II. COMPTE RENDU ANALYTIQUE

RÉUNION DU VENDREDI 8 DÉCEMBRE 1995

PRÉSIDENCE DE M. Ady JUNG.
Président du Conseil Interparlementaire
Consultatif de Benelux
(Parlement Benelux)

La réunion est ouverte à 14 heures 20

ALLOCUTION DU PRÉSIDENT

M. Jung, Président du Conseil interparlementaire De Benelux : Votre assistance à la présente conférence témoigne de votre intérêt de voir se développer la Communauté européenne. C'est à la demande de certaines commissions que le Parlement Benelux a décidé d'organiser cette conférence en collaboration avec le secrétariat général de l'Union économique Benelux.

Nous avons invité, aujourd'hui, 23 Assemblées Parlementaires. Je tiens à dire aux différentes délégations combien je suis sensible à leur présence durant nos travaux.

Nous remercions aussi le Gouvernement luxembourgeois et la Chambre des députés du Luxembourg, ainsi que le ministre de la Justice luxembourgeois, M. Fischbach, et M. Vande Lanotte, ministre de l'Intérieur de Belgique et président en exercice du comité exécutif de Schengen. Nous remercions également tous ceux qui ont une mission particulière ici.

Après les conférences de 1989 et de 1992, ceci est la troisième conférence concernant les accords de Schengen nous souhaitons qu'elle revête aussi une Portée politique.

Nous allons procéder à une évaluation de la période allant du 26 mars 1995 à ce jour, en ce qui concerne les accords de Schengen.

Plusieurs partenaires européens sont encore hésitants. Le Parlement Benelux souhaite combler le déficit démocratique des accords de Schengen.

Cette conférence va permettre une information complète de la situation actuelle. Nous aborderons trois thèmes : l'analyse de six mois de fonctionnement des accords de Schengen, un exposé relatif l'adhésion des nouveaux membres cl, enfin, le contrôle parlementaire.

Demain, deux propositions de déclarations finales vous seront soumises. À 13 heures, se tiendra une conférence de presse.

Je tiens à insister sur la tradition communautaire des pays de Benelux. La libre circulation entre ces trois pays a eu une grande importance économique, nous plaçant au quatrième rang des pays exportateurs. De plus, l'union monétaire belgo-luxembourgeoise devrait convaincre les sceptiques quant à l'union monétaire européenne.

La lutte contre le trafic de stupéfiants, l'immigration clandestine et la criminalité doivent nous préoccuper.

Il faut protéger les minorités des abus des autres. Telle sera notre mission. (Applaudissements sur tous les bancs)

L'ÉTAT DE LA QUESTION

RAPPORT PAR M. FISCHBACH

M. Fischbach , ministre de la Justice du Luxembourg, au nom du Comité exécutif : Je voudrais excuser M. Vande Lanotte, qui nous rejoindra au cours de cet après-midi, si les conditions atmosphériques le permettent. Je ne suis pas en possession de toutes les informations dont dispose la présidence, mais je tenterai néanmoins de vous faire un exposé complet.

Le 26 mars 1995, la libre circulation des personnes, décidée par les accords de Schengen, est devenue opérationnelle sur les territoires de sept États membres signataires les pays du Benelux, l'Allemagne, la France, l'Espagne et le Portugal.

Préfigurée dans l'article 7 du traité de Rome, cette libre circulation ne put être réalisée en raison de divergences d'interprétation. Au début, le Benelux, l'Allemagne et la France avaient décidé de créer un espace de libre circulation. L'accord de Schengen fut réalisé en 1985 et la convention signée en 1991 pour, finalement, être mise en vigueur le 26 mars dernier.

L'Italie a rejoint l'espace Schengen en 1990, l'Espagne et le Portugal en 1991 et la Grèce en 1992.

En 1994, nous avons admis l'Autriche comme nouveau membre du Comité exécutif.

Les critiques contre cet espace de libre circulation n'ont toutefois pas manqué. Certains soutiennent que la sécurité des citoyens ne serait pas assurée par celle convention. D'autres considèrent Schengen comme une nouvelle « forteresse européenne » rendant rentrée dans l'espace Schengen plus difficile.

Ces craintes sont-elles fondées ? Schengen a fait ses preuves et l'opinion publique l'a accepté favorablement. Des problèmes subsistent certes.

Les contrôles aux frontières intérieures ont clé abolis, mais la France, en vertu de l'article 2 § 2 du traité, a décidé de maintenir durant un délai de six mois supplémentaires les contrôles intérieurs en invoquant qu'il y avait des lacunes dans le contrôle du trafic des stupéfiants.

En décembre 1994, la France avait pourtant donné son accord pour la mise en vigueur de la convention. En juin 1995, elle a changé d'avis et elle continue à pratiquer les contrôles aux frontières intérieures.

On a envisagé la création de commissariats communs aux frontières extérieures. Aux frontières intérieures, les contrôles sont effectués de la manière prévue dans les accords et fonctionnent à la satisfaction générale.

En ce qui concerne les aéroports, la situation est, dans l'ensemble, satisfaisante. Certains aéroports doivent cependant encore se mettre en ordre.

L'aéroport d'Amsterdam sera prêt à la mi-décembre 199S, tous les autres aéroports pratiquant la séparation entre membres Schengen et non-membres Schengen. Si cette séparation a créé quelques inconvénients, les passagers membres Schengen sont très satisfaits du système. La situation des marins sera, elle aussi, bientôt réglée.

En ce qui concerne les ports, les aéroports et les gares internationales, les autorités ont réalisé les investissements nécessaires en évitant les files d'attente aux frontières extérieures.

Le système d'information Schengen est un moyen de contrôle efficace aux frontières extérieures et lors de la délivrance de visas.

Depuis le 26 mars dernier, l'ordinateur central de Strasbourg et les systèmes nationaux sont opérationnels 24 heures sur 24.

Ce système est plus efficace que les systèmes nationaux traditionnels. Ainsi dans le fichier SIS figurent 800.000 véhicules volés. 110.000 armes volées, 1,3 million de documents d'identité volés e 560.000 personnes recherchées. Ajoutons quelque 800.000 étrangers non admissibles et 14.000 étrangers clandestins.

Un premier bilan est plus que positif. Au Luxembourg, la consultation des fichiers a permis l'identification de 550 personnes et véhicules recherchés, ce qui est très appréciable.

Les préparatifs sont en cours pour l'intégration, à la mi 1996, de l'Italie et de la Grèce.

La coopération consulaire entre les pays Schengen est bien engagée : consultations régulières, contacts informels fréquents. Cette coopération doit être approfondie.

En ce qui concerne l'asile, certains États membres ont estimé que les procédures d'accueil devaient être améliorées, notamment pour les réfugiés dépourvus de papiers ; il y a aussi les délais trop lents de réponse des États et l'harmonisation des preuves de responsabilité des États. La recherche de solutions pratiques est en cours.

Dès la ratification de la convention de Dublin, le chapitre asile cessera ses effets, le droit communautaire s'appliquant complètement.

La lutte contre les stupéfiants mise en application a développé la coopération des services de police et des douanes. Les acquis de certaines opérations on été examinés et un aide-mémoire a été élaboré. Des opérations conjointes ainsi que certaines expériences seront poursuivies. Les contrôles antidrogue ont fait l'objet de débats approfondis. Le groupe « stupéfiants » a fait un examen global pour déterminer risques et le développement des effectifs.

L'évolution de la situation aux frontières extérieures sera constamment examinée pour réaliser des adaptations en fonction des spécificités locales.

Des difficultés subsistent, auxquelles on tente de remédier. La coopération policière se développe Tous les États ont pris des initiatives pour faire connaître les accords de Schengen à leur police ou ont organisé des formations ou des recyclages. Un memento de coopération policière a été édité.

La protection de la vie privée des personnes est prévue sur le plan national (article 114, désignation d'une autorité nationale) et sur le plan supranational (article 115, désignation d'une autorité supranationale). Ces autorités doivent contrôler si la protection la vie privée est bien réalisée. L'autorité de contrôle commune s'est réunie à quatre reprises et a adopté son règlement. Elle n'a pas encore publié de rapport à l'intention des autorités nationales, ce qui me parait normal, vu la brièveté de la durée de fonctionnement.

Si vous avez des questions à poser, nous y répondrons volontiers. (Applaudissements)

CONTRIBUTIONS DES DÉLÉGATIONS

M. Van der Heijden , porte-parole du parlement Benelux : L'ancien ministre français, M. Alain Peyrefitte, a été arrêté la semaine dernière aux pays Bas. alors qu'il tentait d'entrer dans le pays sans passeport. Il a évidemment été relaxé sur-le-champ L'intéressé a souligné lui-même qu'il était un citoyen de Schengen. Cependant, il oubliait que la France n' pas encore renoncé à opérer des contrôles à ses frontières, de sorte que la convention de Schengen n'est pas applicable aux Français se rendant à l'étranger.

Notre objectif est d'entamer une discussion sur la base de l'introduction de M. Fischbach, afin d'adopter une déclaration finale, qui pourrait à son tour. Servir de source d'inspiration aux responsables politiques et aux pouvoirs exécutifs.

L'accord de Schengen est, en fait, un paradoxe. Il octroie une liberté de mouvement qu'il limite toutefois par des mesures compensatoires. Cet accord permet aux citoyens de voyager librement, mais crée en même temps de nouveaux systèmes de contrôles.

Son entrée en vigueur, en mars 1995, comprenait une période transitoire de trois mois. Cette période est entre-temps révolue. La première évaluation témoigne d'une certaine satisfaction, sauf de la part de la France, qui souhaitait une prolongation de la Période d'essai.

Les conséquences négatives de la suppression des frontières intérieures concernent la politique en matière de visas et d'asile, la lutte contre la drogue, le SIS, les contrôles aux frontières extérieures et la Protection des données personnelles.

