Rapport d'information n° 264 (2004-2005) de M. Jean-Pierre MASSERET , fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 mars 2005
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AVANT PROPOS
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TRAVAUX DE LA COMMISSION
AUDITION CONJOINTE DE M. JEAN-PIERRE BEYSSON, PRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL DE MÉTÉO-FRANCE, DE M. JEAN-FRANÇOIS BÉNARD, PRÉSIDENT DE LA 7ÈME CHAMBRE DE LA COUR DES COMPTES ET DE M. FRANÇOIS PERDRIZET, DIRECTEUR DE LA RECHERCHE ET DES AFFAIRES SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES AU MINISTÈRE DE L'ÉQUIPEMENT, SUR LA COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES RELATIVE À MÉTÉO-FRANCE (22 MARS 2005)
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ANNEXES
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L'ACCOMPLISSEMENT DES MISSIONS
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L'ORGANISATION DE METEO-FRANCE
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LA GESTION DU PERSONNEL
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I. LE CADRE GÉNÉRAL
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II. LES ÉVOLUTIONS MARQUANTES
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III. LE RÉGIME INDEMNITAIRE
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I. LE CADRE GÉNÉRAL
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LES QUESTIONS FINANCIÈRES
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ANNEXE
N° 264
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005
Annexe au procès-verbal de la séance du 23 mars 2005 |
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1), sur le rapport de la Cour des comptes relatif à Météo France ,
Par M. Jean-Pierre MASSERET,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM.Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Roger Karoutchi, MM. Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.
Météorologie. |
AVANT PROPOS
En application de l'article 58 2°) de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la Cour des comptes a réalisé, à la demande de la commission des finances, une enquête sur les comptes et la gestion de l'établissement public Météo-France.
La communication de la haute juridiction financière, remise le 25 janvier 2005 à votre commission des finances, a formulé plusieurs critiques concernant les missions, l'organisation, la gestion du personnel et les comptes de l'établissement public. Cette communication met notamment en évidence une certaine rigidité des charges, susceptible de compromettre, à l'avenir, l'effort d'investissement, alors même que l'établissement public est confronté à une concurrence accrue. La Cour des comptes souligne, par ailleurs, l'existence d'irrégularités au sein des comptes de l'établissement.
Ayant à coeur de valoriser les travaux de la Cour des comptes et de favoriser la concrétisation des recommandations émises, votre commission a procédé, le 22 mars 2005, à l'audition contradictoire de MM. Jean-Pierre Beysson, président-directeur général de Météo-France, François Perdrizet, directeur de la recherche et des affaires scientifiques et techniques au ministère de l'équipement et Jean-François Bénard, président de la septième chambre de la Cour des comptes. Afin d'en favoriser la plus grande diffusion, cette audition avait, par ailleurs, été ouverte à la presse.
Le 12 avril 2005, Météo-France a transmis ses réponses écrites sur la communication de la Cour des comptes. Ces réponses indiquent que l'établissement « mettra en oeuvre dans les meilleurs délais plusieurs des mesures qui découlent [du] rapport [de la Cour des comptes] », tout en précisant que plusieurs de ces mesures sont déjà en préparation. De façon générale, cependant, l'établissement regrette « une impression d'ensemble particulièrement négative » qui ressortirait de la communication de la Cour des comptes et qui ne serait pas, selon lui, conforme à la réalité des faits.
I. UN BUDGET LARGEMENT SUBVENTIONNÉ PAR L'ETAT
A. LES RESSOURCES DE L'ÉTABLISSEMENT
I. La contribution de l'Etat à la météorologie
Météo-France est un établissement public administratif, qui compte 3.732 agents (au 1 er janvier 2004).
L'Etat consacrera, cette année, quelque 153 millions d'euros à Météo-France. Par ailleurs, l'Etat consacrera également cette année, comme l'année dernière, 36,6 millions d'euros à l'organisation européenne des satellites météorologiques (Eumetsat) 1 ( * ) .
Contributions de l'Etat à Météo-France (hors Eumetsat)
(en millions d'euros)
2004 |
2005 |
Evolution |
||||
Subvention de fonctionnement (hors recherche) |
133,4 |
136 |
+ 1,9 % |
|||
Subvention de fonctionnement à la recherche |
14,8 |
14,8 |
- |
|||
Subvention d'investissement (recherche) |
AP 2,7 |
CP 2,7 |
AP 2,7 |
CP 2,7 |
AP - |
CP - |
Total DO + CP |
150,9 |
153,5 |
+ 1,7 % |
Source : projet de loi de finances pour 2005
II. La structure globale des ressources de Météo-France
(en millions d'euros)
Source : Météo-France (rapport d'activité 2003)
Les ressources totales de Météo-France s'élevaient donc, en 2003, à environ 270 millions d'euros (hors Eumetsat), dont 55 % proviennent de la subvention de l'Etat, 26 % des redevances aéronautiques et 15 % des recettes commerciales :
A. LES CHARGES DE L'ÉTABLISSEMENT
La structure des dépenses de Météo-France est marquée par la place importante des charges de personnel et de fonctionnement courant (80 % du total des dépenses) :
II. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE LA COUR DES COMPTES
La Cour des comptes a examiné successivement les missions, l'organisation, la gestion du personnel et les questions financières relatives à l'établissement public administratif Météo-France.
Les observations et recommandations de la Cour des comptes portent, dans le détail sur les points suivants :
A. L'ACCOMPLISSEMENT DES MISSIONS
S'agissant de l'accomplissement de ses missions par l'établissement public, la Cour des comptes observe :
- un certain déficit d'intégration européenne dans le domaine de la prévision à court terme, ce qui ne permet pas à la recherche d'atteindre une taille critique ;
- une insuffisante prise en compte de la fonction commerciale au sein de l'entreprise, malgré le développement de la concurrence ;
- une recherche insuffisamment coordonnée au niveau national et qui n'est peut-être pas assez valorisée sur un plan commercial ;
- des coûts de formation élevés au sein de l'École nationale de la météorologie.
La Cour des comptes souligne notamment que les recettes commerciales n'ont pas augmenté autant que ce que prévoyait le contrat d'objectifs 2001-2005. Elle rappelle que les recettes commerciales de Météo-France, qui représentent 39,8 millions d'euros en 2003, proviennent de deux types de produits : le « kiosque » (produits télématiques et téléphoniques « grand public »), qui en constitue la part majoritaire, et les prestations de service à valeur ajoutée aux professionnels. Or les recettes tirées du kiosque sont en baisse (- 8 % entre 1998 et 2003, - 26 % entre 2000 et 2003) malgré les augmentations tarifaires depuis 2000 . Ce déclin est lié à la double concurrence opérée par de nouveaux entrants sur le marché et l'apparition d'une information météorologique gratuite sur Internet. L'émergence de la concurrence n'a toutefois pas encore « ébranlé » la domination du marché français par l'établissement, en matière de prestations aux professionnels, qui représentent une part croissante du total (ces recettes sont passées de 9 millions d'euros à 17,8 millions d'euros entre 1998 et 2003).
Dans ce contexte, la Cour des comptes déplore une prise de conscience tardive de l'importance de la fonction commerciale , la constitution d'un réseau de vente étant récente. L'établissement n'a établi de plan d'action commerciale (ou business plan) qu'au début de 2004 et les fonctions commerciales demeurent, d'après la Cour des comptes, faiblement attractives.
B. L'ORGANISATION DE MÉTÉO-FRANCE
S'agissant de l'organisation de l'établissement, la Cour des comptes met en lumière :
- des services insuffisamment hiérarchisés et une délocalisation inachevée, entraînant des redondances et des chevauchements de compétences ;
- une organisation territoriale qui mériterait d'être rationalisée, notamment eu égard à un échelon départemental dont l'existence n'est peut-être pas totalement justifiée.
C. LA GESTION DU PERSONNEL
La gestion du personnel fait l'objet des remarques suivantes :
- une organisation du travail non optimale, notamment en ce qui concerne le « service permanent » (travail posté 24h/24, 7j/7, jugé très coûteux pour l'établissement en sa forme actuelle) ;
- un mode de gestion des corps marqué par un égalitarisme poussé et hérité d'une période antérieure à la création de Météo-France ;
- une absence de gestion prévisionnelle des emplois ;
- des modalités de mise en oeuvre de la réduction du temps de travail plus favorables que celles prévalant ordinairement dans la fonction publique de l'Etat ;
- un régime des rémunérations complémentaires irrégulier en raison de l'application de textes non publiés ou rétroactifs.
En définitive, la Cour des comptes critique la rigidité des charges de l'établissement, eu égard à son organisation et à la gestion de son personnel, qui subissent très largement l'inertie du passé ; la haute juridiction financière craint, par conséquent, que l'investissement ne soit la « variable d'ajustement », dans un contexte où les recettes commerciales sont affectées par un accroissement de la concurrence.
C. LES QUESTIONS FINANCIÈRES
La Cour des comptes pointe des « irrégularités comptables substantielles » qui constitueront autant d'obstacles à la certification des comptes de Météo - France par des commissaires aux comptes, ainsi que le prévoit la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière.
S'agissant des comptes et du budget, la haute juridiction financière remarque :
- des anomalies comptables, relatives notamment au suivi de l'actif immobilisé ;
- l'absence de comptabilité analytique ;
- des charges sous-estimées (en raison des irrégularités comptables qui conduisent à minorer les dotations aux amortissements), et rigides ;
- une dégradation du résultat de l'établissement, se traduisant par une réduction des dépenses de fonctionnement et le report de certaines opérations d'investissement ;
- un contrôle de gestion de la commande publique qui a d'ores et déjà été amélioré mais mériterait encore d'être affiné.
III. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission des finances reconnaît très volontiers les performances techniques réalisées par Météo-France, ainsi que l'excellence des compétences mises en oeuvre par son personnel. Elle prend également en compte les observations de l'établissement, tendant à montrer que « Météo-France a contribué de façon significative à la maîtrise des dépenses publiques » dans la mesure où, d'une part, « les subventions versées par l'Etat à Météo-France ont progressé entre 1994 et 2003 de 7,8 % seulement pour une inflation constatée de 14,9 %, pendant que les dépenses de l'Etat progressaient sur la même période de 19,2 % » et dans la mesure où, d'autre part, « l'établissement a reversé à l'Etat en 2000, au titre des résultats dégagés sur les exercices antérieurs, 21 millions d'euros ».
Néanmoins, votre commission des finances estime que la Cour des comptes a révélé un certain nombre de dysfonctionnements bien réels dans l'organisation, la gestion et la comptabilité de l'établissement. Ces dysfonctionnements nécessitent des mesures de réforme, à engager rapidement . Il serait, notamment, souhaitable de clarifier l'organisation de l'établissement, tant sur un plan hiérarchique que territorial, d'assouplir et de rendre plus transparentes les règles de gestion des corps et du temps de travail et, enfin, de rectifier les comptes afin qu'ils puissent être certifiés.
Par ailleurs, votre commission des finances s'est intéressée aux objectifs et indicateurs du programme « Météorologie » de la mission « Transports » , mis en place pour l'application de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Or les indicateurs proposés pour ce programme, dont le responsable sera le président-directeur général de Météo-France, reflètent la priorité donnée par l'établissement à l'excellence du service sur la maîtrise des coûts. En effet, si le programme « Météorologie » comporte plusieurs indicateurs de qualité de service, au demeurant pertinents, il ne comporte pas, en revanche, d'indicateur d'efficience satisfaisant, et notamment pas d'indicateur du type « coût unitaire », qui permettrait de rapporter le service rendu à son coût.
Les objectifs et indicateurs du programme « météorologie » de la mission « transports »
Objectif n° 1 : Disposer du meilleur système de prévision météorologique à courte échéance sur l'Europe |
- Indicateur n° 1 : Comparaison des performances du modèle numérique Arpège de Météo-France aux autres modèles de prévision numérique du temps à l'échéance de 48 heures |
- Indicateur n° 2 : Taux de fiabilité des prévisions météorologiques publiées par Météo-France (bulletins départementaux, marine et routes). |
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Objectif n° 2 : Améliorer la prévention des risques d'origine météorologique |
- Indicateur n° 1 : Taux de pertinence de la procédure de vigilance météorologique et des bulletins marine de sécurité |
- Indicateur n° 2 : Taux de notoriété de la procédure de vigilance météorologique |
Objectif n° 3 : Développer les utilisations de la météorologie notamment par secteurs économiques (transports, collectivités locales, services, agriculture, BTP et industrie...) |
- Indicateur n° 1 : Taux de confiance et de satisfaction des usagers dans les prestations météorologiques. |
- Indicateur n° 2 : Nombre de clients par grands secteurs d'activité (transports, collectivités locales, agriculture, BTP, industrie, services...) et progression de la diffusion des données climatologiques. |
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- Indicateur n° 3 : Evolution des recettes propres de l'établissement. |
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Objectif n° 4 : Maintenir au niveau mondial, dans le domaine de la modélisation opérationnelle du temps et du changement climatique, le Centre national de recherche météorologique |
- Indicateur n° 1 : Nombre de publications de niveau international par les chercheurs de Météo-France |
- Indicateur n° 2 : Nombre de contrats de recherche, en tant que chef de file et en tant que partenaire associé. |
Par conséquent, votre commission des finances souhaite procéder d'ici un an à un bilan des mesures qui auront été prises par Météo-France et par sa tutelle, afin de donner suite à la communication réalisée par la Cour des comptes et qui figure au sein du présent rapport d'information.
Votre commission des finances souhaite également que les outils mis en place par la LOLF jouent, à l'avenir, pleinement le rôle qui devrait être le leur dans l'évaluation des performances de l'établissement et dans la mesure des progrès qui doivent être réalisés.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
AUDITION CONJOINTE DE M. JEAN-PIERRE
BEYSSON, PRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL DE
MÉTÉO-FRANCE, DE M. JEAN-FRANÇOIS BÉNARD,
PRÉSIDENT DE LA 7ÈME CHAMBRE DE LA COUR DES COMPTES ET DE
M. FRANÇOIS PERDRIZET, DIRECTEUR DE LA RECHERCHE ET DES AFFAIRES
SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES AU MINISTÈRE DE L'ÉQUIPEMENT, SUR LA
COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES RELATIVE À
MÉTÉO-FRANCE (22 MARS 2005)
Présidence de M. Jean-Arthuis, président
Séance du 22 mars 2005
Ordre du Jour
- Audition de M. Jean-Pierre Beysson, président-directeur général de Météo-France, de M. Jean-François Bénard, président de la 7 ème chambre de la Cour des comptes et de M. François Perdrizet , directeur de la recherche et des affaires scientifiques et techniques au ministère de l'équipement, sur la communication de la Cour des comptes relative à Météo-France.
__________
La séance est ouverte à 16 heures 10.
M. le président - La séance est ouverte.
L'audition contradictoire sur Météo-France mettra en présence, pour la Cour, M. Jean-François Bénard, président de la 7 ème chambre, Mme Isabelle Latournarie-Willems, conseillère référendaire et Melle Loguivy Roche, auditrice, d'une part, et pour Météo-France, M. Jean-Pierre Beysson, son président-directeur général et M. Serge Duval, son secrétaire général.
Le ministère de l'équipement est représenté par M. François Perdrizet, directeur de la recherche et des affaires scientifiques et techniques.
Météo-France, c'est la pluie, la neige et le beau temps. Nous attendons beaucoup de vous, Monsieur le Président. Nous croyons beaucoup au rôle de l'Etat dans l'organisation du bien-être du pays.
En vertu de l'article 58-2 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, la Cour a réalisé à la demande de la commission une enquête sur les comptes de la gestion de l'établissement public Météo-France.
Le rapport de la haute juridiction financière, remis le 25 janvier 2005, a formulé plusieurs critiques concernant les missions, l'organisation, la gestion du personnel et les comptes de l'établissement public.
Ce rapport met notamment en évidence une certaine rigidité des charges susceptible de compromettre à l'avenir l'effort d'investissement, alors même que l'établissement public est confronté à une concurrence accrue.
La Cour souligne par ailleurs l'existence d'irrégularités au sein des comptes de l'établissement.
Cette audition est pour la première fois accessible au public. Notre volonté est de valoriser les travaux de contrôle diligentés par la Cour et assumés par la commission.
C'est pourquoi nous organisons depuis plus d'un an des auditions contradictoires. Il s'agit de faire vivre le débat, de veiller à ce que les rapports, les observations, les recommandations de la Cour ne soient pas une simple formalité mais qu'au contraire ils puissent servir, en tant que de besoin, de levier à la performance des différentes institutions de la sphère publique.
Il pourrait se faire que telle observation de la Cour soit mal fondée ; c'est la raison de la présence des responsables de l'organisation faisant l'objet de ce contrôle, afin qu'ils puissent répondre en cas d'observations contestables et nous indiquer les dispositions prises pour porter remède aux dysfonctionnements qui auraient pu être constatés.
Je propose donc que, dans un premier temps, M. Bénard s'exprime au nom de la Cour et qu'ensuite M. Beysson réponde aux observations de la Cour. J'inviterai ensuite le rapporteur spécial en charge de Météo-France au nom de la commission des finances, M. Jean-Pierre Masseret, à nous faire part de ses observations et éventuellement à formuler les questions qu'il souhaite livrer au débat.
Monsieur le Président, vous avez la parole.
M. Jean-François Bénard - Mesdames et Messieurs, pour présenter les principaux constats et observations de ce rapport, je suivrai le plan indiqué en traitant successivement des missions, de l'organisation, du personnel et des finances de l'établissement public administratif Météo-France.
S'agissant des missions, il convient de commencer par la production météorologique elle-même. Chacun connaît le cycle de cette production qui commence par la saisie d'observations sur le terrain sur les caractéristiques du temps, l'assimilation des données recueillies par un super calculateur, l'intégration de celles-ci dans un modèle permettant de reconstituer l'état initial, de prévoir les états futurs de l'atmosphère et de réaliser les prévisions météorologiques afférentes.
Sur ce point, deux remarques principales. La première touche au réseau d'observation lui-même, qui était un domaine considéré de façon générale comme en retard au milieu des années 90 pour ce qui concerne Météo-France. Aussi le président de l'établissement avait-il lancé en 1996 le projet Radome, projet d'installation de stations d'observation au sol et de stations automatiques permettant de saisir les données en temps réel.
Il s'agissait d'une priorité affirmée par l'établissement. Le premier constat de la Cour, c'est que ce projet a connu un retard substantiel d'au moins 2 ans et qu'il devrait être terminé dans le courant de l'année 2005. Nous verrons ultérieurement les raisons de ce report d'investissement sur un sujet considéré comme prioritaire.
Le second domaine est celui de la prévision numérique. Il faut appeler l'attention sur le coût de cette prévision, lié au coût des supercalculateurs et de la modélisation elle-même, qui prend beaucoup d'heures de spécialistes. Pour réduire ces coûts, la démarche qui vient naturellement à l'esprit est bien sûr celle de la coopération européenne.
De fait, cette coopération existe dans un certain nombre de domaines. Le principal est la coopération au sein du Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme, qui fait que ce Centre, situé en Grande-Bretagne, à Reading, effectue les prévisions au-delà du 3 ème jour à moyen terme.
Mais Météo-France a souhaité conserver ses capacités de modélisation globale autonomes pour les périodes inférieures à 3 jours. Dans ce domaine, s'il existe des collaborations avec d'autres instituts, il n'y a pas de volonté de recherche d'intégration.
Je crois que c'est un point qui mérite discussion, plutôt avec la tutelle qu'avec l'établissement lui-même, car c'est fondamentalement à elle d'arbitrer entre les différentes préoccupations qui peuvent conduire à un niveau d'intégration plus ou moins élevé des systèmes de prévisions météo.
Bien sûr, l'argument avancé par Météo-France pour justifier cette politique est le souci d'indépendance nationale.
Il conviendra de demander à la tutelle si elle considère que ce souci justifie les surcoûts que ceci entraîne par rapport à des solutions plus intégrées.
Deuxième sujet : les missions institutionnelles, en commençant par la vigilance météo, qui se traduit par les cartes avec quatre couleurs que nous voyons sur nos écrans.
Ces réformes datent de 2001 et constituent un progrès évident. La question qui peut se poser dans ce domaine est celle de la fiabilité de ces cartes. Je me permets de vous inviter à vous reporter à la page 8 du rapport, dans laquelle vous trouverez l'analyse qui a pu être faite par les administrations concernées des vigilances orange décidées en 2003.
Il convient, pour en apprécier l'exactitude, de rappeler qu'il existe deux niveaux : le niveau national et le niveau départemental.
Il y a très peu de cas où il y aurait eu occurrence d'un risque qui aurait justifié une vigilance orange et où il n'y aurait pas eu d'indication à l'échelon national. On en signale deux en 2002.
C'est déjà moins vrai lorsqu'on descend au niveau départemental, où le taux de non détection est de l'ordre de 6 % en 2003.
S'agissant des cas où des départements ont été placés en vigilance orange et où l'on n'a pas constaté le phénomène qui le justifiait, les chiffres sont les suivants : 53 % des départements ont été effectivement touchés par le phénomène annoncé ; 26 % ne l'ont été que partiellement et, dans 21 % des cas, le phénomène qui relevait de l'orange ne s'est pas produit dans le département en question.
Voilà une première indication sur le niveau de fiabilité de ces prévisions.
Deuxième question : celle de l'anticipation des événements. Une prévision, pour être exploitable, doit venir assez tôt. De ce point de vue, la protection civile estime qu'il faut un délai de l'ordre de 3 heures pour prendre en charge un risque annoncé au niveau de la vigilance météo.
En 2003, dans 37 % des cas, l'anticipation des événements a été inférieure à 3 heures et n'a donc pas permis l'intervention dans les meilleures conditions des services de sécurité civile.
Il s'agit là de données brutes ; la Cour n'a pas les moyens de dire si ceci, compte tenu de l'état de l'art, est normal ou non. Je pense que les responsables de l'établissement pourront nous en dire plus, surtout s'ils disposent de comparaisons internationales sur ce point, que nous ne connaissons pas.
Autre sujet abordé en ce qui concerne les missions institutionnelles : l'extension progressive des missions dans les domaines qualifiés de connexes par Météo-France. Au-delà du noyau initial de service public, Météo-France investit progressivement d'autres champs : l'hydrométéorologie, la pollution de l'air, les pollutions marines, la prévision des crues.
La question qui se pose est le régime juridique de ces extensions : s'agit-il de missions institutionnelles couvertes par les subventions publiques, ayant un caractère de service public, ou de prestations de service dans lesquelles l'établissement puisse se situer dans un champ concurrentiel ?
Ce point est aujourd'hui de l'ordre de la zone grise. Il n'est pas parfaitement clarifié et je crois que c'est à la tutelle de préciser les règles du jeu et de dire ce qui, dans son esprit, dans une frontière qui n'est pas évidente, relève du service public ou des activités concurrentielles.
Quelques remarques rapides sur les activités commerciales pour signaler la baisse des recettes kiosque grand public de Météo-France.
En sens inverse, on constate heureusement une augmentation des recettes des prestations à valeur ajoutée destinées aux professionnels. La baisse des recettes kiosque s'explique par la montée de la concurrence.
Deuxième constat : la lente professionnalisation de l'activité commerciale à Météo-France. Des attachés de clientèle ont été créés en 2002, un plan d'action commerciale défini en 2004, mais il n'y a toujours pas de schéma directeur approuvé pour l'activité commerciale. Globalement, cette fonction reste peu attractive du point de vue d'un grand nombre d'agents de Météo-France.
Autre point abordé : la délicate question de la tarification.
Aujourd'hui, Météo-France estime qu'elle doit délivrer gratuitement les informations sur un risque imminent auquel on ne s'expose pas de façon volontaire. A contrario, les expositions volontaires ou les prestations techniques permettant à des entreprises ou à des organismes clients de faire des économies pourraient être facturées et tarifées.
Cette frontière n'est pas évidente et rappelle ce qui passe à l'IGN, où il y aussi une mission coeur de service public que l'IGN appelle la vocation, et toute une série d'activités connexes à valeur ajoutée plus ou moins importante, la première étant gratuite, les autres facturées dans des conditions qu'il faut définir - coût marginal, coût moyen, etc.
Dans le cas de l'IGN, des missions parlementaires ont examiné ce sujet pour fixer des règles du jeu. Je crois que le problème se pose en termes relativement analogues, même si c'est un autre champ, pour Météo-France.
Un mot sur la recherche pour signaler qu'elle n'est pas orientée dans une perspective de valorisation, et sur l'école nationale de la météorologie. L'établissement ayant fait le choix de former ses personnels techniques, la coexistence de coûts de structures élevés et de faibles effectifs pour chaque niveau de qualification conduit à des coûts de formation eux-mêmes notoirement élevés.
Je passe à l'organisation de Météo-France en commençant par les services centraux.
Lorsqu'on regarde l'organigramme de Météo-France, la première chose qui saute aux yeux, c'est le manque de lisibilité. Cet organigramme juxtapose des partis d'organisation différents. Il y a une direction générale, elle-même décomposée en directions, comprenant un secrétariat général qui comprend lui-même des directions, des directions centrales, des directions thématiques, le tout avec des adjoints, des groupes de travail thématiques, etc.
C'est une organisation incontestablement lourde. Lors de l'audition du président de Météo-France devant la Cour, nous lui avons demandé combien il y avait de directeurs à Météo-France. Nous n'avons pas réussi à en avoir le coeur net. Peut-être pourra-t-il préciser la réponse exacte aujourd'hui.
S'agissant de la localisation des services centraux, ceux-ci sont localisés sur trois sites différents : Paris, à l'Alma, Trappes et Toulouse, qui a sa propre direction générale.
Trois sites pour un établissement de la taille de Météo-France, c'est beaucoup et, depuis les années 80, un transfert vers Toulouse est organisé. Nous sommes près d'un quart de siècle plus tard et les objectifs fixés sont toujours assez loin d'être atteints, ceci s'expliquant par le fait que ces délocalisations sont soumises au volontariat des agents concernés et que celui-ci se joue sur une échelle de temps de l'ordre de la décennie ou de la génération, ce qui explique les éclatements de services que l'on constate.
Un exemple parmi d'autres : la direction des systèmes d'observation à Trappes devait être décentralisée à Toulouse et l'on s'est arrêté au milieu du gué. Il y a donc une double localisation, ce qui n'est évidemment pas propice à son efficacité.
C'est également un élément de surcoût - et on peut en donner de nombreux exemples - et d'inadéquation des compétences. Lorsque les agents souhaitaient rester à Paris et éviter d'être mutés en province, certains allaient à la direction commerciale d'Ile-de-France sans avoir de vocation commerciale affirmée.
Un point mériterait d'être évoqué : c'est un point qui n'est pas traité dans le contrat d'objectifs, pourtant récent puisqu'il date de novembre dernier, qui est l'éventuel déménagement du site de l'Alma vers Trappes. Nous croyons savoir que la direction générale de l'établissement a des réflexions en cours. Ce serait une excellente chose si elle voulait bien les livrer devant votre commission pour faire le point exact sur ce sujet !
S'agissant de l'organisation territoriale, celle-ci comprend trois niveaux : les services centraux, les directions interrégionales - il y en a 7 en métropole, 4 outre-mer - et les centres départementaux qui, eux-mêmes, incluent des stations d'observation à un niveau infra départemental.
Le niveau fondamental est le niveau régional. C'est à cet échelon qu'est élaborée la carte de vigilance et assurée la permanence 24 heures sur 24 pour analyser les risques météo.
La question qui se pose est donc celle de la pertinence de l'échelon départemental implanté de façon systématique par Météo-France et dont les justifications sont assez peu évidentes.
Si on se réfère au rapport lui-même, page 20, on trouve une citation du schéma directeur de la prévision adopté en 2002 : « Sans trop forcer le trait, on pourrait dire que les trois échelons ne constituent pas un ensemble cohérent, une chaîne, mais la juxtaposition de trois échelons qui, peu ou prou, font et refont les mêmes analyses, les mêmes expertises. A ces limites techniques et au problème de cohérence, cette situation, fruit d'une absence d'organisation explicite, ajoute les conséquences, non soutenables dans la durée, de surcoûts, de charges de travail indues, de risques de démotivation, sans omettre le danger d'un système dual de prévisions où les experts traditionnels s'opposeraient aux modélisateurs et autres spécialistes de la prévision d'ensemble ».
Après un tel diagnostic, on s'attendrait à ce que des mesures soient prises. C'est le contraire, puisque le même schéma directeur affirme que « l'établissement public a fait le choix non seulement de confirmer l'orientation de ces trois niveaux, mais de la renforcer, notamment en consacrant des efforts importants, sur le plan immobilier, à sa mise en oeuvre ».
C'est un sujet que l'on ne peut pas ne pas aborder : est-il judicieux ou non d'avoir systématiquement ces centres départementaux de météo ? Pour justifier sa position, l'établissement invoque la nécessité de la proximité du préfet pour l'analyse, notamment, des risques météo.
Cet argument laisse dubitatif. D'une part, les centres départementaux en question ne sont pas des guichets - il n'y a pas de contact avec le client - et, s'agissant du contact avec le préfet, il pourrait être assuré sans qu'il y ait pour cela besoin d'un effectif permanent d'une équipe à l'échelon de chaque département.
J'ajoute que la vigilance est assurée 24 heures sur 24 à l'échelon inter régional et non départemental, ce qui est un argument supplémentaire.
Au total, s'agissant de l'organisation de Météo-France, on ne peut s'empêcher de constater qu'il s'agit globalement d'une structure lourde, consommatrice en titres et en effectifs et qui ne semble pas tirer son origine de considérations d'efficacité.
J'en viens à la gestion du personnel, sujet sensible dans un établissement comme celui-ci.
J'aborderai trois points seulement : les effectifs, le temps de travail et le système indemnitaire.
S'agissant des effectifs, ils sont stables, autour de 3.700 agents. Si vous vous référez au rapport, vous trouverez page 23 un tableau qui analyse l'évolution de ces effectifs de 1994 à 2003. On constate qu'il y avait 3.759 agents en 1994 et 3.725 en 2003. Il y a eu une forte réduction des militaires et plutôt une relative augmentation, en conséquence, des autres catégories.
La première question que l'on peut se poser, c'est la légitimité d'un effectif de cette ampleur ; à titre de comparaison, le Met Office, l'établissement de météo britannique, qui a d'ailleurs connu une assez forte réduction d'effectif récemment, est, en 2003, à 1.822 agents, la moitié de Météo-France.
Interrogé sur ce point, l'établissement indique qu'il a des responsabilités plus importantes en ce qui concerne l'outre-mer que les Britanniques, ce qui est très certainement exact. Est-ce que cela justifie un écart de cette ampleur ? On peut se le demander ! Ce qui serait utile, c'est une étude comparative systématique, qui est certainement possible, pour analyser les fonctions comparables assurées par différents établissements. Cela permettrait d'avoir le coeur net sur ce sujet.
Autre point à signaler : l'absence de gestion prévisionnelle des emplois. C'est un sujet en développement dans toutes les entreprises, mais aussi dans l'administration. En ce qui concerne Météo-France, on en est encore au degré zéro sur ce sujet.
Il est vrai qu'à partir du moment où l'établissement a comme objectif de préserver son organisation territoriale actuelle, l'intérêt d'un tel outil, qui est plutôt un outil de changement, apparaît singulièrement réduit.
S'agissant du temps de travail, il y a deux éléments à prendre en compte principalement : la question du service permanent et l'application de la RTT.
Le service permanent est une originalité relative de Météo-France, en tout cas un élément très important de la gestion de son personnel. Cela veut dire que l'on est en travail posté 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ; on emploie le terme « semi permanent » pour indiquer le travail posté pendant 12 heures de jour. Le premier intervient surtout dans les centres inter-régionaux, le second dans les centres départementaux.
Je ne vais pas faire l'analyse détaillée de ce régime, qui figure dans le rapport. On peut simplement relever que c'est un régime très attractif pour les agents et symétriquement très coûteux pour l'établissement. Le taux d'armement de chaque poste est de l'ordre de 7 à 8 agents ; il existe un mécanisme de repos compensateur pour le temps de travail en horaires ou en jours non ouvrables, des indemnités pour horaires adaptés, une brigade de réserve pour pallier les éventuels manques d'agents.
Il semble que la direction n'ait pas pour ambition de faire évoluer cette situation. Si on regarde le tableau de la page 26 du rapport, on voit qu'au cours des dernières années, le nombre d'agents en service permanent et semi permanent est resté stable : 1.465 en 2000, 1.469 en 2003.
Venons-en maintenant à la RTT. Le régime de la RTT a été défini par une décision du PDG du 30 octobre 2001, ensuite avalisée par deux décrets du 30 décembre 2002, ce qui a permis de faire coïncider les normes réglementaires avec la situation de fait.
Il y a un assez grand nombre de remarques dans le rapport parmi les points à signaler dans l'application de la RTT. J'en relèverai quelques-unes.
L'une des caractéristiques est que les bonifications horaires liées au travail posté sont obligatoirement converties en indemnité et à un montant majoré lorsque le temps de travail s'approche de 1.454 heures par an, c'est-à-dire 32 heures par semaine. Une des conséquences de cette décision, c'est que lorsqu'un agent arrive à près de 32 heures par semaine, il a intérêt à choisir la conversion en temps pour bénéficier des indemnités au taux majoré.
Il y a également toute une série de petites particularités que je livre pour l'anecdote. Par exemple, Météo-France considère que les dimanches de Pâques et de Pentecôte sont des jours fériés, ce qui permet d'appliquer les bonifications substantiellement plus élevées des jours fériés par rapport au dimanche.
De la même façon, Météo-France a un mécanisme particulier de décompte de la pause méridienne. En principe celle-ci est exclue du temps de travail effectif. Ici, elle n'est pas décomptée pour les repas pris en alternance, un agent travaillant pendant que l'autre prend son repas.
Autre point à signaler s'agissant de la RTT : la création de 75 emplois lors de sa mise en oeuvre, en contradiction avec le principe fixé pour le secteur public dans ce domaine.
Quelques mots des indemnités -sujet sur lequel on pourrait aussi écrire un livre.
S'agissant des corps techniques, une des questions principales qui s'est posée est due à la fusion des corps d'ingénieurs de la météorologie avec les ingénieurs des ponts.
L'ensemble des corps du ministère de l'équipement issus de l'X ont été récemment regroupés au sein des ingénieurs des ponts.
Ceci a naturellement posé, comme chaque fois dans ces questions de fusion de corps, le problème de l'alignement des primes des intéressés - c'est toujours un des obstacles les plus redoutables aux fusions de corps.
La question s'est compliquée, dans le cas de Météo-France, du fait de la volonté de faire en sorte que, pour les autres corps techniques, la hiérarchie relative au sein de Météo-France entre les différents corps ne soit pas élargie par la revalorisation des primes servies aux ingénieurs des ponts.
Simultanément, une démarche de comparaison, pour chaque niveau, de ce qui se passait dans les corps comparables de l'équipement a été entreprise. On est donc dans un mécanisme de double échelle de perroquet, ce qui n'est pas la solution la meilleure en termes de coût pour l'établissement.
S'agissant des corps communs, le rapport signale les conséquences de l'application du protocole DGAC de décembre 2000, qui s'est également traduit par un surcoût substantiel. Il faut dire que ce n'est pas de la responsabilité de Météo-France ; en effet, une partie de son personnel administratif et ouvrier n'est pas géré par elle mais par la DGAC, qui leur applique ses propres règles.
On peut néanmoins relever que le gage envisagé dans le contrat d'objectifs, qui était le report partiel du rattrapage indemnitaire des ingénieurs de la météo, a été en fait utilisé deux fois : une première fois pour la revalorisation des corps communs et une deuxième fois pour la réduction de l'écart indemnitaire avec les ingénieurs de travaux et les techniciens. Malgré cela, on a dépassé l'enveloppe fixée dans le contrat d'objectifs.
Je passe sur un certain nombre d'irrégularités réglementaires qui sont évoquées dans le rapport pour insister sur un dernier point important, qui est l'égalitarisme en matière indemnitaire.
