C. LA CIRCULAIRE « FILLON » DU 18 JANVIER 2010 CRÉANT UNE CONFUSION ENTRE CE QUI EST IMPOSÉ PAR L'UNION EUROPÉNNE ET CE QUI RELÈVE DU DROIT FRANÇAIS

La circulaire du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations constitue l'un des premiers textes de prise en compte des textes européens en droit français.

La circulaire concerne le financement des services publics lorsqu'ils sont assurés par des associations. Elle n'apporte pas d'innovation majeure par rapport aux textes européens.

Il résulte de la circulaire que les SSIG devront être mandatés par les collectivités territoriales pour que les aides qu'elles attribuent ne soient pas considérées comme des aides publiques illégales. Or, cette notion de « mandat » telle qu'elle figure dans les textes européens est très éloignée du droit français.

Cette circulaire aurait dû être l'occasion de préciser ce que recouvre la notion de mandatement, en adoptant une définition la plus large possible pour sécuriser les collectivités qui organisent ces services et les associations qui les fournissent. Or, elle ne donne pas d'informations suffisantes pour que les collectivités territoriales puissent délibérer de ce mandatement afin de protéger leurs services publics et surtout se prémunir contre de futurs contentieux.


Circulaire du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics
et les associations : conventions d'objectifs et simplification des démarches
relatives aux procédures d'agrément

Le Premier ministre à Monsieur le ministre d'Etat, Madame la ministre d'Etat, Mesdames et Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les secrétaires d'Etat, Monsieur le haut-commissaire

Annexes : cinq.

Références : Circulaires du 24 décembre 2002 relative aux subventions de l'Etat aux associations et n° 5193/SG du 16 janvier 2007 relative aux subventions de l'Etat aux associations et conventions pluriannuelles d'objectifs.

La deuxième conférence de la vie associative (CVA) s'est tenue le 17 décembre 2009 autour de trois thèmes : sécurisation, reconnaissance et développement. Cet événement est une étape importante dans la consolidation du dialogue entre l'Etat, les collectivités territoriales et les associations, et dans la clarification et la sécurisation des relations, notamment financières, entre pouvoirs publics et monde associatif.

Les travaux préparatoires à la conférence de la vie associative ont en effet mis en évidence les attentes et les propositions formulées par le monde associatif sur deux points :

- clarifier et sécuriser le cadre juridique des relations financières entre les pouvoirs publics et les associations, notamment au regard de la réglementation européenne relative aux aides d'Etat ;

- simplifier les démarches effectuées par les associations dans le cadre des procédures d'agrément.

Sur ces deux points, le Gouvernement a pris lors de la conférence du 17 décembre 2009 des engagements qui doivent permettre de donner plus de dynamisme à la vie associative et que je souhaite vous voir décliner avec chacune des administrations placées sous votre autorité.

1. Clarification des règles relatives aux relations financières entre les collectivités publiques et les associations.

Les associations ont demandé une doctrine claire et partagée entre l'Etat, les collectivités territoriales et les associations sur le champ respectif des subventions et des procédures de marché, de délégation de service public ou encore d'appels à projets.

Une première réponse à cette demande a été apportée dès la conférence de la vie associative sous la forme d'une note, complémentaire de la nouvelle convention pluriannuelle d'objectifs et destinée à rappeler des règles simples, accessibles à tous, et à dissiper quelques confusions.

Cette note, jointe à la présente (annexe I) et que je vous engage à diffuser auprès de vos services et partenaires, ne prétend pas clore l'exercice de définition d'un cadre de références complet pour clarifier et sécuriser les relations financières entre collectivités publiques et associations. Elle constitue la première étape de cette démarche de clarification dont je souhaite qu'elle se poursuive, au cours du premier trimestre de l'année 2010, avec vos services, en concertation avec les associations et les représentants des collectivités territoriales et avec l'appui du secrétariat général des affaires européennes (SGAE).

2. Sécurisation des conventions d'objectifs

A l'issue de travaux interministériels approfondis et de consultations des représentants des collectivités territoriales et des associations, un modèle unique de convention d'objectifs, annuelle ou pluriannuelle, a été élaboré pour constituer un nouveau cadre de référence pour la délivrance de subventions aux associations (annexe II). A cette convention est associé un nouveau formulaire « dossier de demande de subvention ».

Cette nouvelle convention de financement simplifiera les démarches des associations. Elle a été élaborée avec le souci de prendre en compte les différentes exigences juridiques applicables, d'origine nationale ou communautaire. Elle devra être mise en oeuvre dès réception de la présente circulaire et vous permettra notamment d'engager le prochain cycle de conventionnement triennal. Je vous rappelle à cet égard que le dispositif de garantie de financement prévu par ma circulaire n° 5193/SG du 16 janvier 2007 relative aux subventions de l'Etat aux associations et conventions pluriannuelles d'objectifs est maintenu.
Le nouveau modèle de convention d'objectifs est accompagné d'un manuel d'utilisation, à l'usage des administrations et des associations, destiné à faciliter l'établissement du dossier de demande de subvention et la rédaction de la convention (annexe IV). Le dossier de demande de subvention a été révisé et figure en annexe III à la présente circulaire. Le nouveau formulaire CERFA, en cours d'enregistrement, sera disponible d'ici à la mi-janvier sur le site internet www.associations.gouv.fr. Il devra être utilisé par l'ensemble des administrations de l'Etat et par les établissements publics sous leur tutelle.

Il convient également d'encourager les collectivités territoriales et leurs établissements publics à l'utiliser ou à s'en inspirer, notamment lorsqu'elles financent des actions conjointement avec les services de l'Etat ou ses établissements publics. Le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse, adressera une circulaire aux préfets en ce sens.