En ce qui concerne la politique en matière de visas et d'asile, on observe une satisfaction générale. Il existe une bonne coordination entre les instances nationales qui délivrent les visas. Une liste commune des pays soumis à l'obligation de visa a été adoptée L'on envisage un visa « Schengen » autocollant

En raison de l'évolution politique de ces dernières années, la politique d'asile est devenue l'élément principal de l'accord de Schengen. Là aussi, le terme « harmonisation » est le mot-clé. À cette fin. il est procédé à un inventaire des politiques nationales des différents pays. Un accord est déjà intervenu pour faire traité le dossier par le pays qui reçoit la première demande. Néanmoins, l'échange de données concernant des demandeurs d'asile demeure une pierre d'achoppement.

Pour ce qui concerne la coopération transfrontalière policière et judiciaire, nous sommes sur la bonne voie. La question de la drogue est un des problèmes transfrontaliers. Sur ce point, les positions françaises et néerlandaises, par exemple, sont difficilement conciliables.

Le Système d'information de Schengen renferme des renseignements sur les citoyens des pays signataires. Dans l'ensemble, ce système fonctionne de manière satisfaisante. Mais là encore, la France est mécontente. C'est pourquoi le système doit encore être étendu et perfectionné.

Nous sommes sur la en bonne voie, mais il subsiste quelques problèmes. On a souvent le sentiment que l'accord de Schengen ne concerne plus l'intérêt économique que présente la libre circulation des biens et des personnes : la problématique acquiert une dimension de plus en plus politique.

L'entrée en vigueur de Schengen n'est pas un aboutissement, mais bien une amorce. Dans certains domaines, un processus décisionnel plus ferme s'impose. Cette réunion pourra y contribuer.

L'Angleterre refuse de participer pour des raisons politiques et l'Irlande s'aligne sur la position anglaise. Plusieurs pays sont opposés à une participation de la Grèce en raison du manque de fiabilité de ses frontières. L'accord de Schengen a été conclu en 1985 ; ce n'est qu'à la fin de 1994 que des pourparlers ont été entamés avec plusieurs autres États membres de l'UE. (Applaudissements)

M. Bourgeois (Belgique) : C'est une bonne chose de s'assurer, par une évaluation régulière de l'accord de Schengen, que l'Europe se trouve toujours sur la bonne voie. En effet, la population est confrontée très directement à cet aspect de l'unification. Le libre franchissement des frontières suscite automatiquement des problèmes de sécurité. La façon d'aborder ces problèmes est déterminante pour la crédibilité de l'accord de Schengen.

À cet égard, je me demande s'il ne serait pas possible de parvenir à une meilleure collaboration policière avec la France. À ce jour, en effet. Schengen n'a guère d'effets à la frontière franco-belge. Aussi, j'aimerais entendre la réaction de la délégation française à mes questions.

M. Janssens (Belgique) : En Belgique, le contrôle parlementaire des accords de Schengen est assuré par la Chambre des représentants et le Sénat. Jeudi prochain, nous aurons une réunion avec le ministre Vande Lanotte, au sein de notre commission de l'Intérieur ; c'est dire combien la présente réunion est la bienvenue.

Je pense que les relations intra-Schengen sont en voie d'apaisement. J'aimerais cependant en avoir la confirmation de la part de nos collègues français. On a parlé de patrouilles conjointes ainsi que de commissariats mixtes. Ce seraient là de bons points. Par ailleurs, la situation entre la France et les Pays-Bas semble également s'harmoniser.

Ce qui, à mon sens, est extrêmement intéressant, c'est que l'Allemagne et le Luxembourg ont renforcé leur coopération policière, montrant ainsi la bonne voie pour d'autres accords.

Je m'inquiète cependant des résultats d'un sondage réalisé fin novembre et révélant que 46 % des Européens sont opposés à la suppression des contrôles ; l'opposition maximale venant de la Suède, avec 71 % d'opposants (la France compte 69 % d'opposants).

Nous devrions faire un effort d'information à l'égard des citoyens

M. Stratzemberger (Autriche) : Mon pays consent des efforts énormes pour respecter les conventions d'application. Cependant, nous nous trouvons dans une situation particulière. Nous sommes, en effet, un petit pays qui a de longues frontières extérieures, principalement avec l'Europe de l'Est. Nous sommes donc confrontés à de sérieux problèmes en matière de criminalité. Pour l'heure, nous mettons sur pied nos propres services de contrôle, chargés également de surveiller la frontière « verte ». Nous espérons pouvoir bénéficier de l'appui nécessaire de ta part de nos partenaires européens en la matière.

L'Autriche est dotée d'une législation rigoureuse sur le chapitre du respect de la vie privée. Nous sommes des précurseurs en ce domaine. Dans le cadre de l'Union européenne, force nous est toutefois de constater que certains États membres, soit ne possèdent pas une telle législation, soit appliquent une réglementation beaucoup moins sévère. C'est là pour notre pays un sujet de préoccupation.

L'Union européenne a insisté pour que, d'ici à deux ans, tous les États membres soient dotés d'une législation adéquate en matière de protection des données relatives à la vie privée. Tous les pays seront-ils en mesure de respecter ce délai ?

M. Regemsburger (Allemagne) : L'Allemagne a été le moteur de l'accord de Schengen. Tous les États signataires considèrent que la suppression des frontières intérieures ne peut se traduire par une diminution de la sécurité. La réalité est malheureusement différente. Les contrôles aux frontières représentaient un bon instrument de sécurité. Ce filtre a aujourd'hui disparu. Quelle solution pouvons-nous trouver à ce problème ?

Le Système d'information de Schengen peut permettre de résoudre cette difficulté, mais tous les États membres doivent alors introduire d'urgence leurs données dans le système.

Par ailleurs, il faut regretter aussi que tous les pays ne fassent pas preuve de la même souplesse que l'Allemagne en ce qui concerne l'observation transfrontalière, le contrôle et les poursuites.

Enfin, il y a l'énorme problème du trafic des stupéfiants.

Des experts allemands sont arrivés à la conclusion que la souplesse qui caractérise la politique des Pays-Bas en matière de toxicomanie est la cause principale de l'accroissement considérable de l'offre de drogues douces sur le marché, non seulement en Allemagne mais aussi dans d'autres pays. La délégation néerlandaise pourrait-elle me dire si les Pays-Bas envisagent éventuellement d'adapter leur politique en matière de stupéfiants ?

Mme Van Lancker (Parlement européen) : Il est dommage que le Parlement européen ne soit pas associé à cette problématique.

Je tiens cependant à adresser au Parlement Benelux tous mes voeux de succès pour l'initiative d'organiser la présente réunion, qui constitue incontestablement une réponse au déficit démocratique. Je me réjouis, en effet, de constater que tous les pays signataires de l'accord de Schengen ont été invités de même que les députés européens.

Des réserves ont déjà été formulées à l'égard de la France, qui semble toujours poser des conditions l'application des accords de Schengen.

Les accords de Schengen remplacent les contrôles aux frontières intérieures par une collaboration transfrontalière entre les services de police. C'est loin d'être parfait. Les Parlements et appareils judiciaire respectifs ont trop peu d'emprise sur cette collabora lion.

Les contrôles renforcés aux frontières extérieures se déroulent dans le chaos le plus complet. Quels sont les résultats obtenus par la commission spécialisée ?

D'autres orateurs avant moi ont déjà soulevé problème de la protection des données relatives à vie privée. Une uniformisation s'impose à ce niveau.

Enfin, je me demande comment des pays tels que la Norvège ou l'Islande - qui ne font pas partie l'UE - pourront être associés à Schengen.. La poli tique spécifique que mènent lés pays nordiques dans le domaine de la drogue, entre autres, pourrait et un obstacle.

Le Président : Je remercie Mme Van Lancker. Les membres du Parlement européen sont évidemment les bienvenus lors des réunions du Conseil interparlementaire consultatif de Benelux, ce microcosme l'Union européenne.

M. Evangelisti (Italie) : Vous savez tous que l'Italie n'est pas totalement intégrée dans l'espace Schengen. Il y avait certains obstacles législatifs techniques et nous travaillons à résorber ce retard organisant nos structures.

Hier, la Chambre des députés a décidé l'approuver une loi relative aux données personnelles. Il s'agit là d'une information positive.

Enfin, je souhaite vivement que nous en arrivions rapidement à une intégration complète.

M. About (France) : À l'attention M. Fischbach qui s'est étonné du changement de la position France, je rappelle qu'il y a eu du changement dans notre pays. Par ailleurs, un certain nombre d'informations alarmistes nous sont parvenues, dont certaines se sont tristement réalisées, avec les attentats à la bombe, depuis juillet 1995.

À Mme Van Lancker, je répondrai qu'actuellement la sécurité du citoyen n'est pas assurée. La France a eu raison d'appliquer l'article 2, $ 2 car elle était mécontente des dispositions concernant la lutte contre les stupéfiants. Nous ne voulons pas que la nouvelle génération soit la génération `stupéfiants', revenant des Pays-Bas avec des stupéfiants à revendre dans nos banlieues.

La France voudra l'application de tout Schengen, mais de Schengen pour tous.

M. Van Oven (Pays-Bas) : Il est de toute évidence Prématuré de poser un jugement définitif sur le fonctionnement des mécanismes mis en oeuvre par l'accord de Schengen, mais une évaluation intermédiaire s'indique.

Nombre de réalisations ont déjà été enregistrées au cours des quelques mois qui se sont écoulés depuis l'entrée en vigueur de l'accord. Le système connaît bien évidemment quelques problèmes de rodage, mais je salue la présidence belge, qui s'est attelée avec fermeté aux problèmes et qui a réalisé des progrès.

Les Pays-Bas ont notamment rencontré une difficulté concernant un point spécifique, à savoir la séparation physique des passagers à l'aéroport de Schipol.

Le contrôle aux frontières intérieures reste le point névralgique de l'accord. À cet égard, on observe que la France, surtout, est tentée d'invoquer l'article 2, § 2. Mais, cette exception temporaire tend de plus en plus à devenir la règle générale et les pays signataires l'invoquent de plus en plus.

Le Comité exécutif organisera incessamment, à Ostende, une discussion sur l'application de l'article 2, § 2. Des conditions d'application plus strictes y seront définies. Je crains néanmoins que, même alors, on pourra encore recourir de manière pratiquement permanente à la procédure d'exception.