L'idéologie - si l'on peut dire - des corps techniques de Météo-France porte sur le fait que les primes et indemnités doivent être versées indépendamment de la situation individuelle de chacun.
Un premier pas très timide a été effectué dans le contrat d'objectifs pour aller vers une modulation individuelle. Il s'agit à ce stade d'une expérience qui sera entreprise en 2007. Il n'y a donc pas de précipitation pour aller dans cette voie. On peut le regretter, car il y a eu des majorations substantielles d'indemnités versées au cours des dernières années et ceci aurait été un élément plus favorable pour la mise en oeuvre d'une modulation individuelle, préoccupation générale dans l'ensemble du secteur public actuellement.
Au total, la gestion des ressources humaines à Météo-France appelle donc un certain nombre d'observations.
Je vous invite à reprendre le texte du rapport lui-même, qui cite quelques phrases du plan stratégique de l'établissement : « Le corps social de Météo-France est profondément attaché à des modes de gestion traditionnels, dont quelques-uns des principes fondamentaux reposent, par exemple, sur l'intangibilité des vacations de 12 heures pour les postes en horaires permanents, sur un maximum de souplesse dans la récupération des heures majorées, sur un égalitarisme aussi poussé que possible en matière de régime indemnitaire et sur la règle de l'ancienneté pour critère unique des mutations ».
La question qui se pose est donc de savoir si, face à ce constat, la direction estime qu'il convient d'en rester là et de déplorer simplement la situation ou si elle souhaite s'engager dans la réforme de ses règles de fonctionnement. Je crois qu'il serait intéressant que M. Beysson nous donne son point de vue sur ce sujet.
J'en viens à la question des finances pour saluer deux progrès récents réalisés par Météo-France. Le premier est la création d'une commission consultative des achats en 2001. En effet, la Cour avait formulé de nombreuses observations sur les marchés passés au cours des années précédentes, qui comportaient diverses irrégularités et cette commission consultative est certainement un progrès.
Il en va de même de la déconcentration budgétaire engagée depuis 2003 qui, là aussi, devrait remédier à une organisation budgétaire reconnue de façon générale comme excessivement centralisée.
Il y a au moins trois remarques à faire sous l'angle comptable et financier.
S'agissant de la comptabilité générale, le rapport cite toute une série d'anomalies comptables qui grèvent les comptes de l'établissement.
Pour ne citer qu'un exemple, l'actif de l'établissement est gravement incomplet. Il manque toute une série de biens, qui ont été remis en dotation à l'établissement, mais qui ne figurent toujours pas à son actif. Les dotations aux amortissements sont donc insuffisantes.
Si l'on fait la liste de l'ensemble des irrégularités signalées dans le rapport en ce qui concerne les méthodes comptables, on aboutit à la conclusion que les comptes de Météo-France ne sont pas certifiables en l'état.
Un autre point concerne la comptabilité analytique. La demande a été formulée dès le premier contrat d'objectifs en 1994. Elle n'a pas été satisfaite à cette époque. Elle a été reprise dans le contrat d'objectifs 2001-2004 et n'a pas été suivie d'effet. Il serait souhaitable de disposer d'une comptabilité analytique dans le contrat d'objectifs 2005-2008 qui vient d'être signé.
Il va de soi qu'il s'agit d'un outil indispensable et il est singulier qu'un établissement de la taille et du niveau de technicité de Météo-France, douze ans après sa création, ne dispose toujours pas d'un tel instrument.
S'agissant de l'équilibre financier, lorsqu'on regarde les comptes, il faut les interpréter en se rappelant les anomalies comptables que j'évoquais tout à l'heure : insuffisance des dotations aux amortissements ou irrégularités dans le rattachement aux exercices de certaines opérations.
Néanmoins, globalement, la situation de départ était satisfaisante d'un point de vue financier mais se fragilise progressivement. Ceci tient au fait que les charges croissent plus vite que les produits, notamment les dépenses de personnel - dont on a vu les raisons du dynamisme. S'agissant des produits, des risques pèsent sur la progression des recettes commerciales du fait du développement de la concurrence.
En conséquence, le résultat d'exploitation de Météo-France a été déficitaire de 2000 à 2003 -nous n'avons pas encore les comptes 2004.
Bien sûr, le résultat global était bénéficiaire, grâce aux opérations exceptionnelles et financières, mais la détérioration du résultat d'exploitation est un souci et, d'ailleurs, sans doute, un des éléments de risque de report d'un certain nombre d'investissements pour permettre une certaine forme d'équilibre financier.
En conclusion, trois points sont à relever : Météo-France est un établissement public depuis 1994. Sa création avait pour objet de faciliter l'évolution de Météo-France, son adaptabilité au terrain, sa recherche d'efficacité.
Aujourd'hui, la mue d'une administration centrale en un établissement public n'est pas encore complètement réalisée -j'en veux pour preuve tout ce qui a été dit concernant le fonctionnement de l'établissement.
De ce point de vue, il faut dire que l'établissement a une excuse, qui est la proximité de la DGAC, qui n'est certainement pas un facteur favorable.
Deuxième remarque : le contrat d'objectifs de Météo-France commence par les termes suivants : « Comme le précédent, le contrat d'objectifs s'inscrit dans la stratégie visant à faire de Météo-France un service météorologique de référence, l'un des premiers dans le monde, et un modèle de service public à la française ».
Météo-France est-elle un modèle de service public à la française ? Si l'on se place sur le plan technique, la réponse, vue par les responsables de Météo-France est oui - nous n'avons pas d'autres sources pour en décider, mais il y a toutes les raisons de les croire sur ce point.
En revanche, s'agissant de la gestion de l'établissement, il est assez difficile de placer Météo-France en haut de tableau, compte tenu de tout ce qui a été dit sur son organisation, son fonctionnement, la gestion des ressources humaines, les questions financières et comptables.
D'une façon générale, lorsqu'on regarde les prises de décisions de Météo-France, on a le sentiment que la voie de l'excellence technique s'exprime avec beaucoup de force, mais qu'en revanche, les avocats de la réduction des coûts supportés par le contribuable sont beaucoup moins audibles.
Il y a une raison à cette situation : un établissement qui ne dispose pas de comptabilité analytique ne peut analyser finement ses réductions de coût ; en outre, il ne fait pas de comparaisons externes et manque donc de repères pour pouvoir apprécier sa situation dans ce domaine.
Troisième et dernière remarque, pour aller vers le champ de la LOLF et signaler deux particularités qui ne vous ont certainement pas échappé s'agissant du programme météorologique tel qu'il figure dans l'avant-projet : d'une part, le PDG de Météo-France est lui-même le responsable du programme « météorologie » ; d'autre part, il n'y a pas, pour les missions de service public de Météo-France, d'indicateurs d'efficience retenus pour l'établissement.
Je ne peux m'empêcher de rapprocher cela des deux propositions précédentes, c'est-à-dire le fait que le président de l'établissement soit responsable du programme - ce qui n'est pas en soit condamnable mais n'est pas un facteur favorable pour clarifier les relations de l'établissement avec sa tutelle, et que l'absence d'indicateurs d'efficience sur les missions de service public a un certain rapport avec le peu de préoccupation marqué en matière de réduction des coûts et d'outils permettant de l'apprécier.
Je pense que le président de l'établissement nous indiquera ses intentions en ce qui concerne l'application de la LOLF, et je ne doute pas qu'il va utiliser celle-ci comme vecteur de modernisation de son établissement, ce qui est l'état d'esprit souhaité par le législateur.
M. le président - Monsieur le Président, merci pour cette analyse. Vous êtes allé d'emblée à l'essentiel, ce qui laisse des marges de progression à Météo-France.
Monsieur le Président-directeur général de Météo-France, vous avez la parole.
M. Jean-Pierre Beysson - Monsieur le Président, il y a seulement quelques mois, nous ne nous serions pas imaginés que nous serions redevables de cet excès d'honneur que représente notre audition devant la prestigieuse commission des finances du Sénat, sous la présidence d'un ancien ministre de l'économie et des finances et en présence d'un ancien ministre du budget, ni cet excès d'indignité que voudrait nous infliger ce rapport qui vous est soumis.
A vrai dire, quand j'ai appris que la haute juridiction financière à laquelle j'ai l'honneur d'appartenir allait procéder au contrôle de l'établissement, j'en étais très heureux, car je pensais que ce serait l'occasion d'appuyer nos réflexions pour l'avenir, la modernisation de notre établissement et que ce serait pour nous un guide précieux pour la direction de Météo-France.
Il serait injuste de dire que mes espérances ont été déçues à cet égard, mais ce serait mentir que de prétendre que le résultat corresponde à ce que j'escomptais. Je ne suis pas le seul. Les quelques personnes qui nous connaissent bien et qui ont pu lire le rapport nous ont dit découvrir un nouveau Météo-France.
Nous ne savions pas que cet établissement public était dirigé par des chefs qui n'avaient d'autre ambition que de suivre leur troupe, appréciation que l'on retrouvera notamment au début du dernier paragraphe de la page 25, où on dit : « L'établissement paraît avoir renoncé à faire évoluer cette situation autrement que sur la base du volontariat » , entendez par là « autrement que par le respect de l'attachement des personnels au statu quo » !
Nous ne savions pas non plus que la direction était aussi inconsciente de ses responsabilités de gestion financière, au point de tolérer des irrégularités, sur lesquelles je reviendrai, mais était surtout inconsciente des contraintes de son nécessaire équilibre financier, jugement qui est porté notamment page 10, sous cette formulation : « Des incertitudes pèsent cependant sur la capacité effective de Météo-France à maintenir durablement le niveau de ses recettes commerciales, qui trouvera rapidement ses limites du fait des coûts de Météo-France » ou, plus nettement encore, page 28 : « Cette situation coûteuse pour l'établissement exclut de fait toute perspective d'évolution de Météo-France dans l'accomplissement de ses missions ». Voilà une prévision bien sombre !
M. le président - M'autorisez-vous à vous interrompre ? Vous n'êtes pas le premier magistrat à présider un organisme qui a fait l'objet d'un contrôle de la Cour et d'observations qui peuvent en effet détonner.
Ne le prenez donc pas en mauvaise part. La seule préoccupation de la commission des finances du Sénat, c'est que cela bouge, que cela change et qu'on s'adapte.
Nous pourrions reprendre le rapport, mais si vous vouliez bien répondre aux observations formulées il y a un instant par le président Bénard, nous gagnerions du temps.
M. Jean-Pierre Beysson - J'entends bien, Monsieur le Président, mais il y a quand même dans cette affaire un problème de climat général qui sort de ce rapport ; ce climat général, indépendamment des réponses que nous allons y apporter, est un climat extraordinairement négatif, qui ne correspond pas du tout au sentiment que nous avons, ni à la réalité des faits. Je vais m'efforcer de le montrer.
Ceci est illustré par un certain nombre de problèmes méthodologiques. On nous dit : « Au premier rang des irrégularités figure le manquement à l'obligation de publication des textes » et on précise dans la note 21 du rapport que sont par exemple concernés « les textes régissant l'indemnité pour horaires adaptés ». Ce texte, nous dit-on, n'a pas été publié. C'est un texte de 1990 ! En quoi la direction de Météo-France est-elle responsable aujourd'hui d'un texte de 1990 ? C'est le seul texte qui n'ait pas été publié. Il a été signé par M. Charasse et prévoit effectivement un dernier article qui dit que cet arrêté ne sera pas publié !
Il est encore plus significatif de noter, en page 32, que l'on évoque des libertés masquées. M. Bénard a parlé du décompte de la pause méridienne. Il est dit dans le rapport que cela n'a fait l'objet d'aucun encadrement réglementaire. C'est inexact ! J'ai ici le texte : cet encadrement réglementaire résulte de l'article 5 de l'arrêté de 11 juillet 2003, lequel prévoit que la pause méridienne, pour des raisons sur lesquelles je reviendrai, qui paraissent solides, n'est en effet pas décomptée.
M. le président - Il est dit par exemple que le personnel travaille 32 heures par semaine.
C'est sûrement beaucoup mais, pour nous qui ne sommes pas des spécialistes de Météo-France, nous trouvons que c'est modeste !
M. Jean-Pierre Beysson - Venons-en donc à ce point.
M. le président - Peut-être pourrait-on prendre dans l'ordre les observations du président Bénard relatives aux missions, à l'organisation, à la gestion du personnel et aux finances.
M. Jean-Pierre Beysson - Si vous voulez.
M. le président - Je précise que quelques observations mettent en cause la tutelle du ministère. Son représentant pourra donc intervenir dès qu'il le souhaitera.
M. Jean-Pierre Beysson - S'agissant de l'observation, qui doit être une priorité de l'établissement, ce qui est effectivement le cas, nous avons un programme d'équipement du territoire en stations automatiques de mesure du temps, qui est le programme Radome, qui a pris un retard de 2 ans.
Je signale que malgré cela, et simplement à la moitié du programme, le nombre de stations automatiques de nouvelle génération, qui sont le nec plus ultra en matière de technologies, était en France supérieur à celui que l'on constate en Allemagne ou en Angleterre.
Ces éléments ont été donnés lors de l'audition à la Cour ; on ajoute maintenant une considération supplémentaire en demandant si ces stations de mesure constituent un choix technique pertinent ou s'il s'agit d'un suréquipement. Je réponds clairement qu'il s'agit d'un choix technique très important, qui correspond au fait que nous faisons des prévisions en France sur 550 zones liées à l'organisation territoriale, dont on parlait il y a un instant. Nous sommes dans une situation unique en Europe de pouvoir suivre le temps avec une précision géographique extraordinaire : chaque département est suivi par nos prévisionnistes au travers de cinq zones en moyenne par département, grâce à des stations de mesure en correspondance avec le zonage du territoire que nous faisons pour la prévision.
Concernant la prévision numérique, on pose la question de savoir si l'intégration pourrait être plus forte. Il n'y a pas un seul pays en Europe qui ait poussé l'intégration de ses activités de prévision numérique aussi loin que Météo-France. Vous le retrouverez d'ailleurs dans le rapport, mais M. Bénard ne l'a pas rappelé complètement dans son introduction.
Nous avons en effet un modèle global qui a le même code que le Centre européen et qui est donc en copropriété. Nous avons fait grâce à cela des économies considérables : toute avancée qui est faite à Redding, en Angleterre, par le Centre européen, est immédiatement transposée sur le modèle de Météo-France.
Le coût de la modélisation à Météo-France est donc un coût relativement modeste, l'essentiel de l'effort de recherche étant partagé avec le Centre européen.
M. le président - Le président Bénard a fait observer que vous n'aviez pas de comptabilité analytique. Comment connaissez-vous donc vos coûts ?
M. Jean-Pierre Beysson - Au stade de la prévision numérique, il n'a pas évoqué la comptabilité analytique. Le coût est connu par le coût du calculateur et également par le nombre de chercheurs qui y sont affectés. Nous avons beaucoup moins de chercheurs en prévision numérique sur la modélisation globale que les Anglais. Nous avons un calculateur dont la puissance de calcul est infiniment inférieure à celle des Anglais, un coût calcul infiniment inférieur à celui des Anglais, des Allemands et même des Danois, pour une raison : nous avons un modèle intégré à celui du Centre européen.
Par ailleurs, nous avons une coopération européenne extrêmement forte et exemplaire. Nous avons, il y a plus de dix ans, lancé un projet européen pour la modélisation à petite échelle qui regroupe quinze pays et qui a aboutit au modèle Aladin, qui n'aurait pas existé sans cette coopération, où la contribution des pays partenaires - essentiellement pays de l'Europe de l'Est mais également Portugal, Maroc, Belgique, Tunisie, etc. - a été de 60 %.
L'intégration ne pouvait être plus forte et ce n'est peut être pas sans raison que le directeur général du Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme, à Redding, est français, ainsi que le directeur de la recherche, tous deux issus de Météo-France.
Reste une question : faut-il malgré tout que Météo-France continue à faire tourner un modèle global sur l'ensemble de la planète ? Notre réponse est clairement oui ! C'est une question politique qui dépend de nos ministres, mais compte tenu des responsabilités internationales de la France, et notamment pour des questions de souveraineté, il n'est pas concevable que, pour les opérations de nos forces armées à travers le monde, on ne puisse faire tourner un modèle correspondant aux besoins de celles-ci.
Dans le monde, il y a là peu près huit services météo qui font tourner un modèle global. Il n'est pas indécent que Météo-France soit l'un d'entre eux !
M. le président - Peut-on dire que, dans les missions de Météo-France, il y a une mission de prévention des risques et de prévision sur le territoire national, éventuellement sur les territoires ultramarins, à laquelle s'ajoute une mission de défense nationale ? Peut-on dire qu'une partie de vos dépenses correspond à des préoccupations qui mettent en cause la défense nationale ?
M. François Perdrizet - Il y a effectivement des relations très étroites, par voie conventionnelle, entre Météo-France et la défense.
Je voudrais dire quelques mots s'agissant de la prévision. Je trouve que ce rapport est sévère. Je me souviens du rapport de la mission d'inspection des organismes scientifiques et techniques (MIOST) du ministère de l'équipement, dont la première remarque mettait l'accent sur la maîtrise technique et scientifique de son domaine et l'attachement au métier de l'établissement. J'ai déploré l'absence de référence à une telle remarque, qui explique des performances remarquables ainsi qu'une évolution qui est probablement différente de celle d'autres secteurs.
Cela cache également le fait que l'équipe de Météo-France a fait faire depuis, et sur toute la période concernée, des progrès importants à l'établissement.
Par ailleurs, l'intégration des prévisions est une question qui a été abordée lorsqu'on a élaboré le contrat d'objectif. On s'est en effet posé la question de savoir si ce positionnement vis-à-vis de l'Europe et des autres pays pouvait évoluer et si des alternatives étaient possibles.
La météo pourrait se regrouper autour d'un centre européen qui s'occuperait de tout, mais un tel schéma ne serait manifestement pas réalisable. Il faut à la fois séparer ce qui est commun aux différents pays et laisser une initiative aux Etats. La coopération peut donc se faire à la fois par des institutions européennes et par des alliances entre pays. Ce sont les deux types de coopération dans lesquels Météo-France s'est largement engagée.
Il est également important de considérer l'émulation. Dans dix ou quinze ans, je pense que la météo aura toujours cette instance européenne et qu'il y aura des centres d'excellence pilotes qui entraîneront des grappes de pays.
Pourquoi n'y a-t-il pas une coopération plus forte avec l'Espagne notamment, alors que Météo-France détient beaucoup de compétences avec Aladin ? Manifestement, les Espagnols ne veulent pas d'une intégration plus forte. Tous les pays manifestent une volonté d'autonomie.
En outre, la prévision à courte échéance et à maille réduite présente des spécificités importantes.
Ce qui se passe en Angleterre est différent de ce qui se passe dans les Cévennes ; chacun a des problèmes spécifiques de météo. La solution de plusieurs centres d'excellence, dont celui de Météo-France, entraînant un certain nombre de pays pour réaliser une prévision à courte échéance et à maille réduite, me paraît la vision réaliste et raisonnable pour l'avenir.
Dernière chose sur la prévision numérique : on ne mentionne jamais dans le rapport - nous non plus et nous ne faisons peut-être pas bien les choses - l'importance économique que revêt la prévision météo. Hier, je suis allé écouter les prévisionnistes d'EDF, les gens qui programment la production des centrales, des barrages hydrauliques et de tous les modes de production. J'ai noté qu'une différence de deux ou trois degrés dans la prévision amène des écarts de puissance entre la demande et l'offre de plus de 2.000 MW et génère des coûts très importants.
Derrière Météo-France et cet aspect technique, il y a donc des enjeux économiques considérables qu'il ne faut pas perdre de vue.
M. Jean-Pierre Beysson - Avec l'armée, lorsqu'il y a une opération en Afghanistan, on fait tourner un modèle spécifique sur cette zone ; pour cela, il faut qu'il soit alimenté par un modèle plus large, afin que l'on sache ce qui se passe aux frontières. Il est plus raisonnable pour l'armée française de recevoir les données du service météorologique français qui le contrôle plutôt que de le demander aux Etats-Unis ou à d'autres.
Enfin, nous nous étions fixés un objectif extrêmement ambitieux. Nous voulions avoir le meilleur modèle de prévision numérique à courte échéance sur la zone Europe, qui est naturellement notre zone de priorité. Chacun des modèles fait l'objet d'un score sur des bases internationales publiées tous les mois et sur des critères qui sont les mêmes. Depuis maintenant 18 mois, le score du modèle français est le meilleur d'Europe.
Ceci est la combinaison à la fois des compétences scientifiques que l'on peut acquérir en modélisation globale et de son application à la modélisation à petite échelle.
M. François Perdrizet - Les ratios techniques et scientifiques montrent la maîtrise de Météo-France. Ce n'est pas uniquement une déclaration unilatérale de Météo-France.
M. le président - Je n'ai pas entendu dire que les prévisions étaient critiquables. Nous sommes la commission des finances et ce qui nous préoccupe, ce n'est pas la météo mais l'efficacité de la dépense publique ! Pourrait-on atteindre les mêmes objectifs en mobilisant moins de fonds publics ?
M. Jean-Pierre Beysson - On nous dit que la vigilance n'aurait été émise pertinemment que dans 53 % des cas. Cela paraît très faible ! Pour des raisons qui ont été longuement discutées avec le ministère de l'intérieur, il a été décidé que la vigilance portait sur un département entier. Il est donc normal que 26 % des départements soient partiellement concernés.
Dans 80 % des départements, la vigilance est pertinente. Les 20 % manquants sont du domaine de l'état de l'art. Nous avons des problèmes que nous pensons résoudre dans les quatre ans qui viennent. Il s'agit des orages ou des précipitations neigeuses. La limite pluie-neige est un phénomène extrêmement difficile à prévoir mais nous allons progresser.
On dit aussi que, dans 37 % des cas, l'anticipation a été inférieure à 3 heures.
La procédure de vigilance est une procédure de discussions permanente entre nos prévisionnistes et les services du ministre de l'intérieur, notamment du COGIC, à la direction de la défense et de la sécurité civile.
On ne sort la carte de la vigilance que lorsque tous les paramètres sont prêts, connus, certains et que le bulletin de suivi est prêt. Mais le COGIC est dans la plupart des cas prévenu avant par des contacts directs. Il faut demander à la direction de la sécurité civile si elle considère que cette procédure ne marche pas. Je suis certain de la réponse : elle considérera que c'est un immense progrès par rapport à ce qui existait auparavant !
D'ailleurs, cette carte de vigilance française va devenir européenne et le projet français est maintenant européen.
On nous reproche, d'autre part, que les domaines émergents soient à la limite de nos compétences. C'est possible. Peut-être faut-il clarifier les choses. Le décret de compétence dit : « Météo-France est chargé de surveiller l'atmosphère ». Si les éléments polluants ne font pas partie de la surveillance de l'atmosphère, je veux bien !
Aucune association de la surveillance de la qualité de l'air, en France, et qui a cette compétence d'alerte, ne pourrait exercer la compétence qui est la sienne sans les données météo et les indications relatives à la qualité de l'air que nous leur fournissons.
Nous avons, dans le cadre de notre mission de service public, des accords avec la quasi-totalité de la cinquantaine d'associations de surveillance de la qualité de l'air, qui sont fournies en données par Météo-France dans le cadre de la mission de service public.
M. le président - Il faudrait que le Gouvernement dise clairement qu'il a fait ce choix et que c'est votre mission.
M. Jean-Pierre Beysson - Nous considérons que c'est dans le texte. On est chargé de surveiller l'atmosphère et l'océan superficiel.
M. le président - Ce que j'ai compris, c'est qu'il y avait une ambiguïté.
M. François Perdrizet - Ce n'est pas une ambiguïté. La météo est en train de pénétrer dans tous les domaines. Il se pose des questions, notamment d'ordre réglementaire ou juridique, qui sont toujours un peu en retard par rapport à ce qu'attend la société des missions de service public. Par exemple, la chimie atmosphérique me semble clairement une mission de service public.
A ce propos, l'article 2 du décret prévoit une forme d'élargissement et précise que « Météo-France peut collaborer avec les services de prévention des risques majeurs ».
M. le président - Nous n'allons pas faire un procès là-dessus. Ce que nous voulons, c'est que les choses soient claires !
M. François Perdrizet - Ce qui est clair, c'est qu'il y a un certain nombre de nouveaux champs, dont certains sont en plein dans le service public. Il faudra le codifier.
M. le président - Que le Gouvernement dise les choses clairement et l'on évitera cette ambiguïté !
M. François Perdrizet - En second lieu, il y a des choses qui sont dans un domaine un peu spécialisé mais qui relèvent encore du service public, dans le cadre d'un système conventionnel.
Enfin, d'autres choses font partie du système privé.
Aujourd'hui, on peut en codifier une partie, mais la chose est en train d'évoluer, vous le savez bien !
M. le président - Pouvez-vous nous parler de vos activités commerciales, dont on dit que la montée en pression est lente ?
M. Jean-Pierre Beysson - On nous dit que la professionnalisation est lente.
La professionnalisation a été lente dans la mesure où, pendant des années, la progression de nos recettes commerciales était presque exponentielle. Nous avons connu des résultats considérables et le problème d'une professionnalisation plus forte était moins crucial.
C'est à cette époque, ayant accumulé des résultats importants, que nous avions pu rendre à l'Etat 21 millions d'euros, ce qui, par rapport à une subvention de 150 millions d'euros actuellement, représente un effort considérable de contribution à la maîtrise de la dépense publique.
La concurrence se développant et le marché ayant tendance à se saturer, nous avons rencontré une baisse de l'activité commerciale, laquelle a amené à une professionnalisation. Celle-ci porte ses fruits.
En 2004, nous avons quasiment stoppé la diminution du nombre d'appels sur les kiosques. C'est essentiellement sur les services en ligne que le problème commercial se pose. Depuis 1995, de manière continue, nous avons fait 1,2 millions d'euros de plus sur les recettes professionnelles, où la recette en volume, depuis 1996, est de 3,3 %.
En 2004, la progression des recettes est de 6 %.
Depuis le début de l'année, la progression des recettes est de 22,6 %. Rien n'est inéluctable et nous avons en effet pris toute une série de mesures pour remobiliser nos agents, affiner nos outils et répondre à la demande.
De ce point de vue, l'évolution de nos recettes commerciales mérite en effet une très grande vigilance, mais nous n'avons pas pris d'engagement inconsidéré. Nous avons retenu une progression des recettes commerciales d'un million d'euros par an, alors que nous avons fait en moyenne, depuis 1996, 1,6 millions d'euros par an sur les seules recettes professionnelles.
M. le président - Vous pouvez peut-être faire beaucoup plus !
M. Jean-Pierre Beysson - Bien sûr ! C'est que l'on va essayer de faire. Je pense que l'on y arrivera. Nous avons complètement revu notre organisation commerciale, recruté un directeur commercial, un directeur marketing, un directeur de vente qui, tous, viennent du privé. C'est en partie grâce à cela que nous avons ces résultats. Rien n'est inéluctable et nous y arriverons !
Cela étant, nous sommes naturellement vigilants, car le marché est difficile. La concurrence est de plus en plus présente, y compris sur les domaines des administrations et nous avons maintenant de la concurrence vis-à-vis des directions départementales de l'équipement, pour la viabilité hivernale.
M. le président - Qui vous concurrence ?
M. Jean-Pierre Beysson - Je ne veux pas leur faire de publicité, mais nous avons des concurrents.
M. le président - Sont-ils rentables, eux ?
M. Jean-Pierre Beysson - Mais nous sommes rentables !
M. le président - Avec une subvention substantielle !
M. Jean-Pierre Beysson - Je vous donnerai les chiffres lorsque nous parlerons des questions financières.
En 2002-2003, Météo-France, sans que la tutelle intervienne, a pris des décisions pour maîtriser ses dépenses de fonctionnement. Le rapport de la Cour le souligne : les dépenses de fonctionnement de Météo-France ont diminué de 2,3 % entre 2001 et 2003. Nous avons reporté des programmes pour faire face à cette situation.
Nous serons donc vigilants.
Certes, la tarification est un problème délicat, Monsieur Bénard a parfaitement raison. Je lui répondrai simplement que le parallélisme qu'il fait avec l'IGN ne me paraît pas pertinent.
Il me semble que les situations sont en grande partie différentes, dans la mesure où Météo-France a une base qui repose sur un accord international des 180 pays de l'organisation météorologique mondiale. Nous avons surtout une lettre de la direction générale de la compétition de la Commission européenne qui approuve notre système de commercialisation.
C'est la raison pour laquelle, dans le débat actuel sur la rediffusion des données publiques, nous considérons que nous avons une base juridique internationale forte qui précise assez clairement ce qui peut être fait et ce qui ne peut pas l'être. Notre situation est donc à mon avis différente.
M. le président - Pouvons-nous parler de la recherche et de la formation ?
M. Jean-Pierre Beysson - On dit que la recherche n'est pas orientée valorisation : elle est fondamentalement orientée valorisation des produits de Météo-France ! La recherche, à Météo-France, n'est pas une recherche amont, théorique, mais finalisée, qui a pour objectif essentiel de faire en sorte que nos modèles soient les meilleurs possibles.
C'est ce qu'on a réussi à faire ; le modèle de la prévision numérique de Météo-France a le meilleur score en Europe depuis de nombreux mois.
Bien sûr, il y a un certain nombre de cas où on pourrait imaginer que nos chercheurs valorisent plus ce qu'ils font. Mais il faut reconnaître que, dans le domaine des sciences atmosphériques, ce n'est pas simple. Ce ne sont pas des puces informatiques, ni du génome humain ! Je ne pense donc pas que l'observation sur l'insuffisante valorisation soit réellement pertinente.
M. François Perdrizet - Sur la recherche, je peux confirmer que la valorisation repose sur le développement météo et pas forcément sur la recherche de brevet. On a beaucoup d'autres organismes dans ce cas-là. Confondre valorisation et brevet pénalise Météo-France et n'a pas de sens.
M. le président - Vous formez vous-mêmes des effectifs peu nombreux. Pourriez-vous former vos propres collaborateurs avec ceux de vos concurrents ?
M. Jean-Pierre Beysson - C'est une observation fondée de la Cour.
Pour ce qui est de l'organisation, nous sommes en total désaccord. C'est un sujet politique fondamental !
Tout d'abord, je ne suis pas d'accord sur l'observation concernant l'organisation de la direction. Nous traitons nos structures géographiques comme des centres de profit qui doivent avoir leurs marges d'autonomie et leur politique, mais dans le cadre de politiques nationales définies par des services centraux.
L'organisation matricielle peut paraître difficile à comprendre mais, de la même manière qu'un directeur d'usine conduit sa politique d'achat ou de ressources humaines dans le cadre déterminé par la direction centrale, nous avons des directions centrales qui fixent une politique générale qui est ensuite déclinée direction par direction.
Le fait qu'il y ait beaucoup de directeurs ne change rien sur le plan budgétaire et financier. Les tires n'apportent aucun avantage spécifique. Il n'y a pas de majoration de salaire. Chacun n'est payé qu'au niveau du grade qui est le sien, dans le corps auquel il appartient. C'est un problème de dénomination : il est vrai que, dans le monde anglo-saxon dans lequel nous vivons, il est plus facile de parler du « directeur de la prévision » que du « chef du bureau de la prévision ». C'est un problème de carte de visite sans aucune conséquence financière ni budgétaire.
En ce qui concerne l'organisation générale, je n'en dirai pas plus.
Par contre, l'organisation territoriale mérite un débat plus long et c'est un sujet politique.
M. le président - On avait parlé d'un éventuel déménagement de l'Alma vers Trappes. Qu'en est-il ? Avez-vous prévu de rapprocher ces deux sites ?
M. Jean-Pierre Beysson - Oui, nous avons une étude en cours.
M. le président - Elle dure depuis un certain temps, semble-t-il.
M. Jean-Pierre Beysson - Non. On nous parle des délocalisations de 1980 et 1990. On nous dit que celles-ci ont conduit à des surnombres. Il n'y a pas eu de surnombres ! Il est reconnu entre autres par la Délégation à l'aménagement du territoire que ces opérations, qui ont été conduites et reconfigurées par des gouvernements successifs, sont exemplaires.
A la différence de la plupart des opérations de délocalisation de l'administration centrale, ce ne sont pas des délocalisations de postes, mais des déménagements de fonctionnaires qui sont partis avec leur poste pour Toulouse.
Nous avons, de notre propre chef, décidé de faire une opération complémentaire de délocalisation d'une partie de notre direction des systèmes d'observations de Trappes. Il n'a jamais été prévu que la totalité de cette direction serait transférée, et ce pour une raison extrêmement simple : si les opérations de 1980 et de 1990 ont réussi, c'est précisément parce qu'il restait en région parisienne un volant de postes pour que les agents qui ne souhaitaient pas déménager à Toulouse puisse avoir une réaffectation dans un poste en région parisienne ! Cette direction a servi à gérer le problème de la délocalisation à Toulouse.
Il y a maintenant à Trappes des agents qui ont échappé à trois délocalisations ; on savait que c'étaient des gens qui avaient des problèmes familiaux, de travail ou autres, qui ne pouvaient déménager. Nous avions dès le départ conscience que nous pouvions faire une opération de délocalisation partielle avec les nouveaux agents arrivés récemment. Nous avons fait une opération qui a sa logique technique : en effet, nous avons délocalisé à Toulouse des unités qui avaient des liens fonctionnels forts avec les directions centrales, en laissant à Trappes ceux qui avaient moins de liens avec Toulouse.
Un jour, l'ensemble de la direction des systèmes d'observation de Trappes déménagera à Toulouse, lorsque le renouvellement des générations fera qu'une majorité d'agents sont prêts à y aller.
Je signale que Météo-France a des personnels techniques ayant un statut propre. Il n'y a pas de mutation d'office dans la fonction publique, sauf erreur de ma part. Si l'on fait une opération de délocalisation autoritaire, on sera donc obligé de créer ces postes en surnombre à Toulouse pour tous ceux qui ne pourraient pas y aller. Cette opération se fera sans doute à une échéance de 5 à 6 ans.
Quant à l'Alma, c'est une toute autre opération, qui consiste à considérer que le siège de Météo-France n'a peut-être pas à demeurer dans un lieu aussi prestigieux. Nous sommes en train d'étudier cette affaire, mais elle est récente. Nous l'avons évoquée lors de la négociation de notre contrat d'objectif. J'ai une réunion avec mon ministre la semaine prochaine pour en parler. C'est une affaire qui avance.
M. le président - L'Alma pourrait donc aller à Trappes ?
M. Jean-Pierre Beysson - En effet. On est en train d'en étudier les conditions. C'est une opération délicate, car une grande partie des agents du siège ont leur domicile à l'Est de la région parisienne, mais je pense que cela se fera.
Concernant le territorial, on pourrait considérer - c'est un choix politique - que la présence d'un centre technique de Météo-France dans chaque département n'est plus nécessaire et que le gain que cela représente en termes d'affinement de la prévision n'est pas à la mesure du coût supplémentaire que cela représente.
M. le président - Vous l'avez proposé ?
M. Jean-Pierre Beysson - Nous ne le proposons pas pour une raison très simple : nous faisons la même chose depuis des années sans afficher ce torchon brûlant qui consisterait à dire que l'on va revoir la carte des centres départementaux. C'est inutile de le faire, dans la mesure où la pyramide des âges de Météo-France est plutôt décalée vers le bas par rapport à celle de la fonction publique. Assez peu de départs à la retraite sont prévus dans les années qui viennent. Afficher une opération que nous ne saurions pas faire, dans la mesure où on ne sait pas muter des agents d'office, ne sert à rien !
M. le président - Le déterminant de vos options, c'est donc le corps social ?
M. Jean-Pierre Beysson - Pas du tout ! Nous considérons que la présence de Météo-France dans chaque département a son utilité et sa justification, mais aussi qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait plusieurs installations dans le même département. Nous avons, dans cette logique, fermé de nombreuses stations ces dernières années - Luce la Croix Haute, Embrun, toutes les îles du canal du Mozambique, Le Touquet, Dinard, Saint-Nazaire - et nous allons en fermer encore.
