
université et qui auraient été destinés à
accueillir les laissés-pour-compte des universités parisiennes.
S'agissant de l'orientation, il a rappelé que l'une des propositions du
groupe de travail qu'il avait présidé consistait à
organiser un service partagé de certains professeurs
agrégés entre le lycée et l'université, cette
initiative pragmatique et sans incidence financière devant selon lui
permettre d'assurer une meilleure orientation des lycéens.
Il a par ailleurs indiqué que les étudiants en situation
d'échec universitaire répugnaient, ainsi que leur famille,
à se tourner vers des formules de formation concrète
dispensée par l'association pour la formation professionnelle des
adultes (AFPA), la rémunération proposée pendant la
période de formation étant loin de compenser pour eux la perte du
statut d'étudiant.
Il a ensuite abordé le problème de l'augmentation
prévisible du nombre des bacheliers professionnels, qui risquent de se
retrouver massivement dans quelques années dans les premiers cycles
universitaires généraux, notamment en droit et en sciences
économiques, ces filières étant appelées à
accueillir des publics de plus en plus hétérogènes. Alors
que le " bac pro " bureautique représente la moitié des
effectifs des bacheliers professionnels, il a indiqué que certaines
grandes entreprises ne recrutaient plus de bacheliers de cette
spécialité.
Afin de répondre à ces besoins spécifiques de formation,
il a rappelé qu'il avait proposé la création d'instituts
universitaires régionalisés, permettant de développer des
solutions alternatives à l'université ; ces formations courtes de
bon niveau, suffisamment attractives pour les intéressés,
résulteraient d'initiatives locales et seraient définies
notamment en liaison avec les organisations consulaires.
Il a également dénoncé l'absence de coordination entre les
différents BTS et les dérives des IUT qui tendent à
devenir des premiers cycles universitaires mais dont l'encadrement est trois
fois plus coûteux que celui des filières générales.
Abordant ensuite les expériences concrètes engagées
à l'université de Marne-la-Vallée, il a souligné
que les principales innovations avaient porté sur l'adaptation des
formations dispensées en premier cycle.
Ces formules se sont d'abord traduites par une organisation de la
première année de DEUG sur une période d'un semestre, avec
un examen final en février, cette désynchronisation des rythmes
universitaires permettant d'optimiser l'occupation des locaux, d'autoriser des
redoublements immédiats pour les étudiants qui perdent pied
après trois mois d'études et d'organiser une rentrée
" latérale " supplémentaire au mois de
février ; ces aménagements permettent ainsi de
réduire l'échec universitaire sur l'année. Une seconde
innovation, aujourd'hui abandonnée, compte tenu des résultats
observés, a consisté à mettre en place, au début de
l'année universitaire, des tests d'évaluation des
étudiants qui ont notamment révélé les lacunes
considérables en français de certains bacheliers.
M. Pierre Laffitte
a fait observer que cette baisse du niveau de
maîtrise de la langue française se retrouvait également
dans les grandes écoles, notamment chez les diplômés de
DEUG ayant obtenu une mention.
M. Daniel Laurent
a ajouté que les formules de tutorat
n'étaient d'aucune aide à ces étudiants, et qu'un DEUG
scientifique ne pouvait être entrepris sans une maîtrise suffisante
de la langue française, cette évolution étant d'autant
plus préoccupante qu'elle concerne des flux d'étudiants de plus
en plus importants.
M. André Maman
s'est demandé s'il ne conviendrait pas
d'organiser ces tests en fin d'année scolaire, ou dans les
lycées, afin de procéder aux remises à niveau
nécessaires.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a exprimé la crainte qu'il
s'agisse là d'un combat d'arrière-garde et que les
" innovations linguistiques " des banlieues finissent par
faire
évoluer profondément la pratique de notre langue.
M. Ivan Renar
a estimé que ce problème était
général, le langage adopté dans certains quartiers
traduisant une opposition des jeunes à la société mais
aussi leur souci de s'en distinguer.
M. Daniel Laurent
est convenu que les premiers cycles universitaires
n'étaient désormais plus épargnés par les
problèmes de la société française, et notamment de
ceux des banlieues, mais a constaté que la poursuite d'études
supérieures supposait une certaine maîtrise du français.
Il a ajouté que l'université de Marne-la-Vallée avait
introduit une autre innovation en organisant la première année du
DEUG de sciences économiques sur une période de quatre mois de
formation, afin d'accroître les chances des étudiants ; cette
expérience, engagée par une équipe pédagogique
motivée, avec l'accord des étudiants, nécessite une
organisation poussée et des horaires proches de ceux des classes
préparatoires aux grandes écoles.
Répondant à une question de
M. Jean Bernadaux,
co-rapporteur
, il a indiqué que cette organisation permettait certes
de réduire le nombre des redoublements mais surtout de repérer
rapidement les étudiants en situation d'échec et de les
réorienter en IUT ou éventuellement vers l'AFPA.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est interrogé sur le
coût de ces formules, sur leur conformité avec les textes qui
régissent l'organisation des études de premier cycle
universitaire et sur les possibilités de restreindre l'accès des
étudiants à l'université.
M. Daniel Laurent
a indiqué que ce type d'organisation
inédite avait un coût et pouvait être plus aisément
mis en oeuvre dans une université de taille réduite.
Il a ajouté que des conventions avaient permis d'organiser des stages
à l'étranger pour les étudiants, que cette
expérience avait nécessité un aménagement des
deuxièmes cycles universitaires sans porter atteinte au caractère
national des diplômes délivrés et que d'autres
établissements avaient également expérimenté une
nouvelle organisation de l'année universitaire en semestres, notamment
dans les filières littéraires.
Il a enfin indiqué qu'il n'avait aucun moyen d'instaurer une quelconque
sélection à l'entrée dans son université.
Il a précisé qu'un tel aménagement de l'année
universitaire entraînait une refonte des cours et une utilisation plus
importante des locaux universitaires, la création d'une rentrée
" latérale " en février offrant par ailleurs, selon
lui, une souplesse supplémentaire pour accueillir les étudiants
qui n'auraient pas été retenus lors de la rentrée
d'octobre.
M. Pierre Laffitte
s'est demandé s'il convenait d'aménager
le statut des universités pour poursuivre ce type d'expérience.
M. Daniel Laurent
a estimé qu'un aménagement de la loi de
1984 ne lui paraissait pas nécessaire et que la seule prolongation du
statut dérogatoire des universités nouvelles lui semblait
suffisante.
Répondant à une question de
M. André Maman
, il a
par ailleurs précisé que cette expérience supposait le
concours d'enseignants dynamiques, renonçant aux avantages de
carrière procurés par une activité de recherche, et
n'avait pas été évaluée par le comité
national d'évaluation.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est interrogé sur la
mesure qui serait la plus efficace pour faciliter le passage délicat de
l'enseignement secondaire à l'université.
M. Daniel Laurent
a indiqué que l'institution d'un temps
partagé entre le lycée et l'université et la
création d'emplois " mixtes " pour certains professeurs
agrégés constituaient des solutions efficaces qui pouvaient
être aisément et rapidement mises en oeuvre.
Cette formule présente l'avantage de combiner pour l'orientation les
expériences respectives des professeurs des deux ordres d'enseignements
et de suppléer à la défaillance des organismes
d'information et d'orientation qui restent boudés par les lycéens.
Abordant le problème de la " secondarisation " des premiers
cycles universitaires, il a estimé que cette formule était
préférable à celle d'un recours massif aux seuls
enseignants vacataires qui sont appelés à pallier la
désaffection des enseignants titulaires à l'égard des
premiers cycles.
M. Ivan Renar
s'est demandé si la généralisation de
ces formules d'aménagement des rythmes universitaires, autorisées
par le principe de l'autonomie des universités, ne risquait pas
d'introduire un enseignement supérieur à plusieurs vitesses. Il a
également rappelé les efforts accomplis par certaines
régions en faveur de la recherche universitaire, ainsi que le poids
financier qu'avait représenté le transfert des lycées aux
régions.
M. Daniel Laurent
a souligné le caractère technique de ces
expériences, et le fait que celles-ci relevaient désormais d'un
ministère unique, compétent pour les enseignements scolaire et
supérieur.
Il a indiqué que la création de centres universitaires
régionalisés pourrait résulter d'initiatives locales et
que cette proposition ne préfigurait en rien une régionalisation
future de l'enseignement supérieur.
Il a remarqué que certaines régions seraient plus
inspirées d'investir dans les premiers cycles universitaires que dans la
recherche ou dans les cycles ultérieurs. Il a estimé qu'une
politique d'aménagement du territoire et de la formation professionnelle
dans l'enseignement supérieur se devait d'utiliser toutes les
possibilités de la formation en alternance, en particulier de
l'apprentissage, y compris en lettres et en sciences humaines dans les
troisièmes cycles, et devrait se traduire notamment par un
développement des stages en entreprise.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est demandé si la
période passée en entreprise serait, dans ce cas, validée
pour l'obtention des diplômes.
M. Daniel Laurent
a répondu par l'affirmative en soulignant que
la législation française sur l'apprentissage était
particulièrement avancée, alors que seulement 8.000
étudiants utilisent cette formule de formation en alternance : il a
estimé que 200.000 étudiants pourraient en
bénéficier et notamment ceux qui sont en dernière
année d'IUP ; dans le cas contraire, les écoles
supérieures de commerce risquent de monopoliser cette modalité de
la formation en alternance.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a rappelé la proposition
qui tendrait à créer un corps spécifique d'enseignants
dans l'enseignement secondaire, lequel serait chargé de l'information
des élèves sur l'orientation.
M. Daniel Laurent
a estimé qu'un tel corps risquerait de se
trouver dévalué et marginalisé par rapport aux autres
enseignants.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est interrogé sur une
généralisation éventuelle du découpage des DEUG en
semestres, et sur le profil des enseignants qui seraient appelés
à enseigner à temps partagé entre les lycées et les
premiers cycles universitaires.
M. Ivan Renar
s'est inquiété de la position des
enseignants des premiers cycles à l'égard de ces innovations et
d'une absence de liaison entre ces premiers cycles et la recherche
universitaire.
M. Daniel Laurent
a précisé qu'un consensus existait chez
les enseignants en faveur de ces expériences, que le semestre
était la norme internationale en matière de période de
formation universitaire, que ces premiers cycles expérimentaux devraient
pouvoir fonctionner avec une majorité d'agrégés permanents
du second degré, notamment en sciences et en lettres, avec un appui de
quelques enseignants-chercheurs. Il a par ailleurs estimé que le
discours tenu sur la nécessité de maintenir une activité
de recherche en premier cycle relevait de la langue de bois, et a
rappelé que le ministre actuel avait pris l'initiative de recourir aux
professeurs agrégés (PRAG) pour pourvoir aux besoins des premiers
cycles universitaires.
M. André Maman
a estimé qu'une valorisation des
enseignants supposait également une disponibilité à
l'égard des étudiants.
M. Adrien Gouteyron, président
, a demandé des
précisions sur les modalités du tutorat, sur les perspectives
d'évolution des effectifs à l'université de
Marne-la-Vallée et sur la mise en oeuvre du concept d'université
thématique qui a été introduit par le Sénat lors de
l'examen du projet de loi sur l'aménagement du territoire.
M. Henri Weber
s'est demandé s'il était envisageable
d'imposer une charge d'enseignement, même réduite, aux chercheurs.
Citant l'exemple de son département,
M. Jean-Pierre Camoin,
co-rapporteur,
a souligné la nécessité d'une
répartition géographique équilibrée des
établissements d'enseignement supérieur dans une perspective
d'aménagement du territoire.
Répondant à ces dernières interventions,
M. Daniel
Laurent
a apporté les précisions suivantes :
- la disponibilité des universitaires français à
l'égard de leurs étudiants est plus limitée qu'aux
États-Unis par exemple, du fait notamment de moyens d'accueil plus
réduits et de comportements de type " enseignement
secondaire ", les universités à taille humaine permettant
cependant aisément ces contacts directs ;
- le tutorat est organisé par groupes d'élèves et est
assuré par des étudiants suffisamment avancés dans leurs
études ;
- les effectifs de l'université de Marne-la-Vallée ne devraient
pas dépasser à terme 8.000 à 9.000 étudiants ;
- les délocalisations universitaires, lorsqu'elles ne sont pas
fondées sur l'excellence et la recherche, aboutissent souvent à
instituer un enseignement supérieur dévalué ;
- la réussite d'une délocalisation suppose, outre un projet et un
financement des constructions universitaires, une équipe enseignante de
haut niveau et une masse critique d'étudiants ;
- le concept d'université thématique est pertinent à
condition de rester l'exception, les établissements créés
devant nécessairement être animés par des équipes de
chercheurs.
IV. MERCREDI 7 FÉVRIER 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La commission a tout d'abord procédé
à l'audition de
M. Michel Valdiguié, directeur de
l'ONISEP
(Office national d'information sur les enseignements et les
professions), accompagné de
Mme Françoise Jourdan
,
directeur des
publications
.
Dans une déclaration liminaire,
M. Michel Valdiguié
a
rappelé que l'ONISEP exerçait depuis vingt-cinq ans une mission
d'information sur les formations, les filières et les professions
auprès des élèves, dès la classe de 6e, et
notamment aux principaux stades d'orientation, cette information consistant
d'abord à mettre à leur disposition des miniguides adaptés
à chaque type de filière. Il a ensuite indiqué que des
brochures d'information plus complètes étaient distribuées
gratuitement aux conseillers d'orientation-psychologues, et depuis une date
plus récente, aux professeurs principaux, et qu'elles étaient
également diffusées dans les centres d'information et
d'orientation ainsi que dans les centres de documentation et d'information des
établissements.
Mme Françoise Jourdan
a ajouté que la diversité des
brochures proposées par l'office (cahiers, dossiers, revue Avenir)
répondait aux besoins particuliers des publics concernés
(présentation des filières technologiques courtes, panorama des
études post-baccalauréat, possibilités de suivre des
études supérieures à l'étranger,...).
M. Michel Valdiguié
a indiqué que l'office proposait
également de nouveaux produits, notamment des cassettes vidéo sur
les métiers conçues en liaison avec les branches professionnelles
et, depuis cette année, des CD-Rom consacrés notamment aux
métiers de la santé, des transports et du tourisme.
Il a rappelé que l'office était un établissement public
administratif national regroupant vingt-huit délégations
régionales placées sous la responsabilité des recteurs
d'académie.
Il a précisé qu'avec 510 personnes et un budget de l'ordre de 200
millions de francs, l'ONISEP, qui a été délocalisé
à Marne-la-Vallée, s'efforçait de rendre son action plus
efficace, en répondant notamment à la demande de parents
d'élèves tout en étant soumis à la concurrence de
groupes de presse privés.
Cette concurrence, qui permet d'ailleurs à l'ONISEP de retirer 30
millions de francs de ressources propres au titre de la diffusion
payante, a également entraîné une nécessaire
modernisation de la présentation de ses brochures.
Il a par ailleurs indiqué que l'office s'était engagé dans
une phase de partenariat, avec ses correspondants traditionnels d'abord
(conseillers d'orientation, professeurs, parents d'élèves) mais
aussi avec les éditeurs qui doivent répondre à une demande
nouvelle en matière d'information sur les métiers et les
professions, ainsi qu'avec les collectivités territoriales, notamment
les régions, et les branches professionnelles.
Il a ajouté que l'ONISEP allait développer son action en faveur
de l'information des parents d'élèves qui ne sont pas
familiarisés avec le cursus et la diversité actuelle des
formations supérieures, en les sensibilisant en particulier à la
nécessité d'une orientation progressive.
Mme Françoise Jourdain
a précisé que la mission de
l'office devait tenir compte de l'absence de motivation des jeunes, de leurs
choix irrationnels en faveur de filières sans débouchés,
des directives du ministère qui ne correspondent pas toujours aux choix
d'orientation des élèves ainsi que du coût d'une
diversification des publications résultant d'une nécessaire
adaptation à des publics de plus en plus variés, d'une
régionalisation des formations et de la nécessité de
publier désormais des documents suffisamment attractifs.
A l'issue de cet exposé général,
M. Jean Bernadaux,
co-rapporteur,
a souhaité obtenir des précisions sur le
caractère gratuit ou non de ces diverses brochures selon leurs
destinataires et s'est demandé s'il ne serait pas opportun de regrouper
les trop nombreux organismes qui concourent à l'information et à
l'orientation des lycéens et des étudiants.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a estimé que l'importance
de l'échec constaté dans les premiers cycles non sélectifs
de l'université et les efforts annoncés par le ministre dans le
domaine de l'information et de l'orientation des lycéens justifiaient
pleinement la mission de l'ONISEP. Il a ensuite souligné que
l'information existante en ce domaine était mieux utilisée par
les élèves qui en connaissaient le mode d'emploi, comme en
témoigne par exemple le taux de réussite des enfants
d'enseignants, et s'est interrogé sur les moyens qui permettraient
d'améliorer la diffusion de cette information auprès de
l'ensemble des élèves. Considérant qu'il était
irréaliste de s'appuyer sur les seuls parents d'élèves en
cette matière, il a rappelé les propositions formulées par
M. Christian Forestier, directeur général des enseignements
supérieurs, tendant à organiser un enseignement obligatoire
consacré à l'éducation au choix dès la classe de 6e.
M. Pierre Laffitte
a noté que la présentation faite des
missions de l'ONISEP n'avait pas abordé les problèmes de
l'apprentissage, des formations en alternance et plus largement des relations
de l'école avec les professions et les branches industrielles. Il a
ainsi souligné la nécessité de ne pas
" sanctuariser " l'éducation nationale par rapport aux
réalités du monde économique. Il s'est en particulier
étonné que le secteur des techniques multimédia, dont
l'activité devrait représenter à terme la moitié de
notre produit intérieur, ne s'accompagne pas d'une vision prospective
sur les métiers qui y seront créés. Il s'est par ailleurs
déclaré favorable à une augmentation des moyens de
l'ONISEP à condition que celui-ci concentre ses efforts sur les
formations présentant un fort potentiel de développement et s'est
enquis des relations éventuelles de l'office avec les services de
prospective économique, comme ceux des établissements bancaires,
afin de définir des marchés porteurs d'avenir.
Il a enfin demandé si l'ONISEP disposait d'un serveur sur le
réseau Internet et si la consultation de certaines brochures
d'information sur ce réseau ne permettrait pas de réaliser de
substantielles économies.
M. Adrien Gouteyron, président,
s'est interrogé sur les
parts respectives qui relevaient de l'information et du conseil dans la mission
de l'office et s'est demandé si son budget incluait les salaires
versés aux personnels.
M. Jean-Louis Carrère
a d'abord souligné la qualité
des brochures diffusées par l'ONISEP mais a estimé que,
même popularisées par le ministre exerçant la tutelle sur
l'office, celles-ci ne sauraient se substituer à une nécessaire
motivation des chefs d'établissement, des professeurs principaux et
aussi des parents d'élèves dans le domaine de l'information des
élèves. Il a constaté que les orientations qui sont
vouées à l'échec universitaire n'épargnaient pas
les étudiants de province et a souhaité obtenir des
précisions sur les modalités de recrutement des agents de
l'office et de choix de ses responsables, estimant que ces procédures
avaient un caractère quelque peu confidentiel.
Répondant à ces interventions,
M. Michel Valdiguié et
Mme Françoise Jourdan
ont notamment apporté les
précisions suivantes :
- les brochures destinées aux personnels relevant de l'éducation
nationale sont gratuites et sont envoyées aux divers autres organismes
en fonction de leur champ de compétence et des demandes qui sont
formulées ;
- les cassettes audiovisuelles sont distribuées gratuitement et font
d'ailleurs l'objet d'une large duplication tandis que la mise à
disposition de CD-Rom suppose un effort financier des collectivités
locales pour équiper les collèges et les lycées ;
- l'ONISEP a développé un système multimédia de
bornes d'information qui coexiste d'ailleurs avec les systèmes mis en
place dans certaines régions en liaison avec divers organismes (centres
d'information et de documentation pour la jeunesse, association pour la
formation professionnelle des adultes...) ;
- la multiplication des organismes d'information et d'orientation
résulte d'une part de la césure ministérielle ancienne
entre l'éducation nationale et l'enseignement supérieur, ce
dernier n'ayant jamais accordé de subventions à l'ONISEP et
l'office étant en conséquence insuffisamment présent dans
les universités, et d'autre part de l'indifférence traditionnelle
des responsables universitaires à l'égard des problèmes
d'orientation ;
- la revue " Info Sup " devrait être modernisée pour
renverser cette tendance dans l'enseignement supérieur, avec l'aide
notamment des mutuelles étudiantes et malgré la difficulté
de s'adresser à des publics étudiants très divers ;
des " journées de l'orientation " devraient en outre
être organisées dans les premiers cycles pour les étudiants
volontaires ;
- la profusion d'informations est sans doute plus gênante que la
concurrence qui se développe entre les divers organismes et leurs
publications ;
- l'information des lycéens, qui devrait se traduire par une
éducation au choix, suppose que les parents d'élèves et
les professeurs principaux soient associés à la
réalisation de cet objectif ;
- l'ONISEP ne joue pas un rôle d'orienteur et diffuse également
une information sur l'apprentissage et les formations en alternance recueillie
notamment auprès des professions ainsi qu'une information sur les
métiers de demain par le biais de son département de recherche et
de développement ;
- l'information dispensée privilégie encore la description
exhaustive des diverses filières mais tend aussi à s'orienter
vers un rôle de conseil aux lycéens en s'interdisant cependant de
dévaloriser certaines formations et de condamner des filières
présentant peu de débouchés ;
- il est regrettable que l'ONISEP, qui assure sur son budget la
rétribution de ses personnels, ne puisse pas accéder plus
largement à la télévision, notamment pour des raisons
financières ;
- le statut de droit public de l'office ne l'empêche pas de recourir
à des contractuels qualifiés, l'essentiel de son personnel
étant cependant recruté parmi les conseillers
d'orientation-psychologues ;
- si l'ONISEP manifeste un souci constant de s'ouvrir sur l'extérieur,
l'office permet aussi aux entreprises d'avoir connaissance des nouveaux
diplômes de notre système éducatif.
La mission d'information a ensuite procédé à
l'audition
de M. Dominique de Calan, délégué
général adjoint de l'union des industries métallurgiques
et minières
(U.I.M.M.).
Après avoir brièvement rappelé l'étendue du champ
professionnel relevant de l'U.I.M.M.,
M. Dominique de Calan
a
indiqué qu'il présidait le groupe " enseignement
supérieur " au CNPF et qu'il avait été l'auteur en
1989 d'un rapport sur l'orientation au sein du Haut comité
éducation-économie.
S'agissant des perspectives d'emploi, après avoir constaté une
confusion dans l'opinion entre branches d'activité et métiers, il
a indiqué que les grandes catégories de métiers devraient
répondre dans l'avenir à sept fonctions principales, de nature
" régalienne " ou économique (production, vente,
animation, conception ...).
Il a par ailleurs estimé qu'une véritable " logique
d'emploi " devrait conduire à une pré-orientation des jeunes
vers ces " grands métiers ", et à une orientation
ultérieure correspondant plus précisément à leurs
capacités.
Il a également observé que le discours tenu sur l'insertion
professionnelle des élèves ignorait la diversité du monde
de l'entreprise et n'envisageait les perspectives de carrière qu'au sein
des grandes entreprises alors que celles-ci n'accueillent que le
cinquième des jeunes entrant dans la vie active.
Il a ensuite souligné les trois évolutions structurelles majeures
qui, selon lui, vont bouleverser l'organisation de l'entreprise dans les
années à venir :
- un cycle des techniques désormais plus court que le " cycle
biologique " : il en résultera que les jeunes arrivant sur le
marché du travail vont connaître durant leur vie active plusieurs
évolutions techniques ou culturelles majeures aujourd'hui
imprévisibles ;
- une société désormais dirigée par le
consommateur : 60 % des emplois sont d'ores et déjà
aujourd'hui totalement exposés en raison de l'ouverture de notre
économie à un marché mondial instantané, du fait
notamment de l'évolution des moyens de transport et des nouvelles
techniques de communication ;
- l'avènement d'une éducation de masse qui s'accompagnera d'une
rupture du lien existant entre le diplôme et le premier emploi.
Il a indiqué que les critères d'embauche dans les années
à venir devraient s'appuyer sur les capacités des salariés
à répondre à certaines exigences -niveau des
connaissances, résolution des problèmes, encadrement, champ
relationnel, contribution économique- un seul de ces critères
relevant directement de l'école.
Il a ensuite estimé, d'une part, que les métiers de demain
seraient majoritairement des emplois d'exécution ou à
responsabilité réduite, et d'autre part, que les entreprises
auraient tendance à repousser à leur
" périphérie " les emplois qualifiés, qui
seraient régis par des contrats précaires ou assurés, pour
des tâches à durée limitée, par des intervenants
ayant un statut de type profession libérale.
Il a par ailleurs rappelé que l'éducation au choix des
élèves avait été expérimentée en 1989
dans deux cents collèges et avait fait l'objet d'une évaluation
dont les résultats ont été jugés positifs. Une
expérimentation analogue a été engagée dans les
premiers cycles de l'enseignement supérieur en 1993 dans trois
universités et a été étendue à sept autres
établissements en 1996.
En conclusion,
M. Dominique de Calan
a estimé que le
problème de l'orientation des étudiants en premier cycle
supposait une poursuite des efforts engagés en amont, que le
rapprochement de l'école et de l'entreprise devait être
intégré dans un processus éducatif et que le lien encore
existant entre le diplôme et l'emploi serait bientôt rompu, du fait
notamment, qu'à la fin du siècle, 200.000 diplômés
à bac + 4 se présenteraient sur le marché du
travail alors que l'économie française ne pourrait leur proposer
que 80.000 postes d'encadrement.
Ces perspectives conduisent, selon lui, à modifier le discours tenu sur
l'emploi et à privilégier la flexibilité du travail, sauf
à accroître encore le chômage des jeunes dans les
années à venir.
Soulignant la rudesse de cette analyse et le caractère explosif de ses
conclusions,
M. Ivan Renar
a rappelé que le système
éducatif avait pour finalité l'insertion professionnelle, mais
aussi sociale des jeunes.
Observant ensuite que les mouvements universitaires de l'automne avaient
résulté d'un souci des étudiants d'une meilleure
organisation de leurs études, mais aussi d'une inquiétude quant
à leurs perspectives d'emploi, il a exprimé la crainte que la
nouvelle logique proposée ne conduise à une explosion sociale,
notamment du fait du décrochage prévu entre les formations et les
métiers proposés.
Il a enfin souhaité obtenir des précisions sur la typologie des
emplois et des métiers précédemment exposée.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a estimé que les
problèmes évoqués ne lui paraissaient pas insolubles
à condition de leur appliquer des solutions nouvelles.
Il a en revanche indiqué, s'agissant de l'acquisition des connaissances
dans l'enseignement scolaire, que le problème de l'insuffisance de la
maîtrise de notre langue par de nombreux élèves
était particulièrement préoccupant.
Considérant que les difficultés principales résulteraient
dans l'avenir d'une incompréhension au niveau du langage entre les
jeunes et les adultes, il a souhaité que l'école réagisse
rapidement pour répondre à la dérive sémantique
observée dans les banlieues, qui présente, selon lui, un
caractère explosif.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est interrogé sur la
finalité des stages en entreprise et sur le moment le plus propice pour
entreprendre une formation en alternance.
Répondant à ces interventions,
M. Dominique de Calan
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- le développement d'une éducation de masse ne saurait être
freiné, mais il convient de tenir un discours réaliste aux jeunes
afin de ne pas entretenir chez eux de faux espoirs ;
- la France n'a pas encore " digéré " la massification
de son système éducatif, notamment dans l'enseignement
supérieur ;
- la formation différée permettant une reprise d'études,
la démultiplication de la voie de l'apprentissage, le
développement des créations d'entreprises, l'aménagement
des rythmes universitaires constituent autant de pistes pour adapter notre
système éducatif aux perspectives de l'emploi ;
- l'économie française dispose d'atouts importants dans la
compétition internationale, notamment du fait d'un niveau culturel
élevé des salariés et d'une
" sensibilité " particulière, notamment dans le domaine
des technologies nouvelles ;
- une " logique de communication " passe par la maîtrise de
la
langue française mais aussi par l'acquisition de compétences
technologiques complémentaires, notre pays manifestant par tradition un
attachement à sa langue et un certain mépris à
l'égard de la technologie ;
- l'apprentissage apparaît comme une voie complémentaire de
formation à côté de la filière
" conceptuelle " et devrait être utilisé pour l'ensemble
du cursus professionnel, du certificat d'aptitude professionnelle jusqu'aux
formations d'ingénieur, cette formule devant être
considérée comme une voie innovante de formation initiale :
- le développement de l'apprentissage suppose que
" l'étudiant apprenti " bénéficie d'un statut
particulier mais conserve un contrat de travail, sous réserve d'un
aménagement de son système de protection sociale qui devrait
s'inspirer de celui des étudiants.
V. MERCREDI 14 FÉVRIER 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La mission a tout d'abord procédé
à l'audition de
M. Jean-Pierre Boisivon, directeur
général du groupe ESSEC.
Dans une série de remarques liminaires,
M. Jean-Pierre Boisivon
a
estimé que les problèmes des premiers cycles universitaires
devaient être replacés dans une perspective plus large, en
rappelant que la société française avait connu depuis dix
ans un phénomène inédit dans son ampleur et ses
conséquences sociales, celui de la massification de notre
enseignement : alors que 10 % d'une génération obtenait
le baccalauréat en 1960, ce pourcentage est passé à
30 % en 1985 et à 60 % en 1995. L'objectif de conduire
80 % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat est ainsi
en passe d'être réalisé.
Soulignant que ce phénomène n'était pas propre à
notre pays, il a cependant rappelé que les travaux de simulation
menés au milieu des années 80 par la direction de
l'évaluation et de la prospective du ministère de
l'éducation nationale avaient retenu cet objectif ambitieux, en
prévoyant cependant le développement des " bac pro " et
de la voie professionnelle : en fait, les bacheliers issus de la voie
générale et technologique ont représenté 70 %
des 200.000 bacheliers supplémentaires et cette évolution
s'est accompagnée d'une hypertrophie de la filière
générale dans les lycées, au détriment de la voie
professionnelle, contribuant ainsi au développement d'un mouvement
général de poursuite d'études dans l'enseignement
supérieur.
Il a également indiqué que 30 % des bacheliers
professionnels poursuivaient leurs études et que la moitié
d'entre eux regrettaient de ne pas être en mesure de le faire. Cette
évolution sans précédent se traduit par le fait que plus
de la moitié d'une classe d'âge accède désormais
à l'enseignement supérieur et que 250.000 étudiants
se retrouvent dans les premiers cycles universitaires non sélectifs.
Soulignant les conséquences " sismiques " de ce mouvement,
il
a cependant salué la capacité de notre système
éducatif à supporter un tel choc sur une aussi courte
période, et a noté que cette évolution s'était
traduite par un renversement de la pyramide des niveaux de
diplômes : alors que la moitié d'une génération
sortait, il y a dix ans, du système éducatif avec un niveau CAP
ou BEP, 250.000 étudiants devraient obtenir en l'an 2000 un
diplôme à bac + 5 ou plus.
Dans le même temps, les DEUG enregistrent un taux d'échec
très élevé qui risque de toucher des effectifs
d'étudiants de plus en plus importants dans les années à
venir : il importe en conséquence de trouver des solutions pour que
ces étudiants ne sortent pas du système universitaire sans aucun
diplôme.
Il a ajouté que cette perspective conduisait tous les responsables
à s'interroger sur les conséquences d'une véritable
révolution culturelle, celle d'une rupture prochaine entre le
diplôme et le statut professionnel et social, l'économie
française n'étant en effet pas en mesure de proposer à
l'ensemble des étudiants diplômés les emplois correspondant
à leur qualification.
Il a par ailleurs estimé que les problèmes de l'enseignement
supérieur résultaient, d'une part, d'un refus de l'orientation
vers l'enseignement professionnel, qui souffre d'une image négative
auprès des familles et qui a été transformé en fait
en structure d'accueil pour les jeunes en difficulté et, d'autre part,
d'une opposition à toute idée de sélection à
l'entrée à l'université, les événements de
1986 et la loi d'orientation sur l'éducation de 1989 ayant
consacré le droit imprescriptible pour tout bachelier de s'engager dans
des études supérieures longues.
Il a ajouté que le secteur sélectif court, prévu à
l'origine pour accueillir les bacheliers technologiques, avait
été en fait investi par les bacheliers généraux,
les premiers se retrouvant dans des formations universitaires
générales inadaptées.
Constatant qu'il n'était pas envisageable d'instaurer une quelconque
sélection à l'entrée à l'université, il a
cependant remarqué que des procédures autorisant la
répartition des étudiants dans des filières
supérieures différenciées permettraient de remédier
à l'hétérogénéité des divers types de
bacheliers.
Il a ensuite estimé que la situation actuelle de l'enseignement
supérieur appelait des solutions urgentes qui devaient s'inscrire dans
la perspective d'un plan de réforme sur plusieurs années,
dépassant l' " horizon stratégique "
habituel des dirigeants de l'éducation nationale. Leur mise en oeuvre
supposerait par ailleurs un redéploiement des moyens existants et une
professionnalisation d'une partie de la formation dispensée par les
universités, notamment par la voie de l'apprentissage. Cette
modalité de la formation en alternance, déjà
utilisée depuis longtemps dans l'internat de médecine, et plus
récemment à l'ESSEC, devrait selon lui connaître un
développement prioritaire dans les formations générales
supérieures et permettre d'adapter les diplômes universitaires aux
besoins des entreprises.
Rappelant ensuite que la filière professionnelle apparaissait souvent
comme une voie de relégation dans l'enseignement secondaire, et
était aussi à l'origine des difficultés rencontrées
dans la filière générale, il a noté que la
réussite d'un système d'orientation au lycée était
subordonnée à une revalorisation de l'enseignement professionnel
qui pourrait, selon lui, notamment, par la voie de l'apprentissage et de la
formation en alternance, être déconnecté de
l'éducation nationale en s'appuyant davantage sur les entreprises.
Il a ajouté que les sorties précoces volontaires du
système éducatif, à un niveau BEP ou " bac
pro ", supposaient que les intéressés aient la
possibilité de reprendre des études ultérieures
débouchant sur un diplôme, en utilisant pleinement
l'expérience professionnelle préalablement acquise, une gestion
décentralisée de ce système au niveau régional
étant par ailleurs souhaitable.
Il a également estimé que la gratuité des études
supérieures, coûteuse pour la collectivité, constituait un
encouragement à la poursuite de longues études alors que le poids
des déficits publics, des dépenses de santé et de
retraite, sera tel que l'éducation nationale ne sera plus un secteur
prioritaire. Il a également noté que l'université
s'était paupérisée depuis les années 60 et que
la France était le seul grand pays qui consacrait davantage d'efforts
à ses lycéens qu'à ses étudiants.
Dans la perspective d'une augmentation substantielle des droits d'inscription,
il a estimé que l'enseignement supérieur devrait constituer un
choix d'investissement pour les familles : les ressources nouvelles
provenant d'une majoration de ces droits devraient permettre d'améliorer
le fonctionnement de l'université, alors que le système actuel de
gratuité était source d'inégalités, procurait une
rente de situation aux étudiants favorisés et privait les autres
de services pourtant indispensables à la poursuite d'études
supérieures (équipements informatiques, stages à
l'étranger...).
Il s'est enfin interrogé sur les conséquences d'un statut de
l'étudiant qui serait rendu plus attractif et qui serait
généralisé à moyen terme aux deux-tiers d'une
génération.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est engagé.
M. Frank Sérusclat
s'est interrogé sur les
expériences envisagées par le ministre chargé des
télécommunications dans le domaine des nouvelles technologies et
d'une utilisation éventuelle du réseau
" téléport " par les universités. Il a par
ailleurs souligné le caractère quelque peu provocateur de
certaines propositions avancées, en particulier celles tendant à
remettre en cause le principe de la gratuité des études
supérieures.
M. Jean-Louis Carrère
a également indiqué que
certaines positions émises par M. Jean-Pierre Boisivon ne pouvaient
recueillir son assentiment, même si leur caractère parfois
provocateur avait le mérite de susciter des interrogations salutaires et
si le diagnostic établi sur la situation de l'université pouvait
être partagé.
Il a ensuite rappelé que la politique menée depuis plusieurs
années avait consisté à adapter certaines formations
à l'enseignement supérieur, sans remettre en cause son
organisation ni proposer une régulation des flux d'étudiants, la
finalité principale de l'université restant, selon lui, de
faciliter l'insertion professionnelle de ses diplômés.
Il a par ailleurs estimé que les chômeurs ne seraient pas en
mesure de payer les études supérieures de leurs enfants, sauf
modulation éventuelle des droits d'inscription en fonction des revenus
des familles.
Il a par ailleurs rappelé que les choix effectués en faveur de
l'enseignement technologique ou professionnel dans le secondaire
résultaient d'une " orientation par défaut " et a
souhaité que le contenu de cet enseignement soit revu, en liaison
notamment avec les besoins des entreprises.
Il a enfin noté que certaines sections étaient maintenues ou
fermées dans les lycées professionnels sans tenir compte des
perspectives d'emploi correspondantes et de leur fréquentation par les
élèves.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a souligné
l'intérêt de l'exposé de l'orateur, notamment concernant le
rôle de la formation en alternance.
Il a ensuite opposé le constat inquiétant fait de la situation de
l'enseignement supérieur, qui appellerait des réformes d'urgence,
à un discours officiel plus rassurant qui ne préconiserait que
des mesures d'adaptation, à l'exclusion de tout aménagement
législatif.
Il s'est enfin interrogé sur les réformes qui seraient
susceptibles d'être acceptées, sans réactions violentes,
par le milieu universitaire.
Souscrivant à l'analyse et aux propositions de M. Jean-Pierre
Boisivon, et s'appuyant sur les exemples des pays étrangers,
M.
André Maman
a estimé que toute formule de sélection
supposerait une information et une orientation des étudiants, que
l'abandon du principe de la gratuité des études
supérieures nécessiterait un effort dans le domaine des bourses
universitaires et que l'encadrement assuré par d'anciens
étudiants devrait être encouragé.
M. Jean Bernadaux, co-rapporteur,
a souligné
l'intérêt et le caractère novateur de l'exposé de
l'orateur, concernant notamment le nécessaire développement de
l'apprentissage et la professionnalisation des formations supérieures.
Il a cependant regretté que le recrutement des enseignants des
universités néglige cette dimension professionnelle.
M. Pierre Laffitte
a souhaité recueillir l'opinion de
M. Jean-Pierre Boisivon sur l'intérêt d'un tutorat
extérieur, susceptible d'apporter un appui aux services d'orientation
dans les lycées.
M. Adrien Gouteyron, président,
a souhaité obtenir
des précisions sur le recours à l'apprentissage dans
l'enseignement supérieur, compte tenu des diverses acceptions de cette
forme de formation en alternance, et s'est demandé si les entreprises
étaient prêtes à s'associer à cette démarche.
Répondant à ces interventions,
M. Jean-Pierre Boisivon
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- s'il ne saurait être question d'empêcher les bacheliers
défavorisés d'accéder à l'enseignement
supérieur, le principe de sa gratuité tend à limiter les
moyens des universités et à exclure en fait les étudiants
défavorisés des savoirs discriminants sur le marché du
travail, notamment dans le domaine des langues vivantes, qui relèvent
alors des initiatives privées ;
- les notions de qualification scolaire et de compétences
professionnelles ne se recouvrent pas et sont trop souvent confondues dans
l'opinion ; à cet égard, il est souhaitable que les
diplômés généraux puissent " irriguer "
l'ensemble des professions ;
- l'évolution rapide des technologies de l'information et de la
communication entraînera une modification profonde des relations entre
maître et élèves -notamment avec les CD-Rom
multimédia, l'enseignement à distance, l'interactivité,
l'accès aux réseaux d'information, le tutorat à distance-
et une " disqualification " rapide des établissements
d'enseignement supérieur qui n'auront pas mis en oeuvre ces nouvelles
technologies ;
- le système universitaire n'a aucune raison de s'engager
spontanément dans un processus " héroïque "
d'auto-réforme, en l'absence de tout élément
régulateur extérieur comme l'est le marché pour les
entreprises : les familles et les étudiants, surtout si ceux-ci
étaient appelés à acquitter des droits d'inscription
significatifs, pourraient dans l'avenir jouer un rôle de
régulateur du système ;
- le service public d'orientation dans l'enseignement secondaire tend à
privilégier l'orientation scolaire, par rapport à l'orientation
professionnelle et pourrait être renforcé par des intervenants
extérieurs et par une formation des orienteurs dispensée à
l'occasion de stages en entreprise ;
- l'apprentissage ne doit pas être considéré comme une
structure d'accueil, mais comme un mode de formation efficace, à
finalité d'insertion professionnelle directe, comme en témoigne
l'exemple de disciplines telles que la médecine et la gestion.
La mission a ensuite procédé à l'audition de
M. Jean de Boishue, ancien secrétaire d'Etat chargé de
l'enseignement supérieur,
auteur du rapport à M. le
Premier ministre sur les voies d'un nouveau partenariat entre l'Etat, les
établissements d'enseignement supérieur et les
collectivités locales.
Dans une déclaration liminaire,
M. Jean de Boishue
a
indiqué que les conclusions des divers rapports consacrés
à la situation de l'enseignement supérieur étaient
convergentes et tendaient à privilégier l'analyse des
difficultés des premiers cycles universitaires, qui appellent
aujourd'hui des solutions urgentes.
Il a ensuite estimé que les aspects positifs et les réussites de
notre système éducatif, qui est aujourd'hui confronté aux
problèmes de la société française, sont trop
souvent oubliés. Il a ainsi rappelé que la démocratisation
réussie de l'enseignement supérieur s'était traduite par
une progression du nombre des étudiants de 500.000 à
2,1 millions en quinze ans, et que des efforts importants de
professionnalisation des formations supérieures avaient permis une
meilleure adaptation de celles-ci aux besoins de notre économie :
en témoigne la création de nouvelles écoles
d'ingénieurs, des sections de techniciens supérieurs, des
instituts universitaires de technologie, des instituts universitaires
professionnalisés qui constituent autant de formations professionnelles
ayant profondément renouvelé notre système universitaire.
Dans le même sens, le plan Université 2000 a constitué une
avancée considérable dans le domaine des constructions
universitaires, grâce à un cofinancement des collectivités
locales qui pourraient aujourd'hui légitimement prétendre
à une certaine coresponsabilité dans la gestion des
établissements, d'autant plus que les lycées, qui entrent dans le
champ de la compétence des régions, accueillent des effectifs
importants d'étudiants en classes supérieures et
préparatoires.
Il reste que le taux d'échec dans les premiers cycles, qui rassemblent
600.000 étudiants, notamment concentrés en région
parisienne, constitue le principal problème du système
universitaire, alors que le taux de réussite dans le secteur
sélectif des cycles courts professionnalisés et des classes
préparatoires aux grandes écoles apparaît satisfaisant.
M. Jean de Boishue
a indiqué que cet échec
résultait d'une maîtrise insuffisante de la démocratisation
de l'enseignement supérieur et d'un défaut d'orientation des
nouveaux étudiants qui découvrent, après le
baccalauréat, un monde largement inconnu.
Il a par ailleurs constaté que les notions de décentralisation et
de déconcentration restaient étrangères à
l'enseignement supérieur, que l'autonomie universitaire demeurait une
notion abstraite et que le système participatif au sein des
universités était particulièrement faible, notamment pour
les étudiants.
Il a ensuite observé que si l'université était encore
" douillettement " protégée il y a vingt ans, celle-ci
était aujourd'hui au centre des problèmes de la
société française, qu'il s'agisse de la crainte du
chômage, des inquiétudes sur les débouchés
professionnels ou du niveau sanitaire préoccupant de la population
étudiante.
Constatant que notre pays consacrait à l'enseignement supérieur
des moyens inférieurs à ceux de nombre de pays voisins ou
comparables, il a appelé de ses voeux un véritable consensus sur
les réformes à engager, permettant de dépasser les
clivages politiques traditionnels.
Il a ensuite souligné le caractère inéluctable des
relations qui devront s'établir entre les universités et les
collectivités locales, même si ce thème reste encore tabou
en raison de ses incidences financières, les premiers cycles
universitaires constituant selon lui des instruments essentiels de
l'aménagement du territoire.
Constatant que l'importance de l'échec universitaire était de
nature à motiver les régions pour mettre en place des formations
courtes de proximité et débouchant sur des diplômes
immédiatement utilisables, il a indiqué que de nombreuses
collectivités locales et organisations consulaires étaient
prêtes à s'engager dans ce type de partenariat.
En conclusion, il a cependant exprimé son inquiétude devant une
inertie générale qui résulterait de la crainte d'une
explosion universitaire alors que tous les rapports publiés ont conclu
à la nécessité d'un développement de l'autonomie,
des partenariats et du système participatif des établissements
d'enseignement supérieur.
Il a enfin estimé que l'université était parvenue à
un moment historique où il lui fallait évoluer parce qu'elle
avait réalisé une grande part des objectifs qui lui avaient
été assignés et qu'elle devait répondre
désormais à de nouveaux défis.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est instauré.
M. Jean-Paul Camoin, co-rapporteur,
a d'abord indiqué qu'il
partageait l'analyse faite de la situation de notre système
universitaire.
Il s'est ensuite demandé si l'implication des collectivités
locales dans les premiers cycles ne risquait pas d'entraîner une
régionalisation de l'enseignement supérieur et de porter atteinte
au caractère national des diplômes, et si une participation
financière de leur part ne conduirait pas à associer les
régions à la gestion des universités et à la
définition de formations adaptées aux besoins économiques
régionaux.
Il s'est enfin interrogé sur les raisons du relatif échec de la
rénovation des DEUG.
M. Ivan Renar
a d'abord indiqué qu'il partageait la
présentation équilibrée qui avait été faite
de la situation actuelle de notre système universitaire.
Convenant que la démocratisation des premiers cycles universitaires
avait pu être réalisée sur le plan quantitatif, il s'est
interrogé sur les conditions dans lesquelles s'était
opérée cette massification, alors que de nombreux bacheliers sont
condamnés à l'échec universitaire.
Il a par ailleurs estimé que la région constituait un
échelon pertinent pour établir un partenariat avec l'enseignement
supérieur, à la condition que les universités ne
deviennent pas de simples prestataires de services et que la région
intervienne à titre complémentaire en finançant par
exemple une bibliothèque universitaire plutôt qu'un investissement
de prestige.
Il a enfin dénoncé la situation sanitaire et sociale
préoccupante du monde étudiant.
M. Jean Bernadaux, co-rapporteur,
a souhaité obtenir des
précisions sur les difficultés d'intégration des nouveaux
étudiants dans les premiers cycles universitaires et s'est
demandé si certains problèmes des banlieues se retrouvaient
désormais dans ces premiers cycles. Il a également
souhaité recueillir l'opinion de M. Jean de Boishue sur la
création de collèges universitaires, sur une déconnexion
éventuelle des premiers cycles de la recherche, ainsi que sur les moyens
d'assurer un encadrement satisfaisant aux formations courtes
professionnalisées qui sont susceptibles d'être
créées.
M. Daniel Eckenspieller
est convenu que la démocratisation
de l'université avait pu être assurée d'une manière
satisfaisante sur le plan quantitatif, qu'une professionnalisation des
formations supérieures avait été engagée,
même si celle-ci n'avait pas concerné les premiers cycles, et
s'est interrogé sur le développement de formations en alternance
de proximité correspondant aux besoins économiques
régionaux.
Souscrivant pour l'essentiel à l'analyse présentée par
M. Jean de Boishue,
M. Pierre Laffitte
a
demandé si le principe de l'autonomie des universités pouvait se
concilier avec la définition d'une carte et de schémas
universitaires et a rappelé que nombre de pays développés,
organisés il est vrai selon des structures institutionnelles
différentes, n'avaient pas la religion du diplôme national.
Il a également souligné l'efficacité des structures
d'enseignement de taille réduite, de type STS et IUT, et souhaité
un renforcement de l'autonomie des universités.
Il a ajouté que le recours aux nouvelles technologies interactives
serait de nature à rénover les méthodes d'enseignement,
notamment dans la perspective d'une décentralisation des sites
universitaires.
Il a enfin souligné l'effort engagé en faveur de la
professionnalisation des formations supérieures en notant la
difficulté d'étendre celle-ci aux premiers cycles et est convenu
que les collectivités locales seront inéluctablement conduites
à jouer un rôle en ce domaine, un système national de
régulation étant par ailleurs nécessaire pour valider les
diplômes et les formations et les diplômes correspondants.
M. Adrien Gouteyron, président
, a souhaité obtenir des
précisions sur la réalité et l'étendue de
l'autonomie universitaire.
M. André Maman
a estimé que l'orientation n'était
pas assurée d'une manière satisfaisante dans les lycées,
que le problème de la sélection à l'université et
de l'augmentation des droits d'inscription devraient faire l'objet d'un
débat et d'une véritable information et que l'université
française, sans un renforcement de ses moyens, ne serait pas en mesure
de réussir sa mutation en entrant dans le XXIe siècle.
Répondant à ces interventions,
M. Jean de Boishue
a notamment apporté les
précisions suivantes :
- le développement d'un partenariat régional et d'une
délocalisation des sites universitaires ne doit pas conduire à
remettre en cause les compétences du ministère -" la
trinité républicaine " -dans le domaine de l'habilitation
des formations, du statut des enseignants et du caractère national des
diplômes- mais à décharger celui-ci des missions qui sont
déjà assumées pour une très large part par les
universités elles-mêmes (organisation des examens,
activités sportives, services de santé ...) .
- les opérations de prestige, notamment dans le secteur de la recherche,
relèvent plutôt de la responsabilité de l'Etat alors que
les collectivités locales ont un intérêt direct à
investir dans les premiers cycles, afin notamment de réduire
l'échec universitaire ;
- la rénovation des DEUG engagée en 1992 s'est traduite par un
grand nombre d'habilitations nouvelles mais n'a pu être menée
à son terme du fait de son caractère technocratique ;
- les régions ont un rôle essentiel à jouer dans la
réforme des premiers cycles puisqu'elles sont déjà
présentes dans les lycées et qu'elles participent à
l'élaboration du schéma régional des formations qui inclut
la carte des enseignements supérieurs ;
- la situation du système de santé des étudiants
apparaît préoccupante et révèle une sous-utilisation
des centres hospitaliers universitaires en ce domaine ainsi que de grandes
inégalités entre les universités ;
- la création de collèges universitaires n'est pas opportune et
il serait dangereux de déconnecter les premiers cyles de
l'activité de recherche ;
- les délocalisations des premiers cycles doivent rester sous le
contrôle des conseils universitaires ;
- les problèmes de l'insertion des nouveaux étudiants dans les
premiers cycles pourront être réduits à condition de mettre
un terme à un certain gigantisme des constructions, de prévoir un
meilleur encadrement et de faciliter le passage du lycée à
l'université en procurant une aide méthodologique aux
étudiants ;
- l'université française constitue un outil culturel et national
d'intégration, notamment dans les banlieues, avec l'installation des
universités nouvelles qui concourent également à la
politique d'aménagement du territoire ;
- l'effort de professionnalisation des formations supérieures
engagé depuis vingt ans est trop fréquemment ignoré et
pourrait être étendu aux premiers cycles, notamment en utilisant
l'alternance ;
- la réconciliation de la nation avec son université constitue un
préalable à une réforme de l'enseignement
supérieur, mais toute idée de sélection universitaire
serait d'autant moins acceptée par les Français que ceux-ci sont
confrontés au développement du phénomène de
l'exclusion ;
- le développement de l'autonomie des universités, dans le
respect des compétences de l'Etat est souhaitable à condition
qu'il soit procédé à une répartition
équitable des moyens accordés aux établissements ;
- l'orientation des lycéens devrait faire l'objet d'un enseignement
obligatoire à partir de la classe de troisième ;
- il ne serait pas inutile que les futurs étudiants puissent disposer
sur le minitel, lors de leur inscription à l'université, d'une
information complémentaire sur les débouchés des diverses
filières de formation.
VI. MERCREDI 21 FÉVRIER 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La commission a tout d'abord procédé
à
l'audition
de
M. Alain Touraine, professeur à
l'Ecole des hautes études en sciences sociales
.
Dans une observation liminaire,
M. Alain Touraine
a constaté que
tout le monde s'accordait pour considérer que les premiers cycles
universitaires étaient le lieu des échecs principaux de
l'université et que l'existence d'un système universitaire
" dual ", rassemblant d'une part un enseignement supérieur
sélectif et professionnalisé et d'autre part, un secteur
général et ouvert, était à l'origine des
difficultés actuelles.
Il a également rappelé que le secteur sélectif
professionnalisé assurait l'essentiel de la formation aux fonctions
supérieures de notre pays et avait tendance à s'étendre,
des grandes écoles jusqu'aux instituts universitaires de technologie et
aux instituts universitaires de formation des maîtres ; dans le
même temps le secteur non sélectif, qui pendant trente ans a
assuré, selon un système de " capillarité
sociale ", des perspectives d'insertion satisfaisantes se trouve
aujourd'hui confronté, dans une situation de crise économique,
à une massification de l'enseignement supérieur et à des
débouchés incertains, et tend ainsi à devenir une
filière d'échec : la part d'une génération qui
accède en France à l'enseignement supérieur est en effet
désormais supérieure à celle constatée aux
Etats-Unis et deux fois plus élevée que celle observée en
Grande-Bretagne.
Il a également constaté que la poursuite d'études
supérieures correspondait à une attente des familles qui ont
progressivement accédé à la société de
consommation, et noté que le ralentissement de la croissance
économique avait plus particulièrement affecté les
perspectives d'emploi des diplômés du secteur universitaire non
sélectif, notre enseignement supérieur ayant désormais
tendance à contribuer à l'aggravation des
inégalités sociales.
Cette situation dramatique concerne davantage les étudiants
scientifiques des premiers cycles qui sont confrontés à la
concurrence de ceux du secteur sélectif, et se traduit également
par une baisse du niveau dans les cycles généraux de
l'université.
Rappelant qu'il était opposé à toute idée de
sélection qui n'aurait aucun sens dans la situation actuelle de
l'université,
M. Alain Touraine
a estimé qu'il ne
servirait à rien d'apporter une information aux étudiants dans la
mesure où personne ne sait à quoi servent les universités
; celles-ci tendent en effet à privilégier l'offre de leurs
formations au détriment de la demande et ne sont pas en état de
préciser les finalités individuelles et professionnelles de leurs
enseignements. Il a ajouté que les établissements d'enseignement
supérieur ignoraient le devenir professionnel de leurs étudiants
du fait d'une organisation des études qui reste définie par des
enseignants-chercheurs enfermés dans leur seule discipline.
Toute information des étudiants apparaît donc vaine tant que les
universités ne seront pas en mesure de publier un état du devenir
universitaire et professionnel à moyen terme de leurs étudiants.
Il a par ailleurs rappelé que les rapports de la commission nationale
d'évaluation se bornaient à évaluer la qualité
professorale des études mais ne servaient à rien dans les
premiers cycles puisque, à la différence du système
anglais d'évaluation, leurs conclusions n'emportaient aucune
conséquence, notamment financière, pour les établissements
évalués. Il a ainsi estimé nécessaire que chaque
université soit en mesure d'établir et de publier à
l'avenir un état des flux de ses étudiants et de leur devenir, en
fonction de l'évolution du marché du travail et de prendre en
compte les projets universitaires et professionnels de ses étudiants.
Constatant ensuite l'extrême
hétérogénéité des étudiants des
premiers cycles, il a souhaité, outre une information préalable
des bacheliers, une différenciation du contenu des enseignements et la
mise en oeuvre de formations renforcées pour ceux qui souhaitent
poursuivre des études longues, notamment dans les filières
scientifiques, afin de ne pas conférer un quelconque monopole aux
écoles supérieures, notamment dans la formation des
enseignants-chercheurs.
Estimant que l'apprentissage des disciplines universitaires relevait
plutôt, à son sens, des deuxièmes cycles, il a
préconisé une différenciation des premiers cycles qui
privilégierait une " autre organisation du champ du savoir "
dans le domaine de la pratique sociale et l'acquisition de connaissances
synthétiques permettant de répondre à de nouveaux besoins
collectifs notamment en matière d'environnement, de santé
publique et de politique de la ville.
Dans cette perspective, les universités établiraient un catalogue
de formations en fonction des perspectives d'emplois existants ou susceptibles
d'être créés dans l'avenir.
Il a souligné que toute information des étudiants impliquait au
préalable la définition d'une " politique d'emploi "
pour chaque université, établie et rendue publique à
partir de l'évolution des flux d'étudiants, ainsi que
l'organisation d'un audit pour chaque établissement universitaire afin
d'évaluer son efficacité en fonction notamment des demandes de
formation et des besoins existants ou virtuels des employeurs.
S'agissant de la restructuration des études universitaires dans une
perspective d'une meilleure adaptation de l'offre à la demande de
formation, il a estimé qu'opposer l'enseignement général
et l'enseignement professionnel relevait de la rhétorique et que
l'essentiel était d'associer les finalités de ces deux ordres de
formation.
A l'issue de cet exposé, un large débat s'est engagé.
M. Adrien Gouteyron, président
, a souligné la
clarté des propositions avancées et s'est demandé si les
universités disposaient des moyens d'informer leurs étudiants et
de suivre l'évolution de leur carrière universitaire et
professionnelle ; il s'est également interrogé sur leurs
capacités à dispenser des enseignements synthétiques par
" catégories d'actions ", tels que ceux-ci ont
été présentés, compte tenu du fait que les
universitaires restaient formés pour enseigner leur propre discipline.
Soulignant la vigueur de l'analyse présentée et
l'intérêt des mesures préconisées,
M. Ivan
Renar
a cependant rappelé que le mouvement de massification des
premiers cycles traduisait une attente des étudiants et de leur famille,
notamment en matière d'insertion professionnelle et sociale et a
souligné les gâchis qui résultent pour les
intéressés et pour le pays de l'échec universitaire.
Il a également souhaité obtenir des précisions quant aux
modalités de mise en oeuvre des propositions formulées.
M. André Maman
s'est inquiété d'une
éventuelle régionalisation de l'enseignement supérieur, a
souligné la difficulté de prévoir des flux d'emploi compte
tenu de l'évolution rapide des qualifications requises sur le
marché du travail et a souhaité obtenir des précisions sur
le niveau comparé des formations professionnalisantes en France et aux
Etats-Unis.
Répondant à ces interventions,
M. Alain Touraine
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- si le problème de l'insertion professionnelle des étudiants ne
relève pas exclusivement de l'université, cette dernière
contribue cependant au désordre général en refusant de se
préoccuper de l'évolution des perpectives générales
du marché de l'emploi alors qu'il serait de sa responsabilité
d'inventer des formations qui optimiseraient les chances des étudiants
de trouver un métier ;
- la formation à de nouvelles " fonctions d'action "
supposerait une organisation multidisciplinaire des programmes et des concours
de recrutement des enseignants, une approche synthétique des
enseignements dispensés et une attitude des responsables universitaires
qui privilégierait la demande plutôt que l'offre de formation ;
- il convient d'exclure toute idée de sélection et de
préprofessionnalisation dans les premiers cycles : les premiers cycles
doivent s'orienter vers des formations multidisciplinaires plutôt que
vers des formations professionnelles pointues coupées de tout lien avec
la réalité sociale et économique ;
- les formations des premiers cycles doivent être diversifiées
selon les perspectives d'insertion professionnelle ou de poursuite
d'étude des étudiants et n'ont pas pour vocation de
déboucher exclusivement sur des emplois locaux ou régionaux ;
- le système universitaire américain est en retard par rapport au
nôtre pour les formations professionnalisées intermédiaires
et se caractérise par de très grandes inégalités
entre les universités ;
- la délocalisation des premiers cycles, qui s'est
développée malgré l'opposition du monde universitaire,
répond à une demande de formations de proximité des
étudiants et de leurs familles mais contribue à renforcer les
inégalités sociales ;
- la massification de l'enseignement supérieur peut également
être analysée comme la manière la plus intelligente de
maintenir les privilèges : les premiers cycles sont en effet
" tirés par le bas " par la crise économique et leurs
étudiants sont voués tout particulièrement à
l'échec universitaire ;
- la mise en place de nouvelles formations multidisciplinaires destinées
à satisfaire des besoins collectifs n'a rien d'irréaliste,
notamment dans le domaine de la santé publique, de la politique de la
ville et de l'environnement ;
- en utilisant pleinement leur autonomie, et la compétence des
recteurs-chanceliers, les universités doivent pouvoir mettre en place
des " plans emploi " permettant d'assurer une information
et une
orientation convenable des étudiants.
La mission a ensuite procédé à l'audition de
MM. Jean Garagnon, président, Christian Merlin,
vice-président, et Sylvère Chirache, secrétaire
général du Haut comité
éducation-économie.
Après avoir rappelé la vocation du Haut comité,
M. Jean Garagnon
a précisé que cet organisme ne
s'était pas spécifiquement prononcé sur le problème
de l'information et de l'orientation des étudiants des premiers cycles
universitaires, mais que cette question restait sous-jacente dans les
réflexions engagées depuis plusieurs années.
Il a indiqué que l'étude menée par le Haut comité,
selon les divers types de baccalauréat, avait confirmé que les
bacheliers des séries A, B, C et D connaissaient un taux de
réussite satisfaisant dans les premiers cycles tandis que les bacheliers
technologiques étaient particulièrement concernés par
l'échec universitaire.
Il a ensuite souligné l'hétérogénéité
des étudiants des premiers cycles et rappelé que l'enseignement
supérieur général avait été conçu
à l'origine pour les bacheliers généraux, tandis que les
STS et les IUT étaient destinés aux bacheliers technologiques.
Observant que les filières sélectives professionnalisées
étaient désormais investies par les bacheliers
généraux de bon niveau et que les bacheliers technologiques se
trouvaient en conséquence en situation d'échec dans des premiers
cycles généraux inadaptés à leur formation, il a
rappelé que 15 % d'une tranche d'âge, soit
125.000 jeunes, quittaient sans diplôme autre que le
baccalauréat le système universitaire dans les trois
années suivant leur entrée à l'université. En
ajoutant les candidats recalés au baccalauréat, c'est environ le
quart d'une classe d'âge qui sort du système éducatif sans
aucun diplôme universitaire.
Afin de répondre à cette situation préoccupante qui
s'expliquerait pour certains par une sélectivité excessive des
premiers cycles, des mesures ont été adoptées au cours des
années récentes pour réduire l'échec
universitaire : il en est résulté une légère
amélioration du taux de réussite des bacheliers technologiques
mais aussi un certain déplacement du problème de l'échec
universitaire vers les deuxièmes cycles.
