OBSERVATIONS PRÉSENTÉES PAR M. IVAN
RENAR,
VICE-PRÉSIDENT DE LA MISSION
membre du groupe communiste républicain et citoyen
La mission d'information sur l'information et l'orientation
des étudiants des premiers cycles universitaires a effectué un
important travail, riche, diversifié. Les nombreuses auditions, les
déplacements sur le terrain ont permis de mieux cerner la
problématique et d'affiner des propositions parfois très
pertinentes. Je ne peux également que me féliciter du respect
constant des apports, des idées de chacun de ses membres.
Au-delà de ce travail, le rapport et les conclusions souffrent à
mon sens d'une faiblesse de fond qui a guidé mon abstention à
leur sujet. Cette prise de position peut tenir en deux arguments majeurs :
- l'absence de références précises aux moyens
nécessaires à la réussite en premier cycle,
- la tentation de rendre l'université responsable de tous les maux de la
société.
·
Quels moyens pour l'université du XXIe siècle ?
Le rapport formule plusieurs propositions intéressantes : meilleure
orientation, meilleure connaissance du milieu universitaire dès le
lycée, multiplication des passerelles entre les différentes
filières, etc... Il y a là quelques pistes qui permettraient
d'améliorer l'orientation des étudiants et de réduire
ainsi le taux d'échec.
Ces propositions permettront-elles d'atteindre l'objectif d'une
réduction de l'échec sans que soit menée une
réflexion parallèle sur les moyens nécessaires en termes
humains, financiers, matériels pour permettre à
l'université d'accomplir ses missions ?
Rien n'indique que l'échec des étudiants trouve son origine dans
le processus de démocratisation de notre enseignement supérieur,
à l'inverse même, la démocratisation est aujourd'hui une
réalité et une nécessité, économique,
culturelle, pour notre pays. Cette démocratisation se doit donc de
permettre au plus grand nombre de réussir.
C'est à l'aune de cette exigence que doivent se mesurer les efforts
à entreprendre.
Soyons clairs. Pour nombre d'étudiants aujourd'hui la réussite
à l'université, et tout particulièrement au sein des
premiers cycles, relève d'un véritable " parcours du
combattant " : difficulté d'inscription dans les
filières de son choix, manque d'enseignants, de personnels
administratifs et techniques, exiguïté des locaux pour
étudier, difficultés matérielles pour se loger, se
nourrir, parfois se soigner... Ce sont là autant d'obstacles à
surmonter alors que l'entrée dans " ce monde inconnu "
nécessiterait un encadrement et un soutien plus importants.
L'échec relatif du système d'orientation est celui du manque des
moyens qui lui sont consacrés. La bonne volonté, les
idées, les compétences sont là, elles doivent être
encouragées et multipliées : c'est une affaire de budget et
de volonté politique. Lutter contre l'échec, c'est aussi et
surtout mener une action de grande ampleur contre la sélection sociale
qui demeure et qui atteint durement les étudiants d'origine sociale
modeste.
Une révolution des esprits est à mener dans ce pays,
l'échec coûte plus cher à la Nation que la réussite.
·
L'université ne peut régler à elle seule tous
les maux de la société.
On ne saurait également appréhender la question de
l'université en dehors de son contexte, à savoir la crise
très forte qui marque toute la société.
L'université ne vit pas en vase clos : la réalité de
la société française aujourd'hui c'est l'existence de plus
de trois millions de chômeurs, de plus de cinq millions de sans emploi.
C'est la généralisation de la précarité.
L'échec à l'université, c'est aussi et très
largement l'absence de débouchés et d'emplois à la sortie.
Aussi efficaces soient-elles, l'orientation et la formation resteront
impuissantes si les emplois n'existent pas. D'où la
nécessité d'une autre politique économique et sociale
axée sur l'emploi et la satisfaction des besoins de tous.
N'est-il pas temps de concilier progrès économique et
progrès social ? Poser l'hypothèse d'une
société de croissance nouvelle et de plein emploi justifie le
besoin de formation de haut niveau pour la majorité des citoyens. La
démocratisation de l'enseignement supérieur, incluant la
réussite du grand nombre est bien entendu une question de justice mais
elle est aussi une nécessité pour le développement de la
société. L'enseignement supérieur doit posséder les
moyens nécessaires pour former les citoyens de demain, les former
à un travail, les former pour leur permettre de maîtriser les
évolutions scientifiques et techniques d'un monde en continuelle
transformation.
On ne saurait traiter des problèmes des premiers cycles universitaires
sans sortir du strict cadre de l'université. Des questions
extérieures au système universitaire comme le chômage,
pèsent pourtant lourdement sur lui. Réforme de
l'université et réformes dans la société sont
étroitement liées.