B. UNE POLITIQUE NATIONALE CIBLÉE SUR LES GRANDES ENTREPRISES ET L'INNOVATION DE RUPTURE

1. Avec un mix électrique avantageux, la France a souscrit à une politique ambitieuse de transition climatique

La France a signé des engagements ambitieux de lutte contre le changement climatique qui impliquent un renforcement des politiques de transition vers la neutralité carbone, quand bien même elle dispose d'un avantage comparatif avec un mix électrique avantageux.

(1) La France dispose d'un mix électrique avantageux

Dans son Bilan électrique 2023, RTE souligne que les émissions de GES du système électrique français ont atteint leur niveau le plus faible depuis le début des années 1950 107(*) et sont également parmi les plus faibles d'Europe.

Le mix électrique français est très largement décarboné, à hauteur de 92 % selon RTE. Les émissions de GES du système électrique français pèsent moins de 5 % dans le bilan carbone national (contre 21 % en moyenne dans le bilan carbone des pays de l'Union européenne) alors que le système électrique représente plus d'un quart de la consommation finale d'énergie.

Cette décarbonation singularise la France en Europe. Notre pays émet ainsi près de 3 fois moins de CO2 pour produire 1 kWh qu'au Royaume-Uni, 4 fois moins qu'en Italie et 5 fois moins qu'en Allemagne qui présente un des mix électriques les plus carbonés d'Europe.

Comme l'a rappelé le 2 juillet dernier la commission d'enquête du Sénat sur la production, la consommation et le prix de l'électricité aux horizons 2035 et 2050, pour les entreprises, l'énergie constitue un facteur important pour leur compétitivité : « les dépenses directes en énergie peuvent dépasser parfois plus de 15 % du chiffre d'affaires des secteurs intensifs en énergie. En ajoutant les expositions indirectes, la dépense totale peut dépasser 30 % du chiffre d'affaires », et l'électricité renforce l'indépendance énergétique de la France, comme l'avait souligné, en mars 2023, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France.

L'énergie nucléaire est la seule qui, aujourd'hui, permet de décarboner rapidement et massivement.

Par ailleurs, la décarbonation des entreprises françaises doit également être soutenable : une décarbonation nationale trop rapide, tout en ne modifiant que marginalement la situation climatique internationale, risque d'altérer la compétitivité de nos entreprises. Il doit être également pris en considération que la décarbonation seule n'épuise pas la nécessaire adaptation aux conséquences du dérèglement climatique : une entreprise peut très bien être totalement décarbonée, mais totalement inadaptée au dérèglement climatique, risquant ainsi de disparaître tout en étant neutre en carbone !

(2) La France est signataire de l'Accord de Paris

La France est signataire de l'Accord de Paris, adopté par 195 nations le 12 décembre 2015, qui vise à maintenir l'augmentation de la température mondiale nettement sous 2°C et à mobiliser des efforts encore plus poussés pour limiter cette augmentation à 1,5°C par rapport à l'ère préindustrielle (1850-1900). Au sein de l'Union européenne, il se décline en un objectif de réduction des émissions nettes de GES de 55 % en 2030 par rapport à 1990 et un objectif de neutralité carbone en 2050, selon la loi européenne sur le climat. À la suite du rehaussement de l'objectif européen, l'objectif français de réduction brute des émissions de GES a été relevé à -50 % en 2030 par rapport à 1990.

Grâce au nucléaire combiné au renouvelable, la France est le pays le moins émetteur en équivalent CO2 par habitant des sept puissances les plus développées et dispose déjà d'une électricité bas carbone à plus de 90 %.

Toutefois, si les émissions de GES ont diminué de 2,1 % par an en moyenne entre 2019 et 2022, ce rythme de réduction devra doubler entre 2022 et 2030. Il est, à horizon 2050, très dépendant de l'état des puits de carbone.

Les puits de carbone

Les puits naturels sont les écosystèmes qui, comme les forêts, les marais côtiers, le bocage, le phytoplancton, captent naturellement le CO2 par photosynthèse et le stockent dans le bois, les sols, les sédiments... Du CO2 se dissout aussi dans les océans. Les écosystèmes sont vulnérables au changement climatique. Ne pas les préserver amplifierait le problème, car le carbone qu'ils stockent serait libéré dans l'atmosphère. Il faut donc aussi agir pour leur adaptation. Sauf à pousser très loin le levier de la sobriété, les puits naturels ne suffiront pas.

4 à 5 milliards de tonnes de carbone seraient stockées dans les sols et forêts de France métropolitaine (et pourraient être restituées dans l'atmosphère en cas de destruction) et 20 % des émissions françaises sont captées chaque année par ces puits de carbone naturels.

Les puits technologiques comme le captage-stockage du CO2 (CSC, CCS en anglais) peut donc être un complément utile. Cela consiste à fixer le CO2 puis à l'injecter dans des réservoirs géologiques étanches, à plus de 1 000 m de profondeur. Dans l'industrie, c'est une technique de réduction d'émissions fossiles. Si on l'applique à une centrale biomasse ou à une usine de bioéthanol, on parle de bioénergie avec CSC (BECSC, ou BECCS). Le Direct Air Carbone Capture and Storage (DACCS), lui, vise à capter le CO2 dans l'air ambiant. Il n'est pas mature, et très énergivore.

Si le CSC existe depuis plus de trente ans, il n'a été déployé que sur quelques sites, dont des sites d'extraction de gaz ou de pétrole : il permet de récupérer plus d'énergies fossiles, donc de repousser la transition énergétique. Si, en théorie, les capacités de stockage seraient suffisantes en France, la question de l'acceptabilité par les riverains et l'absence de risque de fuite ou de séisme lié à l'injection de CO2 dans le sous-sol se posent. Faute d'arriver à les convaincre, le CO2 capté devra être exporté offshore notamment en mer du Nord, ce qui alourdit le coût de ces systèmes.

Source : ADEME

Par ailleurs, les réductions d'émissions entre 1990 et 2022 se sont principalement concentrées dans l'industrie et la production d'énergie, alors que l'atteinte de la neutralité carbone en 2050 implique une forte baisse d'émissions dans tous les secteurs de l'économie.

(3) La planification écologique a été engagée dès 2011

La Stratégie nationale d'adaptation au changement climatique exprime le point de vue de l'État sur la manière d'aborder la question de l'adaptation au changement climatique. Cette stratégie a été élaborée dans le cadre d'une large concertation, menée par l'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), impliquant les différents secteurs d'activités et la société civile sous la responsabilité du délégué interministériel au développement durable. Deux plans se sont succédés, le troisième étant toujours en attente :

1er Plan national d'adaptation au changement climatique (2011-2015).

Avec pour objectif de présenter des mesures concrètes et opérationnelles pour préparer la France à faire face et à tirer parti de nouvelles conditions climatiques, la France s'est dotée en 2011 de son premier Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC) pour une période de 5 ans. Premier plan de cette ampleur publié dans l'Union européenne, les mesures préconisées concernaient tous les secteurs d'activité autour de 4 objectifs :

• protéger les personnes et les biens ;

• éviter les inégalités devant les risques ;

• limiter les coûts et tirer parti des avantages ;

• préserver le patrimoine naturel.

Le premier PNACC 2011-2015 était intersectoriel et interministériel. Il portait sur 20 domaines : actions transversales, santé, eau, biodiversité, risques naturels, agriculture, forêt, pêche et aquaculture, tourisme, énergie et industrie, infrastructures et services de transport, urbanisme et cadre bâti, information, éducation et formation, recherche, financement et assurance, littoral, montagne, action européenne et internationale et gouvernance. La variété des thèmes traités dans le PNACC illustrait parfaitement la logique poursuivie : incorporer l'adaptation au sein de l'ensemble des politiques publiques, avec 84 actions déclinées en 242 mesures dans 20 domaines

La conférence environnementale 2014 avait conclu à la nécessité de renforcer la stratégie d'adaptation nationale après avoir procédé à une évaluation externe du PNACC.

2e Plan national d'adaptation au changement climatique (2018-2023)

Après la réussite de la COP21, la France a actualisé sa politique d'adaptation en cohérence avec l'Accord de Paris. Avec le deuxième Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC-2), la France visait une adaptation effective dès le milieu du XXIe siècle à un climat régional en métropole et dans les outre-mer cohérent avec une hausse de température de +1,5 à 2 °C au niveau mondial par rapport au XIXe siècle, autour de 58 actions sur 5 ans avec de nouvelles priorités.

