AVANT PROPOS : UNE JEUNESSE OU DES JEUNESSES ?
A. LA JEUNESSE : UN « ÂGE DE LA VIE » OU UNE « PÉRIODE DE TRANSITION » AUX CONTOURS INDÉFINIS
1. Une définition statistique nécessaire
Il est difficile de définir la jeunesse de façon objective, celle-ci étant souvent considérée comme une « période de transition » ou de « construction de la personnalité » , l'âge de l'accès à l'indépendance pouvant varier d'un individu à l'autre. Selon M. Olivier Galland 11 ( * ) , l'autonomie se caractérise par la possession de quatre attributs : un emploi stable, un logement indépendant, des revenus tirés, pour l'essentiel, de l'activité, et la construction d'une famille (conjoint, enfant).
De façon générale, les études démographiques, économiques et sociales retiennent la tranche d'âge de 16 à 25 ans , l'âge de 16 ans marquant la fin de la scolarité obligatoire 12 ( * ) et l'âge de 25 ans correspondant à l'âge moyen de l'accès à l'autonomie, cette notion intégrant à la fois l'entrée dans la vie active, la formation du couple 13 ( * ) et l'arrivée d'un premier enfant 14 ( * ) , étapes souvent à l'origine du départ du domicile parental et de l'entrée dans un logement autonome 15 ( * ) .
De nombreux dispositifs ont d'ailleurs retenu l'âge de 25 ans comme limite à l'ouverture de certains droits : le revenu minimum d'insertion (RMI), bientôt revenu de solidarité active (RSA), l'éligibilité à certaines réductions pour accéder aux transports 16 ( * ) ou à la culture 17 ( * ) , le « Livret jeune » 18 ( * ) , etc.
Ainsi que l'ont souligné de nombreuses personnes auditionnées par la mission commune d'information 19 ( * ) , on observe un allongement temporel de la jeunesse - qui provient notamment de l'augmentation de la durée moyenne des études - et la difficulté du passage au « statut d'adulte » , l'accès à l'emploi et à l'autonomie financière, tout comme la formation du couple, intervenant de plus en plus tardivement.
Considérée par certains comme « réductrice » 20 ( * ) , la définition de la tranche d'âge 16-25 ans ne fait donc pas l'objet d'un consensus unanime. Certains pays de l'Union européenne ont d'ailleurs choisi de prolonger la durée de la jeunesse jusqu'à l'âge de 34 ans et, de plus en plus, les organismes statistiques, à l'image de l'INSEE et du Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC), privilégient pour leurs études la tranche d'âge 16-29 ans.
L'ensemble des acteurs s'accordent en revanche à considérer que la jeunesse est une « phase de transition marquée par la recherche de l'accès à l'autonomie » , devant faire l'objet d'une approche politique globale, le passage à la vie adulte se préparant dès la préadolescence 21 ( * ) .
Convenant que la jeunesse ne peut se limiter à une tranche d'âge bien circonscrite, la mission a néanmoins choisi de retenir la tranche d'âge 16-25 ans qui demeure la plus utilisée , même si, dans les faits, elle n'est pas toujours conforme à la réalité sociale.
A cet égard, la mission regrette que les instituts de statistiques n'aient pas procédé à une harmonisation de leurs choix en la matière : selon les études, la tranche d'âge 15-24 ans, 16-25 ans, 16-29 ans ou même 16-35 ans a été privilégiée, ce qui ne permet pas de recouper les diverses informations relatives aux jeunes (emploi, logement, couverture santé, poursuite des études, etc.) et d'avoir une vision globale et cohérente de la réalité des situations.
C'est pourquoi, la mission préconise de fixer, dès à présent, une norme pour l'ensemble des études réalisées pour le compte de l'Etat et des collectivités territoriales , afin que les différentes données statistiques puissent être comparées et permettent d'avoir une vision cohérente et globale de la situation et des conditions de vie des jeunes.
L'objectif est de pouvoir identifier de façon assez précise les différentes composantes de la population des 16-25 ans, selon qu'ils sont scolarisés, étudiants, apprentis, inactifs, demandeurs d'emploi, actifs occupés en emploi aidé ou non. Actuellement, cet exercice est pratiquement impossible à réaliser avec des données récentes et cohérentes. La tranche d'âge 16-25 ans pourrait être conservée , ce qui permettrait de mieux appréhender l'évolution des trajectoires et des situations.
* 11 Auditionné le 31 mars 2009 et auteur de l'article : « Entrer dans la vie adulte : des étapes toujours plus tardives mais resserrées », Economie et statistiques, n° 337-338, 2000.
* 12 Ordonnance n° 59-45 du 6 janvier 1959 portant prolongation de la scolarité obligatoire.
* 13 En 2007, seuls 1,2 % des jeunes âgés de 15 à 19 ans et 22,9 % des 20-24 ans étaient en couple, mariés ou non. L'âge moyen lors du premier mariage était de 31,5 ans pour les hommes et 29,5 ans pour les femmes.
* 14 En 2008, l'âge moyen de la mère lors de l'arrivée d'un premier enfant avoisine 30 ans et plus d'un enfant sur cinq est né d'une mère âgée de plus de 35 ans.
* 15 L'âge moyen de l'entrée dans le logement est actuellement de 22 ans (21 ans en moyenne pour les filles et 23 ans pour les garçons).
* 16 Carte 12-25 ans de la SNCF.
* 17 Accès gratuit aux musées nationaux pour les jeunes âgés de moins de 26 ans depuis avril 2009.
* 18 Le Livret jeune permet aux jeunes âgés de 12 à 25 ans d'épargner jusqu'à 1 600 euros, rémunérés à 3 % (taux applicable depuis le 1 er mai 2009), nets d'impôts, contre seulement 1,75 % pour le Livret A.
* 19 Et en particulier, Mme Catherine Dumont, membre du Conseil économique, social et environnemental, rapporteure au nom de la section des affaires sociales de l'avis sur « Vingt-cinq ans de politiques d'insertion des jeunes : quel bilan ? », auditionnée le 24 mars 2009.
* 20 Propos de Mlle Margaux Madelon, représentant les Jeunes démocrates, lors de la table ronde du 1 er avril 2009 avec des représentants des jeunes au sein des partis politiques.
* 21 Audition de MM. Jean Chiris, directeur adjoint, et de Jean-Claude Richez, responsable de l'unité de recherche, des études et de la formation, de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP), le 30 mars 2009.