C. MIEUX DEFINIR LE CHAMP D'INTERVENTION DE L'UNION

1. Les compétences

a) Redonner sa signification au recours à la directive

Lors des débats de 1992-1993 sur la subsidiarité, la Commission européenne a fait remarquer que, depuis les origines de la Communauté, elle avait privilégié le recours à la directive sur le recours au règlement et que ce choix traduisait déjà le souci de subsidiarité. Cette affirmation serait exacte si la directive était bien en fait ce qu'elle est en droit, c'est-à-dire un texte définissant un résultat à atteindre tout en laissant aux Etats membres le choix des moyens ; mais en pratique, il n'en est rien : les directives communautaires sont devenues presque aussi détaillées que des règlements, et leur valeur contraignante est presque aussi grande, puisque la Cour de Justice leur a reconnu un effet direct en l'absence de mesures nationales de transposition. Ainsi, le choix de la directive par rapport au règlement ne témoigne-t-il pas, en réalité, d'une prise en compte de l'exigence de subsidiarité.

Il serait donc souhaitable, d'une part, de redonner sa signification à la notion de directive, caractérisée certes par l'obligation de résultat, mais aussi par le libre choix des moyens, et, d'autre part, de ne recourir au règlement que lorsqu'il constitue la seule formule possible pour atteindre le résultat recherché. Pour qu'une telle orientation soit effectivement appliquée, elle devrait résulter plus clairement du Traité lui-même.

b) Préciser le partage des responsabilités

Il est vain d'espérer régler de manière cartésienne le partage des compétences entre l'Union et les Etats membres ; mais l'on ne peut non plus se satisfaire du flou actuel, qui dilue les responsabilités et désoriente les citoyens. Dans bon nombre des cas, la rédaction très vague des traités pourrait être remplacée par des formules plus précises, indiquant plus nettement ce qui ne peut entrer dans les compétences de l'Union.

On fera valoir qu'on ne peut enfermer le développement de la Communauté dans un cadre trop rigide. Mais, outre le fait qu'entre un corset trop étroit et le flottement actuel, il existe une marge de progrès raisonnable, on doit souligner qu' une répartition plus précise des compétences par les Traités eux-mêmes n'interdirait nullement toute évolution : elle obligerait simplement à ce que les évolutions aient lieu au grand jour, avec l'approbation des Parlements nationaux.

Le flou actuel est d'autant plus préoccupant que l'article 235 du traité (destiné à l'origine à permettre à la Communauté de prendre des mesures dans des domaines où le traité n'avait pas prévu de pouvoir d'action, dès lors que ces mesures s'avéraient nécessaires au fonctionnement du marché commun) a été progressivement détourné de son sens initial pour être considéré, en pratique, comme autorisant à prendre toute mesure correspondant à un objectif, même très vague, retenu par le Traité et pour lequel celui-ci ne prévoit pas de pouvoir d'action. Comme les objectifs de la Communauté ont été définis, au fil des révisions, de manière de plus en plus large, la combinaison du vague des objectifs et de l'interprétation extensive de l'article 235 conduit à une situation où les compétences de la Communauté peuvent être étendues de manière pratiquement illimitée dès lors qu'il existe pour cela un accord au sein du Conseil. Une définition plus précise des objectifs et compétences communautaires limiterait le risque de centralisation rampante inhérent à une telle situation.

Il est vrai qu'un effort de clarification soulèverait bien des difficultés politiques, et que l'ordre du jour de la CIG en cours est suffisamment chargé pour qu'il ne soit pas judicieux de proposer d'y ajouter un exercice aussi périlleux. Cependant, ainsi que votre rapporteur l'a suggéré plus haut, les Parlements nationaux pourraient, dans un premier temps, recevoir collectivement la tâche de préparer le terrain à cette clarification, éventuellement en vue d'une modification ultérieure des traités.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page