2. Les modalités
a) Enrayer la multiplication des programmes d'action communautaire
Le bon fonctionnement du marché unique requiert des
règles communes et un contrôle de la loyauté de la
concurrence ; il ne demande pas que soient multipliées les
interventions communautaires sous forme de programmes d'action dans les
domaines les plus divers. Ces programmes, consistant en pratique à
subventionner des organismes ou des projets, ne sont pas seulement discutables
au regard du principe de subsidiarité, mais également peu
opportuns dans une période où les Etats membres sont durablement
engagés, dans le cadre du processus d'union économique et
monétaire, dans un effort d'économies budgétaires.
Maîtrise des dépenses à l'échelon national, gestion
dispendieuse à l'échelon communautaire : un tel
schéma traduirait fort mal le principe de subsidiarité !
Bien au contraire, la Communauté se doit, dans l'esprit de ce principe,
de faire preuve d'au moins autant de rigueur que les Etats membres.
Il serait à tout le moins nécessaire, dans cette optique, que le
Gouvernement s'oppose désormais à tout programme d'action
fondé sur l'article 235 du Traité ; cet article
demandant l'unanimité des Etats membres, une telle attitude suffirait
à éviter le lancement des programmes dont l'utilité et la
conformité au principe de subsidiarité sont les plus incertaines,
puisqu'ils ne peuvent s'appuyer sur une disposition précise des
Traités et qu'aucun d'eux ne peut passer pour être
nécessaire au fonctionnement du marché commun.
b) Réformer la politique de cohésion
La politique de cohésion s'est développée
sans prendre en compte le principe de subsidiarité. Sa gestion actuelle
entraîne l'approbation par la Commission européenne d'une
multitude de programmes répondant à six principaux objectifs et
couvrant au total une très grande proportion du territoire
communautaire :
ainsi la politique d'aménagement du territoire
se trouve-t-elle de fait partiellement transférée à un
échelon plus éloigné du " terrain ".
Le degré élevé de centralisation de la politique de
cohésion (malgré les progrès enregistrés lors de la
réforme de 1993) ne semble pas, par ailleurs, être un facteur
d'efficacité incontestable, puisque l'augmentation considérable
des moyens de la politique de cohésion depuis 1988 a eu des effets
très inégaux selon les pays
(10(
*
))
.
De plus, la politique de cohésion revient à faire intervenir la
Communauté, par ses décisions de cofinancement, dans un grand
nombre de domaines où elle n'a normalement que des compétences
résiduelles ou très délimitées : culture,
environnement, aménagement rural, politique industrielle... Le principe
de subsidiarité se trouve ainsi contourné.
Dans l'optique de l'élargissement de l'Union, la politique de
cohésion devra nécessairement être revue. Les pays
associés d'Europe centrale et orientale, compte tenu de leur niveau de
développement, sont appelés à bénéficier
tout particulièrement de l'effort de cohésion. Une extension
à ces pays des aides structurelles sans réforme de celles-ci
provoquerait une hausse de 60 % des dépenses qui pèserait
lourdement sur le budget des pays contributeurs. La révision des
perspectives financières de l'Union qui interviendra en 1999 devra donc
comprendre une réforme de la politique de cohésion : pour
votre rapporteur, une telle réforme devrait principalement se traduire
par une meilleure prise en compte du principe de subsidiarité, de
manière à maîtriser les dépenses et à
rapprocher des citoyens des centres de décision.
Mme Monika Wulf-Mathies, chargée des politiques régionales
au sein de la Commission européenne, s'est elle-même
prononcée, dans le cadre de la préparation du Conseil
européen de Madrid, en faveur d'une "
réforme
approfondie
" des politiques structurelles après 1999, qui
serait "
fondée sur une concentration géographique et
thématique des activités
" en vue d'aboutir à un
système "
plus efficace, mieux géré, et soumis
à une meilleure discipline "
(11(
*
)).
Lorsqu'elle a examiné, au début de l'année, le rapport de
M. Denis Badré sur l'élargissement à l'Est, la
Délégation du Sénat a approuvé ce principe de
concentration des aides et souhaité qu'après 1999 les aides
visent un petit nombre d'objectifs précis et, sauf le cas de certains
grands projets structurants, soient réservées aux régions
en retard de développement (actuel objectif 1).
On obtiendrait
ainsi une restitution partielle de compétences aux Etats membres en
matière d'aménagement du territoire, la Commission
européenne étant là, en tout état de cause, pour
faire respecter la loyauté de la concurrence dans le marché
unique.