D. UNE « MOBILISATION GÉNÉRALE » POUR INCITER ET ORIENTER L'INVESTISSEMENT DES ENTREPRISES

Comme l'ont rappelé très justement plusieurs travaux récents, les entreprises françaises et leurs dirigeants ne pourront assumer seuls le coût colossal des grandes transitions menées à l'échelle de nos sociétés et nos économies entières.

Il est donc nécessaire de sonner la « mobilisation générale » afin que les divers acteurs du financement, mais aussi les acteurs publics, soutiennent et amplifient les efforts menés par les entreprises.

La puissance publique aura un rôle majeur à jouer lorsque les marchés ou le secteur bancaire ne pourront seuls assumer le risque ou le volume de financement nécessaire ; ou afin de combler les failles de marché. C'est déjà aujourd'hui la logique que traduisent les plans d'investissements tels que le PIA ou France 2030, ou encore l'action de Bpifrance et des collectivités territoriales en faveur de l'innovation.

Car le soutien au financement des entreprises se joue aussi à l'échelon territorial, par une politique visant le développement des écosystèmes locaux et la création d'entreprise. Les intercommunalités et les Régions, notamment, ont déployé au cours des dernières années d'importants programmes pour soutenir le tissu entreprenarial de leurs territoires, dont l'impact est aujourd'hui reconnu par tous.

Alors que la situation des finances publiques de la France se dégrade d'année en année, faisant désormais l'objet d'alertes répétées de la Cour des comptes14(*) comme de l'Union européenne15(*), l'appui de acteurs publics au financement du développement et de la transition des entreprises doit se concentrer sur les actions les plus structurantes et les plus efficaces au regard des objectifs d'intérêt général, selon un principe de responsabilité budgétaire défendue de longue date par le Sénat. Comme le souligne le rapport publié par Rexecode, les marges de manoeuvre budgétaires de l'État étant faibles, les actions à fort pouvoir incitatif ou « dé-risquant » doivent être privilégiées pour soutenir le financement des entreprises.16(*)

La préparation et le vote des prochaines lois de finances annuelles sont donc porteurs d'enjeux majeurs, car les choix qui y seront opérés détermineront les conditions et l'ampleur du financement de l'investissement dans les grandes transitions.

Les rapporteurs rappellent que soutenir aujourd'hui le financement et le développement des entreprises, c'est aussi assurer la croissance et les recettes budgétaires de demain. Il est donc tout à fait concevable de concilier le rétablissement des finances publiques et une politique volontariste de soutien au développement des entreprises ; c'est même une nécessité, car le niveau des prélèvements obligatoires en France reste nettement supérieur à celui des pays voisins, pesant sur la compétitivité de nos entreprises et leurs perspectives de croissance future. Au cours des années passées, la France a nettement décru ses parts de marché à l'exportation et dégradé son solde extérieur dans la quasi-totalité des secteurs industriels, atteignant un déficit commercial record. L'accès au financement, par le biais des acteurs bancaires comme non-bancaires, et soutenu le cas échéant par les acteurs publics, est un facteur clef pour la performance de notre économie.


* 14 Le rapport de la Cour des Comptes « La situation et les perspectives des finances publiques », juillet 2024, estime que les « finances françaises sont dans une situation inquiétante », risquant d'« [obérer] la capacité d'investissement du pays et l'[exposant] dangereusement en cas de nouveau choc macroéconomique ». 

* 15 Le Conseil de l'Union européenne a validé, le 26 juillet 2024, la proposition de la Commission européenne d'ouvrir une procédure de déficit excessif à l'encontre de la France.

* 16 Rexecode, document de travail n° 83, « Les enjeux économiques de la décarbonation de la France - Une évaluation des investissements nécessaires », mai 2022.

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