C'est ce qui explique qu'en 2002 et 2003, nous avons redéployé 230 emplois pour faire face aux missions nouvelles qui sont les nôtres dans le domaine du service public - surveillance de la qualité de l'air, océanographie, biométéorologie, enfin, suite à la canicule et aux grands froids.
On pourrait imaginer, plus tard, de réaliser ces redéploiements non plus pour développer de nouvelles missions, mais pour réduire la masse de l'établissement. C'est possible.
M. le président - Si vous nous dites que, scientifiquement, il n'y a pas de justification à maintenir un centre dans chaque département...
M. Jean-Pierre Beysson - Je n'ai pas dit cela ! Nous considérons, nous, que c'est un gain, mais on pourrait considérer politiquement que ce gain n'est pas à la mesure du surcoût que cela représente. C'est une question politique. Je pense que ce ne serait pas nécessairement une bonne chose.
M. François Perdrizet - La question des trois niveaux a été une décision explicite du ministre, soulevée dans le rapport de la mission d'inspection.
J'ajoute que tous les centres départementaux ne se ressemblent pas. Dans certains, cela a un sens technique, du fait des spécificités locales, de maintenir une implantation forte de Météo-France ; dans d'autres cas, il y a un regroupement possible.
Plutôt que de donner au président consigne de prendre position pour tous les centres, on lui a demandé, dans le cadre de la réduction des effectifs prévus au contrat, de gérer au mieux l'évolution, de façon raisonnable et compatible avec le corps social.
M. Jean-Pierre Beysson - Je suis un pragmatique : redéployer 230 emplois sans faire une guerre dans l'établissement - et c'est un établissement socialement difficile - est tout aussi bien qu'afficher un principe qu'on ne saura pas mettre en oeuvre ! C'est ma position.
M. le président - Gestion du personnel : 3.700 agents. Cela fait beaucoup de monde !
M. Jean-Pierre Beysson - En effet, surtout si on le compare aux 1.800 du Met Office !
Tout d'abord, je ne considère pas le système anglais comme un modèle pour le système de service public à la française !
En second lieu, le Met Office n'a rien à voir avec Météo-France. Le Met Office n'a pas de chercheurs ; nous en avons 250. Le Met Office n'a pas de responsabilités outre-mer ; nous avons 500 personnes outre-mer. Le nouveau directeur du Met Office, qui vient du service météorologique américain, considère qu'ils sont allés beaucoup trop loin dans la concentration des services et est en train de réfléchir à la création de nouvelles unités régionales pour éviter de tout concentrer à Exeter, comme c'est le cas actuellement.
Il est dit que cet effectif a été stable. C'est vrai en effectif réel ; en réalité, l'effectif réel a été maintenu parce que nous avons une politique de récupération du temps partiel et une gestion plus dynamique des emplois vacants. Les effectifs budgétaires sont passés de 3.837 à 3.725. Si l'on neutralise les effets des 75 emplois créés pour la RTT, on a 185 emplois en moins, soit - 5 % des effectifs sur la période considérée.
Nous estimons donc, de ce point de vue, avoir apporté notre contribution à la maîtrise des dépenses publiques !
Vous ne tenez pas un service permanent sans un effectif de 8 personnes. Je ne pense pas que la norme d'armement de nos postes permanents soit démesurée par rapport à celle qui existe dans beaucoup d'autres services permanents, où les coefficients sont sensiblement supérieurs aux nôtres.
M. le président - Ce n'est pas ainsi que l'on maîtrise la dépense publique !
M. Jean-Pierre Beysson - Nous l'avons maîtrisée ! Nous avons supprimé à peu près 15 % de nos postes permanents ; cela représente une centaine d'emplois. Bien entendu, lorsque nous pouvons le faire techniquement, nous les transformons au moins en semi permanents.
Le rapport laisse entendre que c'est pour un problème de choix social. Ce n'est pas le cas ! La veille météorologique H 24 est une obligation. Ce n'est pas pour faire plaisir aux personnels que l'on a des agents H 24 à Roissy, Orly, sur toutes les grandes plates-formes aéroportuaires, dans les centres régionaux et à Toulouse !
Je veux d'ailleurs corriger ce qui a été dit tout à l'heure. On a dit que le noeud central de Météo-France était les directions régionales. Non ! Ce sont à la fois les directions régionales et les directions centrales qui sont à Toulouse. Tout cela est indissociable. C'est une chaîne continue.
Un paragraphe du schéma directeur de la prévision qui a été cité tout à l'heure illustre bien les réserves méthodologiques que l'on peut faire sur ce rapport : il évoque un document que je connais bien puisqu'il est de ma plume ! Il date de 1997 et était destiné à préparer ce que nous avions appelé les « ateliers de la prévision ». Afin de montrer que la réforme était indispensable, on avait accentué les défauts qu'on avait à corriger. Le schéma de la prévision qui en a découlé a d'ailleurs mis en place un partage très net des compétences entre Toulouse, les directions régionales et les centres départementaux.
On pourrait dire la même chose des 15 ou 20 autres citations : ce sont le plus souvent des documents rédigés pour faire progresser la prise de conscience de la nécessité d'une réforme. Je trouve donc assez singulier de nous opposer ces documents.
M. le président - La Cour dit que la gestion prévisionnelle des emplois est modeste.
M. Jean-Pierre Beysson - Oui, c'est vrai, nous sommes d'accord avec la Cour.
M. le président - Nous avons vu par ailleurs que les modalités de gestion du temps de travail étaient spécifiques.
M. Jean-Pierre Beysson - On trouve le temps de travail coûteux : les personnels en service permanent qui travaillent les samedis, dimanches, jours fériés, ont un temps de travail inférieur de 10 % à celui des gens qui ont des horaires de bureaux. Ils travaillent 1.413 heures au lieu de 1.600 heures.
Peut-on considérer que c'est un avantage démesuré pour des gens qui travaillent la nuit, les dimanches, les jours fériés ? Nous ne le pensons pas, d'autant que le montant des majorations horaires attribuées à nos personnels par rapport à ce qui existe à l'équipement est infiniment moins avantageux, en particulier pour les horaires de nuit !
Contrairement à ce qui est dit, il y a eu des périodes où les postes permanents étaient très difficiles à pourvoir. Il a même fallu, à une certaine époque, rajouter des primes spécifiques aux prévisionnistes en service permanent pour que ces postes soient pourvus. Nous avons aujourd'hui, à la demande du comité d'hygiène et de sécurité un rapport de la médecine du travail sur les conséquences du travail de nuit ; celles-ci ne sont pas contestables !
On nous dit ensuite que le système mis en place à l'occasion de la RTT l'aurait été de façon irrégulière et outrageusement favorable.
Pour ce qui est de l'irrégularité, j'ai déjà répondu.
M. le président - Je n'ai pas entendu cela !
M. Jean-Pierre Beysson - Si, c'est écrit ! Et l'on cite à nouveau une propre note de ma part ! C'est extraordinaire ! La preuve apportée par la Cour des Comptes est une note du président directeur général. Je trouve cette façon de faire étonnante !
Encore une fois, le problème de la pause méridienne a été traité par un arrêté. Pourquoi ? C'est extrêmement simple. La négociation de la RTT a duré plus d'un an - un an de conflit social. Il apparaissait clairement, par des chiffres irrécusables, qu'un personnel en horaire de bureau gagnait 169 heures du fait de la RTT et qu'un personnel en horaire permanent gagnait 99,9 heures. En effet, nous n'avons compensé que la moitié des emplois qui auraient dû résulter de l'effet mécanique de la RTT.
Pour assurer 365 vacations de jour et autant de vacations de nuit, il faut bien que les personnes soient là. Soit vous réduisez leur temps de travail, soit vous augmentez les effectifs. L'effectif, sur proposition de Météo-France, n'ayant été augmenté que de la moitié de son effet mécanique - 75 emplois au lieu de 150 - il fallait faire des gains de productivité qui ont été faits.
C'est pourquoi nous avons supprimé environ 15 % des postes permanents. Comme ils étaient à 99 heures au lieu de 160 heures, nous avons dû accepter, comme c'était le cas depuis les années 1980, que la pause méridienne continue à être comptée dans le temps de travail pour les personnels en horaires permanents.
Du fait de l'absence de compensation mécanique de la RTT en créations d'emplois, nous avons autoritairement limité la réduction du temps de travail à 32 heures.
Auparavant, ces personnels en horaires permanents, du fait des bonifications horaires, travaillaient autour de 35 heures ; du fait de la RTT, ils auraient dû travailler autour de 30 heures avec les bonifications. Comme nous n'aurions pu remplir les tableaux de service pour l'ensemble des postes qui existaient, indépendamment de ceux qu'on a supprimés, on a limité à 32 heures. Ainsi, la mécanique a pu tourner, mais on a eu un an de conflit social.
Pensez-vous, si le système avait été avantageux comme on le laisse entendre, qu'on aurait eu plaisir à avoir un tel conflit, qui ne s'est jamais résolu par un accord avec les organisations syndicales ? Il a fallu imposer une décision. L'accord est toujours considéré comme désavantageux puisque, au bout du compte, ils ont eu une réduction de 129 heures au lieu de 169 heures pour les personnels en horaires de bureau.
De ce point de vue, ce n'est pas aussi noir qu'on le dit. Il n'y a pas eu de libertés masquées.
M. le président - Je confie un instant la présidence à M. Denis Badré, vice-président de la commission.
M. Denis Badré, président - Continuez, Monsieur le Président.
M. Jean-Pierre Beysson - La météorologie nationale, dans les années 80, a bénéficié d'augmentations d'emplois importantes. Le choix, à l'époque, a été d'empocher les augmentations d'emplois et de reporter l'étude de la situation indemnitaire des personnels.
Il en est résulté un écart considérable des régimes indemnitaires de l'ensemble des personnels techniques de Météo-France - ingénieurs, ingénieurs des travaux, techniciens.
Depuis 1996, au fur et à mesure des contrats d'objectif successifs, nous avons essayé de remettre à niveau ces régimes indemnitaires. A partir du moment où ces agents sont issus des mêmes concours, il y a un vrai risque de désaffectation si les situations offertes sont totalement déconnectées par rapport au ministère de l'équipement ou à l'IGN.
Les corps des ingénieurs issus de Polytechnique ont fusionné ; l'écart indemnitaire était gigantesque, presque du simple eu double. Parallèlement, nous nous sommes efforcés de remonter le niveau indemnitaire des ingénieurs et des techniciens.
Il est vrai qu'il y a une culture d'égalitarisme total très forte et que les syndicats auraient souhaité que ces augmentations ne changent rien à la hiérarchie des salaires telle qu'elle existait.
Nous avons largement élargi la hiérarchie des salaires qui existait auparavant à Météo-France ; les ingénieurs issus de Polytechnique, maintenant ingénieurs de Ponts et chaussées, ont eu une augmentation indemnitaire considérable. Dans les corps techniques en dessous, nous avons augmenté de manière prioritaire les grades des ingénieurs des travaux, ingénieurs et techniciens où les écarts étaient importants.
Nous n'avons donc pas donné satisfaction à la revendication des organisations syndicales de laisser la hiérarchie des salaires telle qu'elle était et de conserver le statut quo.
Cela n'a pas été le cas et les augmentations sont singulièrement plus importantes pour les ingénieurs divisionnaires des travaux que pour les ingénieurs du premier grade, où l'écart par rapport à leurs homologues du ministère de l'équipement n'était pas très important. L'observation ne me paraît donc pas pertinente : l'évolution a été importante !
Il est vrai que la rémunération au mérite est programmée dans notre contrat d'objectif pour 2007. Je signale que celui-ci a été strictement respecté depuis 1995 de manière scrupuleuse, aussi bien par l'Etat que par l'établissement. Tout ce qui est écrit a été mis en oeuvre. La rémunération au mérite sera mise en place en 2007 pour une raison financière, l'enveloppe prévue n'ayant pas permis de tout faire à la fois.
En 2006, nous commencerons par un accroc important à cette logique d'égalitarisme total. Nous avons créé une prime fonctionnelle. Les gens qui tiennent des postes de responsabilité toucheront une prime plus importante que leur collègue qui tient un autre poste. C'est aussi une modification profonde par rapport à la culture de l'établissement, totalement mésestimée dans le rapport mais qui n'en est pas moins vraie !
Concernant l'équilibre financier, la subvention à Météo-France a augmenté de 7,8 % sur l'ensemble de la période sous revue. Durant cette période, l'inflation a été de 14,9 %. La subvention accordée à Météo-France a donc diminué en volume de 7,1 % pendant cette période.
Pendant la même période, le budget de l'Etat a progressé en volume de 4,3 %. Nous avons donc apporté une contribution significative à la maîtrise des dépenses publiques. Il y a donc un écart de 10 % par rapport à l'évolution des dépenses générales du budget de l'Etat.
Dans le même temps, nous avons reversé à l'Etat 21 millions d'euros, grâce aux résultats importants de 2000. Nous avons financé quasi intégralement notre avion de recherche, soit 16 millions d'euros, ainsi que la délocalisation à Toulouse de notre direction des systèmes d'observation pour 6 millions d'euros. Au total, 42 millions ont été financés durant cette période par l'établissement sans peser sur la subvention de l'Etat. Ceci me paraît répondre à la question de savoir si l'on apporte une contribution à la maîtrise des dépenses publiques. Nous pensons que nous le faisons, même si les effectifs ont été maintenus en termes réels - mais réduits en effectifs budgétaires.
S'agissant des irrégularités de comptabilisation, certes, l'ensemble de nos immobilisations n'ont pas été portées au bilan et ne font donc pas l'objet d'amortissements. Où en est - on aujourd'hui ? Sur l'ensemble des immobilisations - et il y en a énormément puisque nous sommes installés dans l'ensemble des départements et souvent dans plusieurs endroits dans le même département - seule la Météopole n'a pas encore été inscrite au bilan de Météo-France. C'est un bien significatif, mais la valorisation de l'ensemble des ces immeubles ne nous a pas encore été communiquée par les services compétents.
J'ajoute que ces immobilisations qui se traduiront par des amortissements complémentaires sont, compte tenu de la durée de l'amortissement, marginales et n'affecteront pas de manière sensible le résultat des années qui viennent.
M. Jean Arthuis, président - Mais M. Bénard nous a dit que les comptes n'étaient pas, en l'état, certifiables. La LOLF a posé un principe de sincérité des documents financiers. Or, vous êtes dans un cas de figure où vous n'auriez pas la certification de sincérité !
M. Jean- Pierre Beysson - Il manque un bien : il sera inscrit dès que nous aurons l'évaluation des domaines. Il est déjà inscrit à l'inventaire de nos biens mais pas encore à notre bilan, pour la raison que j'ai indiquée. L'ensemble, peut-être à part quelques logements ou locaux, l'a été.
Quant à notre résultat 2004, il va pratiquement doubler par rapport au résultat 2003, lequel était déjà en progression sensible par rapport à l'année précédente. Nous étions à 4,7 millions d'euros : nous serons à 7,8 millions d'euros à la fin de l'année. La situation financière est bonne et je ne pense pas qu'elle soit menacée.
M. le président - Quant à la comptabilité analytique...
M. Jean-Pierre Beysson - La Cour a raison : je n'en dis pas plus.
M. le président - Vous vous engagez donc à la mettre en place ?
M. Jean-Pierre Beysson - Elle fonctionnera à l'automne.
M. François Perdrizet - C'est un point très important pour nous et je crois que Météo-France est vraiment en voie de réussir.
Un second point est important : il s'agit de la démarche qualité, qui consiste non seulement à satisfaire aux attentes, mais aussi à revoir tout ce qui dysfonctionne et qui coûte.
M. le président - La LOLF n'est pas seulement une peinture que l'on devrait passer sur les édifices en place : elle doit être l'occasion de remettre en cause un certain nombre de structures et d'organisations !
Monsieur le Président Bénard, vous avez été mis en cause à plusieurs reprises. Estimez-vous nécessaire d'apporter quelques précisions avant que M. Masseret ne prenne la parole ?
M. Jean-François Bénard - J'ai été un peu interloqué par les réponses du président de Météo-France car, sur un certain nombre de points, il semblait contester le constat fait par la Cour ; or, les phrases qui suivaient étaient la confirmation de ce que nous avions dit !
J'ai essayé de comprendre d'où venait sa véhémence. Je crois qu'elle repose sur une confusion quant à l'objet du rapport. Le rapport que nous avait demandé la commission des finances du Sénat est un rapport sur Météo-France, non sur la gestion de son président. Une chose est de dire que tel ou tel problème mérite d'être examiné à Météo-France ; une autre chose serait de dire - ce que nous ne disons pas - que ceci est de la responsabilité du président lui-même.
Je crois que le rapport a pointé un certain nombre de sujets sur lesquels des progrès sont possibles. Il n'est ni dans notre intention ni dans nos missions de dire qui doit les prendre en charge, mais je crois qu'il y a des sujets importants qui pourraient contribuer à l'amélioration de l'efficacité de la dépense publique.
M. le président - Cette approche est très exaltante : elle ouvre des marges de progression.
M. Jean-Pierre Beysson - C'est ce que l'on fait depuis des années ! J'aurais bien aimé que ce soit reconnu !
M. le président - Cela étant, « peut mieux faire » : cela est très encourageant !
M. Jean-Pierre Beysson - Bien sûr, on peut toujours mieux faire !
M. le président - La parole est au rapporteur spécial.
M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial - J'aurais presque envie de dire que si j'avais su, je ne serais pas venu ! Ou bien le rapporteur spécial ne sert à rien - ce qui a été démontré cet après-midi - ou bien on organise nos débats différemment pour lui permettre de poser lui-même un certain nombre de questions.
La tournure des événements ne l'a pas permis. Je le constate, je le regrette, je le condamne, point final !
Il serait surprenant qu'à cet instant, je puisse poser les questions qui pouvaient être soulevées à partir du rapport que la commission avait demandé. Si jamais on doit reproduire de telles auditions, il faudra peut-être s'y prendre autrement. J'ai assisté à une partie de ping-pong ou de tennis fonds de cours intéressante, où des questions ont été posées et des réponses apportées.
Une observation sur les rapports de la Cour. Je suis arrivé en même temps que vous au Sénat, Monsieur le Président ; le rapporteur général était Maurice Blin et j'avais la responsabilité à la commission des finances du rapport sur le rapport de la Cour des comptes. J'avais observé que lorsque la Cour se mêlait d'opportunité, elle était nettement moins bonne que lorsqu'elle faisait des observations purement comptables.
Je l'avais observé sur un point très particulier que je connais bien et que Gérard Longuet connaît tout aussi bien, à propos de la convention générale de protection sociale de la sidérurgie. La Cour trouvait le système tout à fait anormal, ce à quoi j'avais fait observer que, quand on perd 100.000 emplois, il faut bien avoir des réponses politiques !
Ce sont toutes les observations que j'avais à faire à cet instant.
M. le président - Je tiens à vous dire que nous organisons ces auditions contradictoires depuis plus d'un an. A chaque fois, nous donnons d'abord la parole à la Cour, en insistant sur le fait qu'elle doit contenir ses observations sur l'essentiel et éviter les considérations purement rhétoriques.
A la suite de ces observations, le gestionnaire apporte ses réponses, puis viennent les questions des membres de la commission des finances.
La parole est aux commissaires.
M. Maurice Blin - Je retiens de cette audition - vive mais très intéressante, en dépit de ce que disait à l'instant M. Masseret - le sentiment que vous obéissez à une loi non écrite mais toujours respectée par la fonction publique à la française : la qualité n'a pas de prix !
Indiscutablement, votre service, que je connais mal, est certainement, en qualité, l'un des meilleurs. Toutefois, notre rôle est d'essayer, compte tenu de la rigueur des temps, de voir si l'on ne peut d'abord fixer un coût puis, ensuite, assurer la meilleure qualité possible.
On a l'impression, dans bien d'autres domaines, par exemple l'armement, que cela a été plutôt l'inverse : on faisait un merveilleux outil qui coûtait plus cher que prévu et que l'on vendait quelquefois mal !
Ma seconde question - je sais que vous ne pouvez me répondre - est la suivante : les 3.700 agents, qui sont certainement de très bonne qualité, sont fonctionnaires et ont le bénéfice et la lourdeur de ce statut.
Peut-on s'interroger sur ce que représenterait un assouplissement profond d'un tel statut ? Je ne sais ce que font nos voisins, concurrents, rivaux, partenaires. Peut-être y a-t-il d'autres services qui fonctionnent moins bien que le nôtre mais qui coûtent moins à la Nation et qui ont plus de souplesse.
Pour faire reconnaître l'application de la RTT, il a fallu un an de discussions. Que de temps perdu, de mal supporté et de tensions inutiles !
Je m'arrête. On pourrait parler bien davantage, mais j'ai beaucoup appris de vous et vous en remercie.
M. Jean-Pierre Beysson - Sur le premier point, vous avez raison. Il est clair que c'est une responsabilité politique que de dire : « Voilà le prix que l'on veut payer pour ce service ».
Ma responsabilité est de négocier avec l'Etat un contrat d'objectif. C'est le cas depuis 1995 et l'on négocie dans ces limites-là. Lorsque celles-ci sont fixées, nous faisons ce qu'il faut pour atteindre les économies retenues par le Gouvernement.
Je rappelle que nous avons réduit la subvention de l'Etat de 7 % en volume. Pendant la même période, le budget de l'Etat progressait, lui, en volume, de plus de 4 %. On a donc pesé sur la dépense publique 10 % de moins que la moyenne générale des dépenses de l'Etat. On a apporté une contribution, qui se poursuit. Elle est encore renforcée dans le nouveau contrat d'objectif.
Je pense que gérer le domaine social tout en maintenant un niveau de qualité élevé n'est pas un mauvais « deal » pour la collectivité nationale. Je suis assez fier d'avoir fait évoluer ce service public, contrairement à ce que pense la Cour, tout en pesant moins sur la dépense publique !
Quant à un statut différent, j'ai été directeur général d'ADP. J'avais un préavis par jour. La grande différence par rapport à Météo-France, c'est que l'on pouvait négocier. Là, la vraie négociation, c'est la satisfaction intégrale du cahier de revendications des organisations syndicales. C'est l'univers dans lequel nous sommes. Ce n'est effectivement pas facile et c'est ce qui explique que, pendant un an, on a discuté durement - et il y a eu des moments très tendus - la mise en place de la RTT.
M. le président - Vous comprenez que c'est aussi le rôle du législateur que d'être l'observateur de ces situations et peut-être d'être à vos côtés pour que ceux qui négocient sachent que ceci se fait devant l'opinion publique. Nous avons des comptes à rendre aux Français.
J'aurais une simple question : comment se fait-il que vous ayez un peu plus de 30 millions d'euros de valeurs mobilières de placements et à peu près le même montant de disponibilités, soit 60 millions d'euros à l'actif de votre bilan ? C'est bien, mais est-ce de la bonne gestion de trésorerie pour l'Etat ?
M. Jean-Pierre Beysson - Nous sommes un établissement public administratif ; la responsabilité de la gestion de la trésorerie est celle de l'agent comptable et non de l'ordonnateur. Il se trouve que le comptable a une gestion extrêmement prudente ; il a placé la moitié de ses disponibilités en valeurs du trésor. C'est encore un indice du fait que la situation financière de l'établissement est bonne !
M. le président - La subvention pourrait peut-être être ajustée en fonction de vos capacités de trésorerie.
M. Jean-Pierre Beysson - On l'a fait !
M. le président - Nous allons clore cette audition contradictoire qui a été passionnante. Elle a duré plus longtemps que prévu.
Nous sommes bien conscients que l'art de réformer n'est pas un art facile...
M. Jean-Pierre Beysson - On l'a fait.
M. le président - Il est peut-être important que l'ensemble des 3.700 collaborateurs de Météo-France sachent que nous avons de la considération pour la mission qu'ils accomplissent, mais que nous avons aussi l'obligation de veiller avec eux à ce que l'efficacité de la dépense publique soit une exigence forte.
C'est ainsi que nous concevons notre mission de parlementaires. Nous souhaitons accomplir des contrôles, nous faire aider par la Cour des comptes et veiller à ce que le contrôle ne reste pas un rapport qui trouve sa place immédiatement dans un placard. S'il y a des contrôles, s'il y a des observations, c'est pour tenter d'améliorer la gestion !
Merci. Bon vent à Météo-France, qu'il soit un vent modéré, un vent salvateur !
Je voudrais vous demander l'autorisation de publier le rapport de la Cour. Il y sera bien sûr ajouté les réponses du président de Météo-France, du représentant du ministère de l'équipement et, avant que de le publier, nous vous soumettrons, Messieurs, le compte rendu de vos propos.
La commission est-elle favorable à cette proposition ? La commission y est favorable. Je vous en remercie.
La séance est suspendue quelques instants.
ANNEXES
ANNEXE 1 - COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES À LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT SUR L'ETABLISSEMENT PUBLIC MÉTÉO-FRANCE
ANNEXE 2 - RÉSUMÉ ET RECOMMANDATIONS DE LA COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES
ANNEXE 3 - RÉPONSES DE MÉTÉO-FRANCE SUR LA COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES A LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT
COMMUNICATION À LA COMMISSION DES FINANCES, DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE ET DES COMPTES ÉCONOMIQUES DE LA NATION DU SÉNAT
Article 58-2 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.
Articles L. 132-4 et L. 135-5 du code des juridictions financières
MÉTÉO-FRANCE |
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PARTIE I : L'ACCOMPLISSEMENT DES MISSIONS 50
I. L'EXPLOITATION OPERATIONNELLE 50
A. LA PRODUCTION MÉTÉOROLOGIQUE 50
1. La modernisation de l'observation 50
2. La prévision numérique : assimilation et modélisation 51
a. Des besoins de calcul importants 51
c. Les collaborations européennes et la mise en commun de moyens 51
B. LES MISSIONS INSTITUTIONNELLES ET LES ACTIVITÉS COMMERCIALES 52
1. Les missions institutionnelles 52
a. La vigilance météorologique 52
b. Les limites des missions institutionnelles de l'établissement. 54
2. Les activités commerciales 54
a. L'apparition de la concurrence 54
b. La professionnalisation de la fonction commerciale 55
c. Les principes de tarification 55
A. LE DÉVELOPPEMENT ET LA RECHERCHE 56
1. Le pilotage du développement et de la recherche 56
2. Une recherche de bon niveau mais faiblement valorisée 57
B. L'ECOLE NATIONALE DE LA MÉTÉOROLOGIE 57
2. Des coûts de formation élevés 58
3. La collaboration avec d'autres établissements d'enseignement 59
C. LA PRÉSENCE DE MÉTÉO-FRANCE DANS LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES 59
PARTIE II : L'ORGANISATION DE METEO-FRANCE 60
A. L'ORGANISATION GÉNÉRALE DES SERVICES 60
B. DES SERVICES CENTRAUX RÉPARTIS SUR TROIS SITES 60
II. L'ORGANISATION TERRITORIALE 61
A. LA PRÉSENCE TERRITORIALE DE MÉTÉO-FRANCE 61
1. Les directions interrégionales 61
2. Les Centres Départementaux de la Météorologie et les stations d'observation 62
B. LES JUSTIFICATIONS DE L'ÉCHELON DÉPARTEMENTAL 63
PARTIE III : LA GESTION DU PERSONNEL 65
A. LES CARACTÉRISTIQUES DU PERSONNEL DE MÉTÉO-FRANCE 65
2. Les particularités de la gestion des ressources humaines 67
a. Le régime de travail dit en « service permanent » 67
b. Les « brigades de réserve » 69
c. La persistance d'un certain égalitarisme en matière indemnitaire 70
d. La prise en compte de l'ancienneté dans les procédures de mutation 70
B. LES MODALITÉS DE VERSEMENT DES RÉMUNÉRATIONS 71
C. LA GESTION PRÉVISIONNELLE DES EMPLOIS 71
II. LES ÉVOLUTIONS MARQUANTES 72
A. L'AMÉNAGEMENT ET LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL 72
1. Le dispositif général du mécanisme d'ARTT 72
2. La question des personnels en service permanent 73
3. La création de 75 emplois 74
B. L'INTÉGRATION DANS LE CORPS DES PONTS ET CHAUSSÉES 75
1. Les modalités de la fusion et le rattrapage indemnitaire 75
2. Les conséquences de la fusion sur le régime indemnitaire des autres corps techniques de Météo-France 75
C. LE PROTOCOLE DGAC DU 7 DÉCEMBRE 2000 76
III. LE RÉGIME INDEMNITAIRE 77
A. L'INCOMPLÈTE PUBLICATION DES TEXTES INDEMNITAIRES 78
B. LE VERSEMENT DE PRIMES SANS TEXTE APPLICABLE : LE CIAV 78
PARTIE IV : LES QUESTIONS FINANCIÈRES 80
A. LES PROBLÈMES COMPTABLES 80
B. LA COMPTABILITÉ ANALYTIQUE 80
C. EVOLUTION GÉNÉRALE DES PRODUITS ET DES CHARGES 81
2. L'évolution des produits 82
A. L'ORGANISATION COMPTABLE ET LES OUTILS DE GESTION 84
Aux termes de son statut 2 ( * ) , Météo-France a pour mission « de surveiller l'atmosphère, l'océan superficiel et le manteau neigeux, d'en prévoir les évolutions et de diffuser les informations correspondantes. Il exerce les attributions de l'Etat en matière de sécurité météorologique des personnes et des biens » et doit « satisfaire les besoins en assistance météorologique nécessaire à la sécurité aéronautique ». Il est également chargé de la recherche météorologique et de la formation des techniciens de la météorologie. Sur le plan international, il est chargé de « représenter la France au sein de l'Organisation météorologique mondiale ». Il contribue enfin « au développement économique et à l'amélioration de la qualité de la vie en répondant aux besoins d'information des différents secteurs d'activités ».
Le rapport établi par la Cour des comptes à la demande de la commission des finances du Sénat examine les modalités selon lesquelles cet établissement public remplit ses missions, et la pertinence de l'organisation qu'il s'est donnée à cette fin.
L'ACCOMPLISSEMENT DES MISSIONS
I. L'EXPLOITATION OPERATIONNELLE
Météo-France élabore deux catégories de données et de prestations : la production dite « amont », c'est-à-dire les données de base sur lesquelles reposent la prévision ou les études climatologiques, et la production dite « aval » qui comprend l'ensemble des prestations de Météo-France pour des tiers institutionnels (Etat, aviation civile) ou des clients (médias, professionnels, particuliers).
A. LA PRODUCTION MÉTÉOROLOGIQUE
Météo-France entretient un large réseau d'instruments d'observation de l'atmosphère, de la surface des océans et du manteau neigeux. Les données sont assimilées par un surpercalculateur, puis intégrées à un modèle atmosphérique permettant d'établir un état général de l'atmosphère. C'est à cet état initial reconstitué que sont appliqués les modèles de prévision permettant de calculer un état futur. Les prévisionnistes établissent à partir des sorties de ces modèles, de leur expérience et de données d'observation plus récentes, une prévision d'évolution du temps.
1. La modernisation de l'observation
L'observation, et notamment l'observation au sol, n'a longtemps pas connu la même modernisation que les autres secteurs d'activité de l'établissement. Elle accusait un retard, tant en termes d'organisation de la fonction que de qualité du réseau : une inspection des sites retenus pour le projet de modernisation Radome, menée en 1998 et 1999 avait établi que 46 % des stations produisaient au moins une donnée avec un degré de fiabilité considéré comme inacceptable au niveau international.
La qualité de l'instrumentation et de l'observation est désormais une priorité affirmée avec force par l'établissement. Elle est en effet un élément essentiel de l'amélioration de la prévision immédiate ou à très courte échéance, permettant notamment de mieux détecter certains phénomènes dangereux.
L'établissement a donc engagé, au milieu des années 1990, un plan pour l'observation qui s'est traduit par une réorganisation des fonctions de pilotage, par la modernisation et l'extension du réseau de radars pluviométriques en partenariat avec le ministère de l'environnement, et par l'amélioration du réseau de stations d'observation au sol : le projet Radome, lancé en 1996.
La première phase de ce projet, portant sur 400 stations automatiques, devait s'achever en 2002. Les 154 stations du réseau synoptique devaient être ensuite équipées.
Le projet Radome a enregistré plus de deux ans de retard. En 2000, aucune des 75 stations prévues n'était opérationnelle, en 2001 seules 51 stations l'étaient sur les 183 prévues. En 2002 et 2003, 121 et 198 stations fonctionnaient sur près de 400. Fin 2003, 24 des 154 stations du réseau synoptique étaient équipées.
Ce retard est pour partie imputable à des difficultés juridiques (passation des marchés, conventions d'occupation des sites concernés). A partir de 2002, il s'explique par le report des investissements.
Météo-France estime que ces reports ne l'ont pas empêché de disposer de l'un des réseaux les plus performants d'Europe, le nombre de stations installées étant supérieur à celui des outils équivalents dont disposent les services météorologiques britannique ou allemand. L'établissement ne précise cependant pas si ces indicateurs de moyens sont corroborés par les indicateurs de résultats. Il n'est donc pas possible de déterminer si cette supériorité quantitative est le reflet de choix techniques différents, de spécificités territoriales ou climatologiques nationales, d'un choix d'équipement disproportionné par rapport à l'amélioration du service rendu ou d'une réelle supériorité de Météo-France.
En tout état de cause, il reste surprenant que l'établissement ait fait des choix budgétaires l'amenant à différer un investissement dans un domaine considéré comme une priorité.
2. La prévision numérique : assimilation et modélisation
La prévision numérique est un élément incontournable du progrès des prévisions météorologiques des vingt dernières années. Elle nécessite toutefois des investissements considérables et croissants, en capacités de développement et de calcul intensif.
a) Des besoins de calcul importants
Météo-France dispose de l'un des supercalculateurs les plus puissants de France. Depuis 1998, il a augmenté sa puissance de calcul disponible à trois reprises et consacre près de 4 M€ par an au calcul intensif.
Il n'entre pas dans les compétences de la Cour d'évaluer le besoin effectif en calcul lourd de l'établissement. On notera simplement que plusieurs grands services météorologiques nationaux font des investissements similaires. L'établissement estime que les besoins devraient croître encore à l'avenir en raison de l'émergence de modèles à résolution plus fine, des apports attendus de l'assimilation variationnelle à quatre dimensions et du développement de la recherche.
Or, la rationalisation au niveau national des achats de supercalculateurs semble être un exercice délicat en raison de l'évolution constante de la nature des produits disponibles sur le marché et de la quasi inexistence d'un marché de l'occasion. L'établissement continuera donc à consacrer d'importants moyens au calcul intensif.
b) La modélisation
Météo-France utilise quotidiennement deux modèles de prévision de résolution différente (modèles ARPEGE/ARPEGE étiré et ALADIN).
Leur développement et leur mise au point sont consommatrices en temps de calcul ainsi qu'en ressources humaines. Le développement d'ALADIN a ainsi mobilisé des centaines d'hommes/mois et s'est étendu sur une période de près de six ans.
Météo-France a fait le choix de conserver une capacité de modélisation globale, à la différence de certains services météorologiques européens qui ont regroupé les leurs au sein d'un consortium.
c) Les collaborations européennes et la mise en commun de moyens
L'établissement a développé une stratégie d'excellence nationale qui, certes, s'appuie sur de nombreuses coopérations européennes et internationales et sur les moyens du Centre Européen de Prévisions Météorologiques à Moyen Terme (CEPMMT), mais n'a pas pour objectif une intégration complète au niveau européen de ses capacités de modélisation globale.
Les coopérations européennes existent de longue date dans les différents domaines de la météorologie. L'observation fait ainsi l'objet de collaborations visant à coordonner et renforcer les systèmes d'observation sur un plan géographique. Dans le domaine satellitaire, les moyens financiers des services ont été mis en commun en 1986 au sein de l'organisation européenne EUMETSAT, située en Allemagne, qui assure le développement et fonctionnement opérationnel des satellites.
