G. LE LITTORAL : UNE COURSE SANS FIN VERS LA MER ?
1. La forte attractivité du littoral
a) La France, pays tourné vers la mer
Partout ou presque dans le monde, les territoires qui bordent la mer sont davantage peuplés que l'intérieur des terres. La proximité de la mer constitue avant tout une opportunité de voyager, de commercer, et d'accéder aux ressources halieutiques : poissons et crustacés. D'après l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), 20 % de la population mondiale vit à moins de 30 km des côtes, 50 % dans une bande de 100 km et 60 % dans une bande de 150 km.
En France, les communes littorales, qui accueillent un peu plus de 10 % de la population permanente, ont une densité 2,5 fois plus élevée que la moyenne nationale143(*). Elles se sont fortement développées depuis les années 1960. Le manque de terrains disponibles à proximité immédiate des rivages a conduit depuis les années 2000 à un développement fort de l'espace rétro-littoral, comme le montre l'exemple du Var.
Au-delà de la population permanente, le littoral est l'espace privilégié de l'accueil touristique. Les communes littorales concentrent en effet 40 % de la capacité d'accueil touristique totale du pays et peuvent accueillir dans les hôtels, campings ou résidences secondaires de l'ordre de 8 millions de personnes, soit un doublement de la population totale du littoral. Les communes touristiques littorales peuvent d'ailleurs voir leur population présente en juillet-août multipliée par deux à six144(*). En outre, un tourisme maritime de plaisance prend appui sur des aménagements réalisés dans de nombreuses communes pour accueillir un peu plus d'1 million de bateaux de plaisance, dont un peu plus de 200 000 disposent d'emplacements dédiés.
Le littoral a aussi une fonction économique importante et parfois oubliée au profit d'une approche trop résidentielle ou touristique. Le littoral accueille ainsi des activités de construction navale civile et militaire145(*), de pêches maritimes et d'aquaculture avec un peu plus de 4 000 navires en métropole et 3 000 entreprises aquacoles, principalement de production d'huitres et de moules146(*) ainsi que des activités industrielles de transformation des produits de la mer (conserveries, découpe et conditionnement de pêche fraîche). Outre les ports de plaisance et les ports de pêche, sont aménagés sur le littoral des ports de commerce qui jouent un rôle essentiel dans l'armature logistique de notre pays147(*). Les 6 grands ports maritimes (GPM) de métropole (Dunkerque, Le Havre, Nantes-Saint-Nazaire, La Rochelle, Bordeaux et Marseille) sont des points d'arrivée et de départ de très grandes quantités de marchandises.
Il existe bien évidemment des différences sensibles entre les différents types de communes littorales. Les différences sont d'abord physiques : le panorama des paysages littoraux réalisé par le Conservatoire du littoral montre que sur les trois façades maritimes de France métropolitaine (Manche-Mer du Nord, Atlantique et Méditerranée), le littoral est constitué de 44 % de côtes rocheuses et de falaises, de 39 % de côtes d'accumulations (galets, sables, vases) et 17 % de côtes artificialisées148(*). Les différences sont aussi dans les activités ou les types de peuplement dominants : certains littoraux sont très tertiarisés et à dominante résidentielle, lorsque d'autres sont plus multifonctionnels.
Des traits caractéristiques communs sont pourtant à mettre en évidence : les habitants des communes littorales sont globalement plus âgés et disposent de revenus plus élevés que la moyenne. Un autre trait commun reste l'attrait que la mer exerce sur nos concitoyens d'une manière générale, que ce soit pour y habiter ou pour les vacances.
b) Une attractivité économique et résidentielle incontestable
La tendance à une croissance de population plus forte sur le littoral que sur les autres territoires, constatée depuis les années 1960, devrait se poursuivre selon les études prospectives menées au niveau national par l'INSEE mais également par les observatoires locaux. Dans son rapport au Gouvernement d'octobre 2019149(*) intitulé « Quel littoral pour demain ? », le député de Vendée Stéphane Buchou soulignait que l'attractivité du littoral s'observait aussi bien dans les communes littorales urbaines que dans les zones littorales plus rurales, avec dans celles-ci un rythme de construction de logements 3,5 fois plus élevé que la moyenne des espaces ruraux. Il rappelait que l'Observatoire national de la mer et du littoral avait estimé une augmentation de la population des départements littoraux de 4,5 millions d'habitants et pour les seules communes littorales d'1,4 million d'habitants à l'horizon 2040.
