C. LE FICHIER POSITIF DANS LES DÉBATS PARLEMENTAIRES RÉCENTS
1. La discussion du projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs (octobre et décembre 2011)
La discussion en première lecture du projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs 29 ( * ) a eu lieu dans les mois qui ont suivi la remise du rapport du comité Constans : octobre 2011 à l'Assemblée nationale et décembre 2011 au Sénat.
Au Sénat, lors des débats en séance, trois amendements proposant la création d'un répertoire national recensant les crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels ont été discutés, avec une divergence selon que la consultation du répertoire était effectuée par le prêteur ou par l'emprunteur. Ces amendements n'ont pas été adoptés.
Compte tenu de l' absence de consensus au sein du Sénat sur le principe même du répertoire , de la complexité du sujet comme des incertitudes juridiques, techniques et financières qui l'entouraient, vos rapporteurs Alain Fauconnier et Nicole Bonnefoy, respectivement rapporteur au fond et rapporteur pour avis de ce projet de loi, ont proposé la mise en place d'un groupe de travail sénatorial pour clarifier le sujet, sur la base notamment des travaux du comité Constans. Le présent rapport conclut les travaux de votre groupe de travail consacré au répertoire national des crédits aux particuliers.
Des amendements similaires avaient été discutés à l'Assemblée nationale, sur le même projet de loi, connaissant un sort identique.
A l'Assemblée nationale comme au Sénat, le Gouvernement a émis un avis défavorable à ces amendements, s'interrogeant sur l'efficacité du répertoire pour prévenir de manière efficace le surendettement, s'appuyant notamment sur la question du respect des libertés publiques en cas de constitution d'un fichier de plus de 25 millions de personnes et arguant de la nécessité, pour ce motif, de poursuivre la réflexion. La lettre adressée par la CNIL au ministre de l'économie en septembre 2011, faisant part des réticences de la Commission quant au fichier, a conduit M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État chargé de la consommation, à préciser, dans le cadre des débats à l'Assemblée nationale, que « le Gouvernement ne peut pas, aujourd'hui, être favorable à un amendement qui met en place le fichier positif tant que la question de la protection des libertés publiques n'est pas réglée ». Il a toutefois ajouté que le Gouvernement « sera favorable à l'adoption du fichier positif avant la fin de la législature si cette protection est assurée » 30 ( * ) .
2. Le rejet par l'Assemblée nationale d'une proposition de loi tendant à prévenir le surendettement (janvier 2012)
En janvier 2012, l'Assemblée nationale a rejeté une proposition de loi, présentée par notre collègue député Jean-Christophe Lagarde et les membres du groupe Nouveau Centre, tendant à prévenir le surendettement 31 ( * ) . Ce texte proposait de créer un répertoire national recensant les crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels, géré par la Banque de France et soumis à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Les établissements de crédit ne pouvaient consulter ce répertoire qu'afin de vérifier la solvabilité d'un emprunteur, sans caractère obligatoire. Ils devaient aussi supporter les frais de création et de gestion du répertoire.
Notre collègue député Jean Dionis du Séjour, rapporteur de la proposition de loi, a indiqué lors des débats que la création d'un répertoire national des crédits aux particuliers avait pour objectif principal la prévention du surendettement et un objectif second, l'accès d'un plus grand nombre de personnes à un crédit raisonné, arguant du fait « qu'avec 40 % de nos concitoyens exclus du crédit bancaire, [la France tenait], en la matière un triste record » 32 ( * ) .
Lors des débats, le Gouvernement a indiqué que des interrogations tant techniques que juridiques (choix de l'identifiant, protection des libertés publiques et proportionnalité) et des arguments de coûts militaient pour une poursuite de la réflexion sur le fichier positif.
3. Le débat au Sénat sur le crédit à la consommation et le surendettement (novembre 2012)
Le Sénat a débattu en séance le 19 novembre 2012 sur le crédit à la consommation et le surendettement, à l'initiative de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois, sur la base du rapport de cette dernière sur l'application de la « loi Lagarde » 33 ( * ) , établi par nos collègues Muguette Dini et Anne-Marie Escoffier.
Notre collègue Mme Muguette Dini a, lors de ce débat, affirmé que, dans un premier temps favorable à la mise en place d'un fichier positif, sa position avait évolué : « la prise en compte progressive de l'ensemble des éléments qui déterminent la conclusion d'un contrat de crédit, dont la vérification de la solvabilité n'est qu'une étape, m'a conduite à penser que ce n'était pas la solution miracle » 34 ( * ) . Elle a en outre souligné les problèmes de coût et de protection des données personnelles posés par le fichier positif.
A l'issue du débat, M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation, a exprimé pour la première fois une position plutôt favorable du Gouvernement à la création du répertoire national des crédits aux particuliers.
4. Le nouveau rejet par l'Assemblée nationale d'une proposition de loi tendant à prévenir le surendettement (novembre 2012)
En septembre 2012, notre collègue député Jean-Christophe Lagarde a déposé une nouvelle proposition de loi dont le texte était identique à celle présentée en janvier 2012 35 ( * ) . Rapporteur de sa propre proposition de loi, il a notamment pris position pour l'adoption d'un identifiant plus simple que celui dérivé du NIR, préconisé par le rapport Constans, proposant d'utiliser l'identifiant du fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA), basé sur des données d'état civil. Cet identifiant présenterait en effet le double avantage d'exister et d'être déjà présent dans les systèmes informatiques des banques.
Une nouvelle fois, le Gouvernement n'a pas soutenu la proposition de loi, la considérant comme « prématurée » et « ne [présentant] pas toutes les garanties de réussite et d'efficacité ». M. Benoît Hamon, ministre chargé de la consommation, a cependant affirmé la position favorable du Gouvernement sur le principe de la création d'un répertoire des crédits aux particuliers.
* 29 Le dossier législatif est consultable à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl11-012.html
La navette de ce projet de loi ne s'est pas poursuivie au-delà de la première lecture au Sénat.
* 30 Deuxième séance du 29 septembre 2011.
* 31 Proposition de loi n° 4087 (2011-2012) tendant à prévenir le surendettement.
* 32 Première séance du 26 janvier 2012.
* 33 Rapport d'information n° 602 (2011-2012) fait au nom de la commission de l'application des lois sur l'application de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/notice-rapport/2011/r11-602-notice.html
* 34 Séance du 19 novembre 2012.
* 35 Proposition de loi n° 221 (2012-2013) tendant à prévenir le surendettement.