Il a par ailleurs rappelé que le " bac pro " avait
été conçu à l'origine pour déboucher sur la
vie active et a estimé que l'information des lycéens était
particulièrement nécessaire pour orienter de manière
satisfaisante les bacheliers professionnels et technologiques, tandis que les
responsables des STS et des IUT devraient être incités à
accueillir une proportion plus importante de ces derniers.
A l'issue de cet exposé, un large débat s'est engagé.
Constatant que le dispositif d'orientation des divers types de bacheliers avait
en effet été détourné de sa vocation initiale,
M. Jean-Claude Carle
s'est interrogé sur les moyens d'y
remédier en notant par ailleurs que l'intelligence abstraite
était valorisée de manière excessive dans notre
système éducatif.
Il a également souligné l'inadaptation du " bac pro "
aux besoins des entreprises en observant que la filière tertiaire
était choisie par la moitié des élèves, alors que
ses débouchés sont aujourd'hui inexistants.
Il a enfin préconisé une meilleure adaptation des formations aux
besoins des entreprises, par le biais notamment des programmes régionaux
des formations, et souhaité un renforcement des centres d'information et
d'orientation ainsi qu'une formation spécifique des enseignants aux
réalités économiques, notamment au sein des IUFM.
M. André Maman
s'est inquiété de l'origine sociale
des quelque 125.000 élèves qui sortent sans diplôme du
système éducatif et s'est demandé si le principe du libre
accès à l'université ne constituait pas un moyen
détourné pour écarter ces jeunes d'origine modeste de
toute formation supérieure en les condamnant à l'échec.
Il s'est également interrogé sur les possibilités de
développer l'information des lycéens, sur la mise en place d'un
système efficace de sélection-orientation afin de réduire
l'échec dans les premiers cycles, et sur l'institution éventuelle
de tests d'évaluation permettant d'orienter les nouveaux
étudiants en fonction de leurs capacités.
Rappelant qu'il avait été le rapporteur à
l'Assemblée nationale de la loi Haby,
M. Jacques Legendre
a
indiqué que celle-ci comportait des dispositions qui n'ont jamais
été appliquées et qui devaient permettre aux
lycéens de choisir des modules de formation adaptés aux
différentes filières de l'enseignement supérieur.
Remarquant que tous les baccalauréats permettaient d'accéder
à l'enseignement supérieur, mais avec des chances de
réussite très inégales, il a souhaité que leur
définition et que leurs options soient mieux adaptées aux
diverses filières universitaires.
Il a ensuite estimé que la localisation des sites universitaires
constituait en soi un facteur d'orientation des étudiants, s'est
demandé si la multiplication des antennes universitaires avait
constitué un progrès ou au contraire un piège redoutable,
de nature à aggraver l'échec dans les premiers cycles, et s'est
interrogé sur l'efficacité du système d'orientation
scolaire et universitaire.
Il a ajouté que le plan quinquennal de formation professionnelle qu'il
avait présenté en 1980, et qui a été
abandonné après 1981, prévoyait déjà une
formation diplômante avant toute sortie du système
éducatif, une diversification du recrutement des orienteurs, qui devrait
bénéficier en outre de stages en entreprise, et une
préparation progressive des élèves à l'exercice
d'un choix professionnel.
Il a également dénoncé une " psychologisation "
excessive des orienteurs et s'est demandé s'il ne conviendrait pas
d'envisager un rapprochement des conseillers d'orientation relevant de
l'éducation nationale et des conseillers professionnels de l'ANPE.
Il s'est inquiété d'une " secondarisation "
éventuelle des premiers cycles et d'une remise en cause des
délocalisations universitaires qui ont contribué, notamment dans
sa région, à la démocratisation de l'enseignement
supérieur et a souhaité que soit recherchée une
coordination entre les filières supérieures, notamment par la
création de passerelles.
Il a enfin rappelé que la région du Nord-Pas-de-Calais
connaissait plusieurs types d'organisation universitaire, multipolaire pour les
universités nouvelles d'Artois et du Littoral, ou offrant une large
gamme de formations de premiers cycles sur un même site.
M. Adrien Gouteyron, président,
a estimé qu'il convenait
de distinguer l'orientation de la sélection et a indiqué que la
mission aurait le souci de proposer des solutions réalistes pour
réduire l'échec dans les premiers cycles, en tenant compte de la
dimension politique qui s'attache à tout aménagement
éventuel des textes en vigueur régissant l'organisation de notre
enseignement supérieur.
Il s'est ensuite interrogé sur les solutions préconisées
pour réformer les premiers cycles, en notant qu'une
" secondarisation " se heurterait à l'opposition des milieux
universitaires.
Il a enfin demandé si les problèmes des premiers cycles
n'allaient pas se poser en termes différents dans les années
à venir du fait de l'évolution à la baisse de la
démographie universitaire, si le Haut comité
éducation-emploi serait consulté pour la définition des
schémas régionaux de l'enseignement supérieur et de la
recherche et si la stabilisation des effectifs des étudiants des
premiers cycles ne permettrait pas de renforcer leur encadrement et par
là de réduire leur taux d'échec.
Répondant à ces interventions,
MM. Jean Garagnon,
Christian Merlin et Sylvère Chirache
ont notamment apporté
les précisions suivantes :
- tout aménagement en matière d'enseignement supérieur
apparaît comme un compromis entre le courage et l'habileté :
le précédent ministre chargé de l'enseignement
supérieur a été ainsi contraint, sous la pression des
étudiants, de retirer une circulaire qui ne faisait que rappeler les
textes en vigueur en matière d'organisation des études au sein
des filières sélectives professionnalisées ;
- les structures actuelles des premiers cycles sont mal adaptées
à l'hétérogénéité des
étudiants et pour apporter une réponse à ceux qui sont en
difficulté ;
- l'article 54 de la loi quinquennale pour l'emploi a permis
d'expérimenter des formules de rattrapage pour les étudiants qui
se sont fourvoyés dans les premiers cycles généraux ;
- la grande majorité des titulaires de " bac G ", qui
proviennent souvent de milieux défavorisés, enregistrent un
échec massif dans les premiers cycles universitaires ;
- il est préférable de convaincre les lycéens du bien
fondé d'une orientation que de leur interdire l'accès à
telle ou telle filière ;
- les premiers cycles ne sont pas exagérément sélectifs
puisque le taux de réussite y est de 80 % pour les bacheliers A et
C : il convient de rappeler aux lycéens la vocation initiale des
différents types de baccalauréat et de ne pas entretenir
l'illusion selon laquelle les trois formules seraient équivalentes pour
la poursuite d'études supérieures ;
- la plupart des jeunes sont réalistes sur leurs chances de
réussite universitaire et procèdent trop fréquemment
à des " choix par défaut ", en se repliant sur les
filières générales, faute d'avoir été
acceptés en STS ou en IUT ;
- si les universités devraient pouvoir définir des
prérequis pour les nouveaux étudiants dans certaines formations,
elles en sont empêchées par la loi de 1984 que les tribunaux
administratifs entendent strictement : ont été ainsi
jugées illégales les épreuves organisées par les
établissements pour contrôler les capacités physiques des
candidats aux filières sportives ;
- l'orientation scolaire et universitaire constitue l'un des points faibles du
système éducatif, du fait notamment d'une dérive
" psychologisante " des conseillers d'orientation ;
- une articulation est souhaitable en matière d'orientation entre les
lycées et les universités mais les universitaires
répugnent à s'engager dans cette mission ;
- le déficit d'information sur les filières et les métiers
constitue l'obstacle principal à l'élaboration d'un projet
professionnel, ou de poursuite d'études, par les
élèves ;
- le rapprochement entre les conseillers d'orientation et l'ANPE pourrait
constituer une piste intéressante pour l'information des
élèves mais les milieux professionnels ont pour l'instant
plutôt privilégié le recours aux professeurs principaux de
collège et à certains professeurs de lycée, en les
sensibilisant aux problèmes de recrutement dans certains métiers,
notamment constatés au plan local ;
- la délocalisation généralisée des premiers cycles
s'est effectuée notamment sous la pression des collectivités
locales qui ont tendance aujourd'hui à demander la création de
deuxièmes et troisièmes cycles alors que ces sites universitaires
ne justifient pas d'une masse critique d'étudiants nécessaire
pour les activités de recherche ; cette délocalisation
concerne surtout des DEUG littéraires ou juridiques qui constituent des
formations de proximité peu coûteuses mais inadaptées aux
besoins de l'économie locale ;
- une secondarisation éventuelle des premiers cycles permettrait de
s'appuyer sur le " maillage " serré des lycées, sur
l'expérience des classes supérieures et préparatoires et
de développer des formations de proximité, en autorisant des
réorientations ultérieures des étudiants ;
- le traitement de l'échec universitaire dans les premiers cycles
pourrait résulter soit de la mise en place d'une sélection
à l'entrée de l'université, soit d'une amélioration
du fonctionnement des établissements qui se traduirait cependant par un
transfert de l'échec universitaire dans les deuxièmes cycles qui
sont déjà touchés par une certaine perte
d'efficacité interne ;
- l'idée d'une sélection postérieure à
l'entrée à l'université serait susceptible d'être
envisagée soit à l'issue de la première année
d'études, soit à l'entrée en deuxième cycle mais
poserait la question de l'avenir des jeunes écartés des premiers
cycles et conduirait à ouvrir davantage les filières
sélectives de la voie technologique ;
- un système d'évaluation des capacités des
étudiants à l'aide de tests a été
expérimenté dans la région Rhône-Alpes sur le
modèle nord-américain ;
- le " bac pro " n'a jamais été envisagé
à l'origine pour permettre la poursuite d'études
supérieures, alors que 30 % de bacheliers professionnels s'engagent
aujourd'hui dans l'enseignement supérieur ;
- l'amélioration de la situation de l'emploi se traduirait
nécessairement par une réduction du mouvement en faveur de la
poursuite d'études supérieures ;
- la participation du Haut comité éducation-économie
à l'élaboration des schémas régionaux de
l'enseignement supérieur et de la recherche relèverait d'une
décision du ministre ;
- l'évolution à la baisse de la population étudiante se
traduira par un " cylindrage " des effectifs entre les
deuxièmes et troisièmes cycles qui est d'ores et
déjà observé dans les universités parisiennes.
VII. MERCREDI 6 MARS 1996
- Présidence de M. Adrien Gouteyron, président.
- La mission a tout d'abord procédé à
l'audition de M.
Claude Thélot, directeur de l'évaluation et de la prospective.
M. Claude Thélot
a d'abord présenté les
résultats de l'expérience originale qu'il avait initiée et
consistant à faire passer l'examen de certificat d'études
primaires à 6.000 collégiens en les soumettant à une
sélection d'épreuves de français et de
mathématiques identiques à celles données aux
écoliers des années vingt.
Abordant ensuite l'objet même de la mission d'information,
M. Claude Thélot
a rappelé que 57 % des
étudiants inscrits au DEUG passaient en licence dans la discipline
choisie lors de leur entrée à l'université et a
indiqué que ce taux de réussite non négligeable devait
être comparé à celui des IUT, des BTS (75 %) et des
classes préparatoires scientifiques (60 %).
Il a ainsi estimé qu'il convenait de relativiser le problème de
l'échec universitaire dans les premiers cycles en soulignant que cet
échec était plutôt celui de l'entrée dans
l'enseignement supérieur que celui du DEUG lui-même, d'autant que
de nombreux étudiants qui n'accèdent pas à la licence se
réorientent vers d'autres filières supérieures (BTS, IUT,
écoles d'architecture, formations artistiques ou
paramédicales...) et que les autres auront retiré quelque chose
de leur passage à l'université. Il a ajouté que 75 %
des bacheliers technologiques ne passaient pas en licence, ce pourcentage plus
important commandant de développer l'information et l'orientation des
lycéens avant leur entrée dans l'enseignement supérieur.
Il a ensuite exposé les principales conclusions de deux enquêtes
récentes menées par la direction de l'évaluation et de la
prospective (DEP) sur l'information et l'orientation des élèves
de terminale et des étudiants de première année et qui
peuvent être ainsi résumées :
- les lycéens et les étudiants s'estiment sous-informés
pour choisir une filière supérieure, même s'ils ont
bénéficié d'une information multiforme, quelque peu
diffuse et vague, recueillie auprès des conseillers d'orientation mais
surtout des parents et de leurs professeurs et obtenue à l'issue d'une
démarche personnelle : deux tiers d'entre eux auraient ainsi
participé à des journées d'information organisées
dans les lycées ou à des manifestations
spécialisées ;
- l'orientation des étudiants découlerait d'abord d'un
intérêt pour les filières choisies alors que le
problème des débouchés, du contenu et du niveau requis
pour ces filières ne semble avoir été pris en compte que
d'une manière vague et incomplète ;
- le tiers des élèves ont pris leur décision d'orientation
avant la classe de terminale, la moitié en cours d'année et un
huitième après le baccalauréat ;
- 25 % des étudiants déclarent regretter ensuite cette
orientation du fait notamment d'un niveau scolaire insuffisant et d'une
méconnaissance du monde universitaire et la moitié d'entre eux,
compte tenu de ces éléments, auraient choisi une autre
filière ;
- la moitié des étudiants entrés dans les filières
universitaires générales déclarent éprouver des
difficultés à suivre un enseignement supérieur du fait
notamment d'un encadrement insuffisant qui ne les incite pas à
travailler.
A cet égard,
M. Claude Thélot
a considéré
que le devoir des responsables était de rappeler aux bacheliers
professionnels que le " bac pro " était un diplôme
d'insertion professionnelle et n'était pas adapté à la
poursuite d'études supérieures ;
- la moitié des lycéens et étudiants consultés
estiment qu'une orientation plus sélective à l'entrée dans
l'enseignement supérieur serait une bonne chose tandis que l'autre
moitié y est opposée, cette dernière proportion
étant en progression par rapport à une enquête
effectuée en 1990 : les étudiants sont ainsi conscients des
risques d'échec en DEUG mais tiennent à tenter cette
expérience universitaire.
En conclusion,
M. Claude Thélot
a estimé qu'il convenait
de ne pas exagérer le discours tenu sur l'échec dans les premiers
cycles et a rappelé que les étudiants concernés retiraient
quelque chose de leur passage à l'université, que leur salaire
d'embauche était plus élevé que celui proposé aux
bacheliers entrant directement dans la vie active et que leur situation pouvait
être comparée, dans une certaine mesure, à celle des
élèves de classes préparatoires qui n'intègrent pas
les écoles supérieures.
Afin de réduire cependant la fréquence de ce type de cursus
universitaire, qui ne peut être assimilé à un échec
total, il conviendrait de développer l'information et d'aider à
l'orientation des lycéens et étudiants.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est engagé.
Remerciant d'abord M. Claude Thélot pour ces informations
inédites,
M. Adrien Gouteyron, président,
a
demandé si les pourcentages cités d'échec dans les DEUG
concernaient l'ensemble des bacheliers et au bout de combien d'années
cet échec était constaté.
M. Ivan Renar
a souhaité obtenir des précisions sur la
représentativité des échantillons qui avaient permis
d'établir les taux de réussite dans les premiers cycles. S'il est
convenu qu'il ne fallait pas exagérer l'importance de l'échec
universitaire, il s'est enquis du devenir professionnel et social des
étudiants qui abandonnaient leurs études et a rappelé
qu'une sélection " sauvage " de fait s'exerçait dans
l'enseignement supérieur.
Il a par ailleurs exprimé quelque étonnement à
l'égard des appréciations portées sur le sort des
étudiants en situation d'échec et sur le niveau des salaires dont
ils pourraient bénéficier lors de leur premier emploi, notamment
dans des fonctions subalternes. Il a enfin remarqué que les
étudiants de premier cycle réclamaient un encadrement
universitaire de type secondaire.
M. Daniel Eckenspieller
s'est félicité que les choix des
filières universitaires par les étudiants s'effectuent en
fonction de l'intérêt présenté par ces études
mais a remarqué que cette tendance apparaissait quelque peu
contradictoire avec une politique d'orientation.
Il s'est par ailleurs inquiété des conséquences d'un libre
choix sur le niveau général de l'enseignement dispensé
dans des filières où beaucoup d'étudiants se trouvent
rapidement en difficulté.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
s'est demandé si le
renforcement de l'évaluation du système universitaire ne
constituait pas un préalable à la mise en place d'une
véritable politique d'information et d'orientation des étudiants.
Il a souhaité obtenir des précisions sur l'évolution de la
démographie étudiante à court terme dans les
différents cycles universitaires, sur une éventuelle
" secondarisation " des premiers cycles et sur les
conséquences d'une extension de l'apprentissage aux formations
supérieures, compte tenu notamment des capacités d'accueil des
entreprises.
Il a enfin souligné que les critères de recrutement des
entreprises ne recouvraient pas les formations dispensées à
l'université.
M. Jean-Claude Carle
s'est demandé si des expérimentations
ne pourraient pas être engagées pour renforcer l'encadrement des
étudiants des premiers cycles et si le faible rôle des conseillers
d'orientation auprès des lycéens ne résultait pas d'une
implantation inadaptée et insuffisante dans les établissements
scolaires.
Répondant à ces interventions,
M. Claude Thélot
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- le pourcentage des étudiants qui ne passent pas en licence dans leur
discipline s'élève à 75 % pour les bacheliers
technologiques tandis que 63 % des bacheliers généraux
accèdent aux deuxièmes cycles universitaires, cette proportion
restant très faible pour les bacheliers professionnels ;
- la moitié des étudiants qui obtiennent un DEUG le
réussissent en deux ans alors que les changements d'orientation tendant
à allonger la durée nécessaire pour obtenir ce
diplôme ;
- les enquêtes qualitatives relatives aux modalités d'orientation
ont porté sur des échantillons représentatifs importants
(1.600 étudiants et 700 élèves de terminale) ;
- le niveau scolaire des étudiants, à la différence de
celui des élèves de l'enseignement secondaire, n'a pas fait
l'objet d'une évaluation : les tests menés depuis une
vingtaine d'années lors de l'incorporation au service national
révèlent cependant une stabilité générale de
ce niveau, notamment pour les bacheliers et les bac + 2 ou plus,
tandis que les agrégés, les docteurs et les ingénieurs des
grandes écoles obtiennent des résultats supérieurs
à ceux constatés il y a vingt ans ;
- une évaluation du niveau des élites scolaires engagée il
y a deux ans par la DEP, et intégrant les jeunes filles, traduit un
niveau aujourd'hui supérieur à celui constaté
régulièrement depuis la fin de la guerre, notamment dans le
domaine de l'utilisation des connaissances et de l'originalité de la
réflexion ;
- les études de l'INSEE montrent que le salaire moyen dépend
moins du diplôme que du niveau d'études ;
- une étude récente de la DEP sur l'insertion professionnelle des
jeunes diplômés de l'enseignement supérieur
révèle que la durée du processus d'insertion s'est
allongée mais que leur taux de chômage reste limité :
cinq ans après la fin de leurs études, les titulaires du seul
baccalauréat général sont pour 30 % cadres ou
techniciens, 45 % employés ou ouvriers, 12 % au chômage
et 13 % sans activité professionnelle ; pour les titulaires
d'une licence, d'une maîtrise ou d'un doctorat, 79 % sont cadres,
techniciens ou professeurs, 8 % employés ou ouvriers, 7 %
chômeurs et 6 % sans activité professionnelle ;
- l'évaluation du système universitaire reste embryonnaire et
doit être développée, en évitant de laisser cette
mission à la seule responsabilité des universités ;
cette évaluation ne constitue pas un préalable à la mise
en place d'une politique d'information et d'orientation des étudiants
mais apparaît plutôt complémentaire et devrait par ailleurs
permettre de comparer les établissements ;
- la DEP effectue des prévisions à court et à long terme
sur l'évolution de la démographie étudiante afin notamment
de préparer les rentrées universitaires : ces études
prévoient en particulier, non pas une baisse du nombre des
étudiants mais une croissance plus faible de leurs effectifs dans les
dix ans à venir ;
- la société française semble s'accommoder d'une
sélection " souterraine " à l'université ;
- les employeurs, y compris dans le secteur public, ne jouent pas le jeu de
l'alternance et se disent submergés par des demandes de stages, par
ailleurs mal organisés sur l'année et dont l'utilité est
parfois contestable ;
- s'il convient de rester attentif aux besoins de l'économie,
l'université n'a pas pour vocation exclusive de satisfaire la demande
des entreprises privées ;
- la mission des conseillers d'orientation psychologues doit être
précisée et leur présence mieux assurée dans les
établissements, mais leur compétence en matière
d'orientation ne doit pas être exclusive, afin d'éviter toute
professionnalisation de cette fonction qui devrait en priorité
être assurée par les enseignants.
La commission a ensuite procédé à
l'audition de M.
Vincent Merle, directeur du Centre d'études et de recherches sur les
qualifications
(CEREQ).
Après avoir rappelé le statut et les missions du CEREQ,
M.
Vincent Merle
a indiqué que celles-ci s'exerçaient
aujourd'hui, après une période de plein emploi et de
pénurie de main d'oeuvre qualifiée, dans une conjoncture
dominée par le chômage et la précarité.
Il a ensuite précisé que le CEREQ procédait à trois
grands types d'enquêtes sur le devenir des sortants du secteur
éducatif et notamment sur celui des jeunes bacheliers et des
diplômés de l'enseignement supérieur, dans les trois ou
quatre ans suivant l'obtention de leurs diplômes ; ces
enquêtes permettent d'appréhender avec le recul nécessaire
le lien existant entre les filières, les diplômes et l'insertion
professionnelle des intéressés.
Il a ensuite estimé que l'opinion publique et la presse avaient tendance
à dramatiser les perspectives d'emploi des jeunes diplômés
de l'université, en raison notamment d'un décalage explosif qui
existerait entre les flux de sorties et le nombre des postes d'encadrement
proposés, du développement de la poursuite d'études
supérieures, de la désaffection à l'égard des
filières professionnelles et des taux d'échec dans les deux
premières années universitaires.
Convenant que ces indicateurs étaient en effet défavorables, il a
rappelé néanmoins que l'enquête du CEREQ de 1992 avait
relativisé le risque de chômage et de déclassement des
diplômés de l'enseignement supérieur. Le taux de
chômage des diplômés deux ans après la sortie de
l'université est passé de 5 % à près de
11,5 % de 1988 à 1992 et le phénomène du
déclassement de ces diplômés s'est également
aggravé : alors que 91 % des diplômés d'IUT et de
BTS trouvaient un emploi de type professions intermédiaires ou cadres en
1988, ce pourcentage est tombé à 73 % en 1991. Les
données de l'INSEE confirment cette dégradation de l'emploi des
diplômés, et révèlent qu'an an après leur
sortie du système éducatif, 23 % des titulaires d'une
licence, ou plus, étaient au chômage, étant rappelé
que 78 % des jeunes de niveau V (titulaires d'un CAP et d'un BEP ou
dépourvus de tout diplôme) sont dans le même temps à
la recherche d'un emploi.
En dépit de cette évolution préoccupante, il a
estimé que le mouvement de poursuite d'étude traduisait une
réalité : le diplôme protège contre le chômage
même si ses effets sont aujourd'hui amoindris. Tous les
diplômés sont aujourd'hui concernés par les
difficultés et la précarité de l'emploi, y compris ceux de
troisième cycle, cette évolution se traduisant plutôt pour
ces derniers par une prolongation des délais de recherche d'un emploi et
un effet de déclassement qui reste limité.
Il a ajouté que la dégradation actuelle de l'emploi des
diplômés résultait des mesures conjoncturelles prises
à la fin des années 80 pour remédier à la
pénurie de main d'oeuvre qualifiée, notamment en faveur des
ingénieurs et des techniciens supérieurs et par les
conséquences de l'ouverture du baccalauréat, alors que la
conjoncture en matière d'emploi s'est aujourd'hui retournée. Dans
le même temps, un déphasage s'est accentué entre les flux
de sortie de l'enseignement supérieur et les débouchés
offerts en matière d'encadrement.
Il a cependant estimé que les perspectives à moyen terme
inclinaient à l'optimisme : 50 % des jeunes d'une classe
d'âge accèdent en effet aujourd'hui à l'enseignement
supérieur ; cette proportion équivaut à celle des
ingénieurs cadres et professions intermédiaires alors que la
proportion des cadres " montés par le rang " est en
constante
diminution depuis dix ans. Il a toutefois indiqué que le problème
de l'insertion professionnelle des diplômés de l'enseignement
supérieur serait difficile à gérer dans les dix ans
à venir et, notamment, celui de leur déclassement professionnel,
en raison de l'impossibilité de gérer les flux d'entrée
à l'université.
Il a ensuite rappelé que le phénomène de poursuite
d'études supérieures concernait également les
diplômés d'IUT et de BTS et tendait à détourner ces
formations courtes de leur objectif initial d'insertion professionnelle.
Il a ajouté qu'il était difficile sur le plan statistique
d'estimer l'importance de l'échec universitaire dans les premiers cycles
du fait que de nombreux étudiants y sont en position d'attente et
procèdent à des orientations ultérieures.
Il a ainsi indiqué que d'après l'enquête menée par
le CEREQ en 1988, 61 % des étudiants de premier cycle avaient
obtenu un DEUG entre deux et quatre ans, 19 % s'étaient
réorientés vers des BTS, des IUT ou des formations
paramédicales, 11 % étaient resté en premier cycle et
9 % avaient abandonné leurs études supérieures et a
souligné que cette évolution était encore plus
inquiétante pour les bacheliers technologiques qui devraient en
priorité bénéficier d'une véritable politique
d'orientation.
Il a ajouté que depuis vingt ans, les conditions de l'insertion
professionnelle des diplômés de l'enseignement supérieur
avaient été profondément modifiées : alors que
la majorité des diplômés se dirigeaient vers le secteur
public ou les professions réglementées, la moitié des
titulaires de maîtrise et de licence et 70 % des
diplômés de troisième cycle se tournent aujourd'hui vers
les entreprises privées.
En conclusion, il a estimé que la professionnalisation de l'enseignement
supérieur constituait un enjeu majeur et a souligné à cet
égard le caractère novateur des instituts universitaires
professionnalisés.
Il a également indiqué que les jeunes ne s'orienteraient vers les
filières professionnelles que si celles-ci devenaient crédibles
et pouvaient leur assurer une insertion professionnelle satisfaisante. A cet
égard, il serait souhaitable que les entreprises permettent aux
techniciens supérieurs, au cours de leur carrière,
d'accéder aux fonctions d'encadrement.
Un débat a suivi.
M. Daniel Eckenspieller
a rappelé, outre le déclassement
évoqué des diplômés de l'enseignement
supérieur, que la majorité de ceux-ci étaient conduits
à exercer une activité professionnelle éloignée de
leur formation initiale.
M. Jean-Claude Carle
est convenu que le diplôme universitaire
protégeait des risques du chômage, et a souligné
l'inadaptation de certaines formations tertiaires aux besoins des entreprises.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
s'est demandé si
l'évaluation du système universitaire ne constituait pas un
préalable à la mise en oeuvre d'une politique d'information et
d'orientation des étudiants et si les entreprises seraient en mesure de
répondre à une éventuelle extension de l'apprentissage
dans les formations supérieures.
Il s'est ensuite interrogé sur les modalités d'une
diversification des formations courtes post-baccalauréat et sur les
solutions qui seraient de nature à améliorer l'information et
l'orientation des lycéens et des étudiants et à
réduire l'échec dans les premiers cycles, soit par une certaine
sélection, soit par un réaménagement de l'organisation des
études universitaires.
Il a demandé si une meilleure adaptation des diplômes aux besoins
actuels et futurs des entreprises ne pourrait pas résulter d'une
association des milieux professionnels à la définition des
formations.
Il a enfin évoqué la perspective d'une
" secondarisation " des premiers cycles universitaires et
s'est
interrogé sur l'opportunité d'une extension du système de
protection sociale des étudiants aux apprentis.
M. Adrien Gouteyron, président,
s'est interrogé sur le
rôle que pourraient jouer les entreprises dans la définition des
formations, sur le développement de l'apprentissage dans l'enseignement
supérieur et sur le coût qui en résulterait pour les
entreprises. Il s'est ensuite demandé si les réorientations en
cours d'études ne pourraient pas être encouragées par des
dispositions incitatives, notamment en aménageant le régime des
bourses.
Il s'est enfin enquis des rapports entretenus par le CEREQ avec ses deux
ministères de tutelle et a estimé que l'Etat ou les
régions devraient jouer un rôle actif dans la définition de
la carte des formations.
Répondant à ces interventions,
M. Vincent Merle
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- au lieu d'opposer les filières professionnelles et
générales et de chercher à créer une grande
filière technologique supérieure, il conviendrait de
réfléchir aux moyens d'introduire la technologie à
l'université qui, si elle doit permettre d'acquérir des
connaissances générales, doit être aussi un lieu
d'initiation au monde contemporain ;
- il serait illusoire de vouloir freiner la demande éducative de
l'ensemble des bacheliers, y compris des bacheliers professionnels ;
- les métiers industriels et artisanaux enregistrent un déficit
de candidatures et d'offres de formation notamment de niveau V, alors que les
CAP et les BEP tertiaires sont surabondants mais concurrencés sur le
marché du travail par les bacheliers et les BTS ;
- de nouveaux emplois devraient cependant être créés dans
le secteur tertiaire, notamment en matière d'accueil et d'aides à
domicile ;
- un système d'évaluation des universités,
privilégiant l'étude du devenir des diplômés,
devrait, au-delà du seul aspect quantitatif, prendre en compte la
dimension concrète de l'insertion professionnelle, notamment pour les
emplois éloignés des formations dispensées à
l'université ;
- l'introduction de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur, qui
reste symbolique, est de nature à faciliter l'insertion professionnelle
des diplômés, mais a aussi pour conséquence de remettre en
cause le contenu et les modalités de l'enseignement universitaire,
compte tenu de l'expérience acquise par les étudiants dans les
entreprises ;
- le développement de l'alternance risque d'entraîner un certain
alignement des formations supérieures sur les besoins ponctuels des
entreprises et de réduire la disponibilité des étudiants
pour leurs études : la mise en place d'une année pratique
complémentaire à l'issue de la licence pourrait constituer une
solution plus satisfaisante ;
- la réduction de l'échec dans les premiers cycles passe par une
sensibilisation des lycéens au monde universitaire qui permettrait de
réduire les orientations " par défaut " et l'engouement
artificiel pour certaines filières jugées faciles, mais
présentant peu de débouchés ;
- l'affectation d'enseignants plus expérimentés dans les DEUG et
la mise en place de premiers cycles multidisciplinaires d'observation et
d'orientation seraient de nature à assurer une meilleure organisation
des études ;
- les PME et les grandes entreprises devraient engager une véritable
politique d'accueil des jeunes diplômés, notamment lorsque leur
diplôme n'est pas directement adapté aux qualifications
requises ;
- si les contacts établis entre les pédagogues et les
représentants des professions sont souvent fructueux, il convient de
remarquer que ces derniers sont parfois éloignés des
réalités de l'entreprise ;
- l'extension du régime social étudiant aux apprentis serait
valorisante pour cette filière mais risquerait d'entraîner un
certain nombre d'effets pervers comme l'a montré le
précédent du baccalauréat professionnel ;
- la tutelle exercée sur le CEREQ est actuellement équitablement
partagée entre les deux ministères concernés alors que le
poids de l'éducation nationale était plus important il y a une
dizaine d'années ;
- les rectorats et les assemblées locales jouent un rôle
régulateur dans l'évolution de la carte des formations mais il
est souhaitable que les établissements d'enseignement prennent en compte
leur environnement social et économique.
VIII. MERCREDI 20 MARS 1996
- Présidence de M. Adrien Gouteyron, président.
- La commission a tout d'abord procédé à l'audition de
M. Ivar Ekeland, président de la commission consultative
nationale des instituts universitaires de technologie (IUT) et des instituts
universitaires professionnalisés (IUP), de M. Gilles Raynaud,
vice-président, chargé de la commission IUP, et de
M. Jean-Pierre Finance, vice-président, chargé de la
commission IUT.
Après avoir précisé que la commission consultative
nationale des IUT et des IUP avait été créée en
septembre 1995,
M. Ivar Ekeland
a rappelé que les instituts
universitaires de technologie dispensaient des formations à bac + 2
organisées selon des programmes établis par les commissions
pédagogiques nationales et que la commission nationale des IUT ne jouait
aucun rôle dans l'habilitation de ces formations.
Il a ensuite indiqué que les instituts universitaires
professionnalisés, créés en 1991 pour recruter des
étudiants à bac + 1, comportaient trois années
d'études et que la commission nationale des IUP avait au contraire un
rôle consultatif important en matière d'habilitation des
formations, dont la durée est limitée à quatre ans, et
avait permis d'établir en son sein un dialogue fructueux entre le monde
universitaire et les représentants du monde de l'entreprise. La nouvelle
commission nationale qui coiffe les deux types d'instituts est
constituée de deux sous-commissions reprenant les prérogatives
des commissions antérieures et permet de porter un regard
général sur les enseignements universitaires technologiques et
professionnalisés, ces derniers ayant une vocation d'insertion
professionnelle immédiate.
Cette commission est constituée de présidents
d'université, de directeurs d'IUT et d'IUP et de représentants
des organisations professionnelles d'employeurs, de salariés,
d'enseignants et d'étudiants.
M. Gilles Raynaud
a souligné le caractère
indépendant de cette nouvelle commission et son rôle consultatif
en matière de création d'IUP et d'habilitation des formations,
qui dépendent largement de la demande des branches professionnelles.
La commission a également un rôle de réflexion sur les
filières professionnalisantes qui emprunte notamment la forme d'un
rapport annuel.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est enquis du fonctionnement de
cette commission et du dialogue qui s'y était établi, compte tenu
notamment de sa composition originale.
M. Ivar Ekeland
a souligné la qualité de son
fonctionnement et la contribution fructueuse de ses membres aux arbitrages qui
doivent être rendus dans le domaine des habilitations et de
l'implantation des formations compte tenu, notamment, des perspectives de
débouchés et de stages en entreprise.
Rappelant que la création de cette commission avait suscité des
interrogations, voire des réserves,
M. Jean-Pierre Finance
a
indiqué que cette organisation avait permis de dépasser les
blocages nés d'une problématique spécifique à
chaque type d'institut. S'agissant des IUT, il a évoqué les
problèmes de l'évolution des spécialités, de la
répartition géographique des départements, de la poursuite
du mouvement de dispersion constaté depuis quelques années, des
conditions de création des instituts et de leur articulation avec les
autres filières universitaires ou non, telles les sections de
techniciens supérieurs.
A cet égard, il a rappelé que la création des IUT au
milieu des années 60 avait été considérée
comme susceptible d'entraîner une disparition des STS alors que les
effectifs de ces sections sont aujourd'hui trois fois supérieurs
à ceux des instituts, et a posé la question de la poursuite
d'études des étudiants de ces filières sélectives.
Il a enfin évoqué le problème de la création de
nouveaux diplômes qui permettraient de compléter ces formations
courtes et celui de l'insertion professionnelle des étudiants d'IUT
selon les diverses spécialités.
M. Pierre Laffitte
a observé que cette présentation ne
mentionnait pas le rôle que les collectivités locales pouvaient
jouer dans la définition des formations, a noté qu'un
système d'habilitation qui restait centralisé ne permettrait pas
de prendre en compte les évolutions et les caractéristiques de
l'emploi régional et s'est demandé s'il ne conviendrait pas de
décentraliser les commissions compétentes au niveau de chaque
académie.
Il s'est ainsi interrogé sur le bien-fondé d'une approche
nationale dans le domaine de l'habilitation des formations, d'autant que
celle-ci, en ce qui concerne les IUT, n'était pas limitée dans le
temps, et a souhaité une déconcentration des procédures
pour adapter les enseignements à l'évolution du marché de
l'emploi.
Se fondant sur son expérience personnelle,
M. André
Egu
a évoqué la difficulté de mettre en place des
spécialités nouvelles dans un département d'IUT existant.
Soulignant que les formations créées dans les IUT
répondaient à la demande de la société civile,
M. Daniel Eckenspieller
s'est interrogé sur l'origine des
étudiants admis en IUP et sur le choix du niveau d'études retenu
pour leur recrutement. Il a également souhaité obtenir des
précisions sur les formations dispensées en IUT, sur
l'évolution des effectifs étudiants et sur les perspectives de
développement des filières technologiques et professionnelles.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a rappelé que la
plupart des intervenants entendus par la mission d'information avaient
dénoncé la dérive des IUT et STS qui accueilleraient
désormais une grande part de bacheliers généraux, lesquels
poursuivraient ultérieurement leurs études à
l'université : ces filières d'insertion professionnelle
seraient ainsi détournées de leur vocation initiale, tandis que
les bacheliers technologiques seraient contraints de se tourner vers les DEUG
notamment littéraires. Il a enfin demandé si certaines formations
d'IUP, habilitées en principe pour quatre ans, avaient été
supprimées du fait de leur inadaptation aux besoins actuels des
entreprises.
Rejoignant ces préoccupations,
M. Adrien Gouteyron,
président,
s'est interrogé sur les moyens de faire revenir
les bacheliers technologiques dans les IUT et s'est demandé si la
multiplication des IUP, compte tenu de leur réussite, ne constituait pas
une solution permettant de remédier à l'échec
universitaire.
M. Jean Bernadaux, co-rapporteur,
a demandé si le
recrutement des IUT n'était pas exagérément
sélectif, compte tenu des besoins réels des entreprises et s'est
enquis de la part des différents types de bacheliers dans ces
filières et de leur taux de réussite respectif.
Il s'est également interrogé sur les moyens de développer
une coopération plus étroite entre les filières
universitaires générales et les IUT ainsi que sur le devenir des
étudiants d'IUT en termes de poursuite d'études, d'insertion
professionnelle et d'échec.
M. Jean-Claude Carle
a évoqué le problème de
l'ouverture et de la fermeture des formations technologiques et
professionnelles en rappelant le rôle joué par les élus
dans l'établissement des plans régionaux de formation
professionnelle des jeunes. Il a estimé que l'intervention des
élus en ce domaine était de nature à réduire les
corporatismes qui risquent de bloquer l'évolution des formations
offertes et qu'il convenait de passer d'une logique de moyens à une
logique de besoins en s'inspirant de l'exemple des IUP.
M. André Maman
s'est interrogé sur les modalités
d'admission des étudiants en IUP, sur les moyens de préparer
ceux-ci plus efficacement à ce type de formation, sur les effectifs
étudiants concernés, sur leurs perspectives de réussite et
d'insertion professionnelle et a insisté sur la nécessité
d'instituer des passerelles entre les diverses filières.
Il a enfin souhaité obtenir des précisions sur les
critères d'habilitation retenus par la commission.
Répondant à ces interventions,
MM. Ivar Ekeland, Gilles
Raynaud et Jean-Pierre Finance
ont notamment apporté les
précisions suivantes :
- l'habilitation des formations d'IUT, du fait du statut dérogatoire des
instituts, est accordée directement par le ministre alors que,
s'agissant des IUP, l'avis de la commission est requis ;
- une politique d'habilitation des formations technologiques et
professionnelles doit concilier les exigences de la carte universitaire, le
principe du caractère national des diplômes et la prise en compte
des débouchés locaux : une déconcentration
éventuelle de la procédure ne devrait pas conduire à
écarter un pilotage national des formations ;
- les IUP ont accueilli 22.000 étudiants lors de la dernière
rentrée et enregistrent depuis quelques années un
développement considérable : alors que 21 IUP
existaient en 1991, 170 demandes de créations sont aujourd'hui en
cours d'examen ;
- les IUP sont des composantes de l'université et ne
bénéficient pas, à la différence des IUT, d'un
statut dérogatoire : leur habilitation doit être
appréciée en fonction des débouchés locaux, en
tenant cependant compte des impératifs d'une politique nationale de
régulation ;
- l'efficacité de ces formations en termes d'insertion ne peut
être actuellement appréciée faute d'indicateurs
satisfaisants et un groupe de travail utilisant les informations de la
direction de l'évaluation et de la prospective et du Centre
d'études et de recherches sur les qualifications (CEREQ) a
été constitué pour remédier à cette
carence ;
- l'évolution des spécialités est plus aisée dans
les IUP que dans les IUT en raison du caractère quelque peu conservateur
des commissions pédagogiques nationales qui fixent le contenu des
programmes : aucune spécialité d'IUT n'a jamais
été supprimée alors que l'
" évolutivité " des formations apparaît
indispensable ;
- la répartition géographique des départements d'IUT
constitue un problème sensible et résulte de multiples facteurs
locaux : une corrélation devrait cependant être
établie entre les spécialités enseignées et le
tissu économique local, et les IUT sont appelés à jouer un
rôle d'interface entre les structures universitaires et les entreprises,
même s'il convient de faciliter la mobilité des étudiants
au sein des régions ;
- les commissions pédagogiques nationales, généralement
conservatrices, constituent un frein au développement de nouvelles
options d'IUT : il serait souhaitable d'engager des expériences en
ce domaine qui feraient l'objet d'une évaluation au bout de quelques
années ;
- le choix du critère retenu pour l'accès aux IUP (bac + 1)
procède du fait que ces instituts ne relèvent pas du statut
dérogatoire de l'article 33 de la loi de 1984, de
l'impossibilité d'instaurer une sélection à leur
entrée et du souci de ne pas introduire une continuité
d'études avec les IUT qui doivent conserver une vocation d'insertion
professionnelle immédiate ;
- les étudiants des IUP se recrutent notamment parmi les
élèves des classes préparatoires qui n'intègrent
pas les grandes écoles, les étudiants des filières
médicales et pharmaceutiques et, principalement, les étudiants de
DEUG à l'issue de leur première année ;
- les politiques de recrutement des IUT et des IUP devraient être
clarifiées en particulier en distinguant les formations secondaires et
tertiaires, afin notamment de ne pas accréditer l'idée d'un
cursus continu entre ces deux filières qui relèvent d'une
pédagogie et d'une finalité différente, et qui proposent
des enseignements plus ou moins directement inspirés par les
professions ;
- " l'explosion " actuelle des IUP doit s'accompagner d'une
orientation des étudiants et d'un développement de la formation
continue encore trop peu mise en oeuvre au sein de ces instituts ;
- l'université devrait jouer un rôle important dans le
développement de la formation professionnelle et dispose d'atouts en ce
domaine par rapport aux organismes privés ;
- la part des bacheliers généraux dans les IUT, qui, selon une
opinion très répandue, serait excessive, doit être
relativisée selon les filières : si les scientifiques se
partagent à part égale entre les DEUG et les IUT, certains
instituts accueillent plus de 60 % d'étudiants issus des
filières technologiques secondaires alors que l'université
reçoit plutôt des bacheliers C et D ; en revanche, les
" bac G " se tournent vers les filières
générales littéraires où ils sont massivement
condamnés à l'échec ;
- l'orientation des étudiants pourrait être
améliorée en développant une articulation plus
satisfaisante entre l'enseignement secondaire et supérieur : la
participation des enseignants des lycées et des universités
à cette orientation permettrait de pallier les carences des centres
d'information et d'orientation ;
- le passage du lycée à l'université se traduit par des
changements traumatisants pour les jeunes, (contenu des enseignements,
environnement et milieu de vie, méthodes de travail...) et appellerait
une année d'adaptation pour les étudiants ; à cet
égard, les IUP, qui accueillent les étudiants après une
année de DEUG, apparaissent novateurs ;
- les IUP sont appelés à connaître un développement
important car la professionnalisation de leurs enseignements répond
à la demande des branches professionnelles ;
- le caractère sélectif des IUT s'est aujourd'hui sensiblement
réduit du fait notamment d'une désaffection liée à
l' " effet CIP " et du souhait des étudiants de poursuivre
des
études longues : les IUT ont été ainsi contraints de
recourir largement aux listes complémentaires pour utiliser pleinement
leurs capacités ;
- une coopération plus étroite entre universités et
filières sélectives devrait faciliter une réorientation
précoce des étudiants, dans les deux sens, à la condition
que soient mises en place les passerelles nécessaires ;
- l'institution d'une année transitoire d'orientation
post-baccalauréat serait plus opportune que la création de
collèges universitaires ;
- la moitié des diplômés d'IUT poursuivent leurs
études, avec une proportion un peu supérieure pour les formations
tertiaires ;
- l'entrée en IUP se fait sur dossier et les étudiants de ces
instituts enregistrent un taux de réussite élevé en raison
d'un encadrement satisfaisant ;
- la répartition géographique des formations d'IUP résulte
d'un partenariat entre le monde universitaire, les branches professionnelles et
les grandes entreprises mais le ministère chargé de
l'enseignement supérieur, en veillant à la qualité des
formations proposées, joue un rôle essentiel dans les
habilitations ;
- l'université a connu depuis trente ans des changements majeurs,
notamment dans le domaine de la professionnalisation des formations, en
développant des contacts avec les entreprises et les branches
professionnelles, et en répondant avec une bonne volonté
évidente aux besoins exprimés par la société
civile ;
- dans un pays resté jacobin, l'exemple réussi des IUP montre que
l'université française a su évoluer en utilisant les
ressources de l'autonomie et de la décentralisation, et en prenant en
compte les réalités régionales et économiques.
La mission a ensuite procédé à l'audition de
M. Laurent Schwartz
.
M. Adrien Gouteyron, président,
a d'abord rappelé les
fonctions et responsabilités éminentes exercées dans le
passé par M. Laurent Schwartz ainsi que ses propositions
formulées dans un ouvrage fameux " pour sauver l'enseignement
supérieur ".
Répondant à ces propos de bienvenue,
M. Laurent
Schwartz
a indiqué que ses propositions, tirées des travaux
de la commission du bilan, avaient été complètement
ignorées par les ministres chargés, depuis 1981, de
l'enseignement supérieur et étaient jugées quelque peu
" suicidaires " par le ministre actuel, alors que
celles-ci sont
partagées notamment par l'Académie des sciences et le
comité national d'évaluation.
Il a ensuite rappelé que la moitié seulement des
240.000 candidats étaient reçus au DEUG, et a estimé
que cette proportion constituait un échec insupportable pour notre
système universitaire, même si l'on prenait en compte les
réorientations et les inscriptions multiples des étudiants.
Il a ajouté que 105.000 étudiants étaient
reçus en licence, 70.000 en maîtrise, 20.000 en DESS et 25.000 en
DEA, le DEUG et la maîtrise constituant ainsi les barrages les plus
sérieux du cursus universitaire.
Précisant que 8.000 thèses étaient
présentées chaque année, dont 2.000 pour les
étudiants étrangers qui ont, selon lui, vocation à
enseigner dans leur pays d'origine, il a indiqué que 3.000
" thésards " devraient se tourner vers l'enseignement
supérieur, en dépit de la qualité parfois médiocre
de certains de leurs travaux, tandis que 3.000 autres devraient s'orienter
vers les entreprises qui ne manifestent d'ailleurs pas un intérêt
excessif pour ces formations.
Abordant le problème de l'échec massif dans les premiers cycles,
il a souligné le gâchis inacceptable qui en résultait pour
les étudiants, les enseignants et aussi pour les deniers publics.
Il a également estimé que le nombre d'années
consacrées au DEUG devrait être limité afin d'éviter
des gaspillages inutiles et de combattre le dilettantisme de certains
étudiants, lequel se retrouve également parfois dans les
troisièmes cycles.
Afin de remédier à cet échec, il a rappelé qu'il
préconisait depuis 1961 une sélection dans l'enseignement
supérieur qui pourrait être acceptée par l'opinion à
condition d'engager une concertation et une véritable information
notamment en direction des bacheliers " moyens " et
technologiques
qui sont recalés aussi bien dans les STS que dans les premiers cycles
universitaires.
S'interrogeant sur les causes de cet échec massif, il a rappelé
que la loi Savary de 1984, en posant le principe du libre accès des
bacheliers dans l'enseignement supérieur, sans tenir compte des
capacités des élèves, était scrupuleusement
appliquée par les tribunaux administratifs qui condamnent
régulièrement toute initiative tendant à instituer une
sélection des étudiants.
Il a pour sa part estimé que si tout bachelier disposait du droit
d'entrer à l'université, ce droit n'impliquait pas un libre choix
des filières, sauf à laisser s'exercer une sélection
dangereuse par l'argent ou par l'échec, qu'il a opposée à
une sélection démocratique et organisée.
Il a indiqué que l'orientation était entendue par les
étudiants comme une sélection et que les déclarations
gouvernementales conduisant à écarter toute idée de
sélection bloquaient toute perspective de négociations et de
concertation sur le sujet, sauf à précipiter les étudiants
dans le rue, ceux-ci étant justement inquiets devant la menace du
chômage.
Il a ensuite rappelé que l'enseignement supérieur était
régi pour 60 % de ses formations par un système
sélectif (classes préparatoires, grandes écoles, IUT,
STS...) et qu'une sélection géographique particulièrement
néfaste était pratiquée également par les
universités françaises, à laquelle on peut opposer la
mobilité constatée dans les pays étrangers où les
étudiants bénéficient d'un système de bourses
adaptées à leurs ressources.
Il a par ailleurs estimé que les premiers cycles devraient être
diversifiés selon les aptitudes des étudiants qui devraient
être orientés de manière plus ou moins directive selon leur
niveau, après avoir bénéficié d'une information
satisfaisante.
Rappelant que les antennes universitaires s'étaient
considérablement développées au cours des dernières
années, parfois de manière sauvage sans que le ministère
ait été associé à leur création, il a
d'abord souligné l'intérêt de cette formule
(proximité des formations et démocratisation de l'enseignement
supérieur dans les villes moyennes, encadrement satisfaisant
assuré par les enseignants de l'université de rattachement,
grande motivation et meilleure réussite des étudiants). Il a
cependant dénoncé les inconvénients de la
généralisation de ces antennes (éventail étroit des
matières proposées et concentrées pour l'essentiel sur le
droit et les sciences économiques, étudiants captifs de ces rares
disciplines, pléthore de DEUG de droit inadaptés aux besoins
locaux...).
Condamnant les dérives et le développement excessif des antennes
universitaires, il a préconisé la création de
collèges ou d'instituts universitaires de premier cycle relevant de
l'université et qui proposeraient un éventail de disciplines
suffisamment large (droit, lettres, sciences...) dans l'ensemble des villes
universitaires, y compris dans les grandes, pour accueillir sans
sélection notamment les étudiants de DEUG actuellement en
situation d'échec.
Dans cette perspective, le programme actuel des DEUG pourrait être
allégé et orienté vers une formation plus
appliquée : ce diplôme préparé dans les
collèges universitaires abandonnerait sa finalité actuelle qui
est de préparer les étudiants à des études longues.
Parallèlement, il a préconisé la création d'un
autre type de DEUG plus sélectif et orienté vers les disciplines
fondamentales pour les étudiants susceptibles de poursuivre des
études longues, en indiquant qu'un système de passerelles devrait
être institué avec le DEUG de collège.
Cette diversification serait, selon lui, de nature à améliorer le
taux de réussite dans les premiers cycles, ainsi qu'en licence et en
maîtrise et s'inspire par ailleurs du système américain de
sélection, qui apparaît particulièrement
démocratique puisqu'il prévoit des formations de rattrapage pour
les élèves de l'enseignement secondaire dont le niveau est
très faible.
Constatant l'insuffisance des connaissances des bacheliers d'aujourd'hui, il a
estimé qu'une sélection était indispensable pour
remédier à l'échec universitaire, la création des
collèges universitaires devant s'accompagner par ailleurs d'un
développement du système des bourses pour remédier
à l'actuelle sélection géographique et d'un contrôle
strict des universités de rattachement sur le niveau des
étudiants des collèges universitaires, dont les meilleurs
pourraient accéder aux filières longues.
Il a également indiqué que le système de sélection
organisé aux Etats-Unis comportait un recrutement des meilleurs
élèves des high schools par d'anciens diplômés
bénévoles des grandes universités et une
préparation de ceux-ci à l'entrée dans les
établissements universitaires les plus renommés.
A l'issue de cet exposé, un large débat s'est engagé.
M. André Maman
a précisé que les universités
américaines, comme celle de Princeton, envoyaient des " missi
dominici " sur l'ensemble du territoire en organisant une
répartition des étudiants par Etat et utilisaient largement le
bénévolat de leurs anciens diplômés. Il a
ajouté que le niveau de l'enseignement secondaire américain
devait être apprécié en tenant compte de l'excellence du
secteur privé et des quelque trente écoles françaises dont
les bacheliers pouvaient aisément accéder à
l'université.
Il a rappelé que si le coût des études supérieures
était très élevé aux Etats-Unis, celui-ci
était compensé par un système de bourses très
développé.
Il a enfin indiqué qu'il était favorable à un
système universitaire plus largement financé par les
étudiants et leurs familles ainsi qu'à une sélection
organisée des étudiants à l'entrée à
l'université, cette perspective supposant cependant une évolution
radicale des mentalités de notre pays.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a exprimé sa
perplexité devant l'attitude et les réticences des universitaires
et de leurs syndicats face au changement, notamment s'agissant de la
sélection et de la création éventuelle de collèges
universitaires. Il s'est par ailleurs interrogé sur la
nécessité de maintenir une recherche universitaire dans les
premiers cycles.
M. Adrien Gouteyron, président,
a demandé si les
collèges universitaires dont la création avait été
évoquée seraient dotés d'enseignants-chercheurs.
Répondant à ces interventions,
M. Laurent Schwartz
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- les changements nécessaires se heurtent en France à une
véritable sclérose de l'Etat et de la société ;
- les réticences des universitaires à l'égard du
changement résultent notamment du fait que leur carrière
dépend de leur activité de recherche : si
l'université française a conservé un niveau convenable en
matière de recherche, c'est sans doute, dans une certaine mesure, parce
que les enseignants-chercheurs ont négligé leur mission
d'encadrement des étudiants ;
- en Grande-Bretagne, au contraire, tous les étudiants sont
" tutorisés " par des enseignants qui consacrent pourtant
une
partie de leur temps à des travaux de recherche ;
- la loi de 1984 sur l'enseignement supérieur a multiplié les
instances et les procédures délibératives, les
tâches administratives des présidents d'université et a
augmenté les heures de cours peu gratifiantes pour les
enseignants-chercheurs dans des premiers cycles de plus en plus
hétérogènes ;
- les syndicats de l'enseignement supérieur ne sont pas
représentatifs et continuent à s'opposer à toute
idée de sélection ;
- le nombre de professeurs agrégés de l'enseignement secondaire
(PRAG) est trop élevé dans le supérieur du fait de
recrutements massifs intervenus au cours des dernières
années ;
- les premiers cycles de collège universitaire devraient être
encadrés par des enseignants-chercheurs, dont quelques uns
maintiendraient une certaine activité de recherche, et des professeurs
agrégés du secondaire, à l'exclusion des professeurs
certifiés.
· Jeudi 28 mars 1996
- Présidence de M. Adrien Gouteyron, président. - La
mission a d'abord procédé à
l'audition de M.
Alain Minc.
M. Alain Minc
a remarqué à titre liminaire que notre
système universitaire avait, contrairement à une opinion trop
répandue, surmonté dans des conditions convenables le choc
démographique des dernières décennies et a estimé
que l'université, contrairement au secteur de la protection sociale,
avait sans doute davantage évolué que la société
française au cours des années récentes.
Il a cependant souligné que ce système universitaire restait
fondé sur une extraordinaire hypocrisie en matière de
sélection puisqu'il apparaissait à la fois comme le plus ouvert
pour l'entrée à l'université et le plus sélectif du
monde, à l'exception peut-être du Japon, pour l'accès aux
grandes écoles qui fournissent les quelque 30 à
40.000 cadres ou dirigeants nécessaires au fonctionnement de la
société française. Il a constaté que la France
avait laissé dériver son système universitaire sans poser
le problème du processus de sélection des étudiants.
Toute revalorisation de la filière technologique et professionnelle
supérieure est vouée par ailleurs, selon lui, à
l'échec, si le passage par l'enseignement général reste,
à un moment donné, la voie obligée pour parvenir aux
diplômes les plus élevés et si un cursus spécifique
et continu conduisant jusqu'aux grandes écoles n'est pas
organisé. Afin de conférer une noblesse propre à cette
filière et de diversifier l'actuel monopole culturel de nos
élites,
M. Alain Minc
a préconisé qu'un
certain quota soit réservé aux diplômés de la
filière technologique et professionnelle pour l'accès aux grandes
écoles d'ingénieurs.
Il a cependant indiqué que cette suggestion, qu'il avait
récemment proposée aux plus hauts responsables de l'Etat,
s'était heurtée à l'opposition du lobby des grandes
écoles, et notamment de l'Ecole polytechnique. Il a ensuite
estimé que l'opinion ne mesurait pas suffisamment les changements
intervenus depuis quelques années dans l'université et qui se
sont traduits notamment par la création de formations
spécialisées, de nouveaux DESS et de nouvelles filières
sélectives qui soutiennent la comparaison avec les enseignements
correspondants dispensés dans les grandes écoles et dans les
universités étrangères.
Abordant enfin les conséquences de la démocratisation du
baccalauréat, il a observé que celle-ci résultait
davantage de la dynamique de notre système éducatif et
universitaire que de la seule initiative d'un ministre et a regretté que
ce mouvement, qui apparaît désormais irréversible, ait
conduit à " survaloriser " le poids de la filière
générale dans notre système éducatif et à
placer notre système universitaire dans une impasse.
Compte tenu du libre accès à l'université, l'objectif des
80 % de bacheliers pour une classe d'âge aboutit
nécessairement à retarder le " vrai "
baccalauréat de deux ans, soit à l'issue du premier cycle
universitaire, la logique de ce système conduisant en outre à
envisager la création de collèges universitaires et la mise en
place d'un processus d'orientation sélective à l'issue d'une
période de type propédeutique.
S'agissant des étudiants en situation d'échec universitaire, il a
estimé préférable que ceux-ci s'insèrent dans la
vie professionnelle à un niveau bac + 2, alors qu'aujourd'hui un
diplômé à bac + 5 sur trois, soit
100.000 étudiants, est contraint d'accepter un emploi
sous-qualifié et sous-rémunéré par rapport à
son niveau de formation.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est instauré.
M. Adrien Gouteyron, président,
est convenu que notre
système universitaire avait en effet démontré ses
facultés d'adaptation, même si celui-ci était " en
deçà de ce qu'il devrait être ".
Il a cependant estimé qu'un système instituant une
sélection à bac + 2 risquerait de se heurter à
l'opposition des étudiants les plus modestes et de leurs familles qui
engagent des efforts considérables pour envoyer leurs enfants à
l'université.
Il a également exprimé la crainte que la mise en place d'un
cursus permettant à des diplômés des filières
sélectives courtes d'accéder aux grandes écoles
entraîne une modification profonde du programme et de la vocation des IUT.
Il s'est par ailleurs interrogé sur les modalités d'un
système non sélectif permettant d'éviter l'afflux
d'étudiants vers des filières sans débouchés,
telles les filières sportives, et sur les moyens d'orienter les
étudiants, sans les éliminer, de notre système
universitaire.
Il a enfin demandé si les collèges universitaires
évoqués devraient être créés au sein de
l'université ou faire l'objet d'une organisation spécifique.
M. André Maman
a rappelé que le système
universitaire américain, en dépit de son caractère
sélectif, était particulièrement démocratique et
s'est interrogé sur les possibilités d'instaurer en France des
procédures d'orientation sélective entre les filières,
afin de réduire les gaspillages humains engendrés par
l'échec universitaire, et sur les modalités d'une
sélection à l'issue des premiers cycles.
Il a ajouté que de véritables " orienteurs " devraient
être mis en place dans les lycées, a souligné le rôle
des parents dans le processus d'information et a demandé s'il ne serait
pas souhaitable d'augmenter la participation des étudiants et des
familles au financement des études supérieures.
M. Ivan Renar
s'est interrogé sur les risques d'une
conjugaison des phénomènes d'implosion des banlieues et
d'explosion des universités, compte tenu notamment des perpectives
limitées d'insertion professionnelle et sociale des étudiants, et
a estimé qu'aucun discours sérieux n'avait jamais
été tenu à ces derniers qui assimilent le plus souvent
l'orientation à la sélection.
Il a souligné la difficulté de dialoguer avec un monde
étudiant qui reste peu structuré et peu syndiqué, alors
qu'un débat serait nécessaire, notamment avec les
représentants des entreprises.
Il a cependant estimé que les propositions quel que peu provocatrices
émises, en dépit de leur caractère roboratif
indéniable, n'étaient sans doute pas de nature à faciliter
l'organisation d'un tel débat avec les étudiants.
Il a enfin rappelé que la sélection était d'autant plus
brutale qu'elle était inorganisée et a souhaité qu'un
véritable dialogue social s'établisse avec les étudiants
sur les notions d'orientation et de promotion, l'absence de perspectives en
matière d'insertion professionnelle et sociale, notamment pour les
victimes de l'échec universitaire, contribuant pour une large part
à désintégrer davantage la société
française et à la fragiliser.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
a déclaré partager
pour une grande part l'analyse faite de la situation de notre enseignement
supérieur, notamment concernant son efficacité et ses
résultats qui sont trop souvent ignorés de l'opinion.
Il a observé que les propositions avancées tendaient à
prolonger de deux ans la formation des lycéens, pour un coût
inférieur à celui de l'enseignement secondaire, et permettraient
de sélectionner naturellement les étudiants à l'issue de
deux années de type propédeutique.
Il a cependant souligné que les étudiants favorisés de
premier cycle, qui bénéficient d'une information
privilégiée, s'orienteront plus utilement et plus aisément
que les autres et s'est interrogé sur les réticences du corps
professoral concernant une dissociation éventuelle des premiers cycles
de l'ensemble du cursus universitaire, le rétablissement d'une
propédeutique et la création de collèges universitaires,
notamment dans les villes moyennes.
M. Jean-Claude Carle
a souligné les conséquences sociales
résultant de la situation de notre université ainsi que les
implications financières qui résulteraient d'un report de deux
ans de l'orientation des étudiants. Il a estimé qu'il
était difficile de modifier le régime des diplômes comme le
baccalauréat ou même le BTS, dont la réforme vient
d'être abandonnée.
Il a jugé nécessaire de renforcer les filières
technologiques et professionnelles afin de favoriser l'insertion
professionnelle des diplômés et de réduire les frustrations
des étudiants qui se tournent vers des formations inadaptées aux
besoins des entreprises.
Il a enfin estimé que l'orientation des élèves devrait
être engagée dès le collège.
