Le consentement en matière de viol : législations étrangères (Canade, Espagne, Suède...) et Convention d'Istanbul

Table ronde animée par Elsa Schalck, Sénatrice du Bas-Rhin

Merci, Madame la Présidente, pour cette introduction.

Nous entamons notre matinée d'échanges par une séquence internationale.

En effet, avant de nous pencher sur les perspectives d'évolution de notre droit pénal, il est intéressant d'étudier des exemples étrangers. Nous allons nous intéresser aux législations pénales de pays qui ont inscrit l'absence de consentement au sein de leur définition du viol et aux effets positifs que ces évolutions législatives ont pu avoir sur les poursuites et les condamnations en matière de viol, mais aussi aux éventuelles conséquences qui n'avaient pas nécessairement été anticipées.

Aujourd'hui, les États européens ont majoritairement adopté, dans leur corpus juridique, une définition du viol assise sur la notion de consentement. Celui-ci est compris comme devant être donné librement, sans être déduit de la seule absence de résistance de la victime.

Toutefois, les critères encadrant la notion de consentement en matière sexuelle peuvent varier. Si certains États conçoivent le consentement comme comprenant une manifestation de volonté extérieure, libre et non ambiguë, devant être clairement perceptible, d'autres vont encore plus loin, et incluent l'état émotionnel et psychologique de la victime dans la recherche du consentement.

Certains pays accordent une attention particulière à la question de savoir si le caractère volontaire a été exprimé : par la parole, par les actes - en Espagne - ou d'une autre manière - en Suède - exprimant clairement la volonté de la personne.

Dans le cadre de cette table ronde, nous nous pencherons plus particulièrement sur la législation de deux États européens :

- celle de l'Espagne, modifiée récemment en 2022 pour y introduire la notion de consentement ;

- et celle de la Suède, modifiée en 2018, qui a fait de l'expression du consentement explicite au coeur des rapports sexuels une pierre angulaire de sa politique pénale de lutte contre les viols et a permis une augmentation significative du nombre de condamnations pour viol. Nous nous intéresserons également à ce que recouvre la notion de « viol par négligence » qui existe dans la législation suédoise.

Nous examinerons aussi l'exemple du Canada qui a, depuis plus de trente ans, introduit la notion de consentement dans sa définition du viol, estimant que toute personne qui entreprend une activité sexuelle a l'obligation de s'assurer de l'accord explicite, librement exprimé, de son ou sa partenaire.

Enfin, nous nous pencherons sur les stipulations de la Convention d'Istanbul, ratifiée par la France il y a maintenant dix ans. Elles demandent aux États signataires d'intégrer l'absence de consentement dans leur définition du viol. Le Groupe d'experts sur la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (Grevio) veillant à l'application de cette convention a déjà interpellé la France à plusieurs reprises sur ce sujet.

Pour évoquer ensemble ces différents aspects, je souhaite la bienvenue à nos trois intervenantes :

- Catherine Le Magueresse, doctoresse en droit, chercheuse, autrice de nombreux travaux plaidant pour une redéfinition pénale du consentement sexuel. Elle nous parlera plus spécifiquement de la législation canadienne en la matière - je précise qu'elle interviendra par visioconférence et devra nous quitter dès 9 heures 15 ;

- Marion Lacaze, également en visioconférence, maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l'Université de Bordeaux, Institut de sciences criminelles et de la justice (ISCJ). Elle abordera la législation espagnole ;

- Françoise Kempf, administratrice au sein du secrétariat du mécanisme de suivi de l'application de la Convention d'Istanbul, au Conseil de l'Europe. Elle nous présentera les implications de cette Convention ainsi que les quatre grandes approches adoptées par les différents pays européens en matière de définition du viol, et notamment la façon dont la Suède a fait évoluer sa législation.

INTERVENTION DE CATHERINE LE MAGUERESSE
DOCTORESSE EN DROIT, CHERCHEUSE

Bonjour à toutes et à tous. Merci pour cette invitation. Je regrette de ne pouvoir être physiquement parmi vous aujourd'hui. Je suis à Nantes, invitée à intervenir sur le sujet du consentement par l'association Citad'elles qui accueille, écoute, informe les femmes victimes de violences et leurs enfants.

Le thème de votre table ronde revêt une importance cruciale dans le contexte actuel. Nous suivons avec attention le procès dit « des viols de Mazan ». Dans cette affaire, le consentement, qui ne devrait en aucun cas être invoqué, puisque Mme Pélicot était droguée au point d'être inconsciente et donc dans l'incapacité de consentir, est pourtant constamment mis en avant par la défense.

Nous savons que les statistiques judiciaires relatives au traitement des violences sexuelles en France demeurent préoccupantes. Depuis sept ans, et malgré le mouvement #MeToo, elles n'ont guère évolué positivement. Si le nombre de plaintes déposées a augmenté, celui des condamnations, en revanche, a diminué. Ce constat soulève des questions quant au rôle du droit pénal face à ce constat. Est-il aujourd'hui adapté à la réalité des violences sexuelles masculines à l'encontre des femmes ?

Dans ce contexte, le recours au droit comparé s'avère particulièrement pertinent. Ce domaine a toujours constitué un axe central de mes travaux, qu'il s'agisse de ma thèse ou de la rédaction de mon ouvrage Les pièges du consentement. Pour une redéfinition pénale du consentement sexuel. Le Canada, en particulier, a joué un rôle pionnier en démontrant qu'il était possible de repenser l'approche des violences sexuelles, en changeant de paradigme. Cette transformation repose notamment sur l'introduction du concept de consentement « positif », une notion sur laquelle nous reviendrons peut être plus tard qui impose à la personne qui initie un contact sexuel l'obligation de s'assurer du consentement explicite et libre de toute coercition de l'autre.

Cette approche revêt une importance d'autant plus grande que notre société est marquée par une omniprésence croissante de la pornographie, qui imprègne les relations entre hommes et femmes. Votre assemblée a d'ailleurs produit un rapport majeur sur ce sujet, mettant en lumière des chiffres particulièrement préoccupants.

Les jeunes sont consommateurs de pornographie de plus en plus tôt. Cette consommation affecte les relations hommes femmes et la perception de ce qui est autorisé ou interdit. Elle érotise les violences, les normalise et les banalise, notamment à l'encontre des femmes.

Je structurerai mon intervention en trois parties : la définition du consentement dans le Code criminel canadien, son application par la Cour suprême avec des illustrations jurisprudentielles, et la politique volontariste qui l'accompagne.

Le Code criminel canadien a connu trois interventions majeures du législateur, d'abord en 1983, puis en 1992 et enfin en 2018. Je me concentrerai sur les deux dernières. En 1992, à l'issue de travaux importants et de changements législatifs obtenus grâce à la lutte des associations et chercheurs et chercheuses féministes, une définition du consentement sexuel a été intégrée dans le Code. Ainsi, les articles 273.1 et 273.2 définissent le consentement positif comme un accord volontaire donné en tenant compte des circonstances. C'est une question de droit.

Le Code précise également qu'il ne peut y avoir de consentement dans plusieurs cas : lorsque l'accord est manifesté par les paroles ou le comportement d'un tiers - je vous renvoie ici au procès de Mazan -, quand la personne est inconsciente ou incapable de consentir, en cas d'abus de confiance ou de pouvoir, si la personne manifeste son refus par ses paroles ou son comportement, ou si elle retire son consentement initial. Cela implique que le consentement doit être continu. Ainsi, les caractéristiques du consentement sont précisées dans le Code criminel canadien. Cette définition va au delà de la simple mention du mot « consentement ». Elle détaille ses caractéristiques et les situations où il est absent.