De tels partenariats existent également dans le domaine de la prévision numérique. Météo-France y participe, à des niveaux d'intégration différents selon les échéances.
Le CEPMMT, créé en 1973 à Reading au Royaume-Uni, fournit à l'ensemble de ses membres des prévisions à moyen terme (quatre à dix jours) et fait des recherches sur les prévisions saisonnières. L'établissement s'appuie largement, dans le développement de ses propres moyens de prévision, sur les compétences du CEPMMT, dont le directeur et le directeur de la recherche sont d'ailleurs issus de Météo-France.
En ce qui concerne la prévision à courte échéance et à échelle fine en revanche, l'établissement souhaite conserver des capacités techniques et scientifiques de modélisation globale largement autonomes.
Ce choix n'interdit pas le développement de collaborations à plus ou moins long terme, en fonction des occasions et des caractéristiques des projets envisagés. Ainsi le modèle Arpège non étiré a-t-il été développé conjointement avec le CEPMMT qui utilise les mêmes codes pour ses propres prévisions (modèle IFS). De la même façon le modèle Aladin est le fruit d'une coopération large, initiée par Météo-France, avec les pays d'Europe centrale et orientale et certains pays d'Afrique du Nord, dont les chercheurs ont produit près de la moitié des codes du modèle. Ces partenariats et collaborations restent cependant à un niveau faiblement intégré, la compétence restant au niveau national et, notamment dans le cas Aladin, les méthodes de modélisation demeurant celles de Météo-France qui s'affirme ainsi comme chef de file d'une « école » de modélisation.
Les arguments avancés par l'établissement pour justifier l'absence d'une intégration plus poussée reposent sur les besoins des armées et l'indépendance nationale 3 ( * ) et les bienfaits de l'émulation entre grands services européens. Sans doute l'option stratégique de l'établissement de « devenir un service météorologique national de référence » n'est-elle pas étrangère à sa volonté de privilégier des coopérations multilatérales au sein desquelles il reste le service de référence plutôt qu'un transfert de sa compétence vers un organisme de recherche européen.
La stratégie développée par l'établissement implique que soient maintenues en France des capacités scientifiques et techniques largement autonomes. Alors que les enjeux financiers de ces choix sont des plus importants et qu'il revient à l'Etat de déterminer quels sont les besoins nationaux en matière de prévision météorologique, la tutelle ne semble pas s'être donné les moyens de s'assurer de la pertinence, au regard de l'intérêt public, de la stratégie de Météo-France, en se dotant des éléments techniques et de comparaison la mettant à même de discuter avec l'établissement.
La voie d'une plus grande intégration de la recherche, notamment en matière de prévision numérique, au niveau européen gagnerait à être explorée afin de se doter d'une taille critique en capacités de développement et en moyens de calcul lourd.
B. LES MISSIONS INSTITUTIONNELLES ET LES ACTIVITÉS COMMERCIALES
1. Les missions institutionnelles
Le statut de Météo-France lui confie une mission générale d'information et de sécurité météorologiques. L'établissement fournit également l'information météorologique des armées, notamment sur les théâtres d'opérations.
a) La vigilance météorologique
La période récente a été marquée par un grand nombre d'événements météorologiques violents ou graves qui ont rappelé leur caractère dangereux, y compris en métropole, et conduit à une réforme du système de prévention par la circulaire des ministres de l'intérieur et de l'équipement du 28 septembre 2001, modifiée à trois reprises afin de tirer les enseignements des différents épisodes de crise intervenus depuis sa mise en place ou d'introduire de nouveaux risques (canicule, grands froids).
Les procédures de vigilance et d'alerte ont précisé les rôles des acteurs et recentré l'information diffusée au grand public sur le risque météorologique, matérialisé par des couleurs sur une carte de vigilance, et les consignes de prudence à respecter. La carte de vigilance météorologique est élaborée deux fois par jour par Météo-France, qui assure sa diffusion auprès du grand public. Lorsqu'un département est classé en orange ou rouge, la carte comporte des conseils de comportement préétablis par les pouvoirs publics et une procédure de suivi (bulletin de suivi) est mise en place par Météo-France.
La procédure de vigilance et d'alerte météorologiques prévoit également qu'un groupe de suivi, qui rassemble les administrations chargées de la défense et de la sécurité civiles, de la prévention des risques (ministère de l'écologie) et de la sécurité routière, évalue la pertinence et l'opportunité des épisodes de vigilance orange ainsi que la notoriété de la carte de vigilance. Ce groupe publie chaque année un « bilan de la vigilance météorologique ».
D'après le bilan 2003, sur l'ensemble des départements placés en vigilance orange, « 53 % des départements ont été réellement touchés par le phénomène météorologique annoncé ; 26 % ont été touchés partiellement ou de manière atténuée ; dans 21 % des cas, le phénomène relevant de l'orange ne s'est pas produit sur le département placé en orange ». En revanche, il n'a pratiquement pas été recensé d'événement relevant de la vigilance orange et qui n'aurait fait l'objet d'aucune détection sur l'ensemble du territoire (deux cas en 2002). Le décompte des départements dans lesquels des phénomènes météorologiques significatifs se sont produits sans qu'ils aient été placés en orange - alors que d'autres départements ont été placés en orange pour ce même événement - fait apparaître un taux de non-détection de l'ordre de 6 % à l'échelle départementale.
Une des principales difficultés rencontrées est l'anticipation des événements. En 2003, l'anticipation a été inférieure à 1 heure dans 31 % des cas, et à 3 heures dans 37 % des cas. Ces chiffres sont meilleurs que ceux de 2002, mais ils restent préoccupants car les services de sécurité civile ne peuvent intervenir utilement dans des délais aussi brefs. Ce critère de qualité fait d'ailleurs partie des indicateurs du contrat d'objectifs de l'établissement et de l'avant-projet de programme élaboré dans le cadre de la LOLF. Il n'est pour autant pas possible de dire, en l'absence d'éléments de comparaison internationale, si cette situation n'est pas le simple reflet de l'état de l'art.
Météo-France diligente également des études internes de retour d'expérience afin d'identifier les points de faiblesse de ses systèmes d'observation et de prévision comme de ses modalités de gestion de crise. On citera par exemple les rapports sur les retours d'expérience des inondations du Gard en 2002, ou de l'épisode de neige et verglas qui avait paralysé une partie du trafic routier de la région parisienne, les 4 et 5 janvier 2003 4 ( * ) .
Dans ce dernier cas ont été mis en évidence des difficultés techniques mais également des problèmes d'interprétation de la procédure interne de crise 5 ( * ) . Météo-France estime que les efforts de clarification réalisés à l'automne 2003 ont d'ores et déjà porté leurs fruits.
b) Les limites des missions institutionnelles de l'établissement.
Météo-France cherche à investir des « domaines connexes » à ses missions institutionnelles tels que l'hydrométéorologie, la pollution de l'air, les pollutions marines, les prévisions des crues. Il estime d'ailleurs que son intervention dans ces nouveaux domaines permettrait d'optimiser l'utilisation de ses moyens territoriaux. Pour autant, l'établissement ne semble pas clairement définir si ces « domaines connexes » doivent être considérés comme relevant de ses missions institutionnelles ou si ce sont des prestations de service.
S'il n'est pas douteux que Météo-France peut apporter un concours précieux aux acteurs en charge de secteurs soumis à l'influence de la météorologie, il est en revanche moins évident que le décret statutaire de l'établissement autorise une telle extension des missions.
Si ces activités devaient en revanche s'analyser comme des prestations de services, la question de l'ouverture de ce marché à la concurrence devrait être posée.
2. Les activités commerciales
L'exercice d'une activité commerciale est propre à certains services météorologiques nationaux. Dans plusieurs pays, comme les Etats-Unis, cette activité est assurée par le marché et l'information météorologique de base délivrée gratuitement.
Les recettes commerciales de Météo-France, qui représentent 39,5 M€ en 2003, proviennent de deux types de produits : le « kiosque » 6 ( * ) , qui en constitue la part majoritaire et les prestations de service à valeur ajoutée aux professionnels.
a) L'apparition de la concurrence
Les recettes tirées du kiosque sont en baisse malgré les augmentations tarifaires, depuis 2000 (- 8 % entre 1998 et 2003, - 26 % entre 2000 et 2003), en raison de la diminution, tendancielle depuis 1996 et en accélération depuis 2002, du nombre et de la durée des appels vers l'audiotel ou le minitel.
Les recettes tirées des produits à destination des professionnels connaissent une évolution inverse : elles ont augmenté de 94 % entre 1998 et 2003, passant de 9 M€ à 17,8 M€.
La diminution des recettes tirées du kiosque et surtout de l'audiotel peut paraître paradoxale alors que les services de téléphonie sont en phase d'expansion. Elle est liée à la double concurrence opérée par de nouveaux entrants sur le marché et l'apparition d'une information météorologique gratuite sur Internet. L'émergence de la concurrence est récente. Si elle a érodé les parts de marchés sur les secteurs « grand public », elle n'a pas encore ébranlé la domination du marché français par l'établissement, notamment en matière de prestations aux professionnels, bien que la pression soit déjà très forte dans le champ des médias.
Des incertitudes pèsent cependant sur la capacité effective de Météo-France à maintenir durablement le niveau de ses recettes commerciales. Le développement de la concurrence devrait peser sur les parts de marché de l'établissement et même entraîner une pression à la baisse des prix, qui trouvera rapidement sa limite du fait des coûts de Météo-France et de l'interdiction de vente à perte.
b) La professionnalisation de la fonction commerciale
La nécessité d'une professionnalisation des fonctions commerciales et d'une structuration de la politique commerciale est liée au fait que Météo-France doit se positionner par rapport aux autres opérateurs concurrents et que le marché des prestations aux professionnels doit être progressivement construit, les éventuels clients de Météo-France sous-estimant encore les apports des produits météorologiques.
Bien que la prise de conscience ne soit pas récente, les premières réalisations ont tardé à intervenir. Elles ont porté sur la mise en place d'un véritable réseau de vente et le développement d'outils de suivi et de prospective.
Le projet de schéma directeur de l'activité commerciale, élaboré par l'établissement en 2002, mais qui n'a pas été validé par la direction générale et les organisations du personnel, portait un jugement extrêmement critique sur l'organisation de la « force » de vente de Météo-France, constatant : « L'absence de vendeurs identifiés et professionnalisés » et y voyant l'illustration « jusqu'à la caricature [de] la place de l'activité commerciale à Météo-France ».
Ce n'est qu'à partir de 2002 qu'est amorcée une professionnalisation de la gestion commerciale et de la vente sur le terrain avec la création d'attachés de clientèle. Leur périmètre d'activité est défini par référence à une région économique ou à un secteur d'activité, un déploiement systématique sur la base de la carte administrative n'est donc pas envisagé. Un premier bilan, établi pour les Pays de la Loire en 2003, est globalement positif mais montre a contrario que le système précédent, laissant reposer une grande partie de l'action commerciale sur les délégués départementaux de la météorologie (DDM), n'était pas opérant :
« Les témoignages des cinq DDM des Pays de la Loire montrent [...] que l'attaché de clientèle a apporté une aide incontestable sur le plan commercial aux CDM [centres départementaux de la météorologie] et en particulier aux DDM : par la disponibilité pour prendre rendez-vous et s'y rendre, par la connaissance des outils de commercialisation, produits, barème, par la recherche de nouveaux prospects, toutes choses que les DDM n'ont, pour la plupart, ni le temps, ni la connaissance , ni l' envie 7 ( * ) de faire. »
Les outils de prospective et de suivi sont longtemps restés rudimentaires. Bien que sa réalisation fût prévue par le premier contrat d'objectifs, l'établissement n'a établi de plan d'action commerciale (ou business plan) qu'au début de l'année 2004. Il ne dispose toujours pas d'un schéma directeur approuvé pour l'activité commerciale. Enfin, la gestion des factures, de même que la connaissance des clients selon des critères pertinents, ont longtemps été un point faible de l'établissement. Un nouvel outil mis en place en 2003 devrait permettre à l'avenir d'opérer des extractions utiles à une meilleure connaissance des clients de Météo-France.
L'établissement montre enfin des faiblesses persistantes dans l'articulation entre la direction commerciale et les autres services préjudiciable à la prise en compte des impératifs commerciaux dans les projets de développement et les arbitrages entre les différentes activités de l'établissement.
Les fonctions commerciales restent par ailleurs faiblement attractives, les agents craignant de se couper du « coeur de métier » et de compromettre par la suite leurs possibilités d'avancement interne.
c) Les principes de tarification
Météo-France considère que doivent rester gratuites, au titre de sa mission de service public, les informations générales qui concernent la situation prévue dans les 24 heures à venir ou les informations constituant l'avertissement d'un risque imminent auquel l'individu ne s'expose pas volontairement.
En revanche, les prestations qui demandent une technicité particulière excédant les moyens utilisés en routine relèvent du domaine commercial. L'usage que le client fait de la prestation, qu'il s'agisse d'augmenter ses gains ou de réduire ses dépenses ou encore d'assurer sa sécurité ou son confort pour une activité où il s'expose volontairement à un risque météorologique est également un critère du caractère commercial de la prestation.
Météo-France estime par exemple que certaines prestations sur l'état de la chaussée relèvent de la sécurité routière et ne sont pas payantes (avertir d'un risque de chaussée glissante les usagers de la route), tandis que d'autres, comme la fourniture d'informations précises aux services d'entretien routier, relèvent du domaine commercial, les « clients » les utilisant en effet pour choisir les dispositifs les plus efficaces et les moins coûteux. Cette appréciation ne va pas de soi. Si elle peut correspondre au cas de sociétés d'autoroutes, il n'en va pas de même lorsque l'entretien routier est le fait des services de l'Etat ou du département qui devront, de même que la société d'autoroute, payer les informations nécessaires à un entretien routier optimal alors même que leur activité d'exploitation de la route n'est pas exercée dans un but lucratif.
Par ailleurs, la frontière entre ce qui doit relever de la protection civile et de la sécurité météorologique de tous et ce qui est la sécurité de quelques-uns s'exposant volontairement au risque est fluctuante dans le temps, dans une société qui est devenue allergique au risque et qui attend d'être toujours mieux informée.
II. LES AUTRES MISSIONS
A. LE DÉVELOPPEMENT ET LA RECHERCHE
L'établissement dispose d'un service entièrement consacré à la recherche, le centre national de recherches météorologiques (CNRM), qui a pour mission de lui fournir les moyens de progresser dans le domaine de l'instrumentation et de l'observation, comme dans celui de la prévision, à toutes échelles de temps et d'espace.
Les services centraux et déconcentrés de Météo-France interviennent également dans le domaine de la recherche appliquée ou du développement, soit dans le cadre des grands projets stratégiques de l'établissement, soit localement, pour répondre à des besoins identifiés au niveau interrégional.
1. Le pilotage du développement et de la recherche
Le pilotage des activités de développement menées dans les directions interrégionales reste aujourd'hui un enjeu pour la direction générale. Les actions des services déconcentrés sont décidées de leur propre initiative sans réelle coordination au niveau national, malgré plusieurs tentatives de rationalisation. Si l'organisation actuelle donne une grande liberté d'innovation aux services et permet une réactivité au plus près des besoins identifiés, elle aboutit cependant à une déperdition d'énergie et de ressources.
Les autres activités de recherche et de développement sont en principe pilotées par la direction générale de Météo-France. Le CNRM conserve cependant une grande marge de liberté dans la détermination des actions de recherche et la répartition des moyens qui doivent y être consacrés, dans le cadre des documents programmatiques (contrat d'objectifs, plan stratégique) qui gardent une vocation très générale. Le comité scientifique consultatif, qui se prononce tous les ans sur le programme du CNRM, réalise plutôt un contrôle de la qualité scientifique que de l'opportunité stratégique ou même financière des projets et de leur niveau de priorité.
Le directeur du CNRM arrête le programme annuel au cours d'un processus d'information et de concertation associant très étroitement les unités de recherche. Ce processus a l'avantage de favoriser l'adhésion des personnels. Il présente en revanche l'inconvénient de rigidifier les propositions, qu'il est alors plus difficile de faire évoluer en fonction des demandes de la direction générale.
2. Une recherche de bon niveau mais faiblement valorisée
Le CNRM, qui concentre l'essentiel de l'effort de recherche de l'établissement, mobilise des ressources importantes en personnel et en moyens de fonctionnement et d'investissement.
Le budget du CNRM représente, en 2002, de l'ordre de 18 M€ 8 ( * ) soit environ 6 % du budget de Météo-France, pour un effectif de 251 personnes en 2003. Le CNRM concentre près de 28 % des ingénieurs des ponts et chaussées en activité à Météo-France (208 IPC en 2003). Par ailleurs, le CNRM consomme les deux tiers du temps de calcul utilisé par Météo-France. Depuis 2003, la puissance de calcul de l'établissement est répartie sur deux unités dont l'une est exclusivement réservée à la recherche. Enfin, le CNRM est à l'origine de l'une des plus grosses opérations d'investissement réalisées sur la période : l'achat d'un avion instrumenté (15 M€).
La recherche à Météo-France est rarement orientée vers le dépôt de brevets et l'acquisition de droits exclusifs. Cette situation tient pour partie à la nature des recherches effectuées, mais également au relatif manque d'intérêt des chercheurs pour la valorisation « commerciale » de leurs travaux.
Le projet de schéma directeur de l'activité commerciale a ainsi inscrit au nombre des faiblesses de l'établissement les passerelles entre la recherche et les activités commerciales, que ce soit dans le sens de la commercialisation des produits du CNRM ou inversement dans la prise en compte au titre des priorités de la recherche de développements adaptés aux besoins de la clientèle.
L'évaluation des personnels se fait selon les mêmes modalités qu'au CNRS. La place faite aux publications est plus importante que celle accordée aux brevets. Ces éléments de visibilité nationale et internationale confortent par ailleurs la stratégie de l'établissement consistant à se positionner comme un « service météorologique national de référence » 9 ( * ) .
B. L'ECOLE NATIONALE DE LA MÉTÉOROLOGIE
L'établissement dispose de sa propre école, l'Ecole Nationale de la Météorologie, qui assure la formation initiale et continue des personnels techniques de Météo-France ainsi que de certains spécialistes militaires.
L'école dispose de locaux importants : 1 600 m² de salles de cours, 1 400 m² de laboratoires de travaux dirigés et travaux pratiques, 500 m² de salles de réunions et d'examen. Le ratio m²/élève est très favorable, d'autant plus que l'école avait été dimensionnée pour les promotions très nombreuses du début des années 1980.
Elle compte 82 agents dont 39 enseignants et fait appel à des vacataires dans des proportions variant de 4000 à 7000 heures par an.
Compte tenu des faibles effectifs formés et des coûts de structure, la question du maintien d'une école propre à l'établissement peut se poser. Météo-France privilégie cependant la collaboration avec d'autres établissements d'enseignement.
1. Les effectifs
Les effectifs sont peu nombreux : en moyenne 215 élèves par an 10 ( * ) en formation initiale sur la période et 17 400 jours de formation continue, soit l'équivalent de 74 élèves à « temps plein ». La moyenne des effectifs de la formation initiale est surestimée car elle prend en compte les recrutements exceptionnels liés aux 35 heures intervenus en 2001 et 2002. Entre 1998 et 2000, la moyenne annuelle était de 198 élèves.
La relative faiblesse des effectifs s'explique par le fait que l'école consacre l'essentiel de son activité aux besoins d'un seul établissement public. Cette situation ne devrait pas sensiblement évoluer dans les prochaines années.
A la petite taille des promotions s'ajoute le fait que chaque catégorie d'élèves (techniciens supérieurs d'exploitation de la météorologie, technicien supérieur instruments et installation de la météorologie, ingénieur des travaux de la météorologie et, jusqu'à la fusion des corps, ingénieurs de la météorologie, militaires) reçoit des enseignements différents.
2. Des coûts de formation élevés
Non compris les traitements des élèves, le coût de fonctionnement de l'école a augmenté de 13,6 % entre 1998 et 2002 11 ( * ) . La diminution de 5,7 % du coût par élève entre 1998 et 2002 (25 880 € par an) est liée à l'augmentation des effectifs de la formation initiale en 2001 et 2002. Entre 1998 et 2000, ce coût a augmenté de 14,5 %.
3. La collaboration avec d'autres établissements d'enseignement
L'école collabore avec les universités toulousaines afin de mettre en commun des enseignements : langues vivantes au sein du pôle universitaire, DEA de l'université Paul Sabatier. Ces échanges restent limités mais l'école souhaite les développer. Elle envisage ainsi la création d'un mastère commun avec la même université et réfléchit à la possibilité pour les techniciens des instruments d'effectuer une partie de leur formation dans un IUT.
La fusion des corps d'ingénieurs de l'équipement a également conduit à la mise en commun d'une partie des enseignements des ingénieurs issus de l'école polytechnique.
L'impact sur les coûts de l'école de ces différentes collaborations et mises en commun reste mal connu.
C. LA PRÉSENCE DE MÉTÉO-FRANCE DANS LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
Aux termes du décret du 18 juin 1993, Météo-France est chargé de représenter la France auprès de la plupart des organisations européennes et internationales du secteur (Organisation Météorologique Mondiale, Organisation de l'Aviation Civile Internationale). Il intervient aussi dans le domaine de la coopération, notamment avec les pays d'Afrique du Nord et d'Afrique équatoriale.
L'établissement est présent au sein des nombreuses coopérations européennes qui se sont développées soit pour mettre en commun des moyens et des compétences, soit pour constituer des groupes de réflexion et d'influence.
Les actions de coopération, le développement de nombreux partenariats et l'exercice de responsabilités au sein des organismes européens et internationaux font partie de la stratégie de l'établissement consistant à s'affirmer comme service météorologique de référence.
L'ORGANISATION DE METEO-FRANCE
I. LES SERVICES CENTRAUX
A. L'ORGANISATION GÉNÉRALE DES SERVICES
L'organisation générale de Météo-France présente un foisonnement de directions et de services aux compétences imbriquées, qui multiplient les risques de redondances. Les services centraux se répartissent en effet entre une « direction générale » composée de plusieurs directions - l'une d'entre elles étant plus particulièrement chargée d'animer le réseau des directions interrégionales - et des « directions centrales », certaines de ces dernières décomposées en « directions thématiques » ; s'y ajoutent une direction générale pour le site de Toulouse, dirigée par un directeur général adjoint, et une direction de la qualité, directement placée auprès du président-directeur général.
Cette structure fait cohabiter divers partis d'organisation, selon une logique tantôt transversale, tantôt verticale et technique, tantôt géographique, sans qu'un choix explicite ait permis de faire prévaloir un schéma d'organisation susceptible de rationaliser le partage des compétences entre services.
Ainsi les cellules de gestion générale existant d'ores et déjà dans les services centraux, dans les domaines de l'administration, des ressources humaines ou de l'informatique, sont-elles dupliquées au sein de chaque entité technique, sans que cette situation soit motivée par l'éloignement géographique. Ces chevauchements n'épargnent d'ailleurs pas les compétences techniques de l'établissement : de nombreux groupes de travail, composés de représentants de plusieurs directions et des directions interrégionales et parfois dotés d'un pouvoir de décision, interviennent dans les choix techniques fondamentaux concernant notamment l'observation et la prévision.
Une hiérarchisation des différentes directions, en réduisant le nombre des responsables qui font directement rapport au président-directeur général, serait de nature à clarifier l'organisation de l'établissement et, partant, l'exercice des responsabilités au sein de celui-ci.
B. DES SERVICES CENTRAUX RÉPARTIS SUR TROIS SITES
La répartition des services centraux est le fruit d'une délocalisation amorcée au début des années 1980 et dont l'achèvement n'est pas prévu, l'établissement estimant indispensable de maintenir certains services en région parisienne. Les services centraux sont aujourd'hui présents sur trois sites :
Le site de l'Alma regroupe 390 personnes pour un coût de fonctionnement de l'ordre de 3 M€ par an . Il héberge la majeure partie des services de la direction générale.
Le site de Trappes compte 259 agents en 2002. Son coût de fonctionnement annuel est estimé en 2004 à 1 M€. Il accueille essentiellement les agents de la direction des services d'observation, dont une partie est en cours de délocalisation.
Le site de Toulouse, la Météopole, compte environ 1 100 agents, auxquels s'ajoutent les personnels des autres organismes présents sur le site. La Météopole est constituée de 16 bâtiments soit 60 000 m² sur une superficie totale de 45 ha. Elle est dotée depuis 2003 d'une direction générale qui a pour finalité d'en faire un technopôle dépassant le domaine de la météorologie, poursuivant ainsi le choix fait de longue date de rentabiliser le site (3,5 M€ de budget de fonctionnement) en l'ouvrant à des partenaires extérieurs.
La répartition actuelle des services de Météo-France est le fruit d'un compromis entre nécessités fonctionnelles et réticences des agents. L'établissement a mené une délocalisation fondée sur le volontariat : les personnels ne souhaitant pas quitter leur poste en région parisienne ont été assurés de le conserver, tandis que la présence de Météo-France sur l'ensemble du territoire a permis de reclasser les agents disposés à quitter la région parisienne mais non à rejoindre la Météopole.
Le transfert des services centraux de l'établissement vers Toulouse s'est fait par vagues successives, au début des années 1980, puis des années 1990 et en 2004, sous la pression des difficultés fonctionnelles rencontrées par les services du fait de l'éloignement géographique et à la faveur des renouvellements de personnels et des vacances de postes.
L'implantation de l'établissement sur plusieurs sites conduit ainsi à l'éclatement de certains services, parfois par suite du refus des agents de rejoindre le site principal, et à des surcoûts liés aux déplacements et à l'entretien des sites.
Ces délocalisations se sont également accompagnées de nombreux reclassements dans des services, notamment parisiens, de personnels ayant refusé leur mutation, au risque de sureffectifs et d'une inadéquation entre les compétences des personnels affectés dans les services d'accueil et les besoins du service. Une grande partie des personnels de la D2C 12 ( * ) à Paris est ainsi issue de personnels reclassés à l'occasion des délocalisations.
L'actuelle phase de délocalisation répond aux mêmes enjeux que les précédentes, et s'est heurtée aux mêmes contraintes. La délocalisation de la DSO 13 ( * ) à Toulouse s'inscrit dans une logique de rénovation du pilotage de la fonction observation : il s'agissait d'améliorer le fonctionnement de la direction, notamment en la rapprochant de ses principaux « clients », situés à Toulouse et de résoudre les problèmes d'effectifs rencontrés sur le site de Trappes.
Cependant, la délocalisation complète de la direction qui avait été envisagée dans un premier temps n'a pu aboutir. Les négociations internes ont conduit à un transfert partiel : 42 emplois (dont 18 vacances) rejoindront Toulouse. Au total 24 agents seulement quitteront Trappes sur un total de 213.
La délocalisation du reste de la DSO est inscrite dans un horizon dominé par les possibilités de reclassement des agents souhaitant rester en région parisienne. Le budget du déménagement partiel s'élève à 6,5 M€ dont 5,5 M€ pour la construction du bâtiment de la Météopole, 0,5 M€ pour l'équipement, 0,2 M€ pour l'accompagnement du projet. Les frais de personnel ne sont pas inclus dans ce budget 14 ( * ) .
Au-delà de la question de l'achèvement de la délocalisation vers Toulouse, une autre source de coûts tient au fait que l'établissement a longtemps souhaité conserver ses deux sites parisiens. Il semble cependant qu'il envisage de procéder au déménagement des services actuellement présents sur le site de l'Alma à Trappes. Si cette évolution, qui n'est pas inscrite dans le contrat d'objectifs, devait se confirmer, elle serait génératrice d'économies bienvenues.
II. L'ORGANISATION TERRITORIALE
Météo-France est très largement représenté sur l'ensemble du territoire national. Il dispose d'un réseau de services déconcentrés à deux échelons, interrégional et départemental, et d'une présence infra-départementale constituée par les stations météorologiques.
La coexistence de ces échelons semble reposer sur l'attachement des personnels à cette organisation plutôt que sur des considérations liées à la qualité des prestations de l'établissement, tant d'un point de vue institutionnel (sécurité météorologique) que commercial. Or le maintien de cette structure obère durablement la capacité de l'établissement à abaisser le niveau de ses charges de fonctionnement.
A. LA PRÉSENCE TERRITORIALE DE MÉTÉO-FRANCE
Sur un effectif réel de 3 725 agents en 2003, 2 067 sont affectés dans des services territoriaux dont 425 outre-mer.
La présence de Météo-France sur l'ensemble du territoire est assurée à l'échelon interrégional par sept directions interrégionales (DIR) en métropole et quatre outre-mer, à l'échelon départemental par 92 centres départementaux de la météorologie et au niveau infra-départemental par les stations d'observation.
1. Les directions interrégionales
Elles forment le premier échelon déconcentré de l'établissement. En métropole, elles regroupent le centre météorologique interrégional (CMIR) et les centres départementaux de la météorologie (CDM) de l'interrégion, sous l'autorité du directeur interrégional.
Le niveau interrégional est l'échelon principal de l'établissement auquel sont arrêtées les cartes de vigilance météorologiques. Le travail de prévision y est assuré pour tous les types de prévisions et 24h/24h ; c'est en particulier à ce niveau que sont élaborées les lignes directrices à partir desquelles les CDM déterminent leurs prévisions départementales.
Les DIR exercent également des compétences en matière de climatologie, d'action commerciale, de maintenance.
2. Les Centres Départementaux de la Météorologie et les stations d'observation
Les CDM sont de petites structures uniformément présentes dans l'ensemble des départements de métropole. Leurs effectifs varient de six à 26 agents. Seuls 26 CDM ont un effectif total égal ou supérieur à 14 agents. La plupart des CDM ont un effectif juste suffisant pour assurer un poste de direction et un poste en horaire semi-permanent (12 heures par jour) ; 43 CDM ont un effectif de six agents et 15 CDM disposent de sept agents.
L'organisation du travail dans un CDM nécessite une polyvalence des techniciens pour les activités d'exploitation mais aussi pour certaines responsabilités particulières, administratives, commerciales ou de relations avec l'extérieur, qui sont confiées en fonction des compétences et appétences de chacun.
Les CDM sont des structures relativement récentes, ce qui explique certainement que l'établissement soit encore dans une phase d'investissement immobilier en ce qui les concerne.
Les CDM font partie de la chaîne d'observation et de prévision de la DIR à laquelle ils transmettent les observations collectées dans les stations. En matière de prévision, la chaîne d'information est inverse, puisque la plupart des données viennent de Toulouse et sont transmises via les DIR aux CDM en fonction de leurs besoins propres. Les CDM sont également chargés de la surveillance du matériel et éventuellement de certaines opérations de maintenance. Cependant peu d'entre eux (19 seulement) disposent de techniciens de l'instrumentation si bien que la maintenance est le plus souvent le fait des techniciens de la DIR, voire de la DSO. Les CDM assurent aussi une grande partie de la production standardisée (émission automatique de bulletins pour les abonnés, enregistrement des bulletins du kiosque, élaboration de certificat d'intempérie). En revanche, les produits plus élaborés sont réalisés par la DIR. Enfin, le Délégué Départemental de la Météorologie (DDM) assure la représentation de Météo-France, notamment auprès du préfet (sécurité civile), et « l'écoute client ».
Les stations météorologiques dotées d'une capacité d'observation humaine sont chargées au premier chef des fonctions d'observation et accessoirement de missions de représentation et d'écoute client. Leurs missions sont donc similaires à celles d'une CDM, d'autant que l'automatisation en cours des observations rendra nécessaire, à terme, une évolution de la fonction d'observateur vers des activités de prévision immédiate et de prévision du temps sensible.
B. LES JUSTIFICATIONS DE L'ÉCHELON DÉPARTEMENTAL
L'existence de services déconcentrés se justifie du fait de la nature des missions de l'établissement. De la même manière, tant que les progrès technologiques ne permettront pas de remplacer l'essentiel de l'observation humaine, l'établissement aura besoin d'une présence territoriale à un niveau suffisamment fin.
En revanche, la nécessité d'une présence systématique à l'échelon départemental est loin d'être évidente au regard des activités réalisées par les CDM. Il semble même que la dispersion sur trois niveaux de l'analyse prévisionniste soit source de difficultés mises en lumière par le schéma directeur de la prévision adopté en 2002 :
« Notre organisation doit être consolidée. [...] Sans trop forcer le trait, on pourrait dire que les trois échelons ne constituent pas un ensemble cohérent, une chaîne, mais la juxtaposition de trois échelons qui peu ou prou font et refont les mêmes analyses et les mêmes expertises .
« A ses limites techniques (problème de cohérence), cette situation, fruit d'une absence d'organisation explicite, ajoute les conséquences, non soutenables dans la durée, de surcoûts, de charges de travail indues, de risques de démotivation, sans omettre le danger d'un système dual de la prévision, où les experts « traditionnels » s'opposeraient aux modélisateurs et autres spécialistes de la prévision d'ensemble. »
Pour autant, l'établissement fait le choix de conforter cette structure et continue à investir dans l'informatique, afin de résoudre les problèmes de cohérence susmentionnés, mais aussi dans l'immobilier 15 ( * ) .
Les arguments invoqués pour justifier cette organisation territoriale s'appuient sur la nécessité de rester à proximité des usagers et du préfet de département, responsable de la sécurité civile. Ces arguments ne sont pas entièrement convaincants.
D'une part, les services météorologiques ne peuvent être considérés comme des services de proximité ni les CDM comme des « guichets ». L'essentiel de la vente se fait en effet à distance, par voie téléphonique, télématique ou par Internet. Par ailleurs, la fonction commerciale et de communication est d'ores et déjà mieux assurée par d'autres acteurs tels que les attachés commerciaux 16 ( * ) ou le conseil supérieur de la météorologie où sont représentés les partenaires institutionnels de Météo-France.
D'autre part, s'il n'est pas douteux que le préfet a besoin d'un correspondant à Météo-France pour les situations de crise ou pour élaborer des plans de prévention des risques (incendies, sécheresse, accident nucléaire ou chimique), il est en revanche moins certain que la présence systématique d'un agent dans le département garantisse une meilleure qualité d'intervention de Météo-France : la réalisation de prévisions précises à un échelon départemental n'implique pas une localisation départementale du prévisionniste, mais des systèmes d'observation.
On notera par ailleurs que la surveillance 24h/24h de l'évolution du temps est faite exclusivement au niveau régional ; c'est à ce niveau également qu'est établie la carte de vigilance. Enfin, on remarquera que 26 CDM ne sont pas implantés au chef-lieu de département.
On ne peut au demeurant exclure que le maintien de certaines implantations de Météo-France, comme celle de la station météorologique du Mont Aigoual, tienne davantage aux résistances des personnels qu'aux préoccupations de pertinence économique ou de satisfaction des besoins des usagers.
LA GESTION DU PERSONNEL
I. LE CADRE GÉNÉRAL
A. LES CARACTÉRISTIQUES DU PERSONNEL DE MÉTÉO-FRANCE
1. Les effectifs
Globalement, les effectifs de Météo-France sont restés constants depuis la création de cet établissement public, oscillant autour de 3 700 agents, comme le retrace le tableau de la page suivante.
A titre de comparaison et sous réserve des différences de structure qui peuvent exister 17 ( * ) , on remarquera que le MetOffice, service météorologique britannique, emploie en 2003 1 822 personnes (en diminution de 12,8 % sur un an en raison d'un plan de réduction des effectifs).
Le personnel de l'établissement se répartit traditionnellement en deux catégories, qui correspondent à des modes de gestion et de rémunération spécifiques :
- les corps techniques (ingénieurs de la météorologie devenus en 2002 ingénieurs des ponts et chaussées, ingénieurs des travaux de la météorologie - ITM, techniciens supérieurs de la météorologie - TSM), qui représentent une proportion légèrement croissante de l'effectif total (de 75 à 80 %) entre 1994 et 2003, sont gérés et rémunérés directement par Météo-France ;
- les personnels administratifs et ouvriers de l'Etat appartenant à des corps de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), dénommés « corps communs », dont la rémunération et la gestion incombent au ministère de l'équipement.