Répondant à ces interventions,
M. Alain Minc
a notamment
apporté les précisions suivantes :
- le rôle du baccalauréat dans l'imaginaire collectif, et son
caractère intangible, s'opposent à toute politique d'orientation
efficace, voire de sélection, lors de l'entrée à
l'université ;
- l'expérience de deux années d'études acquise par les
étudiants dans les collèges universitaires permettrait sans doute
de leur faire accepter la nécessité d'une orientation plus
sélective ;
- la situation des diplômés à bac + 5, à qui sont
proposés des contrats de travail à durée
déterminée, largement financés par des aides à
l'emploi et rémunérés à 80 % du SMIC,
apparaît plus explosive et plus dramatique que celle des étudiants
à bac + 2 en situation d'échec universitaire ;
- il convient d'expliquer aux étudiants, ce qui n'a pas
été fait dans l'affaire du CIP, que le niveau du salaire
d'embauche se justifie par la nécessité pour les entreprises de
prendre en charge la formation complémentaire des
diplômés ;
- les étudiants apparaissent comme une force sociale fugitive et sont
représentés de manière peu satisfaisante, leurs
problèmes s'exprimant en conséquence nécessairement sous
la forme de débats de société ;
- il est nécessaire que les responsables adressent aux jeunes un
discours non démagogique, en évitant de leur affirmer, par
exemple, que l'accès des bacheliers à l'université est un
droit absolu ;
- le système sélectif (classes préparatoires et grandes
écoles) est plus égalitaire et plus favorables aux
élèves doués d'origine modeste que les filières
générales non sélectives et constitue la dernière
voie d'ascension sociale : les filières universitaires de
troisième cycle sont en revanche plus inégalitaires et
confèrent un avantage aux étudiants privilégiés,
notamment du fait de leur niveau culturel et de leur " capital
relationnel " ;
- les représentants syndicaux du monde éducatif ont
profondément évolué sur les problèmes de
l'enseignement supérieur même si leurs discours officiels n'en
portent pas encore témoignage ;
- le système de sélection des professeurs d'université les
conduit à choisir d'enseigner dans des formations longues plutôt
que dans les premiers cycles ;
- les voies d'accès parallèles aux grandes écoles
devraient déboucher sur des concours adaptés afin de ne pas
" rétroagir " sur le contenu et la vocation des
enseignements
technologiques dispensés dans les filières sélectives
courtes ;
- l'information des bacheliers, si elle peut faciliter la libre décision
d'orientation des étudiants, ne constitue qu'une réponse
partielle au problème général de l'orientation dans
l'enseignement supérieur ;
- une sélection démocratique et organisée pour assurer
l'égalité véritable des jeunes conduirait
inévitablement à remettre en cause des institutions comme celle
du collège unique ;
- l'augmentation éventuelle des droits d'inscription universitaires
devrait d'abord viser les étudiants des troisièmes cycles qui
sont issus à 90 % des classes aisées et qui
bénéficient actuellement d'une véritable rente de
situation ;
- toute réforme de notre système éducatif et toute
cogestion de ce système supposent l'existence d'interlocuteurs
représentatifs ;
- la refonte de notre système de défense devrait fournir
l'occasion de remplacer les garnisons implantées dans les villes
moyennes par des collèges universitaires, mais il serait absurde de
développer des filières à bac + 4 dans les petites
villes ;
- la dissociation des professeurs d'université et des enseignants des
collèges de premier cycle paraît, à terme,
inéluctable.
La mission a ensuite procédé à
l'audition
de
M.
Dimitri Lavroff, professeur à l'Université de Bordeaux I,
président de la commission sur l'évolution du premier cycle
universitaire.
Dans une déclaration liminaire,
M. Dimitri Lavroff
a
rappelé qu'il avait été chargé par le
précédent ministre de l'enseignement supérieur et de la
recherche d'une mission consistant à examiner l'organisation des
premiers cycles universitaires, la place des enseignants du second degré
qui sont appelés à y enseigner et les perspectives d'avenir de
ces premiers cycles.
Il a ensuite indiqué que, contrairement à une idée
reçue, les professeurs d'université de rang A continuaient
d'assurer la plus grande part des enseignements de premier cycle, notamment en
médecine et en droit, mais dans une moindre mesure dans des disciplines
comme les sciences, les lettres et les sciences humaines, et a estimé
que l'abandon de ce principe serait regrettable.
Abordant les raisons du dysfonctionnement des premiers cycles, il a d'abord
rappelé que 40 à 50 % des étudiants échouaient
en première année et environ 40 % pour l'ensemble des deux
années.
Il a remarqué que ce taux d'échec trop important résultait
d'une augmentation considérable du nombre des étudiants, et d'une
baisse du niveau moyen de leurs connaissances, la moitié des
étudiants n'étant pas en mesure, selon lui, de poursuivre un
enseignement supérieur de nature abstraite. Evoquant l'enquête
comparative effectuée entre des élèves des
années 20 et des élèves d'aujourd'hui, il a
souligné que les résultats révélaient une
détérioration des connaissances de base qui témoignait de
la mauvaise adaptation d'une grande part des bacheliers aux études
supérieures de type classique, d'autant que les meilleurs d'entre eux se
tournaient vers les filières sélectives.
Il a ensuite considéré que les mesures récentes prises en
faveur de l'enseignement supérieur pour augmenter le nombre des
professeurs, créer des universités nouvelles ou accroître
le montant des bourses n'étaient pas de nature à résoudre
les problèmes posés et contribueraient même à les
aggraver, et a suggéré que les moyens nouveaux
dégagés soient plutôt affectés à la
création de nouvelles formations adaptées au profil des
élèves du secondaire : il a rappelé à cet
égard que les bacheliers professionnels n'avaient pas vocation à
s'engager dans des études supérieures et que les bacheliers
technologiques n'avaient que peu de chances de suivre avec succès des
filières universitaires classiques.
Il a cependant estimé que la crise actuelle de l'enseignement
supérieur lui paraissait conjoncturelle et que des solutions
étaient envisageables pour y remédier à condition
d'innover en se gardant de toute approche idéaliste et
égalitaire : dans cette perspective, et afin de ne pas rejeter un
trop grand nombre de jeunes d'un système quelque peu figé,
notamment dans des disciplines classiques qui requièrent les mêmes
qualités qu'autrefois (médecine, droit, sciences...), il convient
de créer des formations adaptées aux capacités des
élèves et aux besoins de la société contemporaine.
Au lieu d'un nouveau plan général de réforme de notre
enseignement supérieur, il a ainsi préconisé des mesures
ponctuelles, applicables dès la prochaine rentrée, et
susceptibles d'être étendues en fonction des besoins.
Selon lui, des actions incitatives, pragmatiques et modestes devraient
rapidement être engagées pour mettre en place des formations
technologiques dans une perspective de décentralisation et d'innovation.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est engagé.
M. Adrien Gouteyron, président,
a exprimé son accord avec
la démarche proposée par M. Dimitri Lavroff et a
souhaité que ses propositions se trouvent rapidement
concrétisées.
S'agissant de la nécessaire diversification des formations
supérieures, il a ensuite cité des indications
particulièrement significatives, tirées du rapport de la
commission sur l'évolution du premier cycle universitaire et portant
notamment sur les taux de réussite, de réorientation et
d'échec selon les spécialités des baccalauréats,
ces pourcentages confirmant en particulier l'importance de l'échec
universitaire et des réorientations pour les bacheliers technologiques
industriels et tertiaires.
Il a ensuite insisté sur la nécessité d'entreprendre des
expériences pédagogiques suffisamment nombreuses pour que
celles-ci aient un effet d'entraînement et sur le rôle d'impulsion
de l'Etat en ce domaine, et il a observé que l'expérimentation
pouvait être également, pour les responsables, une façon
d'éluder leurs responsabilités et de différer leurs
décisions.
Il a également rappelé les expérimentations lancées
par l'Université nouvelle de Marne-la-Vallée en matière
d'organisation de l'année universitaire, dans le but de réduire
l'échec dans les premiers cycles, s'est demandé s'il ne convenait
pas de communiquer les résultats des diverses filières selon les
divers types de baccalauréat à l'ensemble des bacheliers et de
prolonger les filières technologiques courtes, les IUT pouvant
être considérés, dans cette hypothèse, comme des
universités thématiques.
Il a par ailleurs exprimé la crainte que la mise en place d'un cursus
permettant aux diplômés d'IUT d'accéder aux grandes
écoles conduise à une modification du contenu de la formation et
de la vocation de ces instituts.
Il s'est demandé si le cadre législatif actuel autorisait un
développement autonome des premiers cycles et si des mesures incitatives
pourraient être proposées aux enseignants afin que ces derniers
continuent ou choisissent d'exercer en premier cycle.
Il a enfin estimé que le recours à une plus grande autonomie des
universités risquait d'être entendu par les étudiants comme
une atteinte portée au principe d'égalité entre les
établissements.
Commentant les propositions émises par M. Dimitri Lavroff dans son
rapport,
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
s'est enquis des
modalités pratiques d'une orientation des lycéens et des
étudiants et de la mise en place de passerelles dans les cursus du
premier cycle, du rôle des collectivités locales dans la
création et le fonctionnement des sites universitaires et de
l'institution éventuelle de collèges universitaires. Il s'est
interrogé sur la nécessité du maintien du caractère
universitaire des premiers cycles et des activités de recherche et sur
la place respective des diverses catégories de personnels qui sont
appelés à y enseigner.
Il a souhaité obtenir des précisions sur la nécessaire
diversification des filières, sur l'articulation des premiers cycles
généraux avec les IUT et les IUP, sur les diverses fonctions des
premiers cycles, sur une éventuelle différenciation des DEUG et
sur la création d'une filière technologique non sélective
dans les collèges d'enseignement supérieur.
Il s'est interrogé sur les moyens d'assurer un décloisonnement
entre enseignement secondaire et supérieur, sur la vocation des antennes
universitaires à accueillir des formations professionnalisées, et
sur les conditions d'une délocalisation réussie pour les premiers
cycles généraux. Il a enfin demandé si la réforme
des premiers cycles devait nécessairement s'inscrire dans une
réforme plus globale de l'enseignement supérieur, s'il
était concevable d'envisager un cursus permettant aux
diplômés d'IUT d'accéder aux grandes écoles
d'ingénieurs, s'il était souhaitable d'instituer un directeur
pour les premiers cycles dans chaque université, et si l'image embellie
de la vie universitaire véhiculée par certaines séries
télévisées n'étaient pas, pour une part, à
l'origine d'une certaine désillusion des étudiants.
M. Jean-Claude Carle
est convenu que l'augmentation des moyens
budgétaires affectés à l'enseignement supérieur
n'est pas le moyen de résoudre les problèmes posés. Il a
demandé si le cadre législatif et réglementaire qui
régissait actuellement l'université permettait d'engager la
politique évoquée en matière d'orientation, de
décentralisation et d'expérimentation, et a souligné le
nécessaire rôle de coordination de l'Etat en ce domaine.
M. André Maman
a rappelé que les universités
américaines étaient d'un niveau très différent, a
noté que leurs étudiants enregistraient un taux d'échec
très limité et a estimé qu'un classement des
établissements universitaires était inévitable.
Il a également souligné la nécessité de
développer des contacts personnels entre les enseignants et leurs
étudiants et s'est enquis de la coopération existant entre
présidents d'université, notamment pour confronter leurs
expériences pédagogiques.
Il a enfin estimé que l'entrée à l'université
n'était pas un droit absolu et qu'il convenait de faire participer les
étudiants au financement de leurs études en développant un
système de bourses adapté à leurs ressources.
Répondant à ces interventions,
M. Dimitri Lavroff
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- le cadre réglementaire existant permettrait de développer
à titre expérimental des DEUG technologiques qui seraient ensuite
habilités par le ministère ;
- le niveau académique ou régional constitue le meilleur
échelon pour engager de telles expériences qui ne devraient
cependant pas systématiquement être choisies en fonction des
besoins de l'économie locale ou régionale ;
- les régions devraient être associées à la
définition de ces expérimentations sans toutefois avoir la
tentation d'exercer une quelconque " co-responsabilité "
dans
les formations dispensées ;
- les projets de formation devraient être soumis au ministère et
faire l'objet d'une évaluation au bout de trois années de mise en
oeuvre ;
- une expérience de DEUG portant sur un nombre d'étudiants trop
réduit n'aurait pas de signification et les projets de formation
devraient concerner plusieurs régions ;
- l'existence de quelque 90 universités et des vingt-deux régions
devrait permettre d'étendre les expérimentations à
l'ensemble du territoire en diversifiant les objectifs recherchés ;
- l'orientation des élèves devrait intervenir d'abord en classe
de seconde et permettre de repérer les élèves susceptibles
de suivre des études supérieures de caractère
abstrait ;
- une deuxième orientation s'effectuerait à l'issue de la
terminale, au moyen de fiches d'information et d'entretiens
individualisés et serait officialisée dans le carnet scolaire des
élèves, qui n'est malheureusement pas transmis à
l'université ;
- une réorientation pourrait intervenir au milieu de la première
année de premier cycle, ceci supposant des possibilités de
réorientation vers des DEUG technologiques non sélectifs ;
- l'organisation d'une année universitaire par semestres pourrait
constituer une solution satisfaisante pour certaines disciplines mais ne
saurait être généralisée : un échec
constaté en première année de médecine devrait
ainsi justifier une réorientation ;
- la diffusion des résultats des étudiants par disciplines selon
les types de baccalauréat est de nature à dissuader les
bacheliers technologiques d'emprunter des filières qui leur sont
inadaptées ;
- la réduction des besoins d'encadrement des entreprises, au profit des
techniciens supérieurs, impose de développer les formations
correspondantes en liaison avec les collectivités locales et les
organisations d'employeurs et de salariés dans le cadre d'une instance
académique ou régionale ;
- la création des antennes universitaires a répondu à une
nécessité sociale et à l'intérêt des villes
moyennes et a permis de démocratiser l'accès à
l'enseignement supérieur en permettant à des communes de
conserver leur population jeune ;
- les antennes universitaires ne devraient accueillir que des étudiants
de premier cycle : une université de plein exercice a en effet besoin
d'un environnement diversifié (bibliothèques, activités
culturelles) pour fonctionner de manière satisfaisante ;
- les nouveaux sites technologiques devraient être non sélectifs
et utiliser les ressources de l'alternance et de l'apprentissage ;
- l'encadrement et la direction des premiers cycles devraient être
assurés par des professeurs de rang A, en petit nombre :
l'utilisation des professeurs agrégés de l'enseignement
secondaire apparaît inévitable dans les sites universitaires
décentralisés, mais leur nombre doit être limité
dans certaines disciplines, même si leur coût est moins
élevé que celui des enseignants-chercheurs ;
- il conviendrait de développer des filières mixtes
résultant de la juxtaposition de deux disciplines, afin de
répondre aux besoins des entreprises ;
- si les IUT ont connu depuis leur création une grande réussite,
ils sont aujourd'hui confrontés au phénomène de la
poursuite des études supérieures, notamment de la part des
meilleurs lycéens qui abandonnent ultérieurement les
filières technologiques ;
- il serait illusoire d'interdire la poursuite d'études aux
étudiants des IUT, comme l'a montré l'exemple d'une circulaire
récente : la liaison entre ces instituts et les IUP doit être
développée, comme d'ailleurs la transformation de certains IUT en
écoles d'ingénieurs ;
- la création d'universités thématiques, notamment
orientées vers la technologie, participe d'une diversification des
formations supérieures ;
- l'idée d'un cursus entre IUT et grandes écoles
d'ingénieurs supposerait une formation scientifique et
générale plus abstraite de leurs étudiants ;
- la réussite des antennes universitaires est subordonnée
à une diversification des formations proposées, tant
générales que technologiques ;
- l'autonomie des premiers cycles permet d'envisager leur réforme sans
tenir compte de l'évolution future des deuxième et
troisième cycles : leur spécificité justifierait (en
dépit des résistances des présidents d'université)
d'envisager la création d'unités de formation et de recherche de
premier cycle qui seraient dotées d'un directeur ;
- des primes pédagogiques sont déjà prévues pour
inciter les professeurs à enseigner en premier cycle, mais n'ont pas eu
pour effet d'y faire venir les meilleurs ;
- les PRAG ont vocation à rester affectés, sauf pour certaines
formations complémentaires, dans les premiers cycles ;
- le développement de l'autonomie des universités doit se
concilier avec le maintien du caractère national des
diplômes ;
- la modulation des droits d'inscription devrait relever, ainsi que
l'attribution des bourses, de la compétence des universités et
être complétée par un développement du
système des prêts aux étudiants.
IX. MERCREDI 17 AVRIL 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. -
La mission a d'abord procédé
à
l'audition
de
M. Roger Fauroux, président de la
commission chargée d'une mission de réflexion sur le
système éducatif.
A titre liminaire,
M. Roger Fauroux
a précisé que la
démarche suivie par sa commission était tout à fait
distincte de celle engagée par le ministre avec les états
généraux de l'université.
S'agissant des premiers cycles, il a constaté que de nombreux nouveaux
étudiants accédaient à l'université dans un
état de dénuement culturel qui les rend inaptes à suivre
un enseignement supérieur, notamment dans les DEUG littéraires,
mais aussi scientifiques. La prise en compte de cette situation commande de
réfléchir à la mise en place d'une année de
transition entre le lycée et l'université en proposant aux
étudiants une remise à niveau " culturelle ", en leur
dispensant des cours d'initiation par groupe de disciplines qui leur
permettraient par ailleurs éventuellement de reconsidérer leur
orientation initiale, ainsi qu'en leur fournissant des outils
méthodologiques spécifiques pour bâtir leur projet
universitaire. Il a rappelé que des expériences avaient
déjà été engagées en ce domaine par
plusieurs universités et que celles-ci mériteraient d'être
étendues, ce qui suppose un renforcement de l'encadrement des DEUG, qui
est aujourd'hui très insuffisant, en utilisant notamment des professeurs
agrégés de l'enseignement secondaire (PRAG), ces derniers ayant
selon lui les qualités requises pour dispenser une formation aussi large
que possible, sous réserve que leur statut soit adapté et que les
premiers cycles ne s'en trouvent pas " secondarisés "pour
autant. Il a estimé que ce recours aux PRAG s'impose du fait de la
faible participation des professeurs d'université au fonctionnement des
premiers cycles, à l'exception notable cependant des filières
juridiques. Il a ensuite insisté sur la nécessité d'une
organisation rénovée de la première année
universitaire selon des séquences trimestrielles ou semestrielles,
permettant notamment des réorientations rapides entre les
filières. Il a également dénoncé l'état
désastreux des bibliothèques universitaires, auxquelles ne
peuvent accéder les étudiants des premiers cycles.
Il a par ailleurs évoqué la possibilité de créer
des filières technologiques courtes non sélectives dans les
premiers cycles, alors que les Instituts universitaires de technologique (IUT)
et les Sections de techniciens supérieurs (STS) ont été
détournés de leur vocation professionnelle et accueillent
désormais les meilleurs lycéens qui poursuivent ensuite des
études générales ; il a ainsi préconisé
une plus grande ouverture de ces filières sélectives aux
élèves moyens qui sont contraints aujourd'hui de se tourner vers
les DEUG.
S'agissant de l'orientation, il a indiqué que les étudiants
étaient opposés à cette idée qui est
assimilée à celle de la sélection mais a rappelé
que près du quart de notre système d'enseignement
supérieur était constitué de filières
sélectives ; les grandes écoles accueillent notamment
4 % des étudiants et bénéficient de 20 % des
moyens affectés à l'enseignement supérieur tandis que les
autres filières générales pratiquent une sélection
anarchique et sauvage par l'échec, le devenir des laissés pour
compte de l'université restant largement inconnu.
Il a estimé que l'importance de l'échec universitaire, qui est
source de frustrations et de gaspillage financier, appelait d'abord un
renforcement de l'orientation dans les établissements d'enseignement,
fondé sur une information sur les débouchés et les chances
de réussite des bacheliers dans les diverses filières, les
professeurs principaux, convenablement formés, étant
appelés à jouer un rôle privilégié dans cette
information des élèves. Il a néanmoins souligné le
caractère innovateur de notre système éducatif qui a
lancé des expériences intéressantes dans le domaine de
l'orientation, permettant notamment de cerner la personnalité des
élèves et de définir un projet individuel de formation.
A l'issue de cet exposé, un large débat s'est engagé.
M. Daniel Eckenspieller
a noté le réalisme de la
proposition qui consisterait à remettre à niveau les nouveaux
étudiants mais a fait observer que cette remise à niveau
s'imposait également à tous les stades du système
éducatif, notamment en classe de 6e et de seconde.
Il a également évoqué la possibilité d'affecter des
professeurs agrégés à la fois en classe de terminale et
dans les premiers cycles universitaires.
M. Franck Sérusclat
s'est demandé si le caractère
parallèle des démarches entreprises par le ministre et par la
commission Fauroux n'inciterait pas cette dernière à organiser
également des états généraux et s'est
interrogé sur la véracité des révélations
publiées par la presse concernant les premières conclusions de la
commission. Il a également souligné l'accumulation des retards
constatés à tous les niveaux du système éducatif,
notamment à l'école primaire, en dépit de la
réussite d'expériences locales qui n'ont pas été
étendues.
M. James Bordas
est convenu que l'échec universitaire
résultait pour une large part d'un défaut d'orientation des
lycéens, s'est demandé si les professeurs principaux
étaient prêts à s'impliquer en ce domaine, et a
souligné la nécessité d'associer les familles à
l'information dispensée par les " orienteurs ".
S'appuyant sur son expérience d'enseignant,
M. Jean-Louis
Carrère
a regretté que les
" maîtres-receveurs " dénoncent sans doute trop
systématiquement le niveau insuffisant des connaissances acquises
antérieurement par leurs élèves et a rappelé que
les enseignants du primaire et du secondaire bénéficiaient d'une
formation pédagogique, à l'inverse des professeurs
d'université qui privilégient leur activité de recherche.
Il a rappelé que des efforts de coordination ont été
engagés entre les maîtres et les professeurs des écoles,
des collèges et des lycées, ainsi qu'entre le deuxième
cycle de l'enseignement secondaire et les premiers cycles universitaires.
L'université ne doit pas, selon lui, constituer un sanctuaire
pédagogique et rester à l'écart des réformes, et il
a notamment regretté l'échec du tutorat dans les premiers cycles.
Il a enfin dénoncé le détournement de la vocation des STS
et des IUT qui assurent également des formations de proximité.
M. Adrien Gouteyron, président,
a demandé s'il
conviendrait de maintenir une certaine proportion d'enseignants-chercheurs dans
la première année universitaire de remise à niveau.
M. Pierre Laffitte
s'est félicité de la méthode de
travail retenue par la commission et qui tend notamment à
privilégier l'observation des expériences engagées sur le
terrain et a rappelé que la mission d'information du Sénat sur
les premiers cycles s'était inspirée du même souci en
lançant une consultation sur le réseau Internet.
Soulignant la richesse des expériences engagées localement, mais
aussi leur caractère artisanal et confidentiel, il a estimé que
leur extension devrait plutôt se réaliser à partir d'un
niveau décentralisé en utilisant les ressources de l'enseignement
à distance et du télé-enseignement.
Il a également évoqué la possibilité d'utiliser,
notamment dans le domaine de l'orientation, les " bonnes
volontés " extérieures au système éducatif
(parents d'élèves, collectivités locales, entreprises,
jeunes retraités).
Il a par ailleurs souligné le rôle que pourraient jouer la
chaîne de télévision éducative et les technologies
nouvelles dans le système scolaire et universitaire, notamment pour
constituer des réseaux entre petits établissements.
M. Jean Bernadaux, co-rapporteur,
a souligné les
difficultés rencontrées par les thésards issus du monde de
l'entreprise pour devenir professeurs d'université.
Répondant à ces interventions,
M. Roger Fauroux
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- le système éducatif fonctionne selon des séquences
isolées relevant de chaque ordre d'enseignement et un partage des
professeurs agrégés entre le lycée et l'université
constituerait un progrès ;
- le défaut d'acquisition des connaissances selon les niveaux scolaires
résulte d'abord de la pression démographique qui a pesé
sur le système éducatif mais aussi, notamment pour le primaire,
de la mise en oeuvre de réformes pédagogiques discutables, de
l'éclatement des familles, d'une concentration géographique de
l'immigration dans certaines localités et du développement de la
télévision ;
- l'institution du collège unique doit être
préservée et sa souplesse s'oppose à la rigidité
des filières du système allemand : son bon fonctionnement
suppose cependant un recours à des classes d'initiation
pré-professionnelle et un développement des passerelles pour
permettre un retour des élèves dans l'enseignement
général ;
- l'évolution différentielle de la démographie entre les
enseignements primaire, secondaire et supérieur commanderait logiquement
un transfert des crédits, et une discrimination budgétaire
positive, en faveur des premiers cycles universitaires ;
- la commission Fauroux et les états généraux fonctionnent
de manière autonome et formuleront des propositions distinctes, le
ministre sera cependant entendu prochainement par les membres de la
commission ;
- les difficultés rencontrées par les élèves dans
le primaire se prolongent tout au long de la scolarité puisque 5 %
seulement de ceux qui ont redoublé le cours préparatoire passent
avec succès le baccalauréat ;
- les " révélations " publiées par la presse sur
les travaux de la commission sont tirées d'un projet d'introduction au
rapport et d'un relevé de certaines réflexions de ses membres qui
n'ont pas été soumis à l'examen de la commission ;
- les professeurs principaux sont sans doute disposés à valoriser
leur métier en se consacrant à l'orientation de leurs
élèves et les préventions idéologiques entre
enseignants et entreprises ont aujourd'hui tendance à s'effacer ;
- les professeurs des universités étrangères, à la
différence des nôtres, sont jugés en fonction de leurs
performances pédagogiques et une évaluation des enseignements par
les étudiants existe déjà dans certaines de nos grandes
écoles ; l'évaluation des universités devrait par
ailleurs être confiée à un office indépendant de
l'exécutif ;
- du fait de notre tradition jacobine, les universités ne disposent que
d'une autonomie limitée alors que celle-ci est nécessaire,
notamment pour dialoguer avec les collectivités locales et leurs
homologues étrangères ;
- le ministère de l'éducation nationale est régi par une
organisation de type vertical qui constitue un obstacle à la mise en
place de réseaux ;
- la commission a constaté au cours de ses déplacements que
certains établissements secondaires utilisaient d'ores et
déjà largement toutes les ressources de l'enseignement à
distance.
La mission a ensuite procédé à
l'audition
de
M. Jean-Marc Monteil, premier vice-président de la
conférence des présidents d'université (CPU).
Dans une déclaration liminaire,
M. Jean-Marc Monteil
a d'abord
tenu à préciser la position prise par la CPU contre la
sélection à l'entrée à l'université,
laquelle ne témoigne en rien d'un quelconque laxisme en faveur des
étudiants.
Il a rappelé que le système universitaire était
déjà très sélectif, soit dans les IUT, soit du fait
de l'échec constaté dans les premiers cycles et que tout nouveau
projet d'orientation était considéré à tort comme
destiné à écarter de l'université les
étudiants en difficulté.
Il a au contraire indiqué que le récent colloque réuni
à Saint-Malo avait été l'occasion pour la CPU de
" faire sauter le bouchon de la sélection " et d'examiner
les
réponses qui peuvent être apportées aux étudiants en
situation d'échec. Soulignant que la massification de l'enseignement
supérieur commandait d'orienter les flux d'étudiants dans
diverses filières en fonction de leurs motivations profondes et de leurs
compétences acquises dans l'enseignement secondaire, il a rappelé
qu'une préorientation existait déjà dans les
filières scientifiques et techniques à la différence des
DEUG littéraires, de sciences humaines et de droit.
Il a par ailleurs observé que les taux d'échec étaient
comparables dans l'ensemble des filières et que 40 % des
élèves des classes préparatoires n'intégraient pas
les grandes écoles et se repliaient sur les premiers cycles
généraux.
Il a estimé que les dysfonctionnements constatés dans les
premiers cycles qui rassemblent des étudiants orientés par
défaut ou après un échec dans des filières
sélectives, le détournement de la vocation professionnelle des
IUT, les aspirations à la poursuite d'études supérieures,
le taux d'échec des bacheliers technologiques et professionnels dans les
DEUG appelaient des solutions urgentes sauf à affecter les professeurs
d'université à des tâches subalternes de remise à
niveau dans les disciplines secondaires de base. Afin de lutter contre la
tendance à l'accumulation des diplômes, il a
préconisé une ouverture des STS et des IUT aux étudiants
qui souhaitent s'insérer rapidement dans la vie professionnelle, en
prévoyant des possibilités de retour dans le système
universitaire.
Il a par ailleurs noté que la réussite d'une politique
d'orientation supposait une information dispensée à l'interface
des enseignements secondaire et supérieur d'une part, et des mondes de
l'université et de l'entreprise, d'autre part. Il a également
évoqué la difficulté de concilier une forte demande
sociale de formation et les besoins immédiats et évolutifs des
employeurs : une " plate-forme des formations " qui
serait
définie par l'université et les entreprises constituerait une
solution qui existe déjà au niveau régional.
Il a également souligné la nécessité
d'institutionnaliser une concertation et une information réciproque
entre les établissements employeurs, afin d'éviter les
décalages entre des schémas académiques de formations et
les besoins économiques régionaux : les diplômes
créés, y compris les DESS, doivent ainsi tenir compte des
réalités économiques et la formation de la masse des
étudiants doit être appréhendée en terme d'objectifs
dans un système de filières diversifiées qui serait
complété par les ressources de la formation continue.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est engagé.
M. Pierre Laffitte
a déclaré souscrire à
l'essentiel de ces développements et s'est interrogé sur les
moyens de développer les capacités créatrices, l'esprit
d'entreprise et les initiatives personnelles au sein de l'université.
Il a également évoqué la prise en compte des fonctions et
des capacités pédagogiques dans l'évaluation des
enseignants.
Citant l'exemple de l'université de Nice qui propose un DEUG comportant
une formation en alternance, il s'est interrogé sur les perspectives de
généralisation d'une telle initiative et les possibilités
d'initier les élèves de terminale à une
méthodologie propre à la recherche. Se demandant si l'orientation
des étudiants relevait exclusivement de personnels appartenant à
l'université, il a souligné l'intérêt de recourir
pour cette fonction à des bénévoles, notamment des jeunes
retraités, étrangers au système éducatif.
M. Adrien Gouteyron, président,
s'est demandé si la
communauté universitaire était prête à accepter une
évaluation de ses enseignants non exclusivement fondée sur les
activités de recherche et s'est interrogé sur les
possibilités d'initiative des présidents d'université en
ce domaine. Il s'est également enquis des perspectives d'une mise en
place éventuelle d'un système de consolidation des acquis des
nouveaux étudiants qui accèdent au premier cycle ainsi que de la
vocation des professeurs d'université à participer à cette
remise à niveau, notamment dans les disciplines fondamentales non
scientifiques.
Il a par ailleurs souhaité obtenir des précisions sur
l'efficacité des services d'information et d'orientation de
l'université de Clermont II et a évoqué le
problème de la répartition des rôles en ce domaine entre
les enseignants et les personnels spécialisés.
M. Jean-Louis Carrère
a rappelé que le problème de
la qualité pédagogique des professeurs d'université
n'était jamais soulevé lors de l'examen des causes de
l'échec universitaire.
Il est ensuite convenu que les relations entre l'université et les
entreprises étaient particulièrement étroites au plan
régional, et qu'il convenait de les aborder sans parti pris
idéologique.
Il a évoqué par ailleurs les difficultés
éprouvées par les banques pour participer au financement de
certains projets universitaires lorsque les dossiers ne sont pas validés
par la hiérarchie de l'université.
M. James Bordas
a souligné le pragmatisme et le caractère
dynamique des propos entendus. S'appuyant sur son expérience de maire,
il a estimé que l'information des jeunes sur les formations était
nécessaire pour éviter la multiplication des chômeurs
diplômés et s'est interrogé sur les modalités d'une
action efficace en ce domaine.
M. Jean-Pierre Carle
a insisté sur la nécessité de
développer des partenariats dans la définition des formations de
proximité. Prenant acte du détournement du système
d'orientation vers les filières courtes, qui résulte notamment de
l'action des chefs d'établissement, il a souhaité obtenir des
précisions sur les moyens susceptibles de réorienter les flux des
étudiants. Il s'est enfin inquiété des modalités
d'un renforcement des services de l'orientation et du rôle futur des
conseillers dont l'efficacité est fréquemment mise en cause.
M. Jean Bernadaux, co-rapporteur
, s'est enquis du rôle joué
par la CPU dans l'organisation des états généraux de
l'université.
Répondant à ces interventions,
M. Jean-Marc Monteil
a
apporté les précisions suivantes :
- l'innovation et la créativité à l'université
restent encore très limitées et une nouvelle dynamique en ce
domaine, susceptible de déboucher notamment sur des créations
d'entreprises, ne pourrait résulter que d'une association des
établissements avec leurs partenaires (collectivités locales,
milieux économiques, banques...) ; si la communauté
universitaire est disposée à s'engager dans cette voie, comme le
montre l'exemple des laboratoires de recherche et les relations nouées
avec les universités étrangères, l'université
française fournit encore une réponse trop académique
à un monde économique qui reste frileux ;
- si la carrière des universitaires est commandée par leur
dossier scientifique et l'importance de leurs activités de recherche,
les enseignants-chercheurs connaissent au cours de leur vie professionnelle des
activités de plus en plus diversifiées ;
- il ne serait pas souhaitable, selon lui, d'instaurer un contrôle sur
l'activité de recherche des enseignants-chercheurs, sauf à
hypothéquer la créativité des meilleurs ;
- l'évaluation du contenu des enseignements par les étudiants
serait préférable à l'institution d'un corps d'inspecteurs
généraux et se généralisera dans quelques
années, mais l'hétérogénéité des
populations étudiantes impose des stratégies pédagogiques
complexes dans les premiers cycles ;
- la démocratisation universitaire est une chance pour le pays, mais
elle doit s'accompagner de la recherche d'une insertion professionnelle des
étudiants en fonction de leurs capacités et de leur motivation,
sauf à conforter la dynamique actuelle de l'échec ;
- si la sélection est inséparable du parcours universitaire, il
convient de la situer à la sortie du système plutôt
qu'à son entrée en gérant
l'hétérogénéité des étudiants par la
diversification des filières ;
- les présidents d'université jouent un rôle essentiel dans
l'organisation des états généraux : cette
consultation appelle des réponses positives qui devraient permettre,
sans médiatisation excessive, de construire l'université de
demain ;
- la formation en alternance apparaît comme un facteur de mobilité
intellectuelle pour les étudiants mais son développement se
heurte à la capacité d'accueil des entreprises ;
- la recherche reste indispensable dans les premiers cycles car elle apporte un
esprit de méthode aux enseignants et aux étudiants ;
- la consolidation des acquis scolaires pourrait être assurée par
les universités, notamment dans les filières scientifiques, en
multipliant les travaux pratiques ; dans le domaine des lettres et des
sciences humaines, il conviendrait plutôt de recourir aux technologies
nouvelles pour permettre aux nouveaux étudiants d'acquérir une
maîtrise syntaxique ou linguistique qui leur fait souvent
défaut ;
- si l'université est prête à évoluer et à se
" réconcilier " avec la nation, il conviendrait de lui en
donner les moyens sinon les meilleurs enseignants la délaisseront :
elle a notamment un rôle considérable à jouer sur le plan
international et européen ;
- le service d'orientation de l'université de Clermont II dispose
de quatre postes de conseillers et de trois universitaires pour 20.000
étudiants ; une véritable politique de l'orientation suppose
une coopération entre le lycée et l'université, une
connaissance par les conseillers des diplômes délivrés par
les établissements ainsi que la création d'un corps de
professionnels puisés notamment parmi les universitaires et justifiant
d'une expérience du monde de l'entreprise.
X. MERCREDI 24 AVRIL 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La mission a d'abord procédé
à
l'audition
de
MM. Philippe Evanno,
délégué général, et
Michel
Legrand
, chargé de mission de l'
Union nationale universitaire
(UNI).
M. Philippe Evanno
a déclaré à titre liminaire que le
problème de l'information et de l'orientation des étudiants
devait être envisagé dans la perspective générale
d'un développement de la formation professionnelle et continue supposant
un réexamen d'ensemble du dispositif éducatif, notamment dans
l'enseignement supérieur. A cet égard, l'orientation doit
être envisagée comme un processus continu permettant de
gérer les flux d'étudiants entre les diverses filières et
de les orienter en grand nombre vers les voies technologiques et
professionnalisées débouchant sur des emplois.
Il a rappelé que le système d'orientation fonctionnait
actuellement " à l'envers ", en contradiction avec la
vocation
des filières sélectives courtes qui accueillent désormais
une proportion importante des meilleurs bacheliers, notamment d'origine
modeste, lesquels se réorientent ultérieurement, après
avoir obtenu un diplôme universitaire de technologie (DUT) ou un brevet
de technicien supérieur (BTS), vers des études longues.
L'idée d'une orientation plus réaliste, même si elle est
mal perçue par les lycéens et les étudiants, permettrait
de réorganiser notre système éducatif de l'enseignement
secondaire jusqu'aux formations supérieures en créant notamment
une véritable filière technologique et en autorisant des sorties
plus rapides vers l'entreprise.
L'organisation actuelle du ministère, qui couvre désormais les
deux ordres d'enseignement, apparaît par ailleurs de nature à
rendre plus aisée la mise à plat du système
éducatif et à mieux coordonner les administrations
concernées dont les insuffisances ont été pour partie
à l'origine de l'affaire du contrat d'insertion professionnelle (CIP).
La seule solution permettant de réguler les flux étudiants
consisterait donc, d'une part, à prendre acte du souhait des titulaires
de DUT et de BTS de poursuivre des études longues en favorisant
cependant les sorties vers la vie professionnelle, la réactivation des
dispositifs de la formation professionnelle et de la formation continue pouvant
autoriser leur retour vers l'enseignement supérieur jusqu'à des
formations de niveau ingénieur, et, d'autre part, de prendre en compte
les aspirations des diplômés à bac + 2 qui sont
actuellement empêchés d'accéder à des fonctions
d'encadrement dans l'entreprise.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est engagé.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est enquis des modalités
d'organisation et de la vocation d'une future filière technologique. Il
s'est demandé si celle-ci serait également destinée
à accueillir les bacheliers généraux et si elle serait
susceptible de permettre aux étudiants de poursuivre leurs études
jusqu'au doctorat.
Il a enfin souhaité obtenir des précisions sur la position de
l'UNI concernant le problème de la sélection.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a souhaité recueillir
l'avis de l'UNI sur la procédure des états généraux
de l'université et sur les problèmes de l'information et de
l'orientation des étudiants tels qu'ils ont été
présentés par la presse qui a rapporté les
premières pistes de réflexion de la commission Fauroux.
Il s'est enquis des propositions de l'UNI concernant un éventuel
système de pré-inscription universitaire, une diversification des
formations offertes dans les premiers cycles et un meilleur encadrement de
ceux-ci.
Il a demandé si une proportion importante d'enseignants-chercheurs
était nécessaire dans les premiers cycles et comment pourrait
être assurés une pluridisciplinarité de la formation, un
accès plus aisé aux instituts universitaires de technologie (IUT)
et aux sections de techniciens supérieurs (STS) aux bacheliers
technologiques et une ouverture des grandes écoles aux titulaires de DUT
et de BTS. Il s'est enfin interrogé sur les modalités
souhaitables de développement de l'enseignement technologique, de
l'apprentissage et de la formation en alternance au sein de
l'université, sur l'évaluation des enseignements qui y sont
dispensés par les étudiants et sur l'avenir des antennes
universitaires.
Répondant à ces interventions,
MM. Philippe Evanno
et
Michel Legrand
ont notamment apporté les précisions
suivantes :
- une grande filière technologique devrait pouvoir être ouverte
à tous les lycéens et à tous les bacheliers, du
lycée professionnel jusqu'à l'école d'ingénieur, en
passant par les formations supérieures intermédiaires ; elle
devrait s'accompagner de la création de passerelles et d'un
élargissement des moyens de la formation continue et de la formation
professionnelle permettant à ceux qui ont choisi la voie technologique
de revenir dans les filières générales ;
- les effectifs d'étudiants en formation continue devraient être
comptabilisés comme de véritables étudiants, ce qui n'est
pas le cas dans le système San Remo de répartition des moyens
entre universités ;
- la mise en oeuvre du partage du temps de travail permettrait de
libérer des postes supplémentaires d'encadrement dans les
entreprises alors que le nombre de diplômés est aujourd'hui trois
fois supérieur à celui des postes offerts ;
- le processus de consultation des états généraux de
l'université a été engagé avec retard et risque de
se traduire par la seule participation des élus étudiants et
enseignants et d'aboutir à une synthèse décevante ne
représentant que l'intersyndicale dominante de chaque
établissement ;
- la composition de la commission Fauroux, en dépit de la qualité
de ses membres, apparaît déséquilibrée et semble
déconnectée des réalités universitaires ;
certaines pistes de réflexion qui ont été
dévoilées par la presse semblent relever de la provocation et
s'inscrivent dans un jeu médiatique obscur qui paraît opposer son
président et le ministre : il conviendrait que la commission Fauroux
prenne en compte les problèmes réels de l'université, sauf
à risquer de générer une agitation qui pourrait être
utilisée par certains lors de la prochaine rentrée universitaire ;
- l'image de l'apprentissage est désormais plus attractive, comme en
témoigne sa mise en oeuvre dans certaines grandes écoles de
commerce, et cette formule est appelée à jouer un rôle
moteur dans les filières de formation au niveau régional : son
développement suppose cependant des moyens adaptés pour
répondre à une forte demande puisque l'enseignement
supérieur n'accueille que 17.000 apprentis ;
- la formation en alternance devrait être développée
à la sortie du diplôme d'études universitaires
générales (DEUG), quel que soit le type de formation, pour
faciliter l'accès de ces diplômés en entreprise : la
réalisation de cet objectif permettrait de réduire les effectifs
en deuxième cycle et devrait s'inscrire dans la perspective de la mise
en oeuvre du droit au retour en formation, qui existe mais dont les
modalités n'ont pas été précisées ;
- l'UNI est défavorable au principe de la sélection à
l'entrée à l'université, à l'exception des
filières où elle existe déjà.
La mission a ensuite procédé à
l'audition
de
Mme
Isabelle Martin
, chargée de mission de la
Mutuelle nationale des
étudiants de France (MNEF).
Dans une déclaration liminaire,
Mme Isabelle Martin
a
indiqué que l'information et l'orientation des étudiants ne
relevaient pas directement des compétences de son organisation mais que
l'étude des problèmes de la vie étudiante et du statut de
l'étudiant lui permettait d'avoir une opinion sur ces questions
essentielles.
A cet égard, elle a rappelé l'expérience engagée
conjointement par la MNEF et l'office national d'information sur les
enseignements et les professions (ONISEP) pour informer les étudiants
par téléphone sur leur orientation.
Elle a ensuite constaté que le développement de la poursuite des
études supérieures résultait d'une demande des familles
qui sont par ailleurs souvent ignorantes des réalités
universitaires, ce phénomène se traduisant par de
fréquentes réorientations, à l'intérieur ou
à l'extérieur de l'université, pour les bacheliers les
moins préparés. Afin de réduire le sentiment
d'échec et d'exclusion de ces étudiants, elle a
préconisé une extension du statut d'étudiant à
l'ensemble des jeunes, quel que soit le statut des formations suivies.
Elle a ajouté que le rôle de l'ONISEP devrait être
élargi afin de permettre aux collégiens et aux lycéens
d'élaborer un véritable projet d'étude ou professionnel et
de réduire les effets pervers du " bouche à oreille " :
cet objectif suppose, sur un plan général, une meilleure
articulation entre le lycée et l'université.
S'appuyant sur l'expérience de la politique de prévention
sanitaire engagée dans les lycées, elle a enfin
préconisé une plus grande mobilisation des enseignants-chercheurs
et surtout des étudiants avancés dans leurs études pour
aider les lycéens à mieux définir leurs choix
d'orientation.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est engagé.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est enquis du bilan de
l'expérience citée par Mme Isabelle Martin et a
souligné la difficulté d'accorder un statut d'étudiant
à des apprentis qui restent régis par un contrat de travail,
même si cette intention apparaît selon lui excellente.
M. Ivan Renar
s'est interrogé sur les conséquences de
l'état sanitaire et social des étudiants de premier cycle et sur
les solutions qui permettraient d'améliorer leur accès aux soins.
M. Pierre Laffitte
a demandé si l'idée d'étendre le
statut d'étudiant à l'ensemble des jeunes en formation, qui
serait susceptible de valoriser les filières de l'apprentissage et de
l'alternance, était bien reçue par les divers acteurs du
système universitaire.
Il s'est déclaré favorable à la participation des
étudiants à l'orientation des lycéens dans le cadre des
forums d'information et s'est interrogé sur les moyens de
développer ces formules, en soulignant l'intérêt d'une
information qui ne soit pas dispensée uniquement par l'éducation
nationale.
Il s'est enfin enquis des propositions de la MNEF concernant l'utilisation des
technologies nouvelles, en particulier en classe de terminale au lycée
et dans les premiers cycles universitaires, qui sont souvent
sous-équipés en matière d'équipements
micro-informatiques.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a rappelé qu'il avait
proposé récemment d'étendre le statut d'étudiant
aux apprentis, et que cette proposition s'était heurtée à
l'opposition du ministre chargé du travail. Il a souhaité que
cette question importante soit abordée dans le cadre des états
généraux de l'université.
M. Adrien Gouteyron, président,
et
M. Pierre Laffitte
ont
également souligné la nécessité de résoudre
ce problème.
Répondant à ces interventions,
Mme Isabelle Martin
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- l'expérience engagée en matière de prévention
sanitaire a été engagée depuis un an dans huit villes
universitaires : cette formule qui privilégie le recours aux
étudiants s'est également développée dans d'autres
domaines, notamment dans le cadre de la politique de la ville en direction des
jeunes en difficulté. Elle répond à la demande de nombreux
étudiants dans certaines disciplines, telles les sciences humaines, qui
envisagent cette aide comme une forme de pratique professionnelle, et elle
autorise un contact direct, notamment au niveau du langage, entre les jeunes et
les étudiants ;
- l'état sanitaire des étudiants est préoccupant et
certaines maladies et anomalies ne sont pas dépistées ;
- la montée du stress et l'apparition de problèmes
psychologiques, notamment au moment des examens, conjuguées aux
méfaits de l'automédication, influent sur la capacité des
étudiants à affronter la réalité
universitaire ;
- les enquêtes réalisées par l'observatoire de la vie
étudiante, si elles ne révèlent pas un appauvrissement
général des étudiants, qui restent pour leur
majorité aidés par leur famille, font apparaître cependant
une précarisation de certaines catégories, notamment les
boursiers confrontés à une perspective de redoublement ;
- si les parlementaires envisagent favorablement l'extension du statut
d'étudiant, cette proposition semble recevoir un accueil plus
mitigé des présidents d'université et surtout de
l'entourage du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement
supérieur et de la recherche, qui craint une dévalorisation des
formations supérieures existantes ; une telle réforme aurait
par ailleurs des incidences financières importantes si elle devait
entraîner un élargissement du droit aux bourses
universitaires ;
- certaines universités font d'ores et déjà participer
leurs étudiants à l'information en organisant des forums
d'accueil des nouveaux étudiants, et la MNEF a préconisé
un système d'exonération des charges sociales pour les
étudiants qui percevraient une rémunération
destinée à financer leurs études en contrepartie de cette
aide à l'orientation des lycéens et des bacheliers ;
- le développement des technologies nouvelles est nécessaire dans
les lycées et dans les premiers cycles de l'enseignement
supérieur. Il répondrait d'ailleurs à la demande des
élèves et des étudiants qui sont de plus en plus
familiarisés avec ces techniques ;
- la diversification des formations, recherchée aujourd'hui à
travers la création d'une grande filière technologique avec le
développement de l'apprentissage et de l'alternance, répond
à l'aspiration de l'ensemble des bacheliers à poursuivre des
études supérieures, et commande d'étudier, notamment dans
le cadre des états généraux de l'université, le
problème complexe de l'extension du statut d'étudiant à
l'ensemble des jeunes en formation, afin notamment d'atténuer les
éléments de rupture sociale à l'intérieur d'une
même génération.
La mission a ensuite procédé à l'
audition
de
M. Pouria Amirshahi
, président de l'
Union nationale des
étudiants de France indépendante et démocratique
(UNEF-ID)
.
Dans une déclaration liminaire,
M. Pouria Amirshahi
a
indiqué que les problèmes de l'information et de l'orientation
des étudiants constituaient, à côté d'un encadrement
insuffisant et d'un niveau de connaissances inadapté à
l'enseignement supérieur, un facteur essentiel de l'échec dans
les premiers cycles universitaires.
Constatant que l'information dispensée aux bacheliers et aux nouveaux
étudiants était peu satisfaisante, notamment du fait de moyens
trop réduits, il a estimé qu'il convenait de passer d'un
système d'orientation forcée à un dispositif autorisant
une orientation choisie.
L'orientation forcée est commandée principalement par le nombre
de places disponibles dans les filières sélectives. Pour ce qui
est de l'université, il a rappelé que le système
" Ravel " d'inscription universitaire, s'il avait permis
dans une
certaine mesure de rationaliser les choix des bacheliers, restait très
imparfait et devrait être complété par la
possibilité pour les élèves de terminale de suivre,
pendant au moins une semaine, les enseignements dispensés dans la
filière supérieure susceptible de correspondre à leur
profil.
Il a ensuite remarqué que le taux d'échec constaté dans
les DEUG, s'il n'était pas dépourvu de tout lien avec une
mauvaise information des étudiants, résultait aussi de
l'organisation des premiers cycles et de l'impossibilité de
réorientation en cours d'année universitaire.
Il a également estimé que l'université souffrait d'une
spécialisation excessive des DEUG, et qu'il conviendrait de
réfléchir à des formules initiales de formation
pluridisciplinaire, précédant la spécialisation et la
professionnalisation ultérieures des étudiants, qui auraient
ainsi la possibilité d'entreprendre des études à leur
rythme et en fonction de leurs projets, l'université devant par ailleurs
avoir le souci de ne pas se couper du monde de l'entreprise.
Il a ajouté que cette pluridisciplinarité permettrait aux
étudiants de mieux s'adapter à l'évolution des emplois et
de ne pas conférer une responsabilité particulière
à l'université en matière de chômage si celle-ci
devait délivrer des diplômes trop spécialisés soumis
aux aléas des délocalisations d'entreprise et des transformations
technologiques.
Il a enfin souligné que la diversité des filières,
l'absence de grille d'équivalence des formations et la validation
insuffisante des acquis ne contribuaient pas à faciliter la poursuite
d'un parcours universitaire, notamment pour les diplômés d'IUT.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est engagé.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, s'est demandé si la
pluridisciplinarité proposée pour la première année
universitaire ne se rapprochait pas des anciennes classes
propédeutiques.
Citant l'exemple des étudiants en médecine qui se voient confier
au cours de leurs études des stages d'aide-soignant, il a
souligné l'intérêt d'une complémentarité des
stages avec la filière d'études suivie, même si les
tâches exercées dans le cadre de ces stages pouvaient parfois
apparaître subalternes aux étudiants.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est interrogé sur les
modalités d'organisation de l'année universitaire, sur les
publics scolaires et étudiants auxquels pourrait être ouverte la
future grande filière technologique, sur la participation des
étudiants aux états généraux de
l'université, et il a souhaité savoir si l'UNEF-ID contestait le
bien-fondé de la création de la commission Fauroux,
constituée de non spécialistes universitaires, et qui avait
été chargée par le Gouvernement de réfléchir
à l'avenir de notre système éducatif. Il a
également demandé si l'UNEF-ID avait été entendue
par la commission Fauroux.
Rappelant que les parlementaires avaient vocation à formuler des
propositions pour aménager le système universitaire, il a
indiqué que la mission d'information du Sénat sur les premiers
cycles prendrait connaissance avec intérêt des solutions
préconisées par l'UNEF-ID.
M. Ivan Renar
a souligné que le recours aux professeurs
agrégés de l'enseignement secondaire (PRAG) pouvait contribuer
à répondre au besoin de pluridisciplinarité des premiers
cycles universitaires, mais a estimé que la démocratisation de
l'université conduisait à poser le problème des moyens qui
lui étaient affectés, notamment pour assurer un encadrement
satisfaisant et remédier à " l'anonymat " des
étudiants.
M. Jean-Claude Carle
s'est enquis des moyens proposés pour
assurer la réorientation des étudiants au cours de la
première année universitaire et s'est demandé si les
étudiants qui seraient susceptibles d'être
réorientés seraient disposés à rejoindre des
classes de STS et des formations en alternance ou en apprentissage.
Il a également souligné l'amélioration constatée
dans le fonctionnement des stages en entreprises, et plus largement dans les
relations entre l'université et les entreprises.
M. Robert Castaing
a demandé si le baccalauréat actuel
restait adapté à sa fonction de premier grade universitaire.
Répondant à ces interventions,
M. Pouria Amirshahi
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- les " révélations " communiquées par la presse
sur les travaux de la commission Fauroux conduiraient à réactiver
les anciennes classes de propédeutique et à transformer le DEUG
en " super baccalauréat " ;
- l'actuel baccalauréat devrait au contraire, selon lui, rester le
premier grade universitaire et permettre l'accès aux premiers cycles,
qui ne sauraient être réduits au rôle d'une " gare de
triage " et devraient, au contraire, permettre à chaque
étudiant de progresser à son propre rythme ;
- les expérimentations engagées dans le domaine de l'organisation
de l'année universitaire consacraient déjà un
découpage par trimestres mais les expériences menées
devaient être prolongées et adaptées : à cet
égard, on constatait que les universités nouvelles qui les
avaient engagées enregistraient le même taux d'échec que
les autres universités ;
- la généralisation d'un système de tutorat
apparaîtrait plus efficace et moins traumatisante pour les
étudiants en situation difficile que la mise en place d'une année
de remise à niveau préconisée par la commission
Fauroux : ce tutorat, qui serait assuré par des étudiants de
deuxième et troisième cycles, pourrait être
rémunéré et inscrit dans le cursus universitaire des
tuteurs. Il permettrait par ailleurs de développer des méthodes
pédagogiques originales ;
- ces tuteurs seraient mis à la disposition des étudiants en
difficulté, et pourraient notamment contribuer à renforcer
l'encadrement des travaux dirigés mais ils n'auraient pas vocation
à se substituer aux enseignants ;
- les PRAG ont des compétences pédagogiques dont ne disposent pas
les enseignants-chercheurs qui ont plutôt vocation à renforcer
l'encadrement des travaux de recherche ; la démocratisation de
l'université suppose une multiplication des groupes de travaux
dirigés et un recours important aux professeurs agrégés du
secondaire qui devraient avoir également la possibilité de
s'initier à la recherche universitaire ;
- la revalorisation du statut des PRAG ne devrait cependant pas dispenser d'un
recrutement massif d'enseignants-chercheurs ;
- les étudiants sont disposés à s'engager dans des
formations en apprentissage et en alternance, y compris en sortant du
système universitaire, à condition que leur faculté de
choix soit préservée, et que soit assurée une
véritable équivalence entre les acquis professionnels et
pédagogiques, permettant des " aller et retour " entre
l'entreprise et l'université ;
- les stages en entreprises ne sont ni réglementés sur le plan
national, ni rémunérés et ne bénéficient pas
d'un encadrement satisfaisant ; ils sont souvent organisés en
violation des règles posées par le code du travail et sont
fréquemment dépourvus de tout lien avec la formation suivie par
les étudiants ;
- les antennes universitaires ont été créées dans
une certaine anarchie et la poursuite d'études de leurs étudiants
suppose un développement des moyens destinés à faciliter
la mobilité de ces derniers, notamment en matière de logement et
de transport ;
- une véritable filière technologique doit avoir vocation
à se prolonger jusqu'au troisième cycle, en développant
les activités de recherche qui sont actuellement absentes dans les
IUT : sa cohérence suppose une intégration à
l'université et cette filière devrait être d'abord
destinée à accueillir les bacheliers technologiques et
professionnels ;
- la commission Fauroux ne comprend aucun représentant de la
communauté universitaire et le caractère confidentiel de ses
travaux apparaît incompatible avec sa mission de réflexion sur
l'avenir de l'université ;
- la coexistence de deux processus de réforme, l'un et l'autre
légitimés par le Gouvernement, mais donnant lieu à deux
discours opposés, notamment en matière de sélection, ne
peut que susciter des inquiétudes et appelle une clarification de la
position officielle : le ministre devrait désormais préciser
ses orientations sur l'avenir de l'université, en excluant notamment
tout statu quo ou retour en arrière, sauf à provoquer la
naissance d'un mouvement étudiant à la prochaine rentrée
universitaire ;
- la concertation engagée au titre des états
généraux de l'université révèle pour
l'instant une faible participation des étudiants, en raison notamment de
la période choisie qui est celle consacrée à la
préparation des examens ;
- si une commission constituée de non spécialistes universitaires
peut être chargée d'engager une réflexion sur l'avenir du
système éducatif, il convient de rappeler que toutes les
tentatives menées depuis vingt-cinq ans pour réformer
l'université ont été conduites sans recueillir l'avis des
étudiants et même contre eux : à cet égard, la
commission Fauroux apparaît déconnectée des
réalités de l'université française qui reste l'une
des meilleures du monde ;
- le baccalauréat actuel s'est ouvert au plus grand nombre, ce dont il
convient de se féliciter et son rôle doit être
préservé sous réserve d'une part plus grande qui serait
faite au contrôle continu des connaissances.
La mission a ensuite procédé à l'
audition
de
M. Sylvain Tranoy
, vice-président de la
Fédération des associations générales des
étudiants (FAGE)
.
Après avoir brièvement présenté la FAGE,
M. Sylvain Tranoy
a rappelé que l'orientation des
lycéens et des étudiants relevait d'un processus continu et,
s'agissant des premiers cycles, il a estimé qu'il ne convenait pas de se
lancer dans une refonte générale des DEUG, alors que leur
rénovation pédagogique engagée à partir de 1992
n'avait pas encore été complètement mise en oeuvre :
il a jugé préférable, à cet égard, de
s'inspirer des ajustements préconisés dans un rapport de
l'inspection générale de l'administration de l'éducation
nationale de juin 1995 et de mener quelques expériences audacieuses
limitées dans le temps et dans l'espace.
Il a par ailleurs estimé que le problème des premiers cycles ne
relevait pas, en raison de son caractère sensible, des sujets qui
étaient susceptibles de faire l'objet d'un référendum sur
l'éducation.
En ce qui concerne la politique d'information, et les périodes de la
formation au cours desquelles elle devrait être plus
particulièrement développée, il a indiqué que
l'information des lycéens pourrait être en partie assurée
par des étudiants motivés dont l'activité pourrait
être valorisée en s'inscrivant dans leur cursus universitaire.
Il a par ailleurs estimé que les enseignants-chercheurs devraient se
consacrer davantage à l'animation pédagogique des premiers cycles
et au suivi de l'insertion professionnelle des étudiants, alors que ces
activités sont actuellement délaissées au profit de la
recherche.
Sur une éventuelle régulation des flux d'entrée des
étudiants dans les premiers cycles, il a précisé que son
organisation était opposée à toute idée de
sélection et s'est félicité des effets de la
démocratisation de notre enseignement supérieur.
Il a cependant ajouté que cette position n'impliquait pas un libre
accès des étudiants à la filière de leur choix et
que l'article 14 de la loi de 1984 constituait un dispositif susceptible
d'être utilisé pour réguler les flux d'étudiants.
Il a enfin estimé que l'orientation ne devait pas, en règle
générale, être imposée aux bacheliers, sauf
exception pour des filières de " deuxième ou de
troisième choix ", un système de préinscription lui
apparaissant cependant trop rigide.
S'agissant de l'organisation des premiers cycles universitaires, il a
préconisé la mise en place d'un système susceptible de
concilier les attentes des différents groupes d'étudiants, en
rappelant que la rénovation pédagogique des DEUG, qui consacrait
le découpage de l'année universitaire en semestres, permettait
d'ores et déjà de mettre en place une orientation progressive des
étudiants.
Il a cependant souligné que cette " semestrialisation "
n'était pas applicable à tous les secteurs disciplinaires,
qu'elle soulevait des problèmes de calendrier et de service des
enseignants-chercheurs, et conduisait notamment à remettre en cause la
seconde session des examens de septembre à laquelle les étudiants
restaient attachés.
Il a ensuite évoqué les expériences engagées par
quelques établissements sur la base du volontariat et qui avaient permis
de créer des DEUG à " géométrie
variable " comportant notamment des éléments de remise
à niveau et de pluridisciplinarité : elles ont permis de
mettre en place une année d'orientation " à la carte ",
sans discipline dominante, et comportant une pédagogie renforcée,
un tutorat amélioré, des modules d'intégration et
d'orientation, et une validation des acquis professionnels antérieurs.
Il a préconisé une extension de ces expériences, qui
pourraient être encouragées dans les établissements par des
incitations financières adaptées.
S'agissant des réorientations " positives " des
étudiants, il a indiqué que celles-ci impliquaient le
développement de passerelles, notamment pour celles intervenant à
la suite d'un échec universitaire.
Il a ajouté que certaines orientations qui se faisaient aussi par
défaut, notamment pour les étudiants " portés "
par leur réussite scolaire mais dépourvus de tout projet
professionnel, nécessitaient également des conseils d'orientation
en fin de première année et une plus grande utilisation des
passerelles existantes.
Il a enfin proposé que les étudiants en situation d'échec
récurrent en premier cycle, et qui sortent du système
universitaire, aient la possibilité de se tourner vers des formations
technologiques courtes de type BTS obtenues en un an.
A l'issue de cet exposé, un débat s'est engagé.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a souligné
l'intérêt des propositions avancées par M. Sylvain Tranoy.
Il a ensuite évoqué les problèmes de calendrier
soulevés par l'organisation des états généraux de
l'université et s'est interrogé sur la participation de la FAGE
à cette concertation.
M. Robert Castaing
a demandé si le baccalauréat devait
conserver son caractère actuel de premier grade universitaire.
M. Jean-Claude Carle
a souligné que la sélection à
l'université était une réalité d'autant plus
incontournable qu'elle s'exerçait par l'échec, et a
insisté sur la nécessité de mettre en place des
dispositifs de réorientation.
M. Adrien Gouteyron, président,
s'est interrogé sur le
sort des expérimentations lancées en matière
d'orientation, et a évoqué la possibilité de mettre en
place des formules de consolidation des acquis au cours de la première
année de premier cycle.
Répondant à ces interventions,
M. Sylvain Tranoy
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- la période de consultation prévue dans le cadre des
états généraux de l'université n'est pas
idéale, et trop tardive pour mobiliser la masse des étudiants,
même si la plupart de leurs organisations syndicales sont favorables au
principe de cette concertation : certains préconisent une
prolongation de la procédure jusqu'à l'automne mais cette
suggestion apparaît peu réaliste dans le contexte politique du
moment ;
- les modalités de participation des étudiants diffèrent
selon les établissements et sont arrêtées par chaque
président d'université ; si la forme de la consultation peut
faire l'objet de critiques, les états généraux devraient
permettre cependant de faire remonter certaines propositions de la base au
sommet ;
- si la sélection universitaire se fait effectivement par
l'échec, la communauté universitaire n'envisage pas de remettre
en cause le principe du libre accès à l'université ni
d'ailleurs de demander la suppression de la sélection existante, et
légale, dans le secteur des grandes écoles, des instituts et des
STS ;
- une orientation satisfaisante et une régulation des flux des
étudiants seraient de nature à réduire le taux de
l'échec dans les premiers cycles ;
- les expériences d'orientation sont susceptibles de prolongement et
d'extension lorsqu'elles sont réussies ;
- le niveau très inégal des bacheliers, notamment en
matière de syntaxe et d'orthographe, appelle des actions de soutien en
première année de premier cycle, mais cette
hétérogénéité ne doit pas conduire à
remettre en cause le caractère de grade universitaire du
baccalauréat ;
- des dispositifs de consolidation en première année
universitaire doivent être développés, mais les enseignants
répugnent à confier des tâches de soutien
méthodologique aux étudiants ;
- le tutorat d'accompagnement devrait en priorité
bénéficier aux étudiants en difficulté et non
à ceux qui souhaitent seulement tester le niveau de leurs connaissances.