Il convient de souligner un aspect essentiel du Code criminel canadien : la possibilité d'invoquer ce que l'on nomme la « défense de croyance sincère, mais erronée, dans le consentement d'autrui ». Toutefois, cette défense n'est admissible que dans des circonstances strictement encadrées, explicitement définies par le Code criminel. À ce titre, l'article 273.2 du Code précise ce que l'on appelle « l'exclusion du moyen de défense fondé sur la croyance au consentement ». Ainsi, cette défense ne peut être invoquée lorsque la croyance en l'existence du consentement découle :

- d'un affaiblissement volontaire des facultés : par exemple, si une personne affirme qu'elle était sous l'emprise de l'alcool ou de drogues et, de ce fait, incapable d'évaluer correctement la situation, cette circonstance ne saurait justifier une telle croyance. En droit français, une telle situation constituerait également une circonstance aggravante, et non atténuante, contrairement à ce que certains pourraient penser ;

- d'une insouciance ou d'un aveuglement volontaire : il incombe à la personne qui initie un contact sexuel de s'assurer activement de l'accord volontaire de l'autre partie ;

- de l'absence de mesures raisonnables pour vérifier le consentement : il s'agit d'une obligation légale de s'assurer, dans les limites de ce que permettent les circonstances, que l'autre partie donne effectivement son consentement.

Mais que signifient précisément ces mesures raisonnables ? Elles impliquent de tenir compte du contexte, un élément fondamental dans l'évaluation du consentement. Ce contexte varie en fonction de la nature du geste sexuel et de la relation entre les individus concernés. Par exemple, si l'on vient de rencontrer une personne, l'obligation de prendre des mesures raisonnables pour garantir son consentement est encore plus forte, car on ne connaît ni ses attentes ni ses préférences. Dans le même temps, dans une relation de couple, cette obligation reste présente, bien que les dynamiques puissent différer. Évidemment, les cas de différence d'âge ou de relations d'autorité doivent faire l'objet d'une vigilance particulière.

Enfin, la preuve de l'absence de preuve de l'un accord volontaire de la plaignante à l'activité, manifesté de façon explicite par ses paroles ou son comportement, -elle a refusé ou est restée silencieuse - invalide cette défense. En résumé, le consentement sexuel est défini comme un accord volontaire, extériorisé et communiqué. Il existe une obligation de prendre des mesures raisonnables pour s'en assurer, en tenant compte du contexte. La loi précise également les circonstances dans lesquelles le consentement ne peut être allégué car il sera vicié.

Avec des collègues réunies au sein de ce que nous avons nommé le « Cercle 1 », composé de magistrates, avocates, universitaires et militantes associatives - j'utilise ici le féminin universel -, nous nous efforçons de définir trois aspects : les éléments constitutifs d'un consentement positif, les circonstances excluant la possibilité de consentement, et les situations nécessitant une vigilance accrue. Nos travaux s'inspirent largement du droit canadien et de la Convention d'Istanbul.

Ces principes ont été appliqués par la Cour criminelle canadienne, équivalent de notre Cour de cassation, dans diverses affaires.

Dans l'arrêt Ewanchuk de 1999, la Cour suprême du Canada établit qu'il n'existe pas de défense de consentement implicite. L'accusé avait allégué que l'absence de résistance physique de la victime pouvait être interprétée comme un consentement tacite. La Cour rejette catégoriquement cette vision, la jugeant fondée sur des mythes et stéréotypes inacceptables en droit.

L'arrêt J.A. contre la Reine de 2011 traite d'une affaire cruciale concernant ce qu'on appelle le sexe violent ou brutal, dit « rough sex », généralement qualifié de viol. Cette décision est d'autant plus importante que ce type de défense se développe, y compris en France. Elle nous intéressera probablement dans les années à venir.

Le cas ici traité relevait d'une asphyxie dite « érotique », illustrant l'érotisation de la violence dont je parlais plus tôt. L'accusé avait étranglé la victime jusqu'à l'inconscience avant de lui imposer des gestes non consentis, prétendant avoir obtenu un consentement préalable. La Cour suprême affirme que le consentement doit être continu, excluant ainsi la possibilité d'un accord anticipé. Elle ferme donc cette porte de défense.

Enfin, l'arrêt Barton de 2019 concerne le meurtre d'une femme autochtone, prostituée, décédée des suites d'actes de violence sexuelle commis par l'accusé. Cette affaire est également significative dans la jurisprudence relative aux violences sexuelles.

Dans l'arrêt Barton, l'homme argue qu'il a cru au consentement, car il avait payé une prostituée pour deux jours d'exploitation sexuelle. Dans cette affaire, la Cour criminelle statue qu'il n'y a pas de consentement possible.

Selon l'arrêt : « L'accusé ne saurait prétendre que le fait de se fier au silence, à la passivité ou au comportement ambigu de la plaignante est une mesure raisonnable pour s'assurer du consentement. Le fait de croire que l'un ou l'autre de ces facteurs emporte consentement est contestable. » Cet arrêt renvoie à l'arrêt Ewanchuk de 1999 précédemment cité. Par conséquent, la tentative de l'accusé de « tâter le terrain » en se livrant sciemment ou inconsidérément à des attouchements sexuels non consentis ne saurait être considérée comme une mesure raisonnable.

Par conséquent, M. Barton a été condamné pour homicide volontaire. Cette décision a été rendue en 2022.

Mme Dominique Vérien, présidente. - Vous parlez ici d'un homicide, et non d'un viol.

Mme Catherine Le Magueresse. - Il se trouve que cette femme est morte des blessures infligées par M. Barton dans le cadre de violences sexuelles, pour lesquelles il plaidait un consentement.

La dernière affaire est relative au port du préservatif. Elle a trait aux circonstances du consentement et aux éléments sur lesquels les partenaires se mettent d'accord. Dans cette affaire, la femme avait consenti à une relation sexuelle à condition d'utiliser un préservatif, que l'homme a retiré pendant l'acte. Ce retrait non consenti a transformé la relation en viol. Cet arrêt est crucial, car il condamne la pratique du « stealthing » ou « retrait furtif du préservatif », influencée par la pornographie. Certains sites proposent même des techniques pour le faire à l'insu du partenaire. J'y vois, là aussi, une influence de la pornographie.

La Cour suprême du Canada s'attache à déconstruire les mythes et stéréotypes autour du consentement, en précisant les circonstances où il est impossible.

Pour faire vivre ces textes, une politique pénale, mais aussi éducative et de formation est indispensable. Le Canada semble plus avancé que la France sur ce point. Le rapport québécois Rebâtir la confiance expose les lacunes de cette politique criminelle et éducative. J'aimerais que nous ayons la même capacité d'introspection pour progresser.

En conclusion, l'exercice de comparaison des systèmes juridiques est délicat, étant donné que nos systèmes juridiques sont différents - inquisitoire ou accusatoire -, mais les enjeux concernant le consentement sont similaires. Ces réflexions peuvent nous inspirer pour nos propres législations. Elles sont transférables dans le droit français.

