LE DSA APPROFONDIT ET COMPLÈTE LA DIRECTIVE SUR LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE
Réaffirmant les deux principes clefs de la directive sur le commerce électronique que sont le principe du pays d'origine - selon lequel un fournisseur de services en ligne doit respecter la législation du pays où il établit, et non du pays de destination du service - et la responsabilité limitée des hébergeurs , la proposition de DSA repose sur une double approche : d'une part, pour les contenus illicites, renforcer les obligations concrètes de modération , et d'autre part, pour l'ensemble des contenus préjudiciables - licites ou non - sur des obligations de vigilance ( due diligence ) , notamment en matière de transparence et de moyens. Ces obligations sont graduées en fonction de la nature et de la taille des opérateurs.
Plus précisément, le texte crée un mécanisme électronique de notification et d'action harmonisé à l'échelle de l'Union, permettant d' engager plus facilement la responsabilité des hébergeurs, s'ils ne retirent pas rapidement un contenu illicite dûment notifié ; il institutionnalise aussi un statut de « signaleurs de confiance » qualifiés, dont les signalements devraient être traités en priorité.
Des obligations graduées de transparence, tant envers les utilisateurs qu'envers les autorités de contrôle et de régulation , sont introduites, en matière notamment de politique de modération et de publicité ciblée.
Les très grandes plateformes , comptant plus de 45 millions d'utilisateurs mensuels au sein de l'Union, sont soumises à des obligations renforcées , en raison des risques sociétaux systémiques qu'elles représentent : évaluation annuelle de ces risques et mise en place obligatoire de mesures d'atténuation, transparence des données et des systèmes algorithmiques .
Pour tous les opérateurs, les infractions au règlement pourraient être sanctionnées jusqu'à 6 % de leur chiffre d'affaire annuel mondial .
UNE APPROCHE PAR LE RISQUE PERTINENTE,
MAIS À
PRÉCISER ET RENFORCER
• Préciser les catégories d'acteurs concernés, en tenant compte des risques posés
Ø Inclure les moteurs de recherche dans le règlement et soumettre les « très grands moteurs de recherche » à des obligations similaires à celles des très grandes plateformes.
• La proposition prévoit d' exempter les petites entreprises de certaines obligations , tandis que les plateformes dépassant une certaine audience à l'échelle européenne seraient soumises à des obligations renforcées .
Ø Privilégier un critère d'audience aux critères de chiffre d'affaire et de nombre d'employés, pour déterminer les exemptions ; supprimer ces exemptions pour les dispositions relatives à la vente en ligne , en raison des risques individuels encourus par les consommateurs en cas de produit ou service dangereux.
Ø En vue d'une meilleure sécurité juridique, et pour ne pas retarder inutilement la désignation des très grandes plateformes, annexer au règlement la méthodologie de calcul des seuils qualifiant les très grandes plateformes, plutôt que de renvoyer à des actes délégués pris par la Commission européenne.
Ø Confier la mesure du nombre d'utilisateurs des très grandes plateformes à des tiers certifiés plutôt que de se fonder sur les chiffres fournis par les plateformes elles-mêmes.
Ø Permettre aux régulateurs de soumettre au cas par cas d'autres plateformes aux obligations renforcées des très grandes plateformes, notamment à raison de leur taux de pénétration chez les jeunes publics .
• Au-delà des places de marché en ligne, de nombreux fournisseurs de services sur internet permettent de conclure des contrats de vente en ligne , y compris à titre accessoire. La prolifération des produits et services contrefaits ou non conformes est susceptible d' affecter gravement la santé et la sécurité des consommateurs
Ø Permettre , dans certains cas, l'engagement de la responsabilité des plateformes qui permettent la conclusion de contrats de vente en ligne dès lors qu'elles auraient manqué aux obligations de diligence prévues par le règlement, notamment concernant la traçabilité des professionnels utilisant leurs services .
• Faciliter les notifications, pour pouvoir engager plus facilement la responsabilité des hébergeurs
Ø Créer un « bouton » d'accès à l'interface de notification des contenus présumés illicites commun à tous les hébergeurs.
Ø Élargir la définition des « signaleurs de confiance » , afin que ce statut puisse être accordé à certaines entités représentant des intérêts particuliers, telles que des marques, des sociétés de gestion de droits d'auteur, ou des journalistes, dans le cadre d'activités de vérification de faits.
• Aller plus loin dans la transparence
Ø Exiger des fournisseurs de services en ligne des données chiffrées sur les moyens technologiques, financiers et humains qu'elles allouent à la modération, ventilés par pays et par langue .
Ø Compléter les obligations de transparence en matière de publicité ciblée.
Ø Garantir aux autorités de régulation et aux chercheurs un accès aux données des très grandes plateformes suffisant :
o supprimer la condition d'affiliation universitaire, afin de permettre à des chercheurs indépendants de bénéficier du statut de chercheurs agréés ;
o élargir le champ des recherches pouvant justifier l'accès de chercheurs aux données des très grandes plateformes ;
o rendre le secret des affaires en principe inopposable aux demandes d'accès aux données par les autorités de régulation et les chercheurs agréés.
• Renforcer les mécanismes de contrôle et de sanction
Au vu des risques spécifiques posés par les très grandes plateformes , la proposition prévoit un mécanisme de contrôle spécifique, selon lequel la Commission européenne interviendrait, subsidiairement aux autorités du pays d'origine.
Ø Afin de pallier l'inégale diligence des différentes autorités de régulation nationales à faire appliquer les régulations numériques, confier à la Commission européenne le monopole du pouvoir d'enquête et de sanction sur les très grandes plateformes.
Ø Renforcer les effectifs affectés, au sein de la Commission , au contrôle des très grandes plateformes.
Ø Mieux associer les autorités nationales de régulation des pays d'origine et de destination aux enquêtes de la Commission et au respect des engagements pris par les très grandes plateformes, notamment pour ce qui concerne leur territoire national.