XI. JEUDI 2 MAI 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La mission a d'abord procédé à
l'audition
de
M. Lachenaud
,
secrétaire
général du SUP Recherche FEN
(Fédération de
l'éducation nationale).
Dans une déclaration liminaire,
M. Lachenaud
a estimé
que la question des premiers cycles universitaires pouvait être
appréhendée selon plusieurs problématiques :
articulation des enseignements secondaire et supérieur, massification de
l'université, aiguillage des étudiants selon les diverses
filières supérieures, rapports entre les formations de premier et
de deuxième cycles.
Il a d'abord indiqué que son organisation était opposée
à une philosophie éducative qui consacrerait une
continuité des filières entre les enseignements secondaire et
supérieur et a estimé qu'un brassage des bacheliers à
l'université était souhaitable afin d'éviter une
" filiarisation " qui conduirait logiquement à mettre en
place
un cycle intermédiaire entre ces deux ordres d'enseignement.
M. Adrien Gouteyron, président
, a noté qu'un tel
système permettrait d'offrir une formation de base qui serait
préalable à la poursuite d'études ultérieures.
M. Lachenaud
s'est déclaré favorable à un
rattrapage pédagogique et méthodologique des jeunes
étudiants mais a repoussé l'idée d'une secondarisation des
premiers cycles universitaires qui aboutirait notamment à un abaissement
du niveau des étudiants et à une dépréciation des
formations courtes, notamment technologiques, sur le marché du travail.
Dans cette perspective, il n'est pas anormal selon lui que les bacheliers
technologiques et professionnels envisagent d'accéder à
l'enseignement supérieur, à la condition que des périodes
d'adaptation, des formules de tutorat et une nouvelle organisation de
l'année universitaire leur facilitent cet accès.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est enquis des modalités
d'encadrement de ces étudiants.
M. Lachenaud
a indiqué qu'il n'était pas hostile à
un recours important aux professeurs agrégés de l'enseignement
secondaire à la condition que cette utilisation des PRAG, voire des
certifiés, ne soit pas exclusive, que leur statut puisse évoluer
vers celui d'agrégé doctorant et que des postes soient
créés pour renouveler le corps des enseignants-chercheurs.
Rappelant son opposition à toute nomenclature des métiers et des
enseignements, il a prôné un brassage des populations
étudiantes et une certaine polyvalence des formations ; à
cet égard, l'organisation modulaire des diplômes d'études
universitaires générales (DEUG) engagée depuis 1992, en
permettant d'offrir des formations générales,
préalablement à une ouverture sur les disciplines, voire à
une préprofessionnalisation, permet déjà de réduire
les dysfonctionnements constatés dans les premiers cycles.
Il a par ailleurs rappelé que les étudiants d'origine modeste
étaient plus nombreux dans les filières sélectives courtes
que dans les filières générales et que le plan de
développement des instituts universitaires de technologie (IUT) n'avait
débouché que sur la création de départements
délocalisés et d'enseignements de proximité de premier
cycle ne permettant pas la poursuite d'études ultérieures.
Il a estimé que la réflexion menée sur le statut
économique et social des étudiants devrait aller de pair avec la
nécessité d'offrir à ces derniers la possibilité
d'effectuer de véritables études supérieures dans des
établissements pourvus d'enseignants-chercheurs et d'activités de
recherche.
M. Adrien Gouteyron
,
président
, a évoqué la
création d'une filière technologique qui a été
proposée par le ministre.
M. Lachenaud
a indiqué que son organisation était hostile
à l'idée de créer une voie technologique
dévaluée qui serait exclusivement destinée aux bacheliers
technologiques et professionnels, a insisté sur les logiques
différentes des filières technologiques et professionnelles et a
préconisé plutôt une prise en compte de l'insertion
professionnelle dans l'ensemble des formations universitaires.
M. Adrien Gouteyron, président
, a observé qu'une telle
filière technologique permettrait cependant de conduire ses
étudiants jusqu'aux diplômes les plus élevés,
notamment au doctorat.
M. Lachenaud
a remarqué que ces formations de haut niveau
restaient à inventer.
Il a ajouté que son organisation avait émis un certain nombre de
propositions dans le cadre des états généraux de
l'université mais a regretté que cette consultation n'ait pas
pris en compte la dimension duale de l'enseignement supérieur
français, c'est-à-dire l'ensemble du secteur sélectif.
Il a indiqué par ailleurs que les bacheliers technologiques ou
professionnels engagés dans une filière technologique de premier
cycle n'auraient que très peu de chance d'accéder à des
formations technologiques de deuxième, voire de troisième cycles,
qui restent rares et très sélectives pour ces bacheliers.
Il a cependant souhaité que les voies de la formation continue soient
largement développées, notamment pour permettre l'accès au
titre d'ingénieur et qu'une réflexion soit engagée sur la
poursuite d'étude des titulaires de diplômes universitaires
technologiques (DUT).
A cet égard, il a noté que les diplômés d'IUT
n'étaient pas épargnés par le chômage et qu'il
convenait de s'interroger également sur l'inadaptation de certaines
formations technologiques à l'évolution du marché de
l'emploi.
Partageant ce souci,
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est
ensuite enquis de la participation du Sup Recherche FEN à la
procédure des états généraux de l'université.
M. Lachenaud
a indiqué que son organisation y avait
déjà participé activement sans demander à en
repousser le terme, à la différence d'autres organisations
syndicales.
Il a indiqué qu'il redoutait une nouvelle explosion universitaire si des
mesures concrètes n'étaient pas prises rapidement, notamment pour
définir un statut économique et social de l'étudiant qui a
été annoncé lors de la campagne des dernières
élections présidentielles et qui ne devrait pas se réduire
à quelques avancées en matière de participation des
étudiants.
Il a en revanche estimé que l'aménagement des institutions
universitaires pouvait être différé et qu'il convenait
d'abord d'appliquer la législation existante dans toutes ses dimensions.
Il a ajouté que le renouvellement du corps des enseignants-chercheurs et
l'insertion professionnelle des étudiants des filières
scientifiques constituaient des priorités.
Il s'est également inquiété des orientations, selon lui
contestables, de la conférence des présidents d'université
qui souhaite jouer un rôle de pilotage national de la recherche
universitaire et des perspectives tendant à conférer aux
présidents des établissements une compétence en
matière de recrutement et de gestion de la carrière des
enseignants.
Il a par ailleurs souligné le caractère parfois contradictoire
des questions posées par le ministre dans le cadre des états
généraux, et s'est félicité de sa position prise
contre la sélection à l'entrée à
l'université.
Il a enfin souhaité que les causes de l'échec universitaire
fassent l'objet d'une véritable analyse, notamment dans des
filières comme le droit et les langues étrangères
appliquées, où cet échec peut résulter d'une
organisation pédagogique désuète ou des choix d'attente
effectués par les familles.
La mission a ensuite procédé à
l'audition de
Mme Joëlle Guignard et de M. Vincent Guillon du syndicat
général de l'éducation nationale (SGEN) Sup CFDT
.
Abordant le problème de l'information et de l'orientation dans
l'enseignement secondaire,
M. Vincent Guillon
a estimé que
l'information des élèves et des étudiants supposait un
message clair des conseillers afin d'aider les bénéficiaires
à élaborer des projets d'études et a noté que les
crédits de l'office national d'information sur les enseignements et les
professions (ONISEP) étaient trop limités.
Il a ensuite souligné que si cette information existait (distribution de
brochures, journées portes ouvertes ...) celle-ci n'était pas
convenablement utilisée par les élèves du fait notamment
de l'insuffisance des moyens accordés aux conseillers d'orientation.
Il a ainsi préconisé la création d'un grand service public
d'information et d'orientation disposant de moyens adaptés et permettant
de dynamiser l'action des établissements scolaires par le biais
notamment des centres d'information et d'orientation (CIO).
A cet égard il a regretté que l'information et l'orientation ne
relèvent que d'un simple bureau dans l'organigramme du ministère
alors que ces tâches devraient être confiées à une
sous-direction transversale couvrant les enseignements secondaire et
supérieur.
Rappelant que certaines expériences intéressantes avaient
été engagées par les établissements en
matière d'orientation, il a regretté cependant que les
universitaires ignorent trop souvent le contenu des programmes des
lycées.
Mme Joëlle Guignard
a également indiqué que des
actions de sensibilisation animées par des enseignants de
l'université avaient été engagées dans les
lycées en classes de première et de terminale, mais que ces
expériences étaient restées limitées puisqu'elles
s'imputent sur le temps scolaire et dépendent de la bonne volonté
des équipes enseignantes.
Il conviendrait, selon elle, de faciliter l'accès à l'information
des élèves au lycée et d'aider les étudiants en
difficulté à évoluer dans le dédale des services
d'information universitaire.
M. Adrien Gouteyron, président
, a évoqué le
problème du rôle respectif des enseignants et des personnels
spécialisés affectés à cette mission d'information
et d'orientation, a demandé si les professeurs principaux
n'étaient pas les mieux placés pour aider les
élèves à construire un projet d'études et
professionnel et comment les universitaires pourraient avoir une meilleure
connaissance des programmes du lycée.
Il s'est également enquis des possibilités de mettre en place des
modules d'adaptation et de mise à niveau en première année
de DEUG, a souhaité disposer des propositions du SGEN-SUP-CFDT en ce
domaine et a suggéré que la mission se déplace sur le
terrain pour étudier les expériences engagées par
certaines universités.
S'interrogeant sur la vocation et la préparation des
élèves à devenir étudiants,
M. Ivan
Renar
a souligné que l'indécision des lycéens en
matière d'orientation résultait du fait que l'université
constituait pour nombre d'entre eux un monde inconnu et que l'ouverture de
l'enseignement supérieur sur le monde économique était
aujourd'hui hypothéquée par la dégradation de la situation
de l'emploi.
M. Franck Sérusclat
a préconisé une autre approche
de l'organisation du système éducatif, de l'enseignement
préélémentaire jusqu'à la sortie de l'enseignement
supérieur, et a indiqué que les auditions menées par la
mission avaient permis de constater qu'il était illusoire de rechercher
des solutions pour remédier aux dysfonctionnements d'un système
qui n'est plus adapté.
Il a rappelé que la plupart des universitaires entendus avaient
dénoncé l'incapacité d'un grand nombre d'étudiants
à maîtriser les acquis nécessaires à la poursuite
d'études supérieures, ce phénomène étant
général puisque les grandes écoles et l'université
enregistraient des taux d'échec similaires.
Répondant à ces interventions,
Mme Joëlle Guignard
et
M. Vincent Guillon
ont notamment apporté les précisions
suivantes :
- les professeurs principaux représentent environ les deux tiers des
enseignants au collège et au lycée et il serait souhaitable de
constituer des équipes restreintes de professeurs, assistées d'un
conseiller d'orientation, pour assurer l'information des
élèves ;
- dans un monde changeant, complexe et incertain, il importe que les divers
conseillers puissent dispenser une information objective et complète en
vue de l'orientation des élèves, qui ne sauraient pas ailleurs
rester passifs ;
- les professeurs principaux jouent un rôle capital en matière
d'orientation mais doivent être assistés, à
côté des parents, de médiateurs, puisqu'ils sont à
la fois juges et parties pour les élèves ;
- l'incertitude des lycéens quant à leur orientation
résulte notamment du fait que les disciplines enseignées à
l'université n'ont pas été abordées au
lycée ;
- une meilleure connaissance des programmes du lycée suppose un effort
des universitaires pour en suivre l'évolution dans leur discipline
respective ;
- l'amélioration du système d'information et d'orientation des
élèves doit s'appuyer sur les structures existantes, en engageant
des actions précoces, même avant le collège, afin de
réduire la rupture constatée entre le lycée et
l'université, qui désavantage notamment les élèves
défavorisés ;
- les élèves apparaissent sensibilisés aux
problèmes de l'orientation à partir de la classe de
troisième et certains lycéens, dès la classe de
première, élaborent un projet d'études et professionnel,
notamment en fonction des stages qu'ils ont effectués en
entreprise ;
- l'enseignement des disciplines doit aller de pair avec un
développement de l'ouverture d'esprit des élèves et
l'acquisition de pratiques sociales (participation à un entretien,
confection d'un curriculum vitae ...) ;
- les nouveaux étudiants qui se révèlent incapables de
maîtriser les apprentissages fondamentaux nécessaires à la
poursuite d'études supérieures sont peu nombreux, mais certains
sont très motivés pour s'engager dans un cursus
universitaire ;
- certaines expériences de remise à niveau en DEUG, qui
conduisent parfois à des réorientations au bout de deux ou trois
mois, ont permis de réduire sensiblement le taux de l'échec
universitaire, mais elles ne peuvent être efficaces que dans des
universités convenablement dotées, notamment en
enseignants-chercheurs, permettant d'assurer un encadrement satisfaisant des
étudiants ;
- la majorité des étudiants actuels ne possèdent plus la
culture générale " élitiste " de leurs
aînés et doivent bénéficier d'un encadrement
renforcé et d'une ouverture sur le monde professionnel ;
- si l'université peut proposer des formations professionnalisantes
à ses étudiants, celles-ci ne seront efficaces que si elles
débouchent sur des emplois existants ;
- les services d'information et d'orientation universitaires sont
sous-dotés, sont dépourvus de documentalistes et doivent recourir
à la bonne volonté des enseignants ;
- les DEUG devraient comporter une part de module consacrée à
l'information et à l'orientation des étudiants ;
- le nouveau contrat pour l'école prévoyait dans sa version
initiale deux séquences mensuelles d'information des
élèves sur les métiers mais cette référence
a disparu du texte définitif.
La mission a ensuite procédé à
l'audition
de
MM.
Daniel Monteux
et
Jean-Claude Garric, secrétaires nationaux du
Syndicat national de l'enseignement supérieur (SNESUP).
Après avoir fourni quelques indications sur la
représentativité de son organisation,
M. Daniel Monteux
a
indiqué dans une déclaration liminaire que la massification de
l'enseignement supérieur constituait une chance pour l'avenir de notre
pays mais a estimé que l'aspiration des jeunes à entrer à
l'université pour y acquérir un vrai diplôme, dans un monde
dominé par l'irruption des technologies, supposait plusieurs exigences.
Il a d'abord rappelé que la démocratisation de l'enseignement
supérieur s'était aussi accompagné d'une diversification
des étudiants en ce qui concernait leur parcours scolaire, leur origine
sociale, leurs références culturelles et leurs projets
professionnels.
Il convient selon lui de tenir compte de cette diversité,
d'évaluer et de valoriser les acquis de ces étudiants, sauf
à alimenter un échec universitaire déjà trop
important. Il a ensuite souligné que toute formation supérieure
devait être organisée par étapes, notamment pour les
étudiants les plus modestes et comporter une double finalité,
à la fois qualifiante et permettant la poursuite d'études
ultérieures, en offrant des parcours diversifiés.
Il a ajouté que la diversité actuelle de notre système
universitaire était trop ignorée et que le bilan de la
réforme des diplômes d'études universitaires
générales (DEUG) pouvait apparaître contrasté,
notamment concernant la mise en place des modules.
Il a par ailleurs souhaité que les arrêtés pris en 1994
pour vider cette réforme d'une part de son contenu soient abrogés
et que les DEUG de technologie soient développés.
Il s'est également déclaré favorable à la
constitution d'une grande voie technologique de bac - 2 jusqu'aux
diplômes d'ingénieur, les formations intermédiaires de type
institut universitaire de technologie (IUT) et section de technicien
supérieur (STS) constituant le pivot du futur dispositif et devant
être articulées de manière claire avec les IUP.
A cet égard, il a considéré que la filière
technologique devrait consacrer un droit à la poursuite d'études
ultérieures, sauf à considérer ces cursus courts comme une
voie de relégation. Il a ajouté, dans le droit fil des
conclusions du rapport Lavroff, qu'il était nécessaire de
créer une voie de réussite pour les bacheliers professionnels,
d'engager une réflexion sur la multiplication des passerelles et la mise
en place d'équivalences permettant une réorientation des
étudiants, et d'irriguer par la recherche l'ensemble des filières
de formation.
S'agissant de l'information sur l'orientation, il a estimé que le
dispositif futur devait se garder de tout autoritarisme et permettre de
dispenser aux lycéens et aux étudiants des données
objectives et complètes, les lycées et les universités
étant susceptibles en ce domaine d'être organisés en
réseaux.
Ceci suppose une présentation claire des cursus universitaires, une
reconnaissance des acquis professionnels et un développement des moyens
accordés aux universités. Il a par ailleurs évoqué
les expériences engagées pour mieux accueillir les nouveaux
étudiants, les formules de " rattrapage " des bacheliers, la
nécessité d'encadrer de manière plus satisfaisante les
étudiants de premier cycle en rappelant que le taux de réussite
était de 68 % en sciences contre 50 % en droit et en sciences
économiques et dépendait aussi du comportement des enseignants.
Il a observé que la réduction des effectifs dans les travaux
pratiques, les travaux dirigés, et aussi dans les cours magistraux,
permettait de réduire de manière sensible l'échec
universitaire : ceci suppose la création de postes d'enseignants et
de personnels ingénieurs, administratif, techniciens, ouvriers et de
service (IATOS), de bibliothèques et de laboratoires de langues.
Il a ainsi préconisé la création de 5000 postes
d'enseignants-chercheurs et de 5000 postes de personnels IATOS par an,
étant rappelé que 10.000 thèses sont
présentées chaque année et que 180 candidats se
présentent pour un poste d'enseignant-chercheur.
S'agissant du recours aux professeurs agrégés et certifiés
de l'enseignement secondaire, il a estimé que cette formule ne
constituait pas la panacée mais que ces enseignants avaient une place
dans l'enseignement supérieur, même s'il convenait de veiller
à ne pas vider le secondaire de ses " forces vives " et de
maintenir une présence majoritaire des enseignants-chercheurs dans le
supérieur.
En conclusion, il a préconisé une augmentation des crédits
alloués à l'enseignement supérieur, qui devraient, selon
lui, passer de 0,44 % à 1 % du produit intérieur brut,
toute démarche à moyens constants étant vouée
à aggraver la ségrégation entre étudiants et
à hypothéquer les potentialités de la
démocratisation de l'université pour notre pays.
A l'issue de cet exposé, un large débat s'est engagé.
Evoquant le problème de la transmission des savoirs,
M. Ivan
Renar
a observé que les retards accumulés par les
étudiants remontaient souvent au collège et résultaient
fréquemment des conditions d'études des élèves, et
a estimé qu'il convenait de tenir compte de ces facteurs dans toute
politique d'orientation.
Il s'est également enquis des modalités du futur statut de
l'étudiant.
M. Frank Sérusclat
a déclaré partager le souci de
prendre en compte la citoyenneté des étudiants et s'est
étonné que les nouvelles techniques de l'information et de la
communication n'aient pas été évoquées par
l'orateur, notamment concernant l'enseignement à distance qui fait
l'objet de développements très importants, notamment aux
Etats-Unis et en Australie. Il a également convenu que le
problème de l'acquisition des connaissances des étudiants devait
être appréhendé très en amont de
l'université, c'est-à-dire depuis l'enseignement
préélémentaire.
M. Adrien Gouteyron, président,
s'est interrogé sur les
modalités du processus volontaire d'orientation évoqué,
sur les personnels susceptibles de mettre en oeuvre cette réforme, ainsi
que sur les perspectives de mise en place dans les DEUG de modules
d'information et d'orientation.
Répondant à ces interventions,
MM. Daniel Monteux
et
Jean-Claude Garric
ont notamment apporté les précisions
suivantes :
- si certaines erreurs d'orientation sont à l'origine de l'échec
universitaire dans l'ensemble des formations supérieures, celui-ci
résulte aussi des retards accumulés au cours de la
scolarité, de difficultés pédagogiques et d'un mauvais
encadrement des étudiants : la réduction de l'échec
universitaire constaté à partir de 1984-1985 a
résulté d'un renforcement de cet encadrement obtenu cependant au
détriment du travail de recherche des enseignants ;
- les conditions de la vie étudiante en matière de logement et de
transports, l'insuffisance du montant et du nombre des bourses,
l'inactivité des parents ou leurs faibles revenus constituent, comme l'a
montré le dernier rapport du comité national d'évaluation,
autant de facteurs négatifs qui pèsent sur l'avenir des
étudiants ;
- la présence des enseignants-chercheurs est indispensable pour apporter
un regard critique sur l'évolution des connaissances : à cet
égard, les grandes écoles ont longtemps été en
retard en matière de recherche et les cadres formés par leurs
soins ont souffert d'un manque de capacité d'adaptation dans leur
emploi ;
- le développement des stages en entreprise et dans les administrations
d'Etat devrait permettre de concilier les impératifs de la formation
générale et d'une formation plus qualifiante ;
- le statut de l'étudiant devrait reconnaître un droit aux
études à temps plein mais aussi se garder de traiter les
étudiants en mineurs assistés alors que ceux-ci accèdent
à la citoyenneté à l'université ;
- les oeuvres universitaires et les services d'accompagnement des
étudiants doivent être développés, notamment en
matière de santé, et pour faciliter l'élaboration d'un
parcours pédagogique et l'individualisation des projets ;
- certains IUT ont développé de nouvelles technologies de
l'information et de la communication mais aller plus loin en ce domaine
soulèverait des problèmes de nature pédagogique et
scientifique, l'enseignement à distance nécessitant par ailleurs
des investissements considérables et une forte motivation des
enseignants ;
- alors que le Gouvernement a annoncé la création d'une grande
filière technologique, les IUT sont confrontés à des
difficultés de fonctionnement liées à une insuffisance de
leurs moyens ;
- une expérience d'enseignement à distance a été
engagée entre les universités de Reims et de
Marne-la-Vallée mais celle-ci ne saurait remplacer une
interactivité personnelle entre enseignants et étudiants et son
bilan apparaît prématuré, cette formule soulevant par
ailleurs le problème de la formation des professeurs ;
- la rupture entre les enseignements secondaire et supérieur
apparaît inévitable mais il conviendrait de mieux articuler leurs
contenus, de renforcer et d'harmoniser les outils d'information au lycée
et à l'université ;
- l'information des lycéens devrait porter, d'abord sur la
réalité des parcours universitaires et sur les
" règles du jeu " des différents cursus ;
- il serait présomptueux de demander à l'université de
remédier aux insuffisances de certains étudiants, notamment au
niveau de l'expression écrite et orale, mais un meilleur encadrement et
un soutien des étudiants leur permettrait d'acquérir certaines
pratiques indispensables à la poursuite d'études
supérieures ;
- un processus d'information et d'orientation doit être continu et
s'engager très en amont de la scolarité pour faciliter les choix
des bacheliers : les brochures d'information doivent décrire
objectivement les diverses filières supérieures sans mettre
l'accent sur leurs aspects dissuasifs ou négatifs.
La mission a ensuite procédé à
l'audition
de
Mme Frédérique Piel, secrétaire nationale,
de
Mme Catherine Remermier
et de
M. Jean-Luc Brun
du
Syndicat national des enseignements du second degré
(FNES).
Dans une déclaration liminaire,
Mme Frédérique Piel
a souligné que son organisation était tout
particulièrement concernée par l'objet de la mission puisque
80 % des lycéens accédaient aujourd'hui à
l'enseignement supérieur, que deux bacheliers sur cinq poursuivaient des
études supérieures à l'intérieur des lycées,
que les conseillers d'orientation exerçaient leur mission aussi bien
dans les collèges, les lycées qu'à l'université et
que les premiers cycles universitaires recouraient de plus en plus aux
professeurs agrégés du secondaire.
Elle a ensuite souhaité obtenir des précisions sur le statut de
la mission d'information du Sénat, sur son rôle et sur la
portée de ses conclusions futures notamment par rapport aux
réflexions engagées dans le cadre des états
généraux de l'université et par la commission Fauroux.
M. Adrien Gouteyron, président
, a souligné la
spécificité de chacune de ces démarches et a
indiqué que l'objet de la mission était destinée à
éclairer le Sénat sur les problèmes de l'information et de
l'orientation des étudiants dans les premiers cycles et que celle-ci
avait vocation à formuler des propositions selon un calendrier pouvant
éventuellement s'articuler avec les autres réformes
préconisées.
Il a également souligné que la réflexion engagée
par les élus de la nation se situait nécessairement à un
autre plan que celle menée par les acteurs du monde universitaire.
Mme Frédérique Piel
a ensuite observé que le
problème de l'information et de l'orientation des étudiants
était lié à la notion d'échec universitaire mais
qu'il convenait de relativiser l'importance de ce dernier et de répondre
à un dénigrement systématique qui met en cause
l'efficacité de notre service public d'éducation, puisque
66 % des étudiants obtiennent leur DEUG en trois ans.
Elle a ensuite regretté qu'aucun bilan n'ait été
établi de la réforme des DEUG engagée en 1992, dont les
grandes lignes ont été approuvées par son organisation, et
qui permettait notamment d'élargir le champ disciplinaire des
formations, d'organiser l'année universitaire en semestres et de
remédier aux carences de la formation générale des
étudiants ; son application n'a pu cependant être
menée à son terme faute de moyens et aussi parce que des
arrêtés pris en 1994 ont vidé en partie cette
réforme de sa portée.
Elle a enfin observé que le système universitaire n'accueillait
pas trop d'étudiants, compte tenu des besoins économiques et
sociaux de notre pays et a estimé que l'élévation du
niveau d'éducation des jeunes était souhaitable.
En conclusion, elle a indiqué que l'actuel système d'information
et d'orientation des étudiants ne pourrait être
amélioré qu'en aménageant les structures existantes.
Se fondant sur son expérience professionnelle,
Mme Catherine
Remermier
a estimé que les conseillers d'orientation-psychologues
(COP) qui se partagent entre le collège, le lycée et
l'université avaient une bonne connaissance des problèmes des
élèves et des étudiants, et étaient en mesure de
les informer utilement sur leurs choix d'orientation. Elle a cependant
relevé l'insuffisance des moyens qui leur sont affectés puisqu'un
conseiller a compétence sur 1.400 élèves du secondaire et
18.000 étudiants. Une multiplication du nombre des COP apparaît
à cet égard indispensable pour donner à ce système
toute son efficacité.
Rappelant que la réforme des DEUG permettait déjà aux
étudiants de se réorienter au cours du premier semestre suivant
leur entrée à l'université, elle a souligné que cet
objectif supposait que soient mises en place des structures adaptées,
des passerelles et des formations professionnelles supérieures
valorisantes pour les étudiants en difficulté.
M. Jean-Luc Brun
a également souligné
l'intérêt de développer les relations et l'information
réciproque entre le lycée et l'université.
Il a par ailleurs reconnu que l'information des lycéens et des
étudiants était devenue un marché livré à
des organismes privés et à des groupes de presse ; à
cet égard le service public a un rôle primordial à jouer
pour dispenser une information objective et pluraliste, notamment par le biais
de l'office national d'information sur les enseignements et les professions
(ONISEP). Il a ensuite estimé que l'information devait en outre
être relayée par des conseillers d'orientation formés
à la psychologie afin d'aider les élèves et les
étudiants à définir un véritable projet.
Mme Catherine Remermier
a ajouté que les opérations
" portes ouvertes " engagées dans le domaine de
l'orientation
dans toutes les universités de la région parisienne
étaient trop limitées dans le temps pour être efficaces.
M. Jean-Luc Brun
a enfin indiqué que la synthèse des
messages adressés à la mission du Sénat, via le
réseau Internet, reprenait l'essentiel des critiques formulées
à l'encontre des conseillers d'orientation qui ne sont pas en mesure de
répondre à des demandes de renseignements très
précises portant par exemple sur les débouchés à
moyen terme de telle ou telle formation.
M. Adrien Gouteyron, président
en est convenu et a
souhaité obtenir des précisions sur la notion de projet
élaboré par les étudiants, sur les rôles respectifs
que les enseignants et les conseillers pourraient être appelés
à jouer dans l'information et l'orientation des jeunes et sur la
complémentarité qui pourrait s'établir en ce domaine entre
les lycées et les universités.
Il s'est ensuite interrogé sur les possibilités de proposer aux
nouveaux étudiants un éventail de formations suffisamment ouvert
pour choisir leur filière.
Il a enfin rappelé le reproche fait aux conseillers de mettre davantage
l'accent sur la dimension psychologique de leur fonction que sur l'information
des élèves.
Répondant à cette intervention,
Mme Catherine Remermier
et
M. Jean-Luc Brun
ont précisé que chaque projet
d'orientation était appelé à être actualisé
et que les conseillers étaient chargés d'aider les lycéens
à le formuler en évitant les choix trop fermés.
Ils ont ajouté que le projet d'orientation ne devrait pas être
limité à son objet professionnel et pourrait être
envisagé dès le collège pour déboucher sur une
spécialisation progressive suivi d'un bilan et d'une
réorientation éventuelle qui prendrait en compte les
éléments de réussite des élèves ou des
étudiants ainsi que leur évolution psychologique. Les parcours
universitaires doivent être selon eux affichés en termes de
chances d'insertion professionnelle et non comme un moyen d'échapper au
chômage. Ils ont par ailleurs souligné le rôle
complémentaire des enseignants, des conseillers principaux
d'éducation, et des conseillers d'orientation en matière
d'information, et ont rappelé que le législateur avait
lui-même décidé en 1985 de transformer les conseillers
d'orientation en " conseillers d'orientation-psychologues ".
Mme Frédérique Piel
a ensuite insisté sur la
nécessité de renforcer l'articulation des formations entre les
enseignements pré et post-bac et a ajouté que la
rénovation du baccalauréat permettait des débouchés
privilégiés mais non exclusifs dans l'enseignement
supérieur, un premier semestre d'information et d'évaluation des
nouveaux étudiants se révélant nécessaire pour
tester les capacités de ces derniers et les faire éventuellement
bénéficier d'un rattrapage ou d'une réorientation.
Répondant à une demande de précision de M. Adrien
Gouteyron, président, elle a indiqué que la formule de
" l'année zéro " permettait à l'étudiant
de redoubler en première année après une remise à
niveau. Elle a ajouté que les perspectives de réorientation
impliquaient un développement des passerelles, notamment entre les DEUG
et les BTS et une mise en place éventuelle de périodes
d'observation pour les étudiants.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est interrogé sur les
effets plus ou moins directifs de l'évaluation au regard de
l'orientation des étudiants.
Mme Frédérique Piel
a répondu que ces derniers
conservaient une totale liberté de choix.
Elle a ensuite abordé la question de l'accueil des bacheliers
professionnels à l'université en rappelant que ceux-ci
représentaient désormais le tiers de l'ensemble des bacheliers et
que ce diplôme avait à la fois une finalité professionnelle
et permettait la poursuite d'études supérieures qui répond
par ailleurs à une demande sociale.
Elle a indiqué que l'université n'était pas adaptée
aux bacheliers professionnels et qu'il conviendrait de réfléchir
à une adaptation des BTS pour les accueillir.
Elle a ajouté qu'une filière technologique devrait être
attractive et ouverte permettant notamment des réorientations vers les
filières générales tandis que les BTS et les DUT devraient
également être revalorisés et articulés avec les
IUP, et autoriser la poursuite d'études ultérieures, y compris
jusqu'aux doctorats.
Elle a également préconisé la mise en place d'une grille
nationale de références pour valider les formations à bac
+ 2.
M. Adrien Gouteyron, président
a souligné le
caractère séduisant de ces propositions mais s'est
interrogé sur le réalisme de certaines, consistant notamment
à permettre aux bacheliers professionnels d'accéder aux BTS.
Mme Frédérique Piel
a rappelé à cet
égard le précédent des premières d'adaptation et a
préconisé le développement de formules d'orientation
progressives et de retour en formation après une période en
entreprise.
Elle a cité sur ce point les expériences engagées dans
l'académie de Créteil, notamment à l'université
Paris XII, qui permettent d'accueillir et de réorienter les divers types
de bacheliers.
M. Adrien Gouteyron, président
a remarqué que les
" premières d'adaptation " avaient connu un
développement limité et a demandé si la grille nationale
de références évoquée serait établie pour
l'ensemble des disciplines.
Mme Frédérique Piel
a précisé que cette
grille ne viserait que les types de formation après négociation,
entre établissements, et que celle-ci devrait permettre de mettre en
place de nouvelles licences à partir des formations à bac
+ 2 en validant les acquis obtenus.
XII. MARDI 7 MAI 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La mission a d'abord procédé à
l'audition de Mme Danièle Pourtier, présidente de
l'association des conseillers d'orientation-psychologues
(ACOP France), et
de
Mme Maryse Hénoque, directeur d'un centre d'information et
d'orientation de l'académie de Paris
.
Après avoir fourni quelques indications sur la nature et les
activités de son organisation,
Mme Danièle Pourtier
a
précisé qu'elle exerçait ses fonctions au centre
d'information et d'orientation de la Sorbonne.
Mme Maryse Hénoque
a indiqué pour sa part qu'elle
dirigeait le centre d'information et d'orientation (CIO) de l'académie
de Paris chargé des 8e et 16e arrondissements.
Soulignant le caractère pratique de toute orientation, elle a
insisté sur la nécessaire liaison qui devrait exister entre le
lycée et l'université afin de réduire au maximum les
erreurs de choix des bacheliers. Elle a rappelé à cet
égard que les CIO fournissaient d'abord des informations
générales, notamment dans les mairies, sur les formations
offertes dans les diverses universités, et notamment sur les
filières qui conduisent à une insertion professionnelle rapide.
Elle a ajouté que les conseillers étaient ensuite principalement
chargés d'aider les jeunes à formuler un projet d'études
et professionnel, et de fournir des conseils d'orientation
individualisés à des lycéens qui bénéficient
par ailleurs d'informations surabondantes de toutes origines.
Elle a également indiqué que son CIO organisait dans les mairies
des rencontres avec d'anciens lycéens qui pouvaient faire part de leur
expérience universitaire et a souligné l'importance d'une
démarche personnelle des élèves.
Mme Danièle Pourtier
a observé que l'information
donnée sur les perspectives de débouchés des
filières de premier cycle était souvent défaillante ;
elle a en outre dénoncé le hiatus existant entre les disciplines
enseignées au lycée et à l'université, notamment en
philosophie et en économie, et a souligné que les
étudiants issus de la génération du " zapping "
éprouvaient de véritables frustrations lorsqu'ils se trouvaient
enfermés dans une filière trop spécialisée.
A l'issue de cette présentation générale, un large
débat s'est institué.
M. Adrien Gouteyron, président
, a évoqué les
rôles respectifs des enseignants et des personnels
spécialisés dans l'information des lycéens ainsi que le
problème de l'orientation progressive des nouveaux étudiants.
Il s'est par ailleurs demandé si le caractère
nécessairement individualisé de toute orientation ne conduisait
pas à privilégier le rôle des enseignants par rapport
à celui des conseillers d'orientation psychologues (COP).
M. Franck Sérusclat
s'est interrogé sur la prise en compte
par les conseillers de la spécificité du parcours scolaire suivi
par les élèves depuis l'école élémentaire,
et sur la maîtrise par les lycéens de terminale de l'informatique
et des techniques modernes de communication.
M. Jean-Claude Carle
a observé que l'orientation des
élèves et des étudiants supposait un dialogue et que les
CIO se situaient à l'interface entre les réalités de
l'école, de l'université et du monde de l'entreprise.
Il a ensuite souhaité obtenir des précisions sur le temps
consacré en moyenne à chaque élève pour faciliter
ses choix d'orientation, sur la connaissance par les conseillers du monde
professionnel, sur leur compétence à l'égard des
élèves des établissements privés d'enseignement et
sur les orientations qui pouvaient être préconisées vers
l'enseignement agricole.
M. Daniel Eckenspieller
s'est enquis des attentes des conseillers
d'orientation quant à l'information générale et
personnalisée qui devrait être apportée par les enseignants
aux lycéens.
Précisant que ses observations n'avaient pas pour objet de mettre en
cause la qualité des conseillers d'orientation psychologues,
M.
Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a souhaité obtenir des
précisions sur l'efficacité du système actuel
d'information et d'orientation des élèves, sur les raisons de ses
insuffisances, sur les améliorations qui seraient susceptibles d'y
être apportées et sur la répartition souhaitable des
rôles entre les différents acteurs chargés de l'orientation.
Il s'est demandé si les conseillers d'orientation n'avaient pas tendance
à privilégier la dimension psychologique de l'orientation au
détriment de l'information objective des élèves, si les
proviseurs n'avaient pas tendance à conseiller à leurs meilleurs
bacheliers de choisir les filières sélectives relevant de leur
établissement et s'il était souhaitable de maintenir une
compétence large des conseillers et des CIO, allant du collège
jusqu'aux premiers cycles universitaires.
Il s'est enfin enquis du contenu de l'information qu'il conviendrait de donner
aux nouveaux étudiants et des moyens qui permettraient d'évaluer
de manière satisfaisante les établissements d'enseignement
supérieur.
M. Ivan Renar
a remarqué que les COP étaient les seuls
à avoir une vision globale des problèmes d'information et
d'orientation des jeunes et a souhaité obtenir des précisions sur
l'image-type et le profil des bacheliers d'aujourd'hui qui ont vocation
à s'engager en masse dans l'enseignement supérieur, sur les
modalités d'une meilleure articulation entre les enseignements
secondaire et supérieur et sur la relation existant entre l'échec
universitaire et l'origine sociale des étudiants.
Soulignant l'insuffisance du nombre des conseillers d'orientation,
M. Pierre Laffitte
s'est demandé s'il ne conviendrait pas de
recourir à des aides extérieures et au bénévolat
(enseignants, étudiants, jeunes retraités, parents
d'élèves, collectivités locales, chambres consulaires) et
de faire passer les conseillers d'un rôle de partenaires à celui
de chefs d'orchestre.
Il a ajouté que les auditions menées par la mission avaient
permis de constater que le système éducatif tendait depuis peu
à s'ouvrir sur le monde extérieur et a souhaité que les
orienteurs participent à cette évolution.
Il a enfin estimé que des formules d'information comme celles des salons
de l'étudiant, qui permettent aux lycéens de nouer des contacts
avec les interlocuteurs les plus variés, devraient être plus
largement développées.
Répondant à ces interventions,
Mmes Danièle
Pourtier
et
Maryse Hénoque
ont notamment apporté
les précisions suivantes :
- les conseillers d'orientation partagent leur activité entre les
établissements et les CIO et, en participant notamment aux conseils de
classe en troisième et en seconde, s'efforcent dans toute la mesure du
possible de mettre en oeuvre une orientation continue en prenant en compte le
parcours scolaire des élèves : leur nombre est cependant
insuffisant et ils ne sont souvent pas familiarisés avec les techniques
nouvelles de communication ;
- leur intervention reste cependant liée à une démarche
personnelle des jeunes, de leur famille ou des professeurs, notamment lorsque
les élèves sont en situation de difficulté scolaire ;
les entretiens individuels dont ils bénéficient sont de l'ordre
de trois quarts d'heure et peuvent associer les parents mais ne concernent
qu'une frange limitée de collégiens et de lycéens ;
- les contacts des élèves avec le monde professionnel peuvent
être développés à l'occasion des stages en
entreprises, qui sont organisés dès la classe de
troisième ;
- l'orientation vers l'enseignement agricole apparaît résiduelle
pour les élèves des établissements parisiens ;
- les effectifs des conseillers d'orientation sont très insuffisants
puisque 4.500 COP ont la responsabilité de six millions
d'élèves du second degré et de plus de deux millions
d'étudiants : l'université de Paris I ne dispose que
d'un seul conseiller pour 40.000 étudiants, alors que l'état
psychologique d'un nombre de plus en plus élevé
d'étudiants apparaît très préoccupant ;
- la demande des élèves de l'enseignement privé en
matière d'orientation est considérable car les conseillers
d'orientation n'organisent pas de permanence au sein des établissements
scolaires ;
- l'aide apportée par les enseignants à l'orientation des
élèves est indispensable et les COP exercent un rôle de
conseiller technique auprès des chefs d'établissement ;
- l'efficacité d'un système d'orientation suppose l'existence
d'équipes éducatives soudées mais les enseignants ne
semblent pas vouloir s'approprier les activités d'orientation qui
deviennent de plus en plus complexes compte tenu de l'évolution rapide
des métiers ;
- les conseillers d'orientation sont les seuls à être en mesure
d'apprécier dans leur globalité les capacités des
élèves et à les aider dans leurs choix mais ils jouent
fréquemment un rôle de bouc-émissaire en cas d'orientation
négative ou mal acceptée, ce phénomène
s'étant accentué avec la massification de l'enseignement
secondaire et supérieur ;
- l'augmentation du nombre des conseillers apparaît comme une
priorité, et permettrait aux COP de suivre des stages en entreprise qui
sont nécessaires à leur information ;
- si certains conseillers peuvent avoir tendance à privilégier
une approche psychologique de leur activité, les réalités
commandent de limiter leur action à un rôle de conseil en
matière d'orientation ;
- il importe que les conseillers puissent suivre l'évolution des
élèves, du collège jusqu'à l'université,
mais l'orientation ne devrait pas être engagée trop tôt pour
ne pas perturber leur scolarité ;
- l'orientation est devenue d'autant plus importante que les
débouchés de certaines filières se sont réduits et
qu'elle doit privilégier l'ouverture des formations sur
l'entreprise ;
- les conseillers s'adressent à une population d'élèves et
d'étudiants de plus en plus diversifiée et il apparaît
difficile d'établir un profil-type du bachelier qui n'a souvent pas de
références familiales universitaires lorsqu'il accède
à l'enseignement supérieur ;
- les boursiers sont particulièrement concernés par
l'échec dans les premiers cycles, et les mauvaises conditions
matérielles d'études (logement, santé, alimentation)
contribuent à augmenter cet échec ;
- les COP qui disposent d'une formation adaptée doivent continuer
à exercer une fonction spécifique d'information et de conseil,
mais ils travaillent déjà en liaison avec des acteurs
extérieurs au système éducatif, comme les chambres des
métiers et l'ANPE ;
- les étudiants avancés dans leurs études ne peuvent
apporter aux lycéens qu'une information sur leur discipline et les
conseillers d'orientation ont recours fréquemment à l'aide des
enseignants retraités et des parents d'élèves ;
- chaque lycée organise régulièrement des forums
destinés à l'information des familles mais le rôle des
conseillers d'orientation est d'adapter cette information à la situation
individuelle de chaque élève.
La mission a ensuite procédé à
l'audition
de
M. Jean-Pierre Laheurte, président de l'université de
Nice-Sophia Antipolis.
Après avoir indiqué les fonctions qu'il exerçait au sein
de la conférence des présidents d'université (CPU), et que
celle-ci avait mis l'accent lors de son dernier colloque sur les
problèmes de l'orientation et de l'insertion professionnelle,
M.
Jean-Pierre Laheurte
a rappelé que notre système
universitaire devait d'abord répondre au défi de la massification.
Il a observé que cet objectif conduisait à s'interroger sur les
modalités d'accès des étudiants à
l'université, sur la mise en place d'un véritable dispositif
d'orientation et sur la création d'une filière technologique
complète privilégiant notamment la formation en alternance et les
filières courtes à vocation professionnelle.
S'agissant de l'orientation, il a noté que celle-ci était
entendue par les étudiants comme une sélection, mais que cette
interprétation n'était pas partagée par la CPU qui
s'opposait à toute idée de restreindre l'entrée à
l'université, et qu'une forte demande sociale de formation
supérieure émanait désormais de l'ensemble des familles.
Il a ensuite estimé que le système actuel d'orientation
était mal conçu, contribuait à donner une image
négative de l'université puisque celle-ci était choisie
par défaut par les étudiants qui n'avaient pu accéder aux
filières sélectives, et que ses dysfonctionnements
résultaient pour l'essentiel d'une continuité insuffisante entre
le lycée et l'enseignement supérieur.
En dépit des efforts engagés par les proviseurs, de
l'expérimentation de diverses formules (forums, salons de
l'étudiant, journées portes ouvertes ...), il a observé
que toute politique en faveur des premiers cycles était vouée
à l'échec si les lycéens de terminale ne pouvaient
s'appuyer sur un " avis général d'orientation " tenant
compte de leurs capacités et des caractéristiques des diverses
filières supérieures.
Il a ajouté qu'il conviendrait que cette orientation des nouveaux
étudiants soit progressive, qu'un bilan soit établi au terme du
premier semestre universitaire et que les étudiants en situation
d'échec se voient proposer des réorientations attractives vers
d'autres disciplines ou d'autres filières sans être
pénalisés pour des erreurs d'orientation initiale.
Il a indiqué que deux autres paliers d'orientation devraient être
prévus, d'une part, à l'issue du diplôme d'études
universitaires générales (DEUG) ou du diplôme universitaire
de technologie (DUT), afin de permettre aux étudiants de poursuivre
leurs études en changeant éventuellement de filière, mais
aussi d'opter pour un emploi après avoir bénéficié
d'une formation professionnelle complémentaire en alternance, et d'autre
part à bac + 4, avant une orientation vers des diplômes
d'études supérieures spécialisées (DESS)
professionnalisés ou des diplômes d'études approfondies.
M. Pierre Laffitte
a rappelé qu'il avait suggéré,
lorsqu'il était président de la conférence des grandes
écoles, que 30 % des élèves des grandes écoles
puissent être recrutés sur titre parmi les titulaires de DEUG, de
licence ou de maîtrise mais a noté que cette proposition avait
suscité une certaine réserve des universitaires et un
intérêt limité des étudiants.
M. Jean-Pierre Laheurte
a estimé que cette proposition
correspondait à une conception positive de l'orientation et a
souhaité que le discours encore tenu dans les lycées, consistant
à affecter les bacheliers en fonction de leur formation secondaire, soit
abandonné.
Il a rappelé que les filières technologiques (écoles
d'ingénieurs, IUT et STS) ne regroupaient que 13 % des effectifs
étudiants et qu'il convenait en conséquence de développer
des passerelles pour permettre à ceux issus de l'enseignement
général de professionnaliser leur formation.
Il a par ailleurs indiqué que la CPU considérait que
l'université avait aussi vocation à se préoccuper de
l'insertion professionnelle de ses étudiants aussi bien pour ceux des
voies technologiques que générales.
Il a ensuite constaté que l'université produisait quelque
120.000 diplômés de niveau I et II, et que les
entreprises et les professions libérales n'étaient susceptibles
d'offrir que 65.000 offres d'emplois d'encadrement et de
responsabilité. Il en résulte que les diplômés
à bac + 5 sont contraints d'accepter des emplois
déqualifiés, ce phénomène se répercutant sur
les diplômes de niveau inférieur jusqu'aux emplois non
qualifiés.
Afin de remédier à cette situation, il a estimé
souhaitable de prévoir la possibilité pour les étudiants
à l'issue d'un premier cycle, notamment en lettres ou en droit, de
compléter leur diplôme par une formation en alternance ou en
apprentissage, sans quitter le système universitaire, puis à
l'issue d'une période d'activité professionnelle, de revenir
à l'université en validant les acquis obtenus.
Cet objectif suppose une concertation étroite avec les entreprises,
notamment avec les petites et les moyennes, qui auraient intérêt
à utiliser de jeunes diplômés et qui sont les plus
susceptibles de créer des emplois.
A l'issue de cet exposé, un large débat s'est engagé.
M. Ivan Renar
s'est interrogé sur la position des professeurs
d'université à l'égard de ces propositions et sur le
rôle que les agrégés du secondaire étaient
appelés à jouer dans les premiers cycles universitaires.
M. Franck Sérusclat
a souligné l'intérêt du
système d'orientation proposé et a demandé comment les
conseillers d'orientation pourraient se situer dans un tel dispositif qui
privilégierait l'insertion professionnelle.
Il a cependant exprimé la crainte qu'un mécanisme de reprise
d'études, décidée après plusieurs années
d'activité professionnelle, contribue à précariser la
situation de ses bénéficiaires, tant sur le plan de leur emploi
que sur celui de leur cursus universitaire ultérieur.
Il a enfin souligné la difficulté de trouver des entreprises
susceptibles d'accueillir en stage un grand nombre d'étudiants.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a remercié
M. Jean-Pierre Laheurte pour sa vision positive de l'avenir de
l'université et a évoqué la possibilité de mettre
en place des formations " transversales ", permettant aux
étudiants de " zapper " pendant une première
année de type propédeutique, afin d'affiner leur choix initial
d'orientation.
Il a également insisté sur la nécessité de mettre
en oeuvre une véritable remise à niveau de certains
étudiants et d'organiser pour ces derniers des cursus professionnels
adaptés.
M. Pierre Laffitte
a souligné l'intérêt des
expériences engagées à l'université de Nice-Sophia
Antipolis, qui devraient selon lui être étendues, et s'est enquis
des difficultés rencontrées dans leur mise en oeuvre.
Il a par ailleurs souhaité obtenir des précisions sur la
possibilité d'adapter les formations générales
supérieures aux besoins des entreprises de sa région qui se
spécialiseraient dans les nouvelles techniques de la communication.
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est interrogé sur les
divers personnels qui auraient vocation à formuler un avis global
d'orientation pour les élèves de terminale et a demandé si
des universitaires, notamment des enseignants-chercheurs, devraient être
associés à cette procédure.
Il a par ailleurs évoqué la possibilité de mettre en place
une grande filière technologique destinée notamment à
accueillir les bacheliers technologiques et professionnels.
Répondant à ces interventions,
M. Jean-Pierre Laheurte
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- les expériences engagées par son université ont pu
être mises en place avec l'aide des entreprises et avec l'appui des
enseignants des IUT, qui ont notamment accepté d'accueillir des DEUG
littéraires et de droit, mais se sont heurtées à des
difficultés réglementaires dans leur mise en oeuvre ;
- les PRAG ne sauraient, d'une manière générale, se
substituer aux enseignants-chercheurs dans les premiers cycles universitaires,
même s'il convient de distinguer les " littéraires " de
ceux des autres disciplines : un recours trop important aux professeurs
agrégés de l'enseignement secondaire conduirait en outre
nécessairement ceux-ci à revendiquer un statut analogue à
celui des enseignants-chercheurs ;
- les étudiants qui accèdent aux premiers cycles universitaires
en situation d'échec sont généralement dépourvus de
tout projet d'études et professionnel et n'utilisent pas, à
l'exception des filles, les outils d'information et de dialogue mis à
leur disposition pour définir leur orientation ;
- l'afflux des étudiants dans les deuxièmes cycles risque de
susciter des frustrations lorsque ceux-ci se verront proposer des emplois
sous-qualifiés par rapport à leur diplôme ;
- une formation complémentaire en alternance permettrait aux titulaires
de DEUG de conserver leur statut d'étudiant : celle-ci pourrait
concerner 20 % de ces étudiants mais la réalisation de cet
objectif suppose que les entreprises d'accueil bénéficient d'une
aide spécifique ;
- la mise en place de ces qualifications nouvelles a rencontré des
difficultés de nature réglementaire et la non homologation de ces
diplômes a été invoquée par le ministère du
travail pour leur refuser le statut des contrats de qualification ;
- les expériences engagées à l'université de Nice
ont également permis de développer des formules de remise
à niveau, qui sont cependant parfois contestées par les nouveaux
étudiants, ainsi que des tutorats : une période
d'observation d'un semestre apparaît nécessaire pour convaincre
les étudiants du bien-fondé d'une réorientation ou d'une
mise à niveau qui doivent être complétées par des
propositions attractives ;
- la détection des seuls étudiants en difficulté
apparaît préférable à une formule
générale inspirée des anciennes
propédeutiques ;
- le processus actuel d'inscription des nouveaux étudiants à
l'université est caractéristique d'un système
d'orientation par défaut : tous les élèves de
terminale devraient, préalablement au baccalauréat, pouvoir
s'appuyer sur un avis motivé d'orientation auquel participeraient des
universitaires ; la mise en place d'un service partagé des PRAG,
entre le lycée et l'université, et de conseillers d'orientation
" mixtes " permettraient à cet égard de faciliter le
passage des lycéens entre les deux ordres d'enseignement ;
- l'évaluation des chercheurs porte sur leurs seules activités de
recherche, mais ces derniers ne se désintéressent pas pour autant
des activités pédagogiques et de l'insertion professionnelle de
leurs étudiants : il serait cependant souhaitable que, dans
l'avenir, les enseignants-chercheurs, mais aussi les chercheurs, consacrent
prioritairement une partie de leur vie professionnelle aux seules tâches
d'enseignement ;
- la généralisation de la formation en alternance à
l'ensemble des étudiants supposerait un choix politique qui consacrerait
l'association des entreprises à l'enseignement supérieur ;
- la création d'une filière technologique diversifiée
devrait permettre d'ouvrir, sous certaines conditions, les filières
sélectives aux bacheliers professionnels, d'autoriser des
réorientations entre les filières générales et
technologiques, de créer des diplômes permettant une insertion
professionnelle immédiate, de faciliter la poursuite d'études des
titulaires de DUT ou de BTS vers les IUP et les écoles
d'ingénieur ;
- la création d'une voie technologique " cylindrique ",
jusqu'à bac + 5, serait incompatible avec la nécessaire
prise en compte de l'évolution des emplois proposés par les
entreprises et serait moins évolutif qu'un système fondé
sur des formations professionnalisées courtes à bac + 2
et bac + 4 ;
- les bacheliers professionnels devraient de préférence
être orientés vers des voies technologiques dès leur
entrée dans l'enseignement supérieur et les IUT, qui rencontrent
actuellement des difficultés de recrutement, pourraient constituer un
dispositif d'accueil : la réalisation de cet objectif suppose
cependant de développer en préalable une véritable
politique d'orientation dans l'enseignement secondaire.
XIII. MERCREDI 12 JUIN 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
. - La mission a procédé à
l'audition de
M. Bertrand Girod de l'Ain, professeur émérite
à l'université de Paris-Dauphine.
Dans une déclaration liminaire,
M. Bertrand Girod de l'Ain
a
d'abord évoqué l'" embargo " dont aurait
été victime son rapport sur " l'avenir des
universités européennes ", qui lui avait cependant
été commandé par le précédent ministre
chargé de l'enseignement supérieur et qui a été
publié en avril dernier par la direction de l'évaluation et de la
prospective (DEP) du ministère de l'éducation nationale.
Estimant que les dysfonctionnements des premiers cycles ne pouvaient
être dissociés de l'examen de l'ensemble des difficultés du
système universitaire, il a indiqué que son rapport
s'efforçait d'établir un diagnostic sur la situation de
l'université et de proposer des objectifs de réforme.
Il a ensuite comparé les divers systèmes universitaires en
opposant notamment le modèle allemand de la " certification
finale " au modèle " additionniste " français qui
est à l'origine de certains effets pervers dans les premiers cycles.
S'appuyant sur les témoignages recueillis au cours de son étude
auprès des représentants des étudiants et des enseignants,
il a estimé que l'éclatement de notre système
universitaire et son organisation en unités de valeur et en modules
entraînaient notamment un " bachotage " des étudiants et
un absentéisme aux cours. Il a au contraire souligné la
nécessité de faire découvrir aux nouveaux étudiants
la cohérence des parcours universitaires ainsi que le rôle
essentiel du travail personnel et a noté que ses propositions n'avaient
pas suscité d'opposition de la part de ses interlocuteurs syndicaux.
Il a ensuite rappelé que la démocratisation de l'enseignement
secondaire et l'augmentation des effectifs des bacheliers avaient conduit les
gouvernements dans les années 1960 à créer les instituts
universitaires de technologie (IUT) et à imaginer un DEUG permettant
à la fois une insertion professionnelle et la poursuite d'études
ultérieures.
Il a cependant noté que cette double fonction avait disparu puisque la
quasi-totalité des étudiants poursuivent aujourd'hui des
études longues après le DEUG et que les entreprises ne sont pas
particulièrement intéressées par des formations
générales à bac + 2.
Abordant le problème de l'échec universitaire dans les premiers
cycles, il a opéré une distinction entre les étudiants qui
abandonnent leurs études et ceux qui échouent au DEUG et a
souligné que les premiers étaient moins nombreux dans des
disciplines comme le droit, que dans les sciences humaines. Il a ensuite
évoqué les perspectives de déqualification des
diplômés à bac + 5 sur le marché du
travail et les prévisions démographiques contrastées pour
les différents cycles universitaires ; il a estimé qu'il
convenait de clarifier les objectifs et les exigences des différents
cursus, notamment pour distinguer les filières longues des formations
courtes.
Il a rappelé que la moitié des entrants à
l'université obtenaient un DEUG et le quart d'entre eux, selon les
estimations de la DEP, une maîtrise. Il a ajouté que les travaux
de l'office universitaire de la région Rhône-Alpes, de
l'université des sciences et technologies de Lille, de
l'Université de Paris II et de l'université de Nancy II avaient
révélé une forte sélection dans la plupart des
seconds cycles et des écarts de réussite considérables
selon les filières, alors que l'échec dans les premiers cycles
semble constituer aujourd'hui la seule préoccupation du
ministère. Il a également souligné l'allongement
général de la durée des études requises pour
obtenir un diplôme permettant d'assurer des fonctions d'encadrement,
qu'il s'agisse des écoles d'ingénieurs ou de l'université.
Insistant sur la gravité de l'échec dans les seconds cycles, il a
indiqué que certaines disciplines étaient plus
particulièrement concernées, notamment en mathématiques
où seulement un étudiant sur trois obtient la licence en un an,
les autres étant confrontés à des redoublements qui les
conduisent parfois à modifier leurs projets de carrière. Il a
ensuite abordé les problèmes de l'orientation en rappelant que
les bacheliers qui ont préparé un projet d'études et de
métier lors de leur entrée à l'université restaient
peu nombreux et qu'un tel projet ne pouvait se construire que progressivement
dans des filières affichant des exigences et des objectifs clairs ; ceci
implique un aménagement des épreuves finales qui devraient
être plus synthétiques et moins nombreuses, le
développement des travaux personnels des étudiants et la
généralisation de la formule du mémoire.
Il a ajouté qu'il revenait à l'Etat de définir un
modèle universitaire qui consisterait d'abord à allonger les
filières courtes, et qui devrait permettre d'augmenter la part des
diplômés de l'université à bac + 5 sur le
marché de l'emploi, notamment pour les étudiants en
mathématiques.
Dénonçant la spécialisation excessive et
l'éclatement des enseignements, qui résultent notamment du
développement des activités de recherche, il a
préconisé un retour à des disciplines principales
" maigres " permettant de réintroduire une cohérence
dans les diverses filières.
Il a également observé que le système universitaire
allemand accordait une part limitée à la recherche et
privilégiait la fonction pédagogique et de conseil des
enseignants et a estimé qu'il convenait en France de reconstituer une
véritable communauté universitaire en partant des objectifs
propres à chaque filière.
Soulignant le caractère " décapant " de ces
observations,
M. Adrien Gouteyron, président
, a
souhaité obtenir des précisions sur le sort des étudiants
qui échoueraient à l'issue de la certification finale.
Il a également constaté que la solution qui consisterait à
recentrer les premiers cycles sur une seule discipline irait à
l'encontre des propositions formulées par la plupart des interlocuteurs
de la mission d'information, qu'elle risquait d'accentuer encore la rupture
constatée entre le lycée et l'université et supposait une
maîtrise par les nouveaux étudiants des acquis et des
méthodes nécessaires pour s'engager avec succès dans des
études supérieures.
Il a enfin demandé si le développement excessif du système
des unités de valeur capitalisables n'avait pas contribué
à l'éclatement des formations de premier cycle.
Insistant sur l'intérêt des remarques formulées,
M.
André Maman
a rappelé que le système d'orientation des
étudiants aux Etats-Unis était fondé sur des tests et des
examens d'entrée dans les universités et a regretté que le
lycée ne développe pas davantage les aptitudes au travail
personnel des élèves.
Il a également noté que les universitaires américains
travaillaient en étroite concertation, notamment pour aider les
étudiants en difficulté, en y consacrant de nombreuses heures par
semaine, que les enseignants étaient " évalués "
par les étudiants, que la spécialisation n'intervenait qu'au
cours des deux dernières années d'étude, et que
l'université américaine avait aussi vocation à
remédier aux insuffisances de l'enseignement secondaire, le faible
échec universitaire qui y était constaté s'expliquant
principalement par un encadrement adapté.
Il a enfin souhaité une véritable évaluation des
universités françaises et a dénoncé les taux
inacceptables d'abandon d'études et d'échecs qui y sont
constatés.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, a évoqué le
déplacement effectué par la mission d'information à
Heidelberg et a rappelé que l'université allemande n'était
pas soumise à la concurrence de grandes écoles.
Il a exprimé la crainte que l'application en France d'un système
de certification finale ne contribue à accentuer la coupure existant
entre les grandes écoles et l'université et s'est
interrogé sur la possibilité de concilier un libre accès
aux premiers cycles universitaires et un examen final très
sélectif intervenant après plusieurs années
d'études.
M. Philippe Richert
a également souligné les
conséquences des orientations préconisées en estimant que
la priorité qui serait donnée au travail personnel des
étudiants risquait d'aggraver la rupture existant entre le lycée
et l'université et de réduire encore les chances de leur passage
entre les premiers et les deuxièmes cycles, alors que la transition
entre le secondaire et le supérieur devrait être, selon lui,
progressive.
Il a en outre remarqué qu'une spécialisation précoce des
nouveaux étudiants serait peu adaptée à une
réorientation ou à une insertion professionnelle
ultérieures, un éventail plus large d'enseignements lui semblant
plus approprié dans cette perspective.
Il a enfin noté que les deux premières années de DEUG en
mathématiques ne pouvaient être considérées comme
dispensant une culture générale.
M. Jean Bernadaux
s'est interrogé sur les raisons de la
pauvreté des statistiques disponibles concernant la réussite et
le devenir des étudiants de licence et de maîtrise. Il a
également noté que les étudiants allemands
exerçaient fréquemment une activité salariée
parallèlement à leurs études.
Rappelant l'exemple des études de pharmacie,
M. Franck
Sérusclat
s'est interrogé sur les mérites respectifs
du modèle " additionniste " et du modèle à
certification terminale en exprimant cependant une préférence
pour le premier, sous réserve que les notes obtenues par les
étudiants dans les matières principales soient prioritairement
prises en compte.
