2. L'InVS, tête de réseau du système de veille

Renforcer le positionnement de l'InVS est une nécessité absolue. L'Institut doit être une tête de réseau, ainsi que le souhaitait le Sénat lors de l'examen de la proposition de loi qui allait devenir la loi du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme.

La mission constate avec satisfaction que des initiatives ont déjà été prises depuis cet été pour améliorer la capacité de l'InVS à déceler les crises, comme en témoignent certaines dispositions introduites dans le projet de loi relatif à la politique de santé publique, actuellement en navette.

Les phénomènes climatiques devraient ainsi être intégrés dans le champ des missions de l'Institut qui s'attache, on l'a vu, à nouer des relations avec Météo France. Reste à définir la valeur ajoutée de l'InVS par rapport aux bulletins bruts fournis par Météo France, ainsi que l'a souligné le directeur général de l'Institut, M. Gilles Brücker, devant la mission : « Nous pourrions être les porte-voix de Météo France. Mais cela ne servirait à rien. Météo France, avec ses 3 000 météorologistes, peut très bien prendre la parole sans nous. Il s'agit plutôt d'analyser comment les indicateurs météorologiques peuvent être transformés en indicateurs sanitaires. Un travail est en cours à ce sujet et apportera -j'espère rapidement- des éléments de réponse ». Par ailleurs, l'InVS a engagé d'autres travaux au niveau européen afin de mieux appréhender le phénomène de la canicule.

L'Institut a également commencé à élaborer un système de veille sanitaire à partir de l'activité des urgentistes, comme l'a indiqué M. Gilles Brücker : « Ma première action a été très simple : j'ai transmis un fax et un e-mail indiquant aux urgences qu'en cas de problème, l'InVS devait être contacté. C'est largement insuffisant. Je souhaiterais avoir des informations quantitatives permettant d'identifier un éventuel accroissement des activités des urgences. Mais je voudrais aussi disposer de quelques informations qualitatives, permettant par exemple de connaître le degré de gravité des situations des malades. Les difficultés proviennent de la très forte hétérogénéité des systèmes d'information. Si tous les acteurs nous envoyaient des messages détaillés et hétérogènes, ce serait impossible à gérer ».

Par ailleurs, l'InVS reçoit désormais chaque jour le bulletin quotidien du COGIC, ce qui traduit un souci de réduire les cloisonnements existants, et devrait permettre à l'Institut de jouer pleinement son rôle de vigie, même si la mise au point du traitement des données ainsi transmises reste à préciser, ainsi que l'a noté M. Gilles Brücker : « J'ai chargé un collaborateur de lire ce bulletin tous les jours. Mais ce bulletin contient beaucoup d'informations très détaillées qui nous sont inutiles. Il faut donc s'interroger sur la façon de transformer une information en un fait analysable et significatif d'un point de vue épidémiologique. Il est donc nécessaire de concevoir des systèmes d'information qui aient du sens. Ce travail est en cours mais il prend du temps. Nous allons essayer de construire des réseaux pilotes. Nous souhaiterions avancer plus vite sur cette question mais elle est complexe et difficile ».

Le projet de loi relatif à la politique de santé publique, actuellement en cours d'examen, prévoit deux autres mesures concernant l'InVS. L'article 10 B du projet de loi complète le réseau de correspondants sur lesquels l'InVS peut s'appuyer afin d'exercer les missions qui lui sont dévolues, et l'étend aux services de protection civile, aux services de santé aux armées et aux entreprises funéraires, dont la crise de l'été 2003 a montré l'utilité pour apprécier la situation sanitaire.

En outre, l'article 10 C du projet de loi dispose que les services de l'Etat et les collectivités territoriales, leurs établissements publics, les établissements de santé publics et privés, le service de santé des armées, les établissements et services sociaux et médicosociaux, les services de secours ainsi que tout professionnel de santé sont tenus de signaler sans délai au représentant de l'Etat dans le département les menaces imminentes pour la santé de la population dont ils ont connaissance ainsi que les situations dans lesquelles une présomption sérieuse de menace sanitaire grave leur paraît constituée. Le représentant de l'Etat porte immédiatement ce signalement à la connaissance de l'Institut de veille sanitaire. La liste des acteurs susceptibles de signaler des menaces pour la santé serait ainsi précisée et la transmission à l'InVS normalement assurée dans les meilleurs délais.

