B. LA SAGA DES ÉCONOMIES ET DE LA RÉCUPÉRATION D'ÉNERGIE :
La meilleure énergie est celle que l'on n'utilise pas. Tout un chacun partage ce constat, mais l'économie d'énergie reste systématiquement traitée à part. Ainsi, le « paquet énergie climat 2020 » mentionne trois objectifs complémentaires mais distincts : réduire de 20 % la consommation d'énergie à l'horizon 2020 par rapport à ce qu'elle était trente ans plus tôt, porter à 20 % la part des ENR dans la production énergétique des États membres, diminuer de 20 % les émissions de gaz à effet de serre. En raisonnant toutes choses égales par ailleurs, ces objectifs signifient que les sources non renouvelables d'énergie doivent passer d'un indice 100 à un indice 64 (80 % de 80 %), soit une réduction de 36 % qui se décompose en 20 % d'énergie économisée et en 16% (20 % de 80 %) d'énergie renouvelable. Pour apprécier de façon complète l'évolution observée entre deux dates, il est conceptuellement nécessaire d'additionner l'évolution des énergies renouvelables et la moindre intensité énergétique de l'économie : la symétrie apparente des trois objectifs à 20 % chacun masque en fait une réduction presque double appliquée aux sources non renouvelables d'énergie est un objectif d'ENR moins ambitieux qu'il n'y paraît au premier abord. Tout cela justifie amplement que la coopération énergétique franco-allemande accorde une importance accrue aux économies d'énergie (1).
Ce thème est d'autant plus important que l'évolution technique est extrêmement prometteuse dans le domaine de la récupération d'énergie perdue. L'exemple le plus connu concerne à ce jour les récupérateurs d'énergie lors du freinage de véhicules électriques ou hybrides. Bien que les dispositifs en cause constituent techniquement des générateurs d'énergie, leur incidence est identique à celle procurée par une économie, puisque le besoin en apport énergétique est réduit : peu importe que la consommation en carburant d'un véhicule hybride soit diminuée grâce à une nouvelle conception mécanique ou parce que le freinage recharge les batteries. La coopération énergétique franco-allemande restera donc bancale, même en matière de recherche, si elle ignore le thème encore balbutiant mais prometteur de la récupération d'énergie (2).
1. Les économies d'énergie, un chantier majeur toujours en cours
Les deux principaux secteurs d'application sont l'habitat (a) et les transports (b).
a) L'habitat.
L'économie d'énergie est relativement simple pour l'habitat nouveau, d'où l'application aux constructions nouvelles de normes à l'exigence rapidement croissante.
La rénovation est une tâche techniquement plus ardue et bien plus difficile à rentabiliser sur le plan économique. En ce domaine, les pratiques française et allemande présentent de notables différences. Ainsi, les techniques d'isolation du bâti existant privilégient la partie intérieure des murs en France, alors que l'isolation extérieure est préférée outre-Rhin. D'après l'ADEME, le chauffage des bâtiments représente 65 % de la consommation totale d'énergie des logements principaux en France. Il est donc pertinent de mettre en commun les moyens d'expertise permettant d'élaborer la meilleure stratégie, dont rien n'exclut au demeurant qu'elle soit variable selon le climat.
b) Dans les transports.
Le remplacement rapide des véhicules est indispensable à l'utilisation des dernières techniques. En pratique, cela signifie que le financement des transports publics doit mettre l'accent sur le renouvellement du parc, la pratique de l'autopartage devant permettre aux urbains d'utiliser en permanence des motorisations offrant un bilan énergétique conforme aux dernières techniques opérationnelles, qu'il s'agisse d'utiliser peu d'énergie ou de récupérer celle gaspillée. Cette dernière solution constitue sans doute la voie la plus innovante pour diminuer l'énergie fournie au secteur des transports.
2. La récupération d'énergie : une activité encore balbutiante
Bien que la récupération d'énergie soit conceptuellement distincte de l'efficacité énergétique procurée par un moteur au rendement accru ou par une meilleure isolation thermique, le résultat est comparable, dès lors que l'énergie récupérée est immédiatement utilisée ou stockée.
Les seuls exemples actuels proviennent des transports utilisant un moteur électrique, de manière exclusive ou accessoire (charge d'un supercondensateur, microturbines actionnées par un fluide bouillant à 15°C). Les derniers résultats obtenus grâce à l'emploi de microturbines permettent de réduire la consommation de 10 % environ, un résultat d'autant plus prometteur que le secteur des transports absorbe actuellement 32 % de la consommation d'énergie en France d'après l'ADEME. En outre, la récupération de la chaleur aujourd'hui dispersée peut avoir de nombreuses applications dans l'habitat et les industries, fournissant une électricité gratuite.
La coopération énergétique entre la France et l'Allemagne ne devrait pas se désintéresser de la récupération d'énergie perdue jusqu'à présent : cette mine à ciel ouvert ouvre un vaste champ d'exploration scientifique et technique.
Ni la France, ni l'Allemagne, ni les autres grands consommateurs européens d'énergie - Grande-Bretagne et Pologne en tête - ne peuvent sérieusement envisager à échéance prévisible le recours exclusif à des sources renouvelables d'énergie, car les techniques de production ne sont pas suffisamment matures. Elles sont donc encore trop évolutives pour que l'on puisse déterminer aujourd'hui les investissements à réaliser en disposant d'une protection raisonnable contre l'obsolescence.
Mais savoir où aller n'est que le premier des deux volets techniques : il faut également connaître le bon dimensionnement des installations. C'est tout l'enjeu du diptyque associant stockage et réseau.