2. Les déclarations ambiguës de certains responsables politiques

Le milieu « people » n'est pas le seul en cause : des personnalités politiques de tous bords ont également reconnu publiquement avoir consommé des drogues illicites ou ont appelé explicitement à leur dépénalisation en niant ou minimisant leurs effets sociosanitaires. Au-delà de la prise de position politique qu'ils sous-tendent et dont la légitimité n'est pas contestable en tant que telle, ces discours ont pour effet de saper les efforts entrepris par l'ensemble des acteurs concernés par la politique de lutte contre la drogue pour sans cesse rappeler les notions d'interdit et de dangerosité liées aux produits stupéfiants.

Mme Catherine Domingo, substitut du procureur de la République de Bayonne, a ainsi insisté devant la commission sur le fait que « l'augmentation importante (de la) délinquance et (de l') usage de stupéfiants est liée au discours ambiant qui est développé par les médias et alimenté par les personnalités publiques qui tentent de faire croire aux jeunes que cet usage de stupéfiants est assez banal ».

Le débat s'est instauré plus précisément lors de la parution, en juin 1998, du rapport Roques, commandé par le secrétaire d'Etat à la santé de l'époque, M. Bernard Kouchner, sur la dangerosité comparée des drogues licites et illicites . Ce rapport avait classé l'héroïne, la cocaïne et l'alcool dans le groupe des produits à toxicité générale élevée, reléguant le cannabis à la fin du classement.

Ces conclusions quant à la dangerosité respective des différentes drogues avaient été reprises et interprétées par plusieurs responsables politiques comme dédouanant le cannabis et justifiant scientifiquement une éventuelle dépénalisation, voire une légalisation de son usage et de sa vente . Le docteur Francis Curtet a ainsi rapporté à la commission que des mineurs de « 13 à 14 ans » fumant du cannabis « du matin au soir » lui avaient déclaré avoir « entendu le ministre dire que c'était beaucoup moins dangereux que l'alcool et le tabac ».

Les conclusions de ce rapport, et surtout la façon souvent fallacieuse dont elles ont été interprétées, ont par ailleurs renforcé dans leur position les partisans d'une politique essentiellement axée sur la réduction des risques qui a, selon les déclarations de M. Michel Bouchet devant la commission, « débouché sur une politique de gestion de la consommation plus que de réduction de celle-ci » et « accordé une place congrue à l'application de l'interdit social et pénal pesant sur l'usage ».

La suite de l'analyse développée devant la commission par le chef de la MILAD sur cette politique est particulièrement éclairante : « Les doctrines sur lesquelles elle s'est appuyée (...) ont conduit progressivement, concernant le cannabis, à une quasi acceptation d'un usage simple, prétendument non nocif, au risque d'une intégration des consommations présentées comme « sanitairement et socialement admissibles » dans notre paysage social, oubliant en cela qu'il existe une corrélation certaine et constante entre la masse des consommateurs et des usagers dits « simples » et celle de ceux qui sont problématiques ou dépendants. En terme de prévention, cette option a débouché sur le principe d'une éducation à une consommation « modérée, maîtrisée et dédramatisée ». De puissantes actions de communication ont, dans le même temps, contribué à modifier les représentations des Français en ce sens ».

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