II. LE FONCTIONNEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DE L'ADMINISTRATION

> Ordonnance n° 2020-413 du 8 avril 2020 visant à assurer la continuité de l'exercice des fonctions exécutives locales durant l'état d'urgence sanitaire

Cette ordonnance comprend diverses mesures visant principalement à déroger aux règles de droit commun en cas de vacance de fonctions exécutives ou de sièges au sein des assemblées délibérantes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pendant l'état d'urgence sanitaire et, en ce qui concerne les communes, jusqu'à l'installation des nouveaux conseils municipaux.

L'ordonnance n'est pas applicable aux assemblées délibérantes dont le régime relève de la loi organique, comme l'Assemblée de la Polynésie française, le Congrès de la Nouvelle-Calédonie ou les conseils territoriaux de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, non plus qu'à leur exécutif.

I. Fondement juridique

L'ordonnance est prise sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, qui, « afin (...) d'assurer la continuité du fonctionnement des institutions locales et de l'exercice de leurs compétences ainsi que la continuité budgétaire et financière des collectivités territoriales et des établissements publics locaux », habilite le Gouvernement à prendre, par voie d'ordonnances, toute mesure relevant du domaine de la loi « permettant de déroger (...) aux règles de fonctionnement des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, s'agissant notamment de leurs assemblées délibérantes et de leurs organes exécutifs , y compris en autorisant toute forme de délibération collégiale à distance ».

Les ordonnances correspondantes doivent être prises les trois mois suivant la publication de la loi, un projet de loi de ratification devant être déposé dans un délai de deux mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

Cette base juridique est fragile , notamment en ce qui concerne les règles de remplacement des conseillers départementaux (article 4 de l'ordonnance), qui relèvent du régime électoral des conseils départementaux et non de leurs règles de fonctionnement.

II. Dispositions relatives aux exécutifs territoriaux

A) Dispositions relatives au maire

L'article 1 er concerne les fonctions de maire.

En premier lieu, il dispose qu'à compter du 15 mars 2020, en cas de vacance des fonctions de maire pour quelque cause que ce soit, celles-ci sont provisoirement exercées par un adjoint au maire dans l'ordre du tableau ou des nominations ou, à défaut, par un membre de l'organe délibérant désigné par celui-ci , jusqu'à l'élection ou l'entrée en fonction des maires élus à la suite du renouvellement général des conseils municipaux, c'est-à-dire :

1° Dans les communes où le conseil municipal a été élu au complet dès le premier tour organisé le 15 mars 2020, jusqu'à l'entrée en fonction du nouveau maire 140 ( * ) ;

2° Dans les communes où le premier tour n'a pas été décisif, jusqu'à l'élection du maire suivant le second tour.

Il s'agit de pouvoir désigner un maire « par intérim », sans qu'il soit nécessaire de réunir le conseil municipal pendant la période de confinement et même lorsque le conseil municipal est incomplet. Plusieurs maires « sortants », dont le mandat a été prolongé par la loi d'urgence du 23  mars 2020, ont en effet exprimé le souhait de « passer la main » dans cette période de crise sanitaire.

Bien que l'ordonnance ne l'indique pas expressément, il est ainsi dérogé à plusieurs dispositions de droit commun :

1° Celles qui déterminent l'élu qui exerce les fonctions du maire en cas de cessation des fonctions de celui-ci. La loi distingue deux cas :

- en cas de démission du maire, celui-ci continue en principe l'exercice de ses fonctions jusqu'à l'installation de son successeur (article L. 2122-15 du code général des collectivités territoriales) ;

- « en cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement », c'est-à-dire aussi bien en cas d'empêchement provisoire que dans tous les cas de cessation de fonctions autres que la démission, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations et, à défaut d'adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l'ordre du tableau (article L. 2122-17 du même code). Cette possibilité est écartée par l'article 1 er de l'ordonnance, ce que l'on peut regretter vu la difficulté actuelle de réunir les conseils municipaux (une réunion physique restant, en l'état du droit, indispensable pour l'élection du maire, qui a lieu au scrutin secret) ;

2° Celles qui fixent un délai pour l'élection d'un nouveau maire : l'article L. 2122-14 dudit code dispose en effet que, « lorsque l'élection du maire ou des adjoints est annulée ou que, pour toute autre cause, le maire ou les adjoints ont cessé leurs fonctions, le conseil est convoqué pour procéder au remplacement dans le délai de quinzaine 141 ( * ) . »

En second lieu, l'article 1 er dispose que, dans les communes dont le conseil municipal a été élu au complet lors du premier tour organisé le 15 mars 2020, il est procédé à l'élection du nouveau maire et de ses adjoints lors de sa première réunion du conseil municipal, même si des vacances se produisent après ce premier tour.

Cette dérogation concerne l'hypothèse où des conseillers municipaux démissionneraient juste après leur entrée en fonction, sans assister à la réunion d'installation du conseil municipal.

Sa portée n'est toutefois pas parfaitement claire.

En effet, l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales impose, en principe, que le conseil municipal soit complet pour toute élection du maire ou des adjoints. Avant la convocation du conseil, il est donc procédé aux élections qui peuvent être nécessaires lorsque celui-ci est incomplet.

Toutefois, ce même article dispose que « Si, après les élections, de nouvelles vacances se produisent, le conseil municipal procède néanmoins à l'élection du maire et des adjoints, à moins qu'il n'ait perdu le tiers ou plus de ses membres ou compte moins de cinq membres . » La jurisprudence considère que cette disposition est applicable aux vacances survenant après tout renouvellement intégral du conseil municipal, y compris lorsque ce renouvellement intégral n'a pas été spécialement organisé en vue de l'élection du maire ou des adjoints mais à la date du renouvellement général des conseils municipaux 142 ( * ) .