Avec François Lavallière, magistrat, nous avons organisé en mars un colloque à l'École nationale de la magistrature (ENM), à destination d'avocats et de magistrats. Nous y avons invité deux Canadiennes, Élisabeth Sheeh, professeure de droit criminel à l'université d'Ottawa, et Delphine Mauger, procureure du Québec. Cette dernière nous a proposé d'examiner une situation de viol, jugée différemment dans les deux droits. L'accusé a été condamné au Canada. Il aurait probablement été relaxé en France, ou l'affaire aurait été classée sans suite et n'aurait même pas atteint un tribunal.

L'introduction du consentement dans la loi ne résoudra cependant pas tout dans une société patriarcale. Elle doit s'accompagner a minima d'une politique de formation et d'éducation beaucoup plus large. Je pense que mes collègues présents l'évoqueront plus longuement.

Néanmoins, cela pose un cadre juridique permettant de s'affranchir des représentations sexistes. Le consentement devient un élément juridique crucial, exigeant une vérification rigoureuse. Nous ne pouvons plus nous contenter de suppositions ou de fantasmes. Je fais ici référence à l'affaire « Pelicot », où les agresseurs ont prétendu avoir mal interprété la situation. Dans une relation intime pouvant potentiellement porter atteinte à l'intégrité d'autrui, il est inadmissible de se fonder sur ses propres fantasmes, de penser qu'une main dans les cheveux vaut consentement, ou qu'un « non » signifie en réalité un « oui ».

En 2024, nous ne pouvons plus nous appuyer sur des mythes et stéréotypes pour alléguer un consentement. Le refus des femmes doit être respecté et produire des effets en droit. Dans la majorité des cas que nous traitons quotidiennement dans les cabinets d'avocats et de magistrats, lorsqu'une femme dit non, elle veut dire non. Son silence équivaut également à un refus. Et même lorsqu'elle dit oui, ce consentement doit être analysé pour s'assurer qu'il est exempt de toute coercition. Ces situations nous ramènent aux notions de violence, contrainte, menace et surprise déjà présentes dans notre droit pénal. Un consentement donné par peur de représailles n'est pas valable et le rapport sexuel imposé est un viol.

Vous nous demandiez de vous éclairer sur la nécessité ou non de modifier le code pénal. Je pense que vous devez le faire évoluer, au moins dans ces trois cas de figure. Actuellement, lorsqu'une femme dit non sans que cela soit corroboré par une situation de violence ou de menace, le droit français ne reconnaît pas ce qu'elle a vécu comme un viol ou une agression sexuelle. En cas de silence, les agresseurs peuvent prétendre avoir cru au consentement.

Le droit canadien, contrairement au droit français, dispose que l'agresseur n'a pas pris les mesures volontaires et raisonnables pour s'assurer du consentement, et que celui ci n'a pas été extériorisé. Voilà la grande différence entre le droit canadien et le droit français.

Enfin, il est crucial non seulement de poursuivre et condamner davantage d'agresseurs, mais aussi de prévenir les agressions. La fonction pédagogique de la loi est primordiale dans ce cadre. Elle doit clairement énoncer qu'il est nécessaire d'éduquer au souci de l'autre et de prendre des mesures raisonnables pour s'assurer du consentement de la personne avec laquelle on initie des contacts sexuels, afin d'éviter de la blesser.

Mme Elsa Schalck. - Merci pour votre intervention, à la fois extrêmement intéressante et particulièrement exhaustive sur le plan juridique. Je sais que votre emploi du temps vous contraint à nous quitter rapidement, mais avant cela, j'aimerais vous poser deux questions pour approfondir certains aspects évoqués.

Premièrement, un changement législatif peut entraîner des conséquences inattendues qui n'avaient pas été anticipées. Disposez vous d'un exemple concret dans le contexte canadien ? Au delà de l'impact juridique, ces évolutions législatives ont elles modifié de manière notable les relations entre les hommes et les femmes au sein de la société canadienne ?

Deuxièmement, vous avez évoqué l'absence de reconnaissance d'un consentement implicite dans ce cadre juridique. Comment, dès lors, s'opère la charge de la preuve concernant l'absence de consentement, précisément dans une situation où le consentement implicite est exclu ?

Mme Catherine Le Magueresse. - Cette seconde question, relative aux relations femmes-hommes, relève davantage du domaine des sociologues. Cela étant, en échangeant régulièrement avec des juristes canadiennes sur ce sujet, je n'ai rencontré aucune voix critique remettant en cause ces changements. Toutes valident pleinement leur pertinence.

J'évoque fréquemment la question de la pornographie, car elle alimente une culture du viol permanente, renforcée par une disponibilité et une accessibilité croissantes de ce type de contenu. Nous sommes confrontés à un paradoxe : d'un côté, un cadre juridique est mis en place, accompagné de formations et de sensibilisations, notamment auprès des jeunes, et de l'autre, cette action semble dérisoire face à l'ampleur de la consommation de contenus pornographiques. C'est un échange complet qui doit être revu pour savoir si les effets produits sont efficaces ou non. La loi ne peut pas tout.

Il est essentiel d'interroger notre culture : qu'est ce qui, dans nos représentations collectives, nous conduit à accorder une importance capitale au consentement ? Comment développons-nous une culture du consentement ? En France, nous en sommes encore loin. Les affaires judiciaires récentes, comme celle du procès Pelicot, nous horrifient et nous interpellent. Seuls deux hommes sur une centaine, ont refusé de pénétrer une femme inconsciente. Certains ont même osé prétendre à une croyance en son consentement ou à un consentement donné par le mari. Elles nous rappellent l'urgence de promouvoir une véritable culture du consentement.

Ensuite, la défense fondée sur le consentement implicite n'est plus recevable en droit canadien. C'est ce qu'on appelle une erreur de droit. Le droit impose désormais une exigence claire : toute relation sexuelle ou tout contact sexuel, quel qu'en soit le degré, doit être précédé d'un consentement explicite, libre et éclairé. Sans un oui explicite, aucune relation ou aucun contact sexuel ne peut être engagé, quelle qu'en soit sa nature.

La jurisprudence canadienne est extrêmement claire à ce sujet. J'en veux pour preuve une décision récente de 2024 : dans cette affaire, deux personnes s'étaient rencontrées via une application de rencontre. La femme avait précisé de manière explicite qu'il n'y aurait pas de relations sexuelles lors de cette première rencontre. Cette affirmation était documentée dans leurs échanges. Malgré cela, l'homme lui a imposé des actes sexuels, ce qui a conduit à sa condamnation. Le tribunal a estimé qu'il n'avait pris aucune mesure pour vérifier si elle avait changé d'avis. Est-ce un renversement de la charge de la preuve ? Non.

Au Canada comme en France, le principe de présomption d'innocence demeure fondamental. La preuve incombe à la partie poursuivante - le procureur en droit français. Cette charge n'est nullement renversée. La preuve repose sur un faisceau d'indices concordants et sur l'ensemble des éléments du dossier.

Il convient de rappeler qu'en droit canadien, qui repose sur un système accusatoire, le rôle du juge est de déterminer si les preuves présentées établissent, au-delà de tout doute raisonnable, la culpabilité de l'accusé. Comme en France, le doute doit en effet toujours profiter à l'accusé.