Des évolutions importantes étaient proposées à travers ce deuxième Plan. Elles concernaient notamment un meilleur traitement du lien entre les différentes échelles territoriales, le renforcement de l'articulation avec l'international et le transfrontalier et la promotion des solutions fondées sur la nature.

Il ne comprenait toutefois aucun élément de chiffrage financier, ni même d'indication méthodologique sur lesquelles s'appuyer pour construire une estimation financière des besoins liés au déploiement des politiques d'adaptation.

Une évaluation à mi-parcours a été effectuée en 2021.

Le PNACC-3, qui a vocation à s'intégrer à la nouvelle Stratégie française sur l'énergie et le climat (SFEC), longtemps attendu, a été présenté le 24 octobre 2024, postérieurement à l'adoption du présent rapport par la délégation aux Entreprises.

Cette planification devait également comprendre :

• la première Loi de programmation sur l'énergie et le climat (LPEC) ;

• la troisième Stratégie nationale bas-carbone (SNBC3) ;

• la troisième Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE3 2024-2033).

Source : Les enjeux économiques de la transition vers la neutralité carbone,

Direction générale du Trésor, novembre 2023

(4) Une planification qui tente de concilier croissance et climat

Comme l'a rappelé Jean Pisani Ferry dans son rapport de 2023108(*) : « la prise de conscience des enjeux économiques immédiats de la transition climatique est récente ».

Trois événements ont précipité un changement de perspective :

- l'accord de Paris de 2015 qui a fixé un cadre et une ambition ;

- l'accord européen de 2019 pour viser une économie neutre en carbone en 2050, et pour réduire dès 2030 les émissions de GES de 55 %, par rapport à l'année de référence 1990. « Cette accélération soudaine a fait entrer la question climatique dans l'horizon des macroéconomistes » ;

- la promulgation, à l'été 2022, de l'Inflation Reduction Act américain. L'adoption par les États-Unis d'une stratégie climatique différente de celle de l'Union européenne a brutalement mis sur le devant de la scène les enjeux de compétitivité et d'attractivité.

La question politique majeure, à l'horizon 2050, est de savoir s'il est possible de concilier neutralité climatique et amélioration du bien-être.

Pour ce rapport, « il ne suffit pas, pour y répondre, de démontrer que le coût économique de l'inaction climatique excède largement celui de l'action. Il faut aussi convaincre les sociétés de ce qu'elles n'ont pas à choisir entre l'avenir de la planète et leur propre bien-être ni même, à long terme, entre préservation du climat et niveau de vie ». S'enfermer dans le débat binaire et réducteur entre croissance et décroissance est en effet une impasse.

L'exemple même de la France montre qu'il est possible de découpler croissance et émissions de GES :

Rester dans la fausse alternative croissance - décroissance est également socialement désastreux, « car cela revient à demander à celles et ceux qui ont du mal à boucler leurs fins de mois de se serrer davantage la ceinture au nom de finalités supérieures », économiquement irréalistes « si, en effet, l'objectif est bien de ramener les émissions nettes à zéro, y parvenir par la seule décroissance supposerait d'annuler la majeure partie des gains de revenu réel des derniers siècles » et politiquement insupportable. Les choix politiques de la transition climatique doivent au contraire déterminer les conditions de la conciliation entre l'impératif de la préservation du climat et la recherche d'une nouvelle croissance qui « prenne en compte la finitude de la planète et donc les externalités environnementales des choix individuels et collectifs ».

Pour la direction générale du Trésor, « la transition bas-carbone est économiquement possible, et est compatible avec une croissance plus soutenable ». Elle implique le découplage entre l'évolution des émissions de GES et celle de l'activité économique.

Pour Antoine Pellion, secrétaire général à la planification économique, entendu lors de la table-ronde du 16 mai 2023 : « la réindustrialisation peut aider à réduire l'empreinte carbone. Nous visons une réduction de 200 millions de tonnes de CO2 par an d'ici 2030 par rapport à 2019. Environ 20 millions de tonnes de CO2 supplémentaires ont été émises en France. Si nous n'avions pas réindustrialisé ou si la population n'avait pas augmenté, il aurait donc suffi de réduire de 180 millions de tonnes, mais en raison de la réindustrialisation, nous visons précisément une réduction de 200 millions ».

Plusieurs scénarii ont modélisé la planification macro-économique de la transition climatique :

(5) Une planification préparée et concertée avec plusieurs instances

Aux côtés du Commissaire général au développement durable (CGDD), acteur interministériel depuis 2008 et direction transversale du ministère en charge de l'environnement, a été créé le 7 juillet 2022 un Secrétariat général à la planification écologique, placé auprès du Premier ministre afin d'affirmer son caractère interministériel109(*).

Le conseil de planification écologique, présidé par le Président de la République, a été le cadre des arbitrages rendus par le chef de l'État le 25 septembre 2023 alors qu'il existe un conseil national de transition écologique110(*) censé « rendre des avis structurants pour la politique de la transition écologique ».

Ces arbitrages avaient été précédés de la présentation, par la Première ministre, de la planification écologique aux membres du Conseil national de la Refondation (CNR) le 19 septembre 2023 dont la formation « Climat et biodiversité » décline la méthode du CNR en l'appliquant aux problématiques de transition écologique. Il doit « échanger sur l'ensemble des sujets relevant de la compétence des ministères de la transition écologique et de la cohésion des territoires et de la transition énergétique, à savoir l'écologie et la biodiversité, le logement et le transport » dans un « dialogue sincère » et le « souci de travailler collectivement et en responsabilité à l'atteinte de nos objectifs » car il « constitue un espace de dialogue devant permettre à ces acteurs de partager leurs visions des enjeux, des objectifs, des contraintes et surtout des leviers d'action qui sont à notre disposition pour réussir collectivement l'accélération dont nous avons besoin ». Il doit « déboucher sur un agenda d'actions partagé qui apportera des solutions concrètes pour relever ce défi ». Il a donc « une dimension opérationnelle et d'action : pour paraphraser le titre du dernier rapport du Haut Conseil pour le Climat, il nous faut désormais « Dépasser les constats, mettre en oeuvre les solutions ».

Il existe enfin depuis 2019111(*) un Haut conseil pour le climat, organisme indépendant chargé d'évaluer l'action publique en matière de climat, et sa cohérence avec les engagements européens et internationaux de la France, en particulier l'Accord de Paris, l'atteinte de la neutralité carbone en 2050, et le respect des budgets carbone de la France112(*).

(6) Une planification qui ignore le Parlement

Depuis la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015, des plafonds nationaux d'émissions de GES dénommés « budgets carbone » sont fixés par décret, pour chaque période consécutive de cinq ans (article L. 222-1 A du code de l'environnement).

Pour la période 2015-2028, trois « budgets carbone » ont ainsi été adoptés en 2015 : des plafonds de 442 millions de tonnes CO2e par an sur la période 2015-2018, 399 pour 2019-2023 et 358 pour 2024-2028. En 2020, les « budgets carbone » des périodes 2019-2023, 2024-2028 et 2029-2033 ont été fixés respectivement à 422, 359 et 300 millions de tonnes de CO2e par an.

La Stratégie nationale bas carbone (SNBC) répartit ces « budgets carbone » par grand secteur d'activité ainsi que par catégorie de GES. Elle définit par ailleurs les orientations et les dispositions d'ordre sectoriel ou transversal qui sont établies pour les respecter.

Elle constitue ainsi la feuille de route de la France pour conduire la politique d'atténuation des émissions des GES. Elle doit permettre d'atteindre les objectifs devant être fixés par le législateur, dans la loi déterminant les objectifs et fixant les priorités d'action de la politique énergétique nationale prévue à l'article L. 100-1 A du code de l'énergie. Cette loi devra notamment fixer les objectifs de réduction des émissions de GES pour trois périodes successives de cinq ans. Elle s'imposera donc au pouvoir réglementaire dans la fixation des « budgets carbone » prévus à l'article L. 222-1 A du code de l'environnement.