Ce dossier sera intégré dans le nouveau dispositif de demande de subvention en ligne accessible sur le site internet www.mon.service-public.fr. Ce guichet unique, qui sera expérimenté au cours du premier semestre avant d'être généralisé, permettra progressivement d'éviter aux associations subventionnées par plusieurs administrations de l'Etat d'avoir à fournir plusieurs dossiers successifs. Cet outil permettra au surplus de faciliter la gestion des aides publiques aux associations, un rapport annuel sur ce sujet devant être communiqué à la Commission européenne. Il sera articulé avec le Registre national des associations (RNA) et le Journal officiel « Associations » pour en faciliter la saisie.

3. Simplification des démarches des associations dans le cadre des procédures de délivrance d'agrément.

Afin de simplifier les démarches des associations qui sollicitent plusieurs agréments, j'ai décidé de mettre en place un tronc commun d'agrément comprenant trois critères, détaillés dans l'annexe V à la présente circulaire : objet d'intérêt général, mode de fonctionnement démocratique et transparence financière.

Chaque ministère instruisant une première demande d'agrément examinera les éléments constituant ce tronc commun et fera apparaître leur validation dans le Répertoire national des associations.

La validation par un ministère de ces critères s'imposera à l'ensemble des autres administrations de l'Etat. Ainsi, une association ayant satisfait à ce socle commun n'aura plus à fournir ces éléments d'information, sauf en cas de modification de ceux-ci, lorsqu'elle sollicitera un autre agrément.

La validation de ce tronc commun ne remet pas en cause la compétence des différents départements ministériels concernés pour délivrer des agréments ou habilitations spécifiques. Ces parties spécifiques - et elles seules - feront l'objet d'un examen particulier par chaque département ministériel concerné, au regard de ses enjeux propres.

Cette démarche de simplification administrative permettra la mise en place, dans les prochains mois, d'une procédure dématérialisée de demande d'agrément.

La mise en oeuvre des mesures de sécurisation et de simplification des conditions d'intervention des associations participera pleinement de la reconnaissance de l'action des associations et de l'essor du mouvement associatif auquel le Gouvernement a réaffirmé son attachement lors de la conférence de la vie associative.

Je vous demande donc de veiller à l'application de ces mesures au sein des services placés sous votre autorité ou votre tutelle.

J.O. du 20 janvier 2010 p. 1138

La réglementation communautaire n'impose pas le recours au marché public pour le financement d'associations qui assurent des prestations de service public. La subvention peut constituer un mode de financement d'un service public pour peu qu'elle respecte les critères du mandatement, de la juste compensation et des obligations de service public.

En revanche, le droit français de la commande publique limite le recours à la subvention aux seuls projets qui sont engagés à l'initiative de l'association. La convention pluriannuelle d'objectifs (CPO) préconisée par cette circulaire vise donc plus à répondre à une situation juridique purement française qu'aux questions posées par le droit européen.

Ainsi, si l'association prend l'initiative d'un projet, elle peut bénéficier d'une subvention. Si l'initiative émane de la collectivité, on se situe dès lors dans le cadre de la commande publique et deux modalités d'intervention sont préconisées : le recours aux marchés publics et la délégation de service public. Le problème est plus aigu encore si l'initiative est conjointe à l'une et l'autre. En effet, le critère de l'initiative du projet va déterminer si l'on entre dans le cadre d'un marché public ou s'il peut y avoir attribution d'une subvention 16 ( * ) .

Il n'est cependant pas toujours aisé de définir exactement qui est à l'initiative du projet :

- si la collectivité est à l'initiative du projet, elle est réputée répondre à un besoin propre et se place en qualité de demandeur. Pour répondre à ses besoins, elle passera alors un marché public ou une délégation de service public ;

- si l'association entreprend un projet, une activité d'intérêt général, elle sollicite une subvention auprès de la personne publique, pour parfaire la réalisation de cette activité ; dans ce cas, l'association est bien en position de demandeur. Pour répondre au besoin de financement de l'association, et pour l'aider dans le projet qu'elle a entrepris, la personne publique peut décider de lui accorder une subvention, le cas échéant encadrée par une convention d'objectifs et de moyens ;

- s'il y a rencontre de deux initiatives autour d'un projet commun, celle de l'association, d'une part, et celle de la collectivité, d'autre part, il est possible de recourir à la convention de partenariat.

En pratique, les associations devront être particulièrement vigilantes lors de la rédaction de la demande de subvention et de la convention d'objectifs. Pour éviter tout risque de requalification en marché public, les associations doivent décrire les raisons pour lesquelles elles demandent une subvention de sorte qu'aucune ambiguïté ne puisse survenir sur l'identité de la personne à l'initiative du projet. Il est nécessaire d'être attentif à ne pas faire apparaître d'obligations pour l'association pouvant être interprétées comme des prestations de services répondant aux besoins de la collectivité, contreparties du soutien financier.

Force est de constater l'existence d'une distorsion entre le droit des aides d'Etat et le droit français de la commande publique. La circulaire reste imprécise et ne constitue pas une base juridique fiable. Un nombre croissant d'activités exercées par les associations entrent dans le champ d'application du droit communautaire, car considérées comme étant de nature économique. Cette situation soulève une série de questions d'ordre pratique et d'interprétation, s'agissant notamment des règles relatives aux aides d'Etat et à la passation des marchés publics. Pour cette raison, le recours au marché public s'est progressivement imposé comme la règle pour ces collectivités qui y voient le moyen de sécuriser juridiquement leurs subventions. Mais le marché public est une opération assez lourde et finalement peu adaptée à l'organisation des services sociaux.


* 16 TA Toulon, 16 avril 2009, Association des consultants en aménagement et développement du territoire (ACAD) c/ Département du Var, req. n° 074409 et n° 074689.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page