Par ailleurs, il est erroné de croire que ces affaires se résument à un simple affrontement de paroles opposées. Dans la majorité des cas, lorsque l'enquête est menée de manière approfondie et rigoureuse - ce qui soulève d'ailleurs la question de ce qu'est une bonne enquête -, les éléments nécessaires pour établir la culpabilité de l'accusé sont généralement réunis. Encore faut-il que ces investigations soient menées avec sérieux : si l'on ne cherche pas, il est évident que l'on ne trouve pas.

Elsa Schalck. - Je vous remercie pour ce témoignage très instructif, notamment concernant l'exemple canadien fréquemment cité. Nous vous sommes reconnaissants pour cette contribution enrichissante.

Je laisse maintenant la parole à Marion Lacaze pour évoquer la législation espagnole.

Catherine Le Magueresse. - Merci beaucoup. Je regarderai la suite de vos travaux en différé, avec un grand intérêt.

INTERVENTION DE MARION LACAZE
MAÎTRE DE CONFÉRENCES EN DROIT PRIVÉ ET SCIENCES CRIMINELLES À L'UNIVERSITÉ DE BORDEAUX
INSTITUT DE SCIENCES CRIMINELLES ET DE LA JUSTICE (ISCJ)

Bonjour à tous. Merci pour cette invitation. Je suis heureuse de pouvoir présenter certains aspects du droit espagnol, souvent considéré comme un modèle en matière de lutte contre les violences de genre.

Concernant la définition du viol, l'évolution du droit espagnol est récente, elle date de la loi du 6 septembre 2022, dite loi Solo sí es sí (« Seul un oui est un oui »). Cette dernière vise à instaurer un changement de paradigme en plaçant le consentement au coeur de la notion d'agression sexuelle. Cette réforme s'inscrit dans une loi de programmation plus large visant à éradiquer les violences faites aux femmes et aux enfants, ainsi qu'à les protéger contre la victimisation secondaire.

Comme souvent, c'est la dimension répressive de la loi qui a capté l'essentiel de l'attention. Bien que l'exposé des motifs ne mentionne que les obligations issues de la Convention d'Istanbul, le contexte sociétal a fortement influencé les débats. Je pense notamment à l'affaire dite de « La Meute ». En 2016, une jeune femme majeure, fortement alcoolisée, avait accepté de suivre un groupe de cinq jeunes hommes dans un hall d'immeuble lors des fêtes de la San Fermín. Ils avaient alors réalisé sur sa personne différents actes de pénétration alors que la victime était passive, sans réaction. Ils avaient filmé leurs actes, et ont ensuite diffusé la vidéo. Dans un premier temps, ces faits ont été poursuivis et jugés sous la qualification d'abus sexuels aggravés, et non de viols, ce qui a suscité une forte indignation et des manifestations importantes dans tout le pays. Le Tribunal suprême a finalement retenu la qualification d'agressions sexuelles, mais l'affaire a mis en lumière la difficulté de distinguer clairement les deux catégories d'infractions sexuelles existantes à l'époque.

La réforme de 2022 a levé ces difficultés en faisant de l'absence de consentement l'élément nécessaire mais suffisant pour qualifier les agressions sexuelles. Ce changement de paradigme s'est cependant heurté à une interprétation inattendue des conséquences répressives, nécessitant des ajustements dès 2023.

La loi de 2022 a en effet abandonné les distinctions antérieures pour faire du seul consentement l'élément qualifiant des agressions sexuelles. Avant cette réforme, le droit espagnol distinguait les agressions sexuelles des abus sexuels, de moindre gravité. Les deux catégories exigeaient un contact de nature sexuelle, et prévoyaient des peines plus lourdes en cas de pénétration. La distinction reposait principalement sur le comportement de l'auteur : l'agression sexuelle impliquait violence ou intimidation, tandis que l'abus sexuel était caractérisé par l'absence de violence ou d'intimidation et l'absence de consentement de la victime à des actes portant atteinte à sa liberté ou à son inviolabilité sexuelle.

Dans l'ancien droit espagnol, le concept d'abus sexuel désignait le fait de commettre des actes à caractère sexuel sur une victime privée de discernement ou de tirer profit d'une situation de faiblesse excluant toute possibilité de consentement.

Ces situations pouvaient être ponctuelles ou chroniques et être provoquées ou non par l'auteur des faits. Elles incluaient des cas variés, tels que des victimes atteintes d'un handicap mental, l'administration de substances ou encore une alcoolisation volontaire de la victime. Le comportement de l'auteur constituait alors un élément central dans la qualification des infractions sexuelles et déterminait la répartition des incriminations.

La réforme législative de septembre 2022 a profondément modifié cette conception. Désormais, l'agression sexuelle est définie comme tout acte à caractère sexuel réalisé sans le consentement libre et explicite de la personne sur laquelle il est commis. La distinction entre agression sexuelle et abus sexuel a été supprimée.

Ainsi, l'absence de consentement mutuel est devenue la seule condition nécessaire, mais suffisante, pour qualifier un acte d'agression sexuelle. Cette redéfinition englobe non seulement les faits déjà qualifiés d'agression sexuelle ou d'abus sexuel avant la réforme, mais également des situations qui, jusqu'alors, échappaient à toute incrimination, dans la mesure où le consentement faisait défaut sans qu'aucun comportement agressif ou abusif ne soit en cause.

Les implications de cette réforme sont considérables et témoignent d'une volonté explicite de changer de paradigme. C'est désormais la préservation de la liberté sexuelle qui prime, indépendamment des moyens utilisés pour porter atteinte à celle-ci. La loi adopte ainsi une fonction expressive forte, affirmant l'importance de cette liberté fondamentale.

Le législateur, conscient des difficultés probatoires liées à la notion subjective d'absence de consentement, a précisé les modalités de son évaluation. Aucun formalisme n'est exigé pour la preuve et il n'est pas question de requérir des éléments préconstitués. La réalité et la liberté du consentement doivent être appréciées à partir de l'attitude de la personne concernée, y compris sa communication non verbale. En revanche, l'absence d'opposition ou de réaction ne saurait être interprétée comme une preuve de consentement. Celui-ci ne peut jamais être présumé, y compris dans le cadre d'une relation conjugale.

Dans cette nouvelle perspective, des situations telles que des relations avec une personne endormie, privée de conscience par des substances ou en état de sidération sont désormais systématiquement qualifiées d'agressions sexuelles. Pour éviter cette qualification, il est impératif que le consentement soit explicite, c'est-à-dire qu'il s'exprime par une manifestation positive de volonté.

L'élargissement de la notion d'agression sexuelle introduit par la réforme de 2022 se traduit par un durcissement des dispositions pénales par rapport au droit antérieur. Toutefois, cette sévérité s'applique exclusivement aux faits commis après l'entrée en vigueur de la loi, le 7 octobre 2022. Les effets de cette réforme, notamment l'exigence d'un consentement explicite, restent difficiles à évaluer en l'absence d'un volume significatif de décisions publiées.

Concernant l'appréciation du consentement, nous pouvons raisonnablement penser que le Tribunal suprême maintiendra, a minima, les critères qu'il avait établis en matière d'abus sexuel, lesquels paraissent compatibles avec les nouvelles orientations législatives. Ces critères incluent notamment l'exigence d'un consentement persistant tout au long de l'acte sexuel et la possibilité, pour une personne, de retirer son consentement à tout moment.

En l'absence de preuves matérielles, l'évaluation de la crédibilité des versions respectives de l'auteur et de la victime revêt une importance capitale. La jurisprudence espagnole témoigne par ailleurs d'une attention notable à la prévention de la victimisation secondaire.