Cette stratégie élaborée par l'ensemble des services des ministères concernés sous le pilotage du ministère de la Transition écologique et solidaire, est le fruit d'une large concertation avec les représentants de la société civile et notamment :

- avec les parties prenantes (entreprises, ONG, syndicats, représentants de consommateurs, parlementaires, collectivités territoriales), via des échanges itératifs avec un Comité d'Information et d'Orientation (CIO) et sept groupes de travail thématiques.

- avec le public, via la conduite en novembre et décembre 2017 d'une concertation préalable à la révision de la stratégie nationale bas-carbone et d'un débat public préalable à la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie de métropole continentale conduit de mars à juin 2018, au sein duquel des sujets liés au climat ont également été débattus.

Cette stratégie prend en compte l'avis d'un Comité d'experts pour la transition énergétique sur la mise en oeuvre de la SNBC et celui du Haut conseil pour le climat.

D'autres instances ont été consultées113(*), en fin de processus de révision, en décembre 2018, mais pas le Parlement.

La décarbonation dans France Relance et France 2030

L'objectif de décarbonation a pris une place de plus en plus élevée dans l'attribution des fonds publics. À peine présente dans le premier Programme d'investissements d'avenir en 2010, cette place est devenue significative dans le plan France 2030.

b) Des montants substantiels

Déployé depuis septembre 2020 pour aider l'économie française à rebondir après l'épidémie de la COVID, le plan France Relance, doté de 100 milliards d'euros s'articulait autour de 3 priorités dont l'écologie114(*), 30 milliards d'euros étant prévus pour « accompagner la transition vers une économie plus verte et durable ».

Lui a succédé le plan « France 2030 », doté de 54 milliards d'euros déployés sur 5 ans, visant à développer la compétitivité industrielle et les technologies d'avenir, dont la moitié des financements sont destinés à des acteurs émergents, et la moitié aux actions de décarbonation.

France 2030 soutient à la fois le développement de solution de décarbonation et leur déploiement dans le tissu industriel.

Au 30 avril 2023, sur les 54 milliards prévus, 13,8 milliards d'euros ont été engagés et, au 31 décembre 2022, 2,7 milliards décaissés au profit de 2 200 projets lauréats émanant en majorité de PME (1 136 lauréats).

Les 10 objectifs de France 2030 (extrait de la présentation)

Mieux produire

1. favoriser l'émergence d'une offre française de petits réacteurs modulaires (SMR) d'ici 2035, et soutenir l'innovation de rupture dans la filière ;

2. devenir le leader de l'hydrogène vert et des énergies renouvelables en 2030 ;

3. décarboner notre industrie afin de respecter l'engagement de baisser, entre 2015 et 2030, 35 % de nos émissions de GES dans ce secteur ;

4. produire en France, à l'horizon 2030, près de 2 millions de véhicules électriques et hybrides ;

5. produire en France, d'ici 2030, le premier avion bas-carbone.

Mieux vivre

6. investir dans une alimentation saine, durable et traçable, afin d'accélérer la révolution agricole et alimentaire sur laquelle la France est un pays leader ;

7. produire en France au minimum 20 biomédicaments, en particulier contre les cancers, les maladies chroniques, dont celles liées à l'âge et créer les dispositifs médicaux de demain ;

8. placer la France en tête de la production des contenus culturels et créatifs, et des technologies immersives.

Mieux comprendre le monde

9. prendre toute notre part dans l'aventure spatiale ;

10. investir dans le champ des grands fonds marins.

Les six leviers pour réussir France 2030

1. sécuriser l'accès aux matières premières ;

2. sécuriser l'accès aux composants stratégiques, notamment électronique, robotique et machines intelligentes ;

3. soutenir l'émergence de talents en construisant les formations de demain

4. maîtriser les technologies numériques souveraines et sûres ;

5. s'appuyer sur l'excellence de nos écosystèmes d'enseignement supérieur, de recherche et d'innovation ;

6. accélérer l'émergence de l'industrialisation de start-ups décisives pour le déploiement de l'innovation.

Les trois premiers objectifs (petits réacteurs nucléaires, hydrogène vert et décarbonation de l'industrie) ont été dotés de 8 milliards d'euros.

Les six priorités des actions dont l'objectif principal est la décarbonation

La décarbonation profonde de l'industrie visée par France 2030 va au-delà de l'efficacité énergétique. Il s'agit de transformer en profondeur les procédés de production, en se fondant sur quatre piliers technologiques : l'électrification des procédés115(*), la biomasse116(*), l'hydrogène117(*) et la capture de carbone118(*). Pour décarboner les sites industriels et soutenir le développement et le déploiement des technologies, l'État investit 5,5 Md€. Il s'agit de financer le déploiement de solutions éprouvées comme l'efficacité énergétique et la chaleur bas carbone, et de mettre en place des technologies de rupture. Cet axe stratégique de décarbonation de l'industrie est complémentaire de la stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène décarboné (2,8 Md€ de France 2030 et 9 Md€ de soutien public au total).

L'électrification des mobilités représente une seconde priorité. Elle s'inscrit en particulier dans la stratégie nationale sur les batteries qui a pris la suite en 2021 du plan batteries. Cette stratégie devrait permettre l'implantation en France de 4 grandes usines de batteries (ACC, Envision, Verkor et Prologium), dont la capacité de production est alignée avec l'objectif de 2 millions de véhicules électriques produits en France. Le plan consacre 3,5 Md€ à l'objectif « véhicules électriques et mobilités » en mobilisant de nombreux leviers, qui visent le développement de nouveaux services de mobilité sobres et performants principalement pour le secteur routier, mais aussi ferroviaire et maritime. Cet axe stratégique inclut également l'objectif d'avion bas carboné, doté de 1,2 Md€. Cet axe se fonde sur deux grands types de mesures : de nouvelles technologies permettant de gagner jusqu'à 30 % d'efficacité énergétique et la transition vers de nouveaux combustibles bas carbone.

La décarbonation de l'agriculture et l'émergence d'une alimentation sobre en carbone mobilisent de l'ordre de 2,7 Md€. Il s'agit d'accompagner les consommateurs vers des comportements alimentaires favorables à leur santé et à la réduction des émissions. À cet effet, les investissements ont pour objectif d'assurer la transition du secteur agroalimentaire vers des modèles de production plus intégrés et résilients. Ils visent aussi à accélérer la transition vers des systèmes agro-écologiques en adoptant des pratiques qui réduisent la consommation d'eau et d'intrants, les émissions de GES et favorisent le stockage de carbone.

La sécurisation des matières et intrants stratégiques et le développement de filières de recyclage bénéficie d'un fléchage indicatif de 2,8 Md€. Des actions diverses sont portées, comme la sécurisation de l'accès aux métaux critiques (lithium, cobalt, nickel) nécessaires à la transition bas carbone, le développement de la filière plastique recyclé et le renforcement des filières bois. Des actions en matière de la ville durable et des bâtiments innovants devraient aussi avoir un impact favorable sur la décarbonation.

La création de nouvelles capacités de production d'électricité renouvelable constitue un axe important pour soutenir l'électrification et répondre aux besoins en électricité décarbonée. France 2030 y contribue avec des moyens envisagés à hauteur de 1,1 Md€ pour favoriser l'émergence d'une offre française de petits réacteurs modulaires et de 0,7 Md€ pour le développement de nouvelles technologies de l'énergie renouvelable. Dans ce dernier domaine, trois secteurs prioritaires sont ciblés : le photovoltaïque, l'éolien flottant et les réseaux énergétiques.

Enfin, France 2030 soutient la R&D dans les « technologies vertes », pour permettre aux entreprises d'améliorer leur compétitivité grâce à des solutions produites en France. Selon l'Agence internationale de l'énergie, la moitié des technologies vertes qui permettront d'assurer la neutralité carbone d'ici 2050 ne sont pas encore connues. L'enjeu est donc de permettre à la France de faire la course en tête dans ces « technologies vertes ». France 2030 mise particulièrement sur les acteurs du numérique et les « greentech »119(*) pour aider les entreprises à accélérer leur transition écologique. Des projets sont par exemple soutenus dans le domaine des véhicules autonomes pour aider à réduire les congestions, ou dans les réseaux intelligents pour mieux gérer l'intermittence dans la production d'électricité.

c) Le ciblage des 50 entreprises les plus émettrices de CO2

Si l'émission de GES est très concentrée dans quelques entreprises et pays, en revanche, le dérèglement climatique impacte toutes les entreprises dans le monde, quelle que soit leur taille et leur localisation.

