2. Des limites à l'action publique locale existent cependant
Tous les territoires ne sont pas logés à la même enseigne. Certains souffrent, cela a été dit, d'handicaps structurels qui rendent beaucoup plus difficiles et aléatoires leurs capacités de réaction. Ainsi, les territoires composés de bassins d'emplois peu peuplés et éloignés de grandes agglomérations risquent la paupérisation et le déclin démographique en cas de défaillance de l'unique employeur industriel. Mêmes les solutions consistant à déployer des infrastructures routières ne paraissent plus pertinentes pour permettre de rebondir à des bassins d'emplois manquant de taille critique pour muer. Les petites collectivités locales paraissent au demeurant démunies de savoir-faire et de moyens pour enrayer les deux phénomènes.
Certes, des collectivités savent prendre les initiatives salvatrices. Des départements comme la Vendée ou le Maine-et-Loire connaissent un taux de chômage inférieur à la moyenne nationale alors même que leurs industries, dominées par les secteurs du cuir et de l'habillement, ont été les plus atteintes par les délocalisations.
Mais à l'inverse, certaines stratégies ou conditions du développement locale retardent les mutations nécessaires ou empêchent des résultats significatifs, notamment en matière d'emploi des personnes non ou peu qualifiées.
a) Des effets sur l'emploi local parfois insuffisants
L'industrie manufacturière est rarement la priorité des politiques locales . Quelques grands projets industriels technologiques (composants électroniques, automobiles) mobilisent certes des moyens significatifs de prospection et d'accueil, de même que certains projets manufacturiers dans l'alimentaire (plats préparés, sandwiches), notamment dans des départements du grand bassin parisien tels l'Indre-et-Loire et le Loiret. Toutefois, les collectivités locales cherchent à privilégier davantage les industries innovantes à forte valeur ajoutée dans des secteurs en croissance . Si cette démarche a évidemment sa légitimité, elle n'est cependant pas en mesure de contribuer à la création locale d'emplois non ou peu qualifiés. Or, ce sont ces personnels qui constituent la majorité des anciens salariés des entreprises manufacturières devenus demandeurs d'emplois .
De fait, les réussites des politiques de développement exogènes menées à l'initiative des collectivités locales profitent faiblement aux populations actives non qualifiées, et les emplois créés par des implantations dans les secteurs technologiques et certains services de haut niveau ne parviennent pas à faire baisser le niveau local du chômage. Les nouveaux emplois nécessitent des qualifications qui manquent aux résidents et sont donc pourvus par des migrants . Dans les situations extrêmes, qu'on rencontre par exemple dans le département des Bouches-du-Rhône, la demande locale d'emplois augmente même du fait de l'implantation du conjoint dans la région.
Enfin, en tout état de cause, l'accélération des pertes de postes non qualifiés dans l'industrie manufacturière dépasse souvent la capacité des collectivités locales à favoriser l'essor des activités industrielles ou tertiaires . Le positionnement sur des secteurs nouveaux nécessite plusieurs années avant de produire des résultats en terme d'emplois.