B. LE FONCTIONNEMENT DE L'AGENCE
1. Analyse succincte des missions confiées à l'ATIH
L'ATIH assure pour le compte de la DHOS la maîtrise d'oeuvre du système d'information relatif à l'activité et aux moyens des établissements de santé publics et privés.
En application de l'article L 6113-8 du code de la santé, ces derniers « transmettent aux agences régionales de l'hospitalisation [...], ainsi qu'à l'État et aux organismes d'assurance maladie, les informations qui sont nécessaires à l'élaboration et à la révision de la carte sanitaire et du schéma d'organisation sanitaire, à la détermination de leurs ressources et à l'évaluation de la qualité des soins.
Les destinataires des informations mentionnés à l'alinéa précédent mettent en oeuvre, sous le contrôle de l'État au plan national et des agences au plan régional, un système commun d'informations respectant l'anonymat des patients... »
L'agence contribue également aux travaux sur les nomenclatures nécessaires au système d'information de santé dans les domaines de sa compétence.
L'ATIH peut donc être considérée comme un service informatique particulier de la DHOS chargé principalement de la mise en oeuvre opérationnelle des procédures de gestion automatisées relatives au programme de modernisation du système d'information (PMSI) et à la tarification à l'activité (T2A).
Agissant dans le domaine du système d'information de gestion hospitalier, l'agence est partiellement dépendante des études et spécifications émanant du GMSIH, agissant pour le compte de ses membres, ainsi que de la MISS.
Par exemple, des spécifications du GMSIH qui auraient des répercussions sur la structure des données de gestion hospitalière auraient une incidence directe sur le programme de capture des données du PMSI par l'ATIH.
2. Les activités principales de l'ATIH
Elles comportent aujourd'hui trois volets principaux : la collecte des données du PMSI, l'analyse des données collectées et la diffusion des produits en résultant aux établissements et aux services concernés, tant au niveau national (ministère, organismes de sécurité sociale) que régional (ARH). L'ensemble de ces activités contribue à accompagner la mise en oeuvre de la tarification à l'activité (T2A).
Principalement orientées vers le PMSI à l'origine, les activités de l'agence se sont diversifiées pour répondre à la demande.
a. La collecte des données liées au PMSI
Les traitements relatifs au PMSI consistent en retraitements comptables et études de coûts réalisés à partir des informations provenant d'un panel de 52 établissements et services spécialisés et permettant de constituer une base nationale des coûts observés. La base de données des coûts reposait en 2004 sur les données d'activité 2001 et 2002 et comportait 3,2 millions d'enregistrements des séjours et séances.
Les domaines couverts ont été progressivement les champs MCO (médecine, chirurgie, obstétrique), SSR (soins de suite et de réadaptation), puis HAD (hospitalisation à domicile). Le champ de la psychiatrie est en cours d'expérimentation.
Les données recueillies sur le patient sont principalement : les données administratives, l'âge, le sexe ; le mois de sortie et la durée du séjour ; le diagnostic principal codifié selon la classification internationale des maladies CIM10 (nomenclature fine qui comporte 10 000 positions) ; les actes pratiqués, codifiés selon la nomenclature CCAM 72 ( * ) et le coût du séjour.
Le logiciel de capture des données, élaboré par l'ATIH, est envoyé aux établissements pour être intégré à leurs applicatifs de gestion.
Ce logiciel réalise sur site l'anonymisation des données collectées au moyen d'un algorithme identique à celui de la CNAMTS qui permet d'assurer le chaînage en cas de migration du patient 73 ( * ) . La clé utilisée à cette fin est constituée du nom, du prénom et du numéro de sécurité sociale 74 ( * ) du patient. Les données anonymisées sont ensuite transmises à l'ATIH.
b. L'analyse des données collectées
La finalité du système est de produire un référentiel de coûts élémentaires standards destiné à refonder les principes de rémunération des établissements de soins publics et privés dans une logique de tarification à l'activité (appelée T2A) qui se substituerait progressivement aux dotations globales ou forfaitaires.
L'enjeu pour les établissements, à terme, est donc d'ordre budgétaire et financier.
Pour cela, l'agence est responsable de la gestion de la classification en groupes homogènes de malades (GHM) qui compte 700 postes et sert de base à la tarification.
À chaque couple (séjour x patient) est affecté un GHM. L'ensemble des couples supposés homogènes est alors analysé selon des techniques statistiques 75 ( * ) destinées à repérer, puis éliminer, les anomalies.