Toutefois, il est encore trop tôt pour évaluer avec précision les effets pratiques de l'élargissement des infractions de viol et des autres agressions sexuelles introduit par la réforme de 2022. En réalité, le coeur de cette réforme n'a pas été au centre des débats publics. L'essentiel des arrêts et du débat public s'est concentré sur une conséquence inattendue de la loi : l'interprétation judiciaire de l'application temporelle des peines prévues par le texte.

Cette difficulté, qui n'aurait pas pu se produire en France en raison de systèmes de pénalité différents, mérite d'être explicitée pour comprendre les motivations ayant conduit à la nouvelle réforme d'avril 2023. En Espagne, les peines encourues sont exprimées sous forme de fourchettes, modulables en fonction de circonstances atténuantes ou aggravantes, lesquelles permettent également de réduire l'intervalle dans sa moitié inférieure ou supérieure.

La loi de 2022, animée par un souci légitime de proportionnalité, a élargi ces fourchettes sans augmenter les peines maximales, mais en abaissant les seuils minimaux. Par exemple, la peine pour un viol simple, auparavant fixée entre six et douze ans d'emprisonnement, est passée à une fourchette de quatre à douze ans, afin d'y intégrer des actes auparavant qualifiés d'abus sexuels. Avec une circonstance atténuante, l'intervalle est passé de six-neuf ans à quatre-huit ans.

L'objectif du législateur était de refléter, par cet élargissement, l'inclusion des abus sexuels et des hypothèses moins graves au sein d'une qualification unique d'agression sexuelle. En dépit d'une circulaire appelant à considérer la réforme de 2022 comme indivisible et globalement plus sévère, certains juges, y compris au sein du Tribunal suprême, ont estimé que des condamnations antérieures devaient être révisées en appliquant rétroactivement les nouvelles peines minimales plus favorables.

Cette interprétation a conduit à la révision de centaines de condamnations et à la libération anticipée de plusieurs dizaines de personnes, provoquant un scandale d'ampleur. Faute d'instruments juridiques permettant d'interdire aux juges cette application rétroactive, le législateur espagnol a dû adopter une nouvelle réforme, entrée en vigueur le 27 avril 2023.

Si cette loi ne peut modifier les peines pour les faits commis avant son entrée en vigueur, en raison du principe de non-rétroactivité, elle exclut pour l'avenir la possibilité que des faits d'une gravité particulière bénéficient de peines plus légères. Désormais, une peine de six à douze ans d'emprisonnement est prévue pour les viols commis avec violence, intimidation ou sur une victime privée de volonté. De plus, la circonstance atténuante fondée sur la faible gravité des faits est expressément exclue dans ces cas.

Certains y voient un recul symbolique par rapport à la loi de 2022, qui visait à établir une qualification unique pour l'ensemble des actes non consentis. Cependant, on peut également considérer que cette « contre-réforme » offre une gradation plus claire et cohérente des peines, en adéquation avec la gravité des comportements fautifs, qui est un critère fondamental du droit pénal.

Malgré ces ajustements, l'apport essentiel de la réforme de septembre 2022 demeure intact. En conformité avec les exigences de la Convention d'Istanbul, l'agression sexuelle est désormais définie comme tout acte de nature sexuelle commis sans consentement libre, mutuel et explicite.

Merci pour votre attention.

Elsa Schalck. - Je vous remercie pour cette présentation démontrant la complexité de la loi et la réactivité des autorités espagnoles. Elle montre aussi à quel point il est important de vérifier les effets de bords lorsque l'on modifie une telle législation.

Je laisse la parole à Françoise Kempf.

INTERVENTION DE FRANÇOISE KEMPF
ADMINISTRATRICE DU GROUPE D'EXPERTS DU CONSEIL DE L'EUROPE
SUR LA VIOLENCE À L'ÉGARD DES FEMMES ET LA VIOLENCE DOMESTIQUE (GREVIO)

Merci beaucoup pour cette invitation à participer à cette audition très importante.

Dans le temps qui m'est imparti, je propose de vous exposer de manière concise le cadre établi par la Convention d'Istanbul pour prévenir et réprimer les violences sexuelles tout en assurant la protection des victimes. Dans un premier temps, je vous présenterai un aperçu des principales dispositions de cette convention relative aux violences sexuelles, y compris la définition du viol. Ensuite, j'analyserai les diverses approches adoptées par les États parties à la convention, en examinant leur compatibilité avec ses exigences et les enseignements que nous pouvons tirer de ces approches.

Tout d'abord, il convient de souligner que la Convention d'Istanbul contient plusieurs dispositions essentielles relatives aux violences sexuelles. L'article 36, notamment, propose une définition de la violence sexuelle et du viol, sur laquelle je reviendrai dans un instant. Par ailleurs, les articles 49 et 50 contiennent un ensemble d'exigences précises en matière d'enquête et de poursuites visant toutes les formes de violences faites aux femmes, y compris les violences sexuelles. L'article 56 se concentre sur les mesures de protection à mettre en oeuvre pour les victimes tout au long de la procédure judiciaire, des dispositions particulièrement cruciales lorsqu'il s'agit de violences sexuelles. Enfin, l'article 25 impose aux États parties de créer et de maintenir un nombre suffisant de services de soutien spécialisés destinés aux victimes de ces violences. Ces services incluent une assistance psychologique, médicale, et juridique, ainsi que la possibilité de collecter et de conserver des preuves, même en l'absence de plainte formelle.

Venons-en maintenant à la définition de la violence sexuelle et du viol, telle que spécifiée dans l'article 36 de la Convention. Cet article impose aux États parties de considérer comme une infraction pénale :

- toute pénétration vaginale, anale ou orale non consentie du corps d'autrui, réalisée avec une partie du corps ou un objet ;

- tout acte de nature sexuelle imposé sans le consentement de la personne ;

- le fait de contraindre une personne à accomplir des actes sexuels non consentis avec un tiers.

En somme, cette disposition englobe l'ensemble des actes à caractère sexuel imposés de manière intentionnelle à une personne sans son libre consentement. Cette définition, il faut le souligner, ne requiert ni l'usage de la force ou de la menace ni la preuve d'une résistance physique ou verbale de la victime.

Les rédacteurs de la Convention d'Istanbul ont ainsi poursuivi deux objectifs principaux. D'une part, il s'agissait de garantir que certains types de viols ne restent pas impunis, notamment lorsque les victimes n'ont pas manifesté une résistance active ou n'ont pas été en mesure de le faire. D'autre part, cette approche vise à refléter pleinement l'expérience des femmes victimes de viol en adoptant une perspective centrée sur leur vécu, en prenant notamment en compte les traumatismes qu'elles subissent.

Enfin, il importe de préciser que cette définition s'appuie sur une jurisprudence fondamentale de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Dès 2003, celle-ci a affirmé que les enquêtes concernant les violences sexuelles devaient se concentrer avant tout sur la question du consentement. Elle a également qualifié de « rigide » l'approche fondée uniquement sur la preuve de la force ou de la contrainte, estimant que cette dernière compromettait l'autonomie sexuelle des victimes.

Un autre aspect fondamental de la définition énoncée à l'article 36 de la Convention d'Istanbul, évoqué par les précédentes intervenantes, réside dans la nécessité d'une évaluation contextuelle des preuves lorsque l'on cherche à déterminer l'existence ou l'absence de consentement. Il s'agit, encore une fois, de prendre pleinement en considération la situation spécifique dans laquelle se trouvait la victime au moment des faits et d'examiner l'ensemble des circonstances.

