b) Des compétences énergétiques indirectes
(1) La collecte et l'élimination des déchets ménagers
Aux termes de l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales (CGCT), les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) assurent, éventuellement en liaison avec les départements et les régions, l'élimination des déchets des ménages .
Cette compétence peut présenter un intérêt énergétique puisqu'en vertu de l'article L. 2224-32 du même code, les communes, sur leur territoire, et les EPCI, sur le territoire des communes qui en sont membres, peuvent aussi aménager, exploiter, faire aménager et faire exploiter toute nouvelle installation de valorisation énergétique des déchets ménagers , ou toute nouvelle installation de cogénération ou de récupération d'énergie provenant d'installations visant l'alimentation d'un réseau de chaleur lorsque ces nouvelles installations se traduisent par une économie d'énergie et une réduction des pollutions atmosphériques.
(2) Le traitement des eaux usées
Comme le service de l'eau potable, le service de l'assainissement est placé sous la responsabilité des communes . Avant la loi sur l'eau du 3 janvier 1992, celles-ci avaient comme seule obligation l'entretien des stations d'épuration, ce service étant financé par la redevance d'assainissement. Désormais, les communes doivent également prendre en charge la totalité des dépenses relatives aux systèmes d'assainissement collectif (réseaux, stations, traitement des boues), de même que les dépenses de contrôle des installations d'assainissement autonome. Leur responsabilité ne concernant donc plus seulement le fonctionnement des installations (stations et réseaux), mais aussi la construction de celles-ci, les investissements qu'elles doivent effectuer sont aujourd'hui beaucoup plus importants.
Cette compétence peut avoir une incidence énergétique forte car l'assainissement des eaux usées implique de traiter des eaux porteuses de pollution organique 22 ( * ) . Or, les déchets récupérés lors du traitement des eaux usées, appelés « boues de station d'épuration », peuvent être valorisés pour produire du biogaz par fermentation .
(3) Un rôle de prescripteur en matière d'urbanisme, de logement et d'aménagement du territoire
Les communes jouent également un rôle essentiel de régulateur et de prescripteur en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire : élaboration de schémas d'urbanisme et de planification tels que le schéma de cohérence territoriale (SCOT) et le plan local d'urbanisme (PLU), lequel s'appuie sur un coefficient d'occupation des sols (COS), la délivrance de permis de construire...
La loi énergie du 13 juillet 2005 a ouvert aux maires la possibilité d'utiliser leur compétence dans le domaine de l'urbanisme pour promouvoir les énergies renouvelables .
D'une part, elle donne des pouvoirs explicites aux communes en encourageant le dépassement du coefficient d'occupation des sols , dans la limite de 20 %, pour les constructions remplissant des critères de performance énergétique (par exemple, haute isolation) ou comportant des équipements de production d'énergies renouvelables.
D'autre part, aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, les maires peuvent désormais recommander, dans le cadre des PLU, l'utilisation des énergies locales renouvelables pour l'approvisionnement énergétique des constructions neuves , en fonction des caractéristiques de ces constructions, sous réserve de la protection des sites et des paysages.
Cette possibilité, offerte par la loi énergie, n'a guère été utilisée jusqu'à présent. Or, la collectivité territoriale, en liaison avec la délégation régionale de l'ADEME, dispose de l'expertise technique et économique pour promouvoir « l'intelligence territoriale » et recommander le recours aux énergies locales pour les ressortissants de sa commune (existence d'une filière bois-énergie, potentiel de l'énergie solaire, durée d'amortissement d'une pompe à chaleur...). Il semble en effet que ce soit souvent le déficit d'information des habitants qui paralyse la conception de l'éco-habitat, plutôt que l'absence de rentabilité économique ou de conscience environnementale. Il est pourtant essentiel d'intégrer la dimension « énergies renouvelables » dès la conception du bâtiment (plancher chauffant, orientation du bâtiment, chauffe-eau solaire...) : il est deux fois moins onéreux de le faire lors de la construction initiale qu'après.
Enfin, les collectivités territoriales peuvent agir sur la construction ou la rénovation de leur propre patrimoine immobilier . Il leur appartient d'être exemplaires à cet égard. C'est dès la conception des bâtiments que les collectivités doivent favoriser les énergies alternatives et la maîtrise énergétique. Le code des marchés publics leur permet ainsi de concevoir des cahiers des charges directifs en la matière, d'intégrer la performance énergétique des bâtiments dans les critères d'appréciation des offres et de sélectionner le mieux-disant.
(4) Un rôle d'impulsion et de sensibilisation
Comme le proclame le rapport de la Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement (Rio de Janeiro, 3-14 juin 1992) : « Les collectivités territoriales jouent, au niveau administratif le plus proche de la population, un rôle essentiel dans l'éducation, la mobilisation et la prise en compte des vues du public en faveur d'un développement durable ».
On peut distinguer trois niveaux permettant aux collectivités territoriales d'assurer un rôle de catalyseur .
En premier lieu , elles peuvent financer des « Agences de l'énergie » et des « Espaces info énergie ».
Les Agences de l'énergie existent sous deux formes : les Agences locales de l'énergie et les Agences territoriales.