L'article 71 de l'accord traite de l'exportation de stupéfiants. Cela ne signifie nullement que la politique en matière de toxicomanie devra être complètement harmonisée. C'est ainsi que les Pays-Bas opèrent une distinction explicite entre les drogues douces et les drogues dures. Une politique de tolérance en matière de drogues douces doit permettre d'endiguer les exportations vers les pays limitrophes. Je puis ainsi rassurer l'Allemagne.

Pour conclure, j'espère que les différends pourront aussi être aplanis avec la France, qui ne devrait plus avoir recours à la clause d'exception que de manière beaucoup plus sélective.

Mme Reding (Parlement européen) : On a entendu beaucoup de critiques à encontre de la mise en pratique des accords de Schengen. Je pense qu'elles partent du fait qu'on a mal pensé la chose.

N'aurait-il pas mieux valu commencer par la mise en place des systèmes de sécurité et de penser ensuite à la libre circulation, au lieu de faire le contraire ? On aurait dû commencer par une communautarisation des moyens de lutte contre la criminalité. Si Schengen représente un bon pas, on est encore loin du but.

Maintenant, il existe un espace qui est en dehors de toutes les institutions : en dehors de la Cour européenne, des tribunaux nationaux, des Parlements nationaux et du Parlement européen. C'est un espace de fonctionnaires, où les peuples et la justice sont totalement absents.

Je plaide pour une Europe de la justice, un Europol performant qui rendrait toutes nos critiques vaincs. (Applaudissements)

M. Singer (Allemagne) : Je voudrais dire à l'oratrice précédente que, en effet, un déficit parlementaire subsiste toujours pour ce qui est du contrôle du volet policier et judiciaire de l'accord de Schengen.

J'aimerais également souligner un problème spécifiquement allemand. À la frontière orientale de l'Allemagne, nous constatons un important problème d'afflux illégal d'éléments criminels. Cette situation oblige les services de contrôle allemands à se concentrer sur la frontière orientale du pays, ce qui se traduit par un relâchement de nos efforts aux autres frontières.

M. Tremmel (Autriche) : Ma question a trait à la coopération policière en vertu de l'article 39 de la convention d'application. Il faut absolument éviter de susciter parmi la population autrichienne l'impression que la suppression des frontières intérieures soit un facteur d'insécurité. Ainsi nous n'avons pas conclu avec l'Allemagne le même type d'accords qu'avec l'Italie sur le plan des compétences en matière de poursuites. Il convient d'harmoniser d'urgence cette politique.

M. Goris (Belgigue) : Je me demande si le Bureau a déjà examiné sérieusement les diverses approches du problème de la toxicomanie dans les différents pays de Schengen.

À titre d'exemple, les Pays-Bas mènent en la matière une politique de tolérance. En Belgique, il est question d'une initiative législative visant a dé pénaliser l'usage des drogues douces.

Envisage-t-on une approche commune de la problématique des stupéfia nts ?

M. Skyltakos (Grèce) : Je m'exprimerai à titre personnel. J'expliquerai la position de mon parti ; ce n'est pas celle de toute la délégation grecque.

Les réticences entendues ici me paraissent justifiées. En Grèce, il y aurait encore certaines réticences basées sur le fait que, sous le régime des Colonels, on enregistrait les données concernant les personnes, en fonction de leurs opinions politiques.

Il est vrai qu'après la chute de la dictature, en 1974, on a supprimé les indications politiques des fichiers, mais une grande sensibilité continue à exister dans ce domaine.

J'ajoute que, vu la situation géographique de la Grèce, il y a des flux migratoires en provenance de pays à régimes autoritaires. Nous craignons que Schengen n'empêche certains réfugiés d'échapper à des poursuites dans leurs pays. Je pense aux Kurdes ou aux Palestiniens.

Notre pays a beaucoup souffert du système de fichage. Un mauvais accord de Schengen n'est pas facile à améliorer. Il faut absolument certaines garanties.

Vous comprendrez, dès lors, les objections de notre groupe.

Mme Benaki (Grèce) : Le point de vue de mon collègue lui appartient et il n'est pas celui du Gouvernement grec, qui a signé les accords de Schengen. Actuellement nous nous préparons pour nous mettre en conformité avec les dispositions de Schengen notamment en mettant en place une structure complète de protection des citoyens à l'égard des données. Ces travaux aboutiront sous peu.

M. Makkreel (Pays-Bas) : En matière de stupéfiants, l'aspect lié à la santé publique l'emporte sur l'aspect judiciaire aux Pays-Bas. C'est pourquoi nous avons déjà enregistré un certain succès dans ce domaine. Chez nous, la consommation de drogues est faible. Nous ne sommes dès lors pas enclins à modifier fondamentalement notre politique intérieure. Cela dit, nous sommes prêts à lutter au maximum contre l'exportation vers d'autres pays. Quant aux importations, nous n'avons de prise sur elles que pour autant qu'elles empruntent le canal des frontières extérieures. En raison de la suppression des frontières intérieures, il nous est très difficile de contrôler les filières d'importation, via l'Allemagne, des drogues dures provenant essentiellement de la Turquie. Cette responsabilité incombe à d'autres.

M. te Veldhuts (Parlement Benelux) ; J'ai le sentiment que la politique menée par les Pays-Bas en matière de stupéfiants suscite chez de nombreuses délégations étrangères une certaine inquiétude. Toutefois, il semble qu'il ne soit pas suffisamment tenu compte des faits. Le pourcentage des consommateurs de drogues dures est moins élevé aux Pays Bas qu'en Allemagne et qu'en France. Des études scientifiques ont déjà révélé, à plusieurs reprises, que la politique néerlandaise porte ses fruits. Je me réfère à cet égard à un article récent paru dans « The Lancet ». La mortalité due à la consommation drogues dures est moins importante aux Pays-Bas que dans de nombreux pays européens.

J'ai l'impression que les délégations étrangères ignorent ces chiffres.

Je ne nie évidemment pas que les Pays-Bas soient confrontés, eux aussi, à des problèmes liés à la toxicomanie. Au Parlement néerlandais, nous menons actuellement un débat intensif sur la lutte contre les méfaits de la drogue. En toute hypothèse, le trafic de drogues douces et dures fera l'objet d'une approche plus rigoureux.

Pour conclure, je dirai que ce serait une erreur de subordonner la réussite de l'accord de Schengen à la politique néerlandaise en matière de stupéfiants. Si l'on procède d'abord à une évaluation de chaque pays en se référant aux problèmes qu'il rencontre, il sera impossible de mener un débat fructueux.

M. About (France) : En France. 70 % de la drogue saisie provient des Pays-Bas.

On peut faire des remarques sur le vin. Je dirai simplement qu'un verre de bordeaux peut permettre de vivre plus longtemps. J'engage donc la délégation néerlandaise à boire du bordeaux. (Sourires)

REPLIQUE DE M. FISCHBACH

M. Fischbach , ministre : Je remercie les intervenants. J'ai finalement l'impression qu'on n'est pas tellement d'accord sur l'objectif à atteindre, alors que les accords de Schengen ont été ratifiés par les Parlements des États membres.

En 1991, lors de la présidence luxembourgeoise j'ai fait arrêter l'horloge le 30 juin pour inviter les délégations à poursuivre la discussion le 1er juillet et à débloquer le dossier du franchissement des frontières extérieures. Cette convention, qui était sur point d'être signée, a échoué sur le problème Gibraltar.

Quelle que soit l'issue de ce contentieux de Gibraltar, il reste que ce dernier n'a rien de commun avec la finalisation de Schengen. De toutes façons. Gibraltar restera toujours une frontière extérieure. Dès lors, il ne peut y avoir d'impact sur Schengen.

Par ailleurs, on serait actuellement plus loin en cette matière si les 15 membres de l'Union européenne avaient ratifié la convention de Dublin. Si ces deux conventions avaient été ratifiées à temps, on aurait pu assurer la libre circulation des personnes d'une meilleure façon que celle qui existe actuellement.

J'insiste pour que l'on intègre un certain nombre de domaines dans l'Union européenne. Peut-être suffira-t-il d'améliorer l'instrument intergouvernemental À l'époque, Schengen, initiative franco-allemande, était conçue pour préfigurer la libre circulation des personnes en Europe, qui devait entrer en vigueur en 1993 et qui n'a pas pu se faire.

La question a donc été mûrement réfléchie. Il ne faut pas confondre Schengen et Europol, dont un certain nombre d'États ne veulent pas. Il faut une juridiction qui assure une jurisprudence commune. Le principe de l'unanimité nous gêne.

En ce qui concerne les questions, je retiens l'intervention de M Janssens qui souhaite accréditer dune manière plus pédagogique l'idée de la libre circulation auprès de nos citoyens. Ce n'est pas simple, dans la mesure où certains de nos parlementaires ne sont Pas convaincus.

Par ailleurs, j'ai été étonné de l'intervention de M. Regensburger connaissant les positions officielles du Gouvernement allemand, je pense que l'Allemagne est plus que satisfaite de la mise en application des accords de Schengen.

Quant à l'évolution de la criminalité organisée, si l'on est convaincu que chaque pays, seul, ne peut la combattre sans l'appui des autres États, il nous faut réaliser davantage ensemble.

Je rappelle que la libre circulation des personnes est la première finalité de Schengen. Je défie tout Gouvernement faisant partie de Schengen de présenter son premier bilan intérimaire. Je sais que tous ces rapports sont positifs.

Je sais également que plusieurs Gouvernements sont en retard dans la saisie des données, mais tout cela est récent et le retard peut être comblé.

Quant aux contrôles aux frontières intérieures. M. Vande Lanolte nous avait expliqué que la latitude laissée aux pays membres de procéder encore à des contrôles intérieurs avait permis d'engranger des résultats substantiels. La France ne doit pas chercher une lacune derrière les attentats, qui ont commencé le 28 juillet, alors que sa position a changé un mois avant.

Il faut être très clair. Si c'est un problème de frontières extérieures, je demanderai alors à chaque pays de nous présenter son bilan. Il ne faut pas parler de ce problème de frontières extérieures pour en faire un problème de frontières intérieures.

J'espère qu'à partir de 1996, nous continuerons ensemble, au même rythme et dans la même direction.