Après l'aménagement des stations balnéaires à partir des années 1960, une part significative de la croissance de population se fait désormais à quelques kilomètres des côtes, contribuant à changer radicalement le paysage de bourgs ruraux qui s'agglomèrent peu à peu à l'espace urbain des villes côtières.
L'attractivité du littoral est toutefois différenciée selon les façades maritimes : c'est désormais la façade atlantique qui connaît la progression de population la plus dynamique, devant le littoral méditerranéen, tandis que les littoraux de la Manche et de la Mer du Nord progressent peu. Il faut aussi se garder d'idées reçues en matière de démographie littorale. Certaines communes côtières peuvent croître moins vite que le reste de la région. C'est le cas en Bretagne et cela peut s'expliquer de plusieurs manières : rareté des terrains disponibles pour bâtir en bord de mer, éviction des résidents permanents par des résidents occasionnels qui achètent des résidences secondaires, besoin de services publics dont sont dépourvues certaines communes côtières. Même si le littoral est un « territoire désirable » pour beaucoup de nos concitoyens, qui le manifestent dans les sondages d'opinion, seule une analyse fine, territoire par territoire, permet d'apprécier les dynamiques propres à chaque département, voire chaque intercommunalité côtière.
Avec le réchauffement climatique et la multiplication des canicules, la proximité de la mer, qui apporte davantage de fraîcheur, pourrait être encore plus recherchée à l'avenir.
L'attractivité du littoral n'est pas seulement résidentielle. Ces territoires constituent aussi une cible de choix pour l'implantation d'activités économiques. Les côtes offrent ainsi un accès à l'eau nécessaire pour assurer le refroidissement des centrales nucléaires. Sur les 6 tranches nucléaires supplémentaires envisagées actuellement par le Gouvernement, 4 seraient situées en bord de mer (2 à Gravelines dans le Nord et 2 à Penly en Seine-Maritime). D'autres installations industrielles gourmandes en eau trouvent aussi un intérêt fort à s'implanter sur les côtes : ainsi, une nouvelle usine de batteries devrait s'implanter à Dunkerque, l'extraction du lithium nécessitant beaucoup d'eau. La chimie ou encore la sidérurgie dépendent aussi de la présence d'eau à proximité.
La proximité d'un port de commerce constitue par ailleurs un facteur d'attractivité pour l'approvisionnement ou l'exportation de la production.
Enfin, la mer constitue le support du développement d'énergies marines renouvelables. La régularité et la puissance des vents en mer rendent en effet particulièrement pertinents les projets de parcs éoliens offshore.
La pression sur les espaces littoraux est donc appelée à persister, au moment même où la gestion des conflits d'usage est rendue plus compliquée par le changement climatique.
2. Le littoral, espace privilégié des conflits d'usage du territoire
a) La montée des risques environnementaux
Les littoraux sont des espaces confrontés à la fois à des risques naturels accélérés par le changement climatique et par des pressions directes sur les milieux naturels liés à l'artificialisation des côtes. La combinaison des deux facteurs crée un cocktail détonnant et appelle à des mesures de protection renforcées.
Le risque de submersion marine est accru par la montée du niveau des mers, qui est déjà en moyenne à l'échelle mondiale de l'ordre de 25 cm depuis un siècle. Dans les scénarios les plus pessimistes du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), cette hausse pourrait être de l'ordre d'1 mètre à l'horizon 2100. Cela peut paraître modeste, dans la mesure où il est toujours possible de créer des digues ou faire de l'enrochement des surfaces situées à une très faible altitude. Mais ces solutions, coûteuses, présentent aussi des failles. Et l'élévation du niveau de la mer peut contribuer à des inondations plus rapides des zones humides côtières, à la salinisation des nappes d'eau douce ou encore à l'aggravation des effets des grandes marées et des tempêtes.