Les Agences locales de l'énergie, regroupées au sein de la Fédération des Agences locales de l'énergie (FLAME), sont créées à l'initiative des collectivités territoriales ou des EPCI. Financées par l'Europe, les régions et les collectivités territoriales, elles ont des missions énergétiques très diversifiées : conseil aux collectivités, entreprises ou acteurs (tels les organismes de logement sociaux) situés sur le territoire, assistance à la maîtrise d'ouvrage. Selon leur statut, elles peuvent facturer leur expertise et leur mission d'assistance à la maîtrise d'ouvrage aux collectivités.
Mais l'action des collectivités territoriales peut aussi s'appuyer sur des Agences territoriales de l'énergie . Actuellement au nombre de dix, celles-ci, créées et majoritairement financées par les conseils régionaux, sont regroupées au niveau national au sein réseau des Agences régionales de l'énergie et/ou de l'environnement (RARE) et interviennent en matière de gestion de l'énergie, de valorisation des ressources naturelles et des déchets, dans une optique de développement durable. Leur effectif global permanent est de 215 personnes, leur budget total de 18,3 millions d'euros. Leur activité concerne 66 % de la population française, soit 38,8 millions d'habitants, sur 52 % du territoire français représentant 70 % du PIB national.
Par ailleurs, les collectivités territoriales peuvent appuyer leur action au moyen des « Espaces info énergie ». Nés d'une initiative de l'ADEME en 2001, ils ont pour mission de fournir des conseils aux particuliers, lesquels représentent environ 50 % de la consommation globale d'énergie en France (logements, transports).
Essentiellement financés par l'ADEME et les collectivités territoriales, ces « Espaces info énergie », le plus souvent portés par les Agences locales de l'énergie, sont répartis sur l'ensemble du territoire dans un réseau comprenant 175 espaces et près de 300 conseillers. Les demandes portent principalement sur le solaire, le chauffage au bois ou encore l'isolation. Au total 1.060.000 personnes ont été conseillées ou sensibilisées au cours de l'année 2005, soit une hausse de 100 % par rapport à 2004.
(Source : Rapport d'activité 2005 de l'ADEME)
La consultation de ces espaces devrait encore progresser dans les années à venir puisque l'article 41 de la loi n 2004-1343 du 9 décembre 2004 relative à la simplification du droit a rendu obligatoire l'établissement d'un diagnostic énergétique des logements lors de leur vente (à partir du 1 er juillet 2006) ou lors de leur mise en location (à partir du 1 er juillet 2007). Ce diagnostic, qui devrait concerner plus de deux millions de logements par an, permettra de les classer en sept classes et s'accompagnera de recommandations de travaux.
En deuxième lieu, vos rapporteurs recommandent aux collectivités territoriales de faire connaître aux habitants la politique d'encouragement aux énergies renouvelables menée par l'Etat, notamment le crédit d'impôt de 50 % sur les équipements produisant des énergies renouvelables (chauffe-eau solaire, inserts bois, pompes à chaleur...). Au-delà de l'intérêt financier, il faut insister sur l'importance symbolique du crédit d'impôt : il valide et conforte la démarche du particulier, qui a le sentiment d'accompagner un mouvement d'ensemble de la société.
En troisième lieu, les collectivités territoriales peuvent organiser des campagnes de sensibilisation . La commune, en particulier, apparaît comme l'échelon de proximité le plus à même de favoriser l'émergence d'une « citoyenneté énergétique » et la modification profonde des comportements. C'est ainsi que les collectivités territoriales peuvent jouer un rôle essentiel pour favoriser l'éducation au développement durable dans les établissements scolaires.
Les élus disposent également d'un autre levier pédagogique majeur au travers de lieux dédiés, comme en témoigne l'ouverture imminente de la Maison de l'énergie à Jonzac (Charente-Maritime) .
La maison de l'énergie à Jonzac Pionnière mais aussi exemplaire en la matière, la commune de Jonzac a acquis une expérience importante en matière de valorisation d'énergies locales. Cette maison de l'énergie, située à proximité immédiate des chaudières bois et d'un forage géothermique, a pour objectif de faire connaître les énergies renouvelables au public le plus large possible. Trois cibles ont été identifiées : a) le jeune public : les jeunes pourront découvrir de façon ludique et interactive les énergies renouvelables. Outre des explications concises et accessibles, des expériences illustreront les notions abordées ; b) les adultes ; c) les professionnels : compte tenu du déficit de connaissance et savoir-faire des professionnels (entreprises, élus, fonctionnaires, maîtres d'oeuvre), la maison de l'énergie vise à donner également à cette cible une grille de lecture pertinente. Le coût de l'aménagement et de la scénographie du musée est estimé à 700.000 € ; le projet est cofinancé par l'ADEME, le conseil général, le conseil régional et la commune. |
* 22 Celles-ci se répartissent en eaux ménagères, qui ont pour origine les salles de bains et les cuisines et sont généralement chargées de détergents, de graisses, de solvants, de débris organiques, etc., et en eaux « vannes », c'est-à-dire les rejets des toilettes chargés de diverses matières organiques azotées et de germes fécaux.