III. LE RÉGIME INDEMNITAIRE
Météo-France a dans une large mesure hérité, dans sa gestion des régimes indemnitaires des personnels techniques qu'il rémunère, de certaines pratiques de la DGAC ; l'application de textes non publiés ou rétroactifs, comme la quasi-absence de modulation individuelle des primes dans les corps techniques, entretiennent des conditions de gestion opaques et rigides autant qu'irrégulières et contribuent à renforcer les résistances à toute évolution de structure, en raison des conséquences qui s'y attacheraient en matière de rémunération.
Le régime indemnitaire de Météo-France présente ainsi beaucoup de traits communs avec celui de la DGAC, examiné par la Cour dans le rapport public particulier de novembre 2002 consacré au contrôle de la navigation aérienne - à commencer par l'empilement des primes et indemnités attachées à l'appartenance à un corps particulier, à l'exercice de certaines fonctions ou à la détention de certaines qualifications. Le nombre des primes susceptibles d'être versées aux agents atteint ainsi une quinzaine.
A. L'INCOMPLÈTE PUBLICATION DES TEXTES INDEMNITAIRES
La Cour avait précédemment relevé l'irrégularité, jusqu'en 1997, de la quasi-totalité des primes et indemnités versées à la DGAC. On retrouve des caractéristiques semblables à Météo-France, où les corps techniques sont conçus selon le même modèle que dans cette direction d'administration centrale, dont l'établissement est d'ailleurs issu.
Au premier rang de ces irrégularités figure le manquement à l'obligation de publication des textes indemnitaires, auquel la publication partielle de certaines de leurs dispositions n'apporte, au plan juridique, aucun remède sérieux 22 ( * ) .
Cette situation découle d'une méconnaissance constante des règles relatives à l'entrée en vigueur des textes de la part des ministères de tutelle de cet établissement public.
B. LE VERSEMENT DE PRIMES SANS TEXTE APPLICABLE : LE CIAV
Pendant plus de trois ans, du 1 er janvier 1998 au mois d'août 2001, un élément important des rémunérations accessoires des personnels techniques de Météo-France, le « complément indemnitaire annuel variable » (CIAV) 23 ( * ) a été versé sans aucun fondement légal.
Le décret n° 96-104 du 9 février 1996 institue, au bénéfice des personnels non militaires en fonction dans les services de Météo-France et gérés par cet établissement, un complément indemnitaire variable lié à l'accroissement des recettes propres engendrées par les activités du service. Il s'agit en quelque sorte d'une forme d'intéressement au développement des activités commerciales de l'établissement, réservée en pratique aux personnels des corps techniques.
La somme répartie annuellement à ce titre ne peut excéder 2 % de la masse salariale inscrite au budget prévisionnel de Météo-France relative auxdits personnels ; elle représente une partie des recettes supplémentaires hors taxes par rapport à un montant de référence, engendrées par les activités du service qui « sont ou peuvent être » soumises à la concurrence. Le montant du CIAV peut être pondéré selon le corps ou la catégorie des agents bénéficiaires ; il est versé sous la forme d'un acompte en fin d'année, suivi d'un solde lorsque le montant définitif du complément est arrêté après la clôture de l'exercice.
Le décret renvoie à un arrêté interministériel la fixation des conditions d'attribution, des modalités de calcul et, pour une période maximale de cinq ans, des valeurs nécessaires au calcul du montant de l'indemnité - en particulier le montant des recettes de référence -, ainsi que la détermination des coefficients de pondération.
A l'origine, un arrêté du 9 février 1996 a fixé ces valeurs rétroactivement pour 1995 - alors, du reste, que le décret n'avait pas de portée rétroactive - et pour 1996 et 1997. En revanche, aucun arrêté ultérieur n'a fixé les paramètres de calcul du CIAV pour les exercices 1998 et 1999, tandis qu'une « régularisation » rétroactive de la situation du seul exercice 2000 a été entreprise par un arrêté du 3 août 2001.
Par suite, les versements de CIAV opérés au titre des exercices 1998, 1999 et 2000 étaient dépourvus de fondement légal.
* 22 Sont par exemple concernés les textes régissant l'indemnité pour horaires adaptés susceptible d'être accordée aux personnels de la Météorologie nationale et l'indemnité de fonction et son supplément attribués à certains personnels administratifs de la DGAC et de Météo-France.
* 23 Le montant du CIAV était de 0,8 M€ en 1998, 0,9 M € en 1999, 1,4 M€ en 2000, 1,2 M€ en 2001, 1 M€ en 2002.