Quant à la politique de lutte contre la drogue, on entend singulariser un État comme si la convention de Schengen était à l'origine d'un problème. Si problème il y a, il y avait déjà problème avant. M faut tenir compte également de la volonté des Pays-Bas en matière de lutte contre la drogue. Cette démarche devrait nous inciter à revoir nos positions initiales.

Comme les parlementaires autrichiens, je souhaite une harmonisation de la coopération policière. Cela nécessite d'amender la convention. La convention n'a jamais prévu de traiter de la lutte contre la drogue.

Le Président : J'invite les collègues à aborder maintenant des points ponctuels.

Mme Van Lancker (Parlement européen) : Je voudrais revenir à ma question sur le manque de transparence des structures de Schengen ainsi qu'au rôle de la commission spéciale du contrôle aux frontières extérieures et sur celui des commissions de suivi.

Que comptez-vous faire pour une meilleure information ? Si nous ne nous y retrouvons pas clairement nous-mêmes, nous pouvons imaginer ce que doit penser le citoyen !

Et qu'est-ce que la présidence compte faire en matière de respect des droits et devoirs des citoyens ?

M. Van Oven (Pays-Bas) : Je reviens un instant sur la possibilité d'obtenir une dérogation à Schengen en invoquant l'article 2.

La mesure d'exception peut dorénavant être prolongée unilatéralement par l'État membre qui l'applique.

Ne faudrait-il pas, pour l'octroi de cette prorogation, appliquer la même procédure que pour l'octroi initial de la mesure d'exception ?

M. Fishback . ministre : À Mme Van Lancker, je dirai : comment convaincre quand on ne l'est pas soi-même ? On ne peut convaincre que sur la base de résultats probants. J'encourage donc la publication de chiffres et l'organisation de conférences avec le public.

La commission spéciale chargée du contrôle aux frontières extérieures est composée de fonctionnaires des États membres. Elle suit régulièrement l'évolution de l'application des dispositions aux frontières extérieures.

En ce qui concerne la commission de suivi, le suivi incombe au comité central. Nous devrons, au Parlement, discuter du bilan qui sera fait après un an.

À M. Van Oven, qui a soulevé un problème très sensible, je signale que le Gouvernement français est disposé à rediscuter de la portée de l'article 2, §2. Cela se fera lors de la prochaine réunion, le 20 décembre.

Le Président : J'exprime le souhait que cette conférence informative contribue à éclairer l'opinion, comme le souhaite Mme Van Lancker.

Mme Jorgensen (Norvège) : Ne faisant pas partie de l'Union européenne, la Norvège ne peut être membre à part entière de Schengen. Nous nous intéressons cependant à une collaboration sur le plan policier. Un problème pourrait toutefois se poser si la Suède et le Danemark devaient devenir membres à part entière de Schengen, puisqu'il existe une union des passeports entre les cinq États nordiques. D'importants problèmes de contrôle aux frontières pourraient se poser entre la Norvège et la Suède, ces deux pays ayant une très longue frontière commune.

Les gouvernements des pays nordiques sont dès lors conscients de la nécessite d'un accord entre les membres de Schengen et ceux de l'Union nordique des passeports.

La Norvège et l'Islande souhaitent, après la conclusion d'un accord frontalier avec les États de Schengen, créer un plus vaste espace de libre circulation, à l'intérieur duquel la lutte contre la criminalité organisée pourra être menée avec plus d'efficacité.

Eu égard aux deux refus norvégiens d'adhérer a l'Union européenne, je comprends le scepticisme des autres États. Mais qu'ils se rassurent : la Norvège est disposée à accepter l'acquis de Schengen et à se comporter comme un partenaire loyal dans le cadre de Schengen. Nous partageons les préoccupations des autres membres en matière de lutte contre la drogue et de protection des données personnelles. J'espère que ces engagements parviendront à temps aux oreilles de ceux qui seront appelés a examiner, le 20 décembre prochain, le dossier de l'extension vers Nord de l'espace de Schengen.

SYNTHESE
PAR M. VAN DER HEIJDEN

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement Benelux : L'utilité de réunions comme celle-ci est une fois de plus mise en évidence aujourd'hui. Schengen devra être constamment évalué et corrigé, sous peine de ne pas devenir l'épine dorsale de l'Europe des citoyens.

Il ressort de nombreuses interventions que Schengen suscite des craintes. Nous ne pouvons le tolérer C'est pourquoi l'opinion publique doit être informée beaucoup mieux encore.

Bien des choses ont été dites à propos de la politique en matière de stupéfiants. L'article 2 ne peut être appliqué isolément. Il ne faut pas rendre permanente une situation temporaire. La France et les autres pays membres de Schengen devraient parvenir à mieux s'entendre, en faisant preuve d'un peu bonne volonté.

La coopération policière reste une pierre d'achoppement. La coopération judiciaire, qui doit déboucher sur de vrais procès, n'a pas encore été réglementée, et l'instance où les citoyens pourront éventuellement interjeter appel n'a pas davantage été définie.

En ce qui concerne le Système d'information de Schengen, des tensions subsistent entre les pays dotés d'une loi rigoureuse en matière de protection de vie privée et les pays où la réglementation est moins sévère. Il est étonnant que la part de la France et l'Allemagne dans ce système soit bien plus importante que celle des autres États.

L'afflux de demandeurs d'asile et d'étrangers clandestins aux frontières extérieures de Schengen est problème concret que la délégation autrichienne évoqué à juste titre.

Les déclarations finales de celle conférence seront rédigées en temps opportun, de sorte que les différentes délégations pourront s'en servir comme matériau de travail

La réunion est suspendue à 17 heures 15. La séance est reprise à 17 heures 55

LA QUESTION DE L'ADHÉSION DE CANDIDATS-MEMBRES

EXPOSÉ INTRODUCTIF DE M. VANDE LANOTTE

M. Vande Lanotte , vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur de Belgique, président du Comité exécutif de Schengen :

Il est bon qu'on réfléchisse à l'avenir de Schengen au niveau parlementaire.

Une extension de Schengen aux cinq pays nordiques, dont trois font déjà partie de l'Union européenne, est à l'ordre du jour. Nous avons vérifié si les candidats ont bien la volonté de souscrire aux acquis de Schengen Ces discussions ont montré que les cinq étaient déterminés à progresser ensemble. D'ailleurs, ils ont déjà conclu entre eux une union des passeports.

Il a. en outre, fallu s'assurer que les cinq pourraient adhérer aux décisions futures de Schengen.

Cette question revêt également un aspect institutionnel. Deux candidats ne sont pas membres de l'Union européenne, mais adhèrent à l'accord de coopération nordique. Les trois autres États signataires de cet accord sont membres de l'Union européenne. Quelle solution institutionnelle pourrait-on apporter à ce problème ?

Première possibilité : au sein des groupes chargés du travail préparatoire, il doit être possible de traiter tous les pays sur un pied d'égalité.

L'on pourrait attribuer à ces deux pays un rôle d'observateur au sein du Comité. Les deux pays concernés ont proposé eux-mêmes la formule d'un « joint committee » qui serait composé de tous les pays signataires de l'accord de Schengen. Toutefois, cette formule ne suscite guère l'enthousiasme.

On envisage actuellement une nouvelle piste, qui insisterait à permettre à ces deux pays - la Norvège et l'Islande - de formuler des objections à certaines décision dans la recherche d'un consensus. Ainsi ils Pourraient avoir un impact sur les décisions.

Les États nordiques n'entendent pas remettre en cause leur union des passeports. Par conséquent, il est peu probable qu'un seul pays fasse obstacle. À mon sens, la meilleure solution résiderait dans une formule permettant aux deux pays associés de se faire entendre préalablement dans le cadre d'une concertation entre les cinq pays nordiques.

L'extension de Schengen, par laquelle le nombre des membres passerait de dix à treize plus deux, soulève également des questions à propos de l'extension du fichier du SIS. De même, l'extension pose la question de savoir comment concilier la sévérité des pays nordiques en matière de lutte contre les stupéfiants et le laxisme dont un certain nombre d'autres pays de l'Union Européenne font preuve dans ce domaine. En Europe du nord, on prône effectivement une politique pénale sévère visant à punir les consommateurs de drogue, tandis que d'autres pays de l'Union européenne se concentrent sur le trafic de stupéfiants.

Ces divers aspects institutionnels seront abordés sous l'angle tant du contenu que des procédures lors du déjeuner de travail du 20 décembre prochain.

Les contacts avec les États nordiques ne se sont pas toujours déroulés sans heurts. Toutefois, il faut progresser sur le plan politique. Le 20 décembre prochain, des questions importantes devront être tranchées.

L'adhésion des candidats nordiques est fondamentale pour l'accord de Schengen. Ces pays sont bien préparés à cette adhésion, grâce à leur union des passeports.

Les prochaines semaines seront mises à profit pour préparer la réunion du 20 décembre par des contacts informels dans l'espoir que des progrès y seront enregistrés.

POINTS DE VUE DES DÉLÉGATIONS PARLEMENTAIRES

M. Bickauskas , président de l'Assemblée balte : L'Assemblée balte a consacré un débat passionnant aux accords de Schengen. L'objectif ultime est d'adhérer à l'accord. Les États baltes se trouvent dans une phase transitoire. La démocratie et la libre économie y progressent. Il ne faut donc pas craindre un flux migratoire incontrôlé vers les autres pays de l'UE. Les différents États baltes peuvent négocier séparément l'exemption de visa avec les pays de Schengen. La Lituanie est certainement prête. Le problème des frontières extérieures subsiste toutefois. Les États baltes ne veulent en aucun cas d'une frontière orientale perméable aux illégaux africains ou asiatiques. Ils examinent actuellement la question et oeuvrent à l'élaboration d'un protocole.

Les États baltes se rendent parfaitement compte que la banque de données commune est une excellente arme dans la lutte contre la criminalité organisée.

Des représentants des pays de Schengen pourraient éventuellement se rendre dans les États baltes afin de mieux les connaître. Ils pourraient alors se rendre compte de l'intérêt que portent les pays baltes à la poursuite de la coopération avec les pays signataires de l'accord de Schengen.

M. Olander (Suède) : La Suède voit cette conférence comme une main tendue des pays de Schengen vers les pays de l'Europe du nord.

