B. DES CONSERVATOIRES DONT LA SITUATION A PEU PROGRESSÉ DEPUIS LA LOI LCAP

1. Les espoirs suscités par la loi LCAP

À la fin des années 2000, l'État s'était considérablement désengagé du financement des conservatoires17(*), l'enveloppe dédiée étant passée de 35 millions d'euros en 2006 à 27 millions d'euros en 2012. Les crédits ont ensuite été entièrement supprimés, excepté pour les conservatoires à rayonnement régional adossés à des pôles d'enseignement supérieur.

Ce retrait progressif de l'État s'est expliqué par la volonté de celui-ci de transférer la compétence « enseignement artistique spécialisé » et les crédits correspondants vers les collectivités territoriales. Ce choix a été particulièrement critiqué, les collectivités déplorant l'insuffisance des moyens pour assumer cette compétence.

C'est dans ce contexte de crise que la loi LCAP marque un réengagement de l'État en faveur des conservatoires, son article 51 affirmant son rôle, aux côtés des collectivités territoriales, dans « le financement de l'enseignement artistique spécialisé au travers des établissements d'enseignement public de la musique, de la danse et de l'art dramatique ».

La loi LCAP précise également, s'agissant du troisième cycle des conservatoires destiné à préparer les élèves à l'enseignement artistique supérieur, qu'il est financé par les régions, auxquelles l'État accorde un montant équivalent aux sommes qu'il a dépensées à ce titre, dans ces mêmes régions, sur les années 2010, 2011, 2012.

Ces dispositions ont, à l'époque, été saluées tant par les professionnels que par les élus locaux, suscitant l'espoir de nouvelles perspectives pour les conservatoires.

À partir de 2016, le ministère de la culture s'est effectivement réinvesti à travers un « plan conservatoires », qui s'est traduit par un abondement de 21 millions d'euros par an. Toutefois, l'aide financière de l'État aux établissements est dorénavant conditionnée à quatre critères : la mise en oeuvre d'une politique tarifaire sociale, le renouvellement des pratiques pédagogiques, la diversification de l'offre artistique et le développement des partenariats. Parallèlement à ce volet financier, le ministère a engagé un travail de réforme des critères de classement des conservatoires et de définition des conditions de délivrance d'un diplôme national. Les propositions élaborées par la DGCA, rendues publiques en juillet 2019, ont cependant été rejetées par les représentants du secteur, ces derniers dénonçant à la fois l'absence de concertation et le caractère inabouti et insatisfaisant des propositions ministérielles.

Les conservatoires ont ensuite été frappés de plein fouet par la crise sanitaire, qui s'est traduite par un fort taux d'absentéisme et une diminution parfois très importante de leurs effectifs.

2. Des conservatoires toujours aux prises avec de nombreuses difficultés

Malgré les gages apportés par la loi LCAP, les rapporteures constatent que la situation des conservatoires a, huit ans après, peu progressé :

- les collectivités, au premier rang desquelles les communes et leurs groupements, en sont toujours les principaux financeurs. Or les marges de manoeuvre de ces dernières étant de plus en plus contraintes, cela a des répercussions sur les conservatoires qui, eux aussi, manquent de financements pour assumer pleinement leurs missions ;

- très peu de régions se sont investies en faveur du troisième cycle des conservatoires et, plus largement, dans la structuration territoriale des enseignements artistiques ;

- le diplôme national n'est toujours pas entré en vigueur, la publication des textes réglementaires ayant pris beaucoup de retard. Auditionnée par les rapporteures, l'association Conservatoires de France dit craindre « une usine à gaz, qui ferait mieux de ne pas voir le jour » ;

- la filière est structurellement fragilisée par de graves problèmes de recrutement : alors que de nombreux départs à la retraite sont programmés, le métier de professeur en conservatoire n'attire plus les candidats. Sont notamment pointés un niveau de rémunération trop faible et un défaut de formation professionnelle continue.

Au regard de cet état des lieux décevant, les rapporteures appellent le ministère de la culture à réinvestir en urgence le sujet « conservatoires ».

Recommandation n° 22 : Mettre fin à la dualité d'interlocuteurs (la DGCA et la DG2TDC18(*)) au sein du ministère de la culture, facteur bloquant de l'avancée du dossier « conservatoires ».


* 17 Le décret du 12 octobre 2006 établit trois typologies d'établissements : les conservatoires à rayonnement régional (CRR), départemental (CRD), communal ou intercommunal (CRC/CRI).

* 18 Respectivement la direction générale de la création artistique et la direction générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle.

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