Le recul du trait de côte constitue une préoccupation majeure. Pour mieux anticiper les évolutions du littoral, le Gouvernement avait d'ailleurs adopté en 2012 une stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte (SNGIC). Comme le rappelle le rapport Buchou précité, le trait de côte a toujours été en mouvement, ce que l'on a parfois tendance à oublier. La dynamique littorale n'est au demeurant pas uniforme sur l'ensemble du territoire national et varie en fonction de la nature des sols et des roches. Certains littoraux connaissent un phénomène d'accrétion (agglomération de sédiments non organiques), comme en Charente-Maritime où l'envasement et l'ensablement du site de Brouage conduit sa citadelle, autrefois en bord de mer, à se trouver désormais à 2 kilomètres du rivage. À l'inverse, d'autres rivages reculent. Le rapport Buchou indique que 20 % des côtes françaises sont concernées par l'érosion, soit 1 526 kilomètres au total. Ce recul se concrétise par la destruction de plages de sable ou par l'effondrement de falaises calcaires. Certaines communes connaissent une érosion marquée de l'ordre de plusieurs mètres par an. À l'horizon 2 100, ce sont environ 15 000 bâtiments qui devraient être engloutis par la mer. Le cas le plus emblématique est celui des deux immeubles Le Signal à Soulac-sur-Mer en Gironde. Construits en 1967 et 1970 et situés alors à 200 mètres de la mer, ils ont les pieds dans l'eau aujourd'hui et leur démolition a démarré début 2023.
Outre les risques naturels, les espaces côtiers sont soumis à des risques accrus résultant d'activités humaines : rejets des eaux usées traitées, aménagements touristiques, pollutions des estuaires. Or, le caractère d'interface entre terre et mer des zones littorales rend des services écosystémiques majeurs et leur fait jouer un rôle essentiel en matière de biodiversité. Marais et prés salés sont souvent classés comme sites Natura 2000, comme zones de protection spéciale au titre de la directive Oiseaux ou comme zones spéciales de conservation au titre de la directive Habitats Faune et Flore. Une attention particulière doit donc être portée aux effets potentiellement néfastes d'aménagements ou simplement d'une sur-fréquentation touristique de certains sites.
La recherche d'un équilibre entre les aménagements et la préservation de l'environnement sur les côtes avait été au fondement de la loi Littoral de 1986, votée à l'unanimité, qui intervenait après la frénésie de constructions en bord de mer des années 1960 et 1970. Mais l'arsenal des mesures prises s'est avéré insuffisant. La tempête Xynthia en février 2010 avait ainsi fait plus de 50 victimes, dont une trentaine à L'Aiguillon-sur-Mer et La-Faute-sur-Mer en Vendée, la rupture de digues ayant inondé des quartiers construits dans des zones à risque. La prévention des risques à travers le plan de prévention des risques littoraux (PPRL), déclinaison littorale du plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRNP) constitue un instrument indispensable pour ne pas subir de nouvelles crises, même si ces démarches conduisent à renforcer la pression sur un foncier de bord de mer devenant très disputé.
b) Un accès au foncier extrêmement concurrentiel
Le foncier de bord de mer est l'objet d'une réglementation contraignante. D'abord, l'accès piéton au domaine public maritime est un droit garanti à nos concitoyens par une servitude de passage imposée aux propriétaires des terrains littoraux sur le sentier du littoral appelé aussi sentier des douaniers.
Ensuite, le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (CELRL), créé en 1975, gère de l'ordre de 13 % des côtes françaises soit 1 450 kilomètres, répartis sur environ 750 sites et représentant plus de 200 000 hectares, avec un objectif à terme de maîtrise foncière de 30 % du linéaire côtier, dans le but de protéger des espaces naturels, de préserver les milieux et les paysages remarquables.
La loi Littoral a réduit les possibilités d'urbanisation des façades maritimes en interdisant le mitage, c'est-à-dire la construction de bâtiments isolés. La loi Littoral a également interdit de construire sur une bande de 100 mètres à compter de la limite haute du rivage, hors espaces urbanisés. Elle a ainsi été un outil efficace pour ralentir considérablement l'urbanisation des bords de mer. La loi ELAN de 2018 a toutefois assoupli ces règles, notamment pour permettre l'aménagement des « dents creuses ». Il n'en reste pas moins que les possibilités d'aménager restent réduites sur la façade maritime.
Plus rare et plus prisé, l'espace au plus près du rivage devient extrêmement concurrentiel. En matière résidentielle, la « vue sur mer » entraîne une hausse des prix. D'une manière générale, se loger dans les stations balnéaires françaises coûte cher et la hausse des prix y a atteint 26 % entre 2020 et 2022, selon une étude de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) publiée à l'été 2022150(*). L'importance des résidences secondaires dans les zones littorales contribue à tendre les marchés immobiliers. Ainsi, selon une étude de l'INSEE de 2022 portant sur la région Nouvelle-Aquitaine151(*), la moitié des résidences secondaires de la région se situeraient sur la côte. Elles représenteraient 22,5 % de l'ensemble des logements du littoral et plus de 50 % dans les zones les plus touristiques. L'Association nationale des élus du littoral (ANEL) alerte ainsi régulièrement les pouvoirs publics sur les difficultés qui en résultent pour le logement de la population résidente à l'année ou encore pour les travailleurs saisonniers. Certains acteurs locaux, au-delà de la majoration de taxe d'habitation pour résidences secondaires, qui n'est cependant possible que dans les zones tendues, en viennent à demander un moratoire sur les acquisitions de biens immobiliers par des résidents d'autres départements ou d'autres régions, solution discriminatoire peu envisageable. Mais le simple fait qu'elle soit avancée dans le débat public en dit long sur l'ampleur de la crise du logement sur une partie du littoral, en particulier aujourd'hui dans l'Ouest.