Mon pays a demandé le statut d'observateur en juin 1995. Une adhésion définitive nécessite la mise en oeuvre intégrale des mesures de compensation. La Suède attache par ailleurs une importance capitale au maintien de l'Union nordique des passeports. Cette question soulève bien évidemment un problème d'ordre institutionnel : deux membres de l'Union des passeports, l'Islande et la Norvège, ne sont, en effet pas membres de l'Union européenne.

Nous tenons à féliciter la présidence belge pour la souplesse avec laquelle les négociations d'adhésion ont été menées.

Le maintien des mesures compensatoires prévues dans l'accord de Schengen constitue pour la Suède une condition sine qua non pour devenir membre à part entière de Schengen. Nous pensons à cet égard à une approche collective du problème de la drogue.

La Suède estime également qu'une surveillance spéciale est indispensable partout où il existe des présomptions de trafic de stupéfiants. Nous espérons que la lutte contre le trafic de la drogue sera intensifiée sous la présidence néerlandaise.

La Suède croit en une Europe sans frontières intérieures, où la sécurité et la lutte contre la criminalité organisée constituent des préoccupations premières. La libre circulation des personnes ne peut engendrer un sentiment d'insécurité.

Il est important que la première phase de notre adhésion puisse se terminer le plus rapidement possible

M. Johansson (Conseil Nordique) : J'ai apprécié avec beaucoup de plaisir la franchise dont à fait preuve M. Vande Lanotte dans son exposé. En tant que porte-parole du Conseil nordique, je voudrais remercier le Conseil interparlementaire de Benelux pour son invitation.

Les États nordiques s'intéressent beaucoup à Schengen et espèrent qu'une coopération avec l'Union nordique des passeports sera possible. Après 40 années de collaboration, il serait regrettable de devoir fermer à nouveau les frontières avec certains États membres du Conseil nordique.

Les premiers ministres des États nordiques ont dès lors préconisé l'adoption d'une position commune concernant les propositions de Schengen. Il est vrai cependant que la Norvège et l'Islande ne peuvent devenir membres à part entière. Ces pays souhaitent dès lors trouver une solution pour maintenir en tout état de cause l'Union des passeports.

Les pays nordiques ont aussi une longue tradition commune en matière de lutte contre la criminalité. Cette tradition doit pouvoir être maintenue intégralement dans le cadre des accords de Schengen.

Le Conseil nordique souligne que les acquis de l'Union nordique des passeports ne peuvent pas se perdre dans le cadre d'un autre accord de coopération. Il faut oser nourrir de grandes ambitions en ce qui concerne l'accord de Schengen.

Des décisions devront être prises lors des négociations du 20 décembre prochain. Il est important d'éliminer les obstacles.

Le Président : Puis-je rappeler que le Conseil interparlementaire de Benelux entretient d'excellentes relations avec le Conseil nordique depuis 1958.

M. Van Oven (Pays-Bas) : La mise en oeuvre des accords de Schengen n'est pas aisée. Le moment est il bien choisi pour accueillir de nouveaux membres ? Les pays nordiques souhaiteraient adhérer collectivement. Formellement la convention ne le permet pas, puisque la Norvège et l'Islande ne sont pas membres de l'Union européenne. L'on cherche dès lors à contourner la difficulté. Le ministre Vande Lanotte a évoqué trois constructions qui nous paraissent plutôt artificielles. Les Parlements des États membres actuels n'ont pas suffisamment voix au chapitre dans ce cadre. Cela risque, en outre, de créer un dangereux précédent. Le lien entre l'Union européenne et Schengen se relâchera bien trop et l'autorité de la Cour européenne de justice risque d'être vidée de sa substance.

Je voudrais, pour conclure, attirer l'attention sur le fait que la Deuxième Chambre néerlandaise ne s'est pas encore prononcée formellement sur cette extension. J'estimais néanmoins pouvoir faire part de nos réserves.

REPLIQUE DE M. VANDE LANOTTE

M. Vande Lanotte . ministre : L'élargissement vers l'Europe de l'Est est une donnée importante. Il faut organiser une campagne d'information à l'intention des pays concernés, de manière à harmoniser progressivement les points de vue.

Bien évidemment, les délégations nordiques sont surtout sensibles au maintien des acquis de l'Union nordique des passeports.

Le représentant néerlandais a formulé un certain nombre de remarques d'ordre institutionnel à propos des négociations menées en vue de l'admission de nouveaux membres. Aucune décision définitive n'a encore été prise. Le volet politique fait toutefois l'objet de nombreuses discussions avec les candidats nordiques. Le Comité exécutif a parfaitement le droit de mener de telles discussions. Les Parlements concernés ne doivent pas être consultés au préalable à ce sujet.

Il n'y a par ailleurs pas lieu de craindre un précédent. Aucun autre pays ne fait partie à la fois de la zone européenne de libre échange et d'une - déjà ancienne - Union des passeports.

L'argument de M. Van Oven, qui estime que Schengen et l'Union européenne doivent aller de Pair, est beaucoup plus pertinent. Mais, pour européaniser Schengen, il faudra permettre aux cinq États nordiques d'adhérer en même temps, puisqu'ils ne voudront certainement pas renoncer à leur Union des passeports.

Même en dehors du contexte de l'adhésion de la Norvège et de l'Islande, il existe des divergences d'opinion fondamentales à propos du rôle de la Cour de justice.

M. Van Oven a qualifié mes constructions d'artificielles. En tant que Belge, j'ai quelque expérience en matière de constructions complexes. Je crois d'ailleurs que Schengen tirerait profit de l'adhésion de cinq États qui possèdent une expérience de quarante années déjà dans le cadre d'une Union des passeports. Tant qu'il n'en résulte pas de retards dans l'application de l'accord, je ne vois aucun inconvénient à un élargissement de l'Europe sans frontières.

SYNTHÈSE PAR M. DEES

M. Dees , porte-parole du Parlement Benelux : Il est difficile de faire une synthèse du deuxième volet de cette conférence étant donné que de nombreux Pays ne sont pas intervenus dans la deuxième partie du débat.

À juste titre, les candidats à l'adhésion considèrent les accords de Schengen comme une étape positive apportant une plus-value. Le Benelux et l'Union nordique des passeports ont démontré depuis pas mal de temps qu'un tel système fonctionne.

Les pays de l'Europe de l'Est ambitionnent un ancrage dans les structures européennes. Or, Schengen est un rouage essentiel de ces structures. Il est normal de vouloir honorer ce souhait politique. Il convient toutefois de régler au préalable une série de problèmes, notamment sur le plan institutionnel.

Les plaidoyers des pays nordiques étaient convaincants. En fin de compte, nous sommes tous favorables à la suppression des frontières.

Le ministre Vande Lanotte a. à mon avis, choisi la bonne procédure. Le 20 décembre, on ne se limitera pas à une discussion de principe : on recherchera aussi des solutions originales pour toute une série de problèmes pratiques.

Le débat de Schengen doit s'inscrire dans le cadre de l'Union européenne. La conférence intergouvernementale de 19 % devra, en tout état de cause, tenir compte de Schengen.

En tant que parlementaires (du Benelux), nous devons, dans notre appréciation, nous laisser guider par six critères. Tout le monde marque-t-il son accord sur une extension du système d'information de Schengen ? Tous les membres et candidats-membres veulent-ils collaborer activement à une protection efficace des frontières extérieures ? L'évolution au sein de Schengen est-elle parallèle à celle au sein de l'Union européenne ? Va-t-on harmoniser les législations nationales en matière de protection de la vie privée ? Quelle est notre position en ce qui concerne le déficit démocratique ? Est-il raisonnable de vouloir étendre Schengen à d'autres pays alors que le processus doit encore être approfondi ?

Il était important d'entendre les délégations du Conseil nordique et des États baltes dans le cadre du débat sur Schengen. Grâce à cette initiative du Conseil interparlementaire consultatif de Benelux, le Comité exécutif et les différents Gouvernements auront sans doute une idée plus précise des aspirations des candidats à l'adhésion. (Applaudissements)

La séance est levée à 19.20 heures

RÉUNION DU SAMEDI 9 DÉCEMBRE 1995

PRÉSIDENCE DE M. Ady JUNG, Président du Parlement Benelux

La séance est ouverte à 9h25

LE CONTROLE PARLEMENTAIRE DE SCHENGEN

EXPOSÉS INTRODUCTIFS DE MM. VAN OUTRIVE ET SUYKERBUYK

M. Van Outrive (Belgique) : Quiconque a suivi attentivement l'élaboration des accords de Schengen, ne peut que s'interroger sur le respect des règles démocratiques.

Le problème est double. D'une part, nous sommes habitués au modèle de l'État démocratique de Hobbes qui offre un cadre aux initiatives institutionnalisées en matière de migration et d'asile, ainsi qu'à la collaboration policière. Ce cadre implique une législation spécifique, une Cour de justice, un Parlement législatif et de contrôle ainsi qu'un Gouvernement. D'autre part, nous constatons que de simples accords de coopération, respectant intégralement la souveraineté des États signataires, ne suffisent plus en raison du caractère transfrontalier de nombreux problèmes. Il en résulte des initiatives comme Schengen, une espèce de « patchwork » de diverses ententes et institutions y afférentes à différents niveaux, avec des alliances alternatives d'États et de régions.

Nombreux sont ceux qui déplorent le déficit démocratique qui accompagne le fonctionnement des accords de Schengen. À l'occasion de la procédure de ratification - un instrument digne du siècle passé -plusieurs Parlements ont pris l'initiative de débattre du déroulement ultérieur de la procédure. Mais il serait illusoire de penser que 7, et bientôt 10 à 17 Parlements pourront exercer un contrôle efficace. Je plaide pour la création, par les Parlements concernés, d'une commission de surveillance interparlementaire adéquate, éventuellement en collaboration avec le Parlement européen. Cela permettrait de neutraliser les différences quant à l'intérêt que portent à celte matière les Parlements concernés. Par ailleurs, les accords de Schengen constituent une matière à ce point complexe que les parlementaires concernés doivent être motivés et doivent parfaitement maîtriser la problématique. Enfin, la constitution d'une commission de surveillance permettrait de (aire régulièrement rapport devant les Parlements concernés.