Par exemple, pour un GHM donné du panel, la distribution statistique des coûts doit être, en principe, centrée et symétrique à variance minimale. Si, lors de l'observation des coûts réels on détecte une distribution bi ou multi modale, cela signifie que l'observation est entachée de biais dont il convient de trouver l'origine afin d'éliminer les causes de l'anomalie. On obtient au final des groupes homogènes assortis des coûts correspondants.
Les propositions de l'agence sont ensuite examinées par les ARH et la DHOS avant d'être transmises au ministre pour validation 76 ( * ) . Ce mécanisme débouche sur la publication de coûts standard par groupe homogène de malades 77 ( * ) qui constituent la base de la tarification à l'activité T2A).
c. Les produits en résultant
Deux types de produits sont fournis par l'ATIH.
Les produits standard, découlant directement des missions de l'agence, sont fournis aux établissements à titre gracieux.
Les produits dérivés, qui constituent un service supplémentaire facultatif, leur sont fournis à titre onéreux.
Les produits standards gratuits
L'agence fournit aux établissements l'ensemble des programmes, des spécifications d'interface (formats de fichiers) et des tables leur permettant d'établir leurs résumés de sortie.
Les produits dérivés payants
Les établissements étant détenteurs des données d'origine, il leur est loisible d'appliquer les coûts standards par GHM à leurs propres données afin de calculer les coûts correspondants et, par là, d'évaluer leur budget prévisionnel en fonction de leur activité réelle.
À cet effet, l'agence fournit à titre onéreux, un logiciel appelé GROUPEUR dont la fonction est d'attribuer à chaque couple (séjour x patient) le GHM et le tarif qui lui correspond. Actuellement, le groupeur comporte également des éléments de facturation pour le secteur privé.
Par ailleurs, le service e-PMSI, accessible via Internet, permet aux établissements d'obtenir pour chaque GHM réalisé le nombre de séjours correspondants, le tarif et le montant des prestations. Il fournit également le total des évaluations des GHM et le total des facturations supplémentaires. L'ensemble constitue un tableau de bord pour la direction de l'hôpital.
Comme le soulignait la directrice de l'agence, « tout se passe comme s'il y avait facturation au fil de l'eau des prestations tarifées à l'activité ».
d. L'organisation correspondante
À ses débuts, l'agence avait mission d'élaborer les données du PMSI une fois par an. Le rythme étant maintenant trimestriel et la T2A constituant une contrainte de plus en plus forte, l'agence a fait de la plate-forme e-PMSI un centre de service à l'usage des établissements et des ARH, ce qui lui a permis par ailleurs de gagner en productivité en réduisant les interventions humaines au cours de la chaîne des traitements.
En effet, ce service permet de recueillir l'information, auparavant transmise sur disquettes, par voie électronique sécurisée et d'enchaîner automatiquement les traitements. Il permet en outre aux ARH de bénéficier d'un dispositif interactif pour les contrôles et la validation.
Selon le rapport d'activité, à fin 2004 le service e-PMSI comptait 9 000 utilisateurs répartis entre 2 900 établissements.
3. Autres activités de l'agence
a. Contribution aux nomenclatures
L'agence contribue de manière active à l'évolution des nomenclatures indispensables à la mise en oeuvre du PMSI.
D'une part, en réalisant, avec la CNAMTS, les mises à jour des modalités de la classification commune des actes médicaux (CCAM) et en maintenant un ensemble d'outils à l'attention des utilisateurs de la CCAM sur le site Internet exploité en commun avec la CNAMTS (ccam.sante.fr).
D'autre part, en contribuant à la révision d'une partie des libellés de la classification internationale des maladies.
b. Évolution et diversification des activités de l'agence
Bien qu'étant d'existence récente, l'agence a vu ses missions évoluer et elle a développé des activités complémentaires.
En premier lieu, outre les commandes de la DHOS, l'agence est amenée à répondre à des sollicitations provenant des autres directions, voire des cabinets.
Cette évolution est marquée par le fait que la tutelle exercée par la DHOS sur l'agence, jusqu'à présent assurée par la sous direction de la qualité et du fonctionnement des établissements de santé (sous direction E), le sera dorénavant par la sous direction des affaires financières (sous direction F). Elle est certainement liée aux contraintes de la T2A, ce qui laisse entrevoir une orientation plus marquée des travaux vers les préoccupations financières.
En second lieu, l'agence dispose de compétences techniques qui la situent en bonne place pour assurer la maîtrise d'oeuvre d'applications connexes de ses activités.