On pourrait se satisfaire que l'ordonnance étende cette même disposition aux vacances survenues entre le premier tour des élections municipales organisé le 15 mars 2020 et la première réunion des conseils municipaux élus au complet.

Toutefois, tel qu'il est rédigé, le II de l'article 1 er autoriserait un tel conseil municipal à élire le maire et les adjoints quel que soit le nombre de vacances survenues entre ces deux dates, et même si le conseil avait perdu plus du tiers de ses membres ou comptait moins de cinq membres. Une telle faculté paraît tout à fait problématique. Il serait pourtant possible, dans une telle éventualité, de procéder aux élections nécessaires pour compléter le conseil à l'occasion des opérations électorales à un ou deux tours qui, en toute hypothèse, devront avoir lieu dans toutes les autres communes, soit au mois de juin, soit ultérieurement.

B) Dispositions relatives aux autres exécutifs locaux ou présidents d'assemblées délibérantes locales

L'article 2 de l'ordonnance déroge, à compter du 15 mars 2020 et pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire, aux règles de droit commun relatives au remplacement des présidents de conseil départemental ou de conseil régional, du président de la collectivité territoriale de Guyane, du président et des autres membres du conseil exécutif de la collectivité de Corse et de la collectivité territoriale de la Martinique ainsi que des présidents des assemblées délibérantes de ces deux dernières collectivités.

Comme précédemment, l'objectif est d'éviter que les assemblées délibérantes doivent se réunir pour élire un nouveau président.

En ce qui concerne les présidents de conseil départemental ou régional, ainsi que le président de la collectivité territoriale de Guyane , il est prévu qu'en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, leurs fonctions sont provisoirement exercées pour toute la durée de l'état d'urgence sanitaire par un vice-président dans l'ordre des nominations ou, à défaut, par un membre de l'organe délibérant désigné par celui-ci. Il n'est ainsi dérogé qu'à la règle qui impose, dans un tel cas, de procéder au renouvellement de l'ensemble de la commission permanente dans un délai d'un mois .

Les règles applicables au président, aux membres du conseil exécutif
et au président de l'assemblée délibérante de la collectivité de Corse
et la collectivité territoriale de Martinique

En ce qui concerne la collectivité de Corse et la collectivité territoriale de Martinique, qui se caractérisent par une dissociation des fonctions exécutives et de la présidence de l'assemblée délibérante :

- en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, les fonctions de président du conseil exécutif seraient provisoirement exercées, pour toute la durée de l'état d'urgence sanitaire, par un conseiller exécutif choisi dans l'ordre de son élection, alors que le droit commun impose, en Corse, une nouvelle élection du seul président par l'Assemblée de Corse sans délai et, à la Martinique, à une nouvelle élection de l'ensemble du conseil exécutif par l'assemblée de la Martinique dans le délai d'un mois ;

- en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, de sièges autres que celui du président au conseil exécutif, le ou les membres en question ne seraient pas remplacés pendant la même durée, alors que le droit commun prévoit l'élection des remplaçants par l'assemblée délibérante dans le délai d'un mois ;

- en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, des fonctions de président de l'assemblée délibérante, un remplaçant provisoire serait désigné dans les conditions de droit commun (en Corse, il s'agit d'un des membres de la commission permanente choisi dans l'ordre de leur élection, et à la Martinique, d'un vice-président dans l'ordre des nominations ou, à défaut, d'un conseiller désigné par l'assemblée) ; mais il ne serait pas procédé pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire à une nouvelle élection du président ainsi que des autres membres de la commission permanente (en Corse) ou des autres vice-présidents (à la Martinique), comme le prévoit la loi en temps normal (sans fixer de délai en Corse, dans un délai d'un mois à la Martinique) ;

- en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, d'un ou plusieurs sièges de vice-président de l'assemblée de la Martinique, il ne serait pas procédé à une nouvelle élection jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire, alors que le droit commun fixe à cet effet un délai d'un mois. Aucune dérogation de ce type n'est prévue pour le remplacement des membres de la commission permanente de l'Assemblée de Corse autres que le président, ce qui est regrettable.

Dans tous les cas évoqués précédemment, le président de l'organe délibérant ou l'élu exerçant provisoirement les fonctions de président serait tenu de convoquer celui-ci afin de procéder aux élections nécessaires dans le délai d'un mois suivant la fin de l'état d'urgence sanitaire , ou, le cas échéant, suivant l'élection partielle des conseils départementaux 143 ( * ) . On comprend donc que, contrairement à la lettre de l'ordonnance, l'élu exerçant provisoirement les fonctions de président continuerait à les exercer au-delà du terme de l'état d'urgence sanitaire et jusqu'à l'élection de son successeur , afin d'éviter toute vacance de la présidence.

Par ailleurs, les dispositions susmentionnées relatives au remplacement de l'exécutif sont étendues aux groupements de collectivités territoriales 144 ( * ) .

En ce qui concerne les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, ces dispositions ne s'articulent pas avec celles du 4 du VII de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 précitée qui prévoient, qu'« en cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le président est provisoirement remplacé dans les mêmes conditions par un vice-président dans l'ordre des nominations ou, à défaut, par le conseiller communautaire le plus âgé ». Cette règle a été voulue par le législateur pour éviter autant que possible la réunion des conseils communautaires pendant la crise sanitaire, y compris dans le cas, certes improbable, où tous les sièges de vice-président seraient vacants en plus de celui du président. Il est indispensable que le Gouvernement revoie la rédaction de l'ordonnance pour mettre celle-ci en cohérence avec la loi .