En 2017, le Carbon Disclosure Project120(*) avait estimé que 71 % des émissions globales de GES depuis 1988 étaient dues seulement à 100 entreprises, la moitié de ces émissions est à imputer à 25 d'entre elles. Les deux plus gros émetteurs sont deux entreprises publiques, China Coal Mining et Saudi Arabian Oil Company, responsables respectivement de 14,3 % et 4,5 % des émissions globales de GES depuis 1988. Total, seule entreprise française de la liste, a contribué à 1% des émissions.

(1) Un effort public conséquent

Le 8 novembre 2022, le Président de la République a fixé un objectif de division par deux des émissions industrielles françaises au cours de la prochaine décennie des 50 sites industriels les plus émetteurs.

Ils génèrent en effet 55 % des émissions de CO2 de toutes les émissions industrielles, et 12 % des émissions nationales totales de GES, sachant que 20 % de ces émissions proviennent de l'industrie.

La décarbonation de l'industrie s'inscrit dans les objectifs globaux de baisse de 55 % des GES d'ici 2030, et de neutralité carbone à l'horizon 2050.

Afin de financer cet objectif, 5 milliards d'euros d'aides directes au déploiement de solutions de décarbonation des sites industriels ont été décidées et 610 millions d'euros sont consacrés à l'innovation et au développement des technologies pour une économie bas carbone, autour de quatre technologies de rupture :

- L'hydrogène bas carbone121(*) ;

- La biomasse122(*) ;

- L'électrification des procédés123(*) ;

- La capture, stockage et utilisation de carbone124(*).

32 contrats pour 50 sites, totalisant un engagement de baisse d'émissions de 45 % d'ici 2030, ont été signés par le ministre délégué chargé de l'Industrie et les présidents des entreprises concernées, le 22 novembre 2022.

Le 17 mars 2022, le Gouvernement a annoncé 47 nouveaux lauréats pour les appels à projets visant à décarboner l'industrie :

- 23 pour le dispositif « Efficacité énergétique et décarbonation des procédés »,

- 24 pour le dispositif « Chaleur biomasse », mis en oeuvre avec l'appui de l'ADEME.

Au total 185 projets ont été soutenus par France Relance pour un montant de 2,6 milliards d'euros d'investissements dans la décarbonation de l'industrie française (dont un soutien public supérieur à 1 milliard d'euros), visant une réduction globale des émissions de l'industrie française d'environ 3,6 millions de tonnes de CO2eq par an.

Le 29 avril 2022, un appel à projets « Industrie Zéro Fossile » (IZF) a été lancé pour « déployer rapidement des projets permettant de réduire les émissions de GES en réduisant l'utilisation des énergies fossiles ». Opéré par l'ADEME, cet appel à projets comporte trois volets :

ü Volet 1 : soutien à la production de chaleur à partir de biomasse,

ü Volet 2 : soutien à des grands projets d'efficacité énergétique et d'évolution des procédés à grande échelle,

ü Volet 3 : soutien des petits projets de décarbonation portés par les PME et les ETI.

Au total, 39 projets ont été validés pour le premier volet et 16 projets pour le deuxième volet, pour un total de 225 millions d'euros. La sélection des projets pour le troisième volet est en cours de finalisation, avec une enveloppe budgétaire de 25 millions d'euros.

Afin de poursuivre les efforts de décarbonation dans l'industrie, un nouvel appel à projets (AAP), opéré par l'ADEME, doté de 125 millions d'euros, doit introduire « de nouvelles modalités de sélection avec des critères hors-prix pour favoriser des technologies d'intérêt stratégique compatible avec une vision d'industrie zéro émission à long terme ». Centré sur des projets de grande taille pouvant nécessiter jusqu'à 30 millions d'euros de subventions et représentant un investissement minimal de 3 millions d'euros, le dispositif vise à mettre en valeur des projets permettant de réduire les émissions d'au moins 1 000 tonnes de CO2 par an.

Un autre AAP de 125 millions d'euros a été également lancé en avril 2023 pour les projets d'utilisation de la biomasse dans l'industrie.

Des feuilles de routes125(*) sont établies conjointement par les représentants des filières économiques (50 entreprises et plus de 60 fédérations professionnelles) au sein du conseil national de l'industrie. Le Gouvernement est censé rendre compte de l'avancée de ces travaux au Parlement, après avis du Haut conseil pour le climat, au moins tous les 3 ans.

Cependant, sur les 19 comités stratégiques de filières, seulement 6 feuilles de route ont été publiées, en juin 2024, sur le site du ministère de la Transition écologique. Elles concernent les secteurs de l'aménagement, du bâtiment, de l'automobile, des véhicules lourds, du maritime, de l'aérien et du numérique.

Or, ces feuilles de route sont essentielles pour décliner la stratégie nationale bas carbone et répartir les objectifs de baisse des émissions entre les secteurs, faire évoluer la règlementation, les financements et la fiscalité, arbitrer de façon intersectorielle pour répartir les ressources rares, acter l'évolution des usages et définir la place de la sobriété.

Elles offrent concrètement un cadre permettant aux acteurs économiques d'appréhender comment la transition bas-carbone va affecter leur activité, d'identifier des leviers d'actions pour réaliser cette transition et de s'engager à mener des actions concrètes en faveur de celle-ci. Elles peuvent leur donner également une certaine visibilité sur la programmation de leurs investissements.

Le retard de publication de la SNBC 3 a obligé les filières économiques à raisonner sur la trajectoire SNBC 2, ajustée pour tenir compte du réhaussement des objectifs européens.

Par ailleurs, les Plans de Transitions Sectoriels (PTS), pilotés par l'ADEME dans le cadre du projet Finance ClimAct, permettent d'élaborer des trajectoires de décarbonation, pour les 9 filières industrielles les plus consommatrices d'énergie (sucre, ciment, acier, aluminium, chimie, verre, papier-carton).

Ils quantifient les impacts sur les coûts de production ; évaluent les besoins d'investissements climat ; analysent les mutations en emplois ; proposent des actions publiques et privées permettant la décarbonation du secteur.

(2) L'exemple de l'aciérie ArcelorMittal de Fos-sur-Mer

Vos rapporteurs se sont rendus sur le site de l'entreprise le 31 mai 2023.

La production française d'acier s'élève à 15 millions de tonnes par an et est responsable de 5 % des émissions françaises de GES et du quart des émissions de l'industrie, essentiellement du fait de la production d'acier primaire par six hauts fourneaux, présents en France sur trois sites. Ces derniers représentent en effet 96 % des émissions du secteur pour deux tiers de la production française d'acier. Le reste de la production est issu de fours à arc électriques, répartis sur 16 sites, qui intègrent des ferrailles pour produire de l'acier recyclé.

Du fait de sa résistance mécanique et de son faible coût, l'acier est omniprésent dans le BTP (43 % de la consommation), les biens d'équipements et de consommation (24 %), les matériels de transport (15 %) et les infrastructures énergétiques (2 %).

La production d'acier primaire est émettrice car elle nécessite une réduction du minerai de fer qui se fait à partir de charbon et à très haute température dans les hauts fourneaux. Deux technologies alternatives se développent pour produire de l'acier sans charbon : la réduction directe et l'électrolyse directe du fer.

Dans le plan de transition sectoriel de l'industrie de l'acier en France d'avril 2024, l'ADEME présente trois scénarios de décarbonation du secteur de l'acier.

Le scénario Pari hydrogéné décrit une décarbonation de la sidérurgie centrée sur la réduction directe par hydrogène, qui remplace les hauts fourneaux. Il s'inscrit dans un contexte où la France est compétitive à l'international, favorisant l'accès à l'électricité bas-carbone et le maintien d'une production stable.

Le scénario Compétitivité dégradée explore les risques liés à la compétitivité du prix de l'électricité et aux limites du Mécanisme d'Ajustement Carbone aux Frontières (MACF). Il met en avant les défis de maintenir un prix de l'électricité faible et stable à long terme. Dans ce contexte, la sidérurgie française rencontre des difficultés à basculer vers la voie électro-intensive de la réduction directe par hydrogène et développe la réduction directe par gaz naturel couplée à du captage et stockage du CO2 pour remplacer ses hauts fourneaux.