Dans le domaine des systèmes d'information État-Assurance maladie, le rapport d'activités 2004 de l'ATIH précise que « la maintenance et le développement de systèmes d'information et de bases de données ont été intégrés aux travaux de l'agence. »
C'est notamment le cas de l'application PARHTAGE, développée à l'origine sous Lotus pour la DHOS.
Cette application a souffert de nombreux errements qui expliquent les lenteurs dans l'avancée du projet : absence de définition des finalités et des informations à partager ; absence de portage politique du projet, désaccords sur les rôles respectifs de l'assurance maladie et de l'État. L'ATIH en a assuré la stabilisation et en assure dorénavant l'hébergement et la maintenance pour le compte de la DHOS.
L'application est destinée à fournir aux ARH, sur un site Web, un outil d'analyse nécessaire à la régulation régionale. Cette partie documentaire doit être complétée en 2005 du volet PARHTAGE-décision destiné à mettre à disposition un ensemble d'indicateurs sur l'activité et le financement des établissements de santé publics et privés. Sont également envisagés, en prolongement, la mise à disposition d'outils d'analyse cartographique et des logiciels d'enquêtes.
Enfin, le système DMI2 de suivi des épidémies de SIDA et d'hépatite C dans 65 établissements de santé est géré et maintenu par l'agence.
La définition du champ de compétences de l'ATIH est, certes, suffisamment générale pour justifier aisément des activités complémentaires sans relation immédiate avec ses missions principales dans la mesure, en outre, où elles relèvent de la DHOS.
Un équilibre serait cependant à trouver entre activité principale et activités complémentaires de l'ATIH, particulièrement au regard de l'utilisation des moyens et des compétences dont elle dispose.
4. L'apport de l'ATIH à l'interopérabilité
La Cour note que l'agence, compte tenu de ses missions, n'a pas à proprement parler vocation à contribuer directement à l'interopérabilité des systèmes d'information en santé. Elle constate toutefois qu'elle y contribue indirectement de plusieurs manières :
en premier lieu par ses travaux dans le domaine des nomenclatures (Classification GHM, classification internationale des maladies et CCAM) ;
en second lieu, par le fait que ses produits contribuent directement à la mise en oeuvre de la T2A qui nécessitera une parfaite interopérabilité entre le système d'information médical et le système d'information de gestion au sein des établissements (sous réserve que soit effectif l'identifiant commun du patient) ;
en troisième lieu, par le fait que l'ATIH intervient dans le domaine médico-économique, ce qui en principe devrait faciliter, au plan général, la mise en cohérence des informations de gestion entre le monde médical et le monde de la gestion 78 ( * ) .
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L'ATIH peut être considérée comme un service informatique particulier de la DHOS, chargé principalement de la mise en oeuvre opérationnelle des procédures de gestion automatisées relatives au programme de modernisation du système d'information (PMSI) et à la tarification à l'activité (T2A). La Cour a pu constater que les travaux menés par l'agence, en termes de contenu et de méthodes, répondent de manière satisfaisante aux missions qui lui sont confiées. Elle note que l'agence, compte tenu de ses missions, n'a pas à proprement parler vocation à contribuer directement à l'interopérabilité des systèmes d'information en santé mais qu'elle y contribue cependant indirectement par la gestion des nomenclatures et par la mise en oeuvre opérationnelle de la tarification à l'activité. La Cour considère cependant qu'un équilibre serait à trouver entre activité principale et activités complémentaires de l'ATIH, particulièrement au regard de l'utilisation des moyens et des compétences dont elle dispose. En effet, il n'apparaît pas que la vocation de l'agence soit d'assurer des prestations d'hébergement pour le compte de tiers. Cette activité, qui pourrait s'étendre, est susceptible de distraire une partie des moyens de l'agence à d'autres fins que celles découlant de ses missions principales. |
* 72 Seuls 35 EPS ne pratiquent pas encore la nomenclature CCAM.
* 73 Cela signifie que pour un même patient la clé cryptée est identique quel que soit le lieu de la consultation.
* 74 NIR : numéro d'inscription au répertoire des personnes physiques attribué par l'INSEE ; l'attribution de cet identifiant étant effectuée dès la naissance depuis 1999.
* 75 Assimilables à des techniques de taxonomie visant à minimiser la variance.
* 76 La validation technique est réalisée par la commission des systèmes d'information des établissements de santé.
* 77 Hors prestations spécifiques et « payés en sus ».
* 78 Avis recueilli auprès d'une société savante.