Même si cette appréciation doit être relativisée en fonction de l'ampleur du recours au temps partiel et de la date d'examen des effectifs réels, les deux catégories de personnel présentent des caractéristiques inverses au regard des effectifs budgétaires comparés aux effectifs réels : de façon récurrente, les effectifs réels des corps techniques excèdent les effectifs budgétaires, alors que les corps communs, en particulier les personnels administratifs, sont dans une situation opposée.
Tableau n° 1 : Evolution des effectifs budgétaires et réels de Météo-France entre 1994 et 2003
Catégorie de personnels |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
||||||||||
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
bud. |
réel |
|
Emplois de direction, AC et administrateurs civils |
5 |
3 |
5 |
3 |
5 |
3 |
5 |
3 |
5 |
5 |
5 |
5 |
5 |
5 |
6 |
6 |
6 |
6 |
6 |
6 |
Ingénieurs de la météorologie / des ponts et chaussées |
221 |
215 |
221 |
219 |
221 |
216 |
221 |
219 |
221 |
219 |
221 |
214 |
221 |
215 |
221 |
219 |
221 |
214 |
219 |
208 |
Ingénieurs des travaux de la météorologie |
818 |
813 |
818 |
810 |
818 |
811 |
818 |
832 |
818 |
843 |
818 |
829 |
823 |
833 |
853 |
867 |
857 |
877 |
861 |
874 |
Techniciens supérieurs de la météorologie |
1850 |
1816 |
1850 |
1830 |
1847 |
1838 |
1844 |
1832 |
1844 |
1863 |
1862 |
1883 |
1857 |
1877 |
1879 |
1902 |
1893 |
1916 |
1890 |
1908 |
Chargés de recherche |
5 |
1 |
5 |
1 |
||||||||||||||||
Total personnel technique géré par Météo-France |
2889 |
2844 |
2889 |
2859 |
2886 |
2865 |
2883 |
2883 |
2883 |
2925 |
2901 |
2926 |
2901 |
2925 |
2953 |
2988 |
2976 |
3008 |
2975 |
2991 |
Agents de catégorie A (hors emplois de direction) |
25 |
22 |
30 |
22 |
38 |
22 |
41 |
26 |
41 |
31 |
41 |
31 |
43 |
34 |
43 |
38 |
43 |
39 |
48 |
42 |
Agents de catégorie B |
106 |
94 |
121 |
90 |
132 |
96 |
134 |
99 |
134 |
96 |
144 |
98 |
147 |
97 |
146 |
100 |
146 |
112 |
140 |
120 |
dont TSEEAC : |
40 |
37 |
40 |
34 |
35 |
32 |
33 |
32 |
33 |
29 |
29 |
26 |
27 |
24 |
26 |
23 |
26 |
22 |
24 |
22 |
Agents de catégorie C |
303 |
303 |
282 |
291 |
262 |
291 |
257 |
296 |
258 |
293 |
248 |
278 |
244 |
276 |
245 |
274 |
247 |
269 |
251 |
271 |
Total personnel administratif à statut DGAC |
434 |
419 |
433 |
403 |
432 |
409 |
432 |
421 |
433 |
420 |
433 |
407 |
434 |
407 |
434 |
412 |
436 |
420 |
435 |
433 |
Ouvriers de l'Etat |
280 |
269 |
277 |
272 |
275 |
263 |
272 |
261 |
268 |
254 |
264 |
243 |
260 |
230 |
254 |
230 |
247 |
232 |
242 |
223 |
Personnels TOM |
84 |
81 |
84 |
82 |
84 |
81 |
84 |
81 |
84 |
79 |
66 |
58 |
66 |
59 |
64 |
62 |
64 |
61 |
64 |
64 |
Militaires |
145 |
143 |
129 |
120 |
120 |
127 |
99 |
114 |
83 |
73 |
69 |
56 |
62 |
40 |
59 |
40 |
22 |
9 |
17 |
8 |
TOTAL |
3837 |
3759 |
3817 |
3741 |
3798 |
3748 |
3775 |
3763 |
3756 |
3756 |
3738 |
3695 |
3728 |
3666 |
3770 |
3738 |
3751 |
3736 |
3739 |
3725 |
Source : DRH et bilan social de Météo-France (NB : l'effectif réel s'entend de celui en fonction au 31 décembre de l'année considérée)
Par ailleurs, la pyramide des âges des corps techniques, en particulier dans le corps des TSM, aurait pour effet de freiner les promotions dans ce corps, du fait d'un ratio défavorable du nombre des promouvables par rapport aux promotions possibles, si des mesures dérogatoires de promotion en surnombre et de repyramidage de ce corps n'étaient régulièrement prises - en dernier lieu dans le contrat d'objectifs 2005-2008.
Les évolutions de structure demeurent limitées par rapport aux premières années de fonctionnement de l'établissement public : le déséquilibre entre effectifs budgétaires et effectifs réels, pour les personnels administratifs, ne s'atténue que de façon très relative ; en outre, de façon générale, l'établissement ne comble que progressivement sa sous-dotation en agents de catégorie A et B. En revanche, l'effectif des personnels militaires et des contractuels, significatif à l'origine, est désormais devenu négligeable, par suite de la suppression de la conscription et des mesures de résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique.
2. Les particularités de la gestion des ressources humaines
La gestion des ressources humaines présente, à Météo-France, des difficultés particulières, assez clairement résumées dans le plan stratégique 2000-2010 de cet établissement public : « Le corps social de Météo-France est profondément attaché à des modes de gestion traditionnels dont quelques-uns des principes fondamentaux reposent, par exemple, sur l'intangibilité des vacations de 12 heures pour les postes en horaire permanent, sur un maximum de souplesse dans la récupération des heures majorées, sur un égalitarisme aussi poussé que possible en matière de régime indemnitaire et sur la règle de l'ancienneté pour critère unique des mutations. »
La forte cohésion des corps techniques rend singulièrement délicate la modification de ces modes de gestion, d'autant qu'elle va de pair avec une relative mise en retrait de l'encadrement au plan local, qui entraîne une « excessive centralisation du dialogue social » à laquelle le récent contrat d'objectifs souhaiterait d'ailleurs remédier. En outre, la référence permanente à la situation des corps techniques équivalents de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) enferme toute évolution dans un cadre qui ne se justifie guère que par des raisons historiques. Sans doute cette situation explique-t-elle que certaines orientations récentes confortent la situation existante, plutôt qu'elles ne la font évoluer.
a) Le régime de travail dit en « service permanent »
Le « service permanent » désigne à Météo-France le travail posté (24 H s / 24, 7 jours s / 7), qui est principalement mis en oeuvre au centre national de prévision et dans les centres météorologiques interrégionaux (CMIR) - dans une moindre mesure dans les CDM, qui ont plutôt recours au régime en service semi-permanent (12 heures de jour, 7 jours s / 7). Cette organisation du travail est réservée aux activités de l'établissement nécessitant une continuité du service, soit les activités d'observation et de prévision, ainsi que la supervision et la maintenance des équipements nécessaires à ces activités.
Un poste permanent est organisé selon deux « vacations » par période de 24 heures, l'une de jour et l'autre de nuit, avec un recouvrement d'un quart d'heure pour la passation des consignes. L'amplitude de chacune de ces deux vacations est donc de 12 heures 15 minutes. Le « taux moyen d'armement des postes » en service permanent, correspondant au nombre moyen d'agents affectés au même poste, oscille entre 7 et 8 agents, selon l'importance des besoins en journées d'études ; en service semi-permanent, le taux était de 3,2 agents en moyenne sur une base de 39 heures en 1998, et de 3,4 agents sur une base de 35 heures en 2002.
L'attractivité du régime de travail en « service permanent », où les agents sont relativement libres de l'organisation de leur emploi du temps par rapport aux emplois en horaires de bureau, est particulièrement forte à Météo-France : en contrepartie de leur disponibilité éventuelle en-dehors des heures ou des jours ouvrables, les agents accomplissent en effet en moyenne trois vacations de douze heures par semaine. Aussi cette forme d'emploi attire-t-elle une part importante des personnels techniques - environ 1 400 agents.
Les agents en service permanent ou semi-permanent bénéficient de bonifications horaires destinées à compenser la pénibilité liée aux horaires décalés ; les heures acquises au titre de ces bonifications horaires peuvent, au choix de l'agent, soit donner lieu à des repos compensateurs de durée équivalente, soit être « rachetées » au titre de l'indemnité pour horaires adaptés (IPHA) instituée en 1990.
Cette forme d'emploi est donc particulièrement coûteuse pour l'établissement, compte tenu du régime de récupération des heures de nuit ou des dimanches et jours fériés, de la majoration de certains éléments de la rémunération attachée au travail en-dehors des heures ouvrables (primes informatiques par exemple), et de la nécessité où il se trouve de couvrir les besoins en personnel de certains CDM par les « brigades de réserve », génératrices de coûts spécifiques, tant en indemnités qu'en frais de fonctionnement. Pourtant, le coût spécifique du travail posté demeure difficile à établir, précisément dans la mesure où il s'impute sur de nombreux postes de dépenses.
Il n'est d'ailleurs pas certain que ce mode d'organisation du travail soit considéré par l'établissement comme optimal sur le plan financier, ni même sur le plan technique ; il paraît cependant avoir renoncé à faire évoluer cette situation autrement que sur la base du volontariat, comme le traduit une note relative à l'application de l'ARTT à Météo-France adressée par son président-directeur général au ministre de l'équipement le 12 octobre 2000 : « Il convient de souligner que la semaine de quatre jours répond à un souci stratégique de l'établissement, à savoir rapprocher l'attractivité des postes en horaires permanents ou semi-permanents de celle des fonctions en horaires de bureau. En effet, faciliter le passage d'un régime de travail à l'autre est, à la fois, un objectif social (...) et une préoccupation de productivité, dans la mesure où le travail posté est plus coûteux pour l'établissement. Ainsi, la semaine de 4 jours (...) serait assez comparable au service permanent qui comporte généralement 3 vacations par semaine, mais avec la sujétion réelle des vacations hors jours ouvrables. On rendrait donc plus facile la fluidité entre ces deux régimes de travail et on permettrait la concrétisation par l'établissement de gains de productivité potentiels. »
Ainsi, malgré les transferts et redéploiements opérés dans les années récentes (231 postes en 2002 et 2003) et la suppression d'une quinzaine de postes permanents, l'effectif des agents en service permanent et semi-permanent marque une stabilité remarquable ; en l'absence d'évolutions de structure génératrices de gains de productivité potentiels, la mise en oeuvre de l'ARTT s'est en effet traduite par une augmentation mécanique des effectifs en régime de travail posté.
Tableau n° 2 : Evolution des effectifs en service permanent et semi-permanent entre 2000 et 2003
Année |
Semi-permanent |
Permanent |
Total |
||
Nombre d'agents |
En % de l'effectif civil |
Nombre d'agents |
En % de l'effectif civil |
||
2000 |
705 |
19 % |
761 |
21 % |
1465 |
2001 |
640 |
17 % |
816 |
22 % |
1456 |
2002 |
602 |
20 % |
855 |
23 % |
1457 |
2003 |
622 |
17 % |
847 |
23 % |
1469 |
Source : bilan social de Météo-France
En outre, certaines règles internes de l'établissement, qui ne sont fondées sur aucun texte, visent à maximiser les avantages susceptibles d'être attribués aux agents en service permanent : en sus des onze jours fériés admis dans la fonction publique, Météo-France assimile en effet à des jours fériés le dimanche de Pâques et le dimanche de Pentecôte ; cette assimilation, neutre pour les personnels en heures de bureau, est source de compensations supplémentaires, en heures de repos ou en IPHA, pour les agents en service permanent et semi-permanent. Cette situation perdure après la mise en oeuvre de l'ARTT au 1 er janvier 2002.
L'impression est forte que, loin de constituer simplement une forme particulière d'emploi de Météo-France, le service permanent et les compensations - ou les avantages - qui y sont attachés, imprègnent, dans une large mesure, toute appréhension par les membres des corps techniques de cet établissement public des questions relatives à la durée du travail et à l'organisation du service.
b) Les « brigades de réserve »
Une autre particularité de l'organisation du travail à Météo-France réside dans le recours à des « brigades de réserve » ou, à défaut, à des « volontaires pour les missions de remplacement » pour assurer la continuité du service dans les centres départementaux de la météorologie (CDM).
Les agents affectés dans les brigades de réserve, placés auprès des directions interrégionales, ont pour fonction de remplacer, parfois au pied levé, les agents temporairement absents dans les stations ou centres départementaux météorologiques, pour des durées allant de trois jours à plusieurs semaines. Les volontaires pour les missions de remplacement remplissent une fonction semblable, mais sur une base volontaire, et à titre non permanent.
Même si leur effectif demeure relativement réduit (une cinquantaine), les « brigadistes de réserve » et, dans une moindre mesure, les volontaires pour les missions de remplacement constituent une variable d'ajustement permettant de préserver l'ampleur du recours à l'organisation du travail en service permanent ou semi-permanent dans l'ensemble des services locaux de Météo-France.
Le coût spécifique de cette forme d'emploi demeure difficile à déterminer avec précision, dans la mesure où il s'impute sur de nombreux postes budgétaires ; lui sont en outre attachés divers avantages, tenant notamment au calcul de l'ancienneté ou au remboursement des frais de déplacement.
c) La persistance d'un certain égalitarisme en matière indemnitaire
La forte cohésion des corps techniques explique aussi, en grande part, le maintien prolongé de l'uniformité des primes. Le contrat d'objectifs récemment signé entre l'Etat et Météo-France pour les années 2005 à 2008, qui comporte une clause de modulation des régimes indemnitaires présentée comme une innovation, ne dessine cependant que de timides évolutions dans ce domaine. En effet, les critères de modulation des primes paraissent, pour une part prépondérante, conçus en fonction d'autres objectifs que l'amélioration des résultats individuels ou collectifs des agents :
- la modulation des régimes indemnitaires en fonction du grade vise, au sein des corps techniques, à combler plus rapidement l'écart avec les corps homologues du ministère de l'équipement pour les grades dans lesquels ce retard est plus accentué ; cette forme de modulation poursuit donc l'objectif constant de rattrapage, par les corps techniques de Météo-France, du niveau indemnitaire des corps homologues de l'équipement ;
- la modulation à raison « des fonctions occupées comportant des sujétions particulières », notamment pour les délégués départementaux ou les brigadistes de réserve, paraît assez indépendante des performances des agents ; au surplus, elle contribue à cristalliser l'organisation territoriale de l'établissement ; s'agissant des brigadistes de réserve, cette modulation est en réalité destinée à remplacer un régime irrégulier de remboursement des frais de déplacement existant depuis 2001 ;
- la modulation en fonction de la localisation géographique est destinée à combattre certains effets pervers de la prise en compte de l'ancienneté comme critère de mutation ;
- en revanche, la réforme fondamentale découlant de l'introduction d'un « coefficient de modulation individuel » demeure encore à l'état d'ébauche, dans la mesure où « ce coefficient serait mis en place à partir de 2007 et à titre expérimental » ; la mise en oeuvre de cette réforme sera d'ailleurs d'autant plus ardue que la majeure partie de l'enveloppe indemnitaire prévue par le contrat d'objectifs aura déjà été dépensée.
d) La prise en compte de l'ancienneté dans les procédures de mutation
L'ancienneté des agents occupe à Météo-France une place importante parmi les critères de mutation. Ainsi, même si les commissions administratives paritaires, comme il se doit, tiennent compte d'autres critères tels que la spécificité du poste ou le profil des candidats, le règlement intérieur de mutation, qui n'a pas été modifié depuis 1999, préconise de classer les postulants à un même poste selon un barème de points reflétant, sous des aspects divers affectés de coefficients variables, l'ancienneté des agents.
Comme le reconnaît d'ailleurs le plan stratégique de Météo-France, ce système n'est pas exempt d'effets pervers, notamment la désaffection de certains agents expérimentés pour certains postes pour des motifs tenant à leur implantation géographique ou aux responsabilités qui y sont attachées ; en outre, l'application de ce critère ne facilite pas les évolutions du mode d'accomplissement du service ; dans un autre registre, l'avantage conféré aux brigadistes de réserve pour le décompte de leur ancienneté contribue à perpétuer l'adhésion des personnels à la forme actuelle d'organisation territoriale de Météo-France.
Ainsi, les modes de gestion des corps techniques, héritiers d'une période antérieure à la création de l'établissement public, présentent une permanence remarquable. Ils visent avant tout à maintenir la forte cohésion de ces corps, par la préservation des avantages importants conférés au régime de travail dit « en service permanent », le maintien d'un égalitarisme poussé en matière indemnitaire et le renoncement à toute action positive en matière d'affectation et de promotion interne.
Cette situation, coûteuse pour l'établissement, exclut de fait toute perspective d'évolution de Météo-France dans l'accomplissement de ses missions. Dès lors, il n'apparaît pas que les évolutions regardées comme nécessaires dans ce domaine dans le cadre du plan stratégique 2000-2010 aient trouvé un commencement d'exécution.
B. LES MODALITÉS DE VERSEMENT DES RÉMUNÉRATIONS
La distinction à Météo-France de deux catégories de personnel, régies par des règles différentes, se traduit, dans le domaine du versement des rémunérations et de la gestion des carrières des agents, par des modalités de mise en oeuvre différentes :
- les agents des corps techniques, régis par des statuts propres à l'établissement - à l'exception notable, depuis 2002, des ingénieurs de la météorologie devenus ingénieurs des ponts et chaussées - sont gérés et directement rémunérés par l'établissement public ; les crédits correspondants sont inscrits à son budget ;
- en revanche, la gestion comme la rémunération des personnels relevant de statuts communs à la DGAC et à Météo-France demeure assurée par cette direction d'administration centrale ; les dépenses correspondantes sont certes provisionnées au budget, mais pour être remboursées, par la voie d'un rétablissement de crédits, au budget annexe de l'aviation civile (BAAC).
Cette situation n'est pas exempte d'effets pervers : il ne faut pas exclure, en effet, que le défaut de maîtrise par Météo-France de la gestion des personnels appartenant aux corps communs contribue à entretenir une certaine sous-dotation de cet établissement public en personnels administratifs, notamment en atténuant l'attractivité des postes qui y sont ouverts, du fait de l'éloignement de la gestion ; surtout, cette situation est un facteur considérable d'affaiblissement de l'autorité hiérarchique du président-directeur général sur cette catégorie de personnel.
Le remboursement par Météo-France au BAAC des frais de rémunération principale et accessoire des personnels des corps dits « communs » a fait l'objet, dans la période récente, d'améliorations traduisant un souci notable de simplification des procédures et d'amélioration de l'exactitude des calculs : en effet, le mode de calcul de ce remboursement, qui reposait depuis l'origine sur une évaluation forfaitaire susceptible de faire peser sur l'établissement public une charge indue, a été révisé successivement en 2002 et 2004, pour aboutir à un remboursement au marc le franc des sommes effectivement engagées.
C. LA GESTION PRÉVISIONNELLE DES EMPLOIS
La préoccupation de gestion prévisionnelle des emplois semble relativement absente de Météo-France, dans la mesure où aucun document ne retrace les évolutions des postes et des qualifications rendues nécessaires par les nouvelles modalités d'exercice des missions prévisibles à moyen terme.
Une grande discrétion prévaut ainsi, dans les documents d'orientation générale, sur l'évolution souhaitable du nombre et des caractéristiques des emplois, comparée à la situation actuelle : le contrat d'objectifs 2001-2004 ne donne aucune précision sur les modalités envisageables des redéploiements permettant d'assurer les missions nouvelles qui sont identifiées, dans le domaine de l'environnement ou de l'hydrologie opérationnelle notamment ; il en va de même du volet social de ce contrat d'objectifs, comme du futur contrat d'objectifs 2005-2008.
Le « tableau annuel de répartition optimale des effectifs disponibles » (TROED), malgré sa dénomination, ne poursuit pas non plus véritablement cet objectif : il constitue plutôt le bilan des besoins exprimés par les services pour l'année suivante, arrêté après avis du comité technique paritaire central, et sert de base à l'ouverture de postes à candidatures. Il relève par suite davantage du constat de l'évolution des effectifs que d'un véritable instrument de gestion prévisionnelle.
Ainsi Météo-France dispose-t-il d'instruments susceptibles de retracer les besoins des services à très court terme, mais non d'un véritable dispositif de gestion prévisionnelle des emplois. Du fait de la situation sociale particulière des corps techniques et de la nécessité, affirmée par le contrat d'objectifs 2001-2004, de préserver l'organisation territoriale actuelle de l'établissement ainsi que le niveau de ses effectifs, il est d'ailleurs à craindre qu'un tel instrument, pourtant nécessaire, dans l'absolu, pour faire face aux évolutions techniques à moyen terme, ne se révèle d'un usage particulièrement délicat.
II. LES ÉVOLUTIONS MARQUANTES
L'autonomie des corps techniques de Météo-France par rapport aux corps administratifs et l'interdépendance des questions concernant les corps techniques de cet établissement sont particulièrement frappantes. Ainsi les négociations sur l'aménagement et la réduction du temps de travail ont-elles offert l'occasion d'évoquer les conséquences de la fusion des corps des ingénieurs de l'équipement, sur la situation indemnitaire de l'ensemble des corps techniques de Météo-France par rapport aux corps homologues du ministère de l'équipement.
Trois réformes, intervenues au même moment que le contrat d'objectifs 2001-2004, ont de la sorte comporté des questions imbriquées : l'aménagement et la réduction du temps de travail, la fusion des corps d'ingénieurs du ministère de l'équipement issus de l'Ecole polytechnique et les protocoles DGAC applicables aux personnels des corps communs.
A. L'AMÉNAGEMENT ET LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL
1. Le dispositif général du mécanisme d'ARTT
A l'issue de négociations difficiles en 2000 et 2001, une instruction du président-directeur général de l'établissement du 30 octobre 2001, prise en l'absence d'accord majoritaire et applicable au 1 er janvier 2002, a mis en oeuvre à Météo-France les dispositions du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat.
L'encadrement réglementaire de ce dispositif n'est intervenu, du reste rétroactivement, que l'année suivante 18 ( * ) , afin, selon la pratique usuelle déjà soulignée par la Cour à propos de la DGAC, de faire coïncider les normes applicables avec la situation de fait prévalant à Météo-France. Ainsi la succession de l'instruction du président-directeur général de l'établissement et des textes réglementaires, selon un ordre inverse de celui qui aurait dû en principe prévaloir, a-t-elle eu pour conséquence de laisser subsister dans l'instruction des dispositions plus favorables que celles prévalant ordinairement dans la fonction publique de l'Etat.
L'instruction établit une distinction fondamentale entre les agents en horaires de bureau et ceux en service permanent : les agents en horaire de bureau se voient appliquer des horaires variables, adossés à l'un des quatre « systèmes pivot », allant de 36 heures sur quatre jours à 37 heures sur cinq jours ; le travail posté est défini comme une organisation permanente du travail en équipes successives, dénommée service permanent ou semi-permanent selon qu'elle comprend ou non des périodes de travail programmées la nuit, et comportant des sujétions particulières, auxquelles l'instruction s'attache à définir des compensations.
Des dérogations aux garanties minimales définies par le décret du 25 août 2000 sont autorisées pour le service permanent ou semi-permanent et en cas de crise météorologique : dans ces deux cas, la durée quotidienne et l'amplitude maximale de la journée de travail sont portées à 12 heures 15 minutes (au lieu de 10 et 12 heures respectivement), et la durée hebdomadaire de travail peut atteindre 49 heures (au lieu de 48 heures).
Les contreparties des sujétions attachées au travail posté allient compensations en temps et bonifications horaires, selon le schéma suivant :
- un repos compensateur de 10 % est obligatoirement pris en temps pour le travail de nuit, des dimanches et jours fériés ;
- au travail de nuit, comme au travail de jour les samedis, dimanches et jours fériés, sont en outre attachées des bonifications horaires, variables selon l'importance des sujétions imposées 19 ( * ) ; ces bonifications horaires sont, au choix de l'agent, « converties » en totalité ou en partie soit en repos compensateur, soit en indemnité, sous la forme du versement de l'indemnité pour horaires adaptés (IPHA) ;
- toutefois, les bonifications horaires sont obligatoirement converties en indemnité lorsque leur conversion en repos compensateur aurait pour effet de réduire le temps de travail effectif de l'agent en-deçà de 1 454 heures, correspondant à 32 heures hebdomadaires en moyenne annuelle ; dans ce cas, le montant de l'IPHA est majoré de 20 %.
2. La question des personnels en service permanent
A l'occasion de la mise en place de l'ARTT, l'établissement est, à la demande de l'Etat, revenu sur certains avantages spécifiques accordés aux personnels en service permanent. Il a en particulier mis fin à une bonification pour congés fractionnés accordée à cette seule catégorie de personnel, qui dépassait de deux jours en moyenne les avantages prévus par le décret du 26 octobre 1984. Quoique justifiée sur le plan technique par les modifications des caractéristiques du service, cette mesure a été perçue comme créatrice d'une inégalité de traitement entre les agents en horaires de bureau et leurs collègues en service posté, qui n'avaient pas la possibilité de réduire leur durée quotidienne de travail, compte tenu des nécessités de continuité du service. Cette catégorie de personnel a néanmoins bénéficié de contreparties appréciables.
De façon générale, la quasi intégralité des compensations dont sont désormais susceptibles de bénéficier les agents en service posté se concentre sur le régime des bonifications spécifiques qu'ils « convertissent » en temps de repos ou en IPHA. C'est sans doute ce qui explique les efforts faits par l'établissement pour « maximiser » le nombre des jours fériés dans l'année : de façon très dérogatoire par rapport aux règles définies pour l'ensemble de la fonction publique, l'instruction sur l'ARTT à Météo-France qualifie de jours fériés, assortis des bonifications horaires qui y sont attachées, les dimanches de Pâques et de la Pentecôte.
Ensuite, l'instruction puis les textes réglementaires ont aménagé pour les agents en service posté des règles spécifiques, aux conséquences potentiellement défavorables à l'établissement.
La règle selon laquelle les personnels en service permanent ou semi-permanent bénéficient d'une bonification horaire qu'ils peuvent, à leur choix, convertir en temps de récupération ou en IPHA a conduit, en 2002, 477 agents (418 TSM et 59 ITM) et, en 2003, 514 agents (468 TSM et 46 ITM) à opter pour une compensation en IPHA. La conversion obligatoire des bonifications horaires en « bonifications horaires indemnisées » (BHI) au taux majoré a eu pour effet d'assurer à 514 agents n'ayant pas opté pour l'IPHA en 2003 une compensation indemnitaire de l'ordre de 1 200 € par an, pour une durée moyenne hebdomadaire théorique de 32 heures.
La conséquence logique de ce mécanisme est que, plus la durée hebdomadaire moyenne du travail s'approche du seuil de 32 heures, plus il est avantageux pour les agents d'opter pour une bonification horaire récupérée en temps, de nature à leur procurer un montant d'indemnité majoré, plutôt que de choisir le versement de l'IPHA au taux normal. Il faut souligner combien ces arbitrages individuels sont susceptibles d'aller à l'encontre des intérêts financiers de l'établissement, contraint de compenser les absences au moyen des brigades de réserve, ou de verser un montant majoré d'IPHA aux agents concernés.
Au demeurant, la limite de 32 heures hebdomadaires en moyenne annuelle reste assez théorique : en réalité, le dispositif adopté par Météo-France comporte des « libertés masquées » permettant de réduire jusqu'à 1413 heures la durée effective de travail des personnels en service permanent, « comme à la DGAC » 20 ( * ) .
La source de cette réduction supplémentaire du temps de travail pour les agents en service permanent réside dans le mécanisme dérogatoire suivant, fondé sur des tolérances très anciennes : le temps de pause méridienne, dont l'instruction du 30 octobre 2001 précise qu'il ne doit pas être inférieur à 45 minutes, est normalement exclu du temps de travail effectif ; toutefois, il n'en est pas ainsi, et « en conséquence, la durée de la pause de midi doit être incluse dans le temps de travail effectif », non seulement lorsque l'agent prend son repas sur place tout en continuant d'assurer son service, mais aussi pour les « postes permanents ou semi-permanents dont les titulaires doivent, pour assurer la continuité de leur service, prendre leurs repas alternativement, l'agent présent assurant simultanément son poste de travail et celui de son collègue qui s'est absenté pour déjeuner ». Cette facilité est loin d'être négligeable, puisqu'elle équivaudrait, selon l'établissement, à cinq vacations par an pour un agent en service permanent dans une unité de sept personnes.
Tout porte à croire que cette dérogation aux règles générales applicables au mécanisme de l'ARTT dans la fonction publique n'a fait l'objet d'aucun encadrement réglementaire.
3. La création de 75 emplois
Le contrat d'objectifs 2001-2004 comportait une provision
budgétaire de
18,5 MF (2,82 M€) en année pleine pour le
recrutement en septembre 2002 de 50 techniciens et 25 ingénieurs
des travaux ; compte tenu du temps de leur formation à l'Ecole
nationale de la météorologie, ces personnels ne devaient entrer
en fonction qu'en 2004 et 2005. Or la mise en oeuvre de l'ARTT à compter
du 1
er
janvier 2002 conduisait, en l'absence de réforme de
structure, à une accumulation considérable des heures à
récupérer, pour les agents en service permanent et
semi-permanent, entre cette date et l'entrée en fonction des ITM et des
TSM. Aussi Météo-France, à l'occasion du conflit social de
l'automne 2000, a-t-il obtenu de sa tutelle l'autorisation d'anticiper à
2001 ces recrutements - au demeurant très inférieurs aux demandes
des personnels, et inférieurs de moitié à l'effet
mécanique de la réduction de la durée du travail -,
à raison de 50 recrutements anticipés en septembre 2001 (25
ITM et 25 TSM), et de 25 recrutements complémentaires de TSM en
2002.
Cette mesure, quoique compensée par la suppression prévue de 76 emplois de militaires et ouvriers de l'Etat, compte tenu des départs à la retraite, entre 2000 et 2004, n'en constituait pas moins une dérogation majeure aux règles arrêtées pour la mise en oeuvre de l'ARTT dans la fonction publique de l'Etat, en principe exclusive de toute création d'emplois. Aussi a-t-elle été officiellement motivée par le souci de renforcer les moyens de surveillance et de sécurité de Météo-France après les tempêtes de décembre 1999.
Ainsi, la mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail à Météo-France s'est accompagnée de multiples dérogations aux règles établies par le décret du 25 août 2000, dont certaines sont demeurées occultes. Certaines des modalités choisies par l'établissement sont une source potentielle de coûts importants pour les années à venir, et l'ont en tout état de cause éloigné des réformes de structures qui eussent été souhaitables.
B. L'INTÉGRATION DANS LE CORPS DES PONTS ET CHAUSSÉES
La fusion des différents corps d'ingénieurs du ministère de l'équipement correspondait à un souhait de longue date de Météo-France. Toutefois, sa mise en oeuvre est rendue plus difficile, dans cet établissement, par la contrainte découlant de la volonté de maintenir constante la hiérarchie des rémunérations de l'ensemble de ses corps techniques.
1. Les modalités de la fusion et le rattrapage indemnitaire
Le décret n° 2002-523 du 16 avril 2002 portant statut particulier du corps des ingénieurs des ponts et chaussées a fusionné dans un corps unique, qualifié de « corps supérieur à caractère technique... et à caractère interministériel » au sens du titre II du statut général des fonctionnaires, les quatre corps d'ingénieurs du ministère de l'équipement issus de l'Ecole polytechnique - ingénieurs des ponts et chaussées régis par le statut du 20 février 1959, ingénieurs de la météorologie, ingénieurs géographes et ingénieurs de l'aviation civile.
Par rapport à leur précédent statut, le nouveau texte élargit notablement les perspectives de carrière des ingénieurs de la météorologie, et met fin à la spécialisation de leur formation dès leur sortie de l'Ecole polytechnique ; en termes de rémunération, la principale conséquence de cette intégration réside dans l'alignement de leur régime indemnitaire sur celui, traditionnellement plus favorable, des autres ingénieurs de l'équipement.
Jusqu'à la fusion des corps, les ingénieurs de la météorologie percevaient en effet une indemnité unique également versée aux autres personnels techniques de Météo-France, l'indemnité de technicité et de sécurité (ITS). Du fait de la fusion, cette indemnité unique avait, à compter de 2002, vocation à être remplacée désormais - pour les seuls ingénieurs de la météorologie - par les deux éléments composant le régime indemnitaire des ingénieurs des ponts et chaussées : la prime de service et de rendement (PSR) et l'indemnité spécifique de service (ISS) dont le montant, contrairement à l'indemnité précédente, fait l'objet d'une modulation individuelle.
Cette réforme a été opérée en 2003 21 ( * ) . Toutefois, dans la mesure où elle conduisait à fixer le montant de l'ISS due pour les exercices 2002 à 2004 à un niveau supérieur à celui de l'ITS que le contrat d'objectifs 2001-2004 avait prévu de répartir entre les trois grades d'ingénieurs de la météorologie - ce que l'établissement n'était pas à même d'assumer immédiatement - le rattrapage indemnitaire des ingénieurs des grades supérieurs a été, titre dérogatoire, étalé sur plusieurs années, jusqu'à la fin de 2004.
2. Les conséquences de la fusion sur le régime indemnitaire des autres corps techniques de Météo-France
Dès sa préparation en 2000, le contrat d'objectifs 2001-2004 intégrait, dans les rythmes d'évolution de l'ITS prévus sur cette période pour les différents corps techniques de Météo-France, la perspective de la fusion des corps des ingénieurs de l'équipement. Cette perspective avait même directement motivé une augmentation très sensible de cette enveloppe par rapport à celle fixée par le précédent contrat d'objectifs - de 2,71 M€ (17,8 MF) pour cinq ans à 3,83 M€ (25,15 MF) pour quatre ans.
La répartition de l'enveloppe entre les différents corps techniques s'appuyait sur une logique de rattrapage homothétique des écarts existant avec les corps homologues de l'équipement. En outre, l'établissement envisageait la possibilité d'affecter, si nécessaire, une partie de la marge ainsi constituée au financement d'un éventuel surcoût, par rapport aux prévisions, de la mise en oeuvre du protocole DGAC.
Or, aucun de ces deux objectifs n'a été atteint : ils ont en effet été précocement abandonnés, à l'occasion du conflit social de novembre 2000 lié à la mise en oeuvre de l'ARTT, au profit d'une répartition de l'enveloppe visant essentiellement à préserver la hiérarchie existante des rémunérations des corps techniques au sein de l'établissement.
En effet, la logique, initialement adoptée, du rattrapage homothétique des écarts de rémunération pour chacun des corps concernés - ingénieurs de la météorologie, ITM et TSM - suscitait une forte opposition de la part des organisations syndicales, en ce qu'elle conduisait à un élargissement de la hiérarchie des salaires au sein de l'établissement. Avec l'accord de sa tutelle, Météo-France a donc révisé les modalités de répartition entre les corps de l'enveloppe d'ITS, demeurée constante, dans des proportions importantes : d'une répartition initiale de 0,64 M€ (4,18 MF) pour les TSM, 1,1 M€ (7,21 MF) pour les ITM et 2,1 M€ (13,76 MF) pour les IM pour la période 2001-2004, l'accord qui a permis de clore le mouvement de grève du 16 novembre 2000 a abouti à la répartition, finalement mentionnée dans le volet social du contrat d'objectifs, respectivement de 1,39 M€ (9,15 MF), 1,37 M€ (9 MF) et 1,07 M€ (7 MF).