Le scénario Sobriété et diversification explore une troisième voie pour réduire les émissions de la sidérurgie française qui vise à mitiger les risques en diversifiant les moyens de production disponibles, dans un contexte où la demande en acier diminue. La réduction directe par hydrogène est déployée dans une moindre mesure que dans Pari hydrogéné. Par ailleurs, ce scénario conserve une place pour un haut fourneau, partiellement décarboné, et considère un développement modéré de l'électrolyse directe du fer.

L'ensemble de ces scénarios « dépasse l'objectif issu de la SNBC 2 et assigné à l'industrie de réduction des émissions annuelles directes de 81 % entre 2015 et 2050 : elles sont réduites de 95 % dans les scénarios Pari hydrogéné et Compétitivité dégradée et de 91 % dans Sobriété et diversification. Ces réductions permettent également d'éviter un doublement voire un triplement du coût de production entre 2022 et 2050 qui interviendrait si les installations existantes étaient maintenues, du fait de la hausse du prix du CO2 ».

Pari hydrogéné met en lumière les défis de la transition vers la réduction directe par hydrogène, qui fait quintupler la consommation électrique, doubler les coûts de production de l'acier et représente les investissements les plus conséquents.

Dans Sobriété et diversification, les effets combinés de la sobriété, d'une forte incorporation de ferrailles et d'un développement plus modéré de la réduction directe permettent d'atténuer l'ampleur de ces défis.

Enfin, du fait de la délocalisation de la production d'acier, Compétitivité dégradée minimise ces défis au prix, toutefois, d'une perte de souveraineté.

Les défis de la décarbonation de la sidérurgie

En février 2022 ArcelorMittal a annoncé investir 1,7 milliard d'euros sur les sites de Fos-sur-Mer et Dunkerque afin d'atteindre d'ici 2030 une réduction totale de près de 40 % des émissions de CO2 d'ArcelorMittal en France, soit 7,8 millions de tonnes annuelles.

À Fos-sur-Mer, ArcelorMittal installe un four électrique (EAF). Cette nouvelle installation vient compléter le four poche soutenu par France Relance. L'investissement représente 73 millions d'euros dont 15 millions provient de l'ADEME. Il vise à substituer le minerai de fer primaire par de l'acier recyclé et donc de réduire, dès 2025, les émissions de CO2 de 10 %. Le directeur d'ArcelorMittal Méditerranée, Bruno Ribo, a indiqué que : « dans un second temps, nous nous doterons d'un four à arc électrique pour atteindre les 35 % de diminution à l'horizon 2030, un investissement estimé à plusieurs centaines de millions d'euros. Celui-ci remplacera l'un de nos deux hauts-fourneaux, mais le procédé traditionnel sera conservé pour continuer à produire certains types d'aciers ». Ensemble, ces investissements vont faire de Fos-sur-Mer un site de référence pour la production d'acier circulaire, produit à partir d'acier recyclé, à faible empreinte CO2.

À Dunkerque, ArcelorMittal construit une nouvelle unité dite « de réduction directe » (DRI), d'une capacité de 2,5 millions de tonnes, pour transformer le minerai de fer avec de l'hydrogène, sans recourir au charbon. Cette unité DRI sera couplée à une technologie innovante de four électrique, et complétée par un four électrique (EAF) additionnel.

d) Des évaluations en cours

Pour Nicolas Bouzou, essayiste français spécialisé en économie, directeur du cabinet de conseil Asterès, auditionné par la délégation aux Entreprises le 25 janvier 2024, « France 2030 est positif sur le papier - même s'il devrait rapidement être transformé en « France 2050 » - mais souffre des défauts de notre pays : les programmes sont trop dispersés. Des sommes allant de 20 000 à 30 000 euros sont allouées dans des projets artisanaux. Certes, on peut soutenir l'artisanat, mais cela n'est pas l'objet de France 2030 et les sommes sont bien trop réduites. Ce programme doit accorder des montants plus élevés - à hauteur de plusieurs millions d'euros - à des projets très innovants et déjà relativement matures. L'amorçage n'est plus un problème en France. Nous sommes déjà une start-up nation et nous ne devons pas le rester ».

(1) L'évaluation par l'État

S'agissant de France Relance, la première évaluation in intinere réalisée en juin 2023 par le comité de surveillance des investissements d'avenir dresse un bilan nuancé de son impact sur la décarbonation de l'économie. En effet seulement : « 46 % des moyens alloués par France 2030 ont un impact potentiel favorable sur la décarbonation de l'économie : 21 % un impact favorable, direct et pérenne et 25 % un impact favorable, indirect ou controversé ».

Selon l'étude, les actions de France 2030 sont alignées sur les objectifs de la planification écologique126(*) et bénéficient principalement à l'énergie, l'industrie manufacturière et les transports. Ces trois secteurs d'activités regroupent 75 % des projets et 95 % des montants engagés dans le cadre du périmètre de l'étude : 41 % des montants concernent l'énergie, 37 % l'industrie manufacturière et 16 % les transports. France 2030 devrait en particulier avoir un impact direct sur la décarbonation de l'industrie estimé à 6 millions de tonnes CO2e en 2030, notamment pour les sites les plus émetteurs. Par ailleurs, la décarbonation est profonde en ce qu'elle concerne les chaînes de production puisque 85 % du portefeuille de projets (en nombre de projets et montant d'aide) porte sur des projets visant des solutions de décarbonation ayant un impact majoritairement sur les étapes du cycle de vie de fabrication ou d'installation de produits.

La substitution du mix énergétique actuel par des carburants non fossiles constitue, parmi les différents leviers de décarbonation, le premier poste en termes de montants engagés. France 2030 cible des solutions de décarbonation coûteuses et avec un fort potentiel d'abattement127(*). La majorité des financements de France 2030 (près de 60 %) est orientée vers une solution non rentable au plan socio-économique à moyen terme, tel que l'hydrogène « vert », ce qui montre la pertinence de l'engagement de l'État.

Cette première évaluation avait trois objectifs :

1. vérifier si l'engagement de France 2030 de 50 % des crédits alloués à la décarbonation est effectivement tenu ;

2. pouvoir mesurer la contribution de France 2030 en matière de réduction des émissions de GES aux objectifs de la planification nationale ;

3. permettre, lors de la sélection des projets, d'orienter les choix en fonction de la réduction des émissions de GES et des coûts d'abattement.

Or, elle s'est toutefois heurtée à d'importants problèmes méthodologiques qui en limitent les conclusions : « Les données disponibles à ce jour ne permettent pas de répondre pleinement à ces trois finalités. D'importantes avancées dans le recueil et le partage d'informations sont constatées, mais des pratiques hétérogènes subsistent (...). Les analyses de mesure de GES menées par les porteurs de projet sont de qualité très variable et l'information disponible pour les évaluations n'est pas toujours suffisante pour déterminer si un projet donné peut être valorisé comme ayant un potentiel de décarbonation suffisamment favorable ».

Le niveau d'exigence des données en termes d'impact sur la décarbonation, classé sur une échelle de 0 à 8, ce dernier niveau étant le niveau le plus élevé, a montré que seulement la moitié (53 %) des cahiers des charges atteignent pour l'instant un niveau supérieur ou égal à 4, tandis que 11 % atteignent un niveau supérieur ou égal à 7.

Afin de « poursuivre le renforcement de l'évaluation des investissements et intégrer davantage les données d'impacts ainsi que les résultats des évaluations dans le processus de décision », le comité a donc émis la recommandation suivante :

- renforcer en particulier la qualité des évaluations environnementales des projets et développer des outils à disposition des porteurs de projets pour faciliter l'évaluation de leurs impacts ;

- accélérer la montée en qualité des données d'impacts recueillies par les opérateurs, notamment en organisant des contrôles ciblés des déclarations ;

- mettre en place un outil numérique permettant la centralisation des données d'impacts et le recueil d'informations provenant d'autres sources, ouvertes et non ouvertes ;

- développer les évaluations de type contrefactuel, notamment pour les dispositifs dits structurels et les actions transverses à plusieurs appels à projets ;

- élargir les collaborations avec les acteurs français et européens de l'évaluation des programmes d'innovation à mission pour améliorer, en continu, les méthodes d'évaluation de France 2030 et les hisser aux meilleurs standards internationaux ;

- mieux intégrer les informations relatives aux impacts attendus des projets au processus d'instruction et de décision de financement des projets mis en oeuvre par les opérateurs ;

- valoriser les résultats des évaluations par une communication régulière sur les impacts des dispositifs et les actions envisagées pour en tirer les enseignements ;

- redéployer 10 % des moyens financiers sur la base des résultats des évaluations disponibles au cours des premières années de déploiement du plan afin de s'assurer une meilleure efficacité des investissements.

