Remise du prix de la délégation à Catherine Champrenault
Madame la Procureure générale,
Je suis très heureuse de vous accueillir de nouveau au Sénat et de vous remettre aujourd'hui le Prix de notre délégation aux droits des femmes.
Vous avez participé aux travaux de notre délégation à deux reprises l'année dernière. En avril 2021, d'abord, vous aviez pris part à notre table ronde consacrée au bilan de l'application de la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel, à l'occasion des cinq ans de son adoption. Du travail reste à mener pour l'application de ce texte. Je vois notre collègue Michelle Meunier au premier rang. Elle a mené ces combats dans l'hémicycle, avec les membres de notre délégation. Cela a été long et difficile.
Ensuite, en novembre 2021, nous vous avions entendue, en compagnie de l'avocat général Gilles Charbonnier, qui est également présent aujourd'hui, afin que vous nous présentiez les conclusions du groupe de travail sur la prostitution des mineurs que vous avez présidé.
La lutte contre la prostitution des mineurs est une problématique que vous connaissez bien et dont vous avez fait un axe de votre politique pénale au parquet général de Paris. Vous avez ainsi mis en place des coopérations avec les associations spécialisées, à la fois afin de recueillir la parole des mineurs victimes, qui coopèrent peu avec les enquêteurs, mais aussi afin de les mettre à l'abri et hors d'atteinte des proxénètes.
J'invite Marie-Pierre Monier, très active dans notre délégation, à nous rejoindre. Je bouscule le protocole, mais j'ai la chance d'être entourée d'hommes et de femmes engagés. Je dois pouvoir les mettre à l'honneur, chacun leur tour.
Ce n'est pas par hasard qu'en septembre 2020, le secrétaire d'État en charge de l'enfance et des familles, Adrien Taquet, vous a désignée pour présider un groupe de travail pluridisciplinaire chargé de réfléchir à une meilleure prévention de la prostitution des mineurs. Ce groupe de travail a publié un rapport remarquable en juin 2021.
Il a, en premier lieu, permis d'attirer l'attention sur cette problématique dramatique. Avec mes collègues, nous avions été particulièrement marqués par le tableau que vous nous aviez dressé sur l'ampleur du phénomène, les profils des adolescentes concernées - qui peuvent venir de tout milieu social - et les facteurs qui peuvent expliquer leur basculement dans la prostitution. Vous avez estimé qu'environ 15 000 adolescents - des filles à 90 % - seraient concernés. Ces jeunes filles entrent majoritairement dans la prostitution entre 15 et 17 ans, mais certaines le font bien plus jeune.
Votre rapport a également donné lieu à la formulation de préconisations concrètes afin de prévenir et combattre la prostitution des mineurs et de mieux accompagner les victimes, qui bien souvent ne se vivent pas comme telles, d'où la difficulté d'aborder la situation.
À sa suite, le Gouvernement a annoncé un plan national de lutte contre la prostitution des mineurs, à hauteur de 14 millions d'euros, et lancé une campagne de sensibilisation à destination du grand public. À travers notamment un film de campagne percutant qui met en scène une victime mineure de prostitution dans un quotidien qu'elle pense « gérer », il s'agit de faire la lumière sur la vulnérabilité des victimes et les dangers auxquels elles doivent faire face.
Vous attribuer le Prix de la délégation aux droits des femmes est une façon pour nous de saluer votre engagement pour faire avancer la lutte contre la prostitution des mineurs, mais aussi de signifier notre vigilance continue face à cette problématique.
Madame la Procureure, merci pour le travail que vous avez mené. C'est un privilège pour moi de vous remettre cette médaille, au nom de l'ensemble des membres de la délégation.