B. LA DIRECTIVE « SERVICES »

La célèbre directive « services » du 12 décembre 2006 14 ( * ) se fixait pour objectif l'achèvement du marché intérieur en garantissant la libre circulation des services dans l'espace européen. Cette directive pouvait donner le sentiment de rompre avec le « tout marché » en dessinant un cadre propice à la prise en compte des contraintes pesant sur certaines activités. Mais en étendant le régime de la concurrence au secteur des services, elle a conduit à la mise en concurrence de tous les prestataires de services sur le territoire.

La directive services a introduit des exceptions aussi importantes que peu claires à l'application des règles de droit commun du traité au secteur des services. C'est ainsi que son article 2-2 dresse une liste des domaines exclus de son champ d'application. En effet, la libéralisation des activités ne concerne pas tous les services.

Les services qui peuvent être exclus de la directive, qui concernent la catégorie des services sociaux d'intérêt général 15 ( * ) (SSIG) et les services assurés en France par les conseils généraux, sont « les services sociaux relatifs au logement social, à l'aide à l'enfance et à l'aide aux familles et aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoins qui sont assurés par l'Etat, par des prestataires mandatés par l'Etat, ou par des associations caritatives reconnues comme telles par l'Etat . » En effet, la France garde le libre choix d'exclure ou non les services, entrant dans ces secteurs, du champ d'application de la directive.

La directive établit un cadre juridique commun à tous les Etats membres. Elle poursuit précisément quatre objectifs :

- faciliter la liberté d'établissement et la liberté de prestation de services au sein de l'Union, notamment grâce à des mesures de simplification des formalités administratives qui bénéficieront en particulier aux PME ;

- renforcer les droits des usagers des services ;

- promouvoir la qualité des services ;

- établir une coopération administrative entre les Etats membres.

La directive services a pour but de favoriser l'émergence d'un marché intérieur des services. En réalité, il ne s'agirait pas de soumettre ou de soustraire certains secteurs, notamment sociaux, au droit de la concurrence, c'est-à-dire à la législation des aides d'Etat, puisque en vertu de la jurisprudence de la CJCE, tous les services publics, y compris les services sociaux, sont soumis au droit de la concurrence. La directive n'a pas conduit à l'élaboration d'un cadre juridique spécifique dédié aux SSIG. Un tel cadre permettrait de les exclure du champ d'application de la directive et de mieux prendre en compte les particularités d'organisation des services sociaux de chaque Etat membre.

En pratique, une activité peut être exclue de la directive services tout en étant soumise aux règles visant à limiter les subventions et les aides d'Etat car le fait de ne pas relever du champ d'application de la directive services n'exonère en rien du respect des règles du « paquet Monti-Kroes » ; et inversement, le fait d'être dans le champ de la directive ne préjuge pas d'une quelconque incompatibilité a priori avec les règles de la concurrence.

C'est dans ce contexte confus qu'est intervenue la circulaire du Premier ministre en date du 18 janvier 2010.


* 14 Directive n° 2006/123/CE, dite « Bolkestein ».

* 15 Outre les services de santé et de sécurité sociale, les « services sociaux d'intérêt général » englobent les services d'assistance sociale, les services d'aide à l'emploi et de formation, le logement social, les services de garde d'enfants et les soins de longue durée. Ces services contribuent à la cohésion, à l'emploi, à l'intégration sociale et à la croissance économique. Les SSIG constituent un des volets des « services d'intérêt général » (SIG), dont font également partie les grandes industries de réseau (énergie, télécommunications, diffusion audiovisuelle et services postaux).

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