Selon une seconde évaluation de janvier 2024 du comité France Relance, le « recul est aujourd'hui insuffisant pour mener une évaluation complète : certains dispositifs ne sont pas encore pleinement déployés (hydrogène décarboné) ou bien ils sont déployés, mais les investissements ne sont pas achevés (décarbonation de l'industrie, rénovation des bâtiments publics) ; ou bien les données ne sont disponibles que pour l'année 2021 (baisse des impôts de production) ou elles sont encore partielles (MaPrimeRénov', APLD et FNE-Formation), ou elles concernent des économies d'énergies attendues et non pas observées (MaPrimeRénov', rénovation des bâtiments publics, décarbonation de l'industrie), voire elles n'ont pas été transmises à temps au secrétariat du comité (protéines végétales, fonds propres). Certaines mesures ont un impact de moyen terme (comme la baisse des impôts de production ou le plan « 1 jeune 1 solution ») et ne sauraient être évaluées sur la base de leur première année de mise en oeuvre ». Le comité note par ailleurs « qu'il n'a pas toujours pu obtenir l'accès aux données qui permettraient d'analyser les effets d'aubaine, par exemple en comparant les trajectoires d'entreprises lauréates et non lauréates pour certains dispositifs d'aides. Il est essentiel de généraliser la collecte et le partage de ces données à l'avenir et de continuer l'évaluation des dispositifs pour à terme renforcer les dispositifs les plus efficients et abandonner les moins efficients ».

Il évalue les coûts budgétaires des actions pour éviter l'émission d'une tonne de CO2 ainsi :

· 700 euros pour la rénovation des bâtiments publics ;

· 600 euros pour le bonus à l'achat d'une voiture électrique ;

· 70 euros pour MaPrimeRenov' ;

· 19 euros pour les projets de production de chaleur à partir de la biomasse.

Le rapport souligne que « ces chiffres sont difficiles à calculer et approximatifs, qu'il ne s'agit que de coûts budgétaires et non de coûts socio-économiques ».

Le tableau suivant précise ce premier bilan sommaire :

Source : évaluation du plan France Relance, synthèse du rapport final, janvier 2024

Évaluer un plan de 100 milliards d'euros, comportant plus d'une centaine de mesures qui peuvent interagir, est un exercice particulièrement complexe. Ainsi, le montant de ce plan nécessitera un rapport de la Cour des comptes et un suivi approfondi par les commissions compétentes du Parlement.

(2) L'évaluation par l'Institut des politiques publiques

L'Institut des politiques publiques128(*) a procédé en janvier 2024 à une «  Évaluation des aides à la décarbonation du plan France Relance » afin d'identifier « les effets de l'octroi des aides sur le comportement d'investissement des entreprises, et sur leur trajectoire économique de façon générale ».

Cependant, comme le recul disponible dans les données fiscales est seulement d'au maximum un an et demi après l'octroi des premières aides à la fin de l'année 2020, « les données disponibles ne permettent pas d'étudier les effets des aides à l'investissement sur le comportement de consommations énergétiques des entreprises » et la mesure des effets sur l'investissement « appellent de plus amples analyses lors que de nouvelles données seront disponibles qui permettent ou bien d'approfondir le recul temporel de l'analyse, ou bien de qualifier la nature des investissements consentis et leurs conséquences en matière de consommations énergétiques ».

(3) L'évaluation par le Réseau Action Climat

Le Réseau Action Climat a procédé, en juin 2023, à une évaluation globale de cette politique de décarbonation de l'industrie129(*), qui souligne « le manque d'efforts réalisés pour la décarbonation des 50 sites industriels les plus émetteurs de GES en France, malgré les milliards d'euros d'aides publiques accordées ces deux dernières décennies » et des « avancées concrètes » qui « se font attendre ».

Le montant des montants des investissements pour décarboner l'industrie est considérable : « Selon l'institut I4CE130(*), les investissements nécessaires pour décarboner certains secteurs industriels tels que l'acier, le ciment, et une partie du secteur de la chimie d'ici 2050 pourraient atteindre jusqu'à 14 milliards d'euros, en fonction du scénario envisagé. L'Institut Rousseau évalue les besoins en investissements à 7,8 milliards d'euro d'ici 2030 pour le déploiement de technologies bas-carbone matures auxquels s'ajoutent 22,5 milliards d'euros pour déployer à moyen terme des technologies de ruptures coûteuses ».

(4) L'évaluation par la commission des finances du Sénat

Le 29 mai 2024, la commission des finances a publié un rapport d'information (n°640), sur les aides à la décarbonation de l'industrie du plan France 2030, par MM. Laurent Somon et Thomas Dossus.

Avec l'attribution de seulement 6 % des aides de l'objectif de la décarbonation de l'industrie, les pouvoirs publics ne sont pas au rendez-vous de l'accélération de son rythme provoquée par l'Union européenne en décembre 2022. Ainsi, « les aides attribuées au-delà de l'année 2027 ont une probabilité réduite de produire des effets utiles pour atteindre les objectifs de réductions des émissions de GES à horizon 2030 ».

Seulement 30 % des aides à la décarbonation de l'industrie ont été attribuées aux bénéficiaires finaux en février 2024 et 1 % décaissées à leur profit au 31 décembre 2023, ce qui s'explique notamment par la complexité et la lenteur de l'élaboration de prototypes.

Par ailleurs, est souligné la réduction des investissements publics par rapport aux montant initiaux annoncés. En effet, le plan France Relance a été réduit, lors d'une réunion interministérielle du 23 octobre 2023, de 57 à 54 milliards et les aides à la décarbonation de l'industrie de 5,5 à 4,5 milliards soit une baisse de 18 %.

Surtout, le financement public ne couvre que 18 % du besoin de financement public à l'horizon 2030 qui est estimé à 22 milliards. Aucune visibilité n'est apportée sur le déploiement de ces aides qui devraient doubler pour atteindre l'objectif de réduction des GES à l'horizon 2030 : si les industriels se sont engagés à réduire de 22 millions de tonnes le carbone émis à cet horizon, le financement public actuel ne permet de financer que 10 millions de tonnes de réduction.

2. L'impact limité du captage et stockage du carbone

La France dispose d'un potentiel de stockage de carbone important avec un sous-sol varié, propice au stockage géologique de CO2 par injection dans des champs d'hydrocarbures déplétés131(*) ou des aquifères salins132(*) à une profondeur minimale de 800 mètres. Le potentiel des concessions existantes françaises permettrait de couvrir 50 ans des besoins de stockage de carbone de l'industrie française.

Un appel à manifestation d'intérêt (AMI) pour identifier les industriels qui souhaitent s'engager dans le développement de la chaîne de capture, valorisation et séquestration du carbone a été ouvert jusqu'au 26 juillet 2024 afin de « permettre d'identifier les acteurs qui seront porteurs de solutions pour accélérer le développement des capacités de stockage géologique de CO2 en France ».

Les technologies de captage, stockage et valorisation du CO2 (CCUS-Carbon Capture, Use and Storage) consistent à capter le CO2 dès sa source de production, à le stocker dans le sous-sol et à le valoriser.

Le volume stocké à ce jour (40 millions de tonnes de CO2 par an dans une trentaine d'installations) reste, pour l'instant, anecdotique au niveau mondial, par rapport aux 40 milliards de tonnes de CO2 émises par les activités humaines chaque année.

L'Agence internationale de l'énergie estime, dans le scénario Net Zero Emission by 2050 (NZE) rendu public en 2021, que pour atteindre la neutralité carbone en 2050, 7,6 gigatonnes (Gt) de CO2 devront être captés par an à partir de 2050, soit 20 % des émissions actuelles. Un objectif intermédiaire fixe à 1,6 Gt la quantité de dioxyde de carbone qu'il sera nécessaire de capter dès 2030. Cette quantité passe à 4 Gt de CO2 en 2035, soit un facteur 100 à atteindre en moins de 15 ans.