La concurrence pour l'espace littoral intervient aussi entre les activités résidentielles et touristiques et les autres activités, notamment les activités économiques génératrices de nuisances. L'installation d'éoliennes offshore, ancrées ou flottantes, crée des tensions. Ainsi, l'ANEL s'est émue de l'absence de règle stricte de distance vis-à-vis du rivage dans l'implantation des parcs éoliens, même si la majorité d'entre eux devraient se situer à plus de 12 miles marins. L'ANEL réclame que ces parcs soient à 50 ou 60 km des côtes, pour minimiser leur impact visuel. Les pêcheurs sont aussi inquiets de voir leur espace de pêche réduit par ces nouveaux équipements.
Les conflits pour l'accès au littoral au sens large ne sont donc pas prêts de cesser et l'enjeu majeur des années à venir consiste à les réguler pour trouver le bon équilibre entre préservation des milieux et combinaison des activités humaines dans toute leur diversité.
3. Quelle stratégie pour les espaces littoraux ?
a) Protéger, anticiper, diversifier.
L'impératif de protection du littoral demeure mais ses objectifs et ses méthodes changent. La protection de l'espace littoral est historiquement conçue dans le cadre de stratégies d'aménagements et de mise en valeur visant à se protéger des éléments naturels. Il convient bien évidemment d'entretenir ce patrimoine constitué de pas moins de 16 000 ouvrages (digues, enrochements, murs). Mais les forces de la nature obligent à être modestes. La bonne stratégie pour le littoral consiste donc à s'appuyer sur les solutions fondées sur la nature (SFN) et à préserver les écosystèmes.
Dans ce cadre, il convient d'anticiper les difficultés futures liées au changement climatique. La France s'inscrit dans cette perspective avec l'adoption en 2017 d'une stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML), en cours de révision152(*), déclinée à travers quatre documents stratégiques de façade (DSF)153(*). Y sont planifiées tant l'implantation de nouvelles activités, comme par exemple la culture d'algues, ou l'exploitation minière des fonds marins de la zone économique exclusive (ZEE) que les exigences environnementales de préservation des milieux aquatiques et des stocks de poissons afin d'assurer une pêche durable.
Le rapport Buchou propose également d'anticiper les problèmes futurs d'érosion côtière en établissant des projets littoraux à l'échelle des intercommunalités précisant les possibilités de relocalisations des activités impactées, et d'organiser la possibilité de maintien dans les lieux d'occupants et d'activités à travers des conventions littorales d'occupation conclues après acquisition de la nue-propriété des bâtiments menacés par la collectivité publique. Un fonds d'aménagement littoral alimenté par une part supplémentaire de droits de mutation sur les communes littorales pourrait être mis en place pour financer les mesures du plan.
Enfin, l'action en faveur du littoral passe par sa diversification. Elle existe déjà en partie. Toutes les communes littorales ne sont pas dominées jusqu'à l'excès par le tourisme de masse et les résidences secondaires. Mais la volonté de développement touristique portée par les acteurs économiques et parfois les élus peut produire des effets extrêmement néfastes. Certaines communes ne vivent que quelques mois dans l'année, et doivent sur-dimensionner leurs équipements pour accueillir les estivants. Les campings nombreux sur le littoral languedocien saturent ainsi la capacité des collectivités à fournir de l'eau potable. Une gestion équilibrée du littoral impose donc de contingenter les capacités d'accueil touristique, ou au minimum de mieux les répartir.
b) Assurer des connexions entre littoral et rétro-littoral
Les communes littorales connaissent une attractivité plus forte que les autres communes au sein de leur région, mais ne peuvent être pensées sans prendre en compte leur voisinage immédiat.