C) Dispositions relatives aux incompatibilités

L'article 3 de l'ordonnance assouplit, à titre dérogatoire, les incompatibilités applicables aux élus qui assureront, à titre provisoire, les fonctions d'exécutif d'une collectivité territoriale en application des articles 1 er et 2. Ces dérogations s'appliquent à compter du 15 mars 2020 et jusqu'à l'élection du nouvel exécutif.

À titre d'exemple, un adjoint qui remplacerait temporairement le maire pourrait rester, pendant cette période, président d'un conseil régional ou départemental, par dérogation à l'article L. 2122-4 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

Possibilité ouverte au président par intérim

Articles auxquels il est dérogé

Le maire par intérim
peut rester président du conseil régional ou départemental

L. 2122-4
du CGCT

Le maire par intérim d'une commune de la Nouvelle-Calédonie
peut rester président du gouvernement de la Polynésie française
ou président du conseil régional ou départemental

L.122-4-1
du code des communes
de la Nouvelle-Calédonie

Le président par intérim du conseil départemental peut rester
président du conseil régional ou maire

L. 3122-3
du CGCT

Le président par intérim de la métropole de Lyon peut rester
président du conseil régional ou départemental

L. 3631-8
du CGCT

Le président par intérim du conseil régional peut rester maire, président du conseil départemental ou de la métropole de Lyon

L. 4133-3
du CGCT

Le président par intérim de l'assemblée de Guyane ou de l'assemblée de la Martinique, de même que le président par intérim du conseil exécutif de la collectivité territoriale de la Martinique, peut rester maire (quelle que soit la population de la commune) ou président d'un EPCI à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants

L. 7123-3, L. 7223-4 et L. 7224-4 du CGCT

III. Dispositions relatives aux conseillers départementaux

L'article 4 de l'ordonnance prévoit que, si le siège d'un conseiller départemental devient vacant pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire, sans qu'il soit possible de pourvoir à son remplacement (en appelant à siéger le remplaçant de même sexe élu en même temps que lui à cet effet), il est procédé à une élection partielle dans les quatre mois suivant la fin de l'état d'urgence sanitaire - alors que le droit commun impose que cette élection partielle ait lieu dans le délai de trois mois suivant la vacance.

L'objectif est donc d'éviter d'organiser des élections partielles pendant le confinement.

Dans cette hypothèse, les dispositions du code électoral selon lesquelles il n'est procédé à aucune élection partielle dans les six mois précédant le renouvellement général des conseils départementaux se trouveraient expressément écartées. Pour mémoire, le renouvellement général des conseils départementaux est prévu pour le mois de mars 2021.

IV. Dispositions relatives à l'application dans le temps des délégations de plein droit de compétences des assemblées délibérantes aux exécutifs locaux

Enfin, l'article 5 de l'ordonnance corrige une imprécision relative au champ d'application dans le temps d'une précédente ordonnance. Cette imprécision a d'ailleurs été relevée par la mission de contrôle dans son rapport du 2 avril 2020 145 ( * ) .

Il est ainsi précisé que les dispositions de l'article 1 er de l'ordonnance n° 2020-391 du 1 er avril 2020 146 ( * ) , qui délèguent de plein droit au maire et au président d'un EPCI ou d'un conseil départemental ou régional les compétences susceptibles de lui être déléguées en temps ordinaire par délibération de l'assemblée délibérante, sont applicables à compter du 12 mars 2020 et pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire.

V. Une question non réglée : l'élection du nouveau maire et de ses adjoints

L'ordonnance ne répond pas aux préoccupations de la mission de contrôle de la commission des lois concernant l'élection des nouvelles équipes municipales dans les communes où le conseil municipal a été élu au complet dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 147 ( * ) .

Dans son rapport du 2 avril dernier, la mission de contrôle a souhaité que cette élection soit « la plus rapide possible pour respecter le vote des électeurs et permettre aux nouvelles équipes municipales de commencer à travailler », y compris en cas de prolongation des mesures de confinement. Elle a invité le Gouvernement à examiner toutes les pistes envisageables, y compris l'organisation de la réunion du conseil municipal en tout lieu ainsi que le vote à l'urne, par correspondance ou par voie électronique.

En cette matière, le délai de l'habilitation courait jusqu'au 24 avril 2020 148 ( * ) .

> Ordonnance n° 2020-462 du 22 avril 2020 relative au report du second tour du renouvellement général des conseils municipaux de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie, et à l'établissement de l'aide publique pour 2021

I. L'habilitation à légiférer par ordonnances

La loi d'urgence du 23 mars 2020 a pris en compte les spécificités de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, territoires dans lesquels la situation sanitaire reste, à ce stade, moins dégradée qu'en métropole.

Par rapport au calendrier électoral retenu pour la métropole, les articles 19 et 20 de la loi permettent d' anticiper deux échéances dans ces collectivités territoriales : d'une part, l'entrée en fonction des conseillers municipaux élus dès le premier tour de scrutin et, d'autre part, la date du second tour.

Le Gouvernement est habilité à légiférer par ordonnances, dans un délai d'un mois, pour préciser ces dispositions de la loi d'urgence en prenant « en compte la situation particulière des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie ».

Un projet de loi de ratification doit être déposé devant le Parlement dans un délai d'un mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

Sur ce fondement, l'ordonnance précise la procédure applicable en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie pour l'entrée en fonction des conseillers municipaux et l'organisation du second tour des élections municipales. Elle ne définit pas d'échéances calendaires, qui relèvent du pouvoir règlementaire et dépendront de l'évolution de la situation sanitaire .

Saisis par le Gouvernement, l'Assemblée de la Polynésie française (APF) et le Congrès de Nouvelle-Calédonie 149 ( * ) ont donné un avis favorable à cette ordonnance.