La mise en oeuvre de la Convention d'Istanbul fait l'objet d'un suivi par deux instances dédiées, créées à cet effet par la Convention elle-même. Parmi celles-ci figure le Grevio. Il est chargé d'élaborer des rapports d'évaluation et de formuler des recommandations aux États parties. Il a publié un peu plus de quarante rapports au cours des huit dernières années. Sur la base des constats issus de ces rapports, quatre grandes approches législatives en matière de définition et de poursuite du viol peuvent être identifiées.

La première de ces approches repose sur des lois définissant le viol à partir du recours à la force, à la contrainte, à l'intimidation ou à la menace. Ce modèle reste encore prédominant dans un certain nombre de pays, tels la France, la Bosnie-Herzégovine, l'Estonie, l'Italie, les Pays-Bas ou encore la Pologne. Cette approche reflète la conception pénale traditionnelle du viol, largement fondée sur une représentation archaïque selon laquelle les viols seraient majoritairement perpétrés par des étrangers à la victime, en usant de violence et en causant des dommages physiques.

Or il est désormais établi qu'une proportion importante de viols sont en réalité commis par des personnes proches ou connues de la victime, et qu'ils ne s'accompagnent pas nécessairement de blessures visibles. Cette approche traditionnelle tend également à perpétuer l'idée, injustifiée, que les accusations de viol sont aisées à formuler, mais difficiles à réfuter, ce qui influence les règles relatives à l'administration de la preuve. Dans ce cadre, l'expérience des victimes de viol n'est que peu prise en compte de manière adéquate, notamment en ce qui concerne les réactions psychologiques telles que l'inhibition, la soumission, ou même l'attachement, dont il a été question précédemment.

Cela étant, il convient de nuancer ce constat en précisant que la majorité des États parties à la convention qui suivent cette approche reconnaissent, que ce soit par le biais de la législation ou de la jurisprudence, certaines circonstances invalidant le consentement. Ces circonstances incluent, entre autres, des états d'impuissance ou de vulnérabilité, des abus de position d'autorité, une infériorité physique ou des situations de surprise.

Cependant, le Grevio a mis en évidence deux problèmes majeurs liés à cette approche. D'une part, l'absence de consentement est encore trop souvent interprétée de manière inconsistante par les tribunaux. D'autre part, le niveau de preuve requis pour établir l'existence d'un viol reste très élevé. Ces obstacles contribuent de manière significative aux abandons de poursuites dans les affaires de violences sexuelles, ce qui explique en partie les faibles taux de condamnation observés.

La deuxième approche, dite à deux niveaux, est suivie par des pays tels que la Grèce, la Norvège ou la Serbie.

Dans ces pays, la législation pénale prévoit à la fois une disposition exigeant le recours à la force et une autre fondée sur l'absence de consentement. En règle générale, les infractions impliquant un recours à la force sont punies par des peines d'emprisonnement plus sévères, tandis que les cas où la force n'est pas employée ne sont souvent pas qualifiés de viols. Ces infractions sont donc classées selon la gravité de la violence physique ou de la menace exercée par l'auteur, ainsi que selon le degré d'impuissance de la victime ou son incapacité à manifester une résistance ou à exprimer sa volonté.

Pour le Grevio, ce n'est pas le recours à la force qui devrait déterminer la gravité de la sanction, mais bien l'absence de consentement. Le recours à la force devrait toutefois être considéré comme une circonstance aggravante. De plus, le Grevio a observé que l'introduction de différentes catégories d'infractions sexuelles se traduit souvent, dans la pratique, par une hiérarchisation des victimes selon leur degré de vulnérabilité, ce qui n'est pas sans rappeler les problématiques soulevées dans le cas espagnol évoqué précédemment.

J'en viens maintenant à la troisième approche, dite du « non, c'est non », adoptée notamment par l'Allemagne et, plus récemment, par la Suisse. Selon cette approche, un acte sexuel est considéré comme consenti si aucune des parties n'exprime de refus. Cette approche repose donc sur une présomption de consentement, sauf si celui-ci est explicitement retiré. En pratique, elle incrimine les actes sexuels réalisés contre la volonté d'une personne, ce qui implique que, pour établir l'absence de consentement, le degré d'opposition exprimée - verbalement ou autrement - par la victime est déterminant. Cette approche tend ainsi à se focaliser davantage sur le comportement de la victime que sur celui de l'auteur.

Cette méthode présente plusieurs limites. D'une part, le mythe persistant selon lequel un « non » de la victime pourrait signifier « oui » reste profondément ancré dans nos sociétés. D'autre part, les situations de passivité, sans consentement explicite, mais où aucune opposition n'est exprimée, sont plus difficiles à aborder dans ce cadre.

Pour répondre à cette difficulté, la Suisse, qui a révisé sa définition du viol en 2023 en adoptant l'approche du « non, c'est non », a intégré des dispositions spécifiques pour reconnaître les cas d'immobilité tonique, ou « freezing », caractérisés par une paralysie de la victime.

Venons-en enfin à la dernière approche, préconisée par la Convention d'Istanbul, communément appelée l'approche du seul un oui veut dire oui. Cette méthode, adoptée par la Suède en premier lieu, puis par la Belgique, le Luxembourg, l'Islande, l'Espagne (avec certaines nuances abordées précédemment) et la Slovénie, repose sur des normes de consentement affirmatif et librement donné. Selon cette conception, le consentement se définit comme un accord mutuel fondé sur le libre arbitre des parties. Ainsi, il incombe à l'auteur de s'assurer qu'un consentement explicite a été exprimé, plutôt qu'à la victime de manifester une opposition. C'est sur ce point précis que cette approche diffère de celle du « non, c'est non. »

Dans les pays qui adoptent cette approche, les rapports sexuels avec une personne n'ayant pas donné son consentement ou n'ayant pas participé de manière volontaire à l'acte sexuel sont répréhensibles. Il est évident que le silence ou l'absence de résistance ne saurait en aucun cas constituer une preuve de consentement. De plus, le consentement doit pouvoir être retiré à tout moment au cours de l'acte sexuel.

La distinction avec l'approche « non, c'est non », parfois perçue comme difficile à saisir, réside également dans l'évolution de la manière dont la société, ainsi que le système judiciaire, appréhendent le processus de consentement à un acte sexuel. Dans cette optique, le sexe est perçu comme un acte auquel les deux parties doivent consentir librement et de manière explicite.

Cette approche entraîne des règles plus claires pour les parties concernées, tant pour celles susceptibles de commettre une agression sexuelle que pour les victimes. Elle vise également à mieux protéger ces dernières en les plaçant au centre de l'intervention, en prenant en compte intégralement ce qu'elles ont subi et leurs traumatismes.

Elle donne lieu à des enquêtes qui se concentrent davantage sur l'absence de consentement que sur les violences subies.

Par ailleurs, cette approche permet d'incriminer d'autres formes d'actes sexuels non consentis, telles que le retrait de préservatifs en cours d'acte, ou encore les agressions sexuelles facilitées par des drogues.

Cette approche juridique implique un changement de paradigme, ayant pour vocation d'impacter la société dans son ensemble. De cette perspective, elle permet une meilleure prévention des violences sexuelles. C'est pour cette raison que le Grevio a estimé que cette approche était la plus conforme à l'esprit de la Convention.