Ce redéploiement, au bénéfice des ingénieurs des travaux et techniciens, rendu possible par un étalement dans le temps du rattrapage du niveau indemnitaire des ingénieurs de la météorologie dans le cadre de la fusion des corps, suscite diverses interrogations : même si le coût budgétaire reste limité par la faiblesse de l'effectif des ingénieurs affectés à Météo-France, l'opération n'est pas complètement restée dans le cadre du contrat d'objectifs, puisque 290 000 € supplémentaires ont dû être versés par le ministère de l'équipement au titre de la fusion des corps en 2002 ; la procédure suivie reporte au contrat d'objectifs suivant une partie de la question de la prise en compte, sur le plan indemnitaire, de la fusion des corps - la seule véritable limite résidant en la nécessité de verser aux ingénieurs-élèves directement intégrés dans le nouveau corps, au fur et à mesure du déroulement de leur carrière, une rémunération égale à celle qu'ils recevraient dans les autres secteurs du ministère de l'équipement. Au surplus, la démarche adoptée en 2000 conforte la revendication de maintien de la hiérarchie des rémunérations des corps techniques au sein de l'établissement ; quand bien même il ne serait pas fait droit à cette demande à l'avenir, un champ nouveau aura été ouvert aux négociations salariales dans l'établissement.
C. LE PROTOCOLE DGAC DU 7 DÉCEMBRE 2000
Le rapport public particulier de la Cour consacré en 2002 au contrôle de la navigation aérienne a relevé l'originalité du mode de gestion des relations sociales dans la sphère de l'aviation civile, se traduisant par la signature de « protocole triennaux » rendus applicables, depuis 1991, à l'ensemble des corps de la DGAC, notamment administratifs. Il a également souligné les conséquences financières très lourdes de ce mode particulier de dialogue social.
Météo-France, au titre de l'emploi des personnels communs, a mis en oeuvre certaines mesures du protocole du 7 décembre 2000, notamment la revalorisation des primes des techniciens supérieurs des études et de l'exploitation de l'aviation civile (TSEEAC) et des personnels administratifs, la création d'emplois de conseillers d'administration et d'adjoints, la revalorisation des taux des salaires des ouvriers de l'Etat ainsi que des mesures de pyramidage. A cette fin, le volet social du contrat d'objectifs 2001-2004 prévoyait que l'établissement provisionnerait une progression de 1,25 MF (190 500 €) par an des crédits de rémunération des personnels communs ; le contrat précisait que le financement d'un éventuel surcoût par rapport aux prévisions initiales devrait provenir d'un étalement dans le temps du rattrapage indemnitaire des ingénieurs de la météorologie lié à la fusion des corps de l'équipement.
Comme pour les protocoles triennaux précédents, le coût du protocole DGAC du 7 décembre 2000 s'est révélé supérieur aux évaluations initiales. Ainsi les dépenses effectivement engagées par l'établissement pendant la période sous revue pour la mise en oeuvre de ce protocole (hors recherche) ont-elles excédé la provision linéaire inscrite au contrat d'objectifs, comme le retrace le tableau suivant.
Il convient au demeurant de noter que ce déséquilibre, corrigé de façon relative en 2003, s'est de nouveau creusé en 2004 ; la situation ne paraît donc nullement stabilisée.
Tableau n° 3 : Coût des mesures du protocole DGAC 2001-2004 comparé à la provision inscrite à ce titre au budget de Météo-France
(en €) |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
Protocole DGAC 2001-2003 |
269 459 |
296 890 |
19 589 |
38 422 |
Mesures reflet catégories A et C |
0 |
0 |
45 971 |
60 461 |
Total DGAC 2001-2003 |
269 459 |
296 890 |
65 560 |
98 883 |
Action sociale |
22 867 |
54 882 |
58 234 |
100 000 |
Total protocole + action sociale |
292 327 |
351 772 |
123 794 |
198 883 |
Provision DGAC du contrat d'objectifs |
190 561 |
190 561 |
190 561 |
190 561 |
Cumul 2001 / 2004 |
292 327 |
644 098 |
767 892 |
966 775 |
Provision du contrat d'objectifs cumulée 2001 /2004 |
190 561 |
381 123 |
762 245 |
762 245 |
Source : Météo-France - direction financière.
Pour autant, la contrepartie initialement envisagée pour la revalorisation des rémunérations des personnels des corps communs, constituée par le report du rattrapage indemnitaire des ingénieurs de la météorologie, a en réalité été utilisée pour garantir la réduction de l'écart indemnitaire entre les ITM et TSM de Météo-France et leurs homologues du ministère de l'équipement. Il ne semble pas que la tutelle ait opposé d'objection à cette utilisation du même gage à deux fins distinctes, alors même que le financement de l'ajustement des dépenses du protocole DGAC, finalement reporté sur la « ligne souple » des dépenses de personnel, méconnaît les engagements contenus dans le volet social du contrat d'objectifs.
III. LE RÉGIME INDEMNITAIRE
Météo-France a dans une large mesure hérité, dans sa gestion des régimes indemnitaires des personnels techniques qu'il rémunère, de certaines pratiques de la DGAC ; l'application de textes non publiés ou rétroactifs, comme la quasi-absence de modulation individuelle des primes dans les corps techniques, entretiennent des conditions de gestion opaques et rigides autant qu'irrégulières et contribuent à renforcer les résistances à toute évolution de structure, en raison des conséquences qui s'y attacheraient en matière de rémunération.
Le régime indemnitaire de Météo-France présente ainsi beaucoup de traits communs avec celui de la DGAC, examiné par la Cour dans le rapport public particulier de novembre 2002 consacré au contrôle de la navigation aérienne - à commencer par l'empilement des primes et indemnités attachées à l'appartenance à un corps particulier, à l'exercice de certaines fonctions ou à la détention de certaines qualifications. Le nombre des primes susceptibles d'être versées aux agents atteint ainsi une quinzaine.
A. L'INCOMPLÈTE PUBLICATION DES TEXTES INDEMNITAIRES
La Cour avait précédemment relevé l'irrégularité, jusqu'en 1997, de la quasi-totalité des primes et indemnités versées à la DGAC. On retrouve des caractéristiques semblables à Météo-France, où les corps techniques sont conçus selon le même modèle que dans cette direction d'administration centrale, dont l'établissement est d'ailleurs issu.
Au premier rang de ces irrégularités figure le manquement à l'obligation de publication des textes indemnitaires, auquel la publication partielle de certaines de leurs dispositions n'apporte, au plan juridique, aucun remède sérieux 22 ( * ) .
Cette situation découle d'une méconnaissance constante des règles relatives à l'entrée en vigueur des textes de la part des ministères de tutelle de cet établissement public.
B. LE VERSEMENT DE PRIMES SANS TEXTE APPLICABLE : LE CIAV
Pendant plus de trois ans, du 1 er janvier 1998 au mois d'août 2001, un élément important des rémunérations accessoires des personnels techniques de Météo-France, le « complément indemnitaire annuel variable » (CIAV) 23 ( * ) a été versé sans aucun fondement légal.
Le décret n° 96-104 du 9 février 1996 institue, au bénéfice des personnels non militaires en fonction dans les services de Météo-France et gérés par cet établissement, un complément indemnitaire variable lié à l'accroissement des recettes propres engendrées par les activités du service. Il s'agit en quelque sorte d'une forme d'intéressement au développement des activités commerciales de l'établissement, réservée en pratique aux personnels des corps techniques.
La somme répartie annuellement à ce titre ne peut excéder 2 % de la masse salariale inscrite au budget prévisionnel de Météo-France relative auxdits personnels ; elle représente une partie des recettes supplémentaires hors taxes par rapport à un montant de référence, engendrées par les activités du service qui « sont ou peuvent être » soumises à la concurrence. Le montant du CIAV peut être pondéré selon le corps ou la catégorie des agents bénéficiaires ; il est versé sous la forme d'un acompte en fin d'année, suivi d'un solde lorsque le montant définitif du complément est arrêté après la clôture de l'exercice.
Le décret renvoie à un arrêté interministériel la fixation des conditions d'attribution, des modalités de calcul et, pour une période maximale de cinq ans, des valeurs nécessaires au calcul du montant de l'indemnité - en particulier le montant des recettes de référence -, ainsi que la détermination des coefficients de pondération.
A l'origine, un arrêté du 9 février 1996 a fixé ces valeurs rétroactivement pour 1995 - alors, du reste, que le décret n'avait pas de portée rétroactive - et pour 1996 et 1997. En revanche, aucun arrêté ultérieur n'a fixé les paramètres de calcul du CIAV pour les exercices 1998 et 1999, tandis qu'une « régularisation » rétroactive de la situation du seul exercice 2000 a été entreprise par un arrêté du 3 août 2001.
Par suite, les versements de CIAV opérés au titre des exercices 1998, 1999 et 2000 étaient dépourvus de fondement légal.
LES QUESTIONS FINANCIÈRES
I. LES COMPTES
A. LES PROBLÈMES COMPTABLES
Les comptes de l'établissement ne reflètent qu'imparfaitement sa situation financière. Des anomalies comptables ont en effet été identifiées à plusieurs niveaux : le suivi de l'actif et l'inventaire physique, la prise en compte des créances et des dettes au cours de l'exercice qui les a vus naître, l'utilisation à mauvais escient de la procédure des ressources affectées.
Parmi ces irrégularités, celles concernant l'actif immobilisé de l'établissement sont les plus préoccupantes.
De nombreux biens affectés à Météo-France ne figurent pas à l'actif de l'établissement. Pour un tiers d'entre eux, la procédure de remise en dotation est encore en cours. Mais cette situation touche également des biens dont la procédure de remise en dotation a déjà abouti (l'ensemble immobilier domanial de la Météopole par exemple), leur inscription dans les comptes de l'établissement étant subordonnée à un accord des différents services sur leur valeur. L'ensemble de ces biens ne fait donc l'objet d'aucune dotation aux amortissements.
Le montant des amortissements est également sous-estimé par la mauvaise utilisation du compte 23 « immobilisations en cours » : il n'a pas fait l'objet d'apurements réguliers avant 2003 et certaines opérations y ont été imputées à tort.
Bien que l'établissement ait entrepris de régulariser progressivement les imputations au compte 23 et en ressources affectées, ses comptes ne sont pas, en l'état, certifiables, alors même que l'établissement devrait prochainement, en vertu de l'article 135 de la loi sur la sécurité financière du 1er août 2003, consolider ses comptes et les faire certifier par un commissaire aux comptes.
B. LA COMPTABILITÉ ANALYTIQUE
L'établissement ne dispose toujours pas d'une comptabilité analytique portant sur l'ensemble de ses activités 24 ( * ) en dépit des demandes répétées de ses tutelles. La nécessité d'une telle comptabilité, pour améliorer la gestion et clarifier les relations financières entre l'Etat et l'établissement, mais aussi pour des motifs juridiques, est pourtant reconnue depuis la création de l'établissement.
Sa mise en place faisait partie des engagements pris par l'établissement dans son premier contrat d'objectifs (1994-1999), réitérés dans le deuxième contrat (2001-2004). Compte tenu de l'important retard pris par le projet, amorcé en 2002, la comptabilité analytique figure également parmi les engagements de l'établissement dans le nouveau contrat d'objectifs (2005-2008).
Le développement de la comptabilité analytique est également, pour un opérateur économique bénéficiant de subventions et intervenant sur un marché ouvert à la concurrence, une exigence du droit européen de la concurrence visant à éviter les subventions croisées entre les missions de service public et les activités commerciales.
Enfin, la mise en place d'une comptabilité analytique est un engagement conventionnel dans le cadre du GIE ECOMET. Au sein de ce groupement, les services météorologiques nationaux européens ont prévu que le prix de leurs produits commerciaux intègre une part du coût de leur infrastructure. ECOMET constitue donc une forme d'entente entre producteurs dont les règles sont soumises à une autorisation de la Commission, accordée sous réserve que les services mettent en place une comptabilité analytique assortie d'une attestation par un commissaire aux comptes. Le calendrier de mise en place adopté par le GIE prévoyait que les SMN dont le chiffre d'affaires commercial dépassait 10 M€ devaient disposer d'une comptabilité en 1997.
L'établissement a engagé la construction d'une comptabilité analytique en 2002. Il a fait le choix de privilégier une identification des coûts en fonction des types de produits et non des services producteurs. Ce choix lui permet de répondre aux exigences du droit de la concurrence mais ne facilite pas en revanche les comparaisons entre les différents services producteurs.
C. EVOLUTION GÉNÉRALE DES PRODUITS ET DES CHARGES
La situation financière de l'établissement est bonne mais connaît une relative dégradation depuis 2000. Le fonds de roulement (35 M€) et la capacité d'autofinancement (17 M€) quoiqu'en diminution respectivement de 20 % et 28 % restent à un niveau satisfaisant. L'établissement dispose également d'un bon niveau de trésorerie (61 M€ en 2003, en augmentation de 6 % par rapport à 1999).
Les charges et produits d'exploitation représentent en moyenne plus de 90 % du total des charges et produits de l'établissement. Entre 1998 et 2003, les charges d'exploitation ont progressé plus vite (+ 15 % 25 ( * ) ) que les produits d'exploitation (+ 11,2 %). Il en découle une dégradation du résultat.
1. L'évolution des charges
Les charges d'exploitation ont progressé de 15 % entre 1998 et 2003. Elles connaissent une forte hausse entre 1999 et 2001 (+ 10,5 %) puis un rythme d'augmentation proche de l'inflation entre 2001 et 2003. Cette évolution globale masque des contrastes selon les postes concernés.
Les charges de fonctionnement courant (hors dépenses de
personnel, impôts et dotations aux amortissements et provisions)
s'élèvent à 88 M€ en 2003 (29 % des charges de
fonctionnement). Elles connaissent une forte augmentation jusqu'en 2001
(+
14,7 %) puis une diminution (- 2,3 % entre 2001 et 2003) qui
traduit, au moins pour partie, l'effort de maîtrise des frais de
fonctionnement et les mesures de régulation budgétaire mis en
place par l'établissement en fin de période. Au total, ces
charges augmentent de 12 % entre 1998 et 2003.
Les charges d'amortissement représentent près de 17 M€ en 2003, soit 5,6 % des charges de fonctionnement. Elles enregistrent une progression de l'ordre de 30 % entre 1998 et 2003, et de 57 % entre 1999 et 2001, du fait notamment de l'intégration dans les comptes d'une partie des biens remis en dotation par l'Etat. Elles restent sous-estimées en raison des problèmes comptables mentionnés plus haut.
Les charges de personnel s'élèvent en 2003 à 195 M€, soit les deux tiers des charges de fonctionnement. Elles ont progressé de 15 % avec un effectif stable 26 ( * ) . Elles constituent un élément de rigidité du budget de l'établissement et leur dynamique reste haussière à moyen terme du fait, notamment, du rattrapage indemnitaire des « corps techniques » de Météo-France par rapport aux corps homologues du ministère de l'équipement 27 ( * ) . L'effort de réduction d'effectifs consenti par Météo-France dans le contrat d'objectifs 2005-2008 (non remplacement d'un départ à la retraite sur trois, le nombre d'emplois supprimé correspondant cependant à des effectifs budgétaires et non réels) ne permettra de compenser que partiellement le coût de ce seul rattrapage indemnitaire (évalué à 5,82 M€).
L'établissement a par ailleurs réalisé plusieurs programmes d'investissement entre 1998 et 2003, qu'il a en partie financés sur ses fonds propres. Il a également pris des participations dans des filiales : Météorage et Météo-France International.
2. L'évolution des produits
Les recettes d'exploitation de l'établissement se répartissent en trois grands postes : subventions d'exploitation (61 %), redevances aériennes (23 %) et ventes de biens et services (13 %). Cette répartition est restée relativement stable dans la période récente.
L'évolution de la subvention d'exploitation est encadrée par le contrat d'objectifs, à l'exception de l'année 2000 non couverte par un tel contrat, au cours de laquelle la subvention a diminué de 11,5 %, conduisant l'établissement à opérer un prélèvement sur le fonds de roulement. Elle a progressé de 6 % en monnaie courante depuis 1998.
La redevance aérienne correspond à la partie de la redevance aéronautique versée par les compagnies aériennes au budget annexe de l'aviation civile rémunérant le service météorologique rendu par l'établissement. Elle évolue cependant de façon indépendante des recettes globales et du trafic aérien. Dans la période récente, la redevance a progressé selon le cadre fixé par les contrats d'objectifs : + 1 % par an en monnaie constante sur la période 2001-2004 (contre + 2 % sur la période antérieure).
Les recettes commerciales sont en progression constante et rapide (+ 10 % à + 13 %) entre 1998 et 2000. En revanche elles baissent de 4 % et 3 % les deux années suivantes, avant de se redresser en 2003 (+ 2,33 %).
Cette évolution, défavorable malgré deux hausses tarifaires intervenues en 1999 et fin 2002 et une augmentation de 22 % du reversement effectué par France Télécom sur les recettes de l'audiotel (soit environ 3 M€), a été mal anticipée. Le niveau de progression annuelle des recettes commerciales fixé dans le contrat d'objectifs 2001-2005 à 2,44 M€ n'a pu être atteint, le montant de recettes commerciales s'élevant en 2003 à 39,7 M€ au lieu des 44,43 M€ prévus. Ce décrochement par rapport aux prévisions est d'autant plus important que le montant des recettes de 2000 qui sert de base à la progression avait été volontairement fixé en-deçà de sa valeur réelle et en augmentation de seulement 0,8 M€ par rapport à 1999.
Le nouveau contrat d'objectifs prévoit une croissance de 1 M€ par an.
3. L'évolution du résultat
Tableau n° 4 : Evolution du résultat 1998-2003
En K€ |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2003/ 1998 |
Résultat d'exploitation |
11 289 |
14 100 |
- 59 006 28 ( * ) |
- 1 021 |
- 1 190 |
- 577 |
- 105 % |
Résultat financier |
- 2 |
35 |
1 741 |
164 |
1 710 |
1 103 |
ns |
Résultat exceptionnel |
1 942 |
2 455 |
3 748 |
3 680 |
2 969 |
4 262 |
119 % |
Résultat net comptable |
13 229 |
16 590 |
-53 516 |
2 769 |
3 464 |
4 788 |
- 63,8 % |
Source : comptes financiers
Le résultat de l'établissement se dégrade nettement sur la période. Les résultats positifs dégagés en 2001 et 2002 apparaissent fragiles au vu de la faiblesse structurelle du résultat d'exploitation, déficitaire sur les quatre derniers exercices.
La diminution des bénéfices de l'établissement se traduit par l'émergence d'une contrainte budgétaire : face à la hausse des charges de personnel et à l'accès de faiblesse des recettes commerciales, l'établissement a été contraint de mettre en place des mécanismes de régulation budgétaire, de réduire ses dépenses de fonctionnement courant et de reporter certaines opérations d'investissement.
Il ne peut être exclu que cette contrainte persiste dans les années à venir, si la concurrence, comme il est probable, se développe sur le terrain des activités commerciales et si la rigidité des charges se maintient.
L'objectif, inscrit dans le volet financier du contrat d'objectifs 2005-2008, de diminuer de 1 % par an en volume les dépenses de fonctionnement et d'investissement pour compenser l'augmentation de 0,6 % par an en volume des dépenses de personnel, laisse craindre que l'investissement ne serve à l'avenir de variable d'ajustement.
II. LE BUDGET
A. L'ORGANISATION COMPTABLE ET LES OUTILS DE GESTION
Le contrat d'objectifs 2001-2004 faisait de l'amélioration des procédures administratives et financières un objectif prioritaire. Depuis 2003, l'établissement s'est engagé dans une refonte de son organisation administrative et comptable avec la mise en oeuvre d'un processus de déconcentration, généralisée à compter du 1 er janvier 2004, dont les objectifs principaux sont la diminution des délais de traitement des dossiers et la responsabilisation des services.
Cette réforme, qui constitue un enjeu majeur pour l'établissement, témoigne d'une prise de conscience des dysfonctionnements antérieurs et d'une volonté d'améliorer la gestion administrative et financière. Elle ne pourra cependant atteindre ses objectifs qu'au prix d'un renforcement du contrôle de gestion et d'un effort accru dans l'harmonisation des procédures, pour lesquels la revalorisation des fonctions administratives et financières et le développement d'une politique de formation adaptée aux besoins constituent un préalable indispensable.
En effet, l'organisation administrative et financière de Météo-France a longtemps paru en retrait par rapport à ses performances techniques. L'absence, au moins jusqu'en 2002, de réseau administratif et financier structuré et le défaut de valorisation des compétences administratives et financières ont contribué à donner un caractère secondaire aux compétences techniques ressortissant à ces matières, y compris dans le domaine budgétaire.
De surcroît, les dysfonctionnements persistants des outils de gestion comptable, auxquels il n'a été que très récemment porté remède, alliés à la dispersion géographique des services et à l'ancrage d'une forte culture technique, ont freiné la mise en place des outils de pilotage qui eussent été nécessaires à l'établissement, en particulier en matière de contrôle de gestion, d'harmonisation des procédures budgétaires ou de gestion commerciale. Dans ce dernier domaine, la mise en place d'une application spécifique a en outre souffert du manque d'une véritable coordination en matière d'informatique de gestion au sein de l'établissement.
B. LA PROCÉDURE BUDGÉTAIRE
Le budget de Météo-France a longtemps été construit essentiellement selon des priorités de nature technique, dont la traduction budgétaire intervenait très tardivement, parfois après les arbitrages ; cette procédure semblait d'ailleurs répondre davantage à une exigence formelle en vue de l'adoption du budget par le conseil d'administration qu'à la nécessité de fournir aux gestionnaires un instrument de suivi.
L'établissement affirme avoir apporté des améliorations de procédure en 2004. Au moins jusqu'à cette date, la prééminence de la culture technique de l'établissement dans la programmation budgétaire a pu être source d'imprécisions notables dans l'appréciation des ressources de diverses natures allouées aux services. En contribuant, pour la part de ces ressources affectée au fonctionnement courant des services, au maintien de règles antérieures à la création de l'établissement public, elle a conduit à figer, jusqu'en 2003, les modalités d'allocations des ressources dans un cadre inadapté, que seule la contrainte budgétaire récemment apparue a permis de faire évoluer.
III. LA COMMANDE PUBLIQUE
L'évolution la plus marquante concernant l'organisation de Météo-France dans le domaine de la commande publique, dans la période récente, réside dans la création en 2001 d'une commission consultative des achats, destinée - au moins pour les marchés d'un montant supérieur à 1 M€ - à remédier au défaut de maîtrise des délais et au manque d'organisation des procédures constatés depuis la création de l'établissement.
Cette commission constitue, après trois années de fonctionnement, un lieu d'échanges reconnu, rassemblant au sein d'une même instance les services techniques, le contrôle financier et l'agent comptable. Dotée d'une vision horizontale des principaux marchés de l'établissement et des problèmes qui se posent lors de leur passation, elle a utilement contribué, à compter de 2002, à la réflexion sur la politique d'achats en préconisant une organisation et des procédures plus efficaces et respectueux du droit de la commande publique.
Néanmoins, le risque subsiste que se poursuivent à l'avenir, pour les marchés dont le montant est inférieur au seuil de saisine de la commission, les dysfonctionnements constatés précédemment dans toutes les catégories de marchés, résidant notamment dans l'incapacité de l'établissement à définir précisément ses besoins, son défaut de maîtrise des délais à tous les stades de la procédure, comme lors du remplacement, en 2000, de son logiciel de gestion comptable et financière, et ses difficultés récurrentes à garantir le respect du principe d'égal accès à la commande publique, en particulier dans le cadre des marchés négociés sans mise en concurrence avec des entreprises du secteur audiovisuel, ou des marchés de services généraux.
Les irrégularités constatées dans le passé rendent d'autant plus nécessaire la réalisation effective des avancées attendues en matière de politique d'achats pendant la période 2005-2008 couverte par le prochain contrat d'objectifs entre l'Etat et Météo-France.
ANNEXE
- bilan - exercice 2003
- compte de résultat - exercice 2003
COUR DES COMPTES
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RAPPORT SUR L'ÉTABLISSEMENT PUBLIC ADMINISTRATIF MÉTÉO-FRANCE |
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Résumé et recommandations |
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Aux termes de son statut 29 ( * ) , Météo-France a pour mission « de surveiller l'atmosphère, l'océan superficiel et le manteau neigeux, d'en prévoir les évolutions et de diffuser les informations correspondantes. Il exerce les attributions de l'Etat en matière de sécurité météorologique des personnes et des biens » et doit « satisfaire les besoins en assistance météorologique nécessaire à la sécurité aéronautique ». Il est également chargé de la recherche météorologique et de la formation des techniciens de la météorologie. Sur le plan international, il est chargé de « représenter la France au sein de l'Organisation météorologique mondiale ». Il contribue enfin « au développement économique et à l'amélioration de la qualité de la vie en répondant aux besoins d'information des différents secteurs d'activités ».
Le rapport établi par la Cour des comptes à la demande de la commission des finances du Sénat examine les modalités selon lesquelles cet établissement public remplit ses missions, et la pertinence de l'organisation qu'il s'est donnée à cette fin.
L'ACCOMPLISSEMENT DES MISSIONS
L'EXPLOITATION OPERATIONNELLE
Les progrès de la météorologie moderne reposent sur le développement de nouveaux instruments d'observation et l'apparition de la prévision numérique. Ils mobilisent d'importants moyens technologiques, informatiques et en recherche développement et nécessitent des investissements réguliers.
A- La production météorologique
L'observation au sol est devenue un élément essentiel de la surveillance en temps réel et de la prévision immédiate. Météo-France s'est engagé en 1996 dans un plan de modernisation des stations terrestres qui ne répondaient pas aux normes de qualité requises au niveau international. Malgré la priorité conférée par l'établissement à ce programme, les choix budgétaires réalisés entre 2002 et 2004 ont conduit à reporter une partie de l'investissement.
La prévision numérique représente des investissements lourds, en augmentation constante, en capacités de développement informatique et de calcul intensif, tant au stade de la recherche que de l'exploitation. De ce fait, les services européens ont cherché à regrouper leurs moyens au sein de partenariats parfois très intégrés : le Centre Européen de Prévision Météorologique à Moyen Terme (CEPMMT) a ainsi été créé afin de fournir des prévisions à une échéance supérieure à quatre jours.
En ce qui concerne la prévision à courte échéance et à échelle fine en revanche, l'établissement souhaite conserver des capacités techniques et scientifiques de modélisation globale largement autonomes. Cette volonté est conforme à sa stratégie d'excellence nationale. Tout en s'appuyant sur des coopérations européennes et internationales et sur les moyens du CEPMMT, l'établissement n'a pas pour objectif une intégration au niveau européen de ses capacités de modélisation globale.
Compte tenu des enjeux financiers en cause, il est surprenant que la tutelle ne se soit pas véritablement donné les moyens de s'assurer de la pertinence, au regard de l'intérêt public, de la stratégie de Météo-France, et n'ait pas exploré la voie d'une intégration européenne plus poussée dans le domaine de la prévision à courte échéance.
B- Les missions institutionnelles et les activités commerciales
Les missions institutionnelles
Le statut de Météo-France lui confie une mission générale d'information et de sécurité météorologiques.
La procédure de vigilance et d'alerte météorologiques a été réformée en 2001. Elle s'appuie désormais sur la diffusion au grand public et aux différents services de l'Etat, d'une information centrée sur le risque météorologique. La carte de vigilance, élaborée par Météo-France, désigne par des couleurs le niveau de risque et délivre des consignes de prudence lorsqu'il est élevé. Le bilan de cette procédure, réalisé chaque année par les services concernés, met en évidence un taux non négligeable de « fausses alertes » au niveau départemental. En revanche, il relève peu de cas de défaut d'alerte. Une faiblesse réside dans le degré d'anticipation des phénomènes : dans un tiers des cas leur détection intervient dans un délai ne permettant pas aux services de la sécurité civile d'intervenir. Il n'est pour autant pas possible de dire, en l'absence d'éléments de comparaison internationale, si cette situation n'est pas le simple reflet de l'état de l'art.
Au-delà de cette mission générale, l'établissement cherche à investir des domaines d'activité « connexes », tels que la prévision des crues ou la pollution de l'air, afin notamment d'optimiser l'utilisation de ses moyens. Le développement de ces activités pose la question de leur statut. Il n'est pas évident en effet que le décret statutaire de l'établissement autorise une extension de ses missions à ces domaines. Ces activités devraient alors s'analyser comme des prestations de service, et leur marché être ouvert à la concurrence.
Les activités commerciales
Météo-France exerce une activité commerciale et tire ses recettes de deux types de produits : les services télématiques et téléphoniques et les prestations aux professionnels. L'émergence d'une concurrence sur les produits grand public s'est traduite par une baisse des recettes dans ce secteur qui n'a été que partiellement compensée par l'expansion du marché des prestations de services aux professionnels.
Des incertitudes pèsent cependant sur la capacité de Météo-France à maintenir durablement le niveau de ses recettes commerciales face au développement de la concurrence sur l'ensemble de ses produits. Une baisse des prix trouverait rapidement sa limite pour l'établissement du fait de ses coûts et de l'interdiction de vente à perte.
L'établissement a engagé récemment une professionnalisation de sa fonction commerciale en se dotant d'outils de suivi et de prospective et d'un réseau de vente. Au niveau local, la gestion commerciale et la vente reposaient jusqu'en 2002 sur les délégués départementaux de la météorologie, qui assurent la direction de l'échelon départemental de Météo-France. Un réseau d'attachés de clientèle été constitué sur la base des régions économiques ou des secteurs d'activité porteurs.
Le manque de coordination entre la direction commerciale et les autres services, notamment ceux chargés de la production et de la recherche, est préjudiciable à la prise en compte des impératifs commerciaux dans les projets de développement. La fonction commerciale reste par ailleurs peu attractive pour les agents.
LES AUTRES MISSIONS
A- Le développement et la recherche
Les développements réalisés dans les directions interrégionales ne sont pas pilotés au niveau national, conduisant à une mauvaise allocation des ressources et une sous-utilisation des produits.
Le Centre national de la recherche météorologique (CNRM), qui jouit d'une grande autonomie dans l'élaboration de son programme annuel, concentre l'essentiel de l'effort de recherche. Il consomme une part non négligeable des ressources de l'établissement : les deux tiers du temps de calcul utilisé, 28 % des ingénieurs des ponts et chaussées. Il a bénéficié de lourds investissements.
La recherche est rarement orientée vers le dépôt de brevets et l'acquisition de droits exclusifs. Cette situation tient pour partie à la nature des travaux menés, mais aussi au relatif manque d'intérêt des chercheurs pour leur valorisation « commerciale ».
B- L'Ecole Nationale de la Météorologie
Du fait de la faiblesse de ses effectifs et d'un dimensionnement inadapté, les coûts de formation de l'ENM sont relativement élevés. L'établissement n'envisage pas d'externaliser totalement les formations initiales ou continues, mais recherche des partenariats avec l'enseignement supérieur afin de mettre en commun des formations. Ils portent actuellement sur un nombre d'élèves relativement marginal.
Conclusion et recommandations
La mise en commun des moyens par l'intégration européenne La météorologie moderne est consommatrice de moyens technologiques de pointe et nécessite des capacités de recherche de haut niveau. Il existe d'ores et déjà des domaines, comme la prévision numérique à moyen terme et l'observation par satellite, où l'intégration européenne est forte. Une telle intégration pourrait être recherchée également dans les domaines de la modélisation à courte échéance ou de la modélisation des phénomènes potentiellement dangereux. |
L'articulation entre la fonction commerciale et les autres services Les fonctions commerciales restent peu valorisées au sein de l'établissement et les enjeux commerciaux parfois mal pris en compte par les services non directement concernés. L'articulation entre la direction commerciale, la direction de la production et le CNRM gagnerait à être améliorée afin de permettre un meilleur ciblage des développements sur les besoins des clients de l'établissement et une prise de conscience du potentiel de valorisation de la recherche. |
L'ORGANISATION DE METEO-FRANCE
LES SERVICES CENTRAUX
A- L'organisation générale des services
L'organisation générale de Météo-France présente un foisonnement de directions et de services aux compétences imbriquées, qui multiplient les risques de redondances.
La structure des services fait en effet cohabiter divers partis d'organisation, selon une logique tantôt transversale, tantôt verticale et technique, tantôt géographique, sans qu'un choix explicite ait permis de faire prévaloir un schéma d'organisation susceptible de rationaliser le partage des compétences entre services. Divers chevauchements de compétences en résultent, non seulement dans le domaine de l'administration et des ressources humaines, mais aussi dans le domaine technique, notamment l'observation et la prévision.
B- Des services centraux répartis sur trois sites
L'éclatement des services centraux de l'établissement sur trois sites (Paris, Trappes et Toulouse), qui résulte de plusieurs phases de délocalisation partielle, est à l'origine de dysfonctionnements et de surcoûts.
Du fait des résistances du personnel, le regroupement sur un seul site n'est pas à l'ordre du jour. Le déménagement des services parisiens vers Trappes, envisagé par l'établissement mais qui ne figure pas dans le contrat d'objectifs 2005-2008, serait en revanche génératrice d'économies bienvenues.
L'ORGANISATION TERRITORIALE
En 2003, 2 067 des 3 725 agents de Météo-France occupaient un poste dans un service territorial. La présence de l'établissement est assurée à l'échelon interrégional (directions interrégionales ou DIR), départemental (Centres départementaux de la météorologie ou CDM) et infra-départemental (stations d'observation).
Le niveau interrégional est l'échelon principal, où sont réalisées les cartes de vigilance et est assurée une permanence 24h/24h. C'est à ce niveau que sont élaborées les lignes directrices à partir desquelles les CDM déterminent leurs prévisions départementales. Les CDM sont de petites structures qui assurent au niveau départemental des fonctions de prévision, de représentation de l'établissement et de production de prestations standardisées et peu complexes. Les stations sont chargées de l'observation mais exercent aussi des fonctions de représentation commerciale.
La nécessité d'une présence systématique à l'échelon départemental est loin d'être évidente au regard de l'activité des CDM. Pourtant l'établissement fait le choix de conforter ces structures. Il invoque des motifs liés à la proximité de l'usager et aux impératifs de la sécurité civile. Ces arguments n'emportent pas la conviction.
D'une part, les CDM ne peuvent être considérés comme des guichets de proximité, les ventes de Météo-France s'effectuant pour l'essentiel par voie téléphonique, télématique ou par Internet. Le réseau de vente créé en 2002 ne repose d'ailleurs pas sur l'échelon départemental. D'autre part, si le préfet a naturellement besoin d'un correspondant à Météo-France, notamment en cas de crise, il n'est pas certain que la présence systématique d'un agent dans le département garantisse une meilleure qualité d'intervention, la précision de la prévision étant indépendante de la localisation du prévisionniste. La permanence 24h/24h s'effectue d'ailleurs dans les seules DIR.
Conclusion et recommandations
L'organisation générale des services Une hiérarchisation des différentes directions, en réduisant le nombre des responsables qui font directement rapport au président-directeur général, serait de nature à clarifier l'organisation de l'établissement et, partant, l'exercice des responsabilités au sein de celui-ci. |
L'implantation territoriale Une rationalisation de l'implantation territoriale prenant en compte les besoins effectifs de l'établissement et de ses usagers permettrait d'alléger ses coûts de structure. |
LA GESTION DU PERSONNEL
LE CADRE GÉNÉRAL
A- Les caractéristiques du personnel de Météo-France
Globalement, les effectifs de Météo-France sont restés constants depuis la création de cet établissement public, oscillant autour de 3 70 agents ; les évolutions de structure sont également limitées.
Le personnel de l'établissement se répartit en deux catégories, correspondant à des modes de gestion et de rémunération spécifiques : la majorité (80 %) appartient aux corps techniques (ingénieurs de la météorologie devenus en 2002 ingénieurs des ponts et chaussées, ingénieurs des travaux de la météorologie - ITM, techniciens supérieurs de la météorologie - TSM) gérés et rémunérés directement par Météo-France ; les personnels administratifs et ouvriers de l'Etat appartenant à des corps de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), dénommés « corps communs », sont par ailleurs gérés par le ministère de l'équipement.