II. L'entrée en fonction des conseillers municipaux lorsque l'assemblée délibérante a été élue au complet dès le premier tour organisé le 15 mars 2020

A) Rappel de la procédure applicable en métropole

La loi d'urgence du 23 mars 2020 a différé l'entrée en fonction des conseillers municipaux élus dès le premier tour , les conditions sanitaires n'étant pas réunies pour organiser la réunion d'installation des assemblées délibérantes.

En métropole, les conseillers municipaux entreront en fonction « à une date fixée par décret au plus tard au mois de juin 2020, aussitôt que la situation sanitaire le permet(tra) au regard de l'analyse du comité de scientifiques ». La première réunion du conseil municipal se tiendra « de plein droit au plus tôt cinq jours et au plus tard dix jours après cette entrée en fonction ».

B) Les adaptations prévues pour la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie

L'ordonnance du 22 avril 2020 prévoit qu'un décret fixe la date d'entrée en fonction des conseillers municipaux de la Polynésie française, d'une part, et de la Nouvelle-Calédonie, d'autre part 150 ( * ) .

Cette date pourra être plus précoce qu'en métropole , en fonction de la situation sanitaire de ces deux collectivités et de l'analyse du comité de scientifiques.

Dans son avis sur l'ordonnance, l'Assemblée de la Polynésie française s'interroge sur la date de la première réunion des conseils municipaux 151 ( * ) .

En l'espèce, il convient de se référer aux dispositions générales de la loi d'urgence du 23 mars 2020 : cette réunion d'installation doit avoir lieu entre cinq et dix jours après l'entrée en fonction des conseillers municipaux . Les recommandations des autorités sanitaires devront être scrupuleusement respectées, notamment en ce qui concerne les gestes « barrières ».

III. L'organisation du second tour des élections municipales

A) Un scrutin qui peut se tenir avant celui de la métropole

La loi d'urgence du 23 mars 2020 autorise le Gouvernement à organiser le second tour des élections municipales en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie de manière anticipée , avant la tenue du scrutin en métropole et au plus tard au mois de juin 2020.

Les électeurs seront convoqués par décret, le Gouvernement devant recueillir deux avis préalables :

- celui du comité de scientifiques ;

- et, selon le cas, celui du président de la Polynésie française ou du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

L'Assemblée de la Polynésie française (APF) s'interroge sur la consultation du comité de scientifiques : « serait-elle adaptée à la situation sanitaire (de la collectivité) ? Comment cette consultation s'opérerait-elle ? Et le cas échéant, est-ce que celle-ci s'opèrerait en lien avec nos autorités sanitaires locales ? L'avis scientifique de ce comité comprendrait-il une partie dédiée spécifiquement à notre situation sanitaire locale ? » 152 ( * ) .

L'APF propose, en conséquence, de consulter les autorités sanitaires locales, en lieu et place du comité de scientifiques placé auprès du Gouvernement.

Cette proposition remettrait toutefois en cause la cohérence des avis du comité de scientifiques, qui se prononce sur les mesures à appliquer sur l'ensemble du territoire national. Il semblerait donc préférable que les autorités sanitaires locales soient consultées par le comité de scientifiques, sans s'y substituer .

B) L'extension des dispositions de l'ordonnance du 1 er avril 2020

L'ordonnance du 22 avril 2020 étend à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie les dispositions d'une autre ordonnance, en date du 1 er avril 2020 153 ( * ) .

Les précisions apportées par les ordonnances des 1 er et 22 avril 2020

- Les candidatures déposées pour le second tour avant le 17 mars 2020 154 ( * ) restent valables. En Polynésie française, 50 déclarations de candidatures bénéficieront de cette simplification administrative 155 ( * ) ;

- Le délai limite pour le dépôt des comptes de campagne est fixé au 10 juillet 2020 pour les listes de candidats uniquement présentes au premier tour et au 11 septembre 2020 pour celles qui participent au second tour ;

- Le plafond des dépenses électorales sera majoré par décret, afin de tenir compte des dépenses supplémentaires induites par le report du second tour. Le coefficient de majoration ne pourra pas être supérieur à 1,5.

C) La gestion des listes électorales

Comme en métropole , les listes électorales de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie sont « gelées » entre le premier et le second tour des élections municipales , sauf pour permettre :

- l'inscription sur les listes électorales des personnes devenues majeures ou ayant acquis la nationalité française avant le second tour ;

- les radiations prononcées sur décision de justice ou pour décès.

L'ordonnance du 22 avril 2020 précise le droit applicable en Nouvelle-Calédonie , dont les listes électorales présentent plusieurs spécificités.

Listes électorales : les spécificités de la Nouvelle-Calédonie

La Nouvelle-Calédonie compte trois listes électorales : la liste électorale générale (corps électoral de droit commun), la liste spéciale provinciale (pour les élections au congrès et aux assemblées de province) et la liste spéciale pour la Consultation (pour les référendums sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté).

En conséquence, la Nouvelle-Calédonie n'est pas rattachée au répertoire électoral unique (REU) géré par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

Les listes électorales sont révisées annuellement par chaque commune, sous le contrôle d'une commission administrative composée du maire, d'un délégué du Haut-commissaire et d'un représentant du tribunal de première instance.

Les demandes d'inscription doivent être déposées avant le 31 décembre de l'année précédant le scrutin 156 ( * ) .

L'ordonnance rappelle que la commission administrative doit réaliser plusieurs opérations, qui relèvent de l'INSEE dans les autres territoires de la République : inscrire les jeunes majeurs sur les listes électorales et procéder aux rectifications nécessaires, notamment lorsque l'électeur ne dispose plus de ses droits civiques.

Les modalités d'application de ce dispositif seront précisées par décret.