Le contenu du contrôle est également de nature à susciter de nombreuses réflexions. Il appartient à la commission interparlementaire de déterminer ce qu'elle entend contrôler et de quelle manière elle souhaite le faire, pour éviter d'être totalement livrée au bon vouloir de ministres ou de fonctionnaires.

Je me bornerai ici à esquisser les grandes lignes de ce que peut être ce contrôle.

Les ordres du jour et les rapports du comité exécutif et du groupe central sont bien évidemment essentiels. Les procédures d'urgence que le comité souhaite appliquer doivent être examinées attentivement. Les quatre manuels, élaborés en vue de la mise en oeuvre de l'accord, comportent des textes tout aussi importants que la convention. Il s'indique également de vérifier scrupuleusement l'organigramme des groupes de travail pour obtenir, si nécessaire, des rapports spécifiques.

La surveillance extérieure des organes de contrôle internes est tout aussi importante. Je songe avant tout aux instances de contrôle nationales et à l'autorité de contrôle commune de Schengen qui assurent la protection de la vie privée et des données y relatives. Mais disposent-elles de suffisamment d'effectifs et de moyens ?

Il y a ensuite le contrôle de l'admissibilité de la demande de renseignements par l'intermédiaire du SIS (art. 103), ainsi que le contrôle de l'enregistrement des demandeurs d'asile.

Les organes CIREA ou CIREFI étudient la situation dans les pays d'origine des immigrés et des demandeurs d'asile. Quelles sources consultent-il à cet effet ?

Le comité ou groupe d'experts, constitué au sein du groupe de travail « frontières », établit l'inventaire des difficultés rencontrées aux frontières extérieures.

Enfin, il y a le « comité de suivi » qui, depuis le 28 mars de celle année, évalue le fonctionnement de la convention. Cet organe est entouré d'un certain mystère.

Des problèmes qualitatifs requièrent également un suivi parlementaire. J'en dénombre dix-sept.

Mon texte traite en détail des dix-sept points J'attire avant tout l'attention sur les relations entre les instances judiciaires et les fonctionnaires chargés de l'application, sur la position des citoyens de Schengen et sur l'exécution de la politique d'asile et de visa.

Des informations quantitatives demandées avec une certaine régularité permettent également d'évaluer le fonctionnement des accords de Schengen. Je compte 23 types de données réparties dans les catégories suivantes : l'éloignement des étrangers non désirés, l'assistance juridique réciproque, le traitement des demandes d'asile, le Système d'information de Schengen (SIS), la coopération politique et les stupéfiants.

Voilà la seule façon pour les Parlements concernés d'exercer le contrôle efficace, que leur impose leur devoir démocratique. Schengen est. en effet, une expérience. C'est pourquoi un contrôle démocratique est requis d'urgence. (Applaudissements)

M. Suykerbuyk (Belgique) : Le contrôle et la surveillance de la réglementation vont de soi dans une démocratie parlementaire. Une commission de contrôle interparlementaire, chargée d'informer les différents Parlements sur le fonctionnement des accords de Schengen, est dès lors indispensable.

La relation entre Schengen et l'Union européenne constitue un point de discussion important. Dans quelle mesure sont-ils complémentaires ?? Quel modèle de coopération est préférable ? Il n'est pas aisé de répondre à ces questions.

Il est clair que la coopération policière est plus difficile à réaliser que la coopération économique. Si le contrôle démocratique apparaît essentiel en cette matière, les opinions divergent quant à la manière d'y procéder.

Le contrôle parlementaire ne peut rester sans effet. Le contrôle vertical - chaque Parlement contrôle son propre Gouvernement - doit aller de pair avec une collaboration interparlementaire horizontale. Pour que celle-ci soit efficace, les délégations doivent être restreintes et étudier attentivement et de manière continue la problématique de Schengen. Le groupe de contrôle interparlementaire doit bénéficier de l'appui nécessaire - financier et autre - des Parlements nationaux. Le professeur Van Outrive a énuméré diverses raisons qui justifient la nécessite de ce contrôle. Nul ne contestera cette nécessité, mais il faut également la volonté d'organiser un contrôle efficace. Le problème de la drogue en est la meilleure illustration.

Le problème de la toxicomanie fait actuellement l'objet dune attention toute particulière, comme I a encore démontré le débat d'hier.

Le raisonnement en vertu duquel, aux Pays-Bas, la consommation de stupéfiants serait surtout une affaire de santé publique paraît peu crédible.

Les Français discutent du trafic de la drogue avec les Néerlandais. Leur négociation s'apparente à un dialogue de sourds. Le problème de la criminalité dans le nord de la France ne date d'ailleurs pas d'hier. Aucun changement brusque ne s'est opère après Schengen.

On dit de certains aéroports internationaux qu'ils sont les maillons faibles des accords de Schengen. Pourquoi ne parle-t-on pas des nombreux aéroports régionaux, tout aussi vulnérables ?

Les opinions divergent au sujet du SIS. D'aucuns y voient un élément positif, alors que d'autres s'interrogent sur le fonctionnement du système. La situation n'est pas claire.

Un accord entre Gouvernements sans aucune forme d'autorité supranationale, reste bancal. C'est précisément l'aspect intergouvernemental qui fait la faiblesse de Schengen. Tout le monde s'accorde à dire que Schengen doit subsister et doit se développer. Un système de contrôle interparlementaire bien conçu doit donc accroître les possibilités de survie et de développement de Schengen. L'Europe sans frontières intérieures ne doit en aucun cas devenir une Europe où l'on ne sente pas en sécurité. Un contrôle démocratique étendu et dûment structuré est la seule garantie pour préserver l'Europe de ce genre d'excès.

CONTRIBUTIONS DES DÉLÉGATIONS

M. About (France) : Je tiens à remercier et à féliciter les deux orateurs que nous venons d'entendre. Leurs discours confortent la position de la France de voir se mettre en place un haut comité consultatif parlementaire. En effet, tout n'est pas rose dans Schengen. Même si les différents Parlements nationaux ont mis en place des commissions d'enquête qui ont établi des rapports, on peut se demander si cela suffit. Nous nous réjouissons donc de la mise en place des contrôles horizontal et vertical afin de combler un déficit démocratique évident. Le Sénat français mettra à disposition toute la logistique possible pour le haut comité consultatif. Nous espérons que tous les pays appuieront la proposition française de créer ce haut comité consultatif parlementaire.

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement Benelux : J'ai récemment lu, dans un journal néerlandais, une belle citation. Les ministres et les fonctionnaires « creusent le trou démocratique plus rapidement que les Parlements ne le comblent. » Cela se passe de commentaire. Le Parlement Benelux se rend bien compte que le contrôle démocratique du fonctionnement de Schengen laisse à désirer. Je songe à cet égard à la possibilité du secret au sein du comité exécutif et à l'impossibilité de contrôler le fonctionnement des organes responsables. Au moment de la ratification de Schengen, des réserves ont notamment été exprimées à cet égard aux Pays-Bas.

Des comités ad hoc de tout genre, peu efficaces, ne peuvent pas compenser l'insuffisance du contrôle.

Le Parlement européen n'est pas suffisamment impliqué dans ce contrôle. De même, la compétence de la Cour européenne est trop restreinte ;.

Schengen n'est pas achevé. Il continue de s'étendre et de se développer. Nous ne pouvons rester les bras croisés. Les parlementaires ont, en effet, le devoir de renforcer le contrôle. J'insiste pour que tous les Parlements nationaux prennent à coeur leur devoir de contrôle. Schengen les concerne directement. Schengen n'est pas le jouet de quelques dirigeants ou fonctionnaires. Par l'intermédiaire du Parlement - qui représente le peuple - Schengen doit être l'affaire des populations.

M. G. Van Oven (Pays-Bas) : Aux Pays-Bas, le contrôle parlementaire du fonctionnement de Schengen est actuellement réglé comme suit : deux semaines avant la réunion, la commission de la Justice reçoit l'ordre du jour du comité exécutif, avec le commentaire et les positions du Gouvernement national. Les parlementaires peuvent alors émettre des réserves au sujet de certains points et en faire part au Gouvernement. Ce système n'est cependant pas idéal. En effet, l'information ne circule pas toujours aisément. Une fois que le comité exécutif a pris des décisions contraignantes, il n'est plus possible de déposer des amendements.

Pour combler ce déficit démocratique. Schengen devrait davantage être une matière communautaire, relevant, par exemple, du premier ou du troisième pilier de Maastricht Pour l'instant, cela semble relever de l'utopie.

Les organes européens pourraient également contribuer au contrôle de Schengen. Nous en sommes encore fort éloignés dans la pratique

Comme le suggérait M. Suykerbuyk, le contrôle vertical pourrait aussi être combiné avec un contrôle interparlementaire horizontal. Comment conçoit-on cet organe de contrôle interparlementaire ? Je m'engage à soulever ce problème au Parlement néerlandais. Nous sommes favorables à l'idée d'une plate-forme interparlementaire

M. Strutzenberger (Autriche) : Il est important qu'un contrôle international soit exercé sur le fonctionnement des accords de Schengen. La possibilité de contrôle des Parlements nationaux est tout aussi importante

Celle question est relativement bien réglée en Autriche Chaque parlementaire peut interpeller des ministres sur les décisions prises au sein du comité exécutif et sur certaines modifications apportées aux accords existants

Le ministère autrichien de l'Intérieur est tenu de présenter annuellement au Parlement un rapport circonstancié sur la politique de sécurité. Ce rapport fait alors l'objet d'une discussion au sein du parlement, qui prend position en la matière à l'égard des ministres compétents.

J'ai déjà indiqué hier que mon pays est doté d'une législation stricte en matière de protection de la vie privée. Elle permet aux citoyens d'exercer eux-mêmes un certain contrôle sur l'usage qui est fait des données personnelles qui les concernent.

Mme Ojala (Finlande) : La suppression des contrôles aux frontières présente incontestablement des avantages. Ces avantages compensent-ils toutefois l'accroissement des activités policières qu'implique une Europe ouverte ?