Cette dernière impose aux États des mesures dans divers domaines, comprenant la protection, les poursuites, mais également la prévention ainsi que des politiques globales de lutte contre les violences faites aux femmes.

Je vais maintenant illustrer ces propos par un exemple concret, à savoir celui de la Suède. Elle a été le premier pays en Europe à adopter une approche fondée sur le consentement positif, et pour laquelle nous disposons aujourd'hui d'un certain recul, après la mise en conformité avec la Convention d'Istanbul en 2018 concernant la définition du viol.

En droit pénal suédois, le viol est défini comme tout acte sexuel réalisé avec une personne n'y prenant pas part volontairement. La participation doit donc être volontaire et perçue comme telle. En outre, le droit suédois prévoit deux autres infractions relevant de la catégorie des abus sexuels par négligence. Dans ces cas, la responsabilité pénale de l'auteur peut être engagée si celui-ci n'a pas raisonnablement pris toutes les mesures nécessaires pour s'assurer du consentement de l'autre personne. Il ne s'agit donc pas d'un viol intentionnel, mais d'un viol par négligence grave de l'accusé.

À la suite de la modification de la législation pénale suédoise, il a été observé qu'entre 2017 et 2019, les condamnations pour viol ont augmenté de 75 %. À partir de 2019, l'augmentation des condamnations s'est poursuivie, bien que de manière beaucoup moins marquée. Entre 2019 et 2023, on a observé une croissance d'environ 5 % par an.

Parallèlement, la Suède a connu une hausse des signalements de viols, notamment ceux impliquant des situations telles que le viol par surprise, ou dans lesquels la victime est restée passive pour diverses raisons. Ce sont précisément ces types de situations que la loi visait à prendre en compte en priorité.

D'autres évolutions positives ont été rapportées par les autorités suédoises, dont une amélioration notable concernant les preuves apportées. Il est désormais de plus en plus rare d'utiliser des preuves relatives aux blessures physiques des victimes, au profit d'autres types de preuves, telles que les enregistrements des faits, les appels d'urgence passés par la victime, ou encore les témoignages de personnes à qui la victime s'est confiée. Cette évolution a conduit à une augmentation des condamnations pour viol sur la base de ce type de preuve.

En outre, des unités de police spécialisées dans la violence sexuelle ont été créées, et les procureurs ont reçu des formations ainsi que des directives spécifiques pour l'application de la nouvelle législation. En effet, il ne suffit pas de modifier la loi pour que des changements se produisent de manière effective.

Par ailleurs, on a pu constater une réduction de la peur des victimes d'être culpabilisées, grâce à une meilleure compréhension de leur situation et à un accent porté davantage sur les explications fournies par l'auteur de l'agression que sur celles devant être présentées par la victime. En conséquence, ces dernières sont moins susceptibles de se voir confrontées aux préjugés persistants au sein du système pénal.

Enfin, les autorités suédoises ont accompagné la réforme législative de mesures de sensibilisation au sein de la société dans son ensemble, par le biais de campagnes d'information, et dans le système éducatif. Des actions ont été menées pour promouvoir la notion de consentement. Il en ressort que la population suédoise est désormais mieux informée à ce sujet. Bien entendu, il reste encore des progrès à réaliser. Il demeure des domaines dans lesquels des améliorations sont attendues, même en Suède.

Pour de plus amples informations, je vous invite à consulter le rapport initial du Grevio sur la Suède de 2019. Un nouveau rapport sera publié dès la semaine prochaine. Je tiens également à signaler que nous publions aujourd'hui la deuxième évaluation du Grevio concernant l'Espagne, qui pourrait également vous intéresser.

Je vous remercie sincèrement pour votre attention.

Elsa Schalck. - Je vous remercie pour cette intervention, qui s'est révélée particulièrement instructive concernant la Convention d'Istanbul et les diverses approches de l'incrimination de viol. Je cède maintenant la parole à mes collègues pour d'éventuelles questions.

TEMPS D'ÉCHANGES

Laurence Rossignol. - Il est vrai que le viol, en tant qu'acte criminel, revêt une dimension universelle. Il demeure semblable d'un pays à l'autre. Cependant, les législations qui régissent cet acte et les résultats qui en découlent ne sont pas tout à fait identiques. En fonction des pays, elles ont évolué de manière différente.

Pour autant, le taux de condamnation au Canada n'est pas plus élevé que le nôtre. En effet, environ 5 à 6 % des victimes portent plainte, et au final, le taux de condamnation atteint environ 12 %. Autrement dit, malgré des approches distinctes, les résultats restent les mêmes. Il est néanmoins à noter que le Canada a mis en place un dispositif législatif tout à fait fascinant, éclairant et même instructif pour nous en France.

Quant à la Suède, je souhaiterais nuancer quelque peu les propos qui ont été tenus. Il est essentiel de prendre en compte le contexte initial dans lequel ce pays se trouvait avant l'introduction de la nouvelle législation. Ainsi, bien que l'augmentation de 75 % des condamnations depuis la réforme soit notable, il convient de se rappeler qu'avant la loi, la Suède ne reconnaissait comme éléments constitutifs de l'infraction sexuelle que la violence, la menace et la faiblesse de la victime - tel que son état d'ébriété par exemple.

À cet égard, la procureure Voigt relate l'histoire d'une jeune femme qui, un soir, fait ses besoins dans un parc, lorsqu'un homme s'approche et lui insère un doigt dans le vagin. Avant la réforme législative, cet homme n'aurait été condamné que pour agression sexuelle. Depuis la réforme, il peut désormais être jugé pour viol. Toutefois, ces mêmes faits aboutiraient aujourd'hui en France à une condamnation pour viol, car ils impliquent à la fois la pénétration et un acte de surprise.

Dans ce contexte, s'il me semble utile de comparer les législations diverses, il faut conserver à l'esprit le fait que tous les pays ne présentaient pas les mêmes définitions au départ, avant l'évolution de la loi. Sans vouloir vous paraître trop productiviste, je rappelle que nous cherchons ensemble à augmenter le nombre de poursuites et de condamnations.

Annick Billon. - Permettez-moi de revenir sur une remarque qui a été formulée par l'une des intervenantes ce matin, à savoir que la loi ne saurait tout résoudre. À partir du moment où nous disposons d'une définition du viol relativement solide dans le droit français, je me demande si, dans d'autres pays, vous avez observé des dispositifs permettant de lutter contre cette culture du viol, notamment face à l'expansion de la pornographie. Laurence Rossignol et moi-même avons mené avec la délégation aux droits des femmes un travail considérable sur l'industrie pornographique. Quelles innovations existent dans les pays voisins ou dans les pays engagés sur ces enjeux, qui pourraient constituer des leviers efficaces pour combattre la culture du viol ?

Marie Mercier. - Je souhaiterais revenir sur la situation au Canada. Depuis l'adoption en France de la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, et d'une disposition visant à interdire l'accès des mineurs aux sites pornographiques, je collabore avec Julie Miville-Dechêne, sénatrice canadienne indépendante. Elle s'efforce de faire adopter un texte visant à protéger les enfants des films pornographiques gratuits.