> Ordonnance n° 2020-430 du 15 avril 2020 relative à la prise de jours de réduction du temps de travail ou de congés dans la fonction publique de l'État et la fonction publique territoriale au titre de la période d'urgence sanitaire

I. L'habilitation à légiférer par ordonnance

L'article 11 de la loi du 23 mars 2020 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances, dans un délai de trois mois, pour permettre aux employeurs publics et privés d'imposer ou de modifier :

- « les dates de prise d'une partie des congés payés dans la limite de six jours ouvrables » ;

- et « les dates des jours de réduction du temps de travail (et) des jours de repos ».

Un projet de loi de ratification doit être déposé devant le Parlement dans un délai de deux mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

Pour le secteur privé, l'ordonnance a été prise le 25 mars dernier 157 ( * ) .

Le droit applicable dans le secteur privé

Le dispositif, qui s'applique aux salariés du secteur privé jusqu'au 31 décembre 2020 , s'organise autour de deux principes .

1. Dans tous les secteurs, un accord de branche ou d'entreprise peut permettre à l'employeur d' imposer aux salariés de prendre des congés payés , dans la limite de six jours , ou de modifier unilatéralement leur date.

2. L'employeur peut également imposer des jours de repos - qui peuvent être puisés dans le compte épargne-temps (CET) - ou modifier unilatéralement leur date. Ce dispositif est réservé aux situations où « l'intérêt de l'entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19 », sans nécessité de conclure un accord de branche ou d'entreprise .

II. La gestion des agents publics pendant la crise sanitaire

Dès le début de la crise, la direction générale de l'administration et de la fonction publique ( DGAFP ) a publié plusieurs notes pour préciser le droit applicable aux agents publics.

Elle a recommandé aux employeurs d'établir un plan de continuité de l'activité (PCA) en déterminant les services publics indispensables (action sociale, état civil, voirie, eau et assainissement, gestion des déchets, etc .).

Le recours au télétravail doit être privilégié , sauf lorsque les fonctions exercées ne le permettent pas et imposent la présence physique de l'agent. Lorsqu'ils ne peuvent pas assurer leurs fonctions, les agents sont placés en autorisation spéciale d'absence (ASA) , leur traitement indiciaire étant maintenu.

III. Les dispositions prévues par l'ordonnance

Dans ses notes publiées au début de la crise sanitaire, la DGAFP rappelle que « le chef de service a compétence pour organiser le calendrier (des congés) après consultation des fonctionnaires intéressés . Il peut donc à la fois modifier des congés posés et imposer des dates, pour des motifs tirés à l'intérêt du service » 158 ( * ) .

Le Gouvernement a toutefois souhaité prendre une ordonnance pour harmoniser les règles applicables et fixer un « plafond » de jours de RTT ou de congés imposés .

Les jours d'absence dans la fonction publique :
rappel des règles habituelles

Lorsqu'il travaille à temps complet, un agent public bénéficie de 25 jours de congés payés par an, soit l'équivalent de cinq semaines. Il se voit octroyer jusqu'à 2 jours de congés supplémentaires lorsqu'il s'absente en dehors de la période comprise entre le 1 er mai et le 31 octobre.

Lorsqu'il dépasse la durée légale du temps de travail (fixée à 1 607 heures annuelles), l'agent bénéficie de jours de réduction du temps de travail (RTT) .

Son compte épargne-temps (CET) est alimenté par les jours de congés payés 159 ( * ) et de RTT non pris, dans la limite de 60 jours maximum.

Enfin, les autorisations spéciales d'absence (ASA) sont accordées par l'employeur pour des motifs exceptionnels (évènements familiaux, obligations parentales, etc .). Elles sont assimilées à du temps de travail effectif.

L'ordonnance s'applique aux fonctionnaires et agents contractuels de droit public de l'État et des collectivités territoriales ainsi qu'aux magistrats de l'ordre judiciaire .

En sont exclus les agents hospitaliers ainsi que « les agents relevant des régimes d'obligations de service définis par les statuts particuliers de leurs corps ou dans un texte réglementaire relatif à un ou plusieurs corps ». Comme le confirme le Gouvernement, « il s'agit principalement des membres du corps enseignant » 160 ( * ) .

Pour l'exécutif, cette ordonnance s'inscrit dans la gestion de « l'après confinement » , « dans un esprit de solidarité » avec le secteur privé : « une fois la crise passée, aux côtés des salariés du secteur privé placés comme eux en situation de confinement, les agents publics auront un rôle important à jouer pour relancer l'activité dans notre pays et cela nécessitera la mobilisation et l'implication de l'ensemble des agents » 161 ( * ) .

A) La gestion des congés dans la fonction publique de l'État

S'agissant de la fonction publique de l'État, l'ordonnance distingue deux cas de figure : les agents placés en autorisation spéciale d'absence (ASA) et ceux qui exercent leurs fonctions en télétravail.

1. Les agents en ASA : 10 jours de RTT ou de congés imposés

Les agents placés en ASA depuis le 16 mars 2020 doivent prendre jusqu'à 10 jours de RTT ou de congés payés , y compris lorsqu'ils ont repris leurs fonctions avant la fin de l'état d'urgence sanitaire (prévue pour le 24 mai 2020). Il s'agit d'un dispositif obligatoire, qui s'applique à tous les agents de l'État .

Ces 10 jours se décomposent de la manière suivante :

- 5 jours de RTT à imputer entre le 16 mars (début du confinement) et le 16 avril 2020 (date d'entrée en vigueur de l'ordonnance), cette disposition comportant un effet rétroactif ;

- 5 jours de RTT ou de congés annuels 162 ( * ) à imputer entre le 17 avril 2020 et la reprise de l'activité ou la fin de l'état d'urgence sanitaire .