Enfin, l'Institut de veille sanitaire devrait voir ses tâches redéfinies « dans une approche populationnelle et non seulement individuelle par pathologie », ainsi que l'a indiqué M. Jean-François Mattei.

La mission estime que ces mesures vont dans le sens souhaité par le Sénat, qui s'était montré précurseur en la matière lors de la discussion de la loi du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme. Elle tient à rappeler qu'elles figuraient déjà dans ce texte de 1998 résultant de l'initiative du Sénat, ainsi que M. Claude Huriet l'a rappelé avec vigueur devant la mission.

LES MISSIONS DE L'INVS PRÉVUES PAR L'ARTICLE 10 A DU PROJET DE LOI
RELATIF À LA POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE

« Art. L. 1413-2. Un Institut de veille sanitaire, établissement public de l'Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, a pour missions :

« 1° La surveillance et l'observation permanentes de l'état de santé de la population. A ce titre, il participe au recueil et au traitement de données sur l'état de santé de la population à des fins épidémiologiques, en s'appuyant notamment sur des correspondants publics et privés faisant partie d'un réseau national de santé publique ;

« 2° La veille et la vigilance sanitaires. A ce titre, l'institut est chargé :

« a) De rassembler, analyser et actualiser les connaissances sur les risques sanitaires, leurs causes et leur évolution ;

« b) De détecter de manière prospective les facteurs de risque susceptibles de modifier ou d'altérer la santé de la population ou de certaines de ses composantes, de manière soudaine ou diffuse ;

« c) D'étudier et de répertorier, pour chaque type de risque, les populations les plus fragiles ou menacées.

« Il peut également assurer des fonctions de veille sanitaire pour la Communauté européenne, des organisations internationales et des pays tiers, avec l'accord du ministre chargé de la santé ;

« 3° L'alerte sanitaire. L'institut informe sans délai le ministre chargé de la santé en cas de menace pour la santé de la population ou de certaines de ses composantes, quelle qu'en soit l'origine, et il lui recommande toute mesure ou action appropriée pour prévenir la réalisation ou atténuer l'impact de cette menace ;

« 4° Une contribution à la gestion des situations de crise sanitaire. A ce titre, l'institut propose aux pouvoirs publics toute mesure ou action nécessaire.

« L'institut participe, dans le cadre de ses missions, à l'action européenne et internationale de la France, et notamment à des réseaux internationaux de santé publique.

« Art. L. 1413-3. -- En vue de l'accomplissement de ses missions, l'Institut de veille sanitaire :

« 1° Effectue, dans son domaine de compétence, toutes études, recherches, actions de formation ou d'information ;

« 2° Met en place les systèmes d'information lui permettant d'utiliser, dans les meilleurs délais, les données scientifiques, climatiques , sanitaires, démographiques et sociales, notamment en matière de morbidité et de mortalité, qui sont nécessaires à l'exercice de ses missions ;

« 3° Elabore des indicateurs d'alerte qui permettent aux pouvoirs publics d'engager des actions de prévention précoce en cas de menace sanitaire et des actions de gestion des crises sanitaires déclarées ;

« 4° Établit, chaque année, un rapport qui comporte, d'une part, la synthèse des données recueillies ou élaborées dans le cadre de ses missions d'observation, de veille et de vigilance sanitaires et, d'autre part, l'ensemble des propositions et des recommandations faites aux pouvoirs publics ;

« 5° Organise des auditions publiques sur des thèmes de santé publique ;

« 6° Met en oeuvre, en liaison avec l'assurance maladie et les services statistiques des départements ministériels concernés, un outil permettant la centralisation et l'analyse des statistiques sur les accidents du travail, les maladies professionnelles, les maladies présumées d'origine professionnelle et de toutes les autres données relatives aux risques sanitaires en milieu du travail, collectées conformément à l'article L. 1413-4. »

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