INTRODUCTION DU COLLOQUE |
M. Gérard Larcher, sénateur des Yvelines, président de la commission des Affaires économiques et du Plan du Sénat
Monsieur le Président, mes chers collègues, mesdames et messieurs, le colloque qui se tient aujourd'hui s'inscrit dans la droite ligne du rapport publié en juillet dernier par le groupe de travail sur l'avenir de la viticulture, créé par notre commission des Affaires économiques.
À cet égard, je tiens tout d'abord à excuser notre collègue Gérard César, vice-président de cette commission et auteur de ce rapport : il devait présider cette journée mais, devant subir une légère intervention chirurgicale, il ne peut participer à nos travaux, qui lui tenaient pourtant particulièrement à coeur.
En son nom, je vous salue et vous remercie de votre présence.
À la suite de Jacques Banc, ce colloque sera présidé par notre collègue Marcel Deneux, vice-président de notre commission. Michel Doublet, sénateur de la Charente-Maritime, qui a participé activement aux travaux du groupe de travail sur l'avenir de la viticulture, se chargera de nous lire l'intervention de Gérard César.
L'une des propositions du groupe de travail sénatorial était d'organiser un débat public sur les relations vin et santé : c'est précisément l'objet de ce colloque.
Il s'agit d'abord, sans occulter les dangers liés à une consommation excessive, de dresser un bilan des travaux scientifiques montrant les effets positifs sur la santé d'une consommation modérée de vin. Attestés par des études épidémiologiques, ces effets commencent à être expliqués en termes biologiques et chimiques.
Dans le même temps, cette manifestation devait être l'occasion de rassembler des acteurs de différents horizons, de la filière vitivinicole au milieu médical en passant par le secteur de la santé publique, afin de permettre un débat dépassionné sur les enseignements à tirer de ces travaux, en particulier en termes de communication.
Il serait, bien entendu, excessif de considérer le vin comme une médication. Cependant, ne pourrait-on pas au moins faire en sorte que les campagnes de prévention cessent d'utiliser systématiquement le vin comme unique symbole de la consommation d'alcool ? Si, comme les autres alcools, le vin et ses abus exposent à des risques, comme celui de provoquer des accidents de la route, force est de reconnaître que les comportements les plus dangereux, en particulier chez les jeunes, sont plus souvent induits par la consommation d'alcools « durs » et la prise de stupéfiants.
N'y aurait-il pas, par ailleurs, intérêt à mettre plus largement l'accent sur la place que peut avoir le vin dans toute alimentation équilibrée ? Cela renvoie naturellement aux bienfaits du régime méditerranéen, qui privilégie une alimentation à base de céréales, de fruits et légumes et d'huile d'olive, mais aussi, plus largement, à la dimension culturelle et hédoniste du vin comme élément incontournable de notre patrimoine.
Ces questions constituent le coeur de notre colloque. Elles seront abordées cet après-midi au travers des deux tables rondes, dont la première est destinée à dresser un bilan de la recherche scientifique, et la seconde à définir une communication adaptée sur ce sujet.
Il était toutefois difficilement imaginable d'organiser une journée de débats autour du vin sans s'interroger au préalable sur le contexte de la consommation et de la production, qui connaissent aujourd'hui d'importantes évolutions.
La consommation de vin apparaît de plus en plus occasionnelle, à dimension festive, alors que le modèle traditionnel de cette consommation, à chaque repas, tend à s'estomper. Plus de 60 % des consommateurs seraient occasionnels. Cette évolution est imputable à des changements d'ordre sociologique, notamment des conditions de travail, avec comme corollaire une augmentation de la part des repas pris hors du domicile. La sédentarisation des modes de vie explique la disparition de la fonction du vin-aliment au profit d'autres boissons. Chez les jeunes consommateurs urbains, dont la culture viticole est moins affirmée, le vin s'achète pour le plaisir ; il doit étonner et correspondre à la qualité attendue.
Ces nouvelles tendances de la consommation ne peuvent être ignorées si l'on souhaite définir des perspectives pertinentes pour l'avenir de la filière.
Cette filière est, en outre, confrontée aujourd'hui à d'autres défis, au premier rang desquels la concurrence croissante sur le marché international des vins, qui a pour conséquence une érosion de nos parts de marché. La France a perdu 6 % de ses parts de marché à l'exportation en dix ans, alors que, dans le même temps, les exportations des pays dits du « nouveau monde » progressaient à un rythme impressionnant.
Parmi les autres défis, il convient également de citer les attentes environnementales de nos concitoyens, ou encore la pression exercée sur nos producteurs par les circuits de distribution. La grande distribution assure, en effet, 75 % des ventes de vins aux ménages.
Face à ces défis, le diagnostic de la filière mérite d'être approfondi et des pistes nouvelles doivent être explorées. Il va nous falloir rendre l'offre plus compétitive, plus lisible et plus communicante.
C'est pourquoi cette journée va commencer par un débat consacré à la place du vin dans la société, organisé autour de deux tables rondes.
La première portera sur l'évolution des modes de consommation du vin, la deuxième sur les atouts et les handicaps de la filière viticole française.
Le vin, sujet de société, c'est une évidence. Le vin, objet de culture, nous en avons tous l'assurance. Le vin, enjeu territorial, nous l'avons bien perçu à travers les conséquences de la désertification viticole de la fin du XIX e et du début du XX e siècle. Le vin est aussi un atout économique.
Enfin, le vin est présent dans le Livre le plus ancien, comme symbole de l'offrande et du passage de l'Homme à Dieu. Puisse le vin, plus laïquement, contribuer à la convivialité et aux travaux de cette journée, que je vous souhaite excellente.