Le rapport évoque les particularités de la gestion des ressources humaines à Météo-France, fortement marquée par l'attachement des membres des corps techniques à des modes de gestion traditionnels et leur référence permanente à la situation des corps techniques équivalents de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) : le « service permanent » désigne le travail posté (environ 1 400 agents), forme d'emploi particulièrement coûteuse pour l'établissement ; les « brigades de réserve », appelées à remplacer les agents temporairement absents dans les stations ou centres départementaux de la météorologie, servent de variable d'ajustement pour préserver l'ampleur du recours à l'organisation du travail posté ; l'attachement des corps techniques à l'uniformité des primes reporte à 2007 l'expérimentation éventuelle d'un coefficient de modulation individuel des régimes indemnitaires ; l'ancienneté occupe une place importante parmi les critères de mutation.
Dès lors, les modes de gestion des corps techniques, héritiers d'une période antérieure à la création de l'établissement public, présentent une permanence remarquable qui ne favorise guère l'évolution de l'organisation territoriale de l'établissement ni de l'accomplissement de ses missions.
B- Les modalités de versement des rémunérations
La gestion des deux catégories de personnel suit des règles absolument distinctes : tandis que l'établissement rémunère directement les agents des corps techniques, il rembourse au budget annexe de l'aviation civile (BAAC) la rémunération des personnels relevant de statuts communs. Cette situation n'est pas exempte d'effets pervers, tels que le maintien d'une certaine sous-dotation de l'établissement en personnels administratifs ou l'affaiblissement de l'autorité hiérarchique du président-directeur général sur cette catégorie de personnel gérée par la DGAC.
C- La gestion prévisionnelle des emplois
Météo-France ne dispose pas d'un véritable dispositif de gestion prévisionnelle des emplois. Du fait de la situation sociale particulière des corps techniques et du souhait de l'établissement de préserver son organisation territoriale actuelle et le niveau de ses effectifs, il est d'ailleurs à craindre qu'un tel instrument, pourtant nécessaire pour faire face aux évolutions techniques à moyen terme, ne se révèle d'un usage particulièrement délicat.
LES ÉVOLUTIONS MARQUANTES
L'autonomie des corps techniques de Météo-France par rapport aux corps administratifs et l'interdépendance des questions concernant les corps techniques de cet établissement sont particulièrement frappantes.
Trois réformes, intervenues au même moment que le contrat d'objectifs 2001-2004, ont de la sorte comporté des questions imbriquées : l'aménagement et la réduction du temps de travail, la fusion des corps d'ingénieurs du ministère de l'équipement issus de l'Ecole polytechnique et les protocoles DGAC applicables aux personnels des corps communs.
A- L'aménagement et la réduction du temps de travail
A l'issue de négociations difficiles en 2000 et 2001, une instruction du président-directeur général du 30 octobre 2001, prise en l'absence d'accord majoritaire et applicable au 1 er janvier 2002, a mis en oeuvre à Météo-France les règles relatives à l'aménagement et à la réduction du temps de travail 30 ( * ) . L'encadrement réglementaire de ce dispositif n'est intervenu que l'année suivante 31 ( * ) , laissant subsister dans l'instruction des dispositions plus favorables que celles prévalant ordinairement dans la fonction publique de l'Etat.
L'instruction établit une distinction fondamentale entre les agents en horaires de bureau et ceux en service permanent, qui bénéficient de bonifications horaires avantageuses 32 ( * ) , le cas échéant convertibles en indemnité pour horaires adaptés (IPHA). Toutefois, les bonifications horaires sont obligatoirement converties en indemnité lorsque leur conversion en repos compensateur aurait pour effet de réduire le temps de travail effectif de l'agent en-deçà de 1 454 heures, correspondant à 32 heures hebdomadaires en moyenne annuelle ; dans ce cas, le montant de l'IPHA est majoré de 20 %.
Cette règle emporte des conséquences potentiellement défavorables à l'établissement : plus la durée hebdomadaire moyenne des agents s'approche de ce seuil, plus il est avantageux financièrement pour eux d'opter pour une bonification horaire récupérée en temps, de nature à leur procurer un montant d'indemnité majoré, plutôt que de choisir le versement de l'IPHA au taux normal.
Au demeurant, la limite de 32 heures hebdomadaires en moyenne annuelle reste assez théorique : en réalité, le dispositif adopté par Météo-France permet, sans fondement réglementaire, de réduire jusqu'à 1 413 heures la durée annuelle effective de travail des personnels en service permanent, par le biais du décompte du temps de pause méridienne dans le temps de travail.
En outre, afin de faire face à l'accumulation considérable des heures à récupérer par les membres des corps techniques, Météo-France, dérogeant aux règles arrêtées pour la mise en oeuvre de l'ARTT dans la fonction publique de l'Etat, a procédé en 2001 et 2002 au recrutement anticipé de 75 ingénieurs des travaux et techniciens.
B- L'intégration dans le corps des ponts et chaussées
La fusion dans un corps unique des quatre corps d'ingénieurs du ministère de l'équipement issus de l'Ecole polytechnique 33 ( * ) a eu pour conséquence d'aligner le régime indemnitaire des ingénieurs de la météorologie sur celui, traditionnellement plus favorable, des autres ingénieurs de l'équipement.
Toutefois, à titre dérogatoire, ce rattrapage a été étalé sur plusieurs années, jusqu'à la fin de 2004 34 ( * ) , pour satisfaire une revendication des autres corps techniques exprimée dans le cadre des négociations relatives à l'ARTT, visant à préserver la hiérarchie existante des rémunérations des corps techniques au sein de l'établissement - et alors que la marge ainsi constituée par un étalement du rattrapage indemnitaire devait en principe, aux termes du contrat d'objectifs 2001-2004, gager le financement d'un éventuel surcoût, par rapport aux prévisions, de la mise en oeuvre du protocole DGAC.
La procédure suivie reporte, en pratique, au contrat d'objectifs suivant la question de la prise en compte, sur le plan indemnitaire, de la fusion des corps, et crée un précédent pour les négociations salariales à venir.
C- Le protocole DGAC du 7 décembre 2000
Météo-France, au titre de l'emploi des personnels communs, a mis en oeuvre certaines mesures du protocole DGAC du 7 décembre 2000. La provision annuelle de 1,25 MF (190 500 €) prévue à ce titre, et qui s'est révélée insuffisante, devait le cas échéant être complétée par le report du rattrapage indemnitaire des ingénieurs de la météorologie lié à la fusion des corps de l'équipement. Il n'en a cependant rien été, ce gage ayant déjà été utilisé à une autre fin.
LE RÉGIME INDEMNITAIRE
Météo-France a hérité, dans sa gestion des régimes indemnitaires, de certaines pratiques irrégulières et opaques de la DGAC. Il en est ainsi de l'absence de publication intégrale des textes indemnitaires.
De même, faute d'intervention de l'arrêté fixant les conditions d'attribution et modalités de calcul du « complément indemnitaire annuel variable » (CIAV) 35 ( * ) , forme d'intéressement des personnels des corps techniques au développement des activités commerciales, Météo-France a, pendant plus de trois ans, du 1 er janvier 1998 au mois d'août 2001, versé sans aucun fondement légal l'un des éléments les plus importants des rémunérations accessoires de ses personnels techniques 36 ( * ) .
Conclusion et recommandations
Les modalités de gestion du personnel en usage à Météo-France depuis la création de cet établissement public l'éloignent des évolutions de structure, génératrices de gains de productivité, qui seraient souhaitables.
Le régime de travail en « service permanent » Le rapport a fait apparaître que l'ampleur donnée au service permanent et semi-permanent dépasse ce qui est strictement nécessaire au maintien de la qualité des prestations de l'établissement en matière d'observation et de prévision. Afin de favoriser des gains de productivité par la diminution des coûts, il conviendrait d'engager, conjointement avec la révision de l'implantation territoriale, des actions de diminution progressive des effectifs techniques et de transformation de postes permanents et semi-permanents en postes en horaires de bureau. D'ores et déjà, il est nécessaire de réviser l'instruction du 30 octobre 2001 sur l'ARTT à Météo-France afin de supprimer celles de ses dispositions qui sont contraires à la réglementation sur la durée du travail dans la fonction publique de l'Etat. |
La gestion prévisionnelle des emplois Il convient de mettre en place des instruments de gestion prévisionnelle des emplois susceptibles de dessiner, à moyen terme, les évolutions des qualifications adaptées à l'évolution des missions de l'établissement. |
La régularité des régimes indemnitaires Il paraît urgent de publier l'intégralité des textes régissant les rémunérations complémentaires versées aux agents de l'établissement. |
LES QUESTIONS FINANCIÈRES
LES COMPTES
A- Les problèmes comptables
Des irrégularités comptables substantielles altèrent les comptes de l'établissement, qui ne donnent pas une image fidèle de sa situation financière. Pour certaines, ces irrégularités sont liées aux retards pris dans la remise en dotation des biens affectés à l'établissement, mais aussi dans l'inscription de biens remis en dotation dans les comptes. D'autres témoignent d'un défaut de respect des règles comptables que l'établissement s'est engagé à corriger.
Malgré les demandes réitérées de ses tutelles et les engagements pris dans les contrats d'objectifs couvrant la période 1994 à 2004, la comptabilité analytique de l'établissement est encore à l'état de projet. Cette situation nuit à la qualité de sa gestion. Elle n'est en outre pas conforme aux exigences du droit de la concurrence et aux engagements conventionnels de l'établissement.
B- Evolution générale des produits et des charges
Sous réserve de l'impact des irrégularités comptables mentionnées plus haut, la situation financière de l'établissement est globalement bonne. Les trois dernières années ont cependant vu le résultat de l'établissement se dégrader par rapport aux années précédentes, les charges d'exploitation augmentant plus vite que les produits d'exploitation, en raison notamment de la hausse des charges de personnel.
La stagnation non anticipée des recettes commerciales a contraint l'établissement à mettre en place des mécanismes de régulation budgétaire, à réduire ses dépenses de fonctionnement courant et à reporter certaines opérations d'investissement.
Il ne peut être exclu que cette contrainte budgétaire persiste à l'avenir si, comme il est probable, la concurrence se développe dans le domaine commercial et si la rigidité des charges de personnel se maintient. L'objectif inscrit dans le volet financier du contrat d'objectif 2005-2008 de diminuer les dépenses de fonctionnement et d'investissement pour compenser la hausse des dépenses de personnel, laisse craindre que l'investissement ne serve de variable d'ajustement.
LE BUDGET
Depuis 2003, Météo-France s'est engagé dans une refonte de son organisation administrative et comptable avec la mise en oeuvre d'un processus de déconcentration, dont les objectifs principaux sont une amélioration des procédures et la responsabilisation des services. Cette réforme constitue un enjeu majeur pour l'établissement qui devra s'en donner les moyens, notamment par la revalorisation des fonctions administratives et financières et la mise en place de procédures uniformes.
LA COMMANDE PUBLIQUE
La création en 2001 d'une commission consultative des achats a permis, pour les marchés d'un montant supérieur à 1 M€, de remédier aux dysfonctionnements constatés depuis la création de l'établissement, notamment ses difficultés persistantes à définir précisément ses besoins, à maîtriser les délais à tous les stades de la procédure et à garantir le respect du principe d'égal accès à la commande publique. Néanmoins, ce dernier risque n'est pas écarté pour les marchés d'un montant inférieur au seuil précité.
Les irrégularités constatées dans le passé rendent d'autant plus nécessaire la réalisation effective des avancées attendues en matière de politique d'achats pendant la période 2005-2008 couverte par le prochain contrat d'objectifs.
Conclusion et recommandations
Régularité des comptes Dans la perspective d'une future certification, l'établissement doit faire en sorte que ses comptes donnent une image fidèle de sa situation financière. |
La commande publique Dans le cadre de la déconcentration en cours, qui donnera davantage d'autonomie aux services, il conviendra de mettre en place un contrôle de gestion de nature à garantir le respect du droit de la commande publique, en particulier pour les marchés d'un montant inférieur au seuil de saisine de la commission consultative des achats. |
REPONSES DE METEO-FRANCE
SUR LA COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES
A LA COMMISSION DES FINANCES, DU CONTROLE BUDGETAIRE
ET DES COMPTES ECONOMIQUES DE LA NATION
DU SENAT
L'établissement partage, évidemment, nombre de préoccupations de la Cour des Comptes et mettra en oeuvre dans les meilleurs délais plusieurs des mesures qui découlent de son rapport, dont bien d'entre elles, notamment dans les domaines de la gestion sociale, financière et comptable, étaient en préparation depuis quelques temps, comme la gestion prévisionnelle des emplois, l'intégration des immobilisations au bilan, ou la comptabilité analytique.
Cependant, même si le rapport mentionne divers points positifs, tels la situation financière ou les progrès de la politique des achats, il ressort de sa lecture une impression d'ensemble particulièrement négative de l'organisation, de la gestion et des résultats de l'établissement public. Les réponses qui suivent s'efforcent de présenter la situation de Météo-France d'une façon plus équilibrée et, de notre point de vue, plus conforme à la réalité.
Seront traités successivement :
A Le coût budgétaire et les questions financières.
B La modernisation sociale.
C L'aménagement et la réduction du temps de travail.
D L'organisation.
E Autres points.
A LE COUT BUDGETAIRE ET LES QUESTIONS FINANCIERES
1. La communication de la Cour des Comptes pose la question du niveau acceptable pour la collectivité nationale du coût du service public météorologique :
« Le maintien de cette structure (l'échelon départemental) obère durablement la capacité de l'établissement à abaisser le niveau de ses charges de fonctionnement », p 18 ;
« La nécessité d'une présence systématique à l'échelon départemental est loin d'être évidente » p20 ;
« On remarquera que le service météorologique britannique emploie, en 2003, 1822 agents » p22 ( Météo-France 3700) ;
« La situation financière est bonne, mais connaît une certaine dégradation » p 40 ;
« La diminution du bénéfice de l'établissement se traduit par l'émergence d'une contrainte budgétaire...l'établissement a été contraint de réduire ses dépenses de fonctionnement et de reporter certaines charges d'investissement...il ne peut être exclu que cette contrainte persiste...si la concurrence de développe...et si la rigidité de charges se maintient. » p 43.
2. L'établissement souhaite que ces appréciations soient tempérées par les éléments suivants qui montrent que Météo-France a contribué de façon significative à la maîtrise des dépenses publiques, tout en maintenant un haut niveau scientifique et technique et en obtenant des résultats financiers positifs.
a) Un compromis jugé raisonnable
3. Les moyens de Météo-France et les conditions de son équilibre financier ont été fixés avec précision, depuis 1995, dans les contrats d'objectifs successifs signés avec les ministres chargés des finances et des transports.
Ces contrats ont été l'occasion d'une mise à plat avec les tutelles de la stratégie et des moyens de l'organisme. Strictement respectés dans leur exécution par les parties prenantes, ces contrats semblent donc avoir été considérés par l'Etat comme un compromis raisonnable entre le niveau des services attendus du service public et sa contribution à la maîtrise des dépenses publiques.
b) Une diminution constante des subventions de l'Etat: Météo-France:-6,2%; Etat:+3,7»% en volume
4. Grâce au développement de ses recettes commerciales et de son effort de maîtrise de l'évolution de ses charges, les subventions versées par l'Etat à Météo-France ont progressé entre 1994 et 2003 de 7,8% seulement pour une inflation constatée de 14,9% , pendant que les dépenses de l'Etat progressaient sur la même période de 19,2%. En outre, l'établissement a d'une part, reversé à l'Etat en 2000, au titre des résultats dégagés sur les exercices antérieurs, 21 millions d'euros, d'autre part, autofinancé à 80 % le remplacement de son avion de recherche et la totalité de l'opération de délocalisation à Toulouse de la direction des systèmes d'observation, soit pour ces deux opérations un montant d'investissement de 18M€, sans participation de l'Etat.
5. On précisera également que cet effort de maîtrise des dépenses ne s'est pas fait au détriment du service puisque des progrès majeurs ont été accomplis dans le même temps sur la fiabilité des prévisions et que les missions de service public de Météo-France ont été enrichies avec la mise en place de la carte de vigilance, le développement de services nouveaux pour le suivi de la qualité de l'air, la prévention des crues, sans oublier les redéploiements internes importants mis en oeuvre au profit de l'observation, de la prévision à très courte échéance et des systèmes de management de la qualité.
c) L'évolution des effectifs : Météo-France: -2,6%;Etat: +2,6%.
6. L'observation figurant dans le rapport sur le fait que les effectifs réels des corps techniques dépassent les effectifs budgétaires ne doit pas laisser penser que l'établissement a été autorisé à recruter en surnombre ou se serait affranchi de cette contrainte. La différence résulte simplement de la compensation de l'existence des temps partiels selon les dispositions en vigueur pour l'ensemble de la fonction publique.
7. Si les effectifs réels de l'établissement sont effectivement restés à peu près stables (moins 35 postes) depuis la création de l'établissement public, il convient néanmoins de noter que les effectifs budgétaire sont passés, malgré la création des 75 emplois liés à la RTT, de 3837 en 1994, à 3739 en 2003. A la fin du nouveau contrat, les effectifs de l'établissement seront de 3668 postes soit une diminution de 4,4%, puisque est engagée la suppression de 78 postes supplémentaires, ce qui représente le non remplacement de près d'un tiers des départs en retraite.
8. Concernant la sous dotation en personnels administratifs, si les effectifs administratifs restent sans doute un peu inférieurs à l'optimum compte tenu du contexte budgétaire, ils ont largement évolué depuis la création de l'établissement public tant sur le plan qualitatif que quantitatif, puisque l'on comptait 21 attachés et 66 assistants en 1994 contre respectivement 47 et 114 à l'effectif budgétaire 2004. Ce renforcement des effectifs administratifs a été réalisé naturellement par redéploiement compte tenu de la réduction globale des effectifs budgétaires de l'établissement.
d) La comparaison avec le Met Office
9. La communication de la Cour souligne à juste titre, sans pour autant en tirer toutes les conséquences, qu'une comparaison avec l'homologue britannique de Météo-France devrait tenir compte « des différences de structure pouvant exister entre » les deux services et notamment des implantations outre-mer de Météo-France et de son école.
On pourrait également noter que les territoires couverts par ces deux établissements sont sensiblement différents, de même que les caractéristiques climatiques des deux pays 37 ( * ) . Dans le domaine aéronautique, le nombre d'aérodromes sur lesquels Météo-France doit être réglementairement présent est également à peu près deux fois supérieur. Une comparaison plus pertinente, établie sur la base du coût des services aéronautiques ramené au nombre d'aérodromes n'est d'ailleurs pas défavorable à Météo-France, si l'on se base sur les chiffres d'une étude d'Eurocontrol.
10. Plus généralement, en ne limitant pas la comparaison au Royaume-Uni, toujours difficilement transposable, on constaterait que nous ne sommes pas très différents des Allemands, des Espagnols, ou des Italiens par exemple, chez qui les responsabilités météorologiques sont partagées entre plusieurs organismes étatiques ou provinciaux.
e) Une progression significative des recettes commerciales: +3,3% par an en volume depuis 1994.
L'activité commerciale s'est considérablement développée depuis la création de l'établissement public et s'accompagne en outre d'un taux de satisfaction élevé des clients de l'établissement.
11. Ainsi, entre 1994 et 2003, les recettes de l'établissement sont passées en euros constants 1994 de 25,9 à 35,5 M€ (+34%) soit une progression annuelle moyenne de 3,3% en volume chaque année. Pour les seuls produits professionnels, les recettes sont passées de 8,7 à 16,0 M€ en euros 94 (+84%) soit une progression annuelle moyenne de 7% en volume.
Si les années 2001 et 2002 ont effectivement été marquées par une diminution des recettes commerciales, la progression a été de 2,8% à 39,8 M€ en 2003 et de 3,2% en 2004 à 41 M€. Le démarrage de l'année 2005 confirme cette tendance positive. Les mesures de réorganisation intervenues récemment pour professionnaliser cette fonction doivent conforter la capacité de l'établissement à atteindre les objectifs 2005-2008.
12. D'autre part un baromètre de satisfaction a été réalisé en 2002 par un institut spécialisé auprès d'un échantillon de 1137 clients de Météo France, représentatif de tous les secteurs utilisateurs ainsi que des différents niveaux de chiffres d'affaires avec Météo France. La note de satisfaction globale ressort de cette enquête à 7,9 sur 10, avec 32% de notes excellentes (9 ou 10) et seulement 7% de notes mauvaises (5 et en dessous). Quant aux intentions de retravailler avec Météo France, elles s'élèvent à 97% dont 77% de manière certaine et 20% probable. Ces scores très importants sont en outre répartis de manière assez homogène.
f) Un équilibre financier satisfaisant :
13. La poursuite de la réduction en euros courants des subventions de l'Etat pèse évidemment sur les marges dont dispose l'établissement. Celui-ci, comme le note la Cour, a été amené, en 2002, puis en 2003, à prendre des mesures de réduction de ses dépenses en cours d'année pour tenir compte de l'évolution moins favorable de ses recettes. Ces décisions propres à l'établissement montrent, d'ailleurs, la maturité d'une gestion financière responsable.
Néanmoins, l'analyse des résultats financiers des quatre dernières années figurant dans le tableau ci-dessous montre que la situation financière de l'établissement reste satisfaisante avec notamment :
- un total des produits qui progresse de façon plus rapide que celui des charges ce qui a permis une amélioration continue du résultat net ;
- une progression concomitante du résultat courant sur la période ;
|
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
Total des Produits dont produits d'exploitation courante |
295,7 291,3 |
298,6 292,7 |
306,0 300,0 |
310,5 304,2 |
Total des charges dont charges d'exploitation courante |
292,9 292,3 |
295,2 293,8 |
301,2 300,6 |
302,7 302,0 |
Résultat net dont résultat d'exploitation |
2,77 -1,02 |
3,46 -1,19 |
4,79 -0,58 |
7,80 2,17 |
14. L'établissement regrette, comme la Cour, que l'ensemble des remises en dotation de l'Etat ne soit pas totalement achevé et que les inscriptions au bilan de certains des biens transférés n'aient pas encore été passées en écritures, le tout minorant par voie de conséquence le montant des amortissements. Force est cependant de reconnaître que Météo-France ne peut porter seul l'incrimination de ce grave manquement.
En effet, pour la Météopole de Toulouse qui représente la dernière opération réellement significative (une cinquantaine de millions d'euros), l'établissement ne dispose pas encore des évaluations par bâtiments qui devraient être fournies par le service des Domaines dans les semaines prochaines. Cette opération devrait donc s'achever incessamment et les écritures au bilan et au compte d'exploitation pourront être passées sur le prochain exercice.
Il est également regrettable que, tout en figurant à l'actif de l'établissement, certaines opérations encore classées en immobilisations en cours ne donnent pas encore lieu à amortissement. Ce retard a bien été identifié par l'établissement et un important travail a été engagé en 2004 par les services de la direction financière et de l'agence comptable. L'essentiel des opérations pouvant recevoir une affectation définitive a bien pu être traité au cours de cet exercice (pour un montant de 26 M€) et celles-ci contribueront donc désormais aux amortissements.
15. L'impact de ces retards sur le compte financier de l'établissement doit cependant être relativisé. Comme cela a été indiqué à la Cour, la prise en compte de ces biens ne devrait pas conduire à une forte augmentation du montant des amortissements à prendre en compte dans les années à venir compte tenu de leur diminution sur d'autres postes. Les prévisions de l'établissement en la matière ont été confirmées par le compte financier 2004, qui enregistre une diminution de 17,0 M€ en 2003 à 15,4 M€ du montant des amortissements. L'intégration de la Météopole évoquée plus haut sera donc absorbée sans détérioration préoccupante du résultat d'exploitation. L'impact de ces amortissements est d'ailleurs pris en compte dans les projections financières du contrat d'objectifs, à hauteur de 18 M€.
16. Il convient, enfin, de souligner qu'en l'absence du texte qui devrait, en principe, déterminer à qui incombe le renouvellement des biens remis en dotation, l'établissement a fait le choix prudentiel de pratiquer l'amortissement réel de l'ensemble de ses biens, alors même que les circulaires budgétaires permettent de neutraliser les amortissements en passant une écriture de recettes qui vient compenser sur la section de fonctionnement la charge des amortissements. De la même manière, l'établissement veille à provisionner correctement ses risques potentiels, tel le contentieux avec l'URSSAF. C'est grâce à ce choix et à ses efforts de maîtrise de ses dépenses de fonctionnement que Météo-France a pu en dépit de cette contrainte pesant sur ses capacités financières globales, financer ses investissements prioritaires et la modernisation de ses moyens.
B LA MODERNISATION SOCIALE
17. La Cour des Comptes présente Météo-France sous les traits d'un organisme de conservation des acquis sociaux, privilégiant les intérêts des agents vis-à-vis de ceux de l'établissement, compromettant ainsi ses capacités à s'adapter aux besoins nouveaux.
« La coexistence de ces échelons semble reposer sur l'attachement des personnels à cette organisation plutôt que sur des considérations liées à la qualité des prestations de l'établissement » p 18.
« Les évolutions de structure demeurent limitées par rapport aux premières années de fonctionnement de l'établissement public » p 24
« Il n'est... pas certain que ce mode d'organisation du travail soit considéré par l'établissement comme optimal sur le plan financier, ni même sur le plan technique ; il paraît cependant avoir renoncé à faire évoluer cette situation, autrement que sur la base du volontariat » p 25.
« La forte cohésion des corps techniques explique aussi, en grande partie, le maintien prolongé de l'uniformité des primes » p 27.
« Ainsi les modes de gestion des corps techniques...visent avant tout à maintenir la forte cohésion de ces corps par la préservation des avantages importants conférés au régime de travail dit en service permanent...Cette situation, coûteuse pour l'établissement, exclut de fait toute perspective d'évolution de Météo-France.» p 28.
18. Météo-France aurait apprécié que ces mises en cause particulièrement graves soient étayées plus solidement et regrette qu'il n'ait pas été vu que certaines des citations de la direction générale provenaient de textes préalables aux réformes intervenues. Leur rédaction délibérément très critique visait à préparer les esprits à des évolutions nécessaires qui ont été mises en oeuvre par la suite et sûrement pas à caractériser la situation prévalant aujourd'hui dans l'établissement ;( cf. les textes en italique aux pages 10, 20, 24, 25 de la communication). Néanmoins, même si la Communication au Sénat indique en p 24 que « la forte cohésion des corps techniques rend singulièrement délicate la modification de ces modes de gestion », les commentaires qui suivent doivent, pour le moins, relativiser cette incrimination d'immobilisme.
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a) La conflictualité sociale
19. Peut-on raisonnablement penser que les conflits sociaux difficiles et parfois longs qui ont jalonné les réorganisations de la direction générale, la création des directions centrales, la fermeture de différentes stations, la transformation de postes permanents, la mise en oeuvre des procédures d'évaluation et, bien sûr, la négociation des contrats d'objectifs et de la RTT aient été provoqués par les organisations syndicales dans le seul but de mesurer leur audience ? Si les mesures mises en oeuvre avaient correspondu à leurs attentes n'auraient-t-on pas signé, au moins, quelques accords avec lesdites organisations? Le procès en immobilisme social n'est pas recevable par la direction.
b) Le service permanent
20. Le choix de baser le service posté sur des vacations de 12 heures ne répond pas aux préférences des agents, mais bien à des impératifs de nature technique puisque, pour assurer la sécurité météorologique des personnes et des biens en général et la sécurité aéronautique en particulier, Météo-France est tenu d'organiser un service opérationnel effectivement présent dans les centres de veille 24 heures sur 24 et 365 jours sur 365. L'activité météorologique mondiale est d'ailleurs calée sur deux rendez-vous impératifs d'observation, dite « synoptique », à 00 heures UTC et à 12 heures, ce qui conduit la quasi-totalité des services météorologiques dans le monde à fonctionner également avec des vacations de 12h.
21. Le coût du service posté est effectivement élevé, mais les bonifications horaires sont à Météo-France moins avantageuses globalement que dans de nombreuses administrations où il n'est pas rare que ces bonifications atteignent 50% pour les nuits de semaine contre 20 % à Météo-France, 60 % pour les nuits du samedi, 80 % pour les nuits de dimanche contre 50 % à Météo-France. Au total, compte tenu de la RTT qu'on évoquera ensuite, les agents en service permanent travaillent généralement de l'ordre de 10% de moins que les agents en horaires de bureau dont la durée de travail est de 35 heures. Il ne semble pas que cet écart soit exagéré par rapport aux contraintes spécifiques du travail de nuit, du week-end et des jours fériés.
22. L'établissement a cependant le souci constant de limiter le nombre de postes en service permanent à ses seuls besoins opérationnels. Un effort a été fait également sur le service semi permanent, en particulier par l'optimisation des heures d'ouverture des CDM. Notons que « la quinzaine de postes permanents », soit 15 % des postes concernés, dont la Cour note la suppression au cours de la période récente concerne une centaine d'agents redéployés, ce qui n'est, ni une évolution « limitée par rapport aux premières années de fonctionnement de l'établissement. », ni la démonstration que l'établissement ait renoncé « à faire évoluer cette situation autrement que sur la base du volontariat ».
c) L'égalitarisme des régimes indemnitaires
23. Il n'est pas contestable que la culture des corps techniques de Météo-France repose, en effet, sur un attachement très fort à l'égalitarisme des régimes indemnitaires. Il est sans doute inutile d'en expliquer les fondements, mais il faut cependant noter que ce souci égalitaire ne manque pas d'arguments relativement recevables. I l n'en demeure pas moins que la direction est parvenue à briser ce véritable tabou dans le contrat 2001-2004 et amplifie l'évolution dans le nouveau contrat. Certes la Cour peut-elle regretter que l'établissement n'ait pas poussé dans toute sa logique le concept de rattrapage homothétique pour 2001-2004. Mais, peut-on réellement soutenir que l'établissement aurait dû consacrer sur le contrat d'objectifs 2001-2004 une enveloppe indemnitaire de 2,1 M€ pour les 220 futurs IPC (9550€ par agent) et des enveloppes de 1,1 M€ pour un peu moins de 800 ITM (1375€) et de 0,64 M€ pour quelques 1800 techniciens (350€) ? La réalité du dialogue social c'est de tenir compte des positions opposées, sans renoncer à l'objectif essentiel. Ce qui fut fait avec un échelonnement par agent de 4900€, 1700€ et 772€.
24. Le nouveau contrat poursuit cette évolution entre corps, avec, de surcroît, une modulation par grade pour mieux faire évoluer les primes au fur et à mesure de la carrière, une modulation fonctionnelle pour tenir compte des sujétions particulières à certains postes, une modulation géographique pour renforcer l'attractivité de certaines régions et enfin une modulation individuelle basée sur la manière de servir. Le projet de décret fixant ces dispositions vient d'être soumis pour avis au CTP (avis unanimement négatif des organisations syndicales) et devrait être publié d'ici l'été.
25. Ajoutons que si la modulation selon la manière de servir est reportée, en effet, en 2007, à la fois pour des raisons budgétaires et sociales (il n'est pas évident de pouvoir distinguer des mérites individuels entre les différents éléments d'une équipe de travail unique, ce qui justifie quelques mois pour élaborer un système aussi objectif que possible), la modulation individuelle est déjà appliquée pour les personnels administratifs et pour les ingénieurs IPC dont la fourchette varie de 0,8 à 1,2. Il ne semble donc pas que Météo-France soit dans une situation de retard caractérisé par rapport au problème général de la rémunération au mérite.
d) La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences :
26. L'établissement ne conteste pas qu'il lui reste des progrès à faire dans le domaine de la gestion des compétences, mais il est exagéré d'affirmer que « le tableau annuel de répartition optimale des effectifs disponibles (TROED) constitue plutôt le bilan des besoins exprimés par les services pour l'année suivante ». L'examen du TROED en CTP central de fin d'année montre qu'il s'agit bien d'un outil d'anticipation : pour les seules années 2002 et 2003, ont été prévu 31 créations d'emploi et 49 suppressions, 27 transformations d'emploi et 231 transferts ou redéploiements liés à des réorganisations. Au total, en 2 ans, plus de 10% des postes ont fait l'objet d'une anticipation d'évolution.
27. Un progrès consisterait à établir ce TROED sur une base pluriannuelle. Comme de nombreuses organisations, Météo-France n'a, en effet, pas fait le choix d'afficher des opérations de restructuration précises et échelonnées dans le temps. La direction dispose, bien sûr, d'un plan de marche pour la suppression des 78 postes sur 2005-2008, mais elle a préféré, jusque ici, une démarche plus pragmatique visant à tirer avantage de la réalité des départs constatés au titre de la retraite ou des mouvements naturels.
- 28. Quant à la gestion des compétences, l'établissement a bien conscience des progrès à réaliser. Depuis 2003, la mise en place des comptes-rendus individuels d'évaluation constitue un outil potentiel de bilan et de prospective de compétences pour chaque agent . La direction donnera les orientations nécessaires pour que ce potentiel soit pleinement utilisé dès la prochaine campagne d'évaluation. De même, des fiches de postes sont désormais établies pour chaque emploi ouvert en CAP .
29. Concernant « l'évolution des qualifications nécessaires par les nouvelles modalités d'exercice des missions prévisibles à moyen terme » , l'établissement est déjà particulièrement attentif au maintien des compétences de ses agents, comme le montrent le plan de formation des prévisionnistes réalisé au cours des dernières années, les formations au profit des commerciaux, les stages de gestion de crise, ou la formation au management d'une centaine de cadres supérieurs. Ces actions doivent s'insérer cependant dans une prospective plus large intégrant les prévisions d'effectifs, l'évolution des techniques et des métiers, les offres de formation du monde universitaire ou des écoles parentes... Un groupe de travail de haut niveau vient d'être chargé d'approfondir ces questions. Sur les bases de ses propositions, le nouveau directeur de l'ENM recevra une lettre de mission fixant les grandes orientations pour les prochaines années.
C L' AMENAGEMENT ET LA REDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL
Cette question mérite un développement spécifique car les appréciations de la Cour des Comptes sont, à la fois, parmi les plus sévères de son rapport et des plus contestées par l'établissement : « Ainsi, la mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail s'est accompagnée de multiples dérogations aux règles établies..., dont certaines sont demeurées occultes. Certaines des modalités choisies par l'établissement sont une source potentielle de coûts importants pour les années à venir, et l'ont en tout état de cause éloigné des réformes de structure qui eussent été souhaitables. »
En fait la Cour relève trois dérogations au décret du 25 août 2000 :
a) Les 75 créations d'emploi
30. En fait la Cour indique elle-même que ces créations ont été « très inférieures aux demandes des personnels et inférieures de moitié à l'effet mécanique de la réduction de la durée du travail. ». Ce qui revient à dire que Météo-France a fait 10% de gain de productivité pour les 2300 agents en horaire de bureau et 5% de gain de productivité pour les personnels en horaire posté. L'introduction du contrôle automatique des horaires par badgeuse, fortement combattu par les organisations syndicales, a constitué l'un des éléments incontestables de vérification de ces gains. Le rappel des 76 suppressions d'emploi qui compensent les 75 emplois crées vient achever la démonstration de l'iniquité de la critique.
b) La prise en compte de la pause méridienne dans le calcul du temps de travail de certains agents.
31. Il convient d'abord de faire justice d'une erreur manifeste quant au statut réglementaire de cette dérogation. Il suffira de citer l'article 5 de l'arrêté du 2 juillet 2003 : « Une pause méridienne de 45 minutes au moins, destinée à la prise d'un repas, est ménagée dans la journée de travail. Elle n'est pas comprise dans le temps de travail effectif, sauf lorsque les agents sont contraints de la prendre sur leur lieu de travail, ou soumis à une contrainte de disponibilité à la demande du responsable hiérarchique pour assurer la continuité du service.Dans ce dernier cas, en moyenne de 45 minutes, elle ne peut dépasser 60 minutes » .
