5. Les perspectives de Cancun
Partant néanmoins de l'hypothèse que l'Union européenne se trouve désormais dans une position de négociation plus favorable que précédemment - en tout cas pour ce qui concerne les soutiens internes - , que peut-elle espérer de ses partenaires à Cancun ?
En matière de soutiens internes , parmi les demandes déposées par l'Union, on trouve l'encadrement des « marketing loans » et du crédit export agricole américains, la suppression de la règle « de minimis » (6 ( * )) , l'organisation disciplinée de l'aide alimentaire américaine, la suppression des coopérations monopolistiques d'État qui existent notamment en Australie et en Nouvelle-Zélande. L'Europe est également très soucieuse d'aboutir sur la question de la protection des indications géographiques, notamment, mais non uniquement, en matière de vins et spiritueux.
Pour ce qui concerne le second point - les restitutions et aides à l'exportation -, il faut bien souligner que la réforme de la PAC n'apporte aucune amélioration et l'Union européenne se trouve dans une situation ni pire ni meilleure que les États-Unis. En la matière, les efforts devront provenir de tous côtés. L'Union européenne a proposé une réduction des aides de 45 % sur six ans mais c'est la seule proposition chiffrée présentée à ce jour.
Enfin, la question de l'accès aux marchés constitue toujours le sujet le plus sensible en discussion. D'abord, pour l'Union européenne elle-même, car ce problème interfère avec la question de la préférence communautaire et remet donc en cause le principe même de la construction européenne. Mais les pays en développement y attachent également la plus grande importance et des alliances objectives pourraient être trouvées, même si les partenaires défendent en réalité des conceptions différentes des choses. En matière d'accès aux marchés, la seule proposition déposée émane, cette fois encore, de l'Union qui propose un abaissement moyen de 36 % des droits de douanes à l'importation, assorti d'un plancher fixé à 15 %. Il est désormais nécessaire que les autres partenaires prennent aussi l'initiative d'émettre des propositions.
Par ailleurs, on devrait logiquement décider à Cancun d'une prolongation de la « clause de paix », valable pour l'instant jusqu'au 31 décembre 2003 et par laquelle les différents pays de l'OMC se sont engagés à ne pas introduire de recours en contestation des politiques de soutien menées par leurs partenaires en faveur du secteur agricole. Après cette date, si aucun accord ne devait être dégagé en matière agricole, n'importe quel État membre pourrait attaquer devant l'ORD les différents régimes de subvention de ses partenaires. Il est donc vraisemblable que, pour l'apaisement du débat, ce dispositif de non-agression sera prolongé jusqu'à la fin du cycle de négociation.
* (6) Système qui autorise actuellement les États-Unis à attribuer un volume important d'aides de la « boîte orange » sans être tenus de les déclarer.