II. UN POINT D'ALERTE MAJEUR : L'INQUIÉTANTE REMISE EN CAUSE, DE PLUS EN PLUS FRÉQUEMMENT, DES PRINCIPES DE LIBERTÉ DE CRÉATION ET DE DIFFUSION ARTISTIQUES

A. LA CONSÉCRATION DANS LA LOI DES PRINCIPES DE LIBERTÉ DE CRÉATION ET DE DIFFUSION ARTISTIQUES 

L'inscription dans le marbre de la loi des principes selon lesquels « la création artistique est libre » et « la diffusion de la création artistique est libre » constitue la mesure phare du volet « création » de la loi LCAP.

Historiquement rattachée à la liberté d'expression, la liberté de création artistique bénéficiait jusqu'alors de la protection de ce droit fondamental, dans un rapport d'accessoire à principal. Sa formulation expresse à l'article 1 de la loi LCAP marque un changement majeur : la liberté de création artistique existe désormais par elle-même, elle n'est plus seulement une application particulière de la liberté d'expression. Cette émancipation conceptuelle permet juridiquement de penser la liberté de création comme un droit à la fois autonome et opposable.

Pour être effective, la liberté de création dépend toutefois d'un certain nombre de conditions, parmi lesquelles les moyens dont dispose l'artiste pour créer. Une autre condition, moins évidente à première vue, car postérieure à l'acte de création, tient aux possibilités de diffusion de l'oeuvre. Les conflits survenus par le passé sur des questions de programmation artistique ont montré, lors des travaux sur la loi LCAP, la nécessité d'aller au-delà de la seule affirmation de la liberté de création et de répondre à l'adage cher aux professionnels de la création, selon lequel « pas de liberté de création sans liberté de diffusion ». L'article 2 de la loi LCAP reconnaît ainsi la liberté de diffusion comme pendant indispensable de la liberté de création.

À l'instar de toutes libertés, les libertés de création et de diffusion sont susceptibles d'atteintes ; elles doivent donc être protégées afin de ne pas être réduites à de simples libertés symboliques. L'article 2 de la loi LCAP introduit ainsi, à l'article 431-1 du code pénal, un délit spécifique en cas d'entrave à l'exercice des libertés de création et de diffusion, puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. En créant ce délit, le législateur fait entrer les libertés de création et de diffusion dans le champ des libertés fondamentales, puisque leur respect est désormais garanti par la loi. C'est donc logiquement que les libertés de création et de diffusion ont été érigées au rang des libertés fondamentales par le Conseil d'État en 20214(*).


* 4 Conseil d'État, juge des référés, n° 451085, Comité professionnel des galeries d'art, 14 avril 2021.

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