Pour atteindre l'objectif de seuil de 2 °C, d'après le scénario « développement durable » de l'AIE, plus de 100 milliards de tonnes de CO2 devraient être stockés et plusieurs milliers d'installations de CCUS déployées d'ici 2050.

D'après le rapport spécial sur le captage, l'utilisation et le stockage du CO2 publié par l'AIE en 2020, la capacité mondiale de stockage de CO2 serait comprise entre 8 000 et 55 000 gigatonnes. Ainsi même le chiffre le plus bas (8 000 Gt) dépasse de très loin les 100 Gt de CO2 qui devraient être stockées d'ici 2055 dans le scénario « développement durable ». Toujours selon l'AIE, le potentiel terrestre est plus important que le potentiel marin. En effet, la capacité de stockage terrestre est estimée entre 6 000 Gt et 42 000 Gt tandis la capacité offshore serait comprise entre 2 000 Gt et 13 000 Gt, en ne considérant que les sites situés à moins de 300 kilomètres de la côte, à des profondeurs d'eau inférieures à 300 mètres et en dehors de l'Arctique et de l'Antarctique. 

Source : IFPEN133(*)

Dans un avis technique rendu en 2020, l'ADEME considère cette technique comme l'une des solutions qui permet de réduire les émissions des sites industriels de grande taille sans changer le moyen de production, grâce à plusieurs technologies pour récupérer le CO2 dans les fumées, le transporter et le stocker dans le sous-sol.

Le potentiel de cette technologie est toutefois limité en France. Le CSC ne serait applicable que sur trois sites Dunkerque, Le Havre et Lacq, et 90 % seraient stockées en mer hors du territoire français.

Pour l'ADEME, « ce gisement sera cependant réduit lorsque d'autres actions de réduction d'émissions de CO2 (efficacité énergétique, électrification des procédés ou développement des énergies renouvelables) seront mises en place sur ces sites industriels. Aussi, ce gisement paraît compatible avec les orientations de la stratégie nationale bas carbone (SNBC) qui limite le CSC à 5 Mt CO2/an d'émissions évitées dans l'industrie en 2050 dans son scénario de référence. A contrario, la plupart des sites du secteur de la chimie de base (situés en région AURA) ainsi que ceux du secteur cimentier (dispersés sur tout le territoire) ne pourront pas s'appuyer sur cette technologie pour décarboner leurs activités ». La mise en oeuvre du CSC pour atteindre la neutralité carbone est, pour l'Agence, « à envisager en tant que dernière étape dans une stratégie de décarbonation commençant par les actions plus matures et performantes (l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables), et il reste un pari risqué ».

Plusieurs défis majeurs doivent être levés pour permettre le déploiement industriel du CSC :

- la réduction des coûts de cette technologie « aujourd'hui loin d'être compétitive » (100 à 150 €/tonne de CO2 évité), notamment, contre 20-25€/tonne de CO2 évité pour les technologies les moins chères dans le secteur industriel). « Même en optimisant les technologies de captage (très consommatrices d'énergie), le CSC restera une solution coûteuse car elle n'est adaptée qu'aux sites très fortement émetteurs, en nombre limité, et nécessite des adaptations au cas par cas. Elle ne verra donc pas ses coûts réduits drastiquement par un effet d'échelle ».

- l'acceptation sociétale, au regard des risques technologiques et sanitaires potentiels : « la réussite de projets nécessitera une implication de la société civile et des autorités locales, qui est loin d'être acquise ».

- la temporalité de cette innovation : « des efforts financiers importants doivent être consentis dès maintenant en matière de R&D pour le développement de projets CSC, qui nécessite un temps de développement et d'intégration d'une dizaine d'années, et donc pas de résultats concrets à moyen terme ».

Pour le Réseau Action Climat, « le CSC n'implique pas de réduction des émissions à la source et donc de réelle remise en cause du système productif actuel ». Cette technologie, qui n'est pas encore totalement mature, nécessitera des investissements considérables, estimés entre 11 et 14 milliards d'euros, tout en présentant un risque potentiel de fuites. De plus, « le CSC est une technologie coûteuse et énergivore, dont la pertinence dépend d'un mix électrique national décarboné ». Au total, le Réseau considère que « le CSC ne constitue pas une solution généralisable à l'ensemble du parc industriel français. Ainsi, le CSC doit être considéré par les industriels comme un ultime recours visant à traiter les émissions résiduelles incompressibles et ne doit pas retarder la transformation profonde de l'industrie ». Selon lui, il faut mettre l'accent sur l'enjeu de sobriété de la consommation et développer l'économie circulaire car « privilégier la réutilisation de matière première recyclée sur le territoire, à l'empreinte carbone faible, permet d'une part de réduire la dépendance aux importations et d'autre part de réduire la consommation de matière première vierge ».

Pour la commission d'enquête du Sénat sur TotalEnergies134(*) : « le captage et le stockage du CO2 ne doivent intervenir que pour les émissions résiduelles pour lesquelles il n'y a pas de technologie ou d'alternative ou à titre transitoire » et pour l'IFPEN : « ces solutions prometteuses doivent encore faire la preuve qu'elles peuvent être industrialisées à un coût acceptable ». En effet ; « la plupart des industries lourdes (sidérurgie, cimenterie, raffinage, chimie et pétrochimie) ne disposent pas à ce jour de technologies de substitution leur permettant de réduire massivement leurs émissions de CO2 ».

D'autres pistes sont explorées, comme la valorisation chimique ou biologique du CO2, mais elles restent à un stade expérimental et elles ne représentent que 8 % du potentiel de réduction attribué au CCUS sur la période 2020-2070.


* 107 16,1 Mt CO2eq.

* 108 « Les incidences économiques de l'action pour le climat », France Stratégie.

* 109 Il exerce, sous l'autorité du Premier ministre, les attributions suivantes :

· il coordonne l'élaboration des stratégies nationales en matière de climat, d'énergie, de biodiversité et d'économie circulaire, en s'assurant du respect des engagements européens et internationaux de la France. Il veille en particulier à la soutenabilité de ces stratégies et à leur différenciation, afin de s'adapter aux particularités de chaque territoire et d'intégrer les enjeux économiques et sociaux ;

· il veille à la mise en oeuvre de ces stratégies par l'ensemble des ministères concernés et à leur déclinaison en plans d'actions ;

· il veille à l'évaluation régulière des politiques menées au titre de ces stratégies et des plans d'action et à la publication d'indicateurs pour en rendre compte ;

· il veille à la cohérence de l'ensemble des politiques publiques avec les stratégies mentionnées précédemment ;

· il prépare et coordonne les saisines et les réponses du Gouvernement aux avis du Haut Conseil pour le climat.

* 110 « Il est consulté sur les projets de loi concernant, à titre principal, l'environnement ou l'énergie et sur les stratégies nationales relatives au développement durable, à la biodiversité et au développement de la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises et la stratégie bas-carbone.

Le conseil national de la transition écologique rend des avis structurants pour la politique de la transition écologique.

Outre la saisine par le Premier ministre et le ministre chargé de l'écologie, le conseil national de la transition écologique peut se saisir de toute question d'intérêt national concernant la transition écologique et le développement durable ou ayant un impact sur ceux-ci. Il doit également contribuer à la préparation des négociations internationales sur l'environnement et le développement durable.

Chaque année, le conseil est informé de l'évolution des indicateurs nationaux de performance et de développement durable pour mesurer l'avancement de la transition écologique.

Le conseil national de la transition écologique a enfin pour mission de préparer et suivre les conférences environnementales et la mise en oeuvre des feuilles de route pour la transition écologique.

Le conseil, présidé par le ministre en charge de l'écologie, est composé de 6 collèges et réunit 50 membres. Sont également invités à participer aux réunions du conseil plusieurs organismes, établissements publics et ministères concernés par les enjeux de transition écologique et de développement durable ».

* 111 Créé par décret du 14 mai 2019, il a été installé le 27 novembre 2018 par le Président de la République.