Cette date « butoir » peut soulever des difficultés : l'agent devra poser le même nombre de congés, qu'il reprenne son activité à la fin de l'état d'urgence sanitaire (prévue, sauf prorogation autorisée par le Parlement, pour le 23 mai 2020) ou bien avant (le 24 avril par exemple).

Si les agents ont moins de 5 jours de RTT « en stock », ils doivent prendre les jours de RTT dont ils disposent, puis, entre le 17 avril 2020 et la reprise de l'activité ou la fin du confinement, jusqu'à 6 jours de congés payés . À titre d'exemple, « une personne qui serait en autorisation d'absence tout au long de la période et qui ne disposerait que de trois jours de réduction du temps de travail serait conduite à poser ces trois jours de réduction du temps de travail et à poser, en complément, six jours de congés annuels » 163 ( * ) .

Agents de l'État placés en ASA :
les RTT et congés imposés (dispositif obligatoire)

Source : commission des lois du Sénat.

2. Les agents en télétravail : la possibilité d'imposer 5 jours de RTT ou de congés

Pour les agents placés en télétravail entre le 17 avril 2020 et la reprise de l'activité ou la fin de l'état d'urgence sanitaire, le chef de service peut imposer jusqu'à 5 jours de RTT ou, à défaut, de congés payés .

Contrairement au dispositif précédent, il s'agit d'un dispositif facultatif , en fonction des nécessités de service. Non rétroactif , il ne couvre pas la période antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance.

Agents de l'État placés en télétravail
(dispositif facultatif)

Source : commission des lois du Sénat.

3. Les règles communes

Contrairement au secteur privé, l'ordonnance ne prévoit pas de saisine des instances de dialogue social pour imposer des jours de RTT ou de congés aux agents publics .

Cette saisine reste toutefois possible, sur décision de l'employeur . Il est rappelé que les instances de dialogue social peuvent délibérer par visioconférence jusqu'au 24 juin 2020, en application de l'ordonnance n° 2020-347 du 27 mars 2020 164 ( * ) .

Les jours de RTT et de congés imposés peuvent s'imputer sur le compte épargne-temps (CET) de l'agent ou sur les jours qu'il a volontairement pris depuis le début du confinement .

Le chef de service doit respecter un délai de prévenance d'au moins un jour franc avant d'imposer un jour de RTT ou de congés.

Il peut également réduire le nombre de jours imposés pour « tenir compte » des congés maladie pris pendant l'état d'urgence sanitaire. Cette disposition mériterait toutefois d'être précisée afin de mieux identifier la marge de manoeuvre laissée au chef de service mais également de mieux garantir les droits des agents .

Enfin, l'ordonnance prévoit un dispositif spécifique pour les agents qui, au cours de la période, ont été à la fois en ASA, en télétravail et en activité présentielle . Le nombre de jours de RTT ou de congés imposés est proratisé en fonction du nombre de jours accomplis en ASA et en télétravail. Là encore, des éclaircissements paraissent nécessaires pour mieux comprendre la mise en oeuvre du dispositif, notamment à partir d'exemples concrets.

B) La gestion des congés dans la fonction publique territoriale

Les employeurs territoriaux peuvent, sur la base du volontariat, appliquer les dispositifs de l'ordonnance du 15 avril 2020 .

Il s'agit d'un dispositif facultatif, et non obligatoire, applicable aux agents placés en autorisation spéciale d'absence ou en télétravail. La décision est prise par l'autorité territoriale (le maire par exemple), sans saisir l'assemblée délibérante .

Le nombre de jours de RTT ou de congés imposés peut être modulé par les employeurs, dans la limite des plafonds fixés par l'ordonnance . La consultation des instances de dialogue social reste possible, à la discrétion de l'autorité territoriale.

IV. Des dispositifs contestés

Les dispositifs adoptés par le Gouvernement ne suscitent pas la pleine adhésion des représentants des agents comme des employeurs publics concernés.

Interrogés par les rapporteurs de la mission de suivi, les syndicats représentés au conseil commun de la fonction publique se sont montrés fermement opposés à cette ordonnance . Ils ont rappelé que le confinement reste une mesure subie par les agents publics, non un choix, et que l'ordonnance risque de diviser les agents dans une période de crise sanitaire. La CFDT a d'ailleurs saisi le juge administratif, par la voie du référé.

De même, au cours des auditions, les représentants des employeurs territoriaux ont rappelé qu'ils n'avaient pas sollicité la publication de cette ordonnance , le chef de service pouvant déjà imposer des jours de congés à ses agents. Ils ont également insisté sur l'importance du dialogue social dans la mise en oeuvre de ce dispositif.

> Décret n° 2020-437 du 16 avril 2020 pris pour l'application des articles 5 et 6 de l'ordonnance n° 2020-351 du 27 mars 2020 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19

I. La base juridique et le périmètre du décret

Ce décret a été pris en application de l'ordonnance du 27 mars 2020 165 ( * ) , qui vise à assurer la continuité des recrutements dans les trois versants de la fonction publique . Il concerne les concours mais également les examens professionnels et, de manière plus marginale, le recrutement d'agents contractuels.

Il est accompagné de lignes directrices , publiées par la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) pour préciser certains points concrets et donner des conseils aux organisateurs de concours 166 ( * ) .

En pratique, les épreuves sont suspendues depuis le 12 mars 2020, les organisateurs espérant pouvoir les reprendre d'ici juin prochain.

Le décret et ses lignes directrices s'appliquent aux concours ou examens en cours ou ouverts entre le 12 mars et le 31 décembre 2020. Ils répondent aux interrogations de la mission de suivi , qui souhaitait que les organisateurs de concours bénéficient « de davantage de visibilité sur les possibilités qui leur sont offertes, notamment en ce qui concerne les visioconférences » 167 ( * ) .