La logique des stations balnéaires a été de se développer sans trop prendre en considération le rétro-littoral. L'aménagement d'une liaison de chemin de fer directe depuis la métropole régionale ou la capitale a longtemps constitué l'unique infrastructure indispensable et suffisante pour répondre aux besoins, essentiellement touristiques.
Or, la rareté du foncier disponible ou encore les prix élevés du logement le long du littoral ont conduit à un développement urbain vers l'intérieur des terres, qui est la version côtière de l'étalement urbain.
Penser le développement du littoral nécessite donc d'adopter une vision élargie de l'espace littoral. La constitution d'EPCI intégrant les communes n'ayant pas d'accès à la mer constitue un premier pas de l'association de l'arrière-pays à la stratégie littorale. Mais les limites géographiques des EPCI peuvent exclure une partie des communes sous influence de la côte. La planification territoriale doit en conséquence se déployer à la bonne échelle, celle du bassin de vie, pour éviter tout déséquilibre.
L'organisation des transports collectifs constitue l'un des aspects de cette stratégie visant à intégrer les différentes parties du territoire littoral : le littoral proche comme le littoral éloigné. La politique du logement et de l'habitat en constitue un autre volet.
c) Pour un aménagement équilibré du littoral
Plusieurs scénarios prospectifs peuvent se dessiner pour l'avenir de l'occupation de l'espace littoral. Deux scénarios extrêmes seraient également inacceptables. Le scénario d'une quasi-interdiction de tout nouvel aménagement, conduisant à geler l'espace littoral dans sa configuration actuelle, est peu séduisant. En apparence, il conduirait à placer au-dessus de toute considération l'ambition de préservation de la nature. Mais il permettrait difficilement de répondre aux risques naturels modifiés par le changement climatique. Par ailleurs, il fait l'impasse sur la nécessité de conserver certaines activités économiques en lien étroit avec la mer comme la pêche ou l'aquaculture.
Le scénario d'un aménagement, priorisant les équipements touristiques, est également déséquilibré, car il conduirait à créer un fossé entre les besoins des résidents permanents et ceux des populations saisonnières.
Le bon scénario passe par un développement urbain du littoral pensé à l'échelle de la bande côtière élargie, permettant aux actifs de circuler et de se loger sans perdre en qualité de vie. En matière de logement des actifs et des ménages modestes, l'inventivité est nécessaire. Si des exceptions à la loi SRU sont prévues faute de foncier disponible, il convient de ne pas donner carte blanche aux communes balnéaires pour accroître les déséquilibres sociaux. De nombreux maires sont conscients de cet enjeu et recherchent des solutions (habitat participatif, réhabilitation de résidences de tourisme pour les transformer en logements).
La diversification de l'économie littorale passe par des initiatives locales et nécessite également le soutien de l'État, mis par exemple en oeuvre par le biais de l'appel à projets Avenir littoral154(*). Il convient d'encourager l'innovation, pour faire du littoral un territoire diversifié et pas dominé seulement par l'économie résidentielle et touristique.
* 143 De l'ordre de 285 habitants/km² contre une moyenne nationale de 116 habitants/km².
* 144 https://www.entreprises.gouv.fr/fr/tourisme/developpement-et-competitivite-du-secteur/littoral-premiere-destination-touristique-du-territoire
* 145 750 entreprises assurant un chiffre d'affaires de 13,2 milliards d'euros, selon le Groupement des industriels de la construction navale (Gican).
* 146 https://www.franceagrimer.fr/content/download/69397/document/20230216_CC_p%C3%AAche_aqua_FR.pdf
* 147 https://www.ecologie.gouv.fr/acteurs-reseau-et-activites-portuaires-en-france
* 148 https://observatoires-littoral.developpement-durable.gouv.fr/chiffres-cles-r9.html
* 149 https://www.vie-publique.fr/rapport/272115-vers-un-nouvel-amenagement-du-littoral-adapte-au-changement-climatique
* 150 https://www.fnaim.fr/communiquepresse/1834/10-etude-fnaim-sur-les-stations-balneaires-les-francais-a-la-recherche-d-evasion-et-de-bords-de-mer.htm
* 151 https://www.insee.fr/fr/statistiques/6477130
* 152 https://www.mer.gouv.fr/strategie-mer-et-littoral-et-planification-maritime
* 153 https://www.merlittoral2030.gouv.fr/
* 154 https://www.prefectures-regions.gouv.fr/occitanie/Actualites/Lancement-de-l-appel-a-projet-Avenir-littoral-edition-2022