B. L'INTÉGRATION DES PRÉOCCUPATIONS ENVIRONNEMENTALES
1. Le transport routier en situation d'accusé
Dans un rapport du mois d'avril 2000, intitulé « La voie de la mobilité durable - Réduire les coûts externes des transports », la Commission présente les résultats d'une étude commandée à un cabinet sur les coûts externes des transports, portant sur 17 pays (les 15 Etats membres de l'Union européenne, la Suisse et la Norvège).
Les principaux coûts externes dans le domaine des transports sont les accidents, la pollution atmosphérique, les effets sur le climat, le bruit et la congestion.
D'après cette étude, les coûts externes environnementaux, hors congestion, des transports en Europe atteignent 530 milliards d'euros en 1995, soit 7,8 % du PIB des pays concernés. Les accidents représentent à eux seuls 29 % des coûts externes hors congestion. La pollution atmosphérique et les changements climatiques en représentent 48 %.
La route est responsable à elle seule de près de 92 % des coûts externes hors congestion (57 % pour la voiture particulière et 29,4 % pour le transport routier de marchandises) suivies par le transport aérien, avec 6 %, alors que le rail ne représente que 2 % et la voie d'eau 0,5 %.
Dans le cadre du protocole de Kyoto, l'Union européenne s'est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 8 % en 2010 par rapport à leur niveau de 1990. Or, en 1998, la consommation énergétique des transports représentait 28 % des émissions de CO 2 , le principal gaz à effet de serre. Si rien n'est entrepris pour renverser la tendance de la croissance du trafic, les émissions de CO 2 dues au transport devraient encore augmenter d'environ 50 % entre 1990 et 2010. Là aussi, le transport routier se trouve en situation d'accusé, puisqu'il représente à lui seul 84 % des émissions de CO 2 imputables aux transports, le transport aérien en représentant pour sa part 13 %.
La congestion n'apparaît comme une externalité que pour les modes où l'utilisateur décide individuellement de l'usage de l'infrastructure, sans prendre en compte les conséquences sur les autres utilisateurs. Par rapport à une situation de référence non congestionnée, l'étude évalue le coût de la congestion en Europe à 128 milliards d'euros, soit 3,7 % du PIB.
Sensibiliser les utilisateurs des transports aux coûts qu'ils engendrent pour la collectivité, du seul fait de leur choix d'un mode de transport, constitue une première démarche en vue d'une réduction des nuisances environnementales. D'une façon plus générale, la connaissance des coûts externes pour chaque mode de transport est un outil indispensable pour permettre aux autorités responsables de donner des signaux au marché et d'orienter les consommateurs vers les modes de transport les plus respectueux de l'environnement.
L'étude précitée estime que les coûts externes, hors congestion, dans le secteur des transports, devraient augmenter de près de 42 % entre 1995 et 2010. Les augmentations de coûts externes les plus importantes concernent les transports routier et aérien.
2. Le système autrichien des écopoints
Une tentative originale de limiter l'impact environnemental du transport routier est le système d'écopoints négocié par l'Autriche lors de son adhésion à l'Union européenne et mis en place par le règlement 3298/94/CE du 31 décembre 1994. Il s'agit d'un droit de transit dont s'acquittent les camions à chaque voyage, proportionnel à la quantité de pollution émise par le véhicule. Chaque Etat membre dispose d'un certain nombre d'écopoints, qui diminue avec le nombre de transits effectués par des transporteurs de sa nationalité, d'autant plus rapidement que les véhicules concernés sont polluants.
Le nombre d'écopoints mis à la disposition des Etats est fixé annuellement et décroît chaque année. Ce système encourage les transporteurs à utiliser les camions les moins polluants. L'objectif est d'atteindre une réduction de 60 % de la pollution émise par les véhicules transitant par l'Autriche, jusqu'à 2003.
Le mécanisme des écopoints est entré en crise en 1999, après le dépassement de plus de 8 % du nombre de transits de l'année de référence 1991. Dans cette hypothèse, un mécanisme de sauvegarde prévoit que la Commission est tenue de revoir à la baisse le nombre des écopoints disponibles pour l'année suivante. L'accord auquel le Conseil est parvenu le 21 septembre 2000 prévoit que la réduction des écopoints portera sur les seuls Etats membres responsables du dépassement de 1999 (Belgique, Allemagne, Grèce, Italie et Autriche), mais sera étalée sur quatre années.
3. Le transport aérien et l'environnement
La Commission a adopté le 1 er décembre 1999 une communication sur les transports aériens et l'environnement (COM (1999) 640 final -E 1407), qui évoque principalement trois sujets : l'adoption, à l'initiative de l'Union européenne, de normes environnementales plus sévères dans le cadre de l'OACI ; la création d'incitations économiques et réglementaires plus efficaces (il s'agit essentiellement de la fiscalisation du kérosène, déjà évoquée ci-dessus) ; la mise en place d'un cadre communautaire pour les aéroports.
En ce qui concerne le bruit, la Commission estime que la 33 ème session de l'OACI, grâce au travail du Comité sur la protection de l'environnement et de l'aviation (CPEA), pourrait déboucher sur la fixation d'une norme plus rigoureuse pour les futures avions et sur l'établissement de règles transitoires pour le retrait progressif des avions les plus bruyants. Ce sujet est toutefois source de conflit potentiel entre l'Union européenne et les Etats Unis, car l'âge moyen des flottes des compagnies américaines est de treize ans, contre huit ans pour les compagnies européennes.
En ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre, auxquelles le transport aérien contribue à hauteur de 3,5 %, le protocole de Kyoto a chargé l'OACI de prendre les mesures destinées à les réduire. Le CPEA cherche à définir de nouveaux paramètres d'émission pour les phases d'ascension et de croisière, en vue de remplacer les paramètres actuels basés sur le cycle atterrissage-décollage.
En ce qui concerne le cadre communautaire pour les aéroports, la Commission propose un système de classement commun des nuisances sonores, l'établissement d'un indice commun de mesure du bruit, la diffusion des meilleures pratiques, et l'introduction de règles plus sévères dans les aéroports particulièrement sensibles.