Ces textes couvrent les expérimentations prévues par la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique pour faciliter l'insertion des agents handicapés et permettant aux employeurs de :

- titulariser un apprenti en situation de handicap à l'issue de son contrat d'apprentissage ;

- détacher un agent handicapé sur un emploi d'un corps ou cadre d'emplois de niveau supérieur.

Neuf mois après la publication de la loi de transformation de la fonction publique, ces deux dispositifs restent toutefois inapplicables , le Gouvernement n'ayant pas publié les décrets d'application correspondants.

II. Le contenu des épreuves

L'ordonnance du 27 mars 2020 prévoit une palette très large pour assurer la continuité des recrutements pendant la crise sanitaire. D'une manière générale, elle permet d' adapter les concours et examens d'accès à la fonction publique, « notamment s'agissant du nombre et du contenu des épreuves » .

Ce chantier d'adaptation s'annonce à la fois long et complexe : la modification des voies d'accès à la fonction publique relève du pouvoir règlementaire, non des organisateurs de concours. Plusieurs décrets sont par exemple nécessaires pour adapter, au cas par cas, les concours de la fonction publique territoriale.

Dans cette perspective, le Gouvernement a toutefois fixé des principes communs , qui guideront ce travail d'adaptation.

Il envisage de modifier « la nature des épreuves (admissibilités ou admission), (...) la forme des épreuves (écrites, pratiques, sur dossier, orales) mais également (...) la durée et le libellé des attendus de l'épreuve » 168 ( * ) .

Plusieurs exemples sont donnés :

- la suppression des épreuves jugées les moins essentielles pour l'exercice des fonctions, comme par exemple les épreuves de langue étrangère ;

- la fusion de deux épreuves ;

- l'augmentation de la durée des entretiens oraux avec le jury, « que l'on peut estimer au maximum à un tiers du temps initialement imparti ».

Pour les concours sur titres, l'épreuve orale pourrait être supprimée, les capacités du candidat étant examinées au regard de son dossier et des diplômes présentés.

Malgré la grande marge de manoeuvre laissée par l'ordonnance du 27 mars 2020 , le Gouvernement préconise d'éviter « la modification substantielle du contenu d'une épreuve » . Le juge administratif considère, en effet, que de telles modifications peuvent méconnaître la sécurité juridique des candidats , en particulier lorsqu'ils ne disposent pas d'un délai raisonnable pour s'y adapter 169 ( * ) .

Les candidats devront être prévenus des modifications opérées dans un délai d'au moins deux semaines avant le début des épreuves. Ce délai de prévenance sera toutefois augmenté si l'ampleur de ces modifications le justifie.

D'après Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, il n'est à ce stade pas prévu de modifier le calendrier ou le contenu des concours d'entrée à l'École nationale d'administration (ENA) .

III. L'organisation matérielle des concours et examens

L'organisation matérielle des concours et examens relève des autorités organisatrices, dans le respect des principes généraux fixés par le pouvoir règlementaire.

Le décret du 16 avril 2020 précise les conditions d'utilisation de la visioconférence pour l'organisation des épreuves , en s'appuyant sur un dispositif qui existe déjà pour la fonction publique de l'État 170 ( * ) .

La visioconférence est également étendue au recrutement, par voie contractuelle, sur les emplois de direction de l'État 171 ( * ) . On peut d'ailleurs s'étonner que cette possibilité ne soit pas ouverte aux employeurs territoriaux et hospitaliers.

Recours à la visioconférence :
les garanties à respecter en vertu du décret

- Garantir une égalité de traitement entre l'ensemble des candidats ;

- Permettre le contrôle de l'identité des candidats ;

- Prévoir une assistance technique pendant toute la durée de l'épreuve ;

- Assurer une transmission de la voix et de l'image en temps simultané ;

- Garantir la sécurité et la confidentialité des données transmises ;

- Prévoir un dispositif adapté pour les candidats en situation de handicap.

Deux cas de figure sont possibles concernant l'organisation de l'épreuve :

- le candidat est accueilli dans un local administratif ou mis à disposition par l'administration, un surveillant s'assurant du respect des consignes ;

- le candidat se situe dans un autre local, par exemple à son domicile .

Dans cette dernière hypothèse, l'organisateur du concours doit mettre en oeuvre une solution technique « permettant une prévention effective de la lutte contre la fraude, y compris par tout moyen électronique ou numérique » 172 ( * ) .

Le Gouvernement recommande plusieurs solutions techniques (plateforme sécurisée, télésurveillance, etc .) et précise les coordonnées de six entreprises spécialisées. Ces dispositifs étant très spécifiques et coûteux, il aurait sans doute été préférable que la direction interministérielle du numérique (DINUM) de l'État développe des solutions en interne , qui auraient pu être mises à la disposition des employeurs territoriaux et hospitaliers.

Les solutions techniques recommandées par le Gouvernement 173 ( * )

Lorsque le candidat participe à une épreuve écrite depuis son domicile, « un dispositif spécifique doit être mis en place pour offrir l'accès à une plateforme sécurisée permettant l'accès aux documents, la saisie de la composition, le blocage et/ou le contrôle de l'activité sur le matériel du candidat, le décompte du temps , etc. ».

D'une manière générale, « la possibilité de recourir à une solution de télésurveillance peut être examinée selon les garanties à mettre en place : télésurveillance à double prise de vue ( webcam de l'ordinateur du candidat, smartphone placé à distance pour surveiller l'activité de la pièce), capture audio et vidéo, surveillance à distance en temps réel ou posteriori, surveillance humaine ou automatisée, surveillance en régie ou déléguée, niveau d'échantillonnage des contrôles, volume de candidats en surveillance simultanée, mode de détection et de signalement de suspicions de fraude, etc . ».