Répondant à ces interventions,
M. Bertrand Girod de l'Ain
a notamment apporté les précisions suivantes :
- le système universitaire américain complète les acquis
insuffisants de l'enseignement secondaire mais comporte aussi une
spécialisation précoce notamment dans les formations
d'ingénieurs ou technologiques ;
- notre enseignement supérieur n'a pas vocation à dispenser des
cours magistraux ni à " faire du rattrapage " mais doit
privilégier des méthodes de réflexion et de raisonnement
s'inscrivant dans des filières cohérentes : un cursus
" maigre " devrait ainsi être proposé aux nouveaux
étudiants plutôt que des enseignements éclatés qui
apparaissent par ailleurs sans rapport avec une culture générale
classique ;
- les entreprises ont plutôt besoin de diplômés
généralistes à bac + 5 et de spécialistes à
bac + 2 ;
- l'absence de sélection lors de l'entrée à
l'université commande une certification finale exigeante et un
réexamen des cursus universitaires, sauf à assister à une
déqualification des diplômés de deuxième et de
troisième cycles sur le marché du travail, qui se substitueront
aux diplômés à bac + 2 ;
- le système universitaire allemand comporte une certification finale
constituée de mémoire et d'examens terminaux portant sur des
sujets arrêtés avec les enseignants ; les séminaires
comportent, dès la première année, des travaux de
recherche et sont sanctionnés par des certificats ;
- la fréquence des échecs et des abandons d'études est
similaire en France et en Allemagne, mais la durée des études est
sensiblement plus longue outre-Rhin ;
- le développement des activités salariées des
étudiants peut s'expliquer pour des raisons matérielles mais
aussi du fait de la finalité incertaine de certains cursus
universitaires ;
- il convient de trouver un compromis entre le modèle
" additionniste " et le modèle de certification finale,
l'Allemagne s'apprêtant pour sa part à mettre en place un DEUG
intermédiaire ;
- la massification de l'enseignement supérieur s'est traduite par une
très grande diversification des enseignants qui sont souvent
dépourvus de toute formation commune, qui notent leurs étudiants
selon des critères jugés parfois arbitraires et qui veulent
" préserver leur territoire " : la présence active
des enseignants-chercheurs, notamment dans les premiers cycles, comme en droit
et en histoire, apparaît indispensable pour maintenir
l'homogénéité des enseignements et ne pas démotiver
les étudiants.
XIV. MERCREDI 19 JUIN 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président
.- La mission a tout d'abord procédé à
l'audition de M. Daniel Bancel, recteur de l'académie de
Lyon.
Souhaitant présenter de manière pragmatique les
expériences d'orientation des lycéens et des étudiants
engagées dans son académie,
M. Daniel Bancel
a
indiqué que ces programmes visaient à prendre en compte et
à étaler dans le temps le difficile passage du lycée
à l'enseignement supérieur.
Il a rappelé que l'académie de Lyon disposait désormais
depuis dix ans d'études quantitatives permettant de suivre l'orientation
des bacheliers et que l'enquête " Vivaldi ", de nature plus
qualitative, lancée en 1995, avait permis de suivre l'évolution
des projets d'études d'un échantillon de
932 élèves à partir de leurs voeux exprimés
successivement en avril, en juillet et à la fin de septembre : les
résultats constatés révèlent que les trois quarts
des lycéens de terminale souhaitent dès le mois d'avril
poursuivre des études universitaires, que la moitié des
bacheliers technologiques changent de projet et qu'une corrélation forte
peut être constatée entre l'imprécision des projets et la
situation d'échec universitaire.
Selon cette enquête, un élève de terminale sur trois n'a
pas, au mois d'avril, une idée précise de son futur
métier ; les élèves qui souhaitent s'engager dans des
études supérieures se partagent à parts égales
entre ceux qui envisagent des études courtes à bac + 2, à
bac + 3 ou 4 ou de plus longue durée.
Il a ensuite souligné que les projets d'orientation des lycéens
étaient le plus souvent déterminés par leurs
résultats scolaires et a indiqué qu'une majorité d'entre
eux attendait de l'université une formation les préparant
à une activité professionnelle intéressante.
Il a également noté la diversité des stratégies
d'orientation retenues par les lycéens, notamment pour ceux de la
filière tertiaire qui privilégient la recherche d'un emploi. Il a
ajouté que 30 % des élèves modifiaient leur projet
après le baccalauréat et près de la moitié dans les
séries technologiques.
Ces changements d'orientation résulteraient, pour 20 % des cas, de
la découverte d'une nouvelle filière, pour 15 % de leur
situation financière et pour 10 % du caractère jugé
décourageant des procédures d'inscription.
La troisième consultation en septembre révèle enfin que la
majorité des nouveaux étudiants sont satisfaits de leur choix
d'études mais que plus de la moitié éprouve des
difficultés résultant de problèmes financiers, de
l'organisation spécifique du travail universitaire et de la rupture avec
leur milieu, notamment familial.
M. Daniel Bancel
a souligné que l'amélioration de
l'orientation des nouveaux étudiants supposait des dispositifs
adaptés, notamment à chaque type de bacheliers et a
indiqué que l'échantillon de l'enquête
" Vivaldi " serait élargi à
4.000 élèves en 1996.
Abordant les dispositions prises dans son académie pour améliorer
l'information des élèves de terminale, il a précisé
que deux journées étaient consacrées dans les
lycées, au début de chaque année, à un
déplacement dans les universités et les classes
post-baccalauréat et que cette initiative était très
suivie par les intéressés.
Il a ajouté que ces journées d'information concernaient
également les professeurs principaux de terminale et les conseillers
d'orientation-psychologues qui avaient ainsi la possibilité de
rencontrer des universitaires dans chaque bassin de formation.
Il a par ailleurs indiqué que l'exploitation de l'enquête dite
" Okapi " avait permis aux responsables universitaires et
aux
proviseurs, à partir des voeux de préinscription informatique,
d'accueillir les nouveaux bacheliers d'une manière concertée et
d'accélérer leur affectation finale en évitant des
inscriptions successives. A cet égard, la dernière enquête
a révélé une baisse de la demande initiale des bacheliers
pour les filières des premiers cycles (18 % en sciences, 14 %
en médecine, 15 % en droit) mais une hausse pour les filières
sportives (18 %) et pour les instituts universitaires de technologies
(IUT) (15,6 %). Il a également souligné que le tiers des
étudiants s'inscrivait en IUT et en sections de techniciens
supérieurs (STS) après avoir suivi une année à
l'université et que les pré-inscriptions témoignaient
d'une stabilité pour les brevets de techniciens supérieurs (BTS)
et pour les classes préparatoires aux grandes écoles dont les
filières scientifiques ont été
rééquilibrées.
Il a souligné que l'académie de Lyon avait organisé des
entretiens et des tests d'auto-évaluation, prévoyant notamment la
rédaction d'une lettre de motivation, qui avaient permis de
réduire le nombre de prétendants à certaines
filières.
Il a en outre indiqué que des entretiens complémentaires
étaient organisés en juillet pour fournir aux bacheliers des
informations sur les capacités d'accueil dans les diverses
filières, et notamment dans les STS, avec des procédures
d'inscription raccourcies. Il a précisé que des structures
destinées aux nouveaux étudiants " fragiles " avaient
été développées pour les aider, au cours du premier
trimestre, à confronter leur projet d'étude à la
réalité universitaire et leur proposer éventuellement une
réorientation, en particulier vers les STS industriels où des
sections d'apprentissage ont été expérimentées. Il
a ajouté que le potentiel d'accueil des STS, notamment dans les grands
lycées, ne pourrait être maintenu que si ceux-ci acceptaient de
recevoir des populations nouvelles de bacheliers, et que les universités
avaient pour leur part développé des filières
professionnalisées permettant d'offrir des diplômes d'insertion
aux populations fragiles.
Il a enfin indiqué que ce dispositif spécifique avait reçu
le soutien de la région, dans le cadre des contrats d'objectifs, et du
ministère, dans le cadre des contrats d'établissement.
Soulignant le caractère pragmatique et la souplesse de ces actions,
M. Adrien Gouteyron, président
, s'est enquis d'une
éventuelle généralisation de ces dispositifs d'orientation
et a souhaité obtenir des précisions sur l'organisation du
système de pré-inscription ainsi que sur la participation des
professeurs principaux, des conseillers d'orientation et des diverses
catégories d'universitaires aux entretiens évoqués.
Il s'est également interrogé sur la place respective des
enseignants-chercheurs et des professeurs agrégés de
l'enseignement secondaire dans l'organisation et le fonctionnement du trimestre
d'orientation, et sur la publicité donnée aux initiatives prises
par l'académie de Lyon.
M. Daniel Eckenspieller
est convenu de l'intérêt de ces
innovations et a demandé des précisions sur la corrélation
qui pourrait exister entre le flou des projets formulés par les
élèves et leur niveau scolaire ainsi que sur les raisons qui
conduisent les futurs étudiants à modifier leur projet
d'études au cours de la procédure d'orientation.
Il s'est par ailleurs demandé si les conseils d'orientation
prodigués aux nouveaux étudiants n'étaient pas
inspirés par la prise en compte des capacités d'accueil des
diverses filières.
Soulignant l'importance accordée à l'accueil des nouveaux
étudiants,
M. Franck Sérusclat
s'est interrogé
sur les perspectives d'extension de ces expériences, sur leur
efficacité pour réduire l'échec universitaire en premier
cycle et sur les modalités des tests évoqués.
M. Jean Bernadaux, co-rapporteur,
a souhaité obtenir des
précisions sur les étudiants qui s'inscrivent en IUT après
avoir suivi une année universitaire, sur l'accueil des étudiants
en STS en cours de scolarité et sur le développement de
l'apprentissage dans les sections de techniciens supérieurs.
M. André Maman
a demandé des informations
complémentaires sur les équipes responsables de
l'opération " Vivaldi ", sur les modalités d'une
préparation des lycéens au " métier
d'étudiant ", sur la nature des tests et des entretiens
proposés aux bacheliers ainsi que sur l'imbrication du trimestre
d'orientation dans le cursus universitaire.
M. Jean-Claude Carle
a demandé si la délocalisation des
sites universitaires avait contribué à réduire
l'échec dans les premiers cycles.
Répondant à ces interventions,
M. Daniel Bancel
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- l'échec universitaire résulte d'abord d'un décalage
entre les projets d'études et les études engagées mais
l'imprécision de ces projets ne paraît pas liée directement
au niveau scolaire des lycéens ;
- l'accès des étudiants en IUT et en STS, à l'issue d'une
année passée à l'université, tend à se
développer et répond à un besoin de finalisation des
études mais ces filières sélectives ne jouent plus
aujourd'hui le rôle d'excellence qui était le leur il y a quelques
années ;
- l'orientation, même si celle-ci est tardive, doit résulter
davantage des voeux de bacheliers et de leurs projets d'études que de la
prise en compte d'un rééquilibrage des filières et des
capacités d'accueil existantes ;
- le semestre serait sans doute la période la plus adaptée pour
faciliter la réorientation des nouveaux étudiants et leur
permettre d'affiner leur projet d'études ;
- les lycées et les universités ressentent désormais le
besoin de travailler ensemble, ce qui n'a pas toujours été le cas
dans le passé ;
- les réorientations vers les STS se réalisent fréquemment
en deuxième année mais nécessitent une organisation
intensive de la scolarité, et notamment un développement des
stages pendant les vacances ;
- l'enquête " Vivaldi " est conduite par des équipes de
conseillers d'orientation ayant une "sensibilité universitaire "
et
son échantillon devrait être élargi afin notamment de
représenter toute la variété de la population
lycéenne ;
- une section d'apprentissage en métallurgie est en cours
d'expérimentation en BTS et cette formule s'adresse plus
particulièrement aux étudiants dépourvus de tout projet
d'études, ou en situation difficile, et a pour objectif de faciliter
leur insertion professionnelle ;
- les tests d'auto-évaluation des étudiants ont été
élaborés avec l'aide des psychologues et portent principalement
sur l'appréciation des prérequis, compte tenu de la nature des
études envisagées, alors que les lettres de motivation ne sont
pas exploitées comme outil de sélection ;
- l'éloignement des étudiants de leur domicile et de leur famille
constitue un facteur important d'échec universitaire ;
- les enseignants-chercheurs " chevronnés " qui ne sont plus
accaparés par leur activité de recherche ont une vocation
particulière à participer à l'orientation et à
l'accueil des étudiants des premiers cycles.
La mission a ensuite procédé à l'audition de
M. Jean-Louis Aucouturier
,
président du comité
national d'évaluation (CNE),
et de
Mme Renée Ridier,
chargée de mission.
M. Jean-Louis Aucouturier
a d'abord rappelé la mission et les
activités du CNE en soulignant que depuis 1985, cette autorité
administrative indépendante, composée de dix-sept membres,
était notamment chargée d'évaluer les universités
et les grandes écoles.
Il a ensuite indiqué que le comité avait procédé
depuis dix ans à l'évaluation de l'ensemble des quelque 130
établissements d'enseignement supérieur et venait d'engager une
seconde évaluation.
L'évaluation de chaque établissement est assurée par deux
membres du CNE et par une dizaine d'experts choisis en fonction de leurs
compétences, et porte plus particulièrement sur la gestion, les
résultats ainsi que sur l'activité de recherche.
Chaque équipe présente un rapport d'étape au CNE qui est
ensuite débattu avec l'établissement concerné ; le
comité adopte ensuite le rapport définitif qui est transmis au
président d'université, ce dernier ayant la faculté
d'apporter des réponses aux observations formulées.
Le CNE procède en outre à des évaluations transversales
pour certaines disciplines, comme l'odontologie et la pharmacie et publie des
études générales comme celle qui a été
consacrée aux instituts universitaires de formation des maîtres
(IUFM).
M. Jean-Louis Aucouturier
a ensuite indiqué que
l'évaluation " de retour " reposait sur un rapport
d'auto-évaluation demandé aux universités qui n'ont
cependant pas toujours une perception claire de leur fonctionnement en
dépit de la mise en place des projets et des contrats
d'établissement.
Il a ajouté que la création de grilles d'auto-évaluation
méthodologique devrait permettre de réduire la période
entre chaque évaluation, l'objectif étant d'obtenir un avis
exhaustif de chaque université tous les six ans et d'évaluer
quelque vingt-cinq établissements chaque année.
Il a précisé que cette évaluation se ferait
désormais par site universitaire et porterait particulièrement
sur l'examen des flux d'étudiants et sur la synergie entre
établissements afin notamment de faire apparaître la
réalité de ces sites au plan national et international.
Il a enfin évoqué le rôle international du CNE qui est
appelé à coopérer dans le cadre européen avec les
comités d'évaluation existants ou à aider à la
définition des outils d'évaluation des pays qui en sont encore
dépourvus.
Mme Renée Ridier
a précisé que les Pays-Bas et la
Grande-Bretagne disposaient déjà d'un comité
d'évaluation, cette dernière établissant une
corrélation entre l'évaluation et le financement de ses
universités.
Elle a ajouté que la plupart des pays européens cherchaient
à se doter de structures d'évaluation, notamment la Suède,
l'Espagne, et l'Allemagne. Elle a également souligné que les pays
de l'Europe de l'Est, comme la Roumanie, la Hongrie et la Bulgarie exprimaient
une demande considérable en ce domaine, née d'un besoin
d'habilitation et de transformation de certaines formations qui sont devenues
obsolètes.
Elle a enfin souligné l'intérêt d'un projet-pilote qui
consiste à tester des méthodologies d'évaluation dans une
quinzaine de pays proposant des formations analogues et qui doit aboutir
à l'adoption d'un protocole européen.
A l'issue de cet exposé général, un large débat
s'est instauré.
M. Jean Bernadaux
,
co-rapporteur
, s'est enquis du rôle du
CNE dans l'évaluation des résultats obtenus dans les
différentes disciplines par chaque université.
Il s'est ensuite interrogé sur les conséquences de la
présence majoritaire des universitaires au sein du CNE et a
souligné l'intérêt d'une évaluation qui serait
également assurée par des professionnels. Il a demandé si
le CNE avait pu mesurer l'importance de l'échec universitaire en licence
et en maîtrise selon les disciplines, et comment les
établissements réagissaient à l'annonce d'une
évaluation.
Il a enfin souhaité obtenir des précisions sur les
méthodes d'évaluation retenues à l'égard des IUFM.
M. Adrien Gouteyron, président,
a demandé si les membres
du CNE exerçaient leur fonction à temps plein et si ses experts
étaient des universitaires. Constatant que les rapports du CNE restaient
confidentiels, il a souhaité obtenir des précisions sur la place
du comité par rapport aux autres organismes d'évaluation et de
prévision, sur les perspectives d'une plus large diffusion de ses
travaux et sur leur prise en compte éventuelle pour l'attribution des
crédits aux établissements d'enseignement supérieur.
M. Daniel Eckenspieller
a évoqué le problème de
l'information des étudiants de premier cycle et a souhaité savoir
si le comité avait constaté que cette question avait
été appréhendée de manière
différenciée selon les établissements.
M. André Maman
a demandé si les travaux
d'évaluation menés par le CNE pouvaient permettre d'opérer
un classement entre les universités et de distinguer leurs
résultats selon les différentes disciplines.
Il a estimé qu'un tel classement serait de nature à stimuler une
compétitivité entre établissements et à faire
apparaître les raisons pour lesquelles certains fonctionnent mieux que
d'autres.
Il s'est enfin inquiété du suivi professionnel par les
universités de leurs diplômés.
Répondant à ces interventions
, M. Jean-Louis Aucouturier
et
Mme Renée Ridier
ont notamment apporté les
précisions suivantes :
- si parmi ses dix-sept membres le CNE comprend onze universitaires, ceux-ci
exercent une activité qui déborde largement du domaine de
l'enseignement et de la recherche et la présence de quatre membres du
conseil économique et social traduit le rôle accordé aux
personnalités extérieures ;
- le CNE recourt à des experts d'origine universitaire mais fait aussi
largement appel aux gestionnaires et aux représentants de
l'industrie ;
- dans la plupart des cas, l'évaluation est demandée par
l'établissement et les conclusions rendues permettent à chaque
président d'université de présenter des requêtes au
ministère en s'appuyant sur les travaux du CNE qui est une
autorité administrative indépendante ;
- l'évaluation faite par le comité est tributaire des
informations fournies par les établissements selon un questionnaire
statistique type ; si certains disposent d'un appareil statistique
satisfaisant, d'autres ne connaissent pas le nombre réel de leurs
étudiants ;
- le CNE n'a pas pour mission d'établir une base de données sur
les cursus universitaires et le suivi professionnel de l'ensemble des
étudiants ;
- le rapport annuel du CNE a consacré une étude
générale aux problèmes des premiers cycles universitaires
et le comité a apporté sur ce point sa contribution aux
récents états généraux de
l'université : les problèmes des premiers cycles ne doivent
pas être isolés de ceux des enseignements
post-baccalauréat, la recherche ne doit pas être absente des
premiers cycles, sauf à courir le risque d'une secondarisation de ces
études, et le libre accès à l'université doit
être maintenu ;
- le niveau de l'université doit rester élevé, ce qui
implique l'acquisition de savoirs et d'une méthodologie dans les
dernières années de lycée, le développement des
relations entre les universitaires et les enseignants du secondaire dans le
domaine de l'orientation et un rééquilibrage des diverses
composantes de l'enseignement supérieur ;
- il conviendrait de mettre l'accent sur l'adaptation des filières
supérieures aux capacités des étudiants, sur le
développement des passerelles et de la formation continue et sur une
plus grande participation des diverses catégories d'enseignants au
fonctionnement des premiers cycles ;
- si le baccalauréat doit rester le passeport permettant
d'accéder à l'université, il ne peut à lui seul
garantir une répartition satisfaisante des bacheliers entre les diverses
filières : ceci suppose de mettre en place un palier d'orientation en
première année d'une durée de quelques mois, sans
envisager de porter à trois ans les premiers cycles ;
- la résorption de l'échec universitaire passe par le
développement de l'alternance dans les filières courtes mais la
création de nouvelles formations courtes professionnalisées
n'apparaît pas souhaitable ;
- en dépit des recommandations formulées par le CNE, les
établissements n'assurent pas le suivi professionnel de leurs
diplômés, à la différence des grandes écoles
qui disposent d'associations actives d'anciens élèves ;
- l'étude menée sur le fonctionnement des IUFM
révèle notamment que la cohabitation, difficile à
l'origine, entre deux types d'enseignants et d'étudiants était
désormais satisfaisante et que la synergie recherchée avait
apporté les effets attendus : cette étude a
nécessité un lourd travail méthodologique et il conviendra
notamment de mesurer, en liaison avec l'inspection générale,
comment les professeurs d'école remplissent leur mission par rapport aux
anciens instituteurs ;
- des problèmes budgétaires sont pour partie à l'origine
de la faible diffusion des rapports du CNE, mais ceux-ci sont désormais
accessibles sur le réseau Internet et de courts condensés de ces
rapports devraient être mis à la disposition d'un plus large
public ;
- le CNE arrête son programme de travail en toute indépendance
mais peut répondre aux suggestions et aux demandes qui lui sont
adressées, notamment par le Gouvernement, comme l'a montré sa
récente contribution aux états généraux de
l'université.
XV. MERCREDI 26 JUIN 1996
-
Présidence de M. Adrien Gouteyron,
président, puis de M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
. - La
mission a procédé à
l'audition
de
M. André Maman, sénateur, représentant des
Français établis hors de France
.
Se fondant sur sa longue expérience d'universitaire acquise pendant plus
de quarante ans au Canada et surtout aux Etats-Unis, à
l'université de Princeton
, M. André Maman
a
estimé qu'il convenait de rappeler l'organisation générale
du système universitaire américain afin notamment de mieux
apprécier la portée de certaines remarques émises sur ce
sujet par plusieurs interlocuteurs de la mission d'information.
A titre liminaire, il a d'abord rappelé que les Etats-Unis ignoraient
toute organisation nationale du système éducatif et que chaque
Etat restait libre de décider à sa guise de sa politique
éducative.
Il a indiqué que les écoles primaires, qui relèvent des
comtés, n'accueillaient les élèves qu'à partir de
cinq ans, et qu'une grande diversité pouvait être constatée
entre les établissements d'enseignement dont le niveau est cependant
connu de tous du fait d'une auto-évaluation
généralisée.
Constatant la dégradation du système éducatif public, il a
souligné le développement d'un secteur laïque privé
qui se révélait coûteux, mais de bonne qualité, et
la disparition d'un nombre croissant d'écoles secondaires catholiques.
Il a précisé que ce secteur privé restait néanmoins
accessible aux élèves peu favorisés du fait du large
développement du système des bourses.
Il a ajouté que les écoles publiques urbaines étaient
confrontées à de graves problèmes de
sécurité et de discipline, à l'inverse des
établissements publics et privés installés dans les
grandes banlieues résidentielles.
Il a ensuite rappelé que tous les élèves du secondaire
avaient vocation à entrer dans l'enseignement supérieur qui
accueille actuellement environ huit à neuf millions d'étudiants
répartis dans 3.000 universités. En l'absence d'un examen
national de type " baccalauréat ", les futurs étudiants
sont soumis à des tests " objectifs " (standardized aptitude
tests et advanced placements) dont les résultats permettent de
définir un profil national pour chaque étudiant mais dont le
contenu est critiqué par certaines minorités.
L'entrée à l'université fait l'objet d'une
préparation au cours des deux années précédant la
fin des études secondaires, chaque élève disposant de
l'aide d'un " orienteur-guideur " et des conseils fournis
notamment
par les " officiers d'admission " et les anciens élèves
des universités : selon les notes obtenues en cours de
scolarité et les résultats des tests, chaque élève
est orienté vers un établissement répondant à son
profil et à son niveau, les tests étant obligatoires pour
accéder aux 200 meilleures universités du pays.
En vue de son entrée dans l'enseignement supérieur, chaque
élève de terminale doit établir un dossier portant sur ses
résultats scolaires et sur ses activités
" extracurriculaires " afin notamment d'évaluer son propre
potentiel. Ce dossier doit notamment porter sur la disponibilité de
l'élève, son esprit d'équipe, son indépendance
à l'égard de sa famille et son sens de l'initiative.
M. André Maman
a rappelé que chaque Etat disposait d'une
université répartie sur plusieurs campus, que certaines
étaient d'un excellent niveau (Indiana, Wisconsin, Californie, Texas
...) et soutenaient la comparaison avec les meilleures universités
privées (Princeton, Harvard, Yale, Stanford, MIT...) qui tentent de
recruter les meilleurs élèves des lycées sur l'ensemble du
territoire américain, avec l'aide des " officiers
d'admission ", de certains de leurs professeurs et des associations
d'anciens élèves.
Il a indiqué que les lycéens formulaient en moyenne des demandes
d'admission dans quatre à huit universités. Il a ajouté
que le système universitaire était complété par
plusieurs centaines de " community colleges " proposant des
formations peu coûteuses de proximité, d'une durée de deux
ans, et permettant à leurs étudiants de poursuivre
ultérieurement des études supérieures plus approfondies
après l'obtention du diplôme de " bachelor ".
Il a précisé que le coût des études
supérieures (28.000 dollars à Princeton) devait être
apprécié en fonction de l'existence de bourses dont le montant
était adapté aux revenus des familles et que les étudiants
bénéficiaient d'un système de prêts bancaires
remboursables dans les six mois qui suivaient l'obtention de leur diplôme.
Il a ensuite insisté sur l'encadrement dont bénéficiaient
les nouveaux étudiants pendant la semaine d'accueil à
l'université et a rappelé que les " officiers
d'admission " s'efforçaient de sélectionner les meilleurs
étudiants, mais devaient tenir compte des quotas instaurés au
bénéfice de certaines minorités et de diverses
catégories d'étudiants (enfants des anciens élèves,
athlètes de haut niveau, " talents inhabituels "...). Il a
ajouté que l'année universitaire était organisée en
deux semestres et que pendant les deux premières semaines
l'étudiant, qui est suivi par son conseiller et ses professeurs, pouvait
être autorisé à changer d'orientation.
A l'université de Princeton, l'encadrement est assuré par 800
professeurs, soit un enseignant pour sept étudiants, et est
complété par 1.400 étudiants de doctorat qui sont
chargés de six heures de cours hebdomadaires sous la direction
d'universitaires expérimentés enseignant le plus souvent en
première et en deuxième années : le taux
d'échec y est très faible mais les deux premières
années sont particulièrement intensives et doivent permettre
notamment de rattraper les retards enregistrés au lycée.
Une large place est faite au contrôle continu, les étudiants
étant soumis à l'obligation de passer un examen pour chaque cours
au milieu du semestre. L'université dispose par ailleurs d'un service
très important de médecins et de psychiatres et les professeurs,
à tous les niveaux, doivent consacrer quinze à vingt heures
hebdomadaires pour apporter des conseils à leurs étudiants. Par
ailleurs, les professeurs des divers départements travaillent en
étroite collaboration et les études
" interdépartementales " sont encouragées.
M. André Maman
a ajouté que certaines universités,
même de qualité, comme celle de New-York, enregistraient un taux
d'échec plus important en dépit des efforts engagés en
matière de rattrapage scolaire, du fait notamment d'une forte
présence d'étudiants provenant de minorités, que la
plupart des établissements assuraient l'hébergement de leurs
étudiants au sein des campus et qu'en troisième année, au
moment des choix de spécialisation, le niveau des études
était comparable à celui des universités
européennes.
Il a également indiqué qu'un système de tutorat,
assuré par des volontaires avancés dans leurs études,
permettait d'encadrer les nouveaux étudiants et de remédier
précocement à leurs difficultés, en leur assurant
notamment des cours de rattrapage gratuits : en cas d'échec dans
une discipline, l'étudiant ne perd pas le bénéfice de son
semestre et a la possibilité de poursuivre ses études sans
redoublement. Des actions de soutien et des réorientations permettent en
outre de réduire l'échec universitaire au cours des
premières années.
Il a enfin noté que les campus américains restaient
épargnés par l'insécurité mais étaient de
plus en plus concernés par le développement de la consommation
d'alcool et de drogue.
M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur
, s'est enquis de la
périodicité des examens évoqués.
M. Daniel Eckenspieller
a souligné l'intérêt de cet
exposé qui faisait apparaître les lumières et les ombres du
système universitaire américain.
Il s'est par ailleurs interrogé sur l'efficacité de ce
système, sur l'adaptation de ses formations aux besoins de la
société américaine et sur les modalités de son
fonctionnement et de son organisation qui pourraient être
transposées dans notre pays.
Répondant à ces interventions,
M. André Maman
a
notamment apporté les précisions suivantes :
- les examens interviennent en cours de semestre et viennent compléter
un dispositif qui accorde une large place au contrôle continu ; des
notes satisfaisantes sont par ailleurs exigées des étudiants pour
entrer dans les écoles spécialisées à vocation
technologique ;
- en ce qui concerne leur activité future, les étudiants sont
aidés par l'existence, sur le campus, d'un " bureau des
carrières " où se trouvent affichées les offres
d'emploi ;
- en l'absence de service militaire, l'université assure un brassage
social des jeunes américains ;
- les deux premières années permettent aux étudiants de
s'auto-évaluer dans un processus de compétition continue qui
n'exclut pas les réorientations et les changements
d'établissement ;
- le principe de l'évaluation des professeurs par les étudiants
se traduit par une notation qui est rendue publique et par des suggestions
portant sur les améliorations à apporter aux cours ;
- les universités américaines recrutent des enseignants de toutes
nationalités et la compétition est particulièrement rude
pour la titularisation des professeurs : les dossiers de promotion prennent en
compte la qualité de l'enseignement, les activités de recherche
qui sont appréciées par des experts et aussi la " bonne
citoyenneté " universitaire des enseignants ;
- les jeunes professeurs bénéficient d'un contrat d'un an,
renouvelable ou non, ou de trois ans, également renouvelable, à
l'issue duquel ils peuvent être soit licenciés, soit promus au
rang de professeur associé, ce qui leur confère la
" tenure ", avant d'être éventuellement promus au rang
de professeur, qui est le grade le plus élevé de la
hiérarchie universitaire ;
- les salaires des professeurs sont fixés par le conseil
d'administration de l'université : dans les universités
privées, les professeurs de rang le plus élevé sont
chargés de répartir une enveloppe globale entre les enseignants
de rang inférieur, selon les activités et les mérites
respectifs de ces derniers ;
- les établissements privés ne subsistent que grâce
à la générosité de leurs anciens
élèves qui est sollicitée par les " bureaux du
développement " : les grandes universités effectuent
actuellement des levées de fonds qui sont évaluées
à un milliard de dollars pour les cinq ou dix ans à venir ;
- le système universitaire américain a fait la preuve de son
efficacité et de son adaptation mais les diplômes des
universités les plus prestigieuses ne garantissent pas, en dépit
de l'efficacité des associations d'anciens élèves, une
stabilité de l'emploi dans les entreprises ;
- les étudiants américains exigent beaucoup de leurs professeurs
et s'engagent précocement dans des activités de recherche ;
- à l'instar des Etats-Unis, il serait sans doute souhaitable de
développer la disponibilité des universitaires français
à l'égard de leurs étudiants, de les inciter à
résider sinon sur les campus, du moins dans les villes universitaires,
d'accroître leur intérêt pour toutes les activités
para-universitaires, notamment en matière culturelle, et de favoriser la
concertation entre les enseignants des diverses disciplines .
- la suppression de l'âge de départ à la retraite pour les
professeurs américains d'université, et la faiblesse du montant
de leur pension, qui les incite à rester en fonction le plus longtemps
possible, ont contribué à sacrifier une génération
de jeunes professeurs qui sont par ailleurs évalués en permanence
à travers leur enseignement, leurs publications et leur participation
à la " bonne citoyenneté " universitaire ;
- le principe de l'accès à l'université selon le
système des quotas est parfois contesté devant les tribunaux
américains par les étudiants de certaines minorités ;
- le fonctionnement du système universitaire américain repose sur
la sélection et sur la non gratuité des études mais aussi
sur le bénévolat des anciens élèves.
ANNEXE II
I. synthèse des messages reçus, via le réseau internet, par la mission d'information entre le 22 février et le 4 juin 1996
Dans le cadre de ses travaux, la mission d'information a
décidé de lancer une consultation sur Internet, via le serveur du
Sénat, afin de recueillir directement les observations et les
propositions des acteurs et des usagers du système universitaire,
à partir notamment des expériences engagées sur le terrain
dans le domaine de l'information et de l'orientation des lycéens et des
étudiants.
Cette consultation a été engagée à partir de sept
questionnaires qui ont été envoyés chaque quinzaine sur le
réseau.
En réponse, cent cinquante-deux messages, le plus souvent très
substantiels, sont parvenus sur le serveur du Sénat.
Chaque série de réponses a fait l'objet de synthèses
bi-mensuelles dont la teneur est reproduite dans la présente annexe.
II. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 22 FÉVRIER ET LE 3 MARS 1996
1. Les principales causes de l'échec universitaire
dans les premiers cycles seraient les suivantes :
- une
absence d'information dans le secondaire
sur le contenu, les
objectifs, les filières et les débouchés de l'enseignement
supérieur ;
- une
absence de projet professionnel et de motivation des
étudiants
qui ont choisi une " orientation par
défaut " et qui s'engagent dans des cursus longs et sans
débouchés directs à court terme ;
- une baisse du
niveau méthodologique des lycéens
et la
nécessité de recentrer l'enseignement secondaire sur
l'acquisition de méthodes de travail ;
- un
passage difficile du lycée à l'université
,
d'un système encadré à un système de
responsabilité : les matières n'y sont pas enseignées
de la même façon et le système d'évaluation
diffère entre les deux ordres d'enseignement ;
- une massification de l'enseignement supérieur qui se traduit par un
environnement pédagogique médiocre
et un sous-encadrement
des étudiants par rapport à celui des lycéens ;
- les cours dispensés à l'université sont jugés
trop scolaires, notamment quand ils sont assurés par les PRAG, tandis
que les enseignants sont parfois considérés comme non
motivés, voire incompétents : le
manque
d'intérêt des programmes
est souligné ainsi que leur
inadaptation à l'emploi
et aux débouchés
professionnels ;
- les étudiants recherchent à l'université une
formation professionnalisée
que les premiers cycles n'ont pas
vocation à leur donner : les formations dispensées sont
considérées à la fois comme trop générales
et trop abstraites ;
-
l'accès à l'université est jugé trop
ouvert
et le baccalauréat ne joue plus son rôle de
diplôme universitaire tandis que les STS et les IUT sont
considérés comme trop sélectifs et leur nombre
insuffisant : l'université n'est plus une machine à
fabriquer des élites mais est devenue un " hall d'attente "
avant de trouver un emploi ;
- la
secondarisation
des premiers cycles et le recours aux PRAG
tendraient à conforter les carences méthodologiques des
lycéens ;
- les
conditions de la vie étudiante
joueraient enfin un
rôle important dans l'échec observé dans les premiers
cycles.
2. L'appréciation portée sur le système actuel
d'information et d'orientation au lycée et à l'université
:
- le système d'information est jugé
insuffisant,
défaillant, trop théorique
, voire " nul ", surtout
dans les lycées et devrait être organisé par des
professionnels et complété par des stages en entreprises ;
- l'information au lycée devrait être dispensée pendant
les
heures de cours
et être complétée par des
entretiens personnalisés permettant d'élaborer un
projet
professionnel
à partir des motivations et des capacités des
lycéens ;
- les conseillers d'orientation dispensent une
information trop
générale
et parfois trop pessimiste sur les filières
et les débouchés et ne connaissent pas les formations
récentes, alors que les enseignants ne sont compétents que pour
leur seule discipline ;
- la sélection trop axée sur les
mathématiques
contribue à une mauvaise orientation des lycéens ;
- l'information existante est difficile à trouver dans certaines
UFR :d'une manière générale, les
lycéens et
les étudiants font peu d'efforts
pour recueillir l'information ;
- les lycéens attendent une
réponse " normative "
des conseillers d'orientation
pour choisir une filière parmi des
formations qui restent pour eux largement inconnues ;
- les
services administratifs des universités
sont très
critiqués : leur disponibilité et leurs compétences
sont mises en cause et les étudiants sont livrés à
eux-mêmes pour leur orientation ;
- les DEUG A et B sont
choisis " par défaut ",
notamment par les bacheliers professionnels.
3. Les modalités d'orientation choisies par les
intervenants :
- goût pour les matières enseignées au lycée, choix
d'un
projet professionnel
effectué à l'occasion de stages,
conseils des conseillers d'orientation et de la famille ;
- orientation par défaut à la suite
d'échec
aux
concours et aux filières professionnelles sélectives :
certains choix sont faits à " l'aveuglette " et sont suivis
de
réorientations
à la suite d'entretiens avec notamment
des
enseignants-chercheurs
de troisième cycle ;
- les conseillers d'orientation du secondaire, jugés " mous et
incompétents ", sont délaissés au profit des
enseignants
et de la consultation de brochures (l'Etudiant) ;
- les orientations sont rarement arrêtées lors de l'entrée
à l'université mais s'affinent progressivement en recherchant
notamment des
" interfaces " entre des
spécialités voisines.
4. Les suggestions pour améliorer le système d'information et
d'orientation des lycéens et des étudiants :
- l'information des étudiants devrait passer par une
sensibilisation
à la vie active
, par une
valorisation des formations techniques
et manuelles
et par une description concrète des
métiers
préparés : des
cours de
sensibilisation
à l'enseignement supérieur devraient
être
obligatoires au lycée
, assurés notamment par
des enseignants chercheurs et devraient être complétés par
des brochures d'orientation et la mise en place d'un numéro vert
spécifique ;
- l'orientation devrait privilégier le
projet professionnel
de
l'étudiant, en l'adaptant ensuite aux débouchés
professionnels, notamment à l'occasion de
stages
organisés
en classe de terminale et de
conférences
données par des
étudiants lors de journées thématiques ;
- le rôle du
baccalauréat
devrait être
renforcé et un
mécanisme de sélection
institué à l'entrée à l'université pour les
lycéens dont la formation initiale est manifestement inadéquate
avec la poursuite d'études supérieures ;
- l'incertitude des étudiants provient aussi
d'un excès
d'informations contradictoires
et une information concrète sur les
carrières, les formations et l'évolution des métiers
devrait être dispensée très tôt,
dès le
collège
, puis tout au long de la scolarité pour gérer
l'orientation des élèves en fonction des besoins de
l'économie de demain : une réflexion sur les projets
professionnels devrait être engagée dès la classe de
1ère sous la
direction d'un tuteur
, cette formule devant
être étendue ultérieurement à tous les
étudiants de premier cycle ;
- les
conseillers d'orientation
devraient avoir pour mission de
détecter les bons élèves et d'orienter les moins bons
d'une manière plus incitative ;
- l'université doit privilégier le rôle des
enseignants-chercheurs
et le recours aux PRAG devrait, pour des raisons
méthodologiques, rester aussi limité que possible dans les
premiers cycles ;
- la
réforme des premiers cycles et l'augmentation des moyens
donnés à l'université constituent un préalable
à une amélioration de l'information et de l'orientation des
étudiants ;
- l'information sur les carrières et les emplois, la
simplification
des filières
pour améliorer la lisibilité des cursus,
la
généralisation des formations en alternance
constitueraient autant de remèdes à l'échec universitaire
dans les premiers cycles.
*
* *
III. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 6 ET LE 18 MARS 1996
La mission d'information est aujourd'hui en mesure
d'établir un premier bilan des messages qui lui ont été
adressés depuis le lancement de la consultation sur le réseau
Internet :
- 19 messages lui sont parvenus à la suite du premier questionnaire
envoyé le 21 février 1996 ;
- 36 messages ont été transmis à la suite du
deuxième questionnaire et de la première synthèse du
6 mars 1996 ;
- 150 demandes ont été formulées pour disposer de la
synthèse bimensuelle de ces messages.
La plus grande part de ces messages proviennent d'étudiants
engagés dans des études supérieures longues, et
émanent également d'enseignants universitaires.
Il convient également de noter que les messages proviennent
d'établissements et de grandes écoles répartis sur
l'ensemble du territoire national et que plusieurs d'entre eux émanent
d'étudiants ou d'enseignants français travaillant dans des
universités étrangères, par exemple aux Etats-Unis et au
Japon.
La mission d'information tient à remercier tous ses correspondants pour
la qualité et le sérieux de leurs remarques et sur le refus de la
fausse démagogie de la plupart des réponses ; elle souligne
que de nombreux messages félicitent le Sénat et sa commission des
affaires culturelles d'avoir engagé cette consultation et expriment leur
souhait de poursuivre le contact.
Dans cette perspective, il serait souhaitable que les correspondants qui le
souhaitent indiquent leur accord pour que soit éventuellement reproduite
dans la synthèse une partie de leurs réponses, l'origine du
message restant confidentielle.
Il convient d'ajouter que certains intervenants ont répondu aux deux
questionnaires et que certains, outre leur réaction personnelle,
présentent les programmes de leur organisation syndicale.
Par ailleurs, il faut rappeler que les synthèses transmises sur le
réseau n'expriment pas l'opinion de la mission d'information mais
s'efforcent de résumer les principales contributions des intervenants
qui peuvent refléter, par exemple, les oppositions existantes entre
diverses catégories de personnels.
I. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU PREMIER QUESTIONNAIRE DU 21
FEVRIER 1996
1. Les causes de l'échec universitaire dans les premiers
cycles :
- lacunes du système d'information et d'orientation dans l'enseignement
secondaire et inadaptation de la méthodologie scolaire à
l'enseignement supérieur ;
- réticences des universitaires à participer à une mission
d'information auprès des lycéens ;
- inadaptation des conditions de travail à l'université, absence
de motivation et dilettantisme de nombreux étudiants, problèmes
de leur passage à l'âge adulte, d'un système assisté
à un système de responsabilité ;
- accès trop ouvert en première année de DEUG alors que la
sélection apparaîtra ultérieurement pour les
étudiants ;
- méconnaissance par les élèves de leurs capacités
et des différences de contenu et de méthode entre l'enseignement
secondaire et supérieur ;
- distance maintenue entre les enseignants et les étudiants, voire
relations conflictuelles, et organisation trop rigide des cursus
universitaires ;
- réforme pédagogique des lycées engagée sans
concertation avec l'université ;
- l'université serait un " parking anti-chômage " pour
20 à 30 % des étudiants inscrits en première
année, ce qui relativise le taux d'échec constaté.
2. L'appréciation portée sur le système actuel
d'information et d'orientation au lycée et à
l'université
- absence d'information sur le contenu des programmes universitaires ;
- information disponible mais pas exploitée : une démarche
personnelle des lycéens est nécessaire pour y
accéder ;
- l'orientation devrait être conduite dès la classe de seconde par
des étudiants et les professeurs de lycée ;
- l'orientation devrait permettre d'exercer des choix entre les filières
courtes et longues, ce qui implique une meilleure définition des
filières technologiques et professionnelles par rapport aux
filières générales ;
- la connaissance des formations et des métiers par les
élèves est caricaturale et le système éducatif ne
peut remédier seul à cette carence.
3. Les suggestions proposées pour améliorer ce système
d'information et d'orientation
- l'école devrait responsabiliser ses élèves ;
- les futurs étudiants devraient tester leur choix dans l'enceinte du
lycée, en bénéficiant notamment d'un enseignement intensif
pour les disciplines qu'ils choisiront à l'université ;
- des sessions d'information assurées par des étudiants dans les
lycées seraient plus efficaces que l'information dispensée par
les CIO ;
- une période de réflexion devrait être instituée au
cours du premier trimestre universitaire ;
- l'amélioration de l'orientation au lycée devrait passer
par :
· un développement des moyens des CIO ;
· la mise à disposition des lycéens de statistiques sur les
résultats universitaires des bacheliers selon le type de
baccalauréat et des sujets d'examen en première année de
DEUG ;
· un avis d'orientation donné par les conseils de professeurs ;
· la recherche d'une meilleure adéquation entre formations
scolaires et formations supérieures selon des procédures plus ou
moins contraignantes de sélection ;
- les réorientations en premier cycle devraient être
favorisées par :
· l'établissement d'une grille d'équivalence nationale
entre les diplômes ;
· le maintien du droit aux bourses après réorientation ;
· le rétablissement de la spécialisation et du
caractère national des DEUG et des " savoirs de
base " ;
- la diversification de l'offre de formation devait être assurée
par :
· une adaptation des formations supérieures aux nouveaux
métiers ;
· une année de spécialisation liée à une
profession à l'issue du DEUG ;
· un développement de la formation en alternance ;
· de nouveaux diplômes et un cursus professionnalisé pour les
bacheliers technologiques et professionnels ;
- une simplification du fonctionnement des universités passerait
par :
· une réduction du nombre des antennes universitaires ;
· une diversification du financement des universités ;
· un rapprochement de l'université des entreprises avec le
développement des stages et de l'alternance ;
- l'information sur l'orientation dans les lycées devrait consister en
conseils personnalisés donnés aux élèves compte
tenu de leurs résultats scolaires et de leurs aspirations,
dispensés par les enseignants du secondaire, des classes
préparatoires et des universités : une orientation
satisfaisante apparaît comme le complément indispensable à
l'obtention du baccalauréat ;
- l'échec universitaire ne pourrait être réduit que par
l'institution de concours spécifique pour chaque filière
universitaire du fait que le baccalauréat ne joue plus son
rôle ;
- le système éducatif doit améliorer sa connaissance du
monde socio-économique, notamment les enseignants et les conseillers
d'orientation : des passerelles devraient être
développées entre les emplois d'enseignants du secondaire et du
supérieur.
II. LES REACTIONS A LA PREMIERE SYNTHESE DU 6 MARS 1996
- le recours aux professeurs agrégés du secondaire (PRAG) a
été rendu nécessaire du fait de la massification de
l'enseignement supérieur et parce que le recrutement des enseignants et
enseignants-chercheurs n'a pas accompagné l'afflux d'étudiants
à l'université : il serait injuste de leur faire porter la
responsabilité de l'échec dans les premiers cycles ;
- les critiques formulées contre les PRAG émanent des doctorants
et des enseignants-chercheurs qui disposent d'un accès
privilégié sur le réseau Internet ;
- le recours aux PRAG pour remédier au sous-encadrement des
étudiants s'explique pour des raisons budgétaires ;
- une orientation progressive des étudiants des premiers cycles risque
de transformer l'université en " hall de gare " accueillant
les laissés-pour-compte du système éducatif.
III. LES REPONSES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 6 MARS 1996
1. Les formations supérieures courtes, à finalité
professionnelle, de type IUT et STS, vous paraissent-elles
exagérément sélectives, compte tenu notamment des besoins
des entreprises ?
- pour la plupart des intervenants, ces filières courtes n'apparaissent
pas exagérément sélectives, et ces formations
correspondant aux besoins des entreprises sont même parfois
considérées comme les " CAP de demain " ;
- pour certains, le caractère sélectif des BTS et des IUT
apparaît indispensable pour maintenir la qualité de ces
formations : ces filières ne sont pas destinées à
devenir des " poubelles " ou à
" amortir " le
chômage des jeunes et doivent retrouver leur finalité
professionnelle immédiate en " collant " aux besoins des
entreprises qui devraient par ailleurs être associées par la voie
d'un partenariat à la définition des cursus, au contenu des
formations, à leur financement et à leur gestion ; il
conviendrait ainsi d'" ouvrir l'accès des estrades aux praticiens
et les portes des entreprises aux étudiants " ;
- un assouplissement de la sélection pour ces formations courtes ne
pourrait résulter que d'une refonte de la philosophie de notre
système universitaire et qui s'accompagnerait d'une sélection
pour les cycles longs lors de l'entrée à
l'université ;
- pour d'autres, ces filières sont trop sélectives, notamment
pour les bacheliers technologiques et professionnels et la formation
dispensée apparaît trop générale par rapport aux
besoins des entreprises qui auraient besoin de diplômés moins
qualifiés, plus nombreux et plus adaptables : ces filières
devraient donc être adaptées aux bacheliers non
généraux et aux métiers ;
- il conviendrait de mesurer les flux d'accès en BTS et en IUT des
étudiants qui ont effectué préalablement une
première année de premier cycle ;
- un quota de 50 % de bacheliers non généraux devrait
être institué, à l'entrée dans les STS et les IUT,
afin d'éviter les gaspillages financiers résultant du
détournement de ces filières d'insertion par les bacheliers
généraux : ces filières ne doivent plus être
considérées comme des " premiers cycles de luxe " ;
- la sélection est inhérente à la vie et les
étudiants la rencontreront in fine lors de leur embauche : il
convient donc de les y préparer suffisamment tôt ;
- les formations sélectives courtes ne sont pas assez nombreuses et
diversifiées et devraient être actualisées en fonction des
nouveaux besoins des entreprises ;
- leur revalorisation passe par la création d'une filière
universitaire technologique, du baccalauréat jusqu'au diplôme
d'ingénieur, en ouvrant celui-ci aux titulaires de DUT et de BTS ;
- les sections technologiques secondaires (STT et STI) apparaissent pour les
élèves et les familles comme dévalorisées par
rapport aux sections " nobles " (ES, L et S) :
l'orientation des
élèves se fait par élimination.
2. A partir de quelle classe de l'enseignement secondaire, et par qui,
devrait être assurée l'information des élèves en vue
de leur orientation ?
- pour de nombreux intervenants, l'orientation devrait être
développée à partir de la classe de seconde, et
assurée en particulier par des étudiants et les professeurs ainsi
que par des stagiaires d'IUFM ;
- certains prônent une orientation des élèves en deux
étapes : découverte de l'entreprise dès la classe de
3e avec une information dispensée par des " professionnels "
au sein de forums organisés dans les collèges, puis
réflexion sur l'orientation avec les conseillers et les enseignants pour
définir un projet professionnel, sans imposer un choix à
l'élève ;
- pour d'autres, cette orientation devrait intervenir aussi tôt que
possible en mobilisant les compétences de la communauté scolaire,
universitaire et du monde du travail ;
- des brochures générales et plus ciblées,
distribuées par l'éducation nationale et les employeurs
potentiels (entreprises, administrations ...) devraient être mises
à la disposition des lycéens en classe de première ;
- le dispositif des CIO devrait être revu et leurs informations mises
à jour après un recyclage des conseillers ;
- une politique d'orientation implique de mettre en place des passerelles entre
filières courtes et filières longues et ne devrait pas conduire
à désorganiser les premiers cycles généraux au
profit des formations courtes : la poursuite d'études après
le DUT et le BTS devrait rester l'exception ;
- l'orientation vers les filières professionnelles courtes, y compris
vers le " bac pro " s'engage dès l'entrée au
collège et résulte aujourd'hui de multiples motivations,
notamment d'origine familiale : il conviendrait de mettre en place un
système d'information continue pour les élèves, les
parents et les professeurs afin de combattre les préjugés sur
l'enseignement technologique ;
- les enseignants doivent jouer un rôle d'intermédiaire et de
conseil entre les représentants du monde du travail et les
élèves ;
- les chambres de commerce et d'industrie au niveau régional devraient
être associées à l'orientation des collégiens et des
lycéens : les formations devraient être davantage
adaptées à l'emploi local ;
- l'orientation doit permettre d'anticiper les conséquences des choix
des élèves qui devraient disposer d'une palette d'options, de
modules et de séquences dans le cadre du lycée, en collaboration
avec des étudiants déjà engagés dans les
études supérieures.
3. Seriez-vous favorable à une orientation progressive au cours du
premier cycle universitaire et accepteriez-vous une certaine sélection
à l'issue de la première année ?
- pour certains, cette orientation progressive est nécessaire et
permettrait de faciliter le passage des lycéens du secondaire au
supérieur, des passerelles devant être aménagées
entre les disciplines ;
- pour d'autres, l'orientation et le projet professionnel devraient être
définis le plut tôt possible dans les premiers cycles qui doivent
conserver un caractère sélectif compte tenu du taux de
réussite au baccalauréat : une information satisfaisante
dispensée en amont permettrait de rendre les diplômes
opérationnels dès le début de la carrière
professionnelle ;
- le droit à l'erreur et les possibilités de réorientation
ne doivent pas conduire à une dislocation des diplômes nationaux
de premier cycle ;
- l'orientation progressive doit être " dynamique " et
permettre l'acquisition d'une culture générale supérieure
dans une perspective d'études longues : on pourrait ainsi envisager
la transformation des premiers cycles en un " tronc
commun ",
à l'exclusion cependant des filières scientifiques ;
- un dispositif d'orientation progressive ne devrait pas avoir pour objet de
masquer l'échec universitaire des jeunes ;
- l'organisation réformée du DEUG, avec la mise en place de
modules, permet d'ores et déjà de différer l'orientation
des étudiants mais est à l'origine de graves
dérives : les passerelles mises en place tendent à alourdir
les programmes des DEUG au détriment des matières principales et
en privilégiant les matières secondaires ;
- certains préconisent une orientation progressive mais sélective
respectant une application stricte de la règle des trois ans pour les
DEUG littéraires ;
- le contenu des DEUG devrait être modifié pour être plus
adapté aux besoins des entreprises : la formation dispensée
est trop fondamentale et incite les étudiants à s'engager dans le
" cycle infernal " de la poursuite d'études pour obtenir des
diplômes qui sont peu attractifs pour les entreprises ;
- le recours aux stages en entreprise et à la formation en alternance
permettrait de rendre ces formations universitaires plus intéressantes
pour les entreprises, à l'instar des formations dispensées par
les grandes écoles ;
- l'orientation devrait s'appuyer sur la généralisation d'examens
partiels en fin de semestre universitaire ;
- pour certains, il conviendrait de multiplier les passerelles entre
filières plutôt que de mettre en place une orientation
progressive, l'orientation devant se faire en terminale selon un
mécanisme inspiré des classes préparatoires ;
- l'orientation au cours des premiers cycles n'implique pas une modification de
l'organisation actuelle du DEUG : le libre accès en première
année permet aux étudiants de concilier leurs études et
une activité salariée et autorise des réorientations vers
des formules sélectives ou des filières différentes de
celle choisie à l'origine ; l'échec universitaire dans les
premiers cycles doit ainsi être relativisé et ne condamne pas
l'organisation actuelle de notre système universitaire qui doit
conserver la diversité de l'offre de ses formations en assurant un
rôle d'accueil de tous les étudiants et une égalité
des chances pour tous ;
- l'orientation est vouée à l'échec si elle est
imposée autoritairement aux étudiants : une information
satisfaisante et un élargissement de l'offre des filières
professionnalisées constitueraient au contraire autant de facteurs d'une
orientation réussie ;
- une orientation trop spécialisée risque de se traduire par un
développement de qualifications trop pointues qui se
révéleront rapidement obsolètes et inadaptée
notamment à l'évolution de l'emploi régional : les
formations doivent concilier les études générales et les
compétences plus pratiques et faciliter le choix d'un
métier ;
- la mise en place d'unités de valeur à vocation professionnelle
au sein des universités, sanctionnées par un diplôme,
permettrait de définir des " généralistes
reconfigurables " susceptibles de s'adapter, mieux que les
diplômés très spécialisés, à
l'évolution des emplois ;
- l'institution d'un système d'orientation progressive, impliquant un
changement de cursus au cours de l'année universitaire serait
matériellement difficile à généraliser dans toutes
les universités et ne réglerait en rien le problème de
l'échec universitaire en l'absence d'information des
étudiants : il serait préférable de prévoir un
forum d'orientation en début d'année universitaire
présentant les filières, leur contenu, les options et les
débouchés offerts ;
- certaines universités de la région parisienne ont mis en place,
avant l'installation du système Ravel, un dispositif d'accueil des
bacheliers pour examiner leurs choix en concertation avec les enseignants ;
- la sectorisation universitaire résultant du système Ravel, si
elle a permis une meilleure gestion des flux d'étudiants, a
renforcé l'orientation des étudiants vers les filières
sélectives ou vers les formations sans débouchés : il
conviendrait d'assouplir cette sectorisation lorsque les étudiants
présentent un projet cohérent et de prévoir des entretiens
individualisés avec les bacheliers avant leur inscription à
l'université.
*
* *
IV. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 19 ET LE 29 MARS 1996
Poursuivant le dialogue engagé depuis le
21 février 1996 sur le réseau Internet, la mission
d'information a reçu au cours des deux dernières semaines quelque
vingt-cinq nouveaux messages répondant au troisième questionnaire
et à la deuxième synthèse des messages.
Certains messages ont été envoyés par des correspondants
français étudiant ou enseignant dans des universités
étrangères situées notamment aux Etats-Unis, en
Grande-Bretagne et au Japon.
Il convient également de remarquer que la plupart des intervenants ont
exprimé leur accord pour que leurs observations et propositions soient
reproduites en totalité ou partiellement.
I. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU PREMIER QUESTIONNAIRE DU
21 FEVRIER 1996
1. Les causes de l'échec universitaire dans les premiers cycles
- cet échec résulterait d'abord de l'existence d'un
" gouffre entre le lycée et la fac " qui nécessite
un
effort considérable d'adaptation
des nouveaux
étudiants ;
-
le manque de motivation des étudiants
constituerait l'une des
principales causes de l'échec en premier cycle : celui-ci " ne
doit pas devenir un sas de décompression pour étudiants
indécis " et il faudrait au contraire faciliter l'accueil des
étudiants ayant choisi de prendre une année de réflexion
après le bac ;
- le choix d'
une année sabbatique
par les bacheliers renforcerait
leur motivation et leur permettrait d'obtenir le DEUG dans des délais
normaux ;
2. Le système actuel d'information et d'orientation
- certains considèrent que l'information sur l'orientation est
disponible pour les lycéens mais que ceux-ci doivent faire l'effort
d'aller la chercher : il conviendrait de
" responsabiliser " les
élèves sur ce point.
3. Les suggestions pour améliorer le système d'information et
d'orientation
- le
recours à l'expérience des étudiants
n'apparaît pas comme la panacée même s'il peut permettre aux
lycéens de découvrir le monde universitaire : les
étudiants ne sont pas formés à cette tâche et n'ont
qu'une vision de l'université réduite à leur seule
discipline ;
- le
personnel des CIO
devrait recevoir une formation plus large car
l'information dispensée aux lycéens sur les problèmes du
marché de l'emploi et les débouchés des différentes
filières est jugée insuffisante et inadaptée ; un
dialogue devrait s'instaurer, au-delà des seuls tests
d'évaluation, pour affiner les projets des jeunes lycéens qui ont
le sentiment d'être " perdus dans un monde
d'adultes " ;
-
le système éducatif, jugé " exsangue et
sclérosé "
, est remis en cause car il n'a pas
évolué aussi vite que la société
française : si le baccalauréat continue à remplir sa
fonction, le système éducatif ne joue plus son rôle dans la
société ;
- l'animosité des doctorants à l'égard des PRAG
résulterait d'une
hiérarchisation excessive
de
l'enseignement supérieur : pour certains, les professeurs
d'université appartiennent à une " caste à
part " qui se refuse à renoncer à ses prérogatives,
et certains enseignants-chercheurs ne sont pas plus motivés que leurs
étudiants, contribuant ainsi, pour leur part, à l'échec
universitaire ; il serait souhaitable de créer un corps
d'inspection dans l'enseignement supérieur, comme il en existe dans le
second degré ;
- pour d'autres, l'
orientation dès la classe de seconde
n'est pas
souhaitable car nombre d'élèves sont encore indécis en
terminale : recourir aux étudiants et aux stagiaires d'IUFM pour
aider à l'orientation des lycéens apparaît peu
opportun ;
- certains préconisent, au moins pour les filières scientifiques,
le développement d'un
partenariat avec les entreprises
, en
organisant des stages d'entreprise en fin de premier cycle, à l'exemple
des " intern ship " américains.
II. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU DEUXIEME QUESTIONNAIRE DU
6 MARS 1996
1. Les formations supérieures courtes, à finalité
professionnelle, de type IUT et STS, vous paraissent-elles
exagérément sélectives, compte tenu notamment des besoins
des entreprises ?
- certains intervenants considèrent que ces filières sont
très sélectives par rapport aux enseignements universitaires
généralistes mais peu sélectives par rapport aux grandes
écoles : cette sélectivité permet de
développer une dynamique de groupe,
une pédagogie efficace
et de responsabiliser les étudiants ;
- pour d'autres, la
sélectivité est un gage de
réussite
au diplôme, notamment pour les étudiants issus
de familles modestes, et apparaît comme la conséquence du
caractère non sélectif de l'accès aux filières
longues : si la sélection était
généralisée à l'ensemble des filières,
l'orientation des étudiants s'effectuerait de manière plus
logique et harmonieuse ;
- les DUT et les BTS sont de plus en plus perçus comme une étape
permettant de préparer ultérieurement divers concours, à
l'aide de passerelles, tout en garantissant aux étudiants un
diplôme valorisé
sur le marché de l'emploi,
contrairement aux classes préparatoires et aux DEUG ;
- certains messages soulignent cependant que tous les titulaires de DUT ou de
BTS n'ont pas la possibilité de s'engager dans des études longues
et qu'un déphasage se crée entre le nombre de
diplômés et les besoins des entreprises : il conviendrait de
réévaluer la sélection à l'entrée des IUT
et des BTS
pour tenir compte des réorientations ultérieures
de leurs élèves ;
- d'autres s'interrogent sur la
finalité professionnelle
réelle
de ces formations, et observent que de nombreux
étudiants de BTS ou d'IUT tentent d'intégrer des écoles
d'ingénieur ou des seconds cycles universitaires : ces formations
sont plutôt considérées comme des " super premiers
cycles ".
2. A partir de quelle classe de l'enseignement secondaire, et par qui
devrait être assurée l'information des élèves en vue
de leur orientation ?
- certains préconisent une information sur l'orientation s'inscrivant
dans la politique générale documentaire de l'établissement
(bibliothèque, nouvelles technologies) et qui serait
proposée
à tous les élèves dès la classe de 6e
, avec une
participation active des parents d'élèves, et soulignent la
nécessité d'une
prise de conscience des
élèves
aussi précoce que possible quant à leur
orientation future ;
- d'autres soulignent la nécessité de développer les
moyens des conseillers d'orientation
dans chaque établissement
(local, documentation ...) et d'informer les élèves dès le
collège, notamment afin de
valoriser les filières
techniques
trop délaissées en raison de
préjugés existants ;
- dans le même sens, certains préconisent, en classes de 5e, de 3e
et de seconde, des réunions animées par des
élèves de filières professionnelles
et auxquelles
les parents seraient conviés, ainsi que des journées de rencontre
organisées avec des
étudiants
engagés dans diverses
filières supérieures qui feraient part aux lycéens de leur
expérience : les conseils des aînés et le
" bouche à oreille " entre étudiants semblent jouer, en
matière d'orientation, un rôle plus important que les services
d'orientation qui fourniraient des réponses trop générales
ou ignorant l'évolution future des métiers.
3. Seriez-vous favorable à une orientation progressive au cours du
premier cycle universitaire ?