Cependant, elle se heurte aux mêmes difficultés que nous rencontrons ici, en France : la protection de la vie privée des utilisateurs et la liberté d'expression des consommateurs de contenus pornographiques. Que ce soit au Canada, un pays hors de l'Union européenne, ou chez nous, nous faisons face aux mêmes obstacles pour protéger nos enfants de l'accès aux films pornographiques gratuits.

Laurence Cohen, ancienne sénatrice du Val-de-Marne. - Je vous remercie pour ces interventions, qui ont toutes été particulièrement éclairantes. Toutefois, je constate qu'elles soulignent un point fondamental : la loi doit être effectivement appliquée. Le problème que nous rencontrons, notamment en France, mais aussi en Suède, au Canada ou en Espagne, réside précisément dans cette application et dans la connaissance qu'en ont les magistrats. En France, par exemple, nous avons redéfini la notion de viol de manière extrêmement précise, mais au cours de différents procès, nous constatons une méconnaissance réelle et profonde de cette loi.

Il ne s'agit pas uniquement de la loi en elle-même, mais de son application, ce qui nous amène à réfléchir à la formation des magistrats ainsi qu'à la qualité des enquêtes. À mon sens, ces deux éléments sont d'une importance capitale et méritent d'être mis en lumière.

Mélanie Vogel. - La question que nous nous posons en France est la suivante : à partir du droit actuel, l'introduction de l'absence de consentement comme élément constitutif du viol améliorerait-elle à la fois le taux de condamnation et le nombre de poursuites, et permettrait-elle également de réduire le nombre de viols ? Un certain nombre d'entre nous sont convaincus que cette modification générerait un effet positif, tandis que d'autres émettent des doutes à ce sujet.

Dans ce contexte, pourriez-vous expliciter les cas qui pourraient être condamnés grâce à l'ajout de la notion de consentement dans la loi, qui ne le sont pas avec notre législation actuelle ? J'ai quelques exemples en tête, mais je pense qu'il est important de les clarifier, afin de bien montrer l'intérêt d'une telle modification là où le droit actuel semble insuffisant.

Françoise Kempf. - Je peux répondre de manière globale à la majorité des questions soulevées, notamment celles concernant la culture du viol, la sensibilisation, la prévention, et le phénomène connexe de la pornographie et son accès croissant parmi les jeunes. Le Grevio a observé une augmentation notable de l'accès des jeunes à la pornographie, dans la plupart des pays, ainsi qu'une hausse des violences sexuelles commises par des très jeunes sur des très jeunes, en particulier des violences graves ou collectives.

Quant aux réponses apportées par les États, bien qu'il existe certaines bonnes pratiques dans divers pays, il ressort généralement un manque de prévention systématique. Les campagnes de sensibilisation ne sont pas suffisamment régulières, organisées ou dotées de budgets conséquents. La violence dans la sphère numérique, continuum des violences physiques, demeure un angle mort dans la prévention, ce qui constitue un problème dans de nombreux pays européens.

De plus, l'éducation à la sexualité, bien que prévue dans la législation de nombreux pays, est souvent mal mise en oeuvre, ou limitée à des initiatives locales. En France, par exemple, la loi de 2001 n'est pas appliquée de manière systématique. Cette absence d'une éducation complète, couplée à l'accès facile à la pornographie, crée une situation problématique pour les jeunes.

Par ailleurs, le Grevio insiste régulièrement sur la nécessité d'une formation initiale et continue obligatoire des magistrats, pour traiter toutes les formes de violence à l'égard des femmes. Bien que certains magistrats évoquent l'indépendance judiciaire comme un obstacle à la mise en place de formations obligatoires, le Grevio considère qu'il s'agit d'un point essentiel. Si des progrès ont été réalisés dans certains pays européens, il reste beaucoup de travail à accomplir pour surmonter les stéréotypes et préjugés persistants dans le milieu judiciaire.

Enfin, bien que je n'aie pas eu le temps d'aborder la question des enquêtes, la Convention d'Istanbul est très précise sur ce sujet et appelle à des investigations rigoureuses pour traiter les violences sexuelles de manière appropriée. Elle recommande que les violences faites aux femmes, et en particulier les violences sexuelles, soient traitées rapidement et, dans la mesure du possible, en urgence. Certains États ont déjà mis en place de telles mesures. Elle comporte également des exigences strictes en matière de collecte des preuves : il ne suffit pas de se fier uniquement au témoignage de la victime. Il est essentiel de recueillir un faisceau d'indices pour étayer les faits. En outre, la manière dont la victime est reçue et accompagnée tout au long de la procédure judiciaire est un point crucial. Faute de temps, je ne peux pas exposer l'ensemble de ces recommandations ici.

Concernant l'introduction de la notion de consentement dans le droit, il ne s'agit pas simplement de traiter des cas particuliers, mais d'une véritable mutation du paradigme juridique. Il est important de souligner que ce changement s'inscrit dans une volonté de modifier profondément la manière dont les actes sexuels sont perçus dans la société. Le droit doit conduire à un changement de mentalité au sein de la société, en instaurant une approche différente des relations sexuelles. La Convention d'Istanbul plaide précisément pour cette transformation des mentalités.

L'approche la plus conforme à la Convention, dans cette perspective, consiste en un modèle qui vise à transformer le paradigme existant, en faisant des actes sexuels des actes fondés sur le consentement mutuel et non sur la contrainte ou le non-consentement de l'une des parties. C'est cet aspect fondamental qu'il convient de retenir, même si le droit français, à l'instar d'autres législations fondées sur des critères tels que la contrainte ou la menace, a mis en place des garde-fous et une jurisprudence qui prend en compte des situations particulières comme la sidération. Toutefois, l'élément distinctif de l'approche défendue par la Convention d'Istanbul réside dans son caractère global et son ambition de générer un changement profond dans la société.

Je n'ai pas suffisamment travaillé sur le cas de la Belgique pour en donner une analyse détaillée ici. Je pourrai vous fournir des informations spécifiques sur la définition du viol dans ce pays, si vous le souhaitez. Le Grevio y prévoit une visite début 2025, ce qui nous permettra d'avoir des informations plus actualisées prochainement.

Elsa Schalck. - Je tiens à exprimer ma sincère gratitude pour ces différents éclairages qui se sont révélés extrêmement précieux. Nous identifions clairement la question du changement de paradigme. Comme vous l'avez souligné, le droit comparé apporte un éclairage significatif sur le droit national. Je crois que ce point fera l'objet de discussions approfondies lors de la deuxième table ronde. Il me revient de vous remercier chaleureusement pour ces différentes perspectives qui, sans aucun doute, ressurgiront dans nos débats ultérieurs.

Dominique Vérien, présidente. - Merci beaucoup pour cette première séquence internationale.

Nous allons maintenant nous pencher sur les débats en cours sur l'évolution du code pénal français en matière de viol. J'invite pour cela les participants à la seconde table ronde à me rejoindre sur l'estrade, ainsi que mes deux collègues, Hussein Bourgi, membre à la fois de notre délégation et de la commission des lois, très impliqué sur tous les sujets de lutte contre les violences faites aux femmes, chargé de l'animation de cette deuxième table ronde ; et Catherine Di Folco, membre de la commission des lois, qui représente sa présidente Muriel Jourda, qui ne pouvait malheureusement pas être présente parmi nous ce matin. C'est un bon début, puisque Catherine Di Folco est une des co-rapporteures de la mission conjointe de contrôle sur la prévention de la récidive en matière de viol et d'agressions sexuelles.

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