32. Quant au fond, sans insister sur le contexte général de la réforme, on soulignera que la régularisation des tolérances antérieures a été souvent obtenue dans les administrations par le maintien de la durée hebdomadaire de 39h, conduisant à 23 jours de récupération, permettant sans trop de préjudice de transformer des jours ministres ou autres tolérances en JRTT. Météo-France qui a refusé la revendication du maintien des 39h, a retenu un système pivot à 37h, pour limiter à 12 le nombre de JRTT et ne pas trop désorganiser le travail collectif des services. Or, la mécanique des JRTT est sans application pour les personnels en service posté. Aussi, après avoir supprimé, comme pour tout le monde, les 2 jours ministres et l'avantage spécifique complémentaire qui leur avait été accordé dans les années 1980 sous la forme d'une bonification complémentaire de 2 jours, en moyenne, pour fractionnement des congés d'été, il est apparu que la réduction moyenne du temps de travail annuel était de 169h pour les personnels en horaire de bureau, mais seulement de 99h pour les agents en service permanent. Face à cette situation, la direction n'a pas été en mesure de faire accepter cette discrimination. On peut douter qu'il eût été possible à quiconque de maintenir le cap après un an de conflit social. En tout état de cause, notre tutelle de l'époque ne l'a pas estimé possible et a explicitement donné accord au maintien de cet avantage ancien,qui repose désormais sur la base réglementaire de l'article 5 de l'arrêté du 2 juillet 2003.
c) L'inclusion des dimanches de Pâques et Pentecôte dans les jours fériés.
33. Il s'agit là, en fait, de la seule dérogation aux dispositions de l'aménagement et de la réduction du temps de travail qui n'ait pas été incluse dans le dispositif réglementaire. La portée de la dérogation est limitée aux bonifications horaires. Il est clair que la remise en cause de cet avantage très ancien, s'ajoutant à la mesure générale de suppression du lundi de Pentecôte, ne manquerait pas d'entraîner une sérieuse difficulté sociale. On doit, en effet, souligner que l'équilibre global du régime des 35h à Météo-France, compte tenu de l'ensemble des dispositions, y compris cette dernière, n'est pas particulièrement avantageux par rapport aux autres régimes de ce type existant dans la fonction publique. Les agents en service permanent travaillent généralement de l'ordre de 10% de moins que les agents en horaires de bureau dont la durée de travail est de 35 heures. Il ne semble pas que cet écart soit exagéré par rapport aux contraintes propres au travail de nuit, des week-end et jours fériés.
Concernant les sources potentielles de coût important, la Cour vise les brigades de réserve et le mécanisme des BHI liées au seuil de 32h. Il s'agit dans les deux cas d'une erreur manifeste d'appréciation.
d) Les brigades de réserve
34. Il ne faut pas commettre de contresens avec les brigades de réserve : elles ne sont pas un facteur d'accroissement des coûts, mais au contraire un outil précieux de remplacement de certaines absences prolongées, permettant de minimiser les coefficients d'armement des postes permanents ou semi permanents et donc facteur d'économies structurelles d'effectifs. Les 5% de gain de productivité qu'il a fallu mettre en oeuvre pour le passage aux 35h leur sont largement imputables. D'autre part, il ne s'agit pas de postes très attractifs, car la contrainte de devoir remplacer, quelquefois au pied levé, une absence prolongée à longue distance de son domicile, est en général peu recherchée par les agents. C'est bien parce que cet avantage indéniable de gestion risquait d'être anéanti par le nouveau mode de calcul des frais de mission, que le ministre chargé des finances a accepté une dérogation à la règle des pièces justificatives, mais il sera mis fin à ce dispositif dérogatoire dès 2006 grâce à la modulation fonctionnelle des indemnités.
e) Les BHI et le seuil des 32h
35. Ce point, il est vrai un peu complexe et insuffisamment évoqué en phase contradictoire, a été manifestement mal interprété. D'abord, il semble ne pas avoir été noté que les BHI (bonifications horaires indemnisées) s'appliquent à tous les agents, mais seulement pour la fraction des compensations horaires qui conduirait à une durée hebdomadaire de travail inférieure à 32h. Un agent qui aurait opté pour la récupération de l'ensemble de ses bonifications sous forme d'indemnité ne bénéficie de ce taux majoré que pour la fraction au dessous de ce seuil. Le mécanisme est donc sans influence sur les choix individuels des agents et sans effet pervers quant à son coût financier pour l'établissement. Ensuite, il faut savoir que les bonifications pour travail de nuit, de week- end ou de jour férié ouvrent droit en moyenne à 4h de récupération par semaine. Le passage de 39 à 35h aurait donc dû conduire à 31h de travail effectif. Pour ne pas aggraver le problème d'effectifs, la direction a donc imposé, en dépit d'une vigoureuse opposition des syndicats, la règle selon laquelle la durée minimale de travail effectif ne peut descendre en dessous de 32h, les droits de récupération complémentaires éventuelles étant obligatoirement indemnisés en argent et non pas récupérés en temps. Malgré la majoration du taux de ces BHI, l'établissement est, au total, largement bénéficiaire du fait des gains d'effectifs qui découlent de ce dispositif. On ajoutera, enfin, que les affirmations selon lesquelles ce seuil resterait « assez théorique » et le dispositif « masqué » sont dénuées de tout fondement. Par définition, le mécanisme logiciel de gestion des horaires bloque les demandes de récupération en temps qui conduiraient à moins de 32h. Quant au dispositif réglementaire on se référera à l'article 2 de l'arrêté du 7 avril 2003 et à l'article 4 de l'arrêté du même jour.
f) Les réformes de structure qui eussent été souhaitables.
36. La direction veut bien admettre qu'il eût été certainement souhaitable de faire bien mieux, mais elle ne peut pour autant laisser penser que le bilan du passage aux 35h soit exclusivement négatif pour l'établissement. Les points suivants méritent considération :
Le régime ARTT de Météo-France exclut le système pivot de 39h hebdomadaires, pour limiter le nombre de JRTT et la désorganisation relative qui pourrait en découler pour les services.
Le contrôle automatique des horaires par badgeuse a été introduit.
Les récupérations en temps ont été plafonnées au seuil de 32h, les compensations complémentaires étant obligatoirement indemnisées en argent. Cette disposition limite les conséquences en emplois du régime des 35h pour les services postés.
Le même mécanisme de plafonnement des récupérations en temps donne à l'administration un outil de programmation des moyens disponibles qui lui faisait défaut auparavant.
Les évolutions d'organisation et les gains de productivité subséquents ont été également mis en oeuvre avec, notamment, la suppression des vacations dérogatoires à la durée réglementaire de 12h, l'optimisation des heures d'ouverture des CDM et une part de la suppression des 15 postes permanents.
D L'ORGANISATION
La Cour des Comptes fait une analyse très critique de l'organisation de l'établissement public, tant pour ses structures de direction centrale, que pour son réseau local,tout en soulignant que la répartition des services nationaux sur plusieurs sites, avatar des opérations de délocalisation passées, est un facteur de coût critiquable.
Il s'agit de questions importantes qui méritent discussion, mais dont les conclusions implicitement suggérées par le rapport ne justifient pas nécessairement de prendre pour acquis l'ensemble des arguments mis en avant.
a) Les structures de direction centrale.
37. Il est probablement vrai que la clarification de l'organigramme de direction est souhaitable. De fait, dans la pratique, le nombre de directeurs qui font directement rapport au PDG n'est pas de 12. De tradition, les directeurs de la production, du CNRM et technique ont plutôt le directeur général adjoint chargé de l'international et des missions institutionnelles comme interlocuteur de travail quotidien. Les décisions de délégations du PDG pourront donc, après validation de ces réflexions, mettre l'organigramme officiel en cohérence avec le fonctionnement réel. Le PDG conserverait un suivi plus direct sur la stratégie, la politique qualité et les ressources humaines, financières et commerciales.
38. En revanche, il ne serait pas souhaitable de remettre en cause l'organisation matricielle qui constitue pour l'établissement un réel progrès. Avant la réorganisation engagée en 1996-1997, les directeurs interrégionaux étaient rattachés au directeur général, ce qui augmentait le nombre de directeurs placés sous son autorité directe et les services techniques centraux ne disposaient d'aucune autorité fonctionnelle dans les domaines et compétences dont ils avaient la responsabilité. Le résultat était qu'il y avait autant de politiques d'archivage climatologique ou de systèmes d'observation que de circonscriptions locales. Sans affaiblir les directions interrégionales que l'on traite comme des centres de profit autonomes, la réorganisation a eu pour objet de placer les 11 directeurs interrégionaux sous l'autorité d'un directeur général adjoint et de conférer aux services techniques centraux une autorité thématique fonctionnelle. Ces services rassemblent et contrôlent, dans un domaine donné, l'expertise la plus pointue et les moyens les plus importants. Ils ont la responsabilité de définir les politiques techniques, les processus, les directives et les modes opératoires, puis d'évaluer et d'améliorer les performances d'ensemble de l'établissement dans leur domaine de compétence. Les décisions techniques et opérationnelles sont prises à leur niveau, tandis que le comité de direction générale se concentre sur les arbitrages et la stratégie.
39. Cette organisation matricielle, qui n'a rien de spécifique à Météo-France, est bien le fruit d'une organisation explicite. L'affirmation selon laquelle il existe des chevauchements de compétences non seulement dans le domaine de l'administration et des ressources humaines, mais aussi dans le domaine technique est infondée. Naturellement les fonctions de gestion des ressources humaines, de gestion financière, de gestion des marchés... ont des relais locaux. La déconcentration de la gestion financière intervenue en 2004 et la mise en place des ordonnateurs secondaires renforcent encore la nécessité de ces relais. Il peut y avoir à la marge telle ou telle redondance à corriger, mais clairement pas d'incohérence grave d'organisation. Quant aux groupes de travail thématiques, effectivement nombreux, ils sont la conséquence nécessaire et souhaitée de la volonté de responsabiliser des échelons régionaux et d'organiser un dialogue constructif entre ces échelons et les directions centrales.
b) La justification de l'échelon départemental
40. La communication transmise au Sénat est suffisamment claire, y compris sur les positions de l'établissement, pour être plus bref sur ce sujet difficile. Deux observations sont cependant nécessaires. La première, pour réaffirmer que si l'établissement, conformément aux décisions des ministres signataires des contrats d'objectifs successifs, n'a pas affiché de plan de reconfiguration de son réseau local, il a néanmoins agi, en regroupant des implantations au niveau départemental, en limitant les heures d'ouverture de beaucoup de CDM, en supprimant les vacations dérogatoires à la durée maximale de 12h et en supprimant des postes permanents, notamment pour l'observation aéronautique, quand l'automatisation de l'observation était déjà possible, permettant ainsi la veille de nuit par un seul agent. La deuxième, pour rappeler que si l'établissement continue à penser que la présence départementale présente des avantages, indéniables, il revient aux politiques d'apprécier si ces avantages justifient ou non les coûts qu'ils représentent. En tout état de cause, comme le souligne la Cour « L'établissement aura besoin d'une présence territoriale à un niveau suffisamment fin » car il faut assumer les missions aéronautiques sur une cinquantaine de plates-formes, prendre en compte les réalités météorologiques de zones difficiles comme les montagnes, le littoral et les zones de crues rapides.
c) La répartition multi sites des services centraux
41. L'établissement ne peut cacher sa stupéfaction d'être mis en cause pour des décisions de délocalisation remontant au début des années 1970. Si les décisions initiales ont mis plus de 10 ans pour connaître un début d'exécution, la deuxième tranche n'a pu se faire que parce que le Gouvernement avait pris la mesure en 1986-1987 du caractère irréaliste du projet de délocalisation globale de la météorologie nationale. C'est bien en maintenant en région parisienne, de manière explicite et pérenne, la direction générale, la direction commerciale et le service des techniques instrumentales que les mutations croisées ont pu s'effectuer entre les agents volontaires et ceux qui décidaient de rester en région parisienne que cette opération a été un succès exemplaire. Ainsi, ce ne sont pas, comme souvent hélas dans ces opérations de délocalisation, des postes qui ont été transférés, mais bien des agents qui ont déménagé à Toulouse. Si des surnombres se sont produits, ils ont été, selon la mémoire de certains acteurs de l'époque, des plus réduits. Ayant ainsi salué l'action de ses lointains prédécesseurs, la direction ne saurait pour autant manifester son accord avec les critiques de la Cour sur l'achèvement de la délocalisation de la DSO. Cette perspective n'a jamais été retenue et on ne peut donc reprocher à Météo-France de ne pas l'avoir terminée. La phase partielle de 2003 a été conduite de la seule initiative de la direction et s'est déroulée conformément au plan approuvé en CIADT, notamment sans surnombre de postes.
42. Cela étant, la direction est depuis longtemps préoccupée par ce problème des implantations multiples. La première phase de la DSO en est l'illustration. Il y a bien longtemps également que nous avons indiqué aux personnels concernés que la délocalisation complète serait des plus souhaitables et que nous suivrions avec la plus grande attention l'évolution de la population de Trappes pour décider dès que possible un deuxième transfert,
43 Enfin, dans le cadre de la préparation du contrat d'objectifs, le PDG a indiqué aux tutelles qu'une opération de valorisation immobilière d'envergure serait recherchée. Depuis un an des études relativement avancées ont été conduite par un expert immobilier et un cabinet d'architecte. Le scénario d'une cession totale du siège de l'Alma et d'une relocalisation à Trappes constitue le scénario de référence à finaliser dans les prochains mois.
E AUTRES POINTS
a) La procédure de mise en vigilance météorologique
44 La communication de la Cour ne rend compte que partiellement des améliorations apportées par la procédure de vigilance mise en place en 2001 : « Le bilan de cette procédure, réalisé chaque année par les services concernés, met en évidence un taux non négligeable de fausses alertes au niveau départemental. En revanche, il relève peu de cas de défaut d'alerte. Une faiblesse réside dans le degré d'anticipation des phénomènes : dans un tiers des cas leur détection intervient dans un délai ne permettant pas aux services de la sécurité civile d'intervenir. Il n'est pour autant pas possible de dire, en l'absence d'éléments de comparaison internationale, si cette situation n'est pas le simple reflet de l'état de l'art. »
Ce bilan passe sous silence les points forts de cette procédure dont le bilan très positif est reconnu par la direction de la défense et de la sécurité civiles du ministère de l'intérieur et par les préfectures :
- la nouvelle procédure a réduit d'un facteur 2 le nombre de mises en alerte des services en charge de la sécurité civile ;
- le taux de fausse alarme complète reste ainsi faible : sur les 54 épisodes de vigilance annoncés en 2003 seuls 2 événements météorologique prévus ne se sont pas produits de façon évidente ; il est vrai que ce taux de fausse alarme est plus élevé à l'échelle du département (21%), mais l'équilibre trouvé entre un faible taux de non détection totale et un faible taux de fausse alarme paraît aujourd'hui satisfaisant aux acteurs de la procédure externes à Météo-France ;
- la procédure a pleinement répondu à l'objectif de mieux informer le grand public sur les risques d'origine météorologique : deux tiers des français estiment aujourd'hui être suffisamment informés des dangers météorologiques, taux qui a progressé de 22 points entre 2002 et 2003 ; la notoriété de la carte s'établit aujourd'hui à 72% et ses conseils de comportement sont également bien connus.
Telles sont les raisons qui font que ce dispositif, mis en place à l'initiative de Météo-France soit en voie d'être adopté par l'ensemble des pays européens.
Bien sûr, le délai d'anticipation des phénomènes dangereux doit encore être amélioré puisqu'un tiers des événements sont encore détectés en moins de 3 heures. Il s'agit d'un axe prioritaire du contrat d'objectifs 2005-2008 de l'établissement qui repose sur les développements en cours pour la prévision numérique et sur le renforcement du réseau d'observation. En outre, un contact permanent existe entre les services de prévision de Météo-France et les services de la sécurité civile, qui permet une information en continu de l'évolution des situations météorologiques.
b) La prévision numérique
45 La stratégie retenue par Météo-France en matière de prévision numérique du temps repose sur une mutualisation maximum des moyens et des efforts de développement au niveau européen, compte tenu de l'état de l'art, des contraintes techniques et opérationnelle, et de la priorité accordée aux objectifs stratégiques définis par le contrat d'objectifs.
La mutualisation des moyens s'inscrit dans une stratégie européenne de l'ensemble des services météorologiques européens qui ont décidé de se décharger complètement sur le Centre Européen de Prévisions Météorologiques à Moyen Terme (CEPMMT) qu'ils ont créé, des prévisions numériques globales à moyenne échéance (de 4 à 10 jours). Cette stratégie a permis des économies de moyens importantes et fait du CEPMMT un leader mondial en matière de prévision globale à moyenne échéance, devant les Etats-Unis.
Elle permet également aux services météorologiques nationaux (SMN) européens de concentrer leurs efforts et leurs ressources, en aval, sur leurs besoins spécifiques de prévision numérique à échelle fine (quelques Km) et à courte échéance, actuellement de 0 à 72 heures. Ces prévisions ne sont pas mutualisées car elles exigent une disponibilité immédiate des données et l'intégration de l'ensemble des informations dans une chaîne de traitement et d'expertise complexe en temps réel, tenant compte des spécificités météorologiques de chaque pays.
Dans ce domaine, les économies ont été recherchées par mutualisation des efforts de développement logiciel, Météo-France faisant figure de pionnier dans ce domaine, puisque, contrairement aux Britanniques et aux Allemands, l'établissement a fait le choix, unique en Europe, de développer les codes utilisés par son modèle global ARPEGE en coopération avec le CEPMMT, afin de minimiser les coûts.
Dans le domaine des modèles à domaine limité et haute résolution, Météo-France a décidé de partager les développements nécessaires à ses besoins dans le cadre d'un consortium européen ALADIN (Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Hongrie, Maroc, Moldavie, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, et Tunisie), 60% des ressources de développement étant mises à disposition par les partenaires. Cet effort couronné de succès, a bénéficié du soutien financier de l'Union Européenne, et se poursuit aujourd'hui avec le développement du modèle AROME. Le succès de la démarche amène d'ailleurs aujourd'hui le consortium nordique HIRLAM à rechercher un rapprochement avec ALADIN, qui pourrait être un facteur d'économie supplémentaire.
L'ensemble de cette stratégie a fait l'objet d'une analyse approfondie avec la tutelle à l'occasion de la préparation du dernier contrat d'objectifs de l'établissement.
46 Concernant la puissance de calcul, l'optimisation sur cette question est un souci permanent de Météo-France, qui a su, de sa propre initiative, saisir l'opportunité offerte par le renouvellement du calculateur du CEPMMT pour augmenter sa puissance de calcul avec un rapport coût/bénéfice exceptionnel. Ce faisant, l'établissement a une nouvelle fois tiré le maximum de profit de la coopération avec le CEPMMT. On notera, d'ailleurs, que les analyses récemment conduites dans le cadre de la préparation du remplacement du supercalculateur de l'établissement montrent que la plupart des services météorologiques européens disposent aujourd'hui d'une puissance de calcul nettement supérieure à celle de Météo-France, comme le montre le schéma ci-dessous.
c) Le développement et la recherche
47 La question de la valorisation de la recherche menée au sein de l'établissement ne peut être traitée objectivement sans tenir compte des objectifs spécifiques de cette recherche et du contexte de coopération internationale qui prévaut dans le domaine de la météorologie. Il est d'abord indispensable de réaliser que cette recherche est directement orientée vers les besoins propres de l'établissement dans le domaine de la prévision numérique : sa valorisation première se mesure donc par le transfert des acquis au stade opérationnel et l'amélioration qui en résulte en termes de performance de prévision et de satisfaction des usagers et clients. D'autre part, dans ce domaine, une politique de dépôt systématique de brevets serait contraire aux intérêts de l'établissement, et vouée à l'échec, compte tenu des pratiques en vigueur au plan international, dans le domaine de la météorologie. Elle serait incompatible avec la politique de coopération pratiquée en Europe, qui permet des économies substantielles grâce au partage du savoir faire et des efforts de développement logiciel. On notera à cet égard que ce modèle de coopération ainsi que l'attractivité de la qualité des recherches menées par Météo-France lui ont permis d'économiser 60% des ressources humaines nécessaires au développement du modèle ALADIN, ce qui constitue en soit une valorisation remarquable.
L'autre grand axe de recherche de l'établissement que constitue le changement climatique se prête peu au dépôt de brevet et à une valorisation industrielle. Il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'un thème de recherche prioritaire, essentiel pour la définition de politiques publiques dont les enjeux économiques sont considérables.
Ce n'est que dans des domaines d'applications concurrentiels, qui mobilisent une fraction limitée de ses ressources, que Météo-France pratique une politique de dépôt de brevets.
d) L'investissement de la démarche qualité de Météo-France
48 En s'engageant dans une démarche qualité, la direction de Météo-France a fait le choix de créer le cadre indispensable à l'amélioration continue des performances de l'établissement, dans tous les domaines de son activité, qu'ils soient techniques, scientifiques ou administratifs.
Ce choix délibéré, fréquent dans le secteur privé mais assez rare au sein des administrations et des services météorologiques nationaux européens, vise à faire partager par l'ensemble des personnels une démarche de progrès et un engagement au service des clients institutionnels et commerciaux.
L'approche retenue repose sur :
- la définition de tous les processus clés contribuant à la performance ;
- la mesure de leur efficacité au service des objectifs stratégiques de l'établissement définis par les contrats d'objectifs signés par les ministres des finances et des transports ;
- des revues de direction où sont décidés les plans d'amélioration, en tenant compte d'indicateurs, de résultats de revues de processus et d'audits internes et externes, et d'analyses stratégiques.
Ces revues de direction permettent notamment de relier les indicateurs et les objectifs de performance définis dans le cadre de la LOLF et des contrats d'objectifs, aux processus qui réalisent ces objectifs, de façon à identifier les leviers d'amélioration.
Le succès de la démarche est déjà mesuré par la certification de conformité d'une fraction croissante des directions de l'établissement à la norme ISO 9001/2000, et sera parachevé par la certification d'ensemble du Système de Management de la Qualité de Météo-France, prévue fin 2005.
e) La comptabilité analytique et les outils de gestion
49 L'établissement a développé une comptabilité analytique avec une finalité précise, celle d'identifier les coûts relevant du secteur aéronautique. Comme la Cour a d'ailleurs bien voulu le souligner, ces coûts sont calculés en conformité avec le principe d'établissement des assiettes d'Eurocontrol et les principes généraux des redevances établis par l'OACI. La formule relative à l'absence de comptabilité analytique pourrait donc être nuancée.
Pour autant, la nécessité de faire évoluer cette comptabilité analytique en développant la partie non aéronautique et en restituant des informations nécessaires au pilotage et à la gestion de l'établissement est réelle et constitue bien un axe incontournable de l'évolution de sa gestion. Il était cependant difficile de lancer un tel chantier avant d'avoir stabilisé l'organisation et les modes de gestion de l'établissement.
50 La conception générale d'une comptabilité analytique rénovée a bien été présentée au Conseil d'administration en 2002 et les principes de mise en oeuvre en 2003. Mais il convient également de prendre en compte le processus de déconcentration de la gestion financière et comptable qui a du être lancé en parallèle par l'établissement en 2002 avec une première étape expérimentale au 1 er janvier 2003 et une deuxième étape généralisant la déconcentration de la gestion à l'ensemble des services de l'établissement et mettant en place des agences comptables secondaires début 2004.
Cette déconcentration est effective depuis le 1 er janvier 2004 et représente une réforme des modes de fonctionnement de l'établissement en matière administrative et financière très importante, qui était indispensable afin d'améliorer son fonctionnement administratif et financier à moyens constants.
De même, la réorganisation de la direction financière rendue possible par la déconcentration a permis la mise en place d'un bureau du contrôle de gestion doté d'une équipe de 7 agents qui était indispensable pour la mise en place et l'exploitation d'une comptabilité analytique, dont l'objectif principal ne se limiterait pas à la question du calcul des coûts des prestations aéronautiques.
Une fois la déconcentration mise en oeuvre, le projet de rénovation de la comptabilité analytique a pu avancer de façon très significative et sera achevé en 2005. Ceci permettra un retraitement a posteriori dans le nouveau système des données de l'exercice 2004 puis de l'exercice 2005. Le nouveau système sera pleinement opérationnel à compter de l'exercice 2006.
51 Concernant de façon plus générale les outils de gestion, l'établissement ne conteste pas qu'il a rencontré de très nombreuses difficultés tant avec son outil de gestion budgétaire et comptable Harmonie, qu'avec son nouveau progiciel de gestion commerciale (OGC). Ces difficultés, qui sont par ailleurs rencontrées sur de très nombreux projets analogues, doivent aussi être appréciées en tenant compte des budgets consacrés à chacune de ces opérations (quelques millions de francs à l'époque, alors qu'il n'est pas rare de voir des organismes consacrer plusieurs dizaines de millions de francs à ce type d'opération).
f) La commande publique
52 Comme le souligne la Cour, la création à l'initiative de l'établissement d'une commission consultative des achats comprenant des membres n'appartenant pas à l'établissement et présidée par un conseiller d'Etat a permis une amélioration très sensible des conditions de passation des marchés de l'établissement et de sa politique achat.
Il convient de souligner que l'existence de ce type de commission est peu courante dans les établissements publics à caractère administratif soumis au Code des marchés. Cette commission émet un avis sur tous les marchés dont le montant dépasse un million d'euros ou sur ceux qui ont une importance particulière, soit sur le plan technique, soit par rapport à la politique achat. En outre, les marchés les plus importants de l'établissement sont discutés en commission dès le démarrage de la procédure comme cela est désormais prévu pour la Commission des marchés publics de l'Etat. Il s'est ainsi établi un dialogue continu entre la commission et les principaux services techniques de l'établissement qui a permis une amélioration continue des orientations prises en matière d'achat par ces différents services.
Au-delà de l'examen des procédures de marchés, l'établissement a mis en place depuis 2002 et les réformes successives du Code des marchés une évaluation de sa politique achat. Cette politique achat définie par des instructions et commune à l'ensemble de l'établissement est basée sur l'existence de marchés multi-services qui correspondent aux besoins pour lesquels la coordination des achats présente un intérêt, qu'il soit économique ou stratégique (matériels informatiques, fournitures de bureau et de papier, matériels d'observation, marchés de télécommunications, transports...)
L'établissement a ainsi réalisé des économies significatives sur ses coûts de fonctionnement. Cette politique achat est présentée de façon régulière à la commission consultative des achats et au conseil d'administration.
53 Au-delà de l'action conduite au sein de la commission des achats, un important effort a été effectué pour améliorer la qualité et la transparence des procédures de marchés en dessous du seuil d'examen par la commission des achats. Des instructions relatives aux obligations de mise en concurrence pour les achats non formalisés étaient ainsi en vigueur au sein de l'établissement depuis le début 2003 avant la création de la procédure adaptée prévue par la dernière réforme du Code.
Concernant l'évaluation des besoins, une amélioration sensible a été constatée au cours des derniers exercices avec la mise en place à l'occasion de la déconcentration de la gestion financière et comptable d'un encadrement très strict des conditions d'exécution des marchés.
L'important travail effectué dans le cadre de la démarche qualité de l'établissement devrait permettre de poursuivre et d'amplifier les améliorations qui ont ainsi été constatées au cours des derniers exercices.
g) Les modalités de rémunération des personnels communs de la DGAC
54 Les personnels des corps communs à la DGAC sont notés et évalués par Météo-France et leur avancement et leurs indemnités dépendent directement des propositions et des capacités budgétaires de l'établissement même si elles sont naturellement examinées dans le cadre de commissions administratives paritaires et d'une gestion communes. Aussi, Météo-France conteste l'affirmation selon laquelle le mécanisme de la paye conduit à un « affaiblissement de l'autorité hiérarchique du président-directeur général sur cette catégorie de personnel gérée par la DGAC » . Cette affirmation ne correspond, en outre, absolument pas à la situation prévalant dans l'établissement.
Cette gestion commune doit aussi être considérée comme source d'économie de gestion par regroupements de corps aux effectifs trop restreints et s'inscrit dans le cadre des orientations définies par le ministère de la fonction publique de réduction du nombre de corps de fonctionnaires.
h) La non-publication des textes réglementaires
55 Le seul texte n'ayant pas été publié au journal officiel est l'arrêté 90-933 du 19 octobre 1990 signé au niveau des ministres de l'équipement, du budget et de la fonction publique de l'époque et dont l'article 3 prévoit qu'il ne sera pas publié au journal officiel.
Il semble difficile de reprocher cette situation à l'établissement.
L'établissement ne conteste pas certains des manquements relevés par la Cour en matière de gestion des personnels mais il lui semble que la critique formulée en page 36 du rapport sur « des conditions de gestion opaques et rigides autant qu'irrégulières » est excessive au regard du fait que l'essentiel des primes versées au cours de la période l'ont bien été dans des conditions régulières et transparentes.
MÉTÉO-FRANCE :
A la demande de votre commission des finances, la Cour des comptes a réalisé, en application de l'article 58-2 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), une enquête sur l'établissement public Météo-France. La communication de la haute juridiction financière, publiée au sein du présent rapport d'information, met en évidence un certain nombre de questions et pointe des rigidités préjudiciables à l'établissement, dans un contexte de concurrence accrue. Estimant que la priorité donnée à l'excellence du service appelle une vigilance accrue en matière de gestion, votre commission des finances a décidé de procéder, d'ici un an, à un bilan des mesures qui auront été prises par Météo France et par sa tutelle, afin de donner suite à l'enquête et aux préconisations de la commission des finances ici rassemblées. |
* 1 La subvention à Eumetsat transite par le budget de Météo-France. Elle est complétée par des crédits provenant des autres ressources de Météo-France. En 2003, la contribution totale à Eumetsat s'est ainsi élevée à 39,1 millions d'euros.
* 2 Décret n° 93-861 du 18 juin 1993 modifié par le décret n° 96-662 du 24 juillet 1996.
* 3 On notera cependant que le développement de modèles par un consortium européen n'interdirait pas leur utilisation autonome par chaque pays.
* 4 L'Etat a également commandé une enquête sur ce sujet.
* 5 Le rapport de retour d'expérience sur les événements de janvier 2003 identifie ainsi plusieurs causes au passage tardif de l'Ile-de-France en vigilance orange : un problème de prévision, une difficulté technique de réalisation graphique de la carte mais surtout une prise de décision considérablement ralentie (le délai est évalué à une heure et demie) du fait de la volonté des prévisionnistes de parvenir à un consensus sur le choix de passer en vigilance orange, alors même que la procédure définie par Météo-France précisait qu'en cas de divergence d'opinion entre le chef prévisionniste national et régional, c'est ce dernier qui tranche.
* 6 Ce sont les produits télématiques et téléphoniques.
* 7 Les rapporteurs soulignent.
* 8 Hors certains frais de fonctionnement qui sont intégrés dans le budget du service de la logistique de la Météopole.
* 9 En 2002, l'établissement disposait d'un portefeuille de 10 brevets, un brevet a été déposé en 2001 et un autre en 2002.
* 10 Non comprise la cinquantaine d'élèves de l'école des marins (METOC). Leur formation n'est pas sous la responsabilité de l'ENM, mais celle-ci héberge les élèves et les enseignants (quatre) et leur donne un accès au matériel.
* 11 La logistique de l'école étant assurée par le service logistique de la Météopole, l'école ne disposant pas de budget propre, et Météo-France n'ayant pas développé de comptabilité analytique, certains coûts de fonctionnement (fluides par exemple) peuvent avoir été estimés de façon plus ou moins précise.
* 12 Direction commerciale et de la communication.
* 13 Direction des systèmes d'observation.
* 14 Rapporté au nombre d'agents, le coût de l'opération s'élève à 0,36 M€ par agent muté, et 0,15 M€ par poste délocalisé.
* 15 Ce choix est clairement exposé par le schéma directeur de la prévision : « La météorologie nationale avait fait le choix de s'implanter progressivement dans chaque département de France et d'Outre-mer. L'Etablissement public a non seulement confirmé cette orientation, mais l'a renforcée en consacrant des efforts importants non seulement au plan des structures mais aussi pour conforter l'armature technique et la place des activités de prévision des centres départementaux et des stations. »
* 16 L'examen des rapports d'activité de décembre 2003 des CDM 88, 55, 67 et 68 montre d'ailleurs que les déplacements commerciaux du DDM sont réalisés le plus souvent en accompagnement de l'attaché commercial.
* 17 On notera par exemple que l'ENM est une spécificité française, et que le poids de l'outre-mer est plus important en France qu'au Royaume-Uni.
* 18 Décrets n° 2002-1623 du 30 décembre 2002 portant dérogations aux garanties minimales de durée du travail et de repos applicables à certains personnels de Météo-France et n° 2002-1624 du 30 décembre 2002 relatifs aux modalités de rémunération ou de compensation des astreintes de certains personnels de Météo-France ; arrêtés des 7 avril et 5 juin 2003.
* 19 Bonification des heures de nuit : jour ouvrable 10 %, samedi 20 %, dimanche 40 %, jour férié 100 % ; bonification des heures de jour : samedi 10 %, dimanche 20 %, jour férié 90 %.
* 20 Cf. lettre adressée par le président-directeur général de Météo-France au ministre de l'équipement, des transports et du logement le 10 octobre 2001, concernant une demande d'audience du SNITM/FO dans le cadre d'un préavis de grève nationale : « nous avons d'autant moins intérêt à soulever de nouveau la question du seuil de 32 H que nous prendrions le risque de devoir révéler les libertés masquées que comporte notre proposition, basée en fait sur une durée effective de 1 413 H pour les personnels en service permanent, comme à la DGAC. »
* 21 Décret n° 2003-799 du 25 août 2003 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts et chaussées et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement.
* 22 Sont par exemple concernés les textes régissant l'indemnité pour horaires adaptés susceptible d'être accordée aux personnels de la Météorologie nationale et l'indemnité de fonction et son supplément attribués à certains personnels administratifs de la DGAC et de Météo-France.
* 23 Le montant du CIAV était de 0,8 M€ en 1998, 0,9 M € en 1999, 1,4 M€ en 2000, 1,2 M€ en 2001, 1 M€ en 2002.
* 24 L'établissement a mis en place une comptabilité analytique pour les activités aéronautiques afin de justifier de ses coûts et de la part météorologique des redevances aériennes.
* 25 L'inflation s'est élevée à 8,2 % (prix hors tabac) sur la période concernée.
* 26 Variation des effectifs réels sur la période : 3 756 agents en 1998, 3 666 agents en 2000, 3 725 agents en 2003.
* 27 Les indemnités versées aux premiers progressaient en effet moins vite que celles des seconds depuis les années 1980, la Direction de la Météorologie Nationale ayant fait alors prévaloir la création de 800 postes sur une progression des indemnités.
* 28 Le résultat de l'année 2000 est exceptionnel, cette année combinant une très forte augmentation des dotations aux amortissements liées à l'intégration dans les comptes d'une série de biens remis en dotation et une diminution de la subvention de fonctionnement versée par l'Etat
* 29 Décret n° 93-861 du 18 juin 1993 modifié par le décret n° 96-662 du 24 juillet 1996.
* 30 Décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat.
* 31 Décrets n° 2002-1623 du 30 décembre 2002 portant dérogations aux garanties minimales de durée du travail et de repos applicables à certains personnels de Météo-France et n° 2002-1624 du 30 décembre 2002 relatifs aux modalités de rémunération ou de compensation des astreintes de certains personnels de Météo-France ; arrêtés des 7 avril et 5 juin 2003.
* 32 Bonification des heures de nuit : jour ouvrable 10 %, samedi 20 %, dimanche 40 %, jour férié 100 % ; bonification des heures de jour : samedi 10 %, dimanche 20 %, jour férié 90 %.
* 33 Décret n° 2002-523 du 16 avril 2002 portant statut particulier du corps des ingénieurs des ponts et chaussées.
* 34 Décret n° 2003-799 du 25 août 2003 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts et chaussées et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement.
* 35 Décret n° 96-104 du 9 février 1996.
* 36 Le montant du CIAV était de 0,8 M€ en 1998, 0,9 M€ en 1999, 1,4 M€ en 2000, 1,2 M€ en 2001, 1 M€ en 2002.
* 37 Si le nombre de météorologistes n'est pas proportionnel à la superficie, il varie au moins dans le même sens. On notera donc que l'on a 6,2 agents par 1000 Km 2 à Météo-France (5,9 avec l'outre-mer), 7,3 au Met Office et 7,8 au DWD allemand sans le service météorologique militaire.