Schengen est une construction qui a été érigée de manière peu démocratique. Les chefs de police se sentent en quelque sorte libérés, à présent qu'ils sont débarrassés du poids que représentait le contrôle parlementaire. C'est intolérable. Le Parlement finlandais veut une plus large emprise sur Schengen. Pour éviter que les corps de police n'opèrent en toute indépendance en Europe, il convient de renforcer sans tarder le troisième pilier du traité européen. On prétend que cette démarche serait actuellement impossible à réaliser pour des raisons politiques Devons-nous nous y résigner ? Pouvons-nous approfondir Schengen si le contrôle parlementaire fait défaut ?

M. Evangelisti (Italie) : L'Italie est un pays de paradoxes Il fut parmi les premiers à rejoindre Schengen, mais il est un des derniers à ratifier la convention Nous sommes les seuls, avec les Pays-Bas, à disposer d'un comité parlementaire de contrôle. Cependant, en raison des élections, nous n'avons pu réuni' ce comité !

À propos de la séance de ce matin, c'est avec surprise que je note un scepticisme que je ne comprends pas trop, mais qui concerne les types de contrôle.

L'Italie préconise un contrôle politique. Il est normal que certaines difficultés surgissent, car les pro blêmes sont nombreux Notre président du Conseil M Dini, a présenté devant la Chambre le programme européen cl a cité Schengen comme un objectif prioritaire.

Malgré les difficultés, nous suivons le débat avec attention

REPLIQUE DE MM. VAN OUTRIVE ET SUYKERBUYK

M. Van Outrive (Belgique) : Les rapports introduits par le Sénat français sont très intéressants et Par ce biais, nous constatons que les commissaires européens ne nous disaient pas toujours la vérité. Les rapports anglais aussi étaient fort intéressants, tout comme ceux du groupe d'experts d'Utrecht.

Par ailleurs, de plus en plus, les universités se préoccupent des phénomènes de collaboration internationale. Elles sont aussi des enceintes importantes d'information et de critique positive. Nous ne pouvons pas nous passer de toutes ces sources, fort utiles.

Je répondrai au porte-parole du Benelux que le volet parlementaire de Schengen n'est toujours pas Pleinement concrétisé. Les Parlements doivent déterminer eux-mêmes les domaines qu'ils souhaitent contrôler ainsi que la manière dont ce contrôle sera effectué. Il leur est loisible de demander au comité exécutif des données chiffrées, notamment au sujet du SIS ou de la possibilité offerte aux citoyens de solliciter des données.

Je me suis étonné hier de la manière dont les instances de Schengen fournissent les informations. Tout n'est pas parfait, et c'est compréhensible. Il n'y a pas de honte à l'admettre. Il faut oser désigner les choses par leur nom.

Le délégué autrichien a rappelé que son pays est doté d'une législation stricte en matière de respect de la vie privée. Dans le cadre de Schengen, il s'avère que ce système n'est pas encore aussi bien développé dans d'autres pays signataires ce qui peut poser des problèmes.

La déléguée finlandaise a exprimé sa crainte de voir les services de police étendre leur pouvoir à la suite des accords de Schengen. Il appartient aux parlementaires d'enrayer cette « loi naturelle » : il faut renforcer le contrôle parlementaire à l'égard des services de police.

Il a été abondamment question de la communautarisation de Schengen. Je ne suis pas très optimiste à cet égard.

Dans les domaines de la sécurité et de la lutte contre la criminalité, il existe des besoins auxquels il est presque impossible de répondre. Les sept pays qui font actuellement partie de Schengen n'y parviennent pas. Même en incluant les cinq États nordique, il sera impossible d'endiguer totalement le trafic international de voitures volées. Schengen doit dès lors s'étendre, malgré l'obstacle que constitue l'article 142 de la convention d'application

Les difficultés qu'éprouvent les parlementaires à obtenir les documents nécessaires m'ont souvent irrité. J'ai demandé un jour à un ministre qui décidait de la « confidentialité » des documents Il s'agit apparemment d'un fonctionnaire. À mes yeux, ce caractère confidentiel ne vaut que pour les informations délicates, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme par exemple. Il n'est pas normal que trop souvent, parlementaires n'aient pas accès a des nombreuses informations.

M. Suykerbuyk (Belgique) : L'idée d'une collaboration interparlementaire reçoit, à juste titre, un accueil favorable. Le Conseil du Benelux a toujours été demandeur à cet égard. Nous sommes en fait des pionniers en la matière

Les différents Parlements doivent décider eux-mêmes de la manière dont ils souhaitent organiser le contrôle de Schengen. Les mécanismes de contrôle nationaux peuvent parfaitement aller de pair avec le contrôle interparlementaire. Il peut d'ailleurs en résulter un échange d'expériences fructueux.

M. Van Oven (Pays-Bas) : Ne faut-il pas aller au-delà de la suggestion de M. Suykerbuyk pour qui une délégation restreinte et fidèle de connaisseurs de Schengen devrait suivre cette problématique au sein de chaque Parlement national ? Le Conseil interparlementaire de Benelux ne pourrait-il pas transmettre régulièrement un rapport aux Parlements nationaux ?

M. About (France) : Nous pourrions réaffirmer, dans notre déclaration finale concernant l'état de la question, notre volonté de voir se créer un tel contrôle interparlementaire. Ce serait un bon acte de poser cette première pierre aujourd'hui.

M. Strutzenberger (Autriche) : Je partage les idées exprimées par les deux orateurs précédents. Il serait utile de mettre sur pied une commission permanente de contrôle sur Schengen qui serait chargée de suivre l'évolution des dossiers.

Cette formule serait plus efficace qu'une rencontre, une ou deux fois par an, entre les Parlements nationaux, qui ne permet pas de suivre de près l'actualité.

SYNTHESE PAR M. VAN DER HEIJDEN

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement du Benelux : Bien des critiques ont été émises aujourd'hui. La critique est source d'inspiration. Je conclus de toutes les interventions qu'il faut renforcer le contrôle parlementaire. Cela ne peut se faire que si un nombre plus grand de documents circulent librement parmi les parlementaires intéressés. Un contrôle démocratique renforcé implique également que chaque Parlement national prenne à coeur sa tache « verticale » de contrôle. Les différents orateurs ont, enfin, plaidé pour un contrôle « horizontal » plus large. Ce contrôle pourrait être organisé sous la forme d'une consultation interparlementaire, d'un comité propre, d'un Sénat distinct ou d'une plate-forme. Nous nous proposons d'insérer ces conclusions dans une deuxième déclaration finale.

M. Van Outrive (Belgique) : Le document que j'ai évoqué contient des informations intéressantes sur les problèmes rencontrés jusqu'à présent dans le cadre de l'accord de Schengen. Il n'est nullement confidentiel.

La réunion est suspendue à 11 heures 20

La séance est reprise à 11 heures 55

DÉCLARATIONS FINALES

Discussion et notes

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement Benelux : Trois textes ont été présentés.

Il y a tout d'abord le proposition de déclaration finale sur l'état de la question. Je demande à tous les participants de s'y rallier. Seul le Benelux est mentionné au début du texte ; les autres pays n'y figurent pas encore. Il leur est, en effet, loisible de souscrire ou de ne pas souscrire la déclaration.

La proposition de déclaration finale qui vous a été distribuée est libellée comme suit :

« Proposition de déclaration finale concernant l'état de la question

Les représentants parlementaires du Benelux,.... se sont réunis les 8 et 9 décembre 1995 à Luxembourg, à l'invitation du Conseil Interparlementaire Consultatif de Benelux.

L'Assemblée a examiné la mise en application de la convention de Schengen, et plus particulièrement les questions suivantes : les contrôles aux frontières intérieures, les contrôles aux frontières extérieures, le Système d'information Schengen (SIS), la politique en matière de visas et de délivrance de visas, le traitement des demandes d'asile, la coopération dans la lutte contre la criminalité, la coopération dans le cadre de la lutte contre les stupéfiants, la protection des données à caractère personnel

Les représentants parlementaires des pays participant à la Conférence :

- constatent que le bilan global de la mise en application lion de la convention de Schengen est positif dans la perspective de la libéralisation totale de la circulation des personnes à l'intérieur de l'Union européenne ;

- insistent pour que cette mise en application soit poursuivie intégralement afin d'arriver à une vraie Europe des citoyens ;

- insistent pour que soit réalisé, intégralement et dans les meilleurs délais, le but préconisé en ta matière par la convention de Schengen ;

- insistent pour que, en vue d'assurer un contrôle uniforme et efficace aux frontières extérieures, les aménagements infrastructurels qui restent à réaliser soient poursuivis et achevés sans délai ;

- insistent pour que les pays signataires de la convention transmettent au Système d'information Schengen toutes les informations relatives aux catégories de données visées à l'article 94 de la convention, afin que le SIS puisse fonctionner dans des conditions optimales ;

- demandent, en ce qui concerne la question de l 'asile que les parties contractantes échangent toutes les données requises pour leur permettre de traiter correctement les demandes d'asile ».

- insistent pour que l'attention se concentre sur la coopération transfrontalière en matière de police et de justice, l'observation et la poursuite transfrontalière, jugées indispensables pour organiser de manière efficace la lutte contre la criminalité ;

- insistent pour que, à défaut d'harmonisation de la politique dans le domaine de la lutte contre les stupéfiants, les pays contractants intensifient la coopération en la matière afin de réduire à néant les effets négatifs des politiques divergentes ;

- insistent pour qu'un effort sérieux soit consenti afin d'expliquer de manière pédagogique la portée de l'acquis de Schengen aux citoyens ;

- insistent pour que le comité exécutif présente à intervalles réguliers un rapport sur la mise en application de la convention de Schengen. »

La délégation française a déposé un amendement visant à compléter le premier tiret. Le texte de cet amendement illustre clairement la volonté de collaboration qui a marqué cette conférence. Je vous demande d'adopter cet amendement.

Je vous demande également d'appuyer l'amendement déposé par la Belgique, visant à modifier le sixième tiret. Il vise un meilleur échange de données relatives a la problématique des demandeurs d'asile.

Le Président : Pour « L'État de la question », il y a un amendement de la délégation française visant à modifier le premier tiret en y ajoutant les mots « malgré de nombreuses difficultés qui nécessitent les efforts de chaque partie ». Le Bureau propose d'accepter cette modification. (Assentiment)

Au 6 e tiret, il y a l'amendement de la délégation belge visant à ajouter à la fin de la phrase les mots : « dans le respect intégral des conventions internationales ». Le Bureau propose d'accepter aussi cet amendement. (Assentiment)

Il faut aussi compléter le document par rémunération des Assemblées parlementaires qui ont assisté a la Conférence.