- certains considèrent que la présentation d'un
cursus
disciplinaire précis et diversifié
permettrait aux nouveaux
étudiants de ne pas perdre leur temps et de conserver leur
motivation ;
- d'autres sont plutôt favorables à des
réorientations
précoces
vers les études courtes pour les étudiants
peu motivés, ou à une véritable
orientation
préalable
à l'entrée à l'université pour
éviter à certains de s'engager sans conviction dans des
filières apparemment " porteuses " en matière
d'emploi ;
- certains s'interrogent sur le
contenu d'une orientation
progressive
: simples conseils ou aiguillage impératif vers
telle ou telle filière ? ;
- d'autres se refusent à " enfermer les gens dans un
carcan "
et sont favorables à une
orientation progressive
et à la
mise en place de passerelles dans l'ensemble des cycles universitaires ;
- certains rappellent que le
système modulaire
fonctionnant
actuellement dans les DEUG ne fait que " maquiller " les
filières préexistantes, notamment en sciences, et que les
étudiants, y compris les meilleurs, jugent les
filières
abstraites et fondamentales
sans intérêt : pour les
disciplines scientifiques (notamment les sciences de la vie), il devrait
être rappelé aux bacheliers que ces formations conduisent à
la recherche et offrent peu d'échappatoires.
III. LES REPONSES AU QUESTIONNAIRE DU 21 MARS 1996
1. Quelles seraient vos
propositions pour réduire l'échec
universitaire dans les premiers cycles généraux ?
- selon certains, l'échec universitaire résulte de
problèmes d'
orientation
des étudiants, d'une
sélection déguisée
ou de
formations
inadaptées
car personne ne peut considérer que
" 60 % des gens sont nuls " ;
- le système universitaire américain autorise notamment, avec un
large système d'options, une orientation très précoce, une
réorientation au cours du cursus et se caractérise par sa
souplesse
; il requiert cependant une grande
motivation des
étudiants
, dont la culture moyenne est particulièrement
faible, et favorise les 10 % de l'élite intellectuelle et
culturelle en démotivant les autres ;
- à la souplesse du système américain, certains opposent
la
rigidité du système français
qui comporte peu
d'options et un nombre d'heures de cours très supérieur :
l'orientation des élèves est plus facile aux Etats-Unis du fait
que la high school fonctionne comme une mini université ;
- il conviendrait de rechercher en France une "
intégration
lycée-université
" en permettant aux lycéens de
capitaliser des " crédits " universitaires et en
transformant
la terminale en année pré-universitaire ; celle-ci serait
constituée de modules
généraux
préparant au
baccalauréat ou
spécialisés
donnant droit à
des crédits validables avant l'entrée à
l'université : ces modules seraient encadrés par des
agrégés et permettraient aux étudiants de s'orienter
après avoir été informés du contenu des disciplines
universitaires ;
- certains regrettent le
manque d'encadrement
, notamment
matériel, des étudiants français, qui est pour partie
à l'origine de l'abandon d'études en premier cycle, rappellent
que les universités américaines sont coûteuses et
suggèrent une augmentation des
droits d'inscription
:
l'actuel système de financement est à l'origine du manque
d'enseignants et de matériels et condamne de trop nombreux
étudiants à l'échec. Il conviendrait donc de faire payer
ceux qui le peuvent (les plus nombreux) et d'aider les plus
démunis ;
- le meilleur investissement en matière d'éducation consisterait
d'abord à
améliorer les conditions matérielles
des
étudiants, à augmenter le nombre des ordinateurs mis à
leur disposition, et les aides directes (bourses) et indirectes (recrutement
d'étudiants pour l'enseignement des TD) ;
- l'idée d'une
coopération école-entreprises
permettrait une meilleure intégration économique et
professionnelle des étudiants, mais ne devrait pas porter atteinte au
rôle fondamental joué par l'université dans l'acquisition
du savoir et l'apprentissage de la responsabilité de citoyens ;
- les employeurs américains recrutent d'abord des jeunes très
motivés, montrant leurs capacités à
bénéficier d'une formation, alors que les employeurs
français recherchent plutôt des
diplômés
immédiatement utilisables
;
- tout système éducatif suppose un certain taux d'échec.
L'objectif des 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat a eu
des effets néfastes et certains estiment que " la plupart des
nouveaux étudiants ne savent pas pourquoi ils sont en fac " :
la réponse à cette question devrait être apportée
par le lycée afin de
renforcer la motivation des étudiants
dans le respect de leur autonomie ;
- un meilleur
encadrement
des étudiants (avec des TD
réduits à 20 étudiants au lieu de 60) permettrait de
réduire le taux de l'échec universitaire : cependant les
concours du CAPES et de l'agrégation ne correspondent pas aux besoins
d'encadrement des étudiants et leurs programmes devraient être
aménagés, notamment pour réduire la masse de connaissances
théoriques exigées ;
- selon un autre intervenant (en stage d'ingénieur au Japon), il
conviendrait de sensibiliser les élèves de lycée au
contenu des études supérieures, de réorganiser
l'année universitaire en augmentant le nombre de semaines
consacrées à la préparation des examens partiels et
terminaux : selon lui les
lacunes
des étudiants et le
taux d'échec constaté
ne proviennent pas d'un
encadrement insuffisant
puisque même une " participation
passive " aux TD permet de réussir le DEUG, mais de " la
paresse et du manque de motivation " de certains étudiants ;
- une
présence
obligatoire
aux cours et aux TD
permettrait, pour certains, de réduire de moitié l'échec
universitaire ;
- l'idée que la
démotivation des étudiants
constitue la principale cause d'échec dans le premier cycle, est
partagée par d'autres intervenants : la participation facultative
au cours des nouveaux étudiants tend à transformer la
première année universitaire en " année
sabbatique ", y compris dans les IUT où leur présence est
pourtant contrôlée. Il conviendrait ainsi, non pas d'imposer des
règles plus strictes aux étudiants à l'université
mais de les responsabiliser dès le lycée ;
- de trop nombreux jeunes s'engagent dans plusieurs filières sans aller
à leur terme et
perdent leur temps
en premier cycle : il
conviendrait de mettre fin à l'hypocrisie d'un système qui se dit
ouvert à tous mais qui pratique une sélection rigoureuse en
deuxième année ;
- certains préconisent l'institution d'une
année post-bac
très généraliste
, commune aux littéraires et
aux scientifiques, et débouchant sur une sélection dans les
disciplines choisies en fonction des capacités des
étudiants ;
- d'autres suggèrent d'organiser des
périodes et des lieux
d'accueil
afin de réduire l'anonymat des étudiants et de les
aider à construire un projet d'études, notamment en
renforçant les services universitaires d'information et d'orientation
qui travaillent depuis dix ans dans l'urgence et la précarité
alors que les effectifs étudiants ont doublé : deux ou trois
conseillers sont ainsi en charge de 20 à 30.000 étudiants ;
- certains considèrent qu'une sélection dans les premiers cycles
serait inopportune et qu'il convient de
laisser une chance
, même
réduite, à tous les bacheliers : l'allégement du
" programme énorme de la première année " et
l'apprentissage de méthodes de travail différentes de celles du
lycée devraient précéder l'acquisition des connaissances
et des théories dans chaque discipline ;
- d'autres remarquent que les bacheliers scientifiques échouent
également massivement dans les DEUG scientifiques et que les
matières enseignées sont trop abstraites
: il est
ainsi proposé de " durcir " le degré d'abstraction des
programmes de la série scientifique au lycée, ce qui paraît
irréaliste, ou d'instituer un DEUG de sciences
différencié, l'un portant sur une formation
générale et appliquée, l'autre sur une formation plus
théorique. Cette dernière option serait réservée
aux quelque 15 % d'étudiants aptes à suivre des
enseignements théoriques ;
- le nombre limité de places en 2e cycle commande une sélection
drastique et induit un
échec important en 1er cycle
qui pourrait
être réduit soit en augmentant les capacités d'accueil des
seconds cycles spécialisés (ce qui déplacerait le
problème sans le régler), soit en élargissant ces seconds
cycles et en autorisant des réorientations entre filières et vers
les IUP ; la réduction du nombre d'étudiants en premier
cycle apparaît en revanche irréaliste ;
- certains préconisent en revanche une
sélection
après le baccalauréat, sur dossier ou par voie de concours, et
proposent que la
présence aux cours
soit obligatoire ;
- d'autres souhaitent que des
innovations pédagogiques
permettent
d'assurer un suivi très poussé pour les étudiants en
difficulté et des cours de soutien adaptés ;
- certains
réfutent la notion d'échec universitaire
et
rappellent que l'université, outre l'obtention d'un diplôme, doit
permettre d'accéder à l'éducation et à la culture
et doit dispenser un " apprentissage réel de la démocratie
et de la société qui n'a pas d'équivalent
ailleurs " : le système universitaire tend à
responsabiliser les étudiants et l'échec permet à chacun
de prendre conscience de ses possibilités avant d'aborder une " vie
moderne dure et sélective " ;
- d'autres
relativisent également la notion d'échec
qui
est entendue du seul point de vue quantitatif : cette notion ne prend pas
en compte les "
plus-values
humaines, culturelles et
relationnelles " accumulées par les étudiants, certes non
diplômés, mais qui sont loin d'avoir complètement perdu
leur temps ; ces " dépenses sociales " ne devraient pas
être assimilées à un " gaspillage
financier " ;
- afin de réduire l'échec universitaire, il conviendrait
d'encourager la
pluridisciplinarité
, dans les options offertes et
les équipes enseignantes, afin de faciliter les changements
d'orientation " en douceur ", de conserver une taille
" humaine " aux établissements, et de développer
l'enseignement à distance
dans un grand nombre de
disciplines ;
- une
multiplication des passerelles
est souhaitée entre les
filières et les disciplines, ainsi que des formations
intermédiaires de transition, car il est difficile de demander à
un jeune de 18 ans de s'engager définitivement dans un type
d'études : les possibilités de réorientation doivent
être développées, notamment par une réorganisation
des modules qui permettrait de construire un profil d'études plus
personnalisé ;
- la réduction de l'échec universitaire passe par une
information des futurs bacheliers
sur les filières
(journées consacrées à l'information sur le contenu des
enseignements, sur les difficultés de la filière envisagée
et sur le devenir des anciens étudiants).
2. Seriez-vous favorable à une implication plus importante des
régions et des milieux économiques dans la définition des
formations supérieures, notamment pour les premiers cycles ?
- de nombreux intervenants y sont
favorables
, mais souhaiteraient que le
système universitaire puisse attribuer, à l'instar des grandes
écoles, des
diplômes d'ingénieurs
;
- d'autres sont plus réservés et soulignent que les
entreprises n'ont qu'une idée vague de la dimension
pédagogique
des formations : un tel rapprochement permettrait
cependant aux universitaires de prendre conscience que leur enseignement doit
s'insérer dans une logique utilitaire, et aux étudiants
d'utiliser leur formation avec un temps d'adaptation minimum ;
- en contrepartie, les entreprises devraient accepter de recourir aux
diplômés dépourvus d'expérience
professionnelle : la généralisation des
stages en
alternance
permettrait de concilier les exigences de la formation
générale et de l'expérience en entreprise ;
- certains considèrent que les
premiers cycles
doivent rester
consacrés aux " enseignement généraux ", mais
admettent l'implication des entreprises et des régions pour les
formations à finalité professionnelle, les cycles universitaires
secondaires et tertiaires ainsi que pour les grandes écoles ;
- d'autres soulignent le rôle parfois trop important joué par les
entreprises et les collectivités dans la définition des
formations des IUT, mais admettent que
l'entreprise doit trouver sa place
à l'université
pour faciliter l'intégration des
étudiants dans la vie active, en organisant notamment des rencontres
avec les employeurs et les salariés ;
- pour certains, "
le milieu universitaire actuel est
endogamique
" et l'intervention des milieux économiques
régionaux dans la définition des formations supérieures
est souhaitable, tout en devant rester limitée dans les cycles
d'approfondissement et à la condition que cette intervention ne
constitue pas un obstacle à la nécessaire mobilité
géographique des étudiants ;
- d'autres rappellent que le
contenu des DEUG
est variable, pour une
même spécialisation, dans une même région, ce qui est
source de rigidité en cas de changement d'université lors du
passage des étudiants en licence ;
- certains estiment que la
finalité d'une formation
est
d'être adaptée aux emplois proposés, "sinon les
études ne servent à rien " ;
- les milieux économiques interviennent déjà largement
(DESS, stages ...) dans la finalisation des cursus universitaires mais certains
intervenants s'interrogent sur la
vocation des régions
à
intervenir dans la pédagogie et la définition des
programmes ;
- pour d'autres, cette implication permettrait aux étudiants de mieux
connaître leur région, en la situant dans son contexte
économique européen et international et d'accroître leur
motivation : la
réduction du nombre des antennes
universitaires irait à l'encontre de ce but ;
- les filières des IUT devraient être mieux adaptées aux
besoins économiques des régions, mais l'intervention de ces
dernières ne devrait
pas conduire à la disparition de
filières universitaires
qui ne seraient d'aucune
" utilité pour l'économie régionale : certains
soulignent les risques d'une
régionalisation des diplômes
supérieurs qui contribuerait à aggraver encore la situation
des étudiants.
3. Quelles sont, selon vous, les principales finalités de
l'enseignement supérieur, et notre système universitaire vous
semble-t-il adapté à ces finalités ?
- pour la plupart des intervenants,
la finalité de l'enseignement
supérieur est double
, l'obtention d'un diplôme et/ou d'une
formation permettant de s'insérer dans le " tissu
socio-économique " (professions libérales, fonctionnaires,
ingénieurs...) mais n'est que partiellement assurée du fait d'une
professionnalisation insuffisante
des formations ;
- pour d'autres, la principale finalité de l'université est de
permettre aux jeunes qui n'empruntent pas les voies sélectives,
d'obtenir une
formation pratiquement équivalente à celle
dispensée dans les écoles d'ingénieurs
, et de
diversifier l'origine des cadres de la société française
en offrant aux étudiants une formation plus générale ;
- l'université a aussi pour fonction de
renouveler les
" têtes pensantes
"
de la France, notamment dans
le
domaine de la recherche et doit être considérée comme un
" lieu de maturation " pour les jeunes, où se développe
leur " pensée logique et politique " : elle
apparaît comme un " microcosme " qui doit être ouvert au
monde extérieur afin " d'apprendre de lui mais aussi de lui
enseigner ". Son évolution est nécessaire pour que notre
pays continue à jouer son rôle de puissance mondiale ;
- certains préconisent, au lieu d'une remise en question du
système universitaire, une
transformation du système
éducatif dans son ensemble
, qui n'a pas évolué aussi
rapidement que notre société, du fait de son gigantisme, de son
inertie et de son caractère corporatiste ;
- d'autres rappellent que l'université a une finalité
théorique et pratique et estiment que
l'enseignement
théorique
(au contraire du Japon) occupe une
place beaucoup trop
importante
et ne permet pas aux étudiants d'utiliser leurs
connaissances. A la différence des élèves des grandes
écoles, les étudiants ont une formation qui les prédispose
à la recherche mais ne les prépare pas du tout au monde du
travail et à l'entreprise :
- pour certains,
l'université ne forme pas à la
citoyenneté
et n'assure pas son rôle d'intégration de
tous les milieux socio-économiques ;
- selon certains, "
l'université tend principalement à
s'auto-reproduire
" et ses programmes sont adaptés à ses
finalités et non pas à celles de ses étudiants : il
est proposé (pour les études de sciences) de considérer le
2e cycle du secondaire comme un cycle des
apprentissages premiers
, les
trois premières années universitaires comme un cycle des
apprentissages fondamentaux
, tandis que les deux années
supplémentaires constitueraient un cycle des
approfondissements
qui devrait également comporter des modules à finalité
économique ;
- d'autres rappellent plus classiquement que l'université a pour
vocation de former des professeurs de l'enseignement secondaire et
supérieur, ainsi que des personnels de recherche :
l'actuelle
organisation en études courtes et longues ne permet pas aux
bac + 4 de postuler à un poste précis
et à
ceux qui échouent après une licence ou une maîtrise de
posséder un diplôme valorisé pour une embauche en
entreprise. La création d'enseignements de
" professionnalisation " de second cycle permettrait de
remédier à cette situation ;
- sur un plan plus général, le système universitaire, dont
les formations ne répondent pas aux attentes des entreprises
, ne
favorise pas la recherche d'un emploi ;
- certains estiment que l'université assure correctement son rôle
traditionnel qui est de dispenser l'éducation et la culture, et qu'elle
s'adapte rapidement aux formations professionnalisantes : en revanche,
sa vocation qui est aussi de former des enseignants-chercheurs
est
aujourd'hui très menacée ;
- d'autres considèrent que la
vocation de l'université est
triple
: permettre au plus grand nombre d'acquérir des
connaissances générales et spécialisées permettant
de s'intégrer dans la communauté nationale et internationale,
assurer le développement économique du pays et des régions
en dispensant des formations adaptées aux besoins présents et
à venir de la population et de l'économie, produire des cadres
moyens et supérieurs compétitifs au plan international ; si
le système français semble répondre aujourd'hui à
ces finalités, notamment par rapport à l'Allemagne, au
Royaume-Uni et aux Etats-Unis, l'université devra cependant s'adapter
aux besoins d'un monde en évolution rapide ;
- pour certains, les études traditionnelles motivées par le seul
goût du savoir sont aujourd'hui dépassées et doivent se
doubler d'une
finalité professionnelle
: il convient de
distinguer l'université des filières sélectives qui
dispensent des formations à visées professionnelles en soulignant
que les formations les plus théoriques, et orientées vers la
recherche, sont paradoxalement les moins sélectives ;
l'enseignement supérieur devrait pouvoir offrir d'une part, une
formation professionnalisée moins sélective, raisonnablement
humaniste et généraliste pour permettre l'adaptation future des
salariés, et d'autre part, maintenir une formation traditionnelle plus
théorique ;
- l'université ne doit pas privilégier à n'importe quel
prix
l'adaptation aux besoins économiques
: la grandeur
d'une nation se mesure autant à sa recherche fondamentale, qui commande
l'avenir, qu'à son économie.
IV. LES REACTIONS SUSCITEES PAR LA SYNTHESE DES MESSAGES EFFECTUEE PAR LA
MISSION D'INFORMATION
-
un correspondant s'est interrogé sur la
portée de la
consultation
engagée par le Sénat sur le réseau
Internet en soulignant le caractère peu représentatif des
réponses, qui font notamment apparaître les PRAG comme des
" boucs-émissaires " du système universitaire et s'est
inquiété des risques de " manipulation " qui pourraient
résulter des réponses de certains groupes de pression ;
- un responsable de centre d'accueil d'information et d'orientation
universitaire a insisté sur la
qualité de l'information
donnée aux étudiants
pour leur orientation, d'abord avant
leur entrée à l'université (salons d'information,
journées portes ouvertes, présentation des filières par
des enseignants au moment des inscriptions) puis tout au long de leur cursus
(information sur les filières et les entreprises).
La mission d'information tient à rappeler que cette consultation par
Internet ne saurait avoir valeur de sondage représentatif et que la
synthèse des réponses transmise sur le réseau n'exprime
pas son opinion mais s'efforce de résumer les principaux messages des
intervenants.
*
* *
V. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE RÉSEAU INTERNET, PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 31 MARS ET LE 13 AVRIL 1996
Au cours de cette période, la mission d'information a
reçu vingt-cinq nouveaux messages.
Elle tient à nouveau à remercier l'ensemble de ses correspondants
pour le sérieux et la qualité de leurs observations et à
souligner l'assiduité de bon nombre d'entre-eux.
Certains correspondants proposent en particulier de communiquer à la
mission la teneur des travaux qu'ils ont consacrés, individuellement ou
collectivement, aux problèmes des premiers cycles universitaires.
Il convient encore de rappeler, en réponse notamment à certains
intervenants, que la synthèse effectuée par la mission ne
reflète nullement la position de ses membres, mais s'efforce seulement
de rapporter l'essentiel des messages recueillis au cours de la consultation
qui ne saurait par ailleurs avoir valeur de sondage représentatif.
I - LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 21 MARS
1996
1. Quelles seraient vos propositions pour réduire l'échec
universitaire dans les premiers cycles généraux ?
- certains préconisent d'abord une
revalorisation des
" formations alternatives "
à celles conduisant au
baccalauréat et le développement de formations qualifiantes
secondaires débouchant directement sur un emploi ;
- d'autres déplorent que les meilleurs lycéens se dirigent vers
les IUT avant d'entreprendre des études longues et suggèrent que
des
" études courtes et pratiques "
, mieux
encadrées soient offertes aux élèves moyens ;
- afin de remédier aux insuffisances du système d'orientation
dans les lycées, il est proposé de créer un
grand
serveur
rassemblant toutes les informations disponibles et d'instituer des
entretiens individualisés
pour les élèves (avec les
professeurs et les conseillers d'orientation-psychologues) afin de les aider
à déterminer leur projet professionnel ;
- certains soulignent
le coût
des inscriptions et des
déplacements nécessités pour passer les concours en vue
d'une
réorientation
et considèrent que l'université
est déjà très sélective au plan financier ;
- une
meilleure information des lycéens
est jugée de
nature à réduire le nombre d'étudiants " en
stationnement " et aiderait à définir l'objectif, la
stratégie d'études et à renforcer la motivation des
étudiants de premier cycle ;
- certains préconisent une réforme complète du
système d'enseignement supérieur français et notamment une
augmentation du nombre des
places offertes dans les filières
courtes
;
- d'autres considèrent que la
notion d'échec universitaire
doit être explicitée : celui-ci résulte d'abord d'une
mauvaise orientation initiale (les résultats des examens partiels et de
l'examen final coïncident le plus souvent) qui devrait être
corrigée par une information des lycéens privilégiant le
fonctionnement de l'université, les méthodes d'enseignement et
les débouchés des filières ;
- certains soulignent les
lacunes des lycéens
, moins en termes de
connaissances que de méthodes : les connaissances ne sont souvent
pas mises en perspectives et les élèves répugnent à
l'abstraction, notamment en mathématiques et en physique ;
- ils préconisent aussi de relever le niveau scolaire au lycée en
privilégiant " l'assimilation de méthodes et la
compréhension des techniques utilisées " ; les
enseignants des lycées
devraient jouer un rôle essentiel
dans l'information et l'orientation des élèves, et être
encouragés à le faire en assistant à des séminaires
d'information qui seraient consacrés au contenu des formations
supérieures, à leurs débouchés, aux pratiques
pédagogiques de chaque filière, les initiatives personnelles de
ces enseignants devant être développées ;
- les
universitaires
qui choisissent de participer à la mise en
place de projets pédagogiques ou à l'animation d'équipes
d'enseignants de premier cycle, ne devraient pas être
pénalisés dans leur
carrière
, ce qui impliquerait
un véritable changement des mentalités universitaires ;
2. Seriez-vous favorable à une implication plus importante des
régions et des milieux économiques dans la définition des
formations supérieures, notamment pour les premiers cycles ?
- certains y sont opposés et rappellent la
vocation
propédeutique
du premier cycle qui permet aux étudiants
d'acquérir une culture générale dans le cadre de leur
spécialité ;
- d'autres s'interrogent sur l'intérêt d'une
régionalisation des premiers cycles et évoquent le risque d'un
favoritisme local
, les entreprises locales ne se bousculant pas, par
ailleurs, pour proposer des stages aux étudiants ;
- certains considèrent en revanche que l'implication des secteurs
industriels est " incontournable " et que celle des régions
pourrait apporter une " plus-value " aux formations de
premier
cycle : celles-ci fournissent en effet la matière
" intellectuelle et pratique " aux entreprises et ces
formations
devraient pouvoir être
utilisables dès la sortie du
système éducatif
;
- s'agissant de la relation université-monde du travail, il est
préconisé pour chaque étudiant, un
passage d'un an en
entreprise
, sous la forme d'un véritable contrat à
durée déterminée, qui serait pris en compte dans le cursus
des études : toutefois l'université ne doit pas avoir une
" attitude clientéliste " vis-à-vis de l'entreprise et
n'a pas à fournir des " produits achevés et finis "
mais doit permettre à ses étudiants d'acquérir une
certaine expérience du monde du travail ;
3. Quels sont, selon vous, les principales finalités de
l'enseignement supérieur, et notre système universitaire vous
semble-t-il adapté à ces finalités ?
- la culture générale dispensée dans les premiers cycles
ne saurait être sacrifiée, pour certains, au profit
immédiat des régions ou des entreprises et doit permettre au
contraire une adaptation du salarié à tout changement
ultérieur de carrière : les études universitaires
doivent apporter une
culture générale
et
spécialisée
, afin de faciliter la recherche d'un emploi, et
permettre aux étudiants d'apprendre à réfléchir
plutôt qu'à amasser des connaissances ;
- certains préconisent un système sélectif fondé
sur des
critères appropriés
privilégiant la logique
et l'analyse plutôt que la mémoire et le conformisme ;
- d'autres rappellent que l'intégration dans la société se
réalise d'abord par le travail et estiment que la première
finalité de l'enseignement supérieur est d'
intégrer les
jeunes dans la société
, chacun à son niveau :
à cet égard, des efforts sont engagés dans certaines
universités pour réduire l'échec universitaire, notamment
en " rattrapant " les étudiants au cours du premier
semestre,
ce qui nécessite une motivation importante des intéressés,
compte tenu des effectifs dans les premiers cycles ;
- il est également rappelé que l'
université est
à l'origine de la richesse intellectuelle de demain et des emplois
d'après-demain
, et que celle-ci continue à jouer ce
rôle malgré les insuffisances qui peuvent lui être
reprochées ;
- certains soulignent que l'acquisition par les étudiants de
méthodes de raisonnement
et l'acquisition de
compétences opérationnelles
sont
complémentaires ; l'enseignement supérieur doit aussi
répondre aux "
attentes sociales
" des jeunes qui
accèdent à l'âge adulte et initier son public à la
pratique démocratique, notamment par une plus grande implication des
étudiants dans le fonctionnement des établissements ;
- la conciliation des deux finalités de l'université (acquisition
de méthodes et de connaissances) suppose l'existence d'
équipes
pédagogiques
diversifiées
mobilisant toutes les
catégories d'enseignants, une nouvelle évaluation de ces
personnels privilégiant, davantage que leur activité de
recherche, leur mission de formation d'un public étudiant
diversifié aux attentes les plus diverses : à cet
égard le recours massif aux PRAG proposé dans le plan d'urgence
de l'automne dernier, suscite chez certains des inquiétudes et ne
permettrait pas de diversifier de manière satisfaisante les fonctions
d'enseignant ;
- la faible
participation des étudiants
au fonctionnement des
établissements est également soulignée : les
associations d'étudiants, notamment des doctorants, devraient jouer un
rôle majeur en ce domaine et les étudiants eux-mêmes
devraient participer à l'évaluation des enseignements ;
- la finalité de l'enseignement supérieur n'est pas de
" reproduire à l'infini des enseignants-chercheurs " sans
prise directe avec la réalité du monde du travail :
l'université doit s'ouvrir sur l'extérieur
, en organisant
des stages en entreprises dès le premier cycle et mettre en place un
véritable contrôle de gestion.
II. LES REPONSES AU QUESTIONNAIRE DU 4 AVRIL 1996
1. Afin de réduire l'échec universitaire et une
" sélection-exclusion " de fait très importante dans
les premiers cycles, seriez-vous favorable à une orientation plus
sélective dans les diverses filières supérieures, voire
à des quotas par spécialités, le principe du libre
accès à l'université pour l'ensemble des bacheliers
restant inchangé ?
- plusieurs intervenants considèrent qu'une
orientation plus
sélective
des étudiants constituerait un bon moyen pour
réduire l'échec universitaire mais préconisent une
diversification
et une augmentation des
capacités
d'accueil
des différentes filières afin d'éviter une
sélection-exclusion
en fin de premier cycle et une
officialisation de la sélection ;
- certains rappellent que des
quotas par spécialité
existent déjà dans les filières
spécialisées : une orientation sélective et un
système de quotas nécessiterait en tout état de cause une
multiplication des
passerelles
entre les filières et une
augmentation considérable des capacités d'accueil, sauf à
limiter le libre accès de l'université à l'ensemble des
bacheliers ;
- d'autres soulignent la nécessité de choisir avec soin les
critères d'orientation
et les "
orienteurs
",
et
estiment que l'orientation devrait intervenir aussi tôt que possible dans
le déroulement des études supérieures ;
- certains dénoncent les
pratiques sélectives
illégales
de certaines universités (mentions au bac) mais ne
seraient pas hostiles à une augmentation éventuelle des
droits
de scolarité
qui serait assortie de prêts à taux
zéro accordés aux étudiants ;
- d'autres considèrent que le
baccalauréat
doit rester le
seul critère de sélection pour accéder à
l'université, et opposent aux concours les examens à valeur
nationale qui consacrent le niveau des connaissances des candidats ;
- certains constatent qu'une
sélection officieuse
existe
déjà à l'entrée en premier cycle et qu'il serait
inutile de l'officialiser ;
- pour d'autres, la sélection se fait à l'entrée des
grandes écoles mais aussi à l'université, et sur le
marché de l'emploi et s'effectue en fonction des résultats
d'examen qui sont largement dépendants de la
motivation des
étudiants
: l'institution éventuelle de quotas par
spécialités suscite par ailleurs des interrogations, notamment
sur leur fondement ;
- le choix des filières résulte de phénomènes de
mode, de réorientation après un échec, et du
caractère jugé porteur de certaines formations en matière
d'emploi : des quotas par spécialités ne pourraient
être fondés que sur la réelle motivation des bacheliers
à s'engager dans telle ou telle filière ;
- certains s'interrogent sur le
caractère sélectif du
baccalauréat
et sur son utilité : l'institution de quotas
conduirait à recréer un " antagonisme stupide grandes
écoles-université " à l'intérieur des
établissements mais le principe de l'ouverture de l'université se
traduit en fait par un libre accès aux filières les plus
médiocres ; certains préconisent ainsi de rétablir la
fonction du bac qui est de sélectionner les étudiants aptes
à poursuivre des études supérieures ;
- d'autres s'interrogent sur l'intérêt d'une orientation plus
sélective et sur les critères de sélection qui pourraient
être retenus : constatant cependant que les premiers cycles sont
devenus des " fourre-tout " pour bacheliers, ils proposent
une
organisation en quatre semestres
, le premier, de caractère
général, permettant aux nouveaux étudiants de
découvrir l'université et les trois autres leur permettant de se
spécialiser et de se réorienter au moyen de passerelles ;
l'institution d'un DEUG " à la carte ", jugé trop
souple, n'est cependant pas souhaitée ;
- pour certains, l'orientation devrait tenir compte de la
formation
antérieure
acquise au lycée, d'un contrôle des
connaissances, des motivations et des capacités des nouveaux
étudiants afin de leur éviter des choix dictés par le seul
hasard : si le libre accès des bacheliers à
l'université doit être conservé, il devrait être
" plus contrôlé ", en définissant des
critères d'admission à certaines filières, la mise en
place de quotas pouvant être envisagée ;
- une orientation plus sélective est souhaitée mais certains
s'interrogent sur les possibilités de sa mise en oeuvre et
suggèrent l'institution d'un
délai de réflexion
obligatoire
d'un an entre le baccalauréat et la première
inscription à l'université ;
- d'autres sont attachés au
maintien du libre accès à
l'université
pour les bacheliers d'enseignement
général, à l'exclusion de tout quota par
spécialités mais proposent une orientation véritable,
progressive et plus sélective pour le choix de certaines
filières : l'uniformisation du
baccalauréat
scientifique
impliquerait une orientation en première année,
avec un tronc commun scientifique étendu, suivi d'un examen
éventuel, en fonction des capacités des étudiants, et d'un
enseignement modulaire de plus en plus sélectif permettant
d'accéder ensuite aux filières de deuxième cycle ;
- certains préconisent un
premier cycle en trois ans
afin que
l'orientation-information soit réellement progressive et efficace,
soulignant que les bacheliers ne sont souvent pas préparés aux
méthodes de travail universitaires et considérant que les modules
ne devraient prendre effet qu'à l'issue d'une année
complète d'enseignement supérieur.
2. Quelles seraient vos propositions pour diversifier l'offre des
filières de premier cycle offertes aux bacheliers ? Seriez-vous
favorable à la création d'une filière technologique courte
non sélective à finalité professionnelle directe ?
- certaines réponses soulignent l'intérêt de
filières professionnalisées
qui seraient ouvertes
dès la première année, permettant la poursuite de
cursus longs
et rappellent que les filières
générales sont inégalement réparties selon les
universités, notamment en sciences ;
- la création d'une
filière technologique courte non
sélective
est souhaitée par certains, à condition que
ses étudiants aient la possibilité de
reprendre des
études longues
: la diversification des filières est
souhaitable si celle-ci ne se traduit pas par un isolement des
étudiants ;
- d'autres préconisent une
diversification des cours
plutôt
que des filières existantes afin de permettre aux étudiants de
composer leur propre programme et d'acquérir une " formation
globale " et considèrent par ailleurs que le système
existant des formations de type DUT et STS est très satisfaisant ;
- certains suggèrent d'améliorer le système existant en
dédoublant les filières
afin d'assurer un encadrement plus
satisfaisant des étudiants et seraient favorables à une plus
grande ouverture des STS et des IUT pour conserver la vocation des DEUG qui est
d'accueillir les étudiants se destinant à des études
longues ;
- d'autres préconisent un
prolongement des filières à
finalité professionnelle
directe.
- certains considèrent que l'offre des filières de premier cycle
est suffisante et expriment leur méfiance à l'égard de
" mini-filières " très spécialisées qui
ne seraient que des
voies de garage
soumises à des
phénomènes de mode ;
- les formations à finalité professionnelle doivent surtout
répondre aux
besoins des entreprises
et y être
adaptées aussi bien au niveau des équipes enseignantes que par le
développement de stages : les entreprises devraient ainsi jouer un
rôle-clé dans la définition des programmes et les
structures d'enseignement devraient pouvoir s'adapter rapidement aux
évolutions du marché de l'emploi, des quotas pouvant par ailleurs
être envisagés dans ces filières
professionnalisées ;
- d'autres estiment qu'une
diversification des filières
ne
pourrait être que
progressive,
le DEUG devant rester un
diplôme général ; en outre, la mise en place
éventuelle de filières technologiques courtes (qui existent
déjà avec le " bac pro "), même si elle est
souhaitable, risquerait de
dévaloriser certains diplômes
et
passerait nécessairement par une redéfinition complète des
formations existantes, notamment les BTS et les DUT ;
- dans le même sens, certains considèrent que la création
d'une filière technologique courte pour ceux qui n'ont pas
été pris en IUT et en STS serait concevable, à condition
qu'il ne s'agisse pas d'une " filière-poubelle " et qu'elle
n'autorise que des poursuites d'études limitées, et seulement
dans des filières technologiques ; il est par ailleurs
proposé de mettre en place des
filières technologiques plus
longues
, du premier jusqu'au troisième cycle, à
capacités d'accueil limitées et dont les formations dans chaque
université seraient définies en fonction des
caractéristiques économiques locales ou régionales ;
- l'intérêt de la création de
sections de mise à
niveau
est par ailleurs souligné ;
- pour d'autres,
l'expérience des IUT
montre qu'une
filière non sélective courte à finalité
professionnelle devient de facto sélective et l'offre actuelle de
formations apparaît déjà très diversifiée;
- certains rappellent qu'une nouvelle filière courte exigerait
l'utilisation de matériels performants et estiment qu'elle ne pourrait
être que
sélective
, comme l'ont été les IUT
dont les étudiants reviennent ensuite à l'université pour
accéder à un enseignement long et plus généraliste ;
3. Quelles seraient, par ordre d'importance, les principales fonctions des
premiers cycles universitaires ?
- la plupart des correspondants insistent sur la
diversité des
fonctions des premiers cycles
(formation générale, remise
à niveau des connaissances, orientation progressive, vocation
d'insertion professionnelle...) mais certains estiment qu'une formation
pluridisciplinaire semble plutôt relever des CPGE, les fonctions de
formation générale et de remise à niveau
étant cependant privilégiées, du fait notamment d'une
baisse du niveau des bacheliers ;
- d'autres insistent au contraire sur l'importance d'une formation
pluridisciplinaire
et sur la nécessaire maîtrise des
technologies
courantes par les étudiants ;
- certains rappellent que le premier cycle a une vocation
générale et multidisciplinaire
mais joue en fait un
rôle d'orientation progressive du fait de l'incertitude des nouveaux
étudiants, alors que cette orientation devrait être
assurée, en amont, dès le lycée ; ils estiment en
outre qu'une remise à niveau des bacheliers est nécessaire du
fait des insuffisances de l'enseignement secondaire ;
- dans le même sens, d'autres jugent préférable d'
" amener à niveau " les bacheliers, plutôt que de
remettre à niveau les nouveaux étudiants et soulignent la
diversité des fonctions remplies par les différents premiers
cycles ;
- pour certains, les formations, qu'elles soient pointues à vocation
professionnelle, terminales, pluridisciplinaires ou générales
n'ont pas à être dispensées par les premiers cycles, tandis
que la remise à niveau des connaissances ne doit pas être la
principale fonction de ces derniers ; en revanche, la fonction
d'orientation progressive
, préalable au choix d'une
filière supérieure apparait la plus importante ;
- d'autres rappellent que les fonctions des premiers cycles sont diverses selon
les spécialités mais que les DEUG doivent toujours garder une
vocation pluridisciplinaire
et permettre une orientation progressive
vers les différents deuxièmes cycles ;
- un correspondant estime que la fonction principale des premiers cycles est de
" diminuer artificiellement le nombre de chômeurs chez les
jeunes " et qu'il n'est pas réaliste d'y voir " autre chose
qu'un
tampon social
" ;
- les formations courtes " pointues " ne devraient être
offertes que comme une alternative à l'université et il est
également rappelé que les DEUG n'ont pas une vocation " de
formation terminale
" : alors que certains préconisent la
création de formations à bac+3 et bac+4 ayant cette
vocation ;
III. LES AUTRES MESSAGES REÇUS
1. Le groupe " Hot Docs "
Ce groupe organise sur le réseau Internet des débats entre
étudiants en doctorat et a publié un rapport intitulé
" Formation doctorale : enjeux, bilan, propositions ".
Un animateur de ce groupe signale à la mission la réflexion
engagée sur les premiers cycles, portant en particulier sur le
rôle spécifique des différentes catégories de
personnels enseignant, notamment pour ceux issus d'une formation doctorale, par
rapport aux enseignants du secondaire, des STS et des IUT, et souligne
l'intérêt d'une complémentarité de ces
différents personnels pour les premiers cycles.
2. Les réactions à la synthèse des messages
reçus par la mission d'information
- un intervenant observe que le chômage des jeunes docteurs tend à
se développer et estime que " l'animosité "
relevée dans certains messages entre les
doctorants
et les
PRAG
provient du fait que l'université recrute de moins en moins
de maîtres de conférences, alors que le nombre des doctorants a
doublé depuis 1989 sous l'impulsion du Gouvernement : il rappelle
qu'un PRAG n'est ni un professeur d'université ni un
enseignant-chercheur et que l'agrégation ne comporte pas de contenu
" recherche " ;
- un autre intervenant est favorable à la généralisation
d'une
année post-bac
qui prendrait la forme d'un enseignement
pluridisciplinaire, d'une inscription d'attente ou d'une année
sabbatique mais souhaiterait que les étudiants ne soient pas
pénalisés en raison de leur âge pour accéder
à un certain niveau d'études ; il conviendrait
également d'
informer les employeurs sur les contenus
pédagogiques
de l'enseignement universitaire, pour mettre fin
à certains préjugés, étant rappelé que
l'université dispense un savoir académique mais développe
aussi la capacité d'adaptation des étudiants : ce n'est pas
tant l'université qui est à remettre en cause que les fausses
idées que certains véhiculent sur elle ;
- un dernier intervenant, réagissant à la remarque faite par un
responsable de CIO universitaire concernant
l'information des
étudiants,
souligne l'inadaptation de cette information dans de
nombreux lycées et établissements universitaires, en raison de
l'évolution rapide des formations, de l'existence d' " informations
erronées " et d'une " documentation parfois totalement
dépassée " ; il indique également que certains
chefs d'établissement assureraient un " contrôle " sur
les CIO, en orientant les lycéens sans tenir compte de leurs souhaits,
afin d'" augmenter le prestige de telle ou telle formation
locale ".
3. Les informations proposées à la mission d'information
- une correspondante s'est proposée de communiquer à la mission
un
rapport
établi dans le cadre de son université
sur l'information et l'orientation des étudiants de premier cycle ;
- une dernière correspondante se félicite enfin des orientations
contenues dans le rapport Fauroux et, s'appuyant sur son expérience,
cite un certain nombre de
dysfonctionnements
constatés dans tous
les degrés de notre système éducatif.
*
* *
VI. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE
RÉSEAU INTERNET,
PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 15 AVRIL
ET LE 3 MAI 1996
Au cours de cette période, la mission d'information a reçu vingt-cinq nouveaux messages dont deux contributions substantielles consacrées aux modalités d'information et d'orientation des lycéens et des étudiants expérimentées dans deux universités.
A. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 21 FEVRIER 1996
1. Les causes de l'échec universitaire dans les
premiers cycles
- certains évoquent l'importance du secteur sélectif dans
l'enseignement supérieur, qui conduit de nombreux étudiants
à
s'orienter par défaut
avec une faible motivation dans
certaines filières générales, et à suivre la
totalité des enseignements avant de prendre ou non conscience de
l'intérêt de la discipline dominante ;
- d'autres considèrent que la
discontinuité des programmes et
des méthodes d'enseignement
entre le lycée et l'enseignement
supérieur, et l'organisation administrative de l'université
elle-même, est à l'origine de l'échec universitaire :
le lycée prépare au baccalauréat mais pas à
l'université alors que la classe de terminale et la première
année de DEUG devraient faire partie d'un même cursus et que les
nouveaux étudiants devraient être préparés au
travail individuel et à la prise de notes ; l'université est
par ailleurs qualifiée de " monstre administratif "
inadapté aux particularités et aux attentes des étudiants
qui n'y viennent qu'en " touristes " ;
- une participation des étudiants à l'organisation des cours, des
TD et des TP est préconisée et l'université devrait mettre
en place des
structures de concertation
à un niveau très
déconcentré :
2. L'appréciation portée sur le système actuel
d'information et d'orientation au lycée et à
l'université
On estime que cette question est secondaire comme le serait celle qui porterait
sur l'intérêt de formations destinées à
préparer des entretiens d'embauche et la rédaction de C.V. dans
le cadre d'une opération contre le chômage au niveau national.
3. Les suggestions proposées pour améliorer ce système
d'information et d'orientation
Certains préconisent de mettre en place un numerus clausus
généralisé dans l'ensemble des filières et de
décloisonner
celles-ci pour permettre aux étudiants de
choisir une dominante après avoir " goûté " aux
différentes matières enseignées.
B. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 6 MARS 1996
1. Les formations supérieures courtes, à
finalité professionnelle, de type IUT ou STS, vous paraissent-elles
exagérément sélectives, compte tenu notamment des besoins
des entreprises ?
- la qualité de ces formations est soulignée mais certains
s'interrogent sur
l'adéquation des flux de diplômés aux
besoins de l'économie
, sur leurs possibilités d'adaptation
aux évolutions technologiques des prochaines décennies et sur la
vocation réelle de ces formations : filières courtes
à finalité professionnelle ou succédanés de classes
préparatoires ?
- on considère que ces formations devraient s'adresser en
priorité aux " élèves moyens ou un peu
faibles ", alors que les bons élèves devraient se diriger
vers l'université ;
- d'autres estiment que le
principe de la sélection en IUT est
satisfaisant
, est adapté aux étudiants motivés et
conscients de leur avenir et soulignent le caractère concret de
l'enseignement dispensé ; la France continue de privilégier
la " logique du diplôme " pour trouver un emploi mais on
regrette que la progression de carrière des diplômés d'IUT
se trouve freinée dans l'entreprise, sauf recours à la formation
interne ;
- la sous-utilisation du
congé annuel de formation
est
soulignée alors que celui-ci permettrait aux salariés de
s'adapter à l'évolution des qualifications dans les emplois
proposés.
2. A partir de quelle classe de l'enseignement secondaire, et par qui,
devrait être assurée l'information des élèves en vue
de leur orientation ?
- l'école est jugée inapte par certains à cerner le
profil, la capacité et les motivations des élèves en vue
de leur orientation ;
- d'autres considèrent que cette information devrait être
dispensée à partir de la seconde et en classe de terminale par
les professeurs principaux et les services d'orientation ;
3. Seriez-vous favorable à une orientation progressive au cours du
premier cycle universitaire ?
- certains y seraient favorables mais s'interrogent sur la possibilité
de remplacer la sélection par l'échec par une véritable
orientation et sur les personnels susceptibles de la mettre en oeuvre ;
- on s'interroge également sur le
suivi des expériences
d'accueil
personnalisé des étudiants engagées dans
certaines universités dont le coût est par ailleurs
souligné ;
- d'autres rappellent que le premier cycle devient une " gare de
triage " pour les étudiants qui y arrivent par défaut et
sont contraints de se réorienter après un échec aux
examens semestriels, notamment vers des formations plus
professionnalisantes : il conviendrait selon eux de
développer
des passerelles entre les premiers cycles et les IUT.
C. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES AU QUESTIONNAIRE DU 21 MARS 1996
1. Quelles seraient vos propositions pour réduire
l'échec universitaire dans les premiers cycles généraux
?
- certains préconisent une autre approche du " transfert des
savoirs " et un aménagement des obligations de service et des
modalités de promotion des enseignants ; ils souhaitent une
modification des relations
existant entre enseignants et
étudiants afin de valoriser le travail personnel de ces derniers et
proposent également d'engager une réflexion sur les
" savoirs réputés indispensables " ;
- on remarque que l'activité de recherche des enseignants et l'absence
de reconnaissance des activités d'animation qui n'entrent pas dans
l'encadrement traditionnel (cours, TD, TP), ainsi que l'incertitude quant
à la rémunération de ces tâches, tendent à
limiter l'engagement des enseignants
.
2. Seriez-vous favorable à une implication plus importante des
régions et des milieux économiques dans la définition des
formations supérieures, notamment pour les premiers cycles ?
Si l'aide apportée par les collectivités locales aux
universités est soulignée, certains s'interrogent sur la
capacité des collectivités à
définir des besoins
de formation
à moyen ou à long terme qui seraient
adaptés aux évolutions futures de l'économie.
3. Quelles sont, selon vous, les principales finalités de
l'enseignement supérieur, et notre système universitaire vous
semble-t-il adapté à ces finalités ?
- certains observent que ces finalités devraient être
définies par le pouvoir politique plutôt que par les
universitaires mais constatent que l'université assure d'une
manière convenable sa
mission d'élaboration et de transmission
des savoirs
, en notant toutefois que l'évolution des savoirs
traditionnels reste incertaine et que les filières technologiques
suscitent toujours des réserves de la part des étudiants ;
- ils remarquent que l'université ne pourra se
professionnaliser
et concurrencer les grandes écoles que si elle bénéficie
de directives claires et de moyens correspondants.
D. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 4 AVRIL 1996
1. Afin de réduire l'échec universitaire et
une " sélection-exclusion " de fait très importante
dans les premiers cycles, seriez-vous favorable à une orientation plus
sélective dans les diverses filières supérieures, voire
à des quotas par spécialités, le principe du libre
accès à l'université pour l'ensemble des bacheliers
restant inchangé ?
- à une orientation plus sélective, certains
préfèrent l'organisation de
rencontres entre les enseignants
et les étudiants
afin de fournir à ces derniers des
informations précises sur le " mode d'emploi " de
l'université ;
- d'autres préconisent une sélection dès la
première année de DEUG, qui ne pourrait par ailleurs pas
être redoublée, et sont favorables à
l'institution de
quotas
dans les filières à faibles
débouchés ; l'intérêt des langues, de
l'économie et des sciences est souligné dans la recherche d'un
emploi et une sélection à l'université est
préférée à un baccalauréat plus difficile
qui comporte des matières non choisies par les lycéens ;
- on estime dans un autre sens que l'institution de quotas serait choquante
pour l'opinion et contraire au principe du libre accès à
l'université, alors que l'idée d'une sélection par
concours dans les grandes écoles n'est pas contestée ;
une orientation plus sélective
serait par ailleurs acceptable
à la condition que les élèves brillants puissent
bénéficier de bourses, dès leur entrée au
lycée ;
- les étudiants et les familles devraient être
précisément
informés des débouchés
existants
, notamment dans des spécialités comme celle des
sciences de la vie, et de la dimension abstraite de certaines
filières ;
- le principe du
libre accès à l'université
est
souhaité par d'autres pour les
seuls bacheliers
généraux
et les bacheliers professionnels ne devraient pas
intégrer un premier cycle universitaire sans une remise à niveau
spécifique ;
- pour certains, la majorité des nouveaux bacheliers sont
dépourvus de véritable projet professionnel
;
- les effectifs trop importants des TD sont dénoncés et on
évoque l'absence d'utilisation des nouvelles technologies ;
l'insuffisance du nombre de TP est soulignée ainsi que le
recours
à des personnels précaires
dans les premiers cycles
(vacataires, moniteurs, ATER) ;
- on estime que les
DEUG modulaires
sont susceptibles d'alimenter
l'échec universitaire et que beaucoup d'étudiants ne sont pas en
mesure de s'adapter à un enseignement de type magistral qui les
maintient dans l'anonymat ;
- l'absence de
contrôle des présences
est également
soulignée, aussi bien dans les cours que dans les TD et contribuerait
à favoriser les abandons d'études ;
- un système de
quotas par spécialités
est
jugé enfin de nature à
accentuer encore l'échec
universitaire
en dirigeant les bacheliers vers des filières
correspondant encore moins à leurs capacités.
2. Quelles seraient vos propositions pour diversifier l'offre des
filières de premier cycle offertes aux bacheliers ? Seriez-vous
favorable à la création d'une filière technologique courte
non sélective à finalité professionnelle directe ?
- la création d'une telle filière axée sur les
connaissances pratiques risquerait, selon certains, de
concurrencer celle
des DUT et des BTS
sur le marché de l'emploi et nécessiterait
des moyens importants ;
- elle serait acceptée par d'autres, à la condition de
prévoir un
quota de places
pour les étudiants qui
échouent en premier cycle ;
- on suggère par ailleurs de proposer aux étudiants des
formations courtes très professionnalisées
débouchant sur un accès rapide au monde du travail, en leur
permettant ultérieurement de poursuivre des études, en
bénéficiant de la formation en alternance ; les nouvelles
technologies devraient par ailleurs faire l'objet d'enseignements
spécialisés et certains métiers manuels devraient
être revalorisés ;
- la création d'une filière courte non sélective est
jugée pertinente, à la condition de ne
pas devenir une
" voie de garage
" pour les laissés pour compte de
l'université : le principe de non sélection risque cependant
de dévaloriser ce type de filière.
- certains considèrent que la filière des IUT et des BTS permet
déjà de diversifier les formations supérieures ;
- pour d'autres, la création d'une filière technologique courte
ne correspond pas à la vocation de l'université et ils en
préconisent la mise ne place
en dehors des structures
universitaires
en maintenant une sélection des
étudiants ;
- le manque de motivation des étudiants en DEUG TI est souligné
et on préconise un enseignement plus pratique s'appuyant sur des
équipements adaptés ;
- certains considèrent que les
filières de premier cycle sont
déjà trop nombreuses
pour être clairement
décrites dans les CIO, et soulignent l'insuffisance des informations
dispensées par les conseillers d'orientation.
3. Quelles seraient, selon vous, dans l'ordre d'importance, les principales
fonctions des premiers cycles universitaires ?
- le DEUG devrait d'abord permettre d'acquérir des
méthodes de
travail
en développant l'autonomie des étudiants, ainsi que
des
connaissances de base
afin de diversifier leurs centres
d'intérêt dans une perspective de pluridisciplinarité ;
- la
fonction de " remise à niveau
" est par ailleurs
contestée et est jugée dévalorisante pour certains ;
- la " formation pointue à vocation d'insertion professionnelle
immédiate " est jugée assimilable à celle
donnée par les IUT mais ne devrait
pas être exclusive d'une
éventuelle poursuite d'études
, tandis que la vocation de
spécialisation de l'université est rappelée ;
- une formation universitaire devrait permettre l'acquisition d'une solide
culture générale
dans la discipline étudiée
et une bonne formation disciplinaire est jugée comme un atout pour
acquérir une formation plus pointue à vocation d'insertion
professionnelle immédiate ;
- les premiers cycles devraient d'abord privilégier la
formation
générale et pluridisciplinaire
tandis que le lycée
devrait lui-même assurer la mise à niveau des connaissances
nécessaires pour suivre des études supérieures ; il
est rappelé que les IUT et les BTS ont vocation à dispenser une
formation pointue à vocation d'insertion professionnelle
immédiate ainsi qu'une formation " terminale " ;
- certains préconisent un
allongement de la durée des DEUG
à trois ans, avec une première année
" généraliste " et un dispositif d'orientation qui
devrait tenir compte du projet professionnel de l'étudiant, et de son
expérience éventuelle de recherche dans un laboratoire ;
- la remise à niveau des nouveaux étudiants n'est pas
considérée comme relevant des premiers cycles universitaires,
mais plutôt d'un "
établissement-sas
" entre le
lycée et l'université, animé principalement par des PRAG.
E. LES REPONSES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 18 AVRIL 1996
1. Certains ont évoqué la possibilité
de créer des collèges de premier cycle à vocation
professionnelle, notamment pour les bacheliers technologiques et
professionnels ; seriez-vous favorable à cette création, et
dans l'affirmative, conviendrait-il de rattacher ces collèges à
l'université ?
- on rappelle que les bons bacheliers technologiques ont la possibilité
d'intégrer les IUT et les STS et que la sélection qui est admise
pour les grandes écoles doit également s'appliquer aux autres
filières pour
maintenir le niveau des formations
tandis que la
création de filières technologiques supplémentaires n'est
pas souhaitée ;
- la
structure universitaire
est jugée lourde, peu dynamique,
" pleine de personnalités peu motivées par leur
travail " et les horaires de cours des universitaires sont
brocardés ;
- on estime que des collèges universitaires risqueraient de faire
double emploi avec les BTS
sauf à présenter une
réelle spécificité, fondée notamment sur des
formations en alternance : doubler des formations technologiques et
professionnelles conduirait à créer un afflux de
diplômés sur un marché du travail déjà
saturé ; le rattachement de ces collèges à
l'université aurait pour conséquence de mettre en place des IUT
moins sélectifs mais présentant peu d'intérêt pour
les étudiants ;
- pour certains, les premiers cycles offrent un trop grand nombre de formations
et leur
libre accès sans information
des étudiants conduit
à de nombreuses défections en première année, une
faible motivation des étudiants et des choix de filières non
commandés par des perspectives d'emploi ;
- on souligne les
difficultés actuelles des IUT
et le
détournement de leur vocation professionnelle puisque 80 % de leurs
étudiants poursuivent des études : leur programme
pédagogique apparaît de plus en plus généraliste,
notamment en informatique ;
- certains s'interrogent sur le caractère opérationnel
d'éventuels collèges universitaires qui concurrenceraient selon
leur niveau, les IUT ou les IUP et préconisent plutôt une mise
à plat et une
simplification de l'ensemble des formations
universitaires
ainsi qu'une prise en compte de leur dimension
professionnelle au sein de l'université, en s'inspirant de l'exemple des
Etats-Unis où les activités de recherche sont importantes ;
- on considère également que ces collèges risqueraient de
se
substituer aux IUT
qui organisent déjà un premier cycle
professionnalisant ;
- d'autres sont au contraire favorables à la création de
collèges et constatent que les
DEUG ne sont pas adaptés aux
bacheliers technologiques et professionnels
même si ces derniers
disposent du droit d'accéder à l'université et ne peuvent
que rarement accéder aux IUT et aux STS qui sont investis par les
bacheliers généraux : ils préconisent la
création d'une
formation diplômante nationale
pour ceux qui
échouent en DEUG, en proposant d'y associer l'industrie pour valoriser
ces formations ;
- on s'interroge sur l'opportunité de
rattacher ces collèges
à l'université
, du fait notamment de la méfiance
manifestée par les universitaires à l'égard du monde du
travail, cependant un tel rattachement permettrait de mettre en commun les
moyens existants, d'accroître la crédibilité de ces
collèges et de leur conférer une valeur, vis-à-vis de
l'extérieur ;
- d'autres préféreraient
promouvoir les IUP
plutôt
que de créer de nouvelles formations redondantes à vocation
professionnelle ;
- certains considèrent au contraire qu'il est nécessaire de
créer des premiers cycles technologiques
spécifiques
en les réservant aux bacheliers technologiques
et professionnels, et en y dispensant une formation originale ;
- la création de collèges est jugée par d'autres inutile
et aboutirait à " prolonger les études de tout le
monde " alors que l'enveloppe financière du système
éducatif reste limitée : pourquoi ne pas créer
plutôt des
sections supplémentaires d'IUT
pour les
bacheliers professionnels ? Les IUT sont là pour
éventuellement permettre aux " titulaires de " bac
pro "
de devenir technicien supérieur ;
- le développement des
passerelles
et de
l'apprentissage
est plutôt préconisé et si des collèges devaient
être créés, ceux-ci devraient être placés sous
la tutelle de l'université ;
- la création de
premiers cycles plus professionnalisants
pour
les bacheliers technologiques suppose pour certains une concertation entre les
structures enseignantes et les entreprises, la définition de formations
recherche-application de pointe, un encadrement renforcé des
étudiants, des moyens financiers adaptés et une véritable
motivation des étudiants ; ceci suppose aussi un recours à
des enseignants non universitaires et à des praticiens, et une
rémunération adéquate de ces formateurs ;
- compte tenu de l'hétérogénéité des
étudiants de premier cycle, une
différenciation des
filières est jugée indispensable
pour former
professionnellement une population étudiante de plus en plus
importante : ceci impliquerait la création de premiers cycles
à vocation directement professionnelle qui devraient être, pour
des problèmes de locaux et de personnels, rattachés à
l'université, ce rattachement facilitant en autre l'existence de
passerelles et éviterait des fractures telles que celles qui existent
déjà entre écoles d'ingénieurs et
universités ;
2. Seriez-vous favorable à la création d'une année
post-DEUG professionnalisante pour les étudiants qui ne souhaitent pas
suivre de deuxième cycle ?
- certains seraient favorables à
une année de stage en
entreprise
à la condition que les étudiants soient au moins
payés au SMIC sans aide de l'Etat, ce qui permettrait de s'assurer du
sérieux et du caractère productif du travail qui leur est
confié : les stages sans finalité professionnelle sont
dénoncés ;
- d'autres acceptaient un
DEUG plus professionnalisé
afin de
renforcer l'intérêt de ce diplôme sur le marché du
travail et aussi de réduire le taux d'échec en deuxième
cycle : on s'interroge cependant sur le contenu d'une formation
professionnalisante en une seule année, en préconisant notamment
le recours à l'alternance ;
- on observe cependant que les
IUP
organisent déjà des
formations professionnalisantes ;
- certains soulignent l'intérêt d'une année post-DEUG, mais
s'interrogent sur son
efficacité dans le domaine des sciences
humaines et des lettres ;
- d'autres préféreraient un
enseignement
professionnalisé plus long
, de l'ordre de deux années, pour
préparer convenablement les titulaires de DEUG à la vie active,
et préconisent un détachement de cette formation de
l'université ;
- il existe déjà des
DEUST
à finalité
professionnelle
qui sont reconnus par le monde professionnel et qui
devraient être développés ;
- la création d'une année post-DEUG professionnalisante est aussi
contestée car il existe déjà des années
spéciales d'IUT et de BTS qui permettent d'acquérir une
compétence professionnelle, des formations AFPA autorisant une
excellente professionnalisation pour les scientifiques dans le secteur
industriel et des formations complémentaires d'initiative locale :
l'importance d'un
partenariat
entre les universités et les
diverses structures d'enseignement est soulignée ;
- une année professionnalisante post-DEUG permettrait de former
des
techniciens moins spécialisés et plus adaptables
aux besoins
des entreprises que ceux issus des STS et des IUT, et d'adapter les DEUG, dont
ce n'est pas la vocation, à la vie professionnelle.
3. Certains préconisent de différencier les filières
générales des premiers cycles en créant d'une part un DEUG
court non sélectif à contenu allégé et
débouchant sur une formation terminale, et d'autre part, un DEUG
renforcé et sélectif préparant à la poursuite
d'études longues ; seriez-vous favorable à une telle
différenciation du DEUG ?
- certains ironisent sur la perspective de mettre en place un DEUG en
alternance " avec des séjours au club med ",
considèrent que
le DEUG actuel est suffisamment
" généraliste "
et n'a nul besoin d'être
allégé et estiment que tout étudiant a déjà
la possibilité de prendre une année sabbatique ;
- on estime que les étudiants ont une vision des études
supérieures privilégiant les notes et les examens plutôt
que l'acquisition des savoirs ;
- une
sélection affichée
est préférée
à une dilution des formations : certains déplorent que
l'université conserve sa conception égalitaire qui permet
à des " parasites d'empêcher les autres de travailler "
et suggèrent radicalement qu'elle puisse se débarrasser de ceux
qui " viennent rarement aux cours ou gênent manifestement les
autres " ;
- d'autres rappellent la fonction généraliste des DEUG et
préconisent un
système optionnel
à l'entrée
à l'université : une formation spécialisée
à vocation terminale, qui n'existe pas pour l'instant, et un DEUG
généraliste préparant à la poursuite
d'études, assorti d'une formation professionnalisante
complémentaire ;
- on estime que l'échec universitaire ne pourrait se réduire
qu'avec une
multiplication des filières
et un
développement de l'information des lycéens ; il conviendrait
également d'augmenter le nombre des passerelles entre les
filières et de créer des formations professionnalisantes courtes
après le premier cycle : un décloisonnement des
filières et la mise en place de formations
" échappatoires " professionnalisantes sont jugés
indispensable pour réduire cet échec et éviter de le
déplacer vers des filières " poubelles " ou sans
intérêt pour les étudiants ;
- certains suggèrent une sélection pour les études longues
avec un système permettant à ceux qui auraient choisi des
filières courtes non sélectives, de
réintégrer
le cursus long
mais s'interrogent sur la finalité d'un DEUG
allégé et spécialisé qui concurrencerait les
IUT ;
- d'autres sont défavorables à une différenciation des
DEUG qui conduirait à créer des diplômes différents
et à
empêcher tout changement d'orientation
ou la poursuite
d'études .
