B. DES GAINS D'EFFICIENCE NON EXPLOITÉS

1. La nécessité de mieux intégrer les contraintes normatives
a) Le « poids » croissant des normes

A l'instar des collectivités territoriales, les établissements publics de santé doivent se conformer à des obligations normatives croissantes. Ces obligations regroupent à la fois des normes générales, telles que les normes de sécurité-incendie ou les normes énergétiques issues du Grenelle de l'environnement, ainsi que des normes spécifiques aux activités médico-chirurgicales accueillies dans les bâtiments hospitaliers.

La Cour des comptes souligne le « défi technique, organisationnel et surtout financier » que représente la mise en conformité pour les CHU . De plus, certaines normes générales peuvent parfois entrer en conflit avec des normes spécifiques au milieu hospitalier.

b) Des conséquences organisationnelles et financières mal prises en compte

L'impact organisationnel et financier des différentes contraintes normatives n'est pas suffisamment pris en compte par les CHU. Au regard de l'ampleur des travaux que les mises aux normes nécessitent, il apparaît indispensable de mieux anticiper ce type de travaux et de les intégrer dans les schémas directeurs immobiliers des établissements.

L'absence de prise en compte, en amont, des contraintes normatives aboutit à l'absence d'évaluation de l'incidence financière des mises aux normes. Les seules données disponibles relatives au coût de mise aux normes au niveau national concernent les mises aux normes exceptionnelles liées à l'amiante, qui se sont élevés à 1 350 millions d'euros pour les CHU de Clermont-Ferrand, Caen, Fort-de-France et Pointe-à-Pitre.

Votre rapporteur spécial se joint ici à la Cour des comptes pour recommander l'intégration, dans les schémas directeurs immobiliers des CHU, des opérations de mise en conformité .

2. Une participation marginale de la politique immobilière à la reconfiguration de l'offre de soins
a) L'efficience, une préoccupation secondaire des investissements immobiliers hospitaliers

L'édition 2012 du panorama des établissements de santé, réalisé par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) 14 ( * ) , souligne l'amélioration de l'efficience des établissements publics de santé entre 2003 et 2009, notamment sous l'effet de la mise en place de la tarification à l'activité (T2A).

Cependant, la Cour des comptes déplore le fait que les investissements immobiliers conséquents réalisés dans le cadre des plans Hôpital 2007 et Hôpital 2012 n'aient pas suffisamment recherché une meilleure efficience dans l'organisation des soins.

La Cour des comptes insiste en particulier sur la nécessité de passer d'une gestion purement technique à une gestion médico-économique , consistant à prendre en compte le rapport coût-efficacité de l'organisation des soins ainsi que son impact budgétaire.

b) La progression des surfaces et des capacités d'hospitalisation

Les investissements immobiliers réalisés dans les CHU ces dernières années ont pour la plupart conduit à une augmentation des surfaces ( + 33 % en moyenne entre 2001 et 2012 ) et de l'offre globale d'hospitalisation . L'exemple du CHR d'Orléans est éloquent : la construction du nouvel hôpital, devant regrouper les services déjà situés sur le site et ceux installés en centre-ville, a entraîné une hausse de près d'un tiers des surfaces.

La Cour des comptes identifie trois principaux facteurs expliquant cette situation :

- dans de nombreux CHU, le souci d'améliorer le confort hôtelier des patients s'est généralement traduit par une augmentation des surfaces plutôt que par une réduction du nombre de lits ;

- l' hospitalisation ambulatoire , qui recouvre l'hospitalisation de moins de douze heures sans hébergement de nuit, est relativement peu pratiquée dans les CHU ( 22 % de leur activité ) contrairement au secteur privé (70 %). Un objectif de la moitié des gestes chirurgicaux pratiqués en ambulatoire d'ici 2016 a pourtant été fixé par le ministère chargé de la santé ;

- les rationalisations de l'implantation immobilière , conformément au principe de pôles d'activités, créés par la loi HPST, sont encore limitées . La réorganisation des activités médico-techniques selon une logique de regroupement en plateaux pluridisciplinaires implique des réaménagements immobiliers lourds et coûteux, qui freinent leur mise en oeuvre. La Cour des comptes a même observé, dans certains CHU, une augmentation du nombre de blocs opératoires. S'agissant des fonctions logistiques , traditionnellement éclatées, les expériences de mutualisation sont encore rares. Il convient toutefois de noter la mise en service par l'AP-HM en avril 2013 d'une plate-forme regroupant la majorité de ses fonctions logistiques (fournitures et consommables, restauration, blanchisserie et stérilisation).

Face à ces constats, la Cour des comptes recommande de « conditionner strictement les aides à l'investissement hospitalier à des diminutions de capacité, à des réductions de surface et à des gains de productivité précisément documentés ».

Cette recommandation est cohérente avec les objectifs de développement de la médecine ambulatoire et de diminution de la durée des séjours hospitaliers. Toutefois, votre rapporteur spécial estime qu'un tel principe de réduction des surfaces et de diminution des capacités ne peut être appliqué de façon systématique . Une appréciation au cas par cas, projet par projet demeure préférable.


* 14 DREES, Panorama des établissements de santé, édition 2012.

Page mise à jour le

Partager cette page