Pouvons-nous adopter le document ainsi amendé ? (Assentiment unanime)

Le Président : Nous passons a la proposition de déclaration finale concerne le contrôle parlementaire, qui est libellée comme suit :

« Proposition de déclaration finale concernant le contrôle parlementaire

Les représentants parlementaires du Benelux,. ... se sont réunis les 8 et 9 décembre 1995. à Luxembourg, à l'invitation du Conseil Interparlementaire Consultatif de Benelux.

L'Assemblée a examiné le problème du contrôle parlementaire de la mise en application et du fonctionnement de la convention de Schengen.

Les représentants parlementaires des pays participant à la conférence :

- constatent que le contrôle est pour chaque Assemblée parlementaire, une responsabilité primaire :

- constatent que ce contrôle est insuffisant et donne lieu à un vide juridique gênant.

- estiment que le contrôle peut être amélioré par la création dune structure de coopération entre les Parlements nationaux des pays signataires de la convention de Schengen, en attendant qu'un contrôle efficace puisse être assuré par les instruments adéquats au sein de l'Union européenne :

- souhaitent que soit organisée à intervalles réguliers une conférence où, d'une pan, le comité exécutif puisse être entendu au sujet de l'état des choses par les représentants parlementaires des pays signataires de la convention de Schengen et où, d'autre part, des échanges de vues puissent avoir lieu sur l'exécution et le fonctionnement de la convention :

- « chargent le Conseil Interparlementaire de Benelux d'élaborer, en concertation avec le secrétariat général de l'Union économique Benelux, une proposition visant à informer dans l'intervalle les Assemblées nationales au sujet des résultats du contrôle exercé au sein des différentes Assemblées parlementaires ».

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement-Benelux : La délégation belge a déposé un amendement à la déclaration finale concernant le contrôle parlementaire libellé comme suit : « Insérer entre le 3 e et le 4 e tiret : - estiment qu'il convient d'associer le Parlement européen à cette structure de coopération » Le texte de cet amendement préconise d'associer davantage le Parlement européen.

Je tiens tout d'abord à signaler qu'une erreur s'est glissée dans le texte au deuxième tiret : il convient de remplacer le mot « juridique » par « démocratique ». Pouvons-nous considérer cette modification comme une correction technique ?

Pour le surplus, la déclaration finale me paraît refléter fidèlement l'échange de vues de ce matin. L'Assemblée peut-elle souscrire unanimement au texte ? À mes yeux, celui-ci rencontre pleinement le souhait formulé par les différents orateurs de renforcer le contrôle parlementaire.

M. Evangelisti (Italie) : En ce qui concerne l'allusion au contrôle « insuffisant », le terme utilisé me semble inadéquat. On pourrait utiliser le terme « défaillant »

M. Van Oven (Pays-Bas) : Il me semblait que ce matin nous avions déjà progresse davantage en ce qui concerne la structure de coopération internationale, et surtout en ce qui concerne le fonctionnement futur de la plate-forme.

Le texte en discussion ne pourrait-il être étendu en ce sens ?

M. About (France) : Je m'associe à la proposition italienne, mais je propose de parler de « déficit démocratique ».

J'approuve la proposition de mon collègue néerlandais.

Le Président : L'Italie, qui avait proposé le mot « défaillante », est-elle d'accord sur la terminologie « déficit démocratique » ? (Assentiment)

M. Janssens (Belgique) : Nous souhaiterions défendre notre amendement. M. Delathouwer se propose de le faire.

M. Delathouwer (Belgique) : La délégation belge a présenté un amendement relatif au contrôle parlementaire. Il ressort des débats que toutes les délégations semblent accorder à ce problème spécifique assez d'importance pour y consacrer une résolution finale distincte.

Notre amendement vise à renforcer sans tarder le contrôle parlementaire en associant plus étroitement le Parlement européen au fonctionnement des structures de Schengen.

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement-Benelux : La délégation belge a apporté des précisions intéressantes. Nous estimons cependant que le texte initial qui prévoit un « contrôle (...) assuré par les instrument adéquats au sein de l'Union européenne » est plus conforme à nos intentions. En mentionnant explicitement le Parlement européen comme organe de contrôle, nous irions au-delà de ce qui est politiquement réalisable à l'heure actuelle.

Nous susciterions en même temps un concurrent pour la plate-forme de contrôle, sur laquelle nous nous sommes mis d'accord aujourd'hui.

Le Président : Notre porte-parole nous invite donc à la prudence. Est-ce notre rôle de nous défaire de certaines de nos compétences nationales au bénéfice du Parlement européen, alors que l'Union européenne n'est pas totalement réalisée ?

M. Delathouwer (Belgique) : Je ne suis pas convaincu par les réactions à l'amendement présenté par la délégation belge. Dis lors que la Commission européenne est déjà associée au fonctionnement de Schengen, pourquoi ne pas établir le lien avec le Parlement européen ?

Nous préconisons uniquement « une association... ». Si le troisième tiret de la proposition de déclaration finale était interprété dans le sens de notre amendement, nous pourrions le retirer. Nous nous interrogeons toutefois encore sur la portée des termes « en attendant que... »

M. Olander (Suède) : La délégation nordique se réjouit d'avoir été invitée à cette conférence, mais nous ne souhaitons pas nous immiscer dans cette problématique interne à Schengen. Nous sommes uniquement présents en qualité d'observateurs.

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement Benelux : Nous devons effectivement nous limiter aux pays de Schengen. C'est pourquoi la résolution relative aux États baltes est déposée par le Parlement Benelux et non par tes États baltes eux-mêmes.

Permettez-moi de donner lecture du texte modifié du dernier alinéa de la déclaration. Il est complété comme suit : « ainsi qu'au sujet de l'élaboration d'une structure de collaboration entre les Assemblées nationales telles que mentionnées dans la présente déclaration finale »

Le Président : Nous allons nous prononcer paragraphe par paragraphe sur la proposition de déclaration finale concernant le contrôle parlementaire, qui est libellée comme suit :

- Le premier alinéa doit être complété par l'énumération des pays signataires de Schengen. (Assentiment)

- Le 1 er tiret ne suscite-t-il pas d'objection ? (Assentiment)

- Le 2 e tiret avec le remplacement des mots « vide juridique » par les mots « déficit démocratique » ne suscite-t-il pas d'objection ? (Assentiment)

- Le 3 e tiret ne suscite-t-il pas d'objection ? (Assentiment)

Le 4 e tiret ne suscite-t-il pas d'objection ? (Assentiment)

Le dernier tiret, avec l'amendement néerlandais visant à compléter le texte par les mots « ainsi qu' sujet de l'élaboration d'une structure de coopération entre les Assemblées nationales telle que mentionnée dons la présente déclaration finale », ne suscite-t-il pas d'objection ? (Assentiment)

La proposition de déclaration finale est adoptée à l'unanimité.

Le Président : Nous passons a la discussion de la troisième déclaration finale relative à la coopération avec les États balles. La proposition est libellée comme suit :

« Déclaration finale concernant la coopération entre les pays Schengen et les pays halles.

Les représentants parlementaires du Benelux et.... se sont réunis les 8 et 9 décembre 1995, à Luxembourg, à l'invitation du Conseil interparlementaire consultatif de Benelux.

- ayant entendu les interventions de la délégation de Assemblée balte et des ministres présents à la réunion :

- souhaitent que des consultations entre les Pays Schengen et les Pays baltes débutent en 1996 en vue d'examiner les possibilités de mettre sur pied des programmes de coopération visant à faciliter la circulation des voyageurs.

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement Benelux : Cette troisième proposition de déclaration finale concerne la collaboration entre les pays Schengen et les États baltes.

Cette recommandation met l'accent sur les liens d'amitié que nous entretenons avec ces nouveaux États.

M. Makkreel (Pays-Bas) : Nous adhérons évidemment au contenu du texte. Je tiens cependant à formuler une observation quant à la forme. À mon avis, les versions française (« en vue d'examiner ») et néerlandaise (« ten einde te onderzoeken ») ne concordent pas avec le texte anglais (« by examining »). Dans les deux premières versions, il s'agit d'un objectif alors que dans le texte anglais, il s'agit d'un moyen.

Je propose donc de modifier le texte anglais comme suit : « in order to examine ».

M. About (France) : La déclaration finale aurait aussi pu faire état de la coopération entre les pays de Schengen et le Conseil nordique. Toutefois, ce n'est pas le cas

Je ne dispose pas d'assez d'éléments pour me prononcer sur la coopération avec les États baltes.

Aussi, je m'abstiendrai a propos de cette proposition et je souhaite que le nom de la France n'y soit pas mentionné.

M. Van der Heijden , porte-parole du Parlement Benelux : Nous comprenons l'objection de la délégation française. Ils ont, bien sûr, le droit de s'abstenir, si notre prudence leur paraît insuffisante.

M. About (France) : Pour mieux faire comprendre notre point de vue. je dirai que nous ne sommes pas hostiles à des consultations entre les pays Schengen et les États baltes. Cependant, la proposition me semble trop ciblée sur la mention spécifique de « coopération visant à faciliter la circulation des voyageurs ».

M. Erangelisti (Italie) : La France souhaite-t-elle une déclaration de coopération avec l'Union nordique ?

M. About (France) : Les négociations sont bien avancées avec l'Union nordique ; c'est cela qui compte et nous ne demandons pas une déclaration spécifique aujourd'hui.

Le Président : Je mets aux voix la proposition de déclaration finale, l'abstention de la France étant constatée.

Comme il n'y a pas d'autre abstention, la proposition de déclaration finale est adoptée.

Le délégué du Conseil nordique nous a communiqué un texte relatif à The Nordic Passport Union in an European Context. Il sera joint en annexe au compte-rendu analytique.

Enfin, je tiens à vous remercier de votre collaboration ainsi que celle du secrétariat et du personnel administratif. (Applaudissements)

La séance est levée à 12 heures 45.

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