3. Un marché dominé par quelques géants où les PME ne parviennent pas à une « masse critique »

Le paysage vidéoludique français, hormis quelques grosses structures comme Ubisoft ou Ankama, est surtout composé de TPE et de PME. Celles-ci présentent des caractéristiques qui sont en phase avec les qualités requises dans le secteur : rapidité de réaction, créativité et inventivité, ou encore la souplesse d'exécution.

Majoritaire en nombre, ce type d'entreprises n'est pas cependant celui qui crée le plus de valeur, captée par les plus importantes, qui possèdent une véritable force de frappe matérielle et financière. Tout l'enjeu pour le dynamisme du secteur est de parvenir, pour cette myriade de TPE et PME, à une « masse critique » assurant leur pérennisation et leur permettant de nourrir des prétentions à l'international .

Le modèle économique de l'industrie du jeu vidéo explique ce paysage très contrasté. Ainsi que le souligne Valérie Bourgouin, chef du service « jeu vidéo et création numérique » au CNC 37 ( * ) , « à chaque nouvelle console, les investissements nécessaires en recherche et développement sont plus longs, les équipes plus importantes. Cette production est donc de plus en plus concentrée : les éditeurs axes leurs investissements sur des licences à succès, assurent la fabrication en maîtrisant toute la chaîne de fabrication, conservent les droits d'exploitation et laissent peu de place à la création indépendante ».

L'évolution de la distribution, qui passe de plus en plus par des plateformes dématérialisées, pourrait permettre de faire évoluer les choses . Dans le modèle de commercialisation traditionnel, en magasin, c'est l'éditeur qui finance, et capte l'ensemble des droits de propriété. Dans le modèle de la distribution digitalisée, des studios indépendants, qui ne sont plus contraints de passer par un éditeur, peuvent accéder au marché tout en conservant la valeur patrimoniale de leurs productions.

« Cela permet à de plus petites structures de développer des jeux très créatifs, dans des économies moins ambitieuses, tout en conservant la majorité des recettes sur les ventes », observe Valérie Bourgoin. Avec à la clef, si le produit est de qualité et rencontre l'intérêt du public, des succès commerciaux et une profitabilité renforcée qui peuvent contribuer au développement de petites sociétés.

Les petits studios indépendants sont aujourd'hui engagées dans une démarche consistant à se positionner comme des producteurs à part entière, autour de projets qu'ils initient et qu'ils portent entièrement, susceptibles de créer de la valeur catalogue. Le problème, dans ce schéma, viendra davantage - et paradoxalement - de la difficulté à obtenir de la visibilité : « le jeu vidéo n'est plus un objet rare, bien au contraire », poursuit la chef de service au CNC, « on y trouve pléthore d'offres, gratuites ou payantes, à l'acte, dans le jeu ou par abonnement, sur toutes les plateformes ».


* 37 Les dispositions françaises en faveur du jeu vidéo , article de Valérie Bourgoin paru dans la revue Géoéconomie, automne-hiver 2012.

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