- on estime également qu'un DEUG différencié serait une
" hérésie " et conduirait à
introduire la
sélection à l'université
, qui risque de ne pas
être acceptée par les étudiants : il est
rappelé qu'un DEUG a vocation à mener à des études
relativement longues, à la différence des IUT et des BTS, mais la
mise en place d'une année supplémentaire serait de nature
à revaloriser ces filières technologiques auprès des
bacheliers généraux ;
- les filières actuelles du DEUG sont également jugées
satisfaisantes et certains considèrent que des
sous-diplômes
n'auraient aucune valeur sur le marché de
l'emploi : l'information post-bac et la valorisation des DEUST et des DUT
apparaissent plus efficaces ;
- la sélection dans les STS et les IUT est considérée par
certains comme trop sévère et ne permettrait pas
d'optimiser
le potentiel
de ces filières ;
- une différenciation des DEUG apparaît peu applicable,
introduirait une ségrégation entre les étudiants et
s'opposerait à la poursuite d'études longues par des bacheliers
moyens : certains préconisent plutôt un
DEUG
" à la carte
" permettant aux élèves
brillants de suivre des cours complémentaires sans exclure des options
professionnalisantes ;
- d'autres préconisent une
dissociation des étudiants
à l'université selon qu'ils viennent d'une filière
générale ou technique, au terme d'une orientation qui serait
décidée par les professeurs et les services d'orientation des
lycées, mais sont opposés à la création de deux
cycles différents dans une même université ;
- les étudiants abandonnant l'université avant la licence
devraient pouvoir
s'intégrer à la vie active
après
avoir obtenu un DEUG : certaines universités ont ainsi
développé des passerelles entre le DEUG et la deuxième
année d'IUT ;
- il conviendrait de
professionnaliser les DUT
en les rendant plus
accessibles et aussi de restreindre l'accès aux cursus universitaires
dont les
débouchés sont moindres
, car le pays a davantage
besoin de techniciens que de chercheurs : les étudiants mal
informés se dirigent vers des études longues pour échapper
au chômage alors que ces études longues en feront au contraire des
chômeurs surdiplômés : on préconise ainsi une
distinction entre un " DEUG professionnalisant non
sélectif "
et un " DEUG études longues " ;
- si les collèges universitaires étaient destinés à
accueillir des étudiants mal formés ou peu motivés, dans
des formations obsolètes, ils n'auraient pour résultat que de
différer d'un an le chômage des jeunes
; le DEUG
n'apparaît adapté que pour 30 % des étudiants et
l'université essaie de " replâtrer une situation qui lui
échappe " due à des dysfonctionnements qui se situent
très en amont ;
- il ne saurait être question de
fermer les filières
longues
à certains étudiants et l'idée d'un DEUG
général sélectif est réfutée : la
sélection et l'orientation des étudiants s'effectuent en fonction
de leur motivation et il serait souhaitable d'ouvrir plus largement les portes
des formations professionnalisantes et des filières courtes.
F. LES INFORMATIONS COMMUNIQUEES À LA MISSION D'INFORMATION
- La mission d'information a reçu deux études
substantielles : la première porte sur le processus d'orientation
et d'information des DEUG MIAS, MASS, SM, TI de l'USTL de Lille
(pré-inscription, entretiens post bac, amphis d'information, bilan de
début d'année, orientation de fin d'année, information des
étudiants et des enseignants ;
- la seconde est consacrée aux modalités d'information et
d'orientation à l'Université Joseph Fourier de Grenoble aussi
bien avant l'entrée à l'université que pendant les
études, tout au long du cursus (sensibilisation des lycéens aux
études post-bac, salon, journée du lycéen,
pré-inscription, accueil de rentrée, actions d'information des
conseillers d'orientation et des professeurs principaux de terminale,
journées des premiers cycles et des maîtrises, jeudi de la CELAIO,
journal d'information, suivi des étudiants et annuaire des
diplômés, accueil à la CELAIO, développement du
tutorat, action auprès des redoublants...).
G. LES REMARQUES SUR LA SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS PAR LA MISSION D'INFORMATION
- la teneur de certains messages critiquant le
recours aux
PRAG
dans les premiers cycles est à nouveau sévèrement
jugée et la qualité de ces enseignants est soulignée ainsi
que leur adaptation pour assurer une transition entre le lycée et
l'université ;
- on rappelle également que le recrutement et la carrière des
enseignants-chercheurs se font exclusivement sur
critères de
recherche
, ce qui peut expliquer les faiblesses pédagogiques de
certains ;
- certains soulignent les
efforts d'information de certaines
académies
(journée banalisée dans les
universités, salon de l'étudiant, forum des formations
techniques, journée d'information des professeurs principaux des
terminales) mais aussi le
désintérêt de beaucoup de
lycéens
pour ces formules et détaillent les modalités
d'information et d'orientation des nouveaux bacheliers à
l'université, via des amphis d'information coordonnés par les
directeurs d'études ;
- on rappelle également que la formation des "
bac
pro
" est totalement inadaptée à la poursuite de DEUG
généralistes ;
- d'autres remarquent que les PRAG ne sont pas destinés à
enseigner dans le supérieur, en particulier dans les disciplines
scientifiques qui évoluent rapidement et notent que ces
agrégés ont été formés pour être des
" enseignants d'élite " du secondaire, mais pas du
supérieur.
*
* *
VII. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS PAR LE SENAT, VIA LE RESEAU INTERNET, ENTRE LE 6 ET LE 20 MAI 1996
Au cours de cette période, dix-sept messages ont
été adressés à la mission d'information dont
certains émanent de correspondants qui répondent avec
régularité depuis plusieurs semaines aux questionnaires
lancés sur le réseau.
Les membres de la mission tiennent à remercier encore une fois
l'ensemble de ses correspondants pour le sérieux et la qualité de
leurs observations qui viendront opportunément compléter les
informations recueillies au cours de ses auditions et à l'occasion d'un
déplacement en Allemagne.
Si aucun questionnaire nouveau n'accompagne la présente synthèse,
la consultation lancée depuis le 22 février 1996 reste ouverte et
la mission continuera évidemment à prendre connaissance des
messages qui pourront lui être envoyés.
A. LES REPONSES COMPLEMENTAIRES APPORTEES AU QUESTIONNAIRE DU 18 AVRIL 1996
1. La création éventuelle de collèges
de premier cycle à vocation professionnelle
- certains s'interrogent sur l'opportunité de créer des nouvelles
structures qui seraient de nature à concurrencer les
formations
technologiques
existantes
(BTS, DUT, DEUST, ...), soulignent le
risque de marginalisation de nouvelles filières si celles-ci
étaient créées en dehors du système universitaire,
et préconisent plutôt le développement d'une filière
technologique au sein des universités, à partir des structures
existantes ;
2. La création d'une année post-DEUG professionnalisante
- il est rappelé que les IUT ont mis en place depuis une dizaine
d'années des
années spéciales
qui sont
destinées aux étudiants engagés initialement dans un
cursus long et qui souhaitent se réorienter vers une filière
courte ;
- on estime que la création d'une année post-DEUG à
finalité professionnelle est une " solution à
creuser ", étant rappelé que cette solution est
déjà expérimentée avec les DNTS qui
complètent les DUT : la
généralisation du DNTS
est souhaitée, cette proposition ayant par ailleurs été
reprise par l'UNI lors des états généraux de
l'université.
B. LES REPONSES APPORTEES AUX QUESTIONNAIRE DU 6 MAI 1996
1. Quelle devrait être la part respective des
différents types d'enseignants dans les premiers cycles et notamment la
ventilation entre les enseignants-chercheurs et les professeurs
agrégés du secondaire ?
Seriez-vous favorable à la généralisation d'un tutorat en
premier cycle ?
- certains rappellent que les
seuls enseignants-chercheurs
ont en
principe vocation à enseigner à l'université, mais compte
tenu des problèmes de la recherche en France, admettent la
présence de PRAG " uniquement " dans les premiers cycles :
on
propose également une première année de DEUG
" généraliste " et permettant d'offrir des
possibilités d'orientation en seconde année, la licence et la
maîtrise devant par ailleurs conserver leur rôle traditionnel ;
- par ailleurs, on note que le développement du
tutorat
n'est pas
nécessaire si l'encadrement de la première année de DEUG
est renforcé et " qu'apprendre à fouiller dans les livres
fait partie de la formation universitaire " ;
- on s'interroge sur la présence des
PRAG en premier cycle
, voire
dans les cycles ultérieurs, ainsi que sur l'affectation
éventuelle d'enseignants du supérieur, ayant stoppé leur
activité de recherche, dans l'enseignement secondaire, en soulignant que
la motivation des enseignants devrait d'abord être prise en compte ;
- certains remarquent que de nombreux bacheliers arrivent en première
année sans avoir acquis
les bases et les méthodes de travail
propres à l'université
, du fait des modalités
spécifiques de formation dans l'enseignement secondaire : ils se
demandent comment des enseignants qui n'ont pu dispenser cette formation
à des classes de lycée à effectifs restreints pourraient
le faire, dans des amphis ou des travaux pratiques surchargés pendant
une période limitée et certains s'interrogent également
sur les critères de sélection des enseignants dans le secondaire ;
- d'autres suggèrent de laisser à chaque université le
soin de recourir aux enseignants de leur choix et aux étudiants
d'évaluer leurs professeurs : on remarque cependant que les jeunes
docteurs
ont principalement été formés pour devenir
enseignants-chercheurs
-en fait plus chercheurs qu'enseignants- alors
que les agrégés sont destinés aux lycées ; si les
PRAG avaient une vocation à enseigner à l'université, il
conviendrait à l'inverse de réserver aux docteurs une place dans
les lycées ;
- on souligne également que les docteurs n'ont " pas vraiment la
chance d'exercer leurs talents ", à l'exception de quelques
" élus " qui peuvent devenir moniteurs, ou vacataires s'ils
ont moins de 27 ans, et qu'un souci d'économies conduit le
ministère à privilégier
l'utilisation des PRAG par
rapport aux maîtres de conférences ;
- constatant que les enseignants-chercheurs -et aussi les étudiants-
" s'ennuient " dans les premiers cycles universitaires,
certains
considèrent au contraire que les
PRAG sont beaucoup plus aptes
" à faire passer le message " : les TD et les TP
assurés par les assistants et les thésards ont pour vocation
d'expliciter les cours magistraux alors que cette fonction est assurée
aux Etats-Unis par les professeurs eux-mêmes ;
- on préconise également une plus grande utilisation des
ouvrages fondamentaux
par les étudiants, et un recours
complémentaire aux professeurs agrégés du secondaire qui
sont proches des nouveaux étudiants et dont les qualités
pédagogiques sont reconnues ;
- à l'instar de l'exemple américain, le professeur
d'université devrait être un
guide pour les
étudiants
et le
tutorat apparaît efficace
à
condition que les tuteurs n'aient pas en charge plus de vingt étudiants ;
- d'autres rappellent que les
agrégés ont été
formés pour l'enseignement secondaire
et pas pour
l'université où les savoirs changent rapidement ; les
enseignants-chercheurs, même " peu motivés ", dispensent
un cours préfigurant ce qui attend les étudiants en
deuxième cycle : certains chercheurs participent activement à
l'orientation des étudiants et ces derniers ne devraient pas attendre la
fin de leurs études pour les rencontrer ;
- la présence des PRAG serait admise pour certains enseignements mais
l'université a vocation à rester en contact étroit avec
la recherche,
qui inspire la méthodologie et garantit
l'actualité des cours : ceci implique une forte présence des
enseignants-chercheurs dans les laboratoires et dans les structures de
l'université ;
- si le
tutorat est jugé utile en début de première
année
pour réduire les disparités entre les divers
bacheliers, on estime aussi que sa généralisation n'est pas
souhaitable dans la mesure où l'université doit " pouvoir
favoriser l'autonomie des apprenants ";
- certains considèrent que les premiers cycles ont besoin
des PRAG
comme des chercheurs
, afin que la transition soit assurée entre le
lycée et la fac, et qu'un tutorat systématique est de nature
à faciliter l'intégration rapide des étudiants dans la vie
universitaire ;
- d'autres pensent au contraire que les professeurs des premiers cycles doivent
être des enseignants-chercheurs : on rappelle encore une fois que
de
nombreux docteurs ne trouvent pas d'emploi
, à l'université,
au CNRS et dans les entreprises et que la mission des PRAG est d'enseigner dans
le secondaire ;
2. Quels seraient les moyens de renforcer la motivation des étudiants
dans les premiers cycles ?
- il est rappelé que les étudiants qui n'entrent pas en classe
préparatoire ou en IUT sont contraints de
s'orienter par
défaut
vers l'université, " que cela leur plaise ou
non ", avec des chances de réussite qui sont liées à
leur motivation : si le libre accès à l'université
est à l'origine d'un échec universitaire important, ce principe
démocratique doit cependant être conservé ;
- on estime qu'une
revalorisation de l'image de l'université
est
indispensable : celle-ci passe par une information des étudiants
sur la difficulté des études supérieures, mais aussi sur
la réussite de ses diplômés, sur les relations
désormais établies entre les établissements et les
entreprises et sur les possibilités offertes aux étudiants
d'accéder aux écoles d'ingénieurs ;
- les
bourses d'études
ont déjà pour objet, selon
certains, de prendre en compte l'éloignement des universités du
domicile des étudiants ;
- une orientation plus directive ne saurait remplacer
l'absence de projet
d'études
qui est très souvent constatée chez les
étudiants : une meilleure information des bacheliers est
préconisée ainsi qu'un encadrement renforcé en
première année de DEUG pour assurer une transition plus facile
entre le lycée et l'université ;
- afin de renforcer leur motivation, certains préconisent de
salarier
tous les étudiants
, à la condition que ceux-ci ne soient plus
rattachés au foyer fiscal de leurs parents, et envisagent une sorte de
" salaire minimum de formation pour la jeunesse ", sur
lequel
seraient assises des cotisations sociales, et qui ne saurait être
inférieur au salaire minimum : en contrepartie, l'étudiant
aurait une
obligation de présence
, sauf motifs de santé,
qui ferait l'objet d'un contrôle et une
obligation de
réussite
à ses examens ; une absence non
justifiée entraînerait une interruption immédiate du
versement de ce salaire et
l'obligation de rembourser
la totalité
des rémunérations perçues ; en cas d'échec aux
examens, le même remboursement est proposé sous réserve
d'une année sur quatre consacrée à une
réorientation éventuelle ;
- un tel statut de l'étudiant permettrait de
revaloriser l'image du
système universitaire
auprès des jeunes, qui passeraient d'un
statut d'assisté à celui de responsable, en leur permettant de
prendre " leur place dans la société " : ce statut
salarié permettrait également de réduire l'importance du
travail au noir effectué actuellement par les étudiants en
situation précaire ;
- on propose également une
augmentation des droits d'inscription
qui devraient obligatoirement contribuer au financement des formations :
le contrôle de l'affectation de ces droits serait assuré par une
commission constituée d'au moins un tiers des étudiants, leur
statut de salarié devant renforcer leur participation au fonctionnement
de l'institution universitaire ;
- ceci suppose également la mise en place de
commissions
d'orientation
chargées d'analyser le dossier du futur
étudiant-salarié, et qui serait constituée d'enseignants
du secondaire et de conseillers d'orientation ;
- la mise en place du statut d'étudiant salarié devrait
être précédée d'une
" modélisation " destinée à en
chiffrer le
coût
mais on estime que celui-ci serait en tout état de cause
inférieur au " monstrueux gaspillage " engendré par la
situation actuelle ;
- pour d'autres, l'université n'a pas à " organiser la pause
café, le match de volley, comme au club " : son rôle
doit être de proposer aux étudiants des cours intéressants,
des diplômes de qualité recherchés par les employeurs,
d'offrir de bonnes conditions d'études et l'étudiant pourra
choisir son université en fonction des prestations offertes ;
- on rappelle que l'université est un lieu d'études et que le
lycée n'apprend pas les méthodes de l'enseignement
supérieur mais privilégie toujours un
enseignement
magistral
et l'apprentissage " par coeur " des
disciplines
(travers qui se retrouve d'ailleurs jusqu'en DEA) : on dénonce
également la pauvreté des bibliothèques françaises
par rapport à celles des universités allemandes ;
- certains préconisent un développement des
filières
alternatives
, notamment avec les entreprises, une plus grande participation
des étudiants au fonctionnement des
structures universitaires
,
à l'exemple de l'Allemagne, ainsi que la possibilité pour les
responsables universitaires de
recruter
(et éventuellement
" de changer ") leur personnel enseignant ;
- on souligne qu'une
orientation trop directive
serait mal perçue
par les étudiants et pourrait empêcher des réorientations
éventuelles ;
-une plus grande participation des étudiants au financement de leurs
études est assimilée par d'autres intervenants à une
sélection par l'argent
et l'augmentation du nombre des bourses
n'apparaît pas de nature à compenser les inégalités
entre étudiants : certains souhaiteraient cependant une
modulation des droits
d'inscription en fonction des revenus des parents,
afin notamment d'augmenter les ressources des universités, mais notent
que les bourses sont parfois détournées de leur objet alors
qu'elles devraient en priorité être réservées aux
étudiants en situation difficile ;
- l'absence de motivation des étudiants résulterait
également de leur interrogation quant à l'
utilité de
leurs études
pour la recherche d'un premier emploi et du sentiment
que l'université n'est pas à la hauteur de la réputation
des grandes écoles : l'université n'est pas valorisée
auprès des entreprises alors que la qualité de son enseignement
permet souvent à ses étudiants de rivaliser avec les
diplômés des grandes écoles d'ingénieurs ou de
commerce ;
- ce défaut de motivation concerne également les étudiants
qui, en nombre croissant, " vont s'enfermer dans les
concours du
CAPES
" ;
- au lieu de
s'isoler du monde extérieur
, l'université
devrait être " le vivier dans lequel les entreprises viendront
chercher ce qui leur fait défaut " ;
- la motivation des étudiants ne pourrait résulter que de la
définition d'une véritable
politique de l'emploi
leur
permettant de s'orienter d'une manière réaliste ;
- l'attribution de bourses sur critères sociaux apparaît pour
certains de nature à assurer une
égalité devant
l'enseignement supérieur
alors que la formule des prêts
bancaires est jugée inégalitaire pour les étudiants les
moins aisés ;
- certains expriment en revanche leur scepticisme quant aux effets
redistributeurs des
bourses
même si les critères actuels
d'attribution apparaissent trop restrictifs : on estime que l'extension du
système des bourses ne renforcerait pas la motivation des
étudiants qui entrent à la fac " sans réel
intérêt ", laquelle est considérée comme une
" voie de garage ", faute d'une orientation
satisfaisante ; les
étudiants perdent par ailleurs souvent leur motivation au cours du
premier semestre, du fait d'un manque d'encadrement, de l'anonymat des grands
amphis et du " peu d'intérêt que leur portent les
profs " ;
- d'autres soulignent au contraire
l'efficacité du système
actuel d'orientation
, pour peu que les étudiants effectuent les
démarches nécessaires : on suggère cependant que les
conseillers d'orientation soient plus présents dans les lycées
et de manière permanente, et ainsi d'augmenter leur nombre, car les
professeurs ne sont pas formés à cette tâche et doivent par
priorité se consacrer à leurs fonctions d'enseignement.
3. Quelles devraient être, selon vous, les vocations principales des
antennes universitaires délocalisées ?
- certains estiment que ces antennes doivent proposer les
mêmes
formations que les " universités-mères "
, sans
toutefois aller jusqu'à la création de troisièmes cycles,
ce qui conduirait à diluer " les maigres crédits de
recherche " pour des résultats aléatoires : les
antennes ont l'avantage d'offrir des
formations de proximité
et
de faciliter le passage entre le lycée et l'enseignement
supérieur ;
- on estime également que le développement des antennes
universitaires jusqu'à la maîtrise risquerait de
pénaliser les activités de recherche
des
enseignants-chercheurs qui seraient affectés en deuxième
cycle ;
- d'autres considèrent que l'université doit rester
intégrée dans des
structures solides de recherche et
d'enseignement
en relation avec le tissu industriel, ce qui implique
l'existence de " vrais campus " comportant les trois cycles
de
formation et un coup d'arrêt aux délocalisations universitaires
encadrées par les " rails profs " ;
- on estime que ces antennes devraient d'abord offrir des
formations de
premier cycle
, afin " d'éviter un exil systématique,
coûteux et trop long en cas de problèmes d'orientation ", et
aussi des
formations technologiques
pas nécessairement
liées aux débouchés locaux, dans une perspective
d'aménagement du territoire
, les formations d'excellence devant
plutôt être regroupées dans les universités de
rattachement ;
- pour d'autres, les antennes universitaires ont vocation à
développer des
formations technologiques orientées vers des
débouchés locaux
, si ceux-ci existent, mais servent aussi
à
décongestionner les universités-mères
pour
les premiers cycles : on souligne que les formations universitaires
doivent rester liées à la recherche et que les
enseignants-chercheurs doivent avoir les moyens de s'y consacrer sur place, ou
sur d'autres sites ;
- on souligne enfin l'intérêt des antennes pour
démocratiser
l'enseignement supérieur, en offrant des
formations de proximité,
et on estime que ces antennes devraient
fournir une formation complémentaire à celles de
l'université-mère, ce qui permettrait ainsi de proposer aux
étudiants un éventail plus large d'enseignements.
C. LES RÉACTIONS À LA SYNTHÈSE DES MESSAGES ET LES AUTRES OBSERVATIONS DES CORRESPONDANTS
- certains considèrent que
l'absence de
motivation
des étudiants est à l'origine de l'échec
universitaire dans les premiers cycles et que l'avenir professionnel de
nombreux étudiants reste flou, voire angoissant : ceci
résulterait d'une mauvaise orientation, d'une connaissance
limitée des métiers, d'une pré-orientation trop
précoce et du passage d'un dispositif scolaire " infantilisant,
quasi-militaire ", à un système universitaire prévu
pour des " étudiants motivés, mûrs et
autonomes " ;
- l'orientation universitaire dans les pays
étrangers
est
jugée plus réaliste : les étudiants prennent leur
temps, suivent des stages en entreprise, effectuent des séjours à
l'étranger, voire des " tours du monde ", ce qui leur permet
d'appréhender d'autres langues et cultures, et ne sont pas astreints au
" parcours du combattant " à la française ;
- certains citent Hegel (" rien de grand ne se fait sans
passion ")
et estiment que les
orientations par défaut
devraient
disparaître de l'université ;
- d'autres préconisent une modification de l'intitulé des
bacs
professionnels
dont les titulaires estiment à tort pouvoir
accéder à n'importe quel DEUG général scientifique,
" ce qui est une hérésie " ;
- on rappelle que
l'éducation des jeunes est le meilleur
investissement
pour une nation en observant que les états
généraux de l'université sont nés aussi des
manifestations des étudiants et des enseignants de l'automne 1995 ;
- s'agissant de la transmission du savoir et de la formation des
étudiants, on souligne que ces derniers devront plusieurs fois changer
d'emploi au cours de leur vie professionnelle et seront mis en concurrence pour
trouver un emploi : il convient de les préparer à ces
perspectives pour les adapter à une
mobilité
géographique et professionnelle
, en développant leur
curiosité, leur esprit critique et leur motivation ;
- en conséquence, il apparaît nécessaire de
valoriser
les projets individuels ou collectifs
des étudiants, en les
associant à la gestion des budgets correspondants, de compléter
les bases fondamentales de chaque cursus, notamment scientifiques, par des
connaissances générales
, d'instituer un
stage
ouvrier
dès la première année de premier cycle, avant
des stages d'études ultérieurs, de favoriser la
mobilité des étudiants
par des échanges entre
universités, de développer le
tutorat
, d'assurer un
environnement
informatique
convenable aux étudiants et de
stimuler la pratique d'une
activité sportive ou culturelle
dans
le cadre universitaire ;
- on propose un
cursus
décalé tendant à dispenser
en première année une formation générale et
pluridisciplinaire, cette année de transition étant
également destinée à responsabiliser et à permettre
à l'étudiant de s'orienter ; il conviendrait ensuite de
développer une formation approfondie jusqu'à bac+3, correspondant
à l'enseignement de base aujourd'hui donné dans les DEUG ou les
IUT, complétée par les projets personnels et les stages
industriels des étudiants, afin de
valoriser la sortie à bac+3
vers le monde de l'entreprise ; une
spécialisation
proche du programme des maîtrises devrait être
réservée à bac + 5, le DEA pouvant être
préparé en plus au cours de la 5e année ;
- s'agissant des
personnels de l'université
, il est
préconisé de limiter les
heures complémentaires
des
universitaires et de recruter massivement de jeunes maîtres de
conférences à partir du vivier des doctorants (de nombreux
enseignants de DEUG et d'IUT multiplient en effet les heures
complémentaires pour bénéficier de la prime
pédagogique) le coût de l'heure complémentaire étant
par ailleurs pour l'Etat bien inférieur à celui de l'heure
" statutaire " ;
- on souligne que les
contrats pédagogiques
sont attribués
au niveau local souvent sans contrôle effectif des capacités
pédagogiques des candidats, lequel pourrait d'ailleurs être
exercé par les étudiants, alors que l'attribution de primes
d'encadrement doctoral est subordonnée à un examen sérieux
du dossier de l'enseignant-chercheur par un groupe d'experts ;
- en outre, la multiplication d'heures complémentaires se traduit
souvent par une " répétition de TD et de TP " et
l'enseignant, qui n'est plus chercheur, perd ses
capacités
d'innovation
en devenant " adepte du ronronnement
ambiant " : ce
comportement se retrouve parfois chez certains PRAG ou certifié
intervenant à l'université ;
- à l'inverse, une
transformation des heures
complémentaires
en postes statutaires, permettant le recrutement de
jeunes maîtres de conférences, entraînerait un foisonnement
d'idées, une stimulation des enseignants plus âgés, et une
meilleure répartition de la gestion des tâches pédagogiques
et administratives de nature à moderniser les méthodes
d'enseignement et à développer les laboratoires de
recherche ;
- on préconise également de
supprimer le système de
primes
qui tend à diviser les universitaires ou de les
intégrer dans le salaire des enseignants-chercheurs : des
décharges d'enseignement
sont proposées pour ceux qui
s'investiraient dans des tâches pédagogiques, administratives ou
de recherche et l'ensemble de ces activités serait pris en compte dans
les promotions des enseignants ;
- il est par ailleurs proposé
d'associer les PRAG et les
certifiés
intervenant dans l'enseignement supérieur,
aux
jurys et concours,
notamment pour la présidence du jury des
baccalauréats qui échoit aux enseignants-chercheurs des
universités ;
- on propose également d'inciter les personnels des universités
à prendre au cours de leur carrière une
année de
congé rémunérée
pour formation
complémentaire (conversion thématique, recherche, mobilité
vers l'industrie ou vers une université étrangère) ;
- il est également suggéré une modification du
système de promotion hors-classe des
maîtres de
conférences
, avec un passage à l'ancienneté vers le
corps des professeurs de 2e classe ;
- certains sont opposés à la suppression du
redoublement
en première année de DEUG, afin de prévoir une
année d'adaptation des bacheliers aux méthodes
universitaires : les élèves qui entrent en DEUG
scientifique, comme dans les classes préparatoires, ne sont pas
formés pour y être performants dès la première
année, en raison d'un " gouffre existant entre la terminale et
l'enseignement supérieur " ;
- le contenu des cours dispensés dans les premiers cycles est
jugé beaucoup trop
théorique
, et l'aspect formel des
démonstrations peut " même dégoûter les
élèves des matières concernées " : on ne
souhaite pas cependant un " enseignement à l'américaine ou
à l'allemande où il n'y a quasiment plus que du
pratique " ;
- certains considèrent que
l'accès à
l'université
doit rester totalement libre, la sélection
s'effectuant naturellement, notamment par l'abandon d'études et
" une élite se constituant inévitablement " ;
- on souligne
l'insuffisance de l'enseignement de l'anglais
à
l'université en DEUG, en licence, en maîtrise et en DEA et on
propose de recourir aux chaînes télévisées
américaines ou anglaises et à un enseignement dispensé par
des étudiants américains ou anglais comportant " un peu
d'écrit et beaucoup d'oral " ;
- le
DEUG est jugé trop diversifié
et certains
préconisent une " redistribution des cartes " en proposant
une
formation technologique ou plus professionnelle en sciences, un enseignement un
peu plus théorique en IUT et la possibilité, après un DUT,
de réintégrer l'université pour obtenir une licence.
*
* *
VIII. SYNTHÈSE DES MESSAGES REÇUS, VIA LE
RÉSEAU INTERNET,
PAR LA MISSION D'INFORMATION ENTRE LE 23 MAI ET LE
4 JUIN 1996
Au cours de cette dernière période, la mission
d'information a reçu cinq nouveaux messages, en réponse à
son questionnaire du 6 mai dernier et à la synthèse des messages.
La présente synthèse sera la septième et dernière
de la consultation et devrait constituer le point final d'un dialogue
engagé depuis le 22 février 1996 entre la mission d'information
et ses correspondants.
Au total, 152 messages auront été envoyés à la
mission et 262 demandes de synthèse auront été
déposées sur le serveur du Sénat.
La mission d'information ne peut donc que se féliciter de la
réussite d'une consultation d'un type inédit qui lui a permis de
recueillir les observations et les propositions directes des acteurs et des
usagers du système universitaire, et de compléter ses
informations recueillies parallèlement au cours d'auditions
traditionnelles.
Elle tient à remercier l'ensemble de ses correspondants pour la
qualité, le suivi et l'intérêt de leurs interventions et
remarque que de nombreuses interventions ont souligné le
caractère novateur de cette initiative du Sénat.
A. LES RÉPONSES COMPLÉMENTAIRES APPORTÉES AU QUESTIONNAIRE DU 6 MAI 1996
1. Quelle devrait être la part respective des
différents types d'enseignants dans les premiers cycles et notamment la
ventilation entre les enseignants-chercheurs et les professeurs
agrégés du secondaire ?
&n
bsp; &nbs
p;
Seriez-vous favorable à la
généralisation d'un tutorat en premier cycle ?
- certains estiment que le
recours aux PRAG est inévitable
du
fait des " carences en enseignants " et que ceux-ci
devraient surtout
participer à l'encadrement des TD, alors que les cours devraient rester
l'apanage des enseignants-chercheurs : si la présence des
chercheurs apparaît indispensable dans certaines disciplines
évolutives, comme l'informatique, ceux-ci sont jugés moins
nécessaires en mathématiques, par exemple ;
- on considère que les
chercheurs
devraient s'investir davantage
dans leur
fonction d'enseignement
afin de remédier à
l'absentéisme des étudiants ;
- on souligne le caractère mesquin des "
querelles de
privilèges
" développées par certains
correspondants entre les enseignants-chercheurs et les PRAG, et aussi
l'intérêt de généraliser le
tutorat
, comme le
fait l'université britannique ;
- d'autres remarquent que certains enseignants-chercheurs s'investissent au
contraire dans des
tâches pédagogiques
en premier cycle
mais constatent que ces activités ne sont pas prises en compte et
même les pénalisent dans le
déroulement de leur
carrière
, en les empêchant d'être
" productifs " au titre de la recherche qui reste le seul
critère d'attribution des promotions internes : la substitution des
PRAG aux enseignants-chercheurs risque de " secondariser "
les
premiers cycles, sans améliorer la prise en compte de la dimension
" humaine " et l'orientation des étudiants ;
- on estime que le
tutorat
pourrait être développé
dans tous les premiers cycles, ce qui ne signifie pas que cette formule devrait
bénéficier systématiquement à tous les
étudiants : certains n'ont nul besoin d'aide et il paraît
indispensable de laisser s'épanouir ceux qui font preuve d'initiative et
d'innovation et qui seront les chercheurs de demain ;
- certains soulignent également la lourdeur de l'investissement des
enseignants-chercheurs dans des
tâches pédagogiques
qui
exigent une disponibilité totale, un " déploiement
d'énergie intense " au détriment du temps consacré
à la recherche et donc de la carrière de ceux qui effectuent ce
choix ;
- d'autres rappellent que la
vocation des PRAG est d'enseigner dans le
secondaire
mais admettent que ceux-ci pourraient être utilisés
en première année de premier cycle pour faciliter le passage du
lycée à l'université, du " bachotage " à
la " réflexion " ;
- on estime également qu'un tutorat en première année,
assuré par des PRAG, permettrait d'y réduire l'échec en
apportant une
aide méthodologique
à des étudiants
souvent démoralisés.
2. Quels seraient les moyens de renforcer la motivation des étudiants
dans les premiers cycles ?
- certains préconisent un
encadrement
inspiré des
méthodes de certaines universités privées, sans toutefois
rétablir un environnement scolaire : le lycée devrait
développer
l'autonomie de ses élèves
et la
motivation des étudiants devrait se concrétiser lors de leur
inscription dans une filière ;
- la
participation des étudiants au financement des études
n'est pas considérée d'une manière générale
comme de nature à renforcer leur motivation, et on remarque que les
problèmes d'éloignement constituent des handicaps qui doivent
être compensés par des aides ;
- d'autres proposent une
orientation plus directive
pour les seuls
étudiants en situation d'échec et un
encadrement
renforcé
pour ceux qui ont échoué à un examen :
tous les étudiants n'ont pas besoin d'être
" maternés ", notamment les esprits originaux et
brillants ;
- une plus grande participation financière des étudiants à
leurs études tendrait à privilégier les choix des familles
plutôt que ceux des étudiants : une
autonomie
financière
permettrait d'aider ceux qui optent pour des formations
correspondant à leur vocation lorsqu'elles sont dispensées dans
des établissements géographiquement éloignés de
leur domicile ;
- certains considèrent que l'absence de sélection entraîne
une
démotivation
des étudiants qui s'orientent par
défaut vers des disciplines " neuves " : l'institution
d'un numerus clausus permettrait d'adapter les capacités des
universités à celles du marché du travail, et les
études menant à un emploi sont jugées
particulièrement motivantes ;
- on estime que la formule des
prêts d'honneur
est envisageable
dans des filières débouchant directement sur un emploi
(écoles d'ingénieurs ...) mais son danger est
souligné dans le cas contraire ;
- certains considèrent que
l'absence de sélection
tend
à faire de l'université une " bande d'arrêt
d'urgence " pour tous les étudiants ayant été
refusés dans les filières sélectives et que leur
motivation dans ce cas ne peut qu'être une
motivation par
défaut
: on note qu'un projet d'études couplé
à la possibilité de réintégrer le cursus des
" grandes écoles " constituerait une motivation
supplémentaire pour les étudiants ;
- on suggère des
possibilités de réorientation
en
cours ou en fin de première année de premier cycle afin de
réduire l'échec par " manque d'intérêt ",
ainsi qu'un couplage projet d'étude-tutorat qui permettrait de
réduire la rupture lycée-université ;
3. Quelles devraient être, selon vous, les vocations principales des
antennes universitaires délocalisées ?
- Certains soulignent l'intérêt de ces
enseignements de
proximité
mais estiment que la
qualité
des formations
des antennes universitaires devrait être identique à celle des
universités-mères et préconisent une certaine
spécialisation
dans des domaines de pointe ;
- d'autres proposent que les antennes dispensent une
formation
généraliste et professionnelle
orientée vers des
emplois locaux et régionaux, assortie de stages
ouvrant sur
les activités d'excellence pour les étudiants les plus
motivés, les seconds cycles étant réservés aux
universités de rattachement ;
- en sens inverse, on estime que ces formations ne devraient pas être
uniquement orientées vers les emplois locaux qui sont par nature
fragiles et on propose plutôt un
tronc commun de formation
,
identique à celui proposé dans les
universités-mères et accompagné d'enseignements
spécifiques ;
- les
filières d'excellence
décentralisées
suscitent par ailleurs un certain scepticisme et on rappelle que les grands
pôles universitaires sont préférés à des
centres délocalisés situés dans des régions peu
prisées ;
- d'autres considèrent que la vocation des antennes est de permettre une
délocalisation d'une partie des enseignements de l'université de
rattachement et de faciliter
le passage entre un enseignement secondaire de
proximité et un enseignement universitaire plus
éloigné
du domicile, étant rappelé que les
deuxièmes et troisièmes cycles relèvent plutôt de la
vocation des universités-mères ;
B. LES RÉACTIONS À LA SYNTHÈSE DES MESSAGES ET LES REMARQUES GÉNÉRALES SUR LES TRAVAUX DE LA MISSION D'INFORMATION
- on rappelle que les
diplômés d'IUT
ont
la possibilité d'intégrer l'université mais que ceux-ci
sont souvent tenus responsables par les universitaires des taux
élevés d'échec en fac : les équivalences
accordées aux étudiants titulaires d'un DUT le sont avec
parcimonie, notamment dans les formations tertiaires, à l'exception de
la filière des IUP ;
- certains proposent de
transformer les heures complémentaires en
postes,
au bénéfice des jeunes chercheurs, s'interrogent sur
le bien-fondé et la nécessité de ces heures
complémentaires et préconisent des mesures radicales pour
sanctionner l'absentéisme de certains enseignants qui oublient les
exigences de leur fonction ;
- on signale que les enseignants ont la possibilité de
valoriser
leurs " tâches administratives
" ;
- d'autres considèrent que la
modulation des bourses
en fonction
des résultats universitaires serait de nature à renforcer la
motivation des étudiants de premier cycle ;
- certains s'interrogent sur le
sort des étudiants qui seraient
écartés
de l'université du fait d'un système
d'orientation trop " radical " ;
- on souligne l'intérêt d'un cursus
" décalé ", d'une amélioration de l'enseignement
de l'anglais et de l'apprentissage de la " mobilité
géographique et professionnelle " par les étudiants ;
- d'autres suggèrent de
poursuivre cette consultation
sur les
problèmes du premier cycle, qui permet d'interroger les étudiants
non syndiqués et de l
'élargir
aux problèmes des
deuxièmes cycles et de la maîtrise qui offrent peu de
débouchés sur le marché de l'emploi.
ANNEXE III
I. COMPTE-RENDU DU DÉPLACEMENT DE LA MISSION D'INFORMATION À HEIDELBERG
Une délégation de la mission d'information a
effectué un déplacement à Heidelberg les 28 et 29 mai 1996.
Sa composition était la suivante :
- M. Jean-Pierre
Camoin
, co-rapporteur ;
- M. Jean
Bernadaux
, co-rapporteur ;
- M. Ivan
Renar
;
- M. Philippe
Richert
;
- M. Daniel
Eckenspieller
.
Le programme de la mission
Mardi 28 mai 1996
- 11 heures : accueil à l'aéroport de Francfort, par le
consul adjoint, par M. Cherqui, directeur de
l'Institut français
de Heidelberg
, et par M. Bastrios, directeur adjoint ;
- 15 heures : séance de travail avec M. Netzold, directeur du
centre d'information et d'orientation professionnelle de l'agence pour
l'emploi
de Heidelberg, et Mme Heine, chargée de
l'orientation
dans les lycées
;
- 17 h 30 : présentation du
programme
Magister im
Beruf
, par le professeur Arnold Rothe au séminaire d'études
romanes de l'université de Heidelberg.
Mercredi 29 mai 1996
- 9 heures 30 : présentation du
système d'orientation des
étudiants de premier cycle
à l'université de
Heidelberg, par M. Raban von der Malsburg et Mme le docteur Dagmar Diehl
au Rectorat de l'Université ;
- 11 h15 : rencontre avec Mme Beate Weber,
maire
de
Heidelberg ;
- 12 h 15 : réception donnée par M. Peter Ulmer,
recteur
de l'université
de Heidelberg, au rectorat, avec signature du livre
d'or de l'université ;
- 13 heures : déjeuner offert par M. Peter Ulmer, recteur de
l'université de Heidelberg, à la villa Paensgen ;
- 15 heures : présentation du
système d'orientation des
étudiants en médecine
, à l'université de
Heidelberg, par Mme Schneider, et rencontre avec deux étudiantes
françaises, dans le cadre du programme d'échanges Erasmus.
*
* *
II. LE COMPTE-RENDU DES RÉUNIONS DE TRAVAIL
I. PRESENTATION DES ACTIVITES DU CENTRE D'INFORMATION ET
D'ORIENTATION PROFESSIONNELLE DE L'AGENCE POUR L'EMPLOI DE HEIDELBERG
Le centre, outre ses compétences en matière de placement et
d'indemnisation du chômage exerce une fonction de conseil et
d'orientation et, fournit une information aux élèves de
l'enseignement secondaire.
Les élèves de première bénéficient d'une
information d'une durée de deux heures par semaine et peuvent obtenir
une information plus individualisée adaptée à leurs
besoins et à leurs capacités, dispensée par des
conseillers d'orientation spécialisés.
Les bacheliers et les étudiants peuvent bénéficier du
système d'orientation générale post-bac qui les dirige
vers une filière universitaire, vers une formation en entreprise ou vers
une école professionnelle utilisant la formule de l'apprentissage.
Le système a également compétence pour orienter les
handicapés.
Le placement en apprentissage est subordonné au nombre de postes
proposés par les entreprises et aux besoins de ces dernières.
L'information est dispensée à l'occasion d'entretiens
individualisés et s'appuie sur une documentation générale
ou plus spécialisée portant sur 485 métiers (dossiers,
ouvrages, technologies informatiques, banques de données
actualisées relatives aux formations initiales et continues offertes sur
l'ensemble du territoire allemand).
Le bilan d'activité du centre d'information professionnelle de
Heidelberg pour 1995 s'établit comme suit : 54 réunions ont
été consacrées à l'information des parents
d'élèves, 66 conférences ont été
organisées, 23.000 jeunes ont eu recours au centre, 7.300 se sont
déplacés pour consulter ses sources documentaires, 2.500
d'entre-eux souhaitant se diriger vers l'apprentissage, 8.500 entretiens
individualisés et 2.500 entretiens de placement ont
été accordés.
Des conférences sont organisées par le centre, principalement
pour les élèves de première et de terminale, et sont
consacrées notamment aux programmes européens Erasmus et Leonardo
da Vinci.
L'accès à l'université est libre sous réserve de
l'existence de numerus clausus dans certaines disciplines ; les
perspectives de débouchés des filières ne sont pas prises
en compte dans les choix des bacheliers mais sont à l'origine de
réorientations en cours d'études, certains étudiants
passant par exemple de l'apprentissage à l'université sans que
leurs décisions se trouvent nécessairement dictées par des
choix professionnels rationnels.
A Heidelberg, 17 % des diplômés de l'enseignement
supérieur sont à la recherche d'un emploi et 30 % des
étudiants inscrits sortent de l'université sans aucun
diplôme.
II. LE PROGRAMME " MAGISTER IM BERUF "
Si la plupart des étudiants préparent la maîtrise, le
système universitaire allemand apparaît moins structuré que
le système français notamment au niveau des examens
intermédiaires, et laisse aux étudiants une très grande
liberté dans le choix des unités de valeur.
En dépit de l'existence d'un service central d'orientation et
d'organismes d'information et d'orientation propres à chaque institut,
un grand nombre d'étudiants en maîtrise n'ont pas d'objectifs
professionnels biens définis ; les choix effectués vers
certaines disciplines (édition, communication, ...) ne tiennent pas
compte des débouchés offerts et négligent les
" qualifications-clés ", notamment les langues vivantes.
Diverses initiatives ont été prises pour rapprocher
l'université et les entreprises dans le cadre de l'opération
" maîtrise et professions " : stages étudiants
rémunérés, programmes d'information des étudiants,
cours intensifs à effectifs réduits consacrés au
fonctionnement de l'entreprise.
Cependant la crise économique qui n'épargne pas l'Allemagne
entraîne une réduction du nombre des stages proposés :
250 stages ont été organisés depuis quatre ans au titre du
programme pour répondre à une demande de 6.000 étudiants
dont un grand nombre sont ainsi conduits à rechercher eux-mêmes
des stages en entreprise.
Certains instituts proposent par ailleurs des cours de formation
professionnelle, financés par le Land et l'université, pour une
durée limitée à quatre ans mais cette formule n'assure pas
nécessairement un débouché professionnel à ses
bénéficiaires. Les stages intensifs accueillent sans
sélection les étudiants dans l'ordre de leur inscription (30 au
maximum) ; seuls certains sont rémunérés ce qui
conduit de nombreux étudiants à exercer une activité
salariée parallèle.
Par ailleurs, les chambres consulaires peuvent proposer des formations
complémentaires aux étudiants sans que celles-ci constituent un
véritable cursus d'études, comparable à celui des
écoles de commerce françaises.
Ces magistères sont organisés par des associations privées
regroupant des professeurs et des représentants des employeurs mais les
entreprises n'ont aucune obligation d'accueillir les étudiants à
l'issue de ces cours intensifs.
Si le pourcentage des élèves qui obtiennent l'Abitur est
très inférieur à celui du baccalauréat
français, la politique de l'enseignement menée en Allemagne
repose sur le souci d'une " académisation de la population "
et de donner une chance de promotion à tous les jeunes, y compris en les
orientant vers les métiers manuels et l'artisanat qui nécessitent
désormais un haut niveau de formation ; cependant la forte
progression du nombre des diplômés de l'enseignement
supérieur se traduit aussi par une certaine déqualification dans
les emplois proposés et un développement du chômage
temporaire.
La politique menée en faveur de la revalorisation de l'artisanat tend
à faciliter le passage des apprentis à l'université
notamment pour les former à certaines disciplines désormais
indispensables comme la gestion.
Il convient également de remarquer que les étudiants sont en
moyenne plus âgés que leurs homologues français, du fait
notamment d'une organisation plus libérale des études, de la
pratique des stages à l'étranger et d'une " liberté
académique " héritée du début du XIXe
siècle et acquise contre les pouvoirs de l'époque, qui a
contribué à asseoir la renommée des universités
traditionnelles.
Il reste que les universités sont confrontées aujourd'hui au
phénomène de la massification de l'enseignement supérieur.
S'agissant de l'organisation des études, les cours font l'objet d'une
présentation semestrielle détaillée dans un livret remis
aux étudiants ; les nouveaux étudiants peuvent s'adresser
par ailleurs à un service central d'orientation comportant notamment un
département de psychologie.
Un projet-pilote tend à développer la formule du tutorat, qui est
assuré pendant le premier semestre d'études par des
étudiants avancés, les actions d'orientation étant
poursuivies pendant la durée des études.
L'institution du " Magister im Beruf " n'est pas spécifique
à Heidelberg ou à Fribourg puisqu'une vingtaine
d'universités allemandes ont engagé des initiatives analogues,
prises au plan local : des échanges se développent entre
universités, notamment avec celle de Mannheim et une concertation est
recherchée entre les services d'orientation.
La plupart des Länder envisagent cependant d'encadrer plus strictement le
fonctionnement de leurs structures universitaires en raison des incidences
financières de la massification de l'enseignement
supérieur ; chaque université conserve cependant son
autonomie pour définir chaque maîtrise et les examens d'Etat sont
homologués au niveau du Land.
Les universités sont tenues d'accueillir l'ensemble des bacheliers en
fonction de leurs capacités d'accueil, l'Abitur restant le premier grade
universitaire ; en l'absence de numerus clausus, certains responsables
universitaires souhaiteraient cependant rendre plus sévère le
baccalauréat.
Le système d'aide est constitué d'une part de bourses
fédérales dont le montant varie en fonction des revenus des
familles et d'autre part de prêts remboursables par les étudiants
à partir de leur entrée dans la vie active.
Ce système est complété par des aides multiples
accordées par les syndicats, les entreprises, et les églises -
les prêts accordés par ces dernières n'étant
généralement pas remboursables - et par des aides
spécifiques consacrées par exemple à l'achat de livres.
Les bibliothèques universitaires fonctionnent de manière
satisfaisante : elles sont ouvertes jusqu'à 22 heures ainsi que le
samedi et disposent de personnels en nombre suffisant, ce qui n'est pas le cas
des bibliothèques des instituts qui souvent ne peuvent fonctionner
qu'avec l'aide des étudiants.
L'université reste par ailleurs attachée à ses traditions,
même si le port de la toge n'est plus pratiqué depuis dix ans,
sauf par les chercheurs, et si les familles modestes déplorent le recul
de ces traditions.
S'agissant de l'hébergement, 80 % des étudiants inscrits
à Heidelberg sont domiciliés dans un rayon de 150 km autour de
l'université alors que dans le passé existait une
" obligation morale " de choisir l'université la plus
lointaine ; aujourd'hui ce souci de mobilité s'est réduit et
la qualité des enseignements est davantage prise en compte que le
prestige de certains sites universitaires.
L'université de Heidelberg, comme beaucoup d'universités
allemandes, ignorait le système des résidences universitaires et
privilégiait l'hébergement locatif ; cependant la
démocratisation de l'enseignement supérieur s'est traduite par la
nécessité de construire des résidences universitaires
implantées à la périphérie. La durée du
séjour y est limitée à deux ans et les nouveaux
étudiants en sont exclus. On assiste actuellement à un
développement de la location collective d'appartements, ce
système apparaissant particulièrement adapté au monde
étudiant.
L'intégration des universités de la RDA s'est
réalisée par une " occidentalisation " des structures
universitaires, et notamment des " lycées avancés ", la
recherche restant principalement localisée dans les académies
scientifiques.
Tous les professeurs sont d'origine universitaire, à l'exception de ceux
des grandes écoles spécialisées ou de quelques
maîtres de conférences issus des lycées : les postes
libres sont proposés dans le bulletin officiel du Land mais les postes
de maîtres de conférences qui sont offerts restent peu nombreux.
Enfin, il convient de rappeler que la fondation de l'Université de
Heidelberg résulte du grand schisme, conséquence de
l'élection de deux papes qui divisa la chrétienté
occidentale en deux camps ennemis et au refus de la Sorbonne de conférer
leurs grades aux écoliers de la " nation allemande ".
III. LA PRESENTATION DU SYSTEME D'ORIENTATION DES ETUDIANTS DE PREMIER
CYCLE
D'après les indications fournies à la délégation de
la mission, la mise en place d'un système d'orientation et de formation
continue, qui relève du rectorat, n'a pas permis de réduire de
manière sensible l'échec universitaire. Ce système
d'orientation intervient à plusieurs stades de la scolarité et du
cursus universitaire :
-
l'information des lycéens
: 40 % des lycéens
auraient recours à des conseils d'orientation et des réunions
d'information sont organisées en mars à leur intention avec les
responsables de chaque discipline universitaire ; ces réunions ont
concerné pour les trois universités de Mannheim, Ludwighaffen et
Heidelberg près de 9000 lycéens, soit la moitié des
bacheliers potentiels.
L'information est dispensée à partir de dossiers documentaires,
du réseau Internet, de conférences et les futurs bacheliers ont
la possibilité de bénéficier d'entretiens
individualisés d'orientation ;
-
en début d'études
, les instituts organisent des
réunions d'information animées par des universitaires et des
étudiants expérimentés qui peuvent être
prolongées par des conseils personnalisés.
Les premiers cycles ne comportent pas de " tronc commun " en
première année et les décisions d'orientation initiales
des nouveaux étudiants restent très incertaines : la
majorité des inscrits attendent des éléments nouveaux pour
affiner leur choix ;
-
en cours d'études
, les réorientations sont
fréquentes et se traduisent soit par des changements de disciplines,
soit même après quatre ou cinq ans d'études, par un nouveau
départ dans un autre cursus universitaire ;
-
en fin d'études
, l'orientation résulte de cours de
préparation à la vie professionnelle, d'informations sur les
différents secteurs d'activité et de stages pratiques notamment
en économie, pour les étudiants des filières
littéraires.
Ce dispositif d'orientation finale a pour objectif de motiver les
étudiants dans la préparation aux examens, dans une perspective
d'insertion professionnelle, mais nombre d'entre eux sont accaparés par
des activités salariés exercées parallèlement
à leurs études.
En réponse aux interrogations des membres de la
délégation, il a été précisé que
36 % des élèves obtenaient l'Abitur ; ce pourcentage
n'était que de 6 % il y a trente ans et devrait passer à
45 % dans quelques années car 65 % des élèves du
secondaire souhaitent aujourd'hui poursuivre des études
supérieures et 80 % des bacheliers s'y engagent effectivement.
De nombreux bacheliers n'entrent à l'université que trois ou
quatre années après avoir obtenu l'Abitur ou après avoir
rempli leurs obligations militaires ou effectué un service civil ;
cette période est mise à profit pour séjourner et suivre
des stages à l'étranger : l'entrée à
l'université se réalise ainsi, en moyenne, à 25 ans et
demi et 40 % des étudiants changent d'orientation au cours des deux
premières années sans que les efforts menés en
matière d'orientation modifient sensiblement ces comportements.
De nombreux bacheliers s'orientent en fait par défaut vers
l'université faute d'avoir été acceptés dans des
filières technologiques ou économiques, notamment dans les
universités techniques qui disposent d'une capacité d'accueil
réduite, et du fait de perspectives d'insertion professionnelle
aujourd'hui plus restreintes.
Les bacheliers sont souvent mal préparés à suivre
l'enseignement de ces universités techniques sélectives qui
accueillent aussi des candidats plus âgés ayant capitalisé
des acquis professionnels.
De nombreux étudiants cherchent des voies alternatives de formation au
sein de l'université : leur manque de motivation se traduit par
exemple par un taux d'abandon d'études de 75 % dans des disciplines
comme la physique, et 40 % des étudiants en " langues
romanes " n'assistent jamais aux cours même s'ils peuvent se
présenter à l'examen de fin d'année. Une meilleure
orientation et une organisation plus motivante des études apparaissent
donc indispensables.
Par ailleurs, la rupture entre le monde du lycée et celui de
l'université apparaît très forte, même si la
méthodologie dans certaines disciplines est commune entre les deux
ordres d'enseignement et si le taux d'échec en premier cycle y est
moindre.
Les responsables universitaires s'opposent cependant fortement à une
" secondarisation " des premiers cycles.
La politique d'orientation qui y est menée s'effectue dans des groupes
de travail qui sont confiés à des animateurs et par un
contrôle des connaissances de base à la fin de la première
année. Le cursus ultérieur est plus libéral mais comporte
des travaux dirigés, et reste principalement fondé sur le travail
individuel des étudiants.
Certains préconisent de s'assurer, en amont, de la motivation des
nouveaux étudiants, de mettre en place une année d'orientation et
un véritable examen en fin de première année : la
législation du Land de Bade-Wurtemberg devrait être
modifiée en ce sens dans les deux ans à venir.
Des actions de soutien aux étudiants ont cependant été
engagées depuis dix ans mais les résultats constatés se
sont révélés décevants, et les responsables
universitaires considèrent que les bons étudiants ont
également besoin d'être aidés.
Il a été également indiqué que le coût d'un
étudiant était inférieur à celui d'un jeune
chômeur indemnisé et que l'investissement en faveur de
l'enseignement supérieur était évidemment plus
" rentable " ; les perspectives d'emploi des étudiants
apparaissent analogues à celles des non-diplômés, avec
toutefois la perspective de se voir proposer un salaire plus
élevé.
Les aides accordées aux étudiants consistent en bourses d'Etat
dont le montant a été récemment réduit, et la
moitié des étudiants exercent parallèlement une
activité salariée, le quart d'entre eux y étant
contraints ; cette proportion est considérée comme excessive
par les responsables universitaires qui demandent un renforcement des moyens
accordés aux bourses.
Certains préconisent une augmentation des droits d'inscription qui
pourraient ainsi représenter 1.000 DM par semestre pour les familles les
plus aisées, afin de remédier à l'injustice de la
situation actuelle qui bénéficie notamment aux étudiants
aisés.
Certains suggèrent d'augmenter le nombre des boursiers, de relever le
montant des bourses et de moduler celui-ci en fonction des résultats des
étudiants : ceci permettrait de réduire l'importance du
travail salarié exercé parallèlement par les
étudiants qui sont conduits à négliger leurs
études, notamment au cours de la période de la préparation
des examens, des dégrèvements de charges pouvant par ailleurs
être accordés aux employeurs pour les activités
liées au statut étudiant.
Le montant des bourses est par ailleurs jugé insuffisant pour couvrir
les dépenses d'hébergement des étudiants et une proportion
très faible d'entre eux exercent une activité ayant un lien avec
leurs études.
Par ailleurs les activités de recherche interviennent très
tôt dans les cursus d'études à l'exception de la
médecine ou du droit.
L'université de Heidelberg accueille 29.000 étudiants dont 12.000
peuvent être considérés comme de très bons
éléments. Les universitaires qui craignent une suppression de
certains postes tentent de s'opposer à la réduction de leurs
moyens et estiment par exemple que 45 % des étudiants en
mathématiques passent leurs examens (alors que les statistiques avancent
un pourcentage de 18 % et indiquent qu'un étudiant inscrit sur
trois assiste aux cours).
Les interlocuteurs de la délégation de la mission ont fait part
de leur scepticisme quant aux possibilités d'évolution de
l'université et ont rappelé que depuis le XVIe siècle,
seules vingt-cinq institutions avaient survécu : le Parlement
anglais, l'Eglise catholique et vingt-trois établissements
universitaires...
Selon certains, il conviendrait de moduler les moyens alloués à
l'université selon les résultats obtenus et selon les
filières, en s'inspirant par exemple des aides apportées à
la recherche : une évaluation précise des enseignements et
des activités de recherche apparaît indispensable dans une telle
perspective.
IV. LE SYSTEME D'ORIENTATION DES ETUDIANTS EN MEDECINE
Les lycéens qui se destinent à la médecine
bénéficient dans une première phase d'orientation, de deux
semaines d'information chaque année qui sont animées par des
universitaires et des étudiants avancés dans leurs études
médicales : ces semaines d'orientation organisées par de
petits groupes, permettent aux lycéens de visiter les locaux
universitaires, les bibliothèques et ont aussi pour objectif de les
" décomplexer " par rapport aux professeurs
d'université.
Les bacheliers souhaitant s'engager dans des études médicales
transmettent leur candidature à un organisme fédéral et
doivent passer des tests spécifiques : 10 % des places sont
attribuées en fonction des résultats obtenus aux tests, 45 %
en prenant en compte la note moyenne obtenue aux tests et les notes du
baccalauréat et 15 % à l'issue d'entretiens de
sélection, le reste des places disponibles étant pourvu en
fonction des listes d'attente. Toute notion de sélection sur examen est
donc en principe exclue dans le système de médecine allemand. Les
tests portent sur les connaissances scientifiques, sur les capacités
d'organisation et de réaction rapide des candidats face à des
situations imprévues.
Les résultats des tests recoupent ceux du baccalauréat :
30.000 bacheliers se portent candidats aux études médicales dans
l'ensemble du pays et certains universitaires souhaitent l'abandon de la
formule des tests au profit de la seule prise en compte des résultats du
baccalauréat.
Il n'existe aucun numerus clausus qui serait défini à partir des
besoins sanitaires du pays, et les facultés de médecine
accueillent dans la limite des capacités, évaluées
notamment en termes de personnels et de lits, les candidats qui satisfont aux
critères d'admission : il en résulte que les
établissements assurent la formation d'un nombre de médecins
supérieur de 50 % aux besoins, soit 8.000 médecins par an,
ce qui tend à renchérir le coût du système sanitaire.
Les coûts sanitaires sont évalués à la suite de
négociations entre les partenaires du système de
sécurité sociale et les médecins ; l'ouverture de
nouvelles sections hospitalières se réalisaient dans le
passé en augmentant les prix de journée mais sous la pression des
employeurs, une loi vient d'être promulguée pour limiter la
progression des dépenses de santé (soins dentaires, utilisation
de médicaments génériques, réduction des
dépenses hospitalières).
Cette législation plus restrictive a réduit également la
liberté d'installation de nouveaux médecins, dont le nombre est
arrêté pour assurer la couverture médicale des
différentes régions : de nombreux médecins
s'expatrient en Grande-Bretagne et surtout aux Etats-Unis.
L'orientation se poursuit jusqu'à la fin du cursus, l'internat ne
constituant pas un concours spécial : des stages optionnels sont
proposés aux étudiants pour les aider à choisir leur sujet
de thèse, poursuivre leur spécialisation ou s'engager dans la
recherche. Les médecins généralistes, pour leur part,
doivent obtenir un doctorat mais n'ont pas à soutenir une thèse
d'Etat. Le taux d'échec en médecine serait de l'ordre de 5
à 8 % et les étudiants ont la possibilité de se
présenter trois fois à chaque examen.
La profession médicale conserve son prestige et ses avantages financiers
(environ 80.000 DM par an auxquels il convient d'ajouter 40.000 DM au titre des
heures supplémentaires), même si une réduction de ces
heures supplémentaires est aujourd'hui envisagée.
Les établissements accueillent un nombre non négligeable
d'étudiants étrangers (6 %) provenant notamment de pays
d'Afrique et d'Asie, tandis que la recherche de base se fait plutôt dans
les instituts spécialisés que dans les centres hospitaliers et
universitaires. Les chercheurs enseignent cependant à
l'université et plusieurs médecins de formation, de
l'Université de Heidelberg, ont obtenu un prix Nobel.
ANNEXE IV
III. COMPTE-RENDU DU DÉPLACEMENT D'UNE DÉLÉGATION DE LA MISSION D'INFORMATION DANS L'ACADÉMIE DE LILLE
Une délégation de la mission d'information s'est
rendue à Lille et à Cambrai les 15 et 16 octobre 1996.
Sa
composition
était la suivante :
- M. Adrien Gouteyron, président,
- M. Jean-Pierre Camoin, co-rapporteur,
- M. Jacques Legendre,
- M. Ivan Renar.
Le programme de travail de la mission
9 h 30 Arrivée à Cambrai
Visite des antennes de l'université de Lille II (droit) et de
l'université de Valenciennes (lettres et sciences) ;
12 h Déjeuner à l'hôtel académique, offert par
M. André Varinard, recteur-chancelier, avec les présidents
des six universités de l'académie (Lille I - sciences et
technologies, Lille II - droit et santé, Lille III - lettres,
sciences humaines et arts, Valenciennes et Hainaut - Cambrésis, Artois
et Littoral) ;
14 h 30 Séance de travail à l'université de Lille I
avec les présidents d'université et les vice-présidents
chargés de la formation ;
16 h Audition des responsables des services universitaires d'orientation et
d'information et de la responsable du CIO post-bac ;
17 h Visite du laboratoire d'enseignement multimédia (LEMM) et de
l'atelier technologique d'enseignement (ATE).
IV. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU
SYSTÈME UNIVERSITAIRE
DANS L'ACADÉMIE DE LILLE
On recensait dans l'académie de Lille, au cours de
l'année universitaire 1995-1996, 146.000 étudiants. Ces
effectifs la placent au second rang national immédiatement
derrière l'académie de Paris.
Dans cet ensemble, la population étudiante inscrite dans les six
universités de l'académie de Lille s'établissait à
un peu plus de 95.000 jeunes.
Le système d'enseignement supérieur dans l'académie de
Lille revêt plusieurs spécificités.
I. UNE CROISSANCE TRÈS RAPIDE DES EFFECTIFS
A la rentrée 1985-1986, on dénombrait environ
80.000 étudiants dans l'académie de Lille dont 51.000 en
université. Depuis 10 ans, les effectifs globaux se sont donc
accrus de près de 83 % alors que la population accueillie en
université augmentait de plus de 86 %.
Cette progression très soutenue s'explique à la fois par la
démographie d'une région très jeune et par la
résorption des écarts négatifs par rapport aux moyennes
nationales que connaissait l'académie de Lille en termes d'accès
au baccalauréat et de poursuite d'études dans l'enseignement
supérieur.
Sur les dernières années, la croissance des effectifs s'explique
moins par l'importance du flux de nouveaux bacheliers que par la plus grande
propension des jeunes à s'inscrire dans les second et troisième
cycles.