IV. Les délibérations du jury

Les jurys de concours sont autorisés à délibérer par visioconférence ou audioconférence, voire par « messagerie instantanée électronique sécurisée ou, à défaut, (par) correspondance électronique sécurisée » 174 ( * ) .

Le Gouvernement rappelle que « le principe d'unicité du jury interdit d'en modifier la composition » après le début de la première épreuve 175 ( * ) . L'organisateur peut toutefois faire appel à des examinateurs spécialisés , comme le prévoit déjà l'article 20 de la loi du 11 janvier 1984 176 ( * ) . Ces derniers corrigent les épreuves pour lesquelles ils ont été désignés et participent aux délibérations du jury avec une voix consultative.


* 140 Conformément à la loi d'urgence du 23 mars 2020, les nouveaux conseillers municipaux entreront en fonction à une date prévue par décret, au plus tard en juin 2020 et aussitôt que la situation sanitaire le permettra. La réunion d'installation du conseil municipal se tiendra, « de plein droit, au plus tôt cinq jours et au plus tard dix jours après cette entrée en fonction ». Cette réunion ne sera pas nécessaire dans les communes qui ont déjà élu un maire et ses adjoints entre le vendredi 20 et le dimanche 22 mars 2020.

* 141 Seule la dérogation à cet article L. 2122-14 est expressément mentionnée à l'article 1 er de l'ordonnance.

* 142 Conseil d'État, 19 janvier 1990, Élections du Moule, n° 108778.

* 143 À ce sujet, voir le commentaire de l'article 4 ci-après.

* 144 Toutefois, la disposition imposant au remplaçant provisoire de convoquer le conseil aux fins d'élire le nouveau président dans le délai d'un mois suivant la cessation de l'état d'urgence sanitaire n'est pas applicable aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, qui font l'objet de règles spécifiques liées au report du second tour des élections municipales et communautaires.

* 145 « 10 premiers jours d'état d'urgence sanitaire : premiers constats. Analyse des décrets et ordonnances (justice, intérieur, collectivités territoriales, fonction publique) », 2 avril 2020.

* 146 Ordonnance n° 2020-391 du 1 er avril 2020 visant à assurer la continuité du fonctionnement des institutions locales et de l'exercice des compétences des collectivités territoriales et des établissements publics locaux afin de faire face à l'épidémie de covid-19.

* 147 La date d'entrée en fonction des nouvelles équipes municipales doit être fixée par décret, au plus tard en juin 2020 et aussitôt que la situation sanitaire le permettra (article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 précitée).

* 148 Article 20 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 précitée.

* 149 En application de l ' article 9 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d ' autonomie de la Polynésie française et de l ' article 90 de la loi n° 99-209 organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

* 150 Le Gouvernement pouvant également définir un calendrier spécifique pour chacun de ces deux territoires.

* 151 Avis n° 2020-1 A/APF du 17 avril 2020 sur le projet d'ordonnance.

* 152 Rapport fait par Yves Ching et Philip Schyle au nom de l'Assemblée de la Polynésie française, 15 avril 2020.

* 153 Ordonnance n° 2020-390 du 1 er avril 2020 relative au report du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers de la métropole de Lyon de 2020 et à l'établissement de l'aide publique pour 2021.

* 154 Soit le délai initialement prévu par le code électoral concernant le dépôt des candidatures pour le second tour des élections municipales.

* 155 Rapport précité, fait par Yves Ching et Philip Schyle.

* 156 Alors que, dans les autres territoires de la République, un électeur peut s'inscrire sur les listes électorales jusqu'au sixième vendredi précédant le scrutin.

* 157 Ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos.

* 158 DGAFP, fiche « Covid-19. Congés ».

* 159 L'agent doit prendre, au minimum, 20 jours de congés payés par an. Sur un total de 25 jours de congés, seuls 5 jours peuvent donc être versés au compte épargne-temps (CET).

* 160 Source : rapport du Gouvernement au Président de la République sur cette ordonnance.

* 161 Source : rapport du Gouvernement au Président de la République sur cette ordonnance.

* 162 Ces jours de congés imposés ne sont pas pris en compte dans le calcul des congés supplémentaires, prévus lorsque l'agent s'absente en dehors de la période comprise entre le 1 er mai et le 31 octobre (voir supra ).

* 163 Source : rapport du Gouvernement au Président de la République sur cette ordonnance.

* 164 Ordonnance n° 2020-347 adaptant le droit applicable au fonctionnement des établissements publics et des instances collégiales administratives pendant l'état d'urgence sanitaire.

* 165 Ordonnance n° 2020-351 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19.

* 166 Ces lignes directrices sont consultables à l'adresse suivante :

www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/covid-19/LD_adaptations_modalites_concours_20200417_VF.pdf

* 167 « 10 premiers jours d'état d'urgence sanitaire : premiers constats. Analyse des décrets et ordonnances (justice, intérieur, collectivités territoriales, fonction publique) », 2 avril 2020.

* 168 Lignes directrices précitées, p. 2.

* 169 Conseil d'État, 25 juin 2007, Syndicats CFDT du ministère des affaires étrangères, affaire n° 304888.

* 170 Décret n° 2017-1748 du 22 décembre 2017 fixant les conditions de recours à la visioconférence pour l'organisation des voies d'accès à la fonction publique de l'État.

* 171 Procédure de recrutement qui nécessite l'organisation d'un entretien avec un jury de sélection, en application du décret n° 2019-1594 du 31 décembre 2019 relatif aux emplois de direction de l'État.

* 172 Article 13 du décret du 16 avril 2020 précité.

* 173 Source : lignes directrices publiées par la DGAFP, p. 11.

* 174 Article 13 du décret du 16 avril 2020 précité.

* 175 Source : lignes directrices publiées par la DGAFP, p. 11.

* 176 Loi n° 84-16 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page