* 112 Il rend chaque année un rapport sur le respect de la trajectoire de baisse des émissions de GES, la bonne mise en oeuvre des politiques et mesures pour réduire les émissions de GES et développer les puits de carbone et un avis tous les 5 ans sur les projets de stratégie bas carbone et de budgets carbone et la trajectoire de baisse des émissions de GES sur laquelle s'engage la France. Il évalue « la cohérence de la stratégie bas carbone vis-à-vis de l'action publique nationale et des engagements européens et internationaux de la France, en particulier de l'Accord de Paris et de l'atteinte de la neutralité carbone en 2050.

* 113 L'Autorité environnementale, qui a rendu son avis le 6 mars 2019 ; le Haut Conseil pour le climat, dont le rapport annuel « Agir en cohérence avec les ambitions » remis au Premier Ministre le 25 juin 2019 et tenant lieu d'avis sur les projets de SNBC et de budgets carbone ; le Conseil national d'évaluation des normes (avis favorable du 11 juillet 2019) ; l'Assemblée de Corse, dont l'avis du 26 juillet 2019 ; les collectivités d'Outre-mer ; la Commission européenne sur le projet de Plan National Intégré Énergie-Climat (avis en date du 18 juin 2019) ; certaines instances se sont auto-saisies du projet de stratégie nationale bas-carbone. En particulier, les avis suivants ont été rendus dont le Conseil économique, social et environnemental (9 avril 2019) et le Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (21 mai 2019).

* 114 Les deux autres étant la compétitivité (34 Md€), pour donner aux entreprises les conditions les plus favorables pour développer leurs activités et ainsi préserver l'emploi des salariés, et la cohésion sociale et territoriale (36 Md€), pour garantir la solidarité entre les générations, entre les territoires, et entre tous les Français.

* 115 Elle concerne l'ensemble des secteurs industriels et vise le remplacement des moteurs et des chaudières à base d'énergies fossiles pour les remplacer par des composants électriques

* 116 Elle est mobilisée pour produire de la chaleur haute-température, principalement dans la chimie, l'agroalimentaire et les matériaux de construction, ou encore pour remplacer les composés de base pétrochimique par de la chimie biosourcée

* 117 Le gaz constitue un substitut aux énergies fossiles pour les procédés chimiques ou sidérurgiques, mais aussi pour le transport lourd à ou grande distance.

* 118 La capture et le stockage dans des formations géologiques profondes des émissions de CO2 est notamment utilisé lorsqu'il n'existe pas à ce jour d'alternative technologique.

* 119 Start-up ou PME offreuse de toute solution innovante permettant le lutter - directement ou indirectement - contre le réchauffement climatique notamment en diminuant les émissions de GES.

* 120 Le calcul a été réalisé par le Carbon Disclosure Project (CDP) en partenariat avec le Climate Accountability Institute (CAI), dans le rapport Carbon Majors Report du 10 juillet 2017.

* 121 L'hydrogène est dit « décarboné » ou « vert » quand ni sa production ni son utilisation n'émettent de CO2. Une des solutions identifiées pour décarboner massivement des industries fortement émettrices, en agissant sur la diminution des émissions de CO2, l'hydrogène décarboné est gaz produit principalement à partir d'eau et d'électricité, qui constitue un substitut aux énergies fossiles pour les procédés chimiques ou sidérurgiques.

* 122 La biomasse définit l'ensemble des matières organiques pouvant devenir des sources d'énergie. Cette biomasse provient de la forêt, de l'agriculture (cultures dédiées, résidus de culture, cultures intermédiaires et effluents d'élevage), de déchets (déchets verts, biodéchets des ménages, déchets de la restauration, de la distribution, des industries agroalimentaires et de la pêche, déchets de la filière bois, boues de stations d'épuration, etc.). La biomasse est mobilisée pour produire de la chaleur haute-température, principalement dans la chimie, l'agroalimentaire et les matériaux de construction, ou encore pour remplacer les composés de base pétrochimiques par de la chimie biosourcée.

* 123 L'électrification des procédés, qui concerne l'ensemble des secteurs industriels, vise le remplacement des moteurs et des chaudières à base d'énergie fossiles par des composants électriques. L'électrification recouvre des projets très divers : électrification de la chaleur avec l'installation de fours électriques, électrification des turbines et chaudières des vapocraqueurs, importantes consommatrices d'électricité. Elle fait appel à de l'électricité décarbonée, c'est-à-dire de l'électricité issue des énergies renouvelables (éolien, solaire et hydraulique) ou du nucléaire.

* 124 La capture et le stockage de carbone permettent de retenir du CO2 émis par les procédés industriels et de le stocker dans des formations géologiques profondes. Ce procédé empêche que le carbone ne soit libéré dans l'atmosphère et ne contribue au réchauffement climatique. Il est utilisé pour les émissions de CO2 pour lesquelles il n'existe pas à ce jour d'alternative technologique. Il s'agit d'un levier de transition mobilisé pour l'ensemble des secteurs particulièrement dans la pétrochimie et le ciment, mais également dans la métallurgie.

* 125 Prévues par l'article 301 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « climat et résilience ».

* 126 À savoir, la réduction des émissions de GES annuelles de 408 MtCO2e/an en 2022 à 270 MtCO2e/an en 2030, avec des niveaux d'efforts différents pour chaque secteur. Les bâtiments (- 53 %), l'énergie (- 43 %), l'industrie (- 38 %) et les transports (- 29 %) sont particulièrement concernés.

* 127 L'indicateur d'efficience usuel concernant les politiques de décarbonation est le coût d'abattement. Exprimé en euros par tonne de CO2 équivalent, il cherche à définir, pour un projet donné, la valeur socio-économique totale, c'est-à-dire les coûts monétaires mais aussi la valeur des externalités associées au projet, mobilisée pour éviter l'émission d'un montant donné de GES.

L'utilisation du coût d'abattement cherche typiquement à ordonner différents projets entre eux pour estimer lesquels permettent d'arriver à un même objectif à moindre coût, ou encore de définir, sur la base de ce coût, quels sont les projets qui sont socialement souhaitables, par référence avec une valeur sociale du carbone aussi appelée valeur d'action pour le climat.

* 128 L'Institut des politiques publiques (IPP) a été créé par l'École d'économie de Pairs (Paris School of Economics) et est développé dans le cadre d'un partenariat scientifique entre PSE-École d'Économie de Paris et le Groupe des écoles nationales d'économie et de statistique (GENES). L'IPP vise à promouvoir l'analyse et l'évaluation quantitatives des politiques publiques en s'appuyant sur les méthodes les plus récentes de la recherche en économie.

* 129 50 sites industriels français les plus émetteurs de CO2 : l'heure des comptes

* 130 Institut de recherche à but non lucratif qui contribue par ses analyses au débat sur les politiques publiques d'atténuation et d'adaptation au changement climatique.

* 131 Le stockage en gisement déplété est assuré au sein d'une cavité de roche poreuse. Perméable et imprégnée d'eau non consommable, cette dernière est remplie de gaz naturel compressé grâce à l'utilisation de puits d'exploitation, des tubes métalliques d'une dizaine de centimètres de diamètre, reliant la surface à la cavité. Au fur et à mesure de l'injection, le gaz naturel, qui ne peut s'échapper, reprend la place de l'ancien gisement, sans aucune modification de l'architecture naturelle du sous-sol.

* 132 Les bassins sédimentaires sont des zones où des particules d'origine minérale ou organique se sont déposées puis solidifiées. De tous les types de réservoirs envisageables, les aquifères salins sont ceux, situés à de grandes profondeurs, qui représenteraient le plus gros potentiel en matière de capacité de stockage (400 à 10 000 Gt CO2). Bien qu'étant largement répartis à la surface du globe, leur structure et leur capacité à piéger durablement le CO2 reste très difficiles à évaluer. Un effort important de recherche doit donc être engagé pour apprécier leur potentiel de stockage géologique et leur capacité à confiner le CO2 sur le long terme.

* 133 IFP Énergies nouvelles (IFPEN) est un acteur de la recherche et de la formation dans les domaines de l'énergie, du transport et de l'environnement, financé par l'État et des industriels, qui apporte un appui aux politiques publiques de recherche et d'innovation à l'échelle européenne, nationale et territoriale.

* 134 Rapport de la commission d'enquête sur les moyens mobilisés et mobilisables par l'État pour assurer la prise en compte et le respect par le groupe TotalEnergies des obligations climatiques et des orientations de la politique étrangère de la France, n°692 du 14 juin 2024.

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