S'agissant de l'année 1996/1997, la diminution du nombre de bacheliers
est de nature à peser sur l'évolution des effectifs. Toutefois,
si une diminution du nombre de nouveaux inscrits est prévisible,
différents phénomènes sont susceptibles de contrebalancer,
au plan des effectifs globaux, cette tendance, tels que les taux de poursuites
d'études en deuxième et troisième cycles.
La croissance des effectifs d'étudiants en 1996/97 devrait être
plus modérée que par le passé et résultera surtout
de l'évolution des universités nouvelles bien que la croissance
de leur population étudiante soit susceptible de connaître une
inflexion sensible.
Cependant, les prospectives réalisées dans le cadre de
l'élaboration du schéma régional de l'enseignement
supérieur et de la recherche établissent que la population
étudiante s'accroîtra encore significativement à l'horizon
2005, essentiellement au travers des développements que sont
appelés à connaître les second et troisième cycles.
II. UN TISSU D'ENSEIGNEMENTS SUPÉRIEURS COMPLEXE
La croissance rapide des effectifs accueillis a induit des modifications
structurelles importantes du système universitaire.
Jusqu'en 1991, l'académie de Lille comptait
4 universités : Lille I, Lille II, Lille III,
ancrées dans la capitale régionale depuis la fin du 19ème
siècle, et Valenciennes créée à la fin des
années soixante.
Ces quatre établissements, compte tenu de la taille et du poids
démographique de la région, avaient progressivement mis en place
des antennes dans les principales villes de l'académie au cours des
années 1970 (Calais, Boulogne, Dunkerque, Cambrai, Béthune, Lens,
Maubeuge).
Le plan " Université 2000 " mis en place pour répondre
aux besoins suscités par la croissance des effectifs a, outre la
réalisation d'un important parc immobilier, permis la création de
deux universités nouvelles à la fin de l'année 1991.
Il s'agit des universités d'Artois et du Littoral qui se sont d'abord
créées en s'appuyant sur les antennes des université
lilloises.
Ce contexte explique l'une de leur originalité, à savoir la
multipolarité. En effet, l'université de l'Artois est
présente sur les sites d'Arras (siège), Béthune, Lens et
Douai, alors que l'université du Littoral s'organise autour des villes
de Dunkerque (siège), Calais, Boulogne-sur-Mer et Saint-Omer.
Ces universités ont permis de constituer une offre d'enseignement
supérieur de proximité dans des zones défavorisées
de la région.
Ces deux universités se sont développées en étroite
symbiose avec leur environnement local. A cet égard, les
collectivités locales se sont révélées de
véritables partenaires de l'Etat pour assurer le développement de
ces deux universités.
Ces deux établissements, s'ils doivent encore être
confortés notamment au niveau de la recherche, constituent un
véritable succès.
Au terme de cinq ans d'existence, ils dispensent un éventail de
formations très variées en premier et second cycles et proposent
déjà des cursus de troisième cycle. Par ailleurs, la
croissance de leurs effectifs s'est révélée
extrêmement soutenue ainsi qu'en témoignent les données
suivantes :
|
1992/1993 |
1993/1994 |
1994/1995 |
1995/1996 |
Université du Littoral |
4.081 |
6.128 |
7.632 |
8.476 |
Université d'Artois |
3.554 |
6.024 |
7.746 |
9.450 |
Ces chiffres établissent que sur 4 ans les
effectifs des universités du Littoral et d'Artois ont respectivement
augmenté de 107 % et 165 %.
A cet égard, on peut noter que l'évolution des effectifs des
universités nouvelles, explique l'essentiel de la croissance de la
population étudiante de l'académie entre 1992 et 1996.
A ce jour, si l'on considère la configuration des universités
nouvelles, les antennes de Cambrai et Maubeuge de l'université de
Valenciennes ainsi que la présence des universités lilloises
à Roubaix, Villeneuve d'Ascq et Tourcoing, on peut estimer que
l'académie de Lille se caractérise par un véritable
réseau régional universitaire.
III. LA VISITE DES ANTENNES UNIVERSITAIRES DE CAMBRAI
D'après les informations recueillies, les étudiants de premier
cycle des antennes de Cambrai sont peu fixés sur la suite à
donner à leurs études et sur leur projet professionnel ; des
expériences ont été engagées depuis deux ou trois
ans pour leur permettre d'affiner leurs souhaits.
D'une manière générale, les étudiants se
positionnent d'abord par rapport aux formations offertes par les antennes. La
création de ces antennes a résulté du constat que les
jeunes du Cambrésis accédaient beaucoup moins à
l'enseignement supérieur que les autres ; elle avait pour ambition
d'offrir aux bacheliers un large éventail de DEUG rattachés
à des pôles d'excellence, ces antennes devant offrir les
mêmes conditions de travail que les universités de rattachement.
Le développement de ces antennes suppose une masse suffisante
d'étudiants dans le bassin de formation et une organisation
spécifique des cursus : c'est ainsi que les DEUG scientifiques
comportent un tronc commun en première année, préalable
à une orientation ultérieure. Ces modalités permettent aux
nouveaux étudiants de s'adapter aux études supérieures
mais soulèvent des problèmes d'organisation. Les DEUG
littéraires et juridiques restent à l'écart de cette
organisation spécifique, car ils se prêtent mal à la mise
en place d'un tronc commun, et sont plus particulièrement
concernés par le phénomène de la poursuite d'études
en deuxième cycle ; ils enregistrent une
" évaporation " importante de leurs étudiants,
notamment en droit.
Cette évaporation se traduit aussi par des redoublements et des
triplements, notamment en AES, dans des proportions proches de celle
constatée dans les universités de rattachement. Par ailleurs, les
universités nouvelles n'offrent pas aux étudiants la même
garantie de poursuite d'études que dans les établissements plus
anciens.
Les étudiants des antennes bénéficient d'une
préparation à l'entrée en deuxième cycle et la
taille humaine des établissements permet de mettre en oeuvre des
initiatives, comme la visite de tribunaux pour les étudiants des
filières juridiques.
Le tutorat s'y développe depuis quelques années et se traduit par
un soutien aux étudiants en difficulté regroupés en petits
groupes et qui est assuré par des étudiants de deuxième
année à la rentrée universitaire.
La participation des étudiants au tutorat est contrôlée, et
cette formule de soutien s'est développée particulièrement
en sciences à Valenciennes mais n'a pas été mise en oeuvre
en droit à Lille II.
Les perspectives de développement de ces antennes doivent tenir compte
d'une évolution démographique en légère
régression, de la demande du tissu industriel local et de la
spécificité du bassin d'emploi du Cambrésis, afin
d'établir un cahier des charges préalable à la
définition de nouvelles formations.
Les antennes universitaires apparaissent ainsi comme des outils de
transformation de l'environnement économique local (centres de transfert
de technologie, pôle des transports terrestres, ouverture aux PME-PMI).
Par ailleurs, l'importance des heures complémentaires en formation
continue justifierait une utilisation des docteurs qui sont actuellement au
chômage.
Après avoir souligné les retombées positives de
l'implantation de ces antennes pour l'animation des villes d'accueil, et le
caractère inédit du concept d'universités multipolaires,
les interlocuteurs de la délégation ont évoqué les
problèmes de la poursuite d'études des étudiants de
premier cycle, de l'articulation des DEUG avec les STS et les IUT et de la
réduction des flux étudiants constatés dans certains DESS
ou DEA.
S'agissant des filières sélectives courtes, les IUT acceptent
80 % des demandes d'inscription. Les efforts d'orientation menés
auprès des lycéens reposent plutôt sur l'information
dispensée par les étudiants dans les établissements
secondaires, que sur les visites des sites universitaires et nécessitent
une réflexion des élèves sur leur projet professionnel, y
compris pour les formations tertiaires.
Par ailleurs, les universités-mères continuent d'exercer une
attraction sur les étudiants du Cambrésis, notamment en LEA et en
histoire, ce qui n'empêche pas d'ailleurs une grande diversité
géographique dans les poursuites d'études ultérieures.
La mission a pu en outre constaté que des réorientations
fréquentes se développaient dans les deux sens entre les
filières courtes et les premiers cycles, notamment en lettres et en LEA,
se traduisant par une forte progression des demandes d'équivalences.
Le renforcement de l'information des étudiants passe par un
développement des services d'information et d'orientation et les
enseignants apparaissent, de manière générale, très
concernés par la réussite de leurs étudiants ; ils
réclament en outre un assouplissement des règles de recrutement
au plan local afin d'assurer une meilleure gestion des carrières.
Certains soulignent enfin la nécessité de relancer la formation
continue, qui n'est pas prise en compte dans l'évolution des moyens
demandés par les universités, et qui est assurée sur un
fort contingent d'heures complémentaires.
IV. LA RÉUNION DE TRAVAIL AVEC LES PRÉSIDENTS
D'UNIVERSITÉ ET LES VICE-PRÉSIDENTS CHARGÉS DE LA FORMATION
M. Losfeld, président de Lille III
, a d'abord indiqué
que son université avait créé à titre
expérimental deux " DEUG larges " en sciences humaines et
sociales qui ont rencontré un succès considérable
auprès des étudiants.
Ces " DEUG d'orientation " associent trois disciplines en
première année (psychologie, histoire, sociologie) et
prévoient une spécialisation en deuxième année
permettant de rejoindre la licence. Son articulation soulève cependant
des problèmes entre les deux années et pour l'accès au
deuxième cycle.
L'université de Lille III propose également une licence
pluridisciplinaire à dominante littéraire qui n'a pas pour objet
exclusif de préparer au concours de professeurs des écoles.
M. Lottin, président de l'université nouvelle d'Artois
, a
indiqué que son université nouvelle était également
confrontée au développement de la poursuite des études
longues : plus de 50 % des titulaires de BTS et environ 65 % des
étudiants poursuivent leurs études et cette fuite en avant peut
également être constatée jusqu'en DEA, faute d'un projet
professionnel pour de nombreux étudiants. Il a par ailleurs
exprimé ses réserves à l'égard des " DEUG
larges " qui préparent mal les étudiants à la licence
et à leur insertion professionnelle, notamment dans les filières
sciences de la vie.
Il a ajouté que la licence pluridisciplinaire expérimentée
dans son université s'adressait à ceux qui ont interrompu leurs
études et a estimé qu'elle ne constituait pas un outil
intellectuel satisfaisant pour les nouveaux bacheliers. Plutôt que
d'opposer DEUG diversifié et DEUG de professionnalisation, il a
indiqué que la poursuite d'études traduisait à la fois un
souci d'épanouissement personnel et de recherche d'un meilleur emploi et
que les universités devaient user avec souplesse de la diversité
des formations.
M. Dubrulle, président de l'université nouvelle du
Littoral,
a noté que les métiers nouveaux appelaient une
polycompétence des étudiants et a exprimé ses
réserves à l'égard d'une professionnalisation des DEUG. Il
a remarqué que 70 % des étudiants d'IUT poursuivaient leurs
études et a préconisé une préparation
spécifique pour ceux qui ont manifesté cette intention dès
le début de la seconde année d'IUT.
Il a également noté que la désaffection qui touche
certains DEUG résultait de la réduction du nombre de postes de
professeurs des écoles offerts et de changements d'attitude en faveur
des études longues. Il a observé à cet égard que
les responsables d'IUT n'incitaient plus leurs étudiants à
rechercher une insertion professionnelle immédiate et que les
entreprises ne jouaient plus le jeu pour les diplômés à
bac + 2 en se contentant seulement de leur proposer des stages qui
correspondaient à la philosophie de la réforme avortée du
CIP.
Il a par ailleurs été rappelé que les modalités
d'entrée en IUP, à bac + 1 n'étaient pas
satisfaisantes et se traduisaient par l'afflux de candidats en situation
d'échec universitaire, peu motivés, notamment dans les
filières tertiaires : ceci conduit les IUP à recruter
à bac + 2, à l'exception des étudiants
recalés en médecine et en pharmacie qui ont cependant obtenu des
résultats satisfaisants. Par ailleurs, si les IUT doivent constituer la
base de la filière technologique supérieure, leur organisation
quelque peu rigide constitue un obstacle à la poursuite d'études
et leur transformation éventuelle en premier cycle supposerait un
aménagement de leurs enseignements.
S'agissant de l' " évaporation " des étudiants en fin
de première année, il a été observé que les
disparitions réelles étaient faibles par rapport aux
réorientations.
En outre, la transformation éventuelle des IUT en premiers cycles ne
devrait pas conduire à supprimer les formations à
bac + 2, même si leurs étudiants sont
" exploités et utilisés comme supplétifs "
déqualifiés par rapport à leurs diplômes, et si par
ailleurs le fonctionnement des DEUST peut être considéré
comme satisfaisant.
Les problèmes de la formation continue ont par ailleurs
été soulignés, et résulteraient pour une large part
de contraintes administratives.
Par ailleurs, la validation des acquis professionnels est diversement mise en
oeuvre selon les disciplines, davantage dans des filières
professionnalisées, comme les sciences de l'éducation, qu'en
lettres et en sciences humaines.
Les interlocuteurs de la délégation ont enfin souligné la
nécessité de revoir le déroulement des carrières
des enseignants-chercheurs et noté en particulier les retards de
carrière enregistrés par les présidents
d'université par rapport à " ceux qui s'épanouissent
auprès des radiateurs de la Bibliothèque nationale ". On ne
saurait en effet confier " plusieurs missions aux
enseignants-chercheurs
et n'évaluer qu'une seule de ces missions ", c'est-à-dire la
recherche.
S'agissant de la formation en alternance, l'académie a
développé l'apprentissage en IUT ainsi que dans les formations
d'ingénieurs ; cette formule donne d'excellents résultats,
mais ne concerne que des effectifs réduits.
L'intérêt du tutorat a également été
souligné, mais ses résultats sont inégaux selon qu'il
concerne l'accueil des étudiants ou leur orientation.
Certains ont souligné la proportion importante des boursiers chez les
primo-entrants dans l'académie ainsi que le problème de la
suppression des bourses en cas de redoublement.
S'agissant du recours aux professeurs agrégés, la situation
diffère selon les disciplines, notamment entre les lettres et les
sciences. Du fait de leurs compétences et de leur expérience de
l'enseignement secondaire, les professeurs agrégés ont permis
d'encadrer efficacement le développement des universités
nouvelles, notamment celle d'Artois, mais leur utilisation ne saurait
être générale et une proportion devrait être
respectée entre ces enseignants du second degré et les
enseignants-chercheurs, la rupture entre le lycée et l'université
devant intervenir à un moment donné pour les nouveaux
étudiants.
Enfin, les relations entre les établissements supérieurs et
secondaires s'établissent davantage au niveau des enseignants des
lycées qu'à celui des proviseurs.
V. AUDITION DES RESPONSABLES DES SERVICES UNIVERSITAIRES D'ORIENTATION ET
D'INFORMATION ET DE LA RESPONSABLE DU " CIO POST-BAC "
Mme Ardoin, responsable du " CIO post-bac "
a d'abord
exposé la philosophie du dispositif
14(
*
)
et a rappelé par ailleurs les modalités de l'opération
" Tremplins ", qui permet d'informer depuis dix ans les
lycéens de première et de terminale sur les professions ;
elle a rappelé que son impact sur le plan régional était
particulièrement important, et que cette initiative avait
été prise pour répondre aux divers " salons de
l'étudiant ". Cette opération se déroule en novembre
et en mars et est complétée par des journées
portes-ouvertes dans l'ensemble des établissements.
Elle consiste en une présentation des universités, des
disciplines et des DEUG par les universitaires qui y participent largement
à l'exception des littéraires ; les réticences
observées s'expliquent notamment par la spécificité de ces
disciplines qui sont par ailleurs souvent choisies par défaut.
Si les professeurs principaux sont invités aux journées
mensuelles d'information, peu y répondent, à la différence
des conseillers d'orientation ; la plupart d'entre-eux ont tendance
à considérer que leur compétence disciplinaire ne les
prédispose pas à jouer un rôle complémentaire en
matière d'orientation. Cette préoccupation devrait être
intégrée dans leur formation dans les IUFM, et fait l'objet d'une
demande chez certains professeurs de lycée.
Certains universitaires, à l'exception des littéraires, sont
prêts à développer des partenariats avec les lycées
et cette démarche est généralement bien reçue par
les lycéens.
Il convient également de noter que les universités nouvelles ne
disposent pas de conseillers d'orientation mais seulement de centres de
documentation non pourvus en personnels spécialisés.
La formation psychologique des conseillers d'orientation apparaît en
outre nécessaire pour répondre à la situation sociale de
plus en plus préoccupante de nombreux étudiants, notamment
à celle des étudiants en situation d'échec.
A cet égard, la session d'octobre des examens dont l'organisation est
particulièrement lourde, n'enregistre qu'un taux de succès
dérisoire, son caractère tardif constituant également une
contrainte pour les inscriptions universitaires ultérieures.
S'agissant des réorientations, les universités ont mis en place
diverses formules : sessions de septembre, accès direct en STS et
en IUT.
Les IUT accueillent désormais une part de plus en plus importante de
bacheliers technologiques mais les " tertiaires " se
réfugient
en lettres et en sciences humaines à Lille III, tandis que les
" bac pro " ne sont pas acceptés.
ANNEXE V :
LE SYSTÈME UNIVERSITAIRE
AMÉRICAIN
par M. André Maman, sénateur,
représentant des Français établis hors de France, ancien
professeur à l'université de Princeton
Avant de décrire le système universitaire
américain, il faut expliquer comment fonctionne le système
primaire, élémentaire et secondaire aux Etats-Unis. En effet,
sans comprendre cette partie du système éducatif, il serait
difficile de bien appréhender ce qui se passe au niveau universitaire.
Les études commencent assez tard aux Etats-Unis, à l'âge de
cinq ans. Certains experts américains voudraient que les études
commencent plus tôt, comme c'est le cas en Europe et spécialement
en France. Il existe des écoles privées, où les enfants de
moins de cinq ans peuvent être accueillis et ceci dès l'âge
de trois ans.
Il faut également noter que chaque Etat de l'Union est libre de
décider de sa politique éducative. En effet, il n'existe pas de
ministère de l'éducation nationale aux Etats-Unis. De ce fait,
certains Etats sont très avancés du point de vue de
l'enseignement qu'ils offrent, et d'autres très en retard. Cela
dépend de la situation financière de l'Etat. Certains sont
très riches et d'autres très pauvres. De plus, chaque Etat est
divisé en comtés indépendants les uns des autres. Le
système éducatif de chacun de ces comtés est
financé par ce que rapportent les taxes d'habitation et les taxes
locatives. Il existe donc de très grandes différences de niveaux,
entre Etats, selon les moyens financiers dont ils disposent.
Dans cet immense pays, il est facile d'évaluer le niveau des divers
systèmes éducatifs, et l'on sait très bien, sur une
échelle de valeurs de 0 à 100, où chacun se tient.
Comme le système éducatif public s'est rapidement
détérioré, on est en présence d'un système
privé d'une double nature :
1- Le système religieux : en général, c'est un
système catholique qui est de moins en moins important à travers
tout le pays, en raison du manque de personnel. La crise des vocations
religieuses et le manque d'attrait pour ces systèmes ont fait que de
nombreuses écoles ont été obligées de fermer,
d'autant plus que les crédits ont diminué.
Il faut noter en passant que les écoles privées, dites
françaises, c'est-à-dire accréditées par le
Ministère de l'Education Nationale et qui sont maintenant au nombre de
28, ont pu ainsi trouver des locaux disponibles, ce qui leur a permis une
installation plus rapide.
2- L'autre, c'est le système laïc, qui est de plus en plus
répandu. Il est cher, mais de très bonne qualité et nous
trouvons des écoles privées, en général de
très haut niveau, dans tous les Etats de l'Union. Les droits
d'écolage de ces écoles varient de 4.000 à 12.000 dollars
par an, uniquement pour les études. Si l'établissement accepte
des pensionnaires, ce qui est souvent le cas, ceux-ci doivent ajouter les frais
de pension.
Ces écoles privées forment une Association nationale des
écoles secondaires privées. Elles se connaissent bien, leurs
professeurs se réunissent souvent et on peut évaluer leur niveau
très facilement, d'après le succès qu'obtiennent leurs
élèves dans l'admission aux Universités américaines
les plus prestigieuses. Leurs professeurs sont excellents, ils ont souvent des
doctorats. Ils vivent dans le campus de l'établissement et sont sans
arrêt en contact avec les élèves, dont en plus ils dirigent
les activités sportives.
En ce qui concerne les étudiants, ceux-ci sont bien suivis. En
général, ils ont été sélectionnés
à l'entrée, pour être súr qu'ils pourront suivre les
cours offerts par l'établissement. Il est possible que malgré
cela, ils soient faibles dans certaines matières. A ce moment-là,
on leur donnera des cours spéciaux offerts par leurs professeurs, des
cours de soutien. Dans les deux dernières années, ils sont bien
orientés, au moment du choix à faire pour l'entrée
à l'Université.
Il faut remarquer que dans tous les établissements secondaires, publics
ou bien privés, religieux ou laïcs, tout est tourné vers
l'admission à l'Université.
Le problème de discipline, qui se pose surtout dans les
établissements publics urbains, n'existe nullement dans les
écoles privées, où quelles soient, et rarement dans les
établissements publics ruraux. Les couches sociales les plus pauvres, et
notamment les minorités raciales, résident dans les villes,
désertées par les gens ayant les moyens de vivre en dehors des
villes. C'est dans le centre des villes que se trouvent les écoles les
plus difficiles, où sévissent la violence, le crime, la drogue et
l'alcool. Les établissements de banlieue, surtout des grandes banlieues,
sont beaucoup plus súrs que ceux des grandes villes.
Ceci nous amène aux Universités.
Comme il n'y a pas d'examen général, analogue au
baccalauréat français, la comparaison entre les
élèves des différents Etats et des différents
établissements est très difficile. La notation aux Etats-Unis se
fait sur A, B, C, D, et F, qui est un échec. Or, il arrive que
d'établissement en établissement et d'Etat en Etat, un A ou un B
ne représentent pas la même chose. Dans ces conditions, il est
très difficile de faire un classement de valeur entre les divers
élèves posant leur candidature à l'admission dans une
Université. Par conséquent, pour pouvoir les évaluer, on
les oblige à passer des tests objectifs de deux sortes :
1- les SAT (Standardized Aptitude Tests)
2- les AP (Advanced Placements)
Ces tests sont élaborés par une organisation privée
à but non lucratif, qui se trouve à Princeton, mais qui n'a aucun
rapport avec l'Université. Il s'agit de "Educational Testing Service"
(ETS).
Dans toutes les matières enseignées dans les lycées, il
existe un test. Ces tests sont semblables dans tout le pays. Ils sont
passés dans les établissements scolaires, sous des
contrôles extrêmement sévères, à des dates
fixées nationalement.
Les SAT sont de deux ordres :
1- Verbal
2- Mathématique
Les scores obtenus dans ces tests, allant de 200 à 800, permettent de
situer les divers candidats, grâce à une évaluation qui
correspond en gros au QI du candidat. Si celui-ci n'est pas content de ses
résultats, il peut d'ailleurs repasser ces tests, qui ne seront
évidemment pas exactement les mêmes, mais qui donneront, de toute
façon, la même possibilité d'évaluation.
En ce qui concerne les AP, il existe plusieurs tests couvrant toutes les
matières importantes, comme par exemple anglais, langues
étrangères, histoire, mathématiques, physique, chimie,
biologie, etc... Là aussi, les scores vont de 200 à 800 et
permettent d'identifier les forces et les faiblesses des candidats.
On peut noter ici que, malgré le retard en âge pris au
départ, les étudiants arrivent à l'Université
à peu près au même âge qu'en Europe, à 17 ou
18 ans. Les systèmes universitaires européens pensent que les
Américains ont deux ans de retard sur leurs étudiants. Autrefois
le baccalauréat français donnait automatiquement deux ans de
crédit universitaire à l'étudiant qui l'avait. Depuis
1968, les diverses instances américaines ont considéré que
le baccalauréat français, ainsi que les diplômes
européens, avaient perdu une certaine partie de leur valeur et
aujourd'hui, le baccalauréat français ne donne qu'un an de
crédit universitaire, et ceci sous certaines réserves.
Les étudiants qui ont passé des tests d'aptitude (AP), et qui ont
eu des scores élevés dans trois de ces tests,
bénéficieront des mêmes avantages qu'un bachelier. De plus
en plus les étudiants américains les mieux qualifiés
arrivent, à la fin de leurs études secondaires, au niveau des
bacheliers français.
Le lycéen commence à s'intéresser à
l'Université deux à trois ans avant de finir ses études.
Dans le choix des Universités, où il fera une demande
d'admission, il sera aidé par un de ses professeurs, qui sera son
orienteur-guide, et ceci est vrai aussi bien dans le système
privé que public.
Comme l'élève conna»t très bien son niveau, par les
divers classements qu'il a obtenus dans les cours qu'il a suivis pendant ses
trois dernières années de lycée, ainsi que par les scores
obtenus dans les tests objectifs, il saura à peu près à
quelles Universités il doit faire une demande d'admission.
Le classement des Universités, par ordre de valeur, est transparent et
connu de tout le monde. Ceci facilitera la tâche de l'orienteur et celle
de l'élève, en lui permettant de savoir où il peut faire
une demande avec une chance d'être accepté. En raison des notes
qu'il a obtenues, il sera apte à faire une comparaison avec ses
camarades. Comme on les classe sans arrêt, par ordre de valeur, dans
toutes les matières, chacun sait exactement à quel niveau il se
trouve.
Des tests objectifs sont d'ailleurs obligatoires, si on veut entrer dans les
200 meilleures Universités américaines. Parmi les 3.000
Universités, réparties dans tous les Etats-Unis, l'on sait
exactement à quel niveau d'excellence se trouve chacune d'entre elles et
les 9 millions d'étudiants, qui vont fréquenter les
Universités américaines, connaissent bien leur classement.
Comment l'élève, en dernière année de
lycée, va-t-il se décider à propos des Universités,
où il fera une demande d'admission ?
A partir de septembre, l'élève demande à chaque
Université qui l'intéresse de lui envoyer des brochures, ainsi
qu'un dossier d'admission. A ce moment-là, il visite les campus, pour
juger de l'ambiance qui y règne, ce qui l'aidera à
déterminer ses choix.
Chaque Etat a un système universitaire public, qui comprend en
général plusieurs campus. Certaines de ces Universités
sont excellentes et peuvent être comparées aux meilleures
Universités privées. Je pense à l'Université
d'Indiana, à l'Université du Wisconsin, à
l'Université de Californie, par exemple, qui peuvent être
comparées à Harvard, Princeton, Stanford ou M.I.T.
A côté de ces Universités, il existe des Universités
privées, dont on sait exactement à quel niveau elles se trouvent
sur une échelle de 0 à 100. Ceci va faciliter l'admission des
étudiants qui feront, en général, une demande dans les
Universités qui correspondent à leur niveau. Les
Universités privées sont, sans arrêt, en contact avec les
candidats potentiels, à travers tout le pays: de septembre à
février, des "officiers d'admission", qui sont parfois
accompagnés de professeurs, se déplacent dans la zone
géographique qui leur a été désignée.
Ces "officiers d'admission" sont aidés par les nombreux réseaux
d'Associations d'Anciens Elèves, qui existent dans tout le pays et qui
sont en contact avec les lycées locaux. Ils se rendent
régulièrement dans ces écoles, pour vanter auprès
des élèves les mérites de leur "Alma Mater".
Ne sachant jamais les réponses qu'il obtiendra, un élève
fait, en général, des demandes dans 4 à 8
Universités, qu'il a choisies avec l'aide de ses professeurs, de son
orienteur, de sa famille et de ce qu'il a appris des "officiers
d'admission".
Les études de base (undergraduates) durent 4 ans et mènent au
diplôme de "Bachelor".
Il existe également des centaines de "Community College" de deux ans,
en
général proches de la résidence de l'étudiant, pas
chers et où l'on peut faire des études raisonnables. A la fin de
ces deux ans, l'étudiant peut s'arrêter ou bien continuer, en
entrant dans une Université de 4 ans, dans laquelle il ne fera que les
deux dernières années.
Les demandes d'admission se présentent sous la forme d'un dossier
complet de tout ce que l'élève a fait pendant ses quatre
dernières années de lycée.
Ce dossier est double :
1- académique : il comprend toutes les notes obtenues dans les divers
cours suivis et plusieurs lettres de recommandation, soit d'enseignants, soit
de personnes qui ont connu le candidat dans un autre cadre que le lycée.
Ce dossier comprend également toutes les notes des tests objectifs, SAT
et AP, que l'étudiant aura passés. De plus, l'élève
s'auto-évalue, il parle de lui-même, de ses plans d'avenir, de sa
motivation, etc...
2- Le dossier des activités extra-curriculaires, où
l'élève prouve qu'il a montré certaines qualités
personnelles :
a- le coeur : il doit avoir aidé des personnes handicapées, avoir
servi dans un hôpital, avoir aidé des élèves plus
jeunes, avoir participé aux oeuvres de sociétés de
bienfaisance, etc.
b- l'esprit d'équipe : il faut avoir fait des sports, avoir gagné
et avoir su perdre, avoir lutté pour l'équipe. Le candidat
indique tous les trophées qu'il a obtenus.
c- l'esprit d'initiative : c'est là qu'on peut évaluer le
potentiel du candidat, on note ce qu'il a créé, ce qu'il a
organisé, sa motivation...
d- l'esprit d'indépendance : notamment par rapport aux parents, pour
être súr que le candidat saura survivre dans un campus où,
les étudiants, venant d'un peu partout aux Etats-Unis et dans le monde,
se trouveront mêlés les uns aux autres.
Ces deux dossiers sont examinés par les "officiers d'admission", qui
les
évaluent. De septembre à février, ces administrateurs ont
voyagé dans tout le pays, pour prendre contact avec le plus grand nombre
d'établissements secondaires possible. A partir de février, ils
cessent de se déplacer pour s'enfermer dans leurs bureaux et
étudier les dossiers d'admission. Les candidats seront prévenus,
en avril, des résultats.
Autrefois, ces officiers faisaient passer aux candidats des interviews
personnelles, mais le nombre de ceux-ci augmentant sans cesse, ces interviews
sont devenues impossibles. Pour donner une idée, à
l'Université de Princeton, où l'on admet 1100 étudiants
par an, on compte environ 15.000 candidats, ce qui rend la sélection
extrêmement difficile. Le but est de choisir les élèves,
dont les deux dossiers, académique et extra-curriculaire, sont de haut
niveau.
Il est bien connu qu'il existe quatre catégories de candidats
bénéficiant de faveurs spéciales :
La première, c'est celle des étudiants de minorités
raciales, surtout les Noirs, considérés comme faisant partie
d'une catégorie spéciale, qui doit être favorisée.
Le but est d'essayer d'en admettre environ 10%. Dans cette catégorie
spéciale, on compte également les Hispaniques, les Chicanos et
les Indiens américains. Par contre, les élèves d'origine
asiatique se sentent brimés, car ils pourraient être admis en plus
grand nombre. Les Universités répondent qu'il est important que
les étudiants viennent de milieux variés et qu'il serait
innoportun d'admettre trop d'étudiants de la même origine raciale.
La seconde, les enfants des Anciens Elèves de l'Université, pour
lesquels on est plus indulgent. Les raisons qu'on invoque pour cela sont la
continuité, et le fait que ces étudiants s'adapteront, en
principe, mieux à l'Université, dont ils connaissent les
traditions. En réalité, c'est un moyen de remercier les Anciens
de tout ce qu'ils ont fait et continuent à faire pour aider
l'Université.
La troisième catégorie est celle des athlètes de haut
niveau qui, au moment de l'admission, auront été signalés
par les entra»neurs des divers sports, dont chacun aura droit à un
certain quota, selon le sport pratiqué.
Enfin, la quatrième catégorie, est celle de ce qu'on appelle "les
talents inhabituels", c'est-à-dire par exemple un acteur
déjà connu, un danseur, un sculpteur, une personne qui se soit
fait remarquer dans sa communauté et qui ait montré un certain
potentiel. Ce sont des qualités difficiles à évaluer par
des tests objectifs.
Les grandes Universités privées opèrent toutes selon ce
système, mais les Universités des Etats, qui acceptent souvent
des dizaines de milliers d'étudiants, ne peuvent agir de cette
façon. Par exemple, dans certains Etats, tous les élèves
résidant dans l'Etat, qui ont obtenu de bonnes notes et qui sont
classés parmi les meilleurs étudiants de leur
établissement, seront admis automatiquement. Quant aux
élèves venant d'autres Etats, leur admission sera plus dure et
leurs frais d'études plus élevés.
Chaque élève dans le pays trouvera toujours une Université
qui soit à son niveau, s'il veut poursuivre ses études.
Les Universités étant ma»tresses de leurs décisions,
l'élève fait, en général, de 4 à 8 demandes,
ne sachant jamais quelles seront les réponses qu'il obtiendra. Les
dossiers doivent être terminés au 15 janvier au plus tard, et au
mois d'avril suivant, arriveront les diverses réponses des
Universités. A ce moment-là, le candidat aura un mois pour
décider où aller, s'il a plusieurs réponses positives. Si
par contre il n'en a aucune, il va falloir qu'il se rabatte sur des
Universités de moindre niveau, qui sont prêtes à accepter
des candidats, même tardivement.
C'est au moment où il sait qu'il a été admis que le
candidat se préoccupera du côté financier de ses
études universitaires. Elles coútent très cher : pour
donner un exemple, à Princeton, les frais d'études sont de 28.000
dollars par an (148.000 francs), pour les études et la pension
complète du début septembre à fin mai. Cela ne comprend
pas les livres, les faux frais, les loisirs... Aucune Université,
qu'elle soit Université d'un Etat ou Université privée,
n'est gratuite. Les frais d'écolage, selon les Universités,
varient de 5 ou 6.000 dollars à 30.000 dollars.
Chaque Université est susceptible d'accorder une aide financière
aux étudiants qu'elle a admis. Cette aide dépendra de
l'importance des revenus de la famille, tels qu'ils appara»tront sur la
feuille d'impôts de l'année précédente, fournie par
les parents du candidat, à laquelle ils auront ajouté quelques
renseignements personnels supplémentaires, notamment le nombre
d'étudiants, dans la famille, qui vont fréquenter des
Universités en même temps.
Pour aider financièrement leurs étudiants à s'acquitter de
tous leurs frais, scolarité, pension, etc, les Universités
peuvent offrir trois possibilités d'aide :
1- Une Bourse, qui peut être complète ou partielle, selon les
revenus de la famille. Souvent, les fonds de bourses sont alimentés par
la générosité des Anciens Elèves.
2- Un travail dans le campus, avec des horaires variables, et qui peut
s'effectuer dans une bibliothèque, un dortoir, une
cafétéria, etc.
3- Enfin, l'étudiant peut obtenir de la part de l'Université un
prêt garanti par le Gouvernement fédéral ou par une banque
locale, prêt à 7% d'intérêt, dont le remboursement ne
commence à courir que six mois après la fin des études. A
noter que si l'étudiant poursuit des études avancées de
Ma»trise ou de Doctorat, le début du remboursement de ce prêt
sera reculé d'autant d'années qu'il restera étudiant. Il
n'est pas rare que l'on ait à rembourser ses prêts, la quarantaine
passée, surtout si l'on a fait des études de Ma»trise et de
Doctorat.
Un sentiment courant aux Etats-Unis est que les études universitaires ne
sont pas quelque chose de dú à l'étudiant, mais qu'il doit
les mériter. Si un étudiant a les qualités requises, il
trouvera toujours un moyen d'aider à financer ses études.
Depuis quelques années, pour éviter d'éliminer de
l'enseignement supérieur les étudiants des classes moyennes, il
arrive que certaines Universités prêtent à leur personnel
à bas intérêt de l'argent, pour le financement des
études de leurs enfants.
En ce qui concerne le fonctionnement des Universités américaines,
on doit dire qu'elles opèrent presque toutes sur le système de
deux semestres. Le semestre d'automne va de septembre à janvier et le
semestre de printemps, de février à fin mai. Fréquemment
dans le Sud des Etats-Unis, les Universités commencent plus tôt,
au mois d'aoút, pour terminer également plus tôt, en avril
ou au début de mai.
Certaines Universités, mais de nombre réduit, voulant utiliser au
maximum leur personnel et leurs locaux opèrent sur un système de
quatre trimestres. Les étudiants peuvent choisir les trimestres qui leur
conviennent, s'arrangeant en général pour en garder un par an,
pour leurs vacances qui peuvent être à n'importe quelle
période de l'année. C'est moins facile pour les membres du
personnel, notamment pour les enseignants, dont les vacances dépendront
de la décision du Département, de façon à
être súr qu'un certain nombre de cours sera offert à chaque
trimestre. Régulièrement, un très grand nombre
d'Universités offrent des cours d'été, que peuvent suivre
les étudiants inscrits à l'Université, ou bien des
étudiants venant d'ailleurs.
Ces cours, notamment en langues vivantes et en sciences, ne sont pas du
même niveau que ceux offerts pendant l'année
régulière, ne serait-ce que parce qu'il faut faire en six
à huit semaines, ce que l'on fait en un semestre.
La question des deux premières années à
l'Université se pose avec acuité, exactement comme en France.
Rappelons que pour éviter de prendre des étudiants qui ne soient
pas d'un niveau convenable, les Universités opèrent toutes par
sélection.
A l'Université de Princeton, par exemple, à son arrivée
dans le campus, en septembre, chaque étudiant de première
année se voit désigner un professeur conseiller. C'est un
professeur de l'Université, qui a volontairement accepté de
conseiller de 15 à 20 étudiants pendant leurs deux
premières années, et qui sera rétribué pour ce
service.
Pendant une semaine, à la rentrée, toute l'Université ne
s'occupe que des étudiants de première année. Avant le
début des cours, ils choisissent, avec l'aide de leur conseiller, les
cours qu'ils vont suivre, pendant le semestre. Un étudiant doit suivre
quatre cours par semestre, mais il peut en suivre un cinquième s'il le
veut, et être auditeur d'un sixième.
Pendant l'été précédant leur venue, des professeurs
du campus appelés "officiers de placement" ont étudié tous
les dossiers des étudiants admis pour les placer dans les diverses
matières, selon les cours suivis au lycée, les notes obtenues et
les scores des tests objectifs. A son arrivée, en septembre, quand
l'étudiant va décider du choix de ses cours, on sait donc
à quel niveau il a été placé dans toutes les
matières principales. Il doit suivre obligatoirement deux cours dans
diverses matières, sciences, langues étrangères, anglais,
sciences humaines, etc. et ceci pendant ses deux premières
années. L'étudiant américain n'a pas travaillé
autant que l'étudiant français pendant ses études
secondaires, aussi ses deux premières années d'Université
très intensives vont-elles lui permettre de rattraper son retard.
Pour cela, l'étudiant de première année sera suivi de
très près par son conseiller et par ses professeurs. Il est
important d'être súr qu'il se trouve placé dans les cours
qui lui conviennent. Pendant les deux premières semaines du semestre, il
peut d'ailleurs être autorisé à changer de cours, avec
l'accord de son conseiller, jusqu'au moment où il sera pleinement
satisfait des cours dans lesquels il se trouve. On doit remarquer qu'un
étudiant de première année peut être autorisé
à suivre des cours avec des étudiants de deuxième ou
troisième et parfois même quatrième année, selon le
niveau où il a été placé.
Le nombre d'enseignants par étudiant est de un pour sept. Souvent, ce
sont les professeurs les plus expérimentés qui enseignent aux
étudiants de première et deuxième années. Les
étudiants sont très souvent notés, et au milieu du
semestre, ils passent un examen dans chacun de leurs cours. Nous avons donc un
contrôle continu et minutieux, qui permet rapidement de se rendre compte
du travail des étudiants. Celui qui perd pied est aidé et peut
être autorisé par un doyen à suivre des leçons
particulières, spécialement en langues vivantes, en sciences et
en mathématiques.
S'il ne travaille pas bien, son professeur le recevra dans son bureau et, au
besoin, l'enverra voir un doyen. De plus, un service très important de
médecins et de psychiatres, dans le campus, peut aider ceux qui en ont
besoin.
Les professeurs, à tous les niveaux, font de nombreuses heures de
bureau, dont l'horaire est obligatoirement affiché sur les portes des
bureaux. Chaque étudiant sait donc très bien à quel moment
il pourra voir, s'il le veut, ses professeurs et recevoir leurs conseils.
Dès leur première année, les étudiants sont
très proches de leurs professeurs, qu'ils viennent souvent voir dans
leur bureau. C'est un moyen pour eux de parler de leurs cours, mais aussi de
leurs études futures et de leur plan de carrière. Ils savent que,
plus tard, pour accéder aux études de Ma»trise et de
Doctorat, ils auront besoin de lettres de recommandation de la part de leurs
professeurs, aussi tiennent-ils à bien les conna»tre.
Les professeurs des divers Départements travaillent en étroite
collaboration entre eux et les études interdépartementales sont
encouragées. Dans un campus, les professeurs se connaissent bien, ne
serait-ce que par le fait qu'ils font partie de nombreux comités
universitaires où siègent ensemble des professeurs venant de tous
les Départements.
Si un étudiant échoue dans un de ses cours, il ne perd pas le
bénéfice du semestre. Certes, sa moyenne pour le semestre
diminuera, mais il continuera normalement ses études.
La sélection à l'entrée ayant été bien
faite, le nombre d'échecs est assez faible. Pratiquement, tout ceux qui
ont commencé leurs études les terminent en quatre ans. Il arrive,
toutefois, que certains d'entre eux, pour des raisons personnelles ou par
manque de motivation, demandent à prendre un an ou deux de congé
au milieu de leurs études, mais ils reviennent presque toujours terminer
leur quatre années. Leur Université les reprend sans aucune
difficulté. Ceux d'entre eux, qui voudraient faire un transfert dans une
autre Université, peuvent le faire pendant leurs deux premières
années d'études. Il s'agit d'étudiants mal adaptés
à leur Université ou bien d'étudiants qui veulent
accéder à une Université d'un niveau plus
élevé.
Comme les Universités sont en majorité résidentielles, les
étudiants ne perdent pas de temps en transports. Ils trouvent tout dans
le campus où ils logent. Leur chambre est souvent à quelques
minutes à pied de leurs salles de cours, ainsi que des divers
restaurants et des magasins où ils peuvent acheter tout ce qui est
nécessaire pour leurs études. Et surtout de la
Bibliothèque centrale du campus, qui contient souvent des centaines de
milliers de livres, sinon des millions. Cette Bibliothèque est, la
plupart du temps, à rayons ouverts et ce sont les étudiants qui
vont eux-mêmes chercher les livres demandés. Tous les moyens sont
mis en oeuvre pour faciliter lectures et recherches.
Dans un campus américain, tout est organisé de telle façon
que les étudiants puissent faire leur travail ou pratiquer les sports
dans les meilleures conditions. Les installations sportives sont superbes,
financées par les Anciens Elèves, qui tiennent à voir
leurs équipes gagner, pour la plus grande gloire de leur "Alma
Mater". A
l'Université, les sports sont obligatoires pour tous les
étudiants. Pratiquement, tous les athlètes américains de
haut niveau, dans tous les sports, ont été formés dans les
Universités.
Arrivés en troisième année, les étudiants sont
largement au niveau de leurs camarades européens. Ils ont
rattrapé le retard qu'ils avaient : autrefois, il était
estimé à deux ans et il est maintenant d'un an. C'est en
troisième année qu'ils se spécialisent, en entrant dans le
Département de leur choix, où ils vont faire des recherches
intensives, conseillés par les professeurs du Département, qui se
partagent la responsabilité de guider les recherches de chaque
étudiant. Ceux-ci sont suivis de très près parce que
chaque professeur a, au maximum, une quinzaine d'étudiants à
conseiller. Les meilleurs des étudiants de troisième et
quatrième années peuvent être autorisés à
suivre des cours de Ma»trise ou de Doctorat, ce qui sera bien vu dans
leurs relevés de notes, au moment où ils décideront de
faire des études avancées, notamment dans les Ecoles
professionnelles comme le Droit, la Médecine, la Pharmacie, le
Management, etc...
La compétition est rigoureuse bien qu'il y ait très peu
d'échecs : en effet, le classement par ordre de valeur des
étudiants pour leurs quatre années d'études va être
important pour leur permettre d'accéder aux meilleurs emplois ou bien
aux meilleures Universités pour leurs études ultérieures.
Après quatre ans d'études de base, l'étudiant sait
très bien ce qu'il veut faire, car il est très motivé pour
entreprendre des études plus avancées.
Le service militaire obligatoire n'existant pas aux Etats-Unis, le brassage de
la jeunesse américaine se fait dans les Universités. En effet, il
n'est pas rare pour les jeunes gens d'aller étudier dans des
régions du pays, éloignées de celles où ils
résident, ce qui leur permet de mieux se conna»tre.
De plus, il est très rare qu'un étudiant fasse ses études
avancées, Ma»trise ou Doctorat, ou Ecoles professionnelles, dans la
même Université que celle où il a commencé ses
études. En même temps qu'ils font leurs études, les
étudiants sont évidemment concernés par leur futur emploi.
Dans les campus, existe un "Bureau des Carrières" où se trouvent
affichées toutes les offres d'emploi possibles. C'est un bâtiment
qui se trouve au milieu du campus, ouvert à tout le monde.
Les recruteurs, de toutes les entreprises qui veulent embaucher du personnel,
viendront interviewer les candidats potentiels, en cherchant à attirer
les meilleurs. La liste des interviews est affichée, longtemps à
l'avance, à travers le campus et ceux qui s'intéressent à
une certaine compagnie s'inscrivent à l'avance pour passer l'interview.
Souvent, ces compagnies offriront des postes d'été aux candidats
pour mieux apprécier leurs qualités et, au besoin, leur offrir
plus tard un poste permanent, à la sortie de l'Université.
Les Associations d'Anciens Elèves aident beaucoup les nouveaux
diplômés, grâce aux contacts établis dans les
diverses régions où ils résident. On ne saurait trop
insister sur le rôle capital que jouent les Anciens Elèves. Comme
cela a déjà été mentionné, ils financent, en
grande partie, l'Université ; ils participent au recrutement des
nouveaux étudiants ; ils aident les étudiants par des fonds de
Bourses ; ils peuvent aider les diplômés à trouver un
emploi par les relations qu'ils ont su établir là où ils
résident.
Dans les Conseils d'Administration des Universités, siègent des
Anciens Elèves élus, qui sont en contact permanent avec les
administrateurs principaux de l'Université, le président, le
prévôt, les doyens, etc. Il faut mentionner que le corps
professoral est également constamment consulté sur la marche de
l'Université, à travers des comités très nombreux,
qui permettent à l'Université de fonctionner et qui gèrent
tous les aspects académiques, financiers, économiques et
prospectifs de l'Université.
Aux Etats-Unis, il n'existe pas de diplômes qui soient nationaux. La
valeur des diplômes dépend de l'Université où on les
a obtenus, de sa réputation, de la place qu'elle occupe dans la
hiérarchie universitaire et du rôle qu'elle joue dans les
progrès de la recherche, à tous les niveaux. Evidemment, les
diplômés des Universités les plus prestigieuses
bénéficient, dès le départ, de
préjugés favorables. Néanmoins, il n'existe pas de
carrière assurée et il appartiendra à ces
diplômés de prouver leur valeur, dans la carrière qu'ils
auront choisie, et de se montrer dignes de ce que leurs diplômes
permettent d'attendre d'eux. Ils seront sans arrêt remis en question.
On sait exactement à quel niveau se trouve chacune des 3.000
Universités du pays et sur une échelle de 0 à 100, on peut
placer, avec beaucoup de súreté, chacune d'entre elles. Un
classement, fait régulièrement tous les trois ou cinq ans, par
des organisations neutres, permet d'établir une hiérarchie entre
elles, par ordre de valeur.
On les juge grâce au renom national et international de leurs
professeurs-chercheurs, à la valeur des recherches entreprises et des
publications, à la qualité de l'enseignement et, enfin, à
la carrière des étudiants qui en sont sortis.
L'attraction que les Universités américaines exercent sur les
étudiants étrangers est bien connue. En général,
ces étudiants sont en Ma»trise ou en Doctorat. Ils viennent de tous
les pays du monde et les plus nombreux sont originaires, dans cet ordre,
d'Asie, d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Amérique Latine. On commence
maintenant à voir arriver, en grand nombre, les étudiants
d'Europe de l'Est, très compétitifs et montrant un féroce
appétit de succès.
Comme les étudiants étrangers n'ont pas en général
de moyens financiers suffisants pour payer leurs études, les
Universités qui les accueillent leur offrent la possibilité
d'enseigner aux jeunes gens de première et deuxième
années. Leur horaire hebdomadaire est, en général, de six
heures. Un étudiant étranger, nouvellement arrivé aux
Etats-Unis, ne sera évidemment jamais chargé d'un cours magistral
qui sera toujours fait par un professeur titulaire. Il aidera les professeurs
chargés de cours, en menant des travaux pratiques, des travaux
dirigés ou bien en donnant des heures de soutien aux étudiants en
difficulté.
On les voit souvent aider les professeurs-chercheurs dans les nombreux
laboratoires du campus. Ces six heures d'enseignement ou de soutien couvriront
complètement leurs frais d'études. Quant à leur pension,
l'Université peut les aider en leur permettant de travailler dans le
campus, en leur fournissant divers emplois assez bien
rémunérés.
Il n'est pas rare, s'ils sont en sciences ou en mathématiques, de les
voir s'intégrer dans un groupe de recherches, où ils sont
également rétribués.
Ces étudiants, dont la sélection a été très
dure, sont souvent de très haut niveau. C'est alors
l'intérêt des Universités et de leurs
professeurs-chercheurs de les retenir, de façon à les garder aux
Etats-Unis. Cela pose des problèmes de visas que les Universités
arrivent à résoudre, grâce aux contacts qu'elles ont
établis dans les plus hautes sphères du Gouvernement. Si ce n'est
pas possible, on aide ceux qui doivent retourner chez eux à trouver un
poste dans une entreprise américaine, qui s'est installée dans
leur pays d'origine, quitte à les faire revenir ensuite aux Etats-Unis
pour les employer de façon permanente. On estime que la proportion des
étudiants étrangers, en Ma»trise et en Doctorat, approche
des 40%, dans les meilleures Universités.
En ce qui concerne maintenant le corps professoral, chaque Université,
qu'elle soit privée ou d'un Etat, se charge elle-même du
recrutement de ses professeurs. Selon les possibilités
financières de l'Université, chaque Département choisit
les nouveaux professeurs dont il a besoin. Chaque année, à
travers tout le pays, sont publiées régulièrement les
listes des postes offerts, spécifiant les titres universitaires
exigés, l'expérience pédagogique demandée et les
publications souhaitées de la part des candidats. Pour postuler, chaque
candidat doit écrire lui-même aux Universités, où il
a noté qu'il y avait un poste libre dans sa discipline et pour lequel il
pense avoir rempli les conditions requises. Il va donc constituer un dossier
complet, qui est conservé par l'Université qu'il a
fréquentée et qui va être envoyé, sur demande,
à chaque Université s'intéressant à lui.
La situation de l'emploi dans l'enseignement supérieur s'est durcie ces
dernières années, dú au fait qu'il n'y a plus d'âge
de la retraite. Pendant longtemps, cet âge avait été de 65
ans, puis de 68 ans, enfin de 70 ans, et depuis 1994, il n'y a plus d'âge
de la retraite. Tout laisse penser que les professeurs, âgés de
plus de 70 ans, resteront en fonction le plus longtemps possible, surtout si
l'on considère la faiblesse des retraites des professeurs aux
Etats-Unis. Pour donner une idée du montant de ces retraites, disons
qu'il représente en général 50% à 60% du dernier
salaire de l'enseignant.
Le postulant ne sera jamais choisi sans avoir été reçu
dans le campus où il espère avoir un poste. Ceux, invités
à venir dans le campus, font en général partie d'une
Ò liste courte Ó de 4 ou 5 candidats. Ce sont ceux qui
ont été choisis parmi les centaines de demandeurs d'emploi, par
un Comité de sélection composé de quelques professeurs du
Département. Le candidat, venant dans un campus, aura auparavant
été interviewé par ses futurs collègues potentiels,
qui ont fait un classement par ordre de valeur. Dans le campus, il sera
reçu par les professeurs du Département, par les administrateurs
de l'Université et il sera obligé de faire une conférence
devant les professeurs et les étudiants. C'est après sa visite,
qui dure en général une journée, que le choix sera fait
par le Département concerné.
Si ce candidat convient, on peut lui offrir, soit un contrat d'un an
renouvelable ou non, soit un contrat de trois ans comme professeur assistant
s'il a déjà son doctorat, et s'il a acquis de l'expérience
et qu'il a déjà publié. De plus en plus, on note
malheureusement que les candidats sont engagés pour un an, non
renouvelable, ce qui les oblige à changer de postes d'année en
année. On les appelle les
Ò professeurs-bohêmes Ó.
S'il est engagé pour trois ans, son contrat peut être
renouvelé pour trois autres années, à la fin desquelles il
peut, soit être remercié, parce que n'ayant pas satisfait ses
supérieurs dans le Département, ou bien promu au rang de
professeur associé, ce qui lui donne la
Ò tenure Ó, c'est-à-dire qu'il
Ò tient Ó son poste et qu'on ne peut plus le renvoyer.
Il bénéficiera alors d'une grande sécurité,
puisqu'il aura la garantie de l'emploi et plus tard, s'il justifie les espoirs
placés en lui, il sera promu au rang de professeur, rang le plus
élevé dans la hiérarchie académique.
La situation des femmes professeurs dans l'enseignement supérieur est
telle qu'elles sont nombreuses dans les rangs les plus bas, mais leur nombre
diminue rapidement au fur et à mesure que l'on monte. En ce moment, nous
constatons de fortes pressions de la part des femmes professeurs pour
être promues, dans un contexte de ce qui est Ò politiquement
correct Ó, et dans plusieurs campus, elles ont engagé des
procès pour obtenir satisfaction.
Pour enseigner aux Etats-Unis, il n'est pas nécessaire d'avoir la
citoyenneté américaine. Les Universités recrutent des
professeurs de toutes nationalités, qu'ils aient étudié
aux Etats-Unis, ou qu'ils aient des diplômes étrangers. En dehors
de toutes conditions de nationalité, l'Université gardera, parmi
les professeurs en compétition, celui qui lui para»t le mieux
convenir au Département.
En vue d'une promotion possible, les jeunes professeurs sont sans cesse
évalués dans trois domaines. D'abord, par l'importance et la
qualité de leurs publications; ensuite, par la valeur de leur
enseignement, tel qu'il est jugé par les étudiants; finalement,
par ce qu'on appelle la bonne citoyenneté, c'est-à-dire avoir
fait partie de comités inter-universitaires, avoir servi dans
l'administration comme chef de Département ou doyen par exemple, avoir
été très présent dans le campus, avoir
été Ò visible Ó, en dehors du campus.
On a dit que les professeurs étaient enfermés dans des
Ò cages de verre Ó, où ils sont sans arrêt
observés par ceux qui les entourent.
Le jugement sur les publications s'appuiera sur les commentaires, faits par
écrit ou oralement, par les professeurs chargés de juger de leur
valeur.
Quant à l'enseignement, une trentaine de questions, semblables pour tous
les cours, permettent aux étudiants, à la fin du semestre, de
juger leurs professeurs, en les notant de 0 à 5. Une fois que ces notes
auront été traitées par ordinateur, ces réponses,
mises ensemble pour former Ò le guide de
l'étudiant Ó, pourront être consultées dans
plusieurs bureaux du campus. Elles permettront aux étudiants de mieux
choisir les cours qu'ils comptent suivre les semestres suivants.
En ce qui concerne la bonne citoyenneté, le troisième volet,
chaque année, tous les enseignants doivent faire, au président de
leur Université, un rapport obligatoire donnant la liste de toutes leurs
activités, dans le campus et hors du campus.
On voit donc que le jeune professeur, arrivant dans un campus, sera
obligé de travailler énormément pour satisfaire à
toutes ces conditions requises, qui lui laissent très peu de temps libre
pour sa vie personnelle. Evidemment, une fois qu'il aura obtenu la
Ò tenure Ó, il sera plus libre puisqu'aucune contrainte
de temps ne pèsera plus sur lui, sauf s'il veut accéder
rapidement au rang de professeur le plus élevé. Les congés
sabbatiques, en principe un an tous les sept ans, aident les professeurs
à poursuivre leurs recherches, sans autre contrainte, mais en raison des
restrictions budgétaires, ils sont de plus en plus difficiles à
obtenir.
Il arrive que les Universités soient en compétition pour attirer
un professeur important, bien connu, un prix Nobel par exemple, qui pourrait
ajouter au renom de l'établissement. A ce moment-là, ce
professeur se verra offrir une Chaire particulière, à un salaire
très élevé, et dans des conditions de travail
exceptionnelles.
Pendant longtemps, les professeurs étaient tenus de vivre dans le
campus, où ils avaient des appartements qui leur étaient
réservés, ou bien ils pouvaient s'installer tout près du
campus. A partir de la guerre du Vietnam, où beaucoup de restrictions
anciennes ont disparu, les professeurs ont pu résider là
où ils le voulaient, mais à condition d'être disponibles
facilement pour remplir toutes leurs fonctions.
Chaque Université à ses caractéristiques propres, son
histoire, ses traditions, son esprit. On mettra le jeune professeur à
l'épreuve pour savoir s'il a compris cela et s'il est prêt
à perpétuer les traditions de l'établissement.
Les salaires des professeurs sont décidés par le Conseil
d'Administration de l'Université. Dans les Universités qui
dépendent des Etats, les augmentations sont uniformes et l'on sait
qu'elles seront d'un certain pourcentage, 2, 3, ou 4%, pour chaque enseignant.
En plus, il y aura des fonds spéciaux pour récompenser le
mérite, justifié par les diverses activités de
l'enseignant.
Dans les Universités privées, chaque Département a une
enveloppe financière représentant les sommes qui seront
allouées, pour l'année suivante, aux professeurs des trois rangs
les plus bas. Ce sont les professeurs de rang le plus élevé qui
sont chargés de distribuer ces augmentations, selon ce qu'ils pensent
des divers bénéficiaires. Les salaires des professeurs de rang le
plus élevé sont décidés par le Chef du
Département et par un Comité interdépartemental.
Les Universités entretiennent des liens très étroits avec
leurs Anciens Elèves, en adressant à chacun d'entre eux une revue
hebdomadaire ou mensuelle, selon les cas, les mettant au courant de ce qui se
passe dans le campus et donnant des renseignements sur eux, tels que les ont
fournis les responsables de chacun des groupes d'Anciens Elèves
répartis, à travers tout le pays.
Ceci permet de garder des contacts nationalement et de pouvoir utiliser toute
l'aide que, selon les besoins, ils sont prêts à fournir à
leur "Alma Mater ". Les Universités privées ne vivent que
grâce à la générosité de leurs Anciens, qui
sont sollicités par le Bureau du Développement, comprenant des
spécialistes qui, pour trouver des fonds, ne font que prospecter dans la
région qui leur a été assignée.
Pour donner une idée de l'optimisme qui règne en ce moment aux
Etats-Unis, les grandes Universités font des levées de fonds pour
les cinq ou dix ans à venir qui atteignent, pour les plus riches, le
milliard de dollars, c'est-à-dire 5 milliards de francs.
Aux Etats-Unis, tout passe par les Universités, associées aux
grands centres de recherches privées, notamment en ce qui concerne les
sciences, les mathématiques et l'ingénierie. Elles obtiennent des
contrats provenant, soit du Gouvernement fédéral, soit du secteur
privé. Il n'est pas rare qu'un grand chercheur, par exemple un prix
Nobel, travaille pour une entreprise privée et enseigne aussi, à
temps partiel, dans une Université.
De plus, les Universités sont des centres d'activités culturelles
de toutes sortes, où les étudiants sont encouragés
à créer. Elles attirent des artistes, peintres, sculpteurs,
musiciens célèbres, ainsi que des écrivains, qui y
viennent enseigner. Souvent, une Université, dont le campus est en
dehors d'une grande ville, sera le centre d'attraction culturelle de toute la
région.
On peut voir, en conclusion, que les Universités américaines ont
une vision de l'avenir tout à fait positive. Grâce à la
souplesse de leur fonctionnement et aux facilités qu'elles ont de
pouvoir innover dans tous les domaines, elles préparent une jeunesse qui
va pouvoir assumer les nombreuses responsabilités dont elle sera
chargée.
1
Une note d'information de la DEP
(février 1996) révèle que si la durée du processus
d'insertion professionnelle des jeunes diplômés s'est
allongée, leur taux de chômage reste limité : 7 %
pour les titulaires d'une licence, d'une maîtrise ou d'un doctorat cinq
ans après la fin de leurs études contre 12 % pour les
titulaires du seul baccalauréat général.
2
La dépense moyenne par lycéen (cycle
général) serait de 45.000 F, de 56.700 F en cycle technologique
et de 52.500 F en cycle professionnel contre 33.500 F pour un étudiant
d'université (hors IUT et ingénieurs).
3
Le coût d'un cycle en classe préparatoire serait de
70.000 F, en BTS de 56.000 F, en IUT de 52.000 F et en DEUG de 32.000 F.
4
Le coût annuel moyen d'un étudiant français
est de 32.000 F contre environ 62.000 F aux Etats-Unis ou au Japon et 35.000 F
en Allemagne ou au Danemark.
5
Le taux d'accès à l'enseignement supérieur
avoisinait en 1991 64 % aux Etats-Unis, 53 % au Japon, 42,6 % en
Allemagne, 44,4 % en France et 27,7 % au Royaume-Uni.
6
" Les bacheliers dans l'enseignement supérieur.
Documents CEREQ n° 113, série Observatoire, janvier
1996. "
7
Voir l'audition de M. Daniel Bancel, recteur de l'académie
de Lyon, du 19 juin 1996.
8
La rénovation des premier et second cycle universitaire,
rapport 1996 - IGAEN -
9
Voir le compte rendu de l'audition du 31 janvier 1996 de
M. Daniel Laurent, président de l'université de
Marne-la-Vallée.
10
n° 241, octobre 1996.
11
Voir audition de M. Dominique de Calan, du 7 février 1996.
12
Une enquête du CEREQ de 1992 a tenté de mesurer
l'évolution du risque de chômage et de déclassement des
diplômés : deux ans après la sortie de
l'université, leur taux de chômage est passé de 5 %
à près de 11,5 % de 1988 à 1992. Le
déclassement des diplômés s'est également
aggravé puisque 73 % des diplômés d'IUT et de BTS
trouvaient un emploi de type professions intermédiaires ou cadres en
1991 contre 91 % en 1988.
13
voir audition de M. Jean-Louis Aucouturier, président du
CNE, du 19 juin 1